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Une éthique de l’épisode en régime semi-feuilletonnant : de la subjectivation épisodique à l’individuation résistante dans Fringe et Dollhouse

Pablo Cabeza-Macuso

Résumés

Cet article expose une lecture éthique du statut de l’épisode à partir de l’étude de cas des changements d’identités des personnages dans les séries semi-feuilletonnantes Fringe et Dollhouse. L’« éthique » est envisagée en un sens strictement spinoziste puisqu’il s’agit pour les personnages d’arriver jusqu’à la possession d’affects actifs en sortant du cadre épisodique qui leur est initialement imposé par un rapport de pouvoir. L’épisode y est tout d’abord envisagé comme un cadre normatif imposant des changements d’identité réguliers aux personnages (affects passifs). Cette domination d’un pouvoir sur les corps y est nommée « subjectivation épisodique ». Paradoxalement, la résistance des personnages désirant un mode de vie feuilletonnant émerge au cœur même de l’épisode. Cette opposition des personnages à une situation de domination prend le nom d’ « individuations résistantes » (passage aux affects actifs). L’article définit donc une éthique de l’épisode en régime semi-feuilletonnant : l’épisode est analysé comme l’espace d’où émergent de nouvelles subjectivités résistantes par l’entremise des mécanismes affectifs des personnages.

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Texte intégral

  • 1 Le semi-feuilletonnant formulaire se caractérise par des intrigues épisodiques closes couplées à de (...)
  • 2 Joss Whedon est souvent revenu sur l’insistance de Fox concernant la volonté d’intrigues autonomes (...)
  • 3 Claire Cornillon, Les Séries dramatiques semi-feuilletonnantes formulaires des grands networks amér (...)
  • 4 Sur la tension entre l’épisode et le feuilletonnant dans Dollhouse, voir Claire Cornillon, « Dollho (...)
  • 5 Judith Butler, La Vie psychique du pouvoir : l’assujettissement en théories, Paris, Éditions Amster (...)
  • 6 Butler., p. 18.
  • 7 Ibid., p. 113.
  • 8 Pour Butler, le « sujet » est un site que viennent occuper des « individus ». Butler, p. 22. Même c (...)

1Le sens commun admet comme un fait que les séries télévisées sont intrinsèquement répétitives. Cependant, les usages de la répétition peuvent être très divers et peuvent notamment traduire un enjeu éthique lorsque l’existence des personnages est fermement corrélée au statut de l’épisode. Nous nous proposons d’étudier deux séries semi-feuilletonnantes de science-fiction, Fringe (FOX, 2008-13) et Dollhouse (FOX 2009-10), qui lient étroitement le processus de subjectivation des personnages à une itération épisodique. Fringe et Dollhouse sont toutes deux diffusées sur la chaîne FOX, le quatrième network lors de son lancement en 1986. Nous pouvons considérer que Fringe et Dolhouse adoptent une forme semi-feuilletonnante formulaire1 en grande partie parce que ce sont deux séries télévisées de networks2. En effet, le format trouve son origine sur les chaînes de networks aux alentours des années 1960 puis se stabilise réellement dans les années 19903. Dans Fringe et Dollhouse, la mise en récit des existences est, au sein de la diégèse, contrôlée par un pouvoir autoritaire imposant aux personnages des changements réguliers – entendre épisodiques – d’identités. Les missions imposées aux métamorphes (Fringe) et aux poupées (Dollhouse) participent de la structure semi-feuilletonnante formulaire des deux séries puisqu’elles sont narrées prioritairement de façon épisodique, quand bien même leur échec ou leur réussite fait partie d’un arc narratif global propre à la saison, voire à la série tout entière4. Les personnes renommées « poupées » dans Dollhouse et les métamorphes de Fringe partagent une même situation d’« assujettissement », au sens de Judith Butler, c’est-à-dire un « processus par lequel on devient subordonné à un pouvoir et le processus par lequel on devient un sujet5. » Butler lit, avec l’aide de Foucault, l’assujettissement « comme subordination et formation simultanée du sujet6 ». Ainsi, dans notre corpus le pouvoir se manifeste par ses effets de « subjectivation » c’est-à-dire par la formation d’une subjectivité comme « subordonnée » puisque l’assujettissement « n’est pas seulement une subordination, mais une assurance et un maintien, une mise en place du sujet, une subjectivation7. » La subjectivation est donc une organisation de pouvoir qui forme des identités - au sens de subjectivités ou de formes corporelles - par un processus d’assujettissement. En bref, la subjectivation est la transformation d’un individu en sujet8. Il s’agira alors, dans un premier temps, d’étudier la façon dont les personnages sériels sont transformés en « sujets » d’un point de vue figuratif et narratif, par l’entremise d’un contrôle strict de leurs affects.

  • 9 Spinoza, Éthique, Paris : Points, 2014 [1677], partie III, proposition 11, scolie ; partie IV, prop (...)
  • 10 Ibid., partie III, définition 3.
  • 11 Gilles Deleuze, Critique et clinique, Paris, Les Éditions de Minuit, coll. « Paradoxe », 1993, p. 1 (...)
  • 12 Gilles Deleuze, Spinoza et le problème de l’expression, Paris, Les Éditions de Minuit, coll. « Argu (...)
  • 13 « en première instance les hommes sont mus par leurs passions, en dernière analyse leurs passions s (...)

2Cependant, l’accumulation des expériences épisodiques semble aussi être le lieu d’une reprise en main du personnage sur sa vie. Nous verrons que cette reprise en main est essentiellement traitée par Fringe et Dolhouse sous l’angle des affects expérimentés par les personnages : d’abord des affects d’assujettissement, puis des affects de résistance. Spinoza a explicitement distingué les mécanismes affectifs de l’être humain en termes de « passivité », c’est-à-dire de sentiment de tristesse (affects passifs), et de « liberté », c’est-à-dire de sentiment de joie (affects actifs)9. Spinoza définit ainsi les affects : « les affections du Corps qui augmentent ou diminuent, aident ou répriment, la puissance d’agir de ce Corps, et en même temps les idées de ces affections10. » Ainsi, selon le commentaire deleuzien de Spinoza, si les affections expriment l’état du corps à un moment donné, les affects sont des signes vectoriels qui indiquent les variations continues de puissance d’un corps11 : diminution (affects passifs) ou augmentation (affects passifs puis actifs) de la puissance d’agir. Pour Spinoza, la question « éthique » consiste à parvenir à la possession d’affects actifs12. C’est pourquoi la ligne directrice de notre travail consiste à lier les analyses politiques de Butler/Foucault à l’éthique des affects chez Spinoza. Ainsi, notre travail pourrait se lire comme l’interprétation esthétique du « structuralisme des passions » théorisé par Frédéric Lordon. Cet auteur a précisément démontré la portée politique de l’éthique spinoziste en général, et le rapport d’implication mutuelle entre les « structures » et les individus « passionnés » en particulier13. Le point commun sur lequel nous souhaitons insister est une pensée de l’émancipation (Spinoza) et de la résistance (Butler/Foucault) se situant au cœur même des relations de pouvoir.

  • 14 Ce point de vue permet de dépasser la vision traditionnelle du pouvoir comme une « appropriation » (...)
  • 15 Deleuze, Foucault, p. 34.
  • 16 Foucault, Histoire de la sexualité. 1. La volonté de savoir, p. 121-122.
  • 17 « Bref, le pouvoir n’a pas d’homogénéité, mais se définit par les singularités, les points singulie (...)

3C’est pourquoi nous adoptons une conception foucaldienne du pouvoir selon laquelle le pouvoir est une affaire de « micro-physique14 ». Dans cette optique, le pouvoir est essentiellement local : « le pouvoir est local parce qu’il n’est jamais global, mais il n’est pas local ou localisable parce qu’il est diffus15. » Son caractère local et diffus est indissociable de sa caractérisation par Foucault en termes de rapports de force16. Si le pouvoir semble localisé dans Fringe et Dollhouse (les instances dirigeantes responsables des métamorphes et des poupées sont clairement identifiées), les œuvres insistent tout autant sur la façon dont ce pouvoir existe à travers des points singuliers précis (métamorphes et poupées) qui en constituent les relais17. Mais, précisément, ces personnages comme points singuliers par lesquels passe le pouvoir sont à envisager, selon Deleuze, en termes d’affects :

  • 18 Ibid., p. 80.

points singuliers qui marquent chaque fois l’application d’une force, l’action ou la réaction d’une force par rapport à d’autres, c’est-à-dire un affect comme « état de pouvoir toujours local et instable »18

  • 19 Michel Foucault, Le Souci de soi, Paris, Gallimard, 1984. Pour un commentaire sur l’articulation en (...)

4La question éthique au cœur de notre article, développée à partir du format semi-feuilletonnant, consiste à dégager les processus de subjectivation épisodique à l’œuvre dans Fringe et Dollhouse, d’où découlent des rapports affectifs permettant aux personnages d’entrer en résistance. D’où le fait que, dans Fringe et Dollhouse, la question politique de la formation des sujets assujettis (points singuliers comme « relais » du pouvoir) soit indissociable de la question éthique spinoziste : c’est au cœur des relations de pouvoir que les personnages semblent accéder à la possession d’affects actifs d’où découle un nouveau rapport à soi. Ainsi, le dénominateur commun entre politique butlerienne/foucaldienne et éthique spinoziste est, selon notre proposition, une pensée de l’agentivité, non pas extérieure à l’assujettissement (ou aux « déterminismes » dans une optique spinoziste), mais trouvant ses appuis sur le terrain même de l’assujettissement/du déterminisme. Nous analyserons l’émergence d’un nouveau rapport à soi (ou « souci de soi » en termes foucaldien19) pour les personnages, irréductible à une simple subjectivation, mais nécessairement toujours en rapport avec les cadres régulateurs du pouvoir. Il conviendra de distinguer les types de personnages aux affects passifs (les métamorphes en général et la plupart des poupées) des types de personnages aux affects actifs (les métamorphes « résistants » dans Fringe et Echo dans Dollhouse).

  • 20 Nous nous référons aux travaux de Claire Cornillon qui fait la distinction entre « les personnages (...)

5Nous nous demandons donc comment l’itération épisodique peut à la fois être le lieu d’un assujettissement par une subjectivation, mais aussi un potentiel processus d’individuation résistante. Peut-on in fine dégager une éthique de l’individuation des personnages à partir du statut de l’épisode tel qu’agencé au sein du format semi-feuilletonnant ? Enfin, cette éthique de l’individuation concerne-t-elle de la même façon un personnage dit « non-récurrent » et un personnage dit « récurent » 20 ? Nous verrons que la dimension éthique de Fringe et Dollhouse se situe précisément au niveau de l’épisode lorsque les personnages entrent en lutte, non pas en cherchant à retrouver un stade antérieur de leur existence (identité fixe), mais en embrassant leur devenir à partir des affects expérimentés dans le cadre de leur subjectivation. Ainsi, nous défendrons l’idée que la résistance du personnage comme lutte politique se comprend par la transition des affects passifs épisodiques vers des affects actifs feuilletonnants.

Des subjectivations épisodiques

1) La subjectivation épisodique des métamorphes dans Fringe

  • 21 Nous entendons la modulation au sens de Simondon qui l’oppose à l’opération du « moule » : « Mouler (...)

6Dans Fringe, il y a en effet création d’une nouvelle subjectivité et d’un nouveau corps lorsqu’un métamorphe est envoyé sur Terre pour prendre une apparence humaine. Son identité, numérique et qualitative, dépend donc du pouvoir en deux sens. Premièrement, un sens psychique, puisqu’il n’a pas d’identité originelle avant son arrivée sur Terre (une matière informe proche d’un cocon) ; seule la relation de pouvoir permet au métamorphe le déploiement d’une subjectivité. Deuxièmement, un sens corporel puisque découle de la relation de pouvoir une modulation matérielle épisodique de son corps lorsqu’il change régulièrement de visage21.

  • 22 « L’infiltrée » [« Do Shapeshifters Dream of Electric Sheep? »], S03E04, Fringe, Fox, première diff (...)

7La subjectivation est proprement épisodique dès lors que les métamorphes sont « activés » pour répondre à des besoins ponctuels s’inscrivant dans le cadre d’un épisode. Dans l’épisode S03E0422, l’enjeu éthique consiste précisément dans la tension entre les affects actifs d’un mode de vie feuilletonnant et les affects passifs d’un mode de vie épisodique. Ainsi, la distinction spinoziste entre affects passifs et affects actifs trouve son incarnation esthétique par la façon dont Fringe articule l’existence du personnage au statut de l’épisode : la vie du métamorphe est tout d’abord strictement maintenue dans un cadre épisodique.

  • 23 Deleuze, Spinoza et le problème de l’expression, p. 205.
  • 24 Deleuze, Critique et clinique, p. 172.
  • 25 « Passager clandestin » [« Sowaway »], S04E17, Fringe, Fox, première diffusion le 18/03/2011.
  • 26 Deleuze, Critique et clinique, p. 178. L’auteur souligne.
  • 27 Pour une analyse esthétique détaillée du changement de tête dans Fringe, voir Pablo Cabeza-Macuso, (...)

8Le métamorphe est un « agent dormant » depuis cinq années ayant pris l’apparence d’un policier qui est aussi père de famille. Cela fait donc cinq ans qu’il expérimente une vie de substitution jusqu’à l’apparition de Jerome Thomas Newton, un personnage secondaire, lui indiquant quel doit être sa mission épisodique. Les métamorphes sont alors dans la situation décrite par Spinoza dans la mesure où leur individualité se réduit à une puissance de pâtir, c’est-à-dire à des affects passifs sur lesquelles ils n’ont aucune prise. La subjectivation est donc constitutive des affects passifs en tant qu’elle sépare les métamorphes de leur puissance propre23. Autrement dit, la subjectivation sépare les métamorphes de leur degré de puissance constitutif par l’imposition d’un mode de vie épisodique. Dans la situation de l’épisode S03E04, effectuer une mission épisodique contrevient au mode de vie feuilletonnant d’une vie de famille puisque le métamorphe doit changer définitivement de visage et donc perdre son ancrage affectif (il finit par réellement aimer sa famille de substitution). Deleuze utilise le terme de « servitudes diminutives » pour qualifier les affects passifs chez Spinoza24 : les missions épisodiques sont le moyen employé par le pouvoir afin de maintenir en état de servitude les métamorphes par l’imposition d’un vecteur de diminution de leur puissance d’agir dans le monde. Cette situation de servitude est développée dans l’épisode S04E17 avec l’exemple d’un métamorphe changeant d’identité au gré de multiples rencontres aléatoires et donc vivant sans aucune visibilité quant à son propre avenir25. Ses affects passifs diminuent constamment sa puissance d’agir puisqu’il en est réduit à tuer afin de voler des identités pour survivre. Sa situation rappelle ce que Deleuze appelle, au sujet des affects passifs, « l’enchaînement associatif qui dépend d’un ordre comme simple rencontre au hasard des corps physiques26. » Le changement d’apparence du métamorphe implique un dispositif technologique justifié par le cadre science-fictionnel, et introduit en amont dans la série, mais sans qu’il ne soit clairement réinvesti pour ce personnage. En effet, les changements de tête ne sont pas traités figurativement puisque les plans se coupent avant qu’ils n’aient lieu à l’image ; les plans se coupent avant que le changement de tête ne soit effectué, si bien que le personnage change de visage d’une scène à l’autre sans que la continuité identitaire psychique, derrière le changement de corps, n’ait été fermement attestée par l’image27. Encore une fois, c’est un mode de vie feuilletonnant qui est désiré par le personnage puisqu’il ne cesse de regarder une photo du fils de son ex-compagne : le métamorphe désire une vie feuilletonnante (malgré le changement d’identité physique, il reste affectivement lié à la personne sur la photo) là où sa condition matérielle d’existence impose un changement régulier d’identité.

2) La subjectivation épisodique des poupées dans Dollhouse

  • 28 Michel Foucault, « Les rapports de pouvoir passent à l’intérieur des corps », in Dits et écrits, 19 (...)
  • 29 Cornillon, « Dollhouse. Sérialité, genres et narration », p. 91.
  • 30 Eve Bennett, « Deconstructing the Dream Factory: Personal Fantasy and Corporate Manipulation in Jos (...)

9Cette situation de subjectivation épisodique, produisant des personnages éprouvant des affects passifs, se retrouve dans la série Dollhouse avec le statut des poupées. Mais si, selon Foucault, les rapports de pouvoir passent « matériellement » dans l’« épaisseur » des corps28, les solutions esthétiques adoptées par Fringe et Dollhouse diffèrent radicalement. Il nous faut déterminer précisément le fonctionnement de la subjectivation épisodique dans Dollhouse, notamment concernant le rapport entre la mémoire, la subjectivité, et les affects puisque c’est à partir de ces éléments que pourra émerger l’enjeu éthique d’un nouveau rapport à soi via une individuation feuilletonnante. Les deux séries traitent la subjectivation épisodique comme l’enfermement du personnage dans un « rôle » sur lequel il n’a aucune maîtrise. Cependant, dans Fringe, ce « rôle » dispose de très peu de scènes à l’écran, tandis qu’il est explicitement thématisé dans Dollhouse. En effet, les textes critiques ont régulièrement soulevé l’aspect métafictionnel du concept de la série puisqu’il traite de la question de la fiction en général29, et du cinéma hollywoodien en particulier30. Dollhouse radicalise la proposition de Fringe puisque si, dans Fringe, le pouvoir souhaite que le métamorphe « oublie » sa vie de substitution pour pouvoir en embrasser une nouvelle dès que possible, il s’agit d’un souhait qui peut ne pas se réaliser, tandis que Dollhouse narre explicitement la façon dont le rôle imposé à une poupée implique d’intervenir directement sur la production de sa mémoire.

  • 31 Nous privilégions ici le terme de « différenciation » à celui de « défamiliarisation » actorale pui (...)

10Cette intervention sur les souvenirs produit alors ce que nous proposons d’appeler une « différenciation actorale » épisodique afin de qualifier le renouvellement constant des formes actorales adoptées par les acteurs et actrices incarnant les poupées31. Au début de la série, la poupée n’existe que sous deux états : une poupée sans mémoire ou une poupée en mission avec une identité épisodique. La différenciation actorale dans Dollhouse se caractérise par une oscillation entre deux pôles : celui du sous-jeu et du sur-jeu. Les acteurs « sous-jouent » quand ils incarnent une poupée puisque cette dernière n’a aucune mémoire (effacée après chaque mission) et aucun affect élaboré (des désirs simples, limités, et surtout « programmés »). Eliza Dushku joue souvent avec un visage « neutre », sans expression notable, et avec la bouche entr’ouverte pour traduire le questionnement et l’incompréhension d’Echo dans la dollhouse (voir figure 1).

Figure 1 : Echo bouche entr’ouverte; Dollhouse S01E01.

Figure 1 : Echo bouche entr’ouverte; Dollhouse S01E01.
  • 32 « Le Fantôme » [« Ghost »], S01E01, Dollhouse, Fox, première diffusion le 13/02/2009.

11À l’opposé, lors des missions épisodiques, Eliza Dushku adopte un jeu ostentatoire, c’est-à-dire un style de jeu appuyant certaines caractéristiques gestuelles censées singulariser son identité temporaire. Dans l’épisode S01E01, Echo est caractérisée comme une « professionnelle » par le port des lunettes, une tenue stricte et une certaine façon de tenir sa main en l’air avec les doigts pincés32. L’épisode S01E10 voit Dushku adopter une posture très droite avec les mains dans le dos pour caractériser une mère de famille tyrannique (voir figure 2).

Figure 2 : Différenciation actorale de Echo : doigt pincés (S01E01) et mains dans le dos (S01E10)

Figure 2 : Différenciation actorale de Echo : doigt pincés (S01E01) et mains dans le dos (S01E10)
  • 33 « La série reproduit donc étrangement, dans ses premiers épisodes, un fonctionnement à mi-chemin en (...)
  • 34 Cornillon, « Dollhouse. Sérialité, genres et narration », p. 88-89.

12Ce répertoire gestuel est alors majoritairement épisodique puisque le processus de subjectivation impose un mode de vie itératif pour empêcher l’émergence d’une mémoire et des affects associés. En effet, les quatre premiers épisodes se veulent idéalement anthologiques33 ; Echo n’a pas la mémoire des anciennes missions et n’est pas liée à des personnages récurrents34. Nous voyons donc qu’il y a une adéquation entre l’intrigue formulaire et le projet d’assujettissement de la « dollhouse ».

13Cependant, le projet d’assujettissement est mis en difficulté dès le premier épisode par les capacités de mémoire d’Echo. C’est précisément sur le terrain de la mémoire que se trouve mis en jeu le projet éthique spinoziste : Echo s’émancipera des rôles qui lui sont imposés en se souvenant correctement et en élaborant dans un même mouvement de nouvelles modalités affectives. On a souvent relevé qu’Echo se construit une nouvelle subjectivité par l’intégration d’une mémoire à l’aide des expériences formulaires, mais l’on a peu relevé qu’il s’agit d’un processus démarrant dès le pilote de la série. Par souci de clarté, nous parlons dorénavant de « Echo-poupée » lorsqu’elle est une poupée sans mémoire dans la « dollhouse » et de « Echo-mission » lorsque « Echo-poupée » possède une identité épisodique dans le cadre d’une mission formulaire. Il ne s’agit donc pas d’états du personnage « étanches » entre eux, puisque Echo-mission n’est qu’une variation temporaire rendue possible grâce à l’état initial d’Echo-poupée.

  • 35 « A la vie, à la mort » [« The Target »], S01E02, Dollhouse, Fox, première diffusion le 20/02/2009.
  • 36 Reconnaissance mutuelle des poupées Victor et Sierra dans « Mourir sur scène » [« Stage Fright »], (...)

14Dans l’épisode S01E0235, Echo-poupée se souvient d’un geste caractéristique de son identité formulaire expérimentée pendant l’épisode : la mémoire introduit alors du lien malgré la discontinuité des identités, mais se limite au cadre de l’épisode (Echo-poupée se souvient partiellement de l’identité d’Echo-mission propre à l’épisode). Dans les épisodes S01E01 et S01E02, Echo-mission se souvient, en pleine mission formulaire, de scènes ayant eu lieu sous son identité de poupée. Dans l’épisode S01E07, plusieurs poupées en viennent à se rappeler des bribes de leur véritable identité suite à un empoisonnement dans le cadre de leur mission formulaire. La présence d’une mémoire introduisant une continuité narrative, par-delà la subjectivation épisodique, et donc par-delà les différents états de poupée, est alors constitutive de la série dès son pilote et ne saurait se réduire à un processus tardif. La mémoire des poupées, introduisant des brèches au cœur même du formulaire, peut se résumer par le franchissement de trois seuils : 1°) le seuil d’une identité à une autre contenu dans le cadre d’un épisode (Echo-poupée se souvient d’un geste propre à Echo-mission) ; 2°) le seuil inter-épisodique mais sans changement d’identité (l’amour entre Victor et Sierra introduit une mémoire affective alors que ceux-ci restent dans leur état de poupée36) ; 3°) le seuil inter-épisodique d’une identité assujettie à une autre identité assujettie (Echo-mission qui se souvient de son état de poupée d’un ancien épisode).

  • 37 Butler, p. 117.

15Ces trois seuils de brèches mémorielles concernent toujours des états d’assujettissement et de subjectivation puisque, même avec des souvenirs, les poupées ne sont pas maîtresses de leurs affects qui restent passifs. Ces brèches mémorielles sont involontaires et n’offrent aucune augmentation de leur capacité d’action : les poupées dans Dollhouse ne sortent pas encore du cadre narratif qui leur est imposé. Dès lors, comment les séries formulent-elles le passage aux affects actifs, si même la mémoire est d’ordre passif car involontaire ? En effet, la théorie politique foucaldienne et butlerienne de la subjectivation postule que l’assujettissement forme le sujet de manière « répétitive » (nous disons « épisodique »), et que « c’est la possibilité d’une répétition dirigée contre son origine [le pouvoir] qui investit l’assujettissement de son pouvoir habilitant37. » Comment la résistance des poupées et des métamorphes, pensée comme « répétition dirigée contre son origine », s’incarne-t-elle esthétiquement ? Cette résistance prend-elle une forme différente selon qu’il s’agisse de personnages non-récurrents ou récurrents ? Et quelles en sont les conséquences sur le format narratif de Dollhouse et de Fringe ?

Des individuations résistantes feuilletonnantes

  • 38 Foucault, Histoire de la sexualité. 1. La volonté de savoir, p. 125-126.
  • 39 Ibid.
  • 40 Butler, p. 23. L’autrice souligne.
  • 41 Ibid. Nous paraphrasons Butler.
  • 42 Spinoza, Éthique, op. cit., partie III, prop. 57, démonstration.
  • 43 Deleuze, Spinoza et le problème de l’expression, p.  218. Voir aussi : « Les affections passives s’ (...)

16Nous avons précédemment insisté sur le fait que la subjectivation épisodique, dans Fringe et Dollhouse, est principalement d’ordre matériel (changement du visage des métamorphes ; différenciation actorale pour les poupées), mémoriel (les métamorphes doivent « oublier » leur famille de substitution ; la mémoire supprimée des poupées) et affectif. Si selon Michel Foucault, tout pouvoir sécrète ses résistances, alors la résistance devra ici être envisagée au niveau des affects des personnages. Pour Foucault, « là où il y a pouvoir, il y a résistance et […] pourtant, ou plutôt par là même, celle-ci n’est jamais en position d’extériorité par rapport au pouvoir38. » Il ajoute qu’il n’y a pas « une » résistance mais « des » résistances : « […] par définition, elles ne peuvent exister que dans le champ stratégique des relations de pouvoir39. » Butler ajoute que l’assujettissement comme pouvoir « exercé » sur un sujet « […] est néanmoins un pouvoir assumé par le sujet, une assomption qui constitue l’instrument du devenir de ce sujet40. » Autrement dit, l’agir du personnage n’est pas que la simple reproduction passive du pouvoir qui le forme initialement : il y a un « jeu » entre le pouvoir comme condition de la capacité d’agir (la formation du personnage assujetti) et la capacité d’agir « propre » du personnage41. C’est précisément ce « jeu » qui est constitutif du mode de vie éthique dans notre lecture de Spinoza. Si Spinoza nous aide à penser l’état de servitude des personnages, il nous permet aussi de penser la résistance en termes d’affects. En effet, notre puissance de pâtir n’est pas uniquement condition de « tristesse », mais aussi condition de « joie ». Un affect de joie peut certes être « passif », mais est en même temps une augmentation relative de notre puissance d’agir42. Il s’agit d’un vecteur de joie, même si « nous sommes encore impuissants, encore séparés de notre puissance d’agir43. » Deleuze, commentant Spinoza, ajoute :

  • 44 Ibid, p. 219.

En tant que le sentiment de joie augmente la puissance d’agir, il nous détermine à désirer, à imaginer, à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour conserver cette joie même et l’objet qui nous la procure44.

17En effet, la création d’une subjectivité épisodique intégralement au service d’une relation de domination produit alors inévitablement des affects paradoxaux pour le personnage concerné. L’affect est dit « paradoxal » parce que bien qu’initialement passif, conditionné par le pouvoir, l’affect peut aussi être la condition éthique d’un mouvement vers des actes de résistance au pouvoir. Ainsi, pour notre compte, le passage de l’affect passif à l’affect actif est la condition de la résistance au pouvoir.

1) L’auto-subjectivation feuilletonnante dans Fringe

18De fait, dans Fringe, c’est bien au sein même du rapport de pouvoir qu’augmente progressivement la puissance d’agir du métamorphe jusqu’à la possession de nouvelles modalités affectives de résistance. En effet, le métamorphe en mission devenu père de famille a progressivement développé une subjectivité qui semble échapper à un strict assujettissement (S03E04). Le métamorphe refuse de changer de visage pour effectuer sa mission en espérant pouvoir retrouver sa famille qu’il ne souhaite pas tuer. Son corps n’est plus défini comme une matière inerte formée par un pouvoir (imposition d’un changement de visage), mais comme une force ayant sa propre volonté (intention de garder son visage).

  • 45 Deleuze, Critique et clinique, p. 174.
  • 46 Nous ne suivons pas l’intégralité de l’analyse spinoziste qui engage une théorie de la connaissance (...)

19C’est au cœur même de sa mission que le personnage tente de reprendre en main sa vie en maintenant autant qu’il peut ce qui l’affecte de joie (notamment son fils de substitution). Comme l’indique Deleuze, nous pouvons nous émanciper de notre servitude par la « sélection des affects passionnels comme première étape pour sortir du premier genre de connaissance et pouvoir transformer ses affects en action45. » Ce vecteur de joie n’est pas maintenu jusqu’au bout puisque le personnage périt de l’affront qu’il commet envers Jerome Thomas Newton (son supérieur hiérarchique qui le tue). Le métamorphe de l’épisode S04E17 est celui qui réussit véritablement le programme de sélection des affects passionnels afin de suivre un vecteur de joie jusqu’à devenir maître de ses affects devenus actifs46. Pour la première fois dans la série, la formation d’un visage par le métamorphe lui appartient et n’est plus complètement une formation matérielle assujettie. Le métamorphe père de famille ne pouvait pas atteindre une nouvelle capacité d’agir puisqu’il restait dépendant d’une subjectivation (sa vie et son visage ne dépendaient pas de lui), tandis que le métamorphe de l’épisode S04E17 destitue sa relation de subordination au pouvoir en changeant par lui-même de visage afin de reprendre le contrôle narratif de son existence. Cette dépendance à une subjectivation initiale pour le père de famille est aussi une dépendance au « rôle » qu’on lui a attribué. La nouvelle subjectivation du métamorphe est donc une auto-subjectivation grâce à la sortie du cadre narratif normatif via la création d’un nouveau rôle et d’une nouvelle vie. Ce nouveau visage comme auto-subjectivation est l’une des formes d’un nouveau rapport à soi qui dérive d’une subjectivation initiale, sans en être pour autant complètement irréductible. Le métamorphe entré en résistance est donc un personnage dont la subjectivité n’est pas entièrement dépendante d’un rapport de domination, et dont le mode de vie résiste à l’impératif du renouvellement identitaire épisodique producteur d’affects passifs au profit d’une existence feuilletonnante productrice d’affects actifs. Cependant, cette auto-subjectivation n’a pas d’incidence figurative profonde. La logique figurative reste la même que dans notre analyse précédente : le changement de tête, et donc d’acteur, a lieu entre deux plans, sans que nous puissions, en tant que public, en être témoin. Néanmoins, la résistance des deux métamorphes reste individuelle : soit elle échoue, soit elle fait progresser l’intrigue feuilletonnante, mais ne constitue jamais une étape d’émancipation pour l’entièreté des métamorphes. En bref, aucun des deux métamorphes n’amorce de lutte collective du moment qu’ils restent des personnages non-récurrents, c’est-à-dire des personnages apparaissant et disparaissant au sein d’un même épisode. L’un des métamorphes réussit bien son auto-subjectivation mais ne prend pas part au combat final puisqu’il disparaît définitivement de la série à la fin de l’épisode. De fait, le nouveau rapport à soi du métamorphe, s’il échappe, en partie, à la subjectivation initiale, n’est pas pour autant le point de départ à une revendication politique de plus grande envergure.

2) L’individuation résistante dans Dollhouse

2-1) De la multiplicité à la subjectivité

  • 47 L’auteur propose une analyse du personnage littéraire à partir de six procédés différentiels. Nous (...)
  • 48 Nous employons la notion d’« individuation » au sens de Simondon. Gilbert Simondon a produit une th (...)

20Avec Dollhouse, la lutte n’est plus celle entre deux formes de subjectivation (assujettie ou non), mais celle entre la fixité et le processus, entre l’identité stable et l’individuation. Dollhouse poursuit le problème de la subjectivation individuelle vers celui de l’individuation collective. Alors que la résistance des métamorphes de Fringe reste un processus strictement épisodique non investi dans le cadre d’une saison entière, Echo est, a contrario, un personnage récurrent, voire un personnage « principal », au sens de Philipe Hamon47, car elle est le personnage le plus développé (qualification différentielle), le plus présent au sein de la série (distribution différentielle) ; elle constitue le personnage fédérateur du groupe (autonomie différentielle) dont les actions guident le récit (fonctionnalité différentielle) tout en étant la garante de la mémoire du collectif. De plus, dans Dollhouse, ce n’est pas une unique identité qui est mise en avant (subjectivation), mais, précisément, la dimension toujours multiple (individuation) de ce que nous percevons au premier abord sous l’angle de l’unité (identité ou individu)48.

  • 49 « Le feuilletonnant d’Echo est un feuilletonnant non pas seulement de grandes lignes d’intrigue, ma (...)

21Nous souhaitons insister dans cette sous-partie sur le fait que l’individuation d’Echo relève d’une éthique spinoziste lorsqu’elle transforme une vie intermittente cumulative en une vie feuilletonnante linéaire49. En effet, la trajectoire générale du personnage consiste à transformer de simples brèches mémorielles, encore constitutives d’affects passifs, en une véritable mémoire productrice d’affects actifs au sein d’un feuilletonnant linéaire. Cette trajectoire générale implique de faire sens de la multiplicité d’identités cumulées par Echo au fil des subjectivations épisodiques, c’est-à-dire de donner une forme cohérente à toutes ses expériences affectives fragmentées. Nous avons donc une corrélation ferme entre la mémoire que doit se réapproprier le personnage, les affects associés à cette mémoire, et la construction d’une nouvelle subjectivité. L’enjeu éthique pour Echo consiste précisément à s’individuer autrement en se créant, dans un même mouvement, une nouvelle mémoire, de nouveaux affects et une nouvelle subjectivité.

  • 50 Julie Hawk propose la dénomination d’« Echo-sujet ». Cette dénomination est envisageable du moment (...)
  • 51 « Serments » [« Vows »], S02E01, Dollhouse, Fox, première diffusion le 25/09/2009 ; « Dans la tête (...)
  • 52 Sur ce point, la série affirme une position philosophique anti-idéaliste n’assignant pas de prédomi (...)

22Cependant, il s’agit d’un processus d’individuation très progressif et non pas d’un nouvel état instantané. Echo a jusqu’ici été analysée sous son double statut de poupée passive sans mémoire et de poupée en mission avec une subjectivité imposée de force. Nous avons nommé ces deux états « Echo-poupée » et « Echo-mission », et les distinguons du troisième état qui est Echo ayant conscience de ses anciennes identités. Ce troisième état introduit dans l’épisode S01E12 peut être appelé « Echo-personne »50. Si c’est bien dans l’épisode S01E12 qu’Echo semble atteindre un nouveau seuil dans son individuation (d’où émerge Echo-personne), le personnage n’est pas pour autant émancipé de sa situation de domination. En effet, le début de la saison 2 voit toujours Echo soumise à des subjectivations épisodiques, même si elle redevient Echo-personne entre les missions. Ce nouveau seuil dans l’individuation d’Echo consiste en la disparition de son statut de poupée sans mémoire (Echo-poupée). Echo-personne remplace Echo-poupée dans la dollhouse et y introduit dorénavant une continuité narrative par le contrat qu’elle passe avec Ballard, un employé de la « dollhouse », afin de lutter contre ses employeurs. De fait, le début de la saison 2 constitue une évolution du personnage qui ne subit plus passivement des brèches mémorielles, mais s’en sert activement pour acquérir de nouvelles compétences51. L’épisode S02E02 introduit explicitement Echo-personne comme un personnage conscient de lui-même, non pas grâce à une capacité réflexive transparente définissant sa « conscience », mais parce qu’elle est capable d’établir une continuité affective entre ses différentes identités : elle se souvient de ses émotions issues de ses différentes identités en tant qu’Echo-mission. L’identité d’Echo-personne n’est pas uniquement issue de sa conscience, mais dérive aussi de ses affects : le personnage dit « ressentir » plus que se « souvenir52 ». De fait, Echo-personne n’est pas un état différent du personnage, mais une phase de son individuation. Echo-personne englobe ses anciennes identités d’Echo-poupée et d’Echo-mission.

  • 53 « Incognito » [« Meet Jane Doe »], S02E07, Dollhouse, Fox, première diffusion le 11/12/2009.

23Cette continuité affective émergeant des subjectivations épisodiques conduit le personnage à devenir à la fois moteur des intrigues formulaires et des intrigues feuilletonnantes. C’est Echo-personne qui est à l’initiative des intrigues formulaires des épisodes S02E04 et S02E07. Ce dernier épisode est d’ailleurs à la croisée du formulaire et du feuilletonnant53. Echo-personne décide, pour la première fois dans la série, d’une mission épisodique sans en passer par une nouvelle subjectivation. Elle reste donc Echo-personne pendant tout l’épisode qui est précisément le point de bascule vers un nouveau seuil d’individuation. Il y aurait donc trois niveaux d’individuations concernant Echo : le premier niveau est celui d’Echo-poupée sans mémoire et subissant des subjectivations épisodiques (tous les affects passifs de la saison 1) ; le second niveau est celui d’Echo-personne dans la « dollhouse » subissant des subjectivations épisodiques (le début de la saison 2 où son existence en tant que « personne » est cumulative et intermittente) ; le troisième niveau est celui d’Echo-personne émancipée des subjectivations épisodiques en créant les conditions de possibilités d’une existence linéaire continue (passage aux affects actifs à partir de l’épisode S02E07).

  • 54 « Buste de femme », Juin-juillet, huile sur toile, 1907, Centre national d’art et de culture George (...)
  • 55 « Les Demoiselles d’Avignon », huile sur toile, 1907, Museum of Modern Art, New York. Ce tableau es (...)
  • 56 En effet, selon Gombrich, l’esthétique du « cubisme » n’est pas celle du désordre, mais la producti (...)

24Ce passage aux affects actifs est celui d’une mise en forme cohérente des identités multiples initialement vécues comme des fragments non raccordés. L’équivalent figuratif de cette idée se cristallise à travers le motif visuel du fragment. Dans l’épisode S01E04, Echo-poupée est face au « Buste de femme » peint par Pablo Picasso en 190754. Le motif du fragment est ici convoqué à travers la période « cubiste » de l’histoire de l’art puisque ce tableau est une « étude » des « Demoiselles d’Avignon » du même Picasso55. Face au tableau, Echo considère dans un dialogue qu’il est « cassé » parce qu’elle n’arrive pas à donner du sens à une multiplicité de fragments colorés. Ensuite, un raccord-regard en gros plan dévoile Echo-poupée en train de se tâter le visage (voir figure 3). Echo établit une correspondance ferme entre sa situation d’assujettissement, fragmentée entre de multiples identités, et la peinture cubiste de Picasso. Cette série de champ-contrechamp ne respecte pas l’intégrité du tableau puisque les plans « fragmentent » la totalité de l’œuvre par l’utilisation de gros plans. Il y a donc une correspondance entre trois ordres de fragments dans cette scène : le cubisme comme forme picturale reposant sur la mise en ordre de fragments colorés56 ; le montage fragmentant le tableau ; Echo-poupée comme un être sans forme identitaire stabilisée, vivant dans la discontinuité d’elle-même, donc un être que l’on pourrait qualifier de fragmenté.

Figure 3 : Echo-poupée face à un tableau de Picasso

Figure 3 : Echo-poupée face à un tableau de Picasso

25Dans cette scène, un personnage interprète le tableau comme une allégorie de la désagrégation de l’identité (walton. On commence comme un tout puis des parties se désagrègent.) alors que le parcours d’Echo sera inverse (d’une multiplicité de fragments identitaires vers la formation de la subjectivité d’Echo-personne). Ce motif du fragment est de nouveau élaboré figurativement dans l’épisode S02E07, c’est-à-dire dans l’épisode du passage au troisième seuil d’individuation concernant Echo.

Figure 4 : Plan conclusif de la plupart des épisodes de Dollhouse

Figure 4 : Plan conclusif de la plupart des épisodes de Dollhouse
  • 57 Cornillon, « Dollhouse. Sérialité, genres et narration », p. 88. L’autrice rapproche cette conclusi (...)

26Cette élaboration figurative convoque l’esthétique des plans qui concluent la plupart des épisodes et montrent une multitude d’écrans qui ressemblent à des cassettes vidéo57 (voir figure 4) ; chaque écran semble rassembler un fragment de la mémoire d’Echo. Le motif de l’épisode S02E07 emploie donc de nouveau cette esthétique du fragment, mais au service de la constitution de la subjectivité d’Echo-personne : son visage se superpose à l’avant-plan aux fragments de mémoire qui défilent à l’arrière-plan. La découverte de cette compétence est accompagnée d’une phrase d’Echo qui affirme « Je ne suis pas cassée ». Il s’agit d’un rappel de la scène dédiée au tableau de Picasso où la fragmentation est d’abord perçue comme néfaste, comme une brisure de l’identité. Le propos de Dollhouse, figuré explicitement, est inverse : l’identité émancipée résulte d’un processus d’individuation qui consiste à donner forme à une multiplicité de fragments identitaires. En effet, dans la scène de l’épisode S02E07, les changements d’identités se font par un gros plan sur le visage d’Echo. Son visage est rapidement traversé par une multitude d’anciennes identités qui se superposent à son visage (voir figure 5). Chaque fragment est une potentielle nouveauté au sein d’un processus d’individuation plutôt qu’un vestige d’une unité préalable perdue.

Figure 5 : S02E07 Passage aux affects actifs d’Echo-personne

Figure 5 : S02E07 Passage aux affects actifs d’Echo-personne

27Echo arrive donc à donner une forme à cette multiplicité d’identité via l’émergence d’une nouvelle identité (Echo-personne), qui ne se réduit pas à la somme de toutes les précédentes, une fois passé le troisième seuil d’individuation. C’est donc précisément ce troisième seuil qui caractérise le mode de vie éthique feuilletonnant.

2-2) De l’individuation psychique à l’individuation collective

28Si nous disions que Dollhouse déplace le problème de la subjectivation vers celui de l’individuation collective, c’est précisément parce que le développement du personnage d’Echo, avec tous les seuils d’individuation qu’elle surmonte, implique une expérience du devenir qui semble comporter une dimension collective. C’est-à-dire que la voie vers un mode de vie éthique par la maîtrise de ses affects devenus actifs n’est pas une expérience existentielle personnelle, mais est le point de départ d’une émancipation collective.

  • 58 Simondon, p. 25.

29Cette dernière étape peut se comprendre, encore une fois, avec l’aide de Simondon puisque le philosophe pense l’individuation selon différentes phases : l’être pré-individuel, l’être individué en tant qu’être psychique puis en tant qu’être psycho-social. L’objectif d’Echo n’est jamais de revenir à l’état passé de l’identité de Caroline (l’identité initiale du corps d’Echo), mais d’embrasser son devenir, c’est-à-dire d’embrasser un processus d’individuation où l’être n’est pas perçu sous une forme fixe, mais par sa capacité à « se déphaser par rapport à lui-même, [à] se résoudre en se déphasant58 ». Autrement dit, Echo se constitue d’abord une intériorité psychique qui servira de fondement au processus d’individuation collectif puisqu’il s’agit d’offrir les conditions de possibilités d’une émancipation de toutes les poupées.

  • 59 L’individuation collective (des poupées) est une seconde individuation par rapport à l’individuatio (...)
  • 60 Selon Simondon, l’individuation psychique intervient avant l’individuation collective. Simondon, p. (...)

30L’individuation est proprement sérielle mais en deux sens différents. Là où Fringe ne débouche sur aucune émancipation collective des métamorphes, Dollhouse, par l’entremise de son personnage principal Echo, raconte la constitution d’un groupe de résistants. Nous pouvons dire, avec Simondon, que l’on atteint une individuation collective59, puisqu’Echo, après avoir constitué une nouvelle subjectivité (Echo-personne comme « individuation psychique »60), s’individue en même temps que les autres poupées : c’est le groupe qui s’individue lui-même en luttant. Alors que, dans Fringe, chaque lutte de métamorphe est autonome et ne s’inscrit pas dans une continuité narrative : l’auto-subjectivation y est épisodique, donc sans mémoire des luttes passées, dans Dollhouse, Echo-personne garde en mémoire les anciens épisodes pour convoquer volontairement une identité : l’individuation y est feuilletonnante. Dans le premier cas, le personnage est non-récurrent, donc moins développé que les autres personnages du récit, moins autonome, il est isolé, et lutte sans ancrage historique ; il n’a pas eu accès à une éventuelle individuation collective comme condition de possibilité de résistance. Dans le second cas, émerge une tension entre la volonté politique de penser le collectif et le parti-pris créatif de construire le groupe autour d’Echo, personnage principal présenté comme un être exceptionnel. Bien que l’émancipation concerne plusieurs personnages de poupées, c’est bien Echo-personne qui reste au cœur du processus puisqu’il s’agit du seul personnage accédant à la possession d’affects actifs lors de son troisième seuil d’individuation. Nous avons donc trois éléments corrélés : l’individuation d’Echo-personne (individuation psychique) ; un récit feuilletonnant plus affirmé ; la constitution d’un groupe de résistants (individuation collective). Mais c’est bien l’individuation, d’abord psychique, puis ultérieurement collective, qui en est le dénominateur commun : Echo-personne ne peut s’individuer que dans un récit feuilletonnant afin de constituer un collectif de résistants.

Conclusion : Lecture éthique du semi-feuilletonnant formulaire

  • 61 Nous paraphrasons Luc Vancheri dans Film, forme, théorie, Paris Torino Budapest, l’Harmattan, coll. (...)

31L’un des objectifs de cet article est de promouvoir une attention au fonctionnement interne des séries télévisées afin de nous rendre sensibles à la manière dont elles pensent et organisent leur propre rapport à la théorie61. Deux opérations furent menées en ce sens : 1) identifier les façons dont les séries télévisées reformulent des concepts à partir de leurs potentialités esthétiques ; 2) déterminer les nouveaux actes de pensées inexistants dans la langue philosophique du concept. Transformation esthétique de la philosophie, en même temps que devenir conceptuel de l’esthétique sérielle, voici l’enjeu méthodologique général dont il faut maintenant rappeler les aboutissements afin d’en tirer les conséquences théoriques pour une lecture éthique du semi-feuilletonnant formulaire.

32Fringe et Dollhouse, en reformulant un concept (la subjectivation) par leurs moyens intrinsèques (le semi-feuilletonnant), font émerger une forme esthétique nouvelle lorsque les poupées et les métamorphes subissent un mode de vie épisodique (la subjectivation épisodique). En effet, le rapport de pouvoir accorde aux personnages un rôle et une place précise, retirés de la communauté humaine, car inscrits dans une autre temporalité : les intrigues formulaires des poupées/métamorphes sont une exclusion de la vie commune incarnée par le feuilletonnant linéaire. À cette non-concordance des temps s’ajoute l’implication corporelle du rapport de domination : les métamorphes dont les visages sont matériellement modulés ; les poupées sujettes à des subjectivités toujours différentes qui s’incarnent visuellement par un processus de différenciation actoral. Cependant, le statut de l’épisode est bien double : il est à la fois le lieu d’une subjectivation épisodique créatrice d’affects passifs, mais est en même temps le lieu d’où émerge la possibilité d’affects actifs de résistance. Ces affects actifs se traduisent par une auto-subjectivation (le nouveau visage du métamorphe résistant), ainsi que par l’individuation, d’abord psychique puis collective, d’Echo-personne (les affects actifs comme création d’une nouvelle subjectivité via une réorganisation de sa mémoire). La résistance consiste alors en une contestation des rôles qui leur ont été assignés : les personnages sortent de la fonction narrative qui leur est imposée et accèdent à la vie en société par l’entremise d’une existence linéaire feuilletonnante. Cette individuation s’accompagne alors d’une évolution du semi-feuilletonnant lui-même : le feuilletonnant prend de plus en plus d’importance dans Dollhouse au fil de la saison 2.

33De fait, le format semi-feuilletonnant formulaire peut s’avérer particulièrement adéquat à produire une réflexion éthique lorsqu’il fait du statut de l’épisode, constitutif d’une dynamique entre clôture et continuité, un enjeu existentiel pour les personnages. Si, dans notre corpus, la clôture épisodique propre à l’assujettissement est aussi la condition de possibilité d’une continuité émancipatrice, les pôles peuvent néanmoins être inversés. La clôture épisodique peut tout autant être vectrice d’une émancipation lorsqu’il s’agit pour les personnages de redonner un cadre à leur vie face à une existence chaotique prise en charge par le récit feuilletonnant (notoirement dans Angel [The WB, 1999-2004] puis Supernatural [The WB/The CW 2005-2020]).

  • 62 L’Éthique, « c’est-à-dire une typologie des modes d’existence immanents remplace la Morale, qui rap (...)

34En conclusion, si nous pouvons parler, avec Gilles Deleuze, non pas d’une morale, mais d’une éthique de l’épisode en régime semi-feuilletonnant formulaire, c’est parce que l’individuation des personnages au sein d’une ligne narrative linéaire feuilletonnante n’est rendue possible que par les affects expérimentés épisodiquement62. C’est ainsi que Fringe et Dollhouse dégagent avec force les potentialités politiques de l’éthique spinoziste, en même temps que l’importance des affects dans la gouvernementalité, tout en offrant des pistes de réflexion en vue de possibles émancipations futures.

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Notes

1 Le semi-feuilletonnant formulaire se caractérise par des intrigues épisodiques closes couplées à des intrigues feuilletonnantes de diverses natures (mythologiques, relations entre personnages, etc.). Pour une définition du semi-feuilletonnant formulaire : Claire Cornillon et Sarah Hatchuel, « Pour une approche éthique des séries semi-feuilletonnantes », in Fabien Boully (dir.), Troubles en série : les séries télé en quête de singularité, Nanterre, France, Presses universitaires de Paris Nanterre, 2020. ; Claire Cornillon, « La forme semi-feuilletonnante formulaire : l’exemple d’Ally McBeal », TV/Series, no 15, 16 juillet 2019.

2 Joss Whedon est souvent revenu sur l’insistance de Fox concernant la volonté d’intrigues autonomes dans chaque épisode et la réticence au développement des intrigues feuilletonnantes.

3 Claire Cornillon, Les Séries dramatiques semi-feuilletonnantes formulaires des grands networks américains de Moonlighting (1985-1989) à The Flash (2014-), Thèse de doctorat, Université Sorbonne Nouvelle, 2022.

4 Sur la tension entre l’épisode et le feuilletonnant dans Dollhouse, voir Claire Cornillon, « Dollhouse. Sérialité, genres et narration », in La Sérialité à l’écran : comprendre les séries anglophones, éd. Anne Crémieux et Ariane Hudelet, Tours, Presses Universitaires François-Rabelais, coll. « Sérial », 2020, p. 85-99.

5 Judith Butler, La Vie psychique du pouvoir : l’assujettissement en théories, Paris, Éditions Amsterdam, 2022, p. 12. Taylor Boulware propose une lecture queer de Dollhouse en insistant sur la notion d’« assujettissement » de Judith Butler. L’auteur ne l’adosse cependant pas à une analyse narratologique. Boulware Taylor, « "I Made Me" : Queer Theory, Subjection, and identity in Dollhouse », Slayage, The Journal of the Whedon Studies Association, vol. 10.1, 2011. URL : https://www.whedonstudies.tv/volume-101.html. Même constat pour l’article de Julie L Hawk., « Hacking the Read-Only File : Collaborative Narrative as Ontological Construction in Dollhouse », Slayage, The Journal of the Whedon Studies Association, vol. 8.1, 2011. URL : https://www.whedonstudies.tv/volume-81.html

6 Butler., p. 18.

7 Ibid., p. 113.

8 Pour Butler, le « sujet » est un site que viennent occuper des « individus ». Butler, p. 22. Même chose pour Foucault : l’« individu » y est transformé en « sujet » par une forme de pouvoir. Michel Foucault, « Le sujet et le pouvoir », in Dits et écrits. II 1976-1988, Paris, Gallimard, coll. « Quarto », 2001, p. 1056 [p. 1041-1061].

9 Spinoza, Éthique, Paris : Points, 2014 [1677], partie III, proposition 11, scolie ; partie IV, proposition 54, scolie. Au sens philosophique strict, la « joie » n’est pas, chez Spinoza, uniquement liée à un « affect actif ». Nous affinerons l’analyse ultérieurement.

10 Ibid., partie III, définition 3.

11 Gilles Deleuze, Critique et clinique, Paris, Les Éditions de Minuit, coll. « Paradoxe », 1993, p. 172.

12 Gilles Deleuze, Spinoza et le problème de l’expression, Paris, Les Éditions de Minuit, coll. « Arguments », 1968, p. 199.

13 « en première instance les hommes sont mus par leurs passions, en dernière analyse leurs passions sont largement déterminées par les structures ; ils sont mus le plus souvent dans une direction qui reproduit les structures, mais parfois dans une autre qui les renverse pour en créer de nouvelles. » Frédéric Lordon, La Société des affects : pour un structuralisme des passions, Paris, Éditions du Seuil, coll. « L’ordre philosophique », 2013, p. 12. Le lien Spinoza-Foucault est d’ailleurs clairement énoncé par Lordon : Ibid., p. 228.

14 Ce point de vue permet de dépasser la vision traditionnelle du pouvoir comme une « appropriation » au profit d’une vision en termes d’« exercices » et de « stratégies », c’est-à-dire à travers ses effets de domination via des dispositions, manœuvres et techniques. Michel Foucault, Surveiller et punir, Paris, Gallimard, coll. « Collection Tel 225 », 1993, p. 34‑35 ; Michel Foucault, Histoire de la sexualité. 1. La volonté de savoir, Paris, Gallimard, coll. « Collection Tel 248 », 1994, p. 121.

Pour des analyses de Dollhouse à l’aune de Foucault, voir Tom Garbett, « “What about the Laws?” Regulation and the Celebration of Resistance », in Joss Whedon's Dollhouse : confounding purpose, confusing identity, éd. Heather M Porter., Sherry Ginn, Alyson Buckman, Lanham Boulder New York, Rowman & Littlefield, 2014, p. 57 [p. 53-62] et Holly Randell-Moon, « “I’m Nobody”: The somatechnical construction of bodies and identity in Joss Whedon’s Dollhouse », Feminist Media Studies, vol. 12, no 2, juin 2012, p. 265‑280. Cependant, ces articles ne formulent aucune analyse esthétique et n’expliquent donc pas les processus de subjectivations épisodiques.

15 Deleuze, Foucault, p. 34.

16 Foucault, Histoire de la sexualité. 1. La volonté de savoir, p. 121-122.

17 « Bref, le pouvoir n’a pas d’homogénéité, mais se définit par les singularités, les points singuliers par lesquels il passe. » Deleuze, Foucault, p. 33.

18 Ibid., p. 80.

19 Michel Foucault, Le Souci de soi, Paris, Gallimard, 1984. Pour un commentaire sur l’articulation entre sujet assujetti et auto-constitution du sujet dans l’œuvre de Foucault, voir Yves Charles Zarka, « Foucault et l’idée d’une histoire de la subjectivité : le moment moderne », Archives de Philosophie, vol. 65, no 2, 2002, p. 255‑267.

20 Nous nous référons aux travaux de Claire Cornillon qui fait la distinction entre « les personnages principaux de la série ou récurrents, qui appartiennent donc aux arcs narratifs feuilletonnants, et ceux qui n’apparaissent que dans un seul épisode, et qui forment par conséquent l’enjeu même de la structure formulaire. » Cornillon, Les Séries dramatiques semi-feuilletonnantes formulaires des grands networks américains de Moonlighting (1985-1989) à The Flash (2014-), p. 235.

21 Nous entendons la modulation au sens de Simondon qui l’oppose à l’opération du « moule » : « Mouler est moduler de manière définitive ; moduler est mouler de manière continue et perpétuellement variable. » Gilbert Simondon, L’Individuation à la lumière des notions de forme et d’information, Grenoble, Millon, coll. « Krisis », 2005, p. 47.

22 « L’infiltrée » [« Do Shapeshifters Dream of Electric Sheep? »], S03E04, Fringe, Fox, première diffusion le 14/10/2010.

23 Deleuze, Spinoza et le problème de l’expression, p. 205.

24 Deleuze, Critique et clinique, p. 172.

25 « Passager clandestin » [« Sowaway »], S04E17, Fringe, Fox, première diffusion le 18/03/2011.

26 Deleuze, Critique et clinique, p. 178. L’auteur souligne.

27 Pour une analyse esthétique détaillée du changement de tête dans Fringe, voir Pablo Cabeza-Macuso, « Doubles robotiques. Une esthétique de la résurrection », Cultural Express, n° 6, 2021. URL : https://cultx-revue.com/article/doubles-robotiques-une-esthetique-de-la-resurrection

28 Michel Foucault, « Les rapports de pouvoir passent à l’intérieur des corps », in Dits et écrits, 1954-1988. II 1976-1988, op. cit., p. 231 [p. 228-239].

29 Cornillon, « Dollhouse. Sérialité, genres et narration », p. 91.

30 Eve Bennett, « Deconstructing the Dream Factory: Personal Fantasy and Corporate Manipulation in Joss Whedon’s Dollhouse », Slayage, The Journal of the Whedon Studies Association, vol. 9.1, 2011. URL : https://www.whedonstudies.tv/volume-91.html; Scott Rogers, « Joss Whedon’s “Dollhouse” and Joss Whedon’s Dollhouse », Journal of the Fantastic in the Arts, vol. 22, no 2, 2011, p. 153170. ; Julien Achemchame, « Dollhouse de Joss Whedon (FOX, 2009-2010) : Écho, un “corps-marchandise” posthumain au service de la sérialité audiovisuelle », TV/Series, no 14, 31 décembre 2018. URL : https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/tvseries/3139

31 Nous privilégions ici le terme de « différenciation » à celui de « défamiliarisation » actorale puisque, si cette dernière implique une « familiarisation » initiale avec les acteurs et actrices, la première peut se penser sans point de référence originaire. Pour l’usage du terme de « défamiliarisation actorale », voir Cabeza-Macuso Pablo, « Ce que les mondes parallèles font au personnage de série télévisée : une esthétique du character overhaul », ReS Futurae, n° 19, 2022. URL : https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/resf/11107, consulté le 14/12/2023.

32 « Le Fantôme » [« Ghost »], S01E01, Dollhouse, Fox, première diffusion le 13/02/2009.

33 « La série reproduit donc étrangement, dans ses premiers épisodes, un fonctionnement à mi-chemin entre la série formulaire et l’anthologie, puisque le personnage change d’épisode en épisode, ne conserve pas la mémoire de ce qui s’est produit avant et évolue dans un contexte complètement différent à chaque fois. » Cornillon, Les séries dramatiques semi-feuilletonnantes formulaires des grands networks américains de Moonlighting (1985-1989) à The Flash (2014 -), p. 277.

34 Cornillon, « Dollhouse. Sérialité, genres et narration », p. 88-89.

35 « A la vie, à la mort » [« The Target »], S01E02, Dollhouse, Fox, première diffusion le 20/02/2009.

36 Reconnaissance mutuelle des poupées Victor et Sierra dans « Mourir sur scène » [« Stage Fright »], S01E03, Dollhouse, Fox, première diffusion le 27/02/2009 ; Victor a une érection en voyant Sierra dans « Croyance aveugle » [« True Believer »], S01E05, Dollhouse, Fox, première diffusion le 13/03/2009.

37 Butler, p. 117.

38 Foucault, Histoire de la sexualité. 1. La volonté de savoir, p. 125-126.

39 Ibid.

40 Butler, p. 23. L’autrice souligne.

41 Ibid. Nous paraphrasons Butler.

42 Spinoza, Éthique, op. cit., partie III, prop. 57, démonstration.

43 Deleuze, Spinoza et le problème de l’expression, p.  218. Voir aussi : « Les affections passives s’opposent aux affections actives parce qu’elles ne s’expliquent pas par notre puissance d’agir. […] À leur manière, elles sont notre puissance d’agir, mais à l’état enveloppé, non exprimé, non-expliqué. » Ibid., p. 225.

44 Ibid, p. 219.

45 Deleuze, Critique et clinique, p. 174.

46 Nous ne suivons pas l’intégralité de l’analyse spinoziste qui engage une théorie de la connaissance non nécessaire à la compréhension de Fringe. Pour Spinoza, le passage des affects passifs aux affects actifs se fait par la formation d’une « notion commune ». Spinoza, partie II, prop. 39, démonstration et corollaire. Pour une présentation claire de la « notion commune », voir Deleuze, Spinoza et le problème de l’expression, p. 264.

47 L’auteur propose une analyse du personnage littéraire à partir de six procédés différentiels. Nous retenons en priorité la qualification différentielle (« Le personnage sert de support à un certain nombre de qualifications que ne possèdent pas, ou que possèdent à un degré moindre, les autres personnages de l’œuvre »), la distribution différentielle (un mode d’accentuation purement quantitatif jouant sur les moments et fréquences d’apparitions du personnage), l’autonomie différentielle (« […] le héros apparaît seul, ou conjoint avec n’importe quel autre personnage »), et la fonctionnalité différentielle (le personnage principal pose les actions déterminantes du récit). Philippe Hamon, « Pour un statut sémiologique du personnage », in Poétique du récit, éd. Roland Barthes, Wolfgang Kayser, Wayne Booth Clayton et Philippe Hamon, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Points Essais 78 », 1992, p. 154-155 [p. 115-180]. Publication originale : Philippe Hamon, « Pour un statut sémiologique du personnage », Littérature, vol. 6, no 2, 1972, p. 86‑110.

48 Nous employons la notion d’« individuation » au sens de Simondon. Gilbert Simondon a produit une théorie de l’individuation permettant de saisir l’« individu » au sein d’un processus plus large qu’il nomme l’« individuation ». Il reproche à la philosophie classique de partir de l’« individu » pour penser l’« individuation », au lieu de réinscrire l’individu dans un processus d’individuation. Simondon, p. 26.

49 « Le feuilletonnant d’Echo est un feuilletonnant non pas seulement de grandes lignes d’intrigue, mais aussi d’une évolution du personnage par accumulation des épisodes formulaires dans une mémoire de la série. Cela recoupe la typologie des différents types de feuilletonnant que j’ai établie auparavant, d’un feuilletonnant linéaire à un feuilletonnant cumulatif. » Cornillon, Les séries dramatiques semi-feuilletonnantes formulaires des grands networks américains de Moonlighting (1985-1989) à The Flash (2014 -)., p. 279.

50 Julie Hawk propose la dénomination d’« Echo-sujet ». Cette dénomination est envisageable du moment que Hawk réserve la notion de subjectivation à l’émancipation d’Echo, et non pas aux états d’assujettissements vécus en tant que poupée. Selon nous, Echo ne devient pas uniquement « sujet » en cours de saison 2 (comme le voudrait Hawk), mais devient « sujet » à chaque situation de subjectivation épisodique. Hawk. « Hacking the Read-Only File : Collaborative Narrative as Ontological Construction in Dollhouse »

51 « Serments » [« Vows »], S02E01, Dollhouse, Fox, première diffusion le 25/09/2009 ; « Dans la tête du tueur » [« Belle Chose »], S02E03, Dollhouse, Fox, première diffusion le 08/10/2009 ; « Tempête médiatique » [« The Public Eye »], S0205, Dollhouse, Fox, première diffusion le 04/12/2009.

52 Sur ce point, la série affirme une position philosophique anti-idéaliste n’assignant pas de prédominance à la conscience sur le corps et les émotions. Ce constat est celui de Jeffrey Bussolini qui mentionne bien Spinoza, mais pas sa théorie des affects. Jeffrey Bussolini, « Technology and Magic, Joss Whedon’s Exploration of the Mind », in Reading Joss Whedon, éd. Rhonda V Wilcox., Tanya R Cohran., Cynthea Masson et David Lavery, op. cit., p. 328 [p. 325-340]. Comme le note Margo Collins : « In this series, hypomnesis cannot exist without anamnesis ; there is no disembodied self, and throughout Dollhouse, selfhood implies embodiment. » Collins, p. 36.

53 « Incognito » [« Meet Jane Doe »], S02E07, Dollhouse, Fox, première diffusion le 11/12/2009.

54 « Buste de femme », Juin-juillet, huile sur toile, 1907, Centre national d’art et de culture Georges-Pompidou. Il s’agit d’une imitation approximative puisque les couleurs et les formes ne sont pas exactement les mêmes que sur la peinture de Picasso.

55 « Les Demoiselles d’Avignon », huile sur toile, 1907, Museum of Modern Art, New York. Ce tableau est considéré comme le premier tableau cubiste de l’histoire de l’art. Ce tableau représente par ailleurs des prostituées, ce qui n’est pas complètement hors de propos au vu de la situation des poupées dans Dollhouse.

56 En effet, selon Gombrich, l’esthétique du « cubisme » n’est pas celle du désordre, mais la production d’une impression cohérente à partir d’un mélange de formes disloquées. Ernst Hans Gombrich, Histoire de l’art, Paris, Phaidon, 2006 [1950], p. 443. C’est aussi le constat de Perdigao qui formule une analogie entre la fragmentation d’Echo et la fragmentation épisodique de la série : « As “Gray Hour” exhibits how, in art and in life, pieces begin to slide, come apart, and “Man on the Street” suggests the obliteration of these clusters of neurons, the teleology of Dollhouse constructs a collage of the parts. » Lisa K Perdigao., « “This One’s Broken”: Rebuilding Whedonbots and Reprogramming the Whedonverse », The Journal of the Whedon Studies Association, vol. 8.1, 2011. URL : https://www.whedonstudies.tv/volume-81.html

57 Cornillon, « Dollhouse. Sérialité, genres et narration », p. 88. L’autrice rapproche cette conclusion des épisodes avec le discours métafictionnel de l’œuvre.

58 Simondon, p. 25.

59 L’individuation collective (des poupées) est une seconde individuation par rapport à l’individuation psychique (des poupées, mais aussi des métamorphes). Selon Simondon, l’individuation collective est liée par des liens de réciprocité avec l’individuation psychique : « En un sens, c’est une “seconde individuation” par rapport à la psychique, qui est elle-même individuation seconde par rapport à la vitale, “seconde” voulant dire qu’elle n’instaure pas un nouveau régime entièrement autonome d’individuation. » Jean-Yves Château, Le Vocabulaire de Simondon, Paris, Ellipses, coll. « Vocabulaire de… », 2008, p. 52.

60 Selon Simondon, l’individuation psychique intervient avant l’individuation collective. Simondon, p. 29.

61 Nous paraphrasons Luc Vancheri dans Film, forme, théorie, Paris Torino Budapest, l’Harmattan, coll. « Champs visuels », 2002, p. 10.

62 L’Éthique, « c’est-à-dire une typologie des modes d’existence immanents remplace la Morale, qui rapporte toujours l’existence à des valeurs transcendantes. » Gilles Deleuze, « Sur la différence de l’éthique avec une morale » in Spinoza, philosophie pratique, Paris : Les Éditions de Minuit, 2003, p. 35.

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Table des illustrations

Titre Figure 1 : Echo bouche entr’ouverte; Dollhouse S01E01.
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Titre Figure 2 : Différenciation actorale de Echo : doigt pincés (S01E01) et mains dans le dos (S01E10)
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Titre Figure 3 : Echo-poupée face à un tableau de Picasso
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Titre Figure 4 : Plan conclusif de la plupart des épisodes de Dollhouse
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Titre Figure 5 : S02E07 Passage aux affects actifs d’Echo-personne
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Pour citer cet article

Référence électronique

Pablo Cabeza-Macuso, « Une éthique de l’épisode en régime semi-feuilletonnant : de la subjectivation épisodique à l’individuation résistante dans Fringe et Dollhouse »TV/Series [En ligne], 23 | 2024, mis en ligne le 25 octobre 2024, consulté le 07 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/tvseries/8150 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12lhq

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Auteur

Pablo Cabeza-Macuso

Pablo Cabeza-Macuso est doctorant en études cinématographiques et ATER à l’Université Paul-Valéry Montpellier 3 (RIRRA 21). Ses recherches portent sur le character overhaul télévisé (Jason Mittell) à partir d’une perspective esthétique et actorale. Il a publié sur les mondes parallèles dans les séries de science-fiction (ResFuturae), sur le motif de la résurrection à partir des personnages androïdes (Cultural Express), ainsi que sur le trope science-fictionnel du « body swap » (A l’épreuve). Il a de plus proposé plusieurs communications sur la thématique du « Body Snatchers » télévisé (GUEST 2021 et SERCIA 2022).

Pablo Cabeza-Macuso is a PhD student in Film and Television Studies; he teaches at the University Paul-Valéry Montpellier 3 (RIRRA 21). His research focuses on character overhaul (Jason Mittell) through a perspective mixing aesthetics and performance studies. He has published on parallel worlds in science-fiction series (ResFuturae), on the motif of resurrection based on android characters (Cultural Express), and on the science-fiction trope of the ‘body swap’ (A l’épreuve). He has also presented several papers on the theme of televised "Body Snatchers" (GUEST 2021 and SERCIA 2022).

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