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L’insertion par l’activité économique

Comment les salariés sont-ils accompagnés et quelle perception en ont-ils ?
Work Integration Social Enterprises. How Are Their Beneficiaries Supported and What Is Their Feeling about Them?
Véronique Rémy
p. 29-51

Résumés

Cet article décrit la manière dont les bénéficiaires d’un dispositif de politique de l’emploi particulier, l’insertion par l’activité économique, sont accompagnés et formés, ainsi que leur ressenti à son égard. L’enquête de la Dares auprès de salariés et d’employeurs du secteur permet d’ouvrir la « boîte noire » de ce dispositif peu étudié. La typologie réalisée souligne la diversité des publics accueillis et l’adaptation du parcours d’insertion qui leur est proposé – l’accompagnement étant d’autant plus resserré que les difficultés sont grandes. Le regard porté sur le dispositif dépend des caractéristiques des bénéficiaires et du déroulement de leur parcours : les avantages qu’ils perçoivent sur un plan subjectif (acquisition de compétences, résolution des difficultés sociales, etc.) sont d’autant plus importants qu’ils sont éloignés de l’emploi et ont bénéficié d’un accompagnement intensif. En revanche, leur accès à l’emploi ne diffère pas de celui des salariés moins en difficulté.

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Texte intégral

L’auteure tient à remercier Thomas Amossé, Laurène Le Cozanet, Magali Marcille, Véronique Simonnet ainsi que les deux rapporteurs anonymes de la revue pour leur relecture attentive et leurs remarques constructives.

  • 1  Les travaux du réseau de chercheurs émergence des entreprises sociales (Emes) ont constaté le même (...)
  • 2  Ce conventionnement est la base du contrat entre l’État et les structures de l’IAE et permet la re (...)
  • 3  La réforme de 2014 a simplifié et harmonisé le financement accordé par l’État aux différentes stru (...)

1Plusieurs dispositifs de politique de l’emploi existent pour lutter contre le chômage de longue durée et l’exclusion du marché du travail de certaines populations fragilisées : les contrats aidés marchands ou non marchands, les politiques de formation ou les programmes d’aide à la recherche d’emploi. Néanmoins, ils ne permettent pas de surmonter l’ensemble des obstacles rencontrés par les personnes en marge du marché du travail, qui cumulent freins à l’emploi (niveau de formation insuffisant, perte des habitudes de travail, illettrisme, etc.) et difficultés sociales (problèmes de santé, d’addiction, de logement, financiers, etc.). Le secteur de l’insertion par l’activité économique (IAE) cherche à répondre aux besoins de ces personnes en leur proposant un « parcours d’insertion », c’est-à-dire un emploi associé à un accompagnement social et professionnel personnalisé (pour une description détaillée, voir encadré 1). En France, comme dans d’autres pays, ce secteur s’est développé dans les années 1970 avant d’être reconnu par l’État et inscrit dans le Code du travail par la loi d’orientation de juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions, qui fixe un cadre juridique général au secteur1. Les structures qui le composent sont conventionnées2 par l’État et accueillent un public agréé par Pôle emploi. Cet agrément atteste que le public rencontre bien des difficultés sociales et professionnelles particulières et que le dispositif est donc ciblé sur les personnes en ayant le plus besoin. Les structures perçoivent en contrepartie des aides financières. Dans le contexte actuel de remise en cause de l’intérêt de certains dispositifs de politique de l’emploi tels que les contrats aidés, la pérennité de l’IAE pourrait être menacée. Néanmoins, depuis la réforme du financement du secteur conduite en 2014, aucun salarié en parcours d’insertion n’est recruté en contrat aidé3. De plus, dans le cadre du recentrage des dispositifs sur les personnes les plus éloignées de l’emploi, les sommes affectées au secteur pour l’année 2018 ont été revues à la hausse.

Encadré 1
Les différents types de structures de l’IAE

Deux grandes catégories de structures accueillent des personnes en parcours d’insertion. D’un côté, les entreprises d’insertion (EI) et les ateliers et chantiers d’insertion (ACI) sont des structures de production qui emploient ces personnes directement en contrat à durée déterminée d’insertion (CDDI) ou en contrat aidé. D’un autre côté, les associations intermédiaires (AI) et les entreprises de travail temporaire d’insertion (ETTI) mettent ces personnes à disposition de particuliers – pour les AI – et d’entreprises clientes – pour les ETTI.
Ces structures constituent un ensemble hétérogène : les ACI s’adressent aux personnes les plus éloignées de l’emploi, tandis que les salariés en insertion des ETTI sont plus proches de l’emploi, puisqu’ils doivent pouvoir être placés en mission auprès d’entreprises. Cette hétérogénéité du public accueilli est en partie liée aux niveaux de subventions accordées aux différentes structures : les ACI sont les structures les plus subventionnées, devant les EI, les ETTI et les AI. D’après Claudon et ses co-auteur·e·s (2013), l’aide annuelle moyenne par poste d’insertion en équivalent temps plein en 2011 était de 42 000 euros pour les ACI et de 11 000 euros pour les EI, tandis qu’elle s’élevait respectivement à 5 100 euros et à 3 500 euros dans les ETTI et les AI (hors exonérations de cotisations sociales).

  • 4  À partir d’entretiens qualitatifs réalisés auprès de salariés et du personnel en charge de leur ac (...)
  • 5  C’est-à-dire un emploi en contrat à durée indéterminée (CDI), un emploi en contrat à durée détermi (...)

2Dédiées à l’insertion de publics en difficulté, les structures de l’IAE (SIAE de façon générique dans le texte) accompagnent leurs salariés « dans » et « vers » l’emploi (Cervera, Defalvard, 20094) dans le cadre d’un parcours d’insertion. Ce dernier, par nature temporaire, doit leur permettre d’accéder à un emploi de droit commun de préférence durable5. L’accompagnement est généralement réalisé par le personnel permanent de la structure et parfois complété par des prestations de Pôle emploi ou d’autres organismes extérieurs. Il est à la fois social et professionnel, puisqu’il doit permettre aux salariés en insertion de lever leurs différents freins d’accès à l’emploi (problèmes de logement, de santé, de mobilité, etc.), de réaliser le travail pour lequel ils ont été recrutés et de retrouver un emploi à la sortie. Son champ est ainsi plus large que celui des programmes d’« aide à la recherche d’emploi » destinés aux demandeurs d’emploi, qui ont fait l’objet de nombreuses évaluations. Les travaux menés sur ces programmes montrent que leur efficacité dépend fortement de la fréquence des entretiens entre les conseillers du service public de l’emploi et les demandeurs d’emploi qu’ils suivent (Van den Berg, Van der Klaauw, 2006 ; Maibaum et al., 2012). Cette dimension est également importante pour l’IAE puisque les structures peuvent ajuster la fréquence du suivi en fonction des difficultés rencontrées par leurs salariés en parcours d’insertion.

  • 6  Les auteures montrent que la formation dispensée par les SIAE peut notamment augmenter les chances (...)

3En complément de l’accompagnement, les SIAE offrent des formations à leurs salariés en insertion selon leurs besoins. Elles sont hybrides par rapport aux dispositifs de formation dédiés soit aux demandeurs d’emploi, soit aux salariés en poste. D’un côté, elles se rapprochent des formations destinées aux demandeurs d’emploi, puisqu’elles doivent permettre de trouver un emploi à l’extérieur de la structure et couvrent donc des domaines plus vastes que l’adaptation au poste, même entendue au sens large (acquisition de compétences de base, formation qualifiante, etc.). Mais d’un autre côté, elles s’apparentent à de la formation professionnelle puisque les formations d’adaptation au poste n’y sont pas rares (Avenel, Rémy, 2014). De nombreux travaux, en France et à l’étranger, ont évalué les dispositifs de formation et concluent généralement à un effet au mieux faible sur le retour à l’emploi de leurs bénéficiaires. Le constat reste néanmoins incertain, compte tenu de la rareté des études mesurant les effets de la formation à long terme (pour un état des lieux sur le sujet, voir Ferraci, 2013). Néanmoins, une formation suivie en parallèle d’une activité professionnelle, comme cela est prévu par les contrats en alternance, semble plus efficace qu’une formation seule ou un contrat aidé seul (Bonnal, Fougère, Serandon, 1997 ; Brodaty, Crépon, Fougère, 2001). Même si les formations proposées par les SIAE sont assez éloignées de l’alternance, le renforcement des compétences acquises qu’elles induisent peut favoriser l’insertion ultérieure des bénéficiaires et améliorer leur ressenti quant à leur situation professionnelle (Calavrezo, Rémy, 20176).

  • 7  Des travaux qualitatifs existent, mais sont centrés sur la spécificité des entreprises sociales (c (...)

4Comparé aux autres dispositifs de politique de l’emploi, le secteur de l’IAE a fait l’objet de peu de travaux empiriques7. Un phénomène d’ailleurs regretté par un récent rapport de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales, qui insiste sur la nécessité d’« améliorer et [de] compléter les outils d’évaluation du dispositif de manière conséquente » (Claudon et al., 2013, p. 57). Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce relatif désintérêt. Tout d’abord, son budget et le nombre de ses bénéficiaires ne représentent qu’environ 5 % des sommes affectées aux politiques actives du marché du travail et des embauches afférentes. Ensuite, contrairement à d’autres dispositifs, l’IAE n’est pas utilisé comme un moyen conjoncturel de lutte contre le chômage, mais plutôt comme une première marche de la politique de l’emploi. Enfin, les données disponibles en France sont relativement pauvres, puisqu’elles ne permettent pas d’identifier les actions précisément mises en œuvre par les structures pour accompagner leurs salariés en parcours d’insertion ni de connaître leur devenir professionnel à la sortie de la structure. En dehors des données utilisées dans l’article, l’une des seules exceptions au niveau national est l’enquête menée par le ministère en charge du travail et de l’emploi auprès des salariés en parcours d’insertion en 2002 : Roza Céalis et Anna Smyk (2003) constatent ainsi que trois ans après leur entrée dans une structure de l’IAE, 70 % des bénéficiaires occupent un emploi dont près d’un quart au sein d’une SIAE. En Belgique, Alexis Platteau et Marthe Nyssens (2004) ont construit une typologie à partir des caractéristiques d’une centaine de salariés travaillant dans 15 entreprises d’insertion. Ils observent que les salariés les plus fragiles sont ceux qui ont vu le plus leurs compétences s’améliorer (d’après les déclarations de leurs responsables). Deux ans après leur entrée, 65 % des bénéficiaires sont encore dans l’EI, ce qui témoigne selon les auteurs du fait qu’ils se sont bien adaptés à la structure. Par ailleurs, 30 % des salariés ayant quitté l’entreprise ont retrouvé un emploi à la date de l’enquête, leurs chances étant d’autant plus grandes que leurs compétences ont fortement augmenté durant leur passage dans l’EI. Les effectifs sont néanmoins trop faibles pour permettre aux auteurs d’aller plus loin dans l’analyse. En somme, malgré leur intérêt, ces différents travaux ne permettent pas d’identifier quantitativement les liens entre le parcours d’insertion et la trajectoire ultérieure des personnes entrées dans le dispositif.

  • 8  L’étude porte donc sur la situation du secteur avant la réforme de 2014, dont on peut toutefois pe (...)
  • 9  Selon les auteurs de ce rapport, le critère de l’accès à l’emploi (voire à l’emploi durable) actue (...)

5À partir de l’enquête menée par la Dares en 20128 auprès d’employeurs et de salariés du secteur de l’IAE (encadré 2), cet article vise à ouvrir la « boîte noire » de l’accompagnement et de la formation dispensés par ces structures, et ainsi répondre à la question suivante : dans quelle mesure les associations et les entreprises de ce secteur adaptent-elles leurs différents outils aux difficultés rencontrées par leurs salariés ? À notre connaissance, le déroulement du dispositif comme son lien avec le devenir des bénéficiaires et leur ressenti sur leur passage par l’IAE restent méconnus. Compte tenu de la population accueillie, parfois très éloignée de l’emploi, il semble important d’élargir l’évaluation de ce dispositif au-delà de ses seuls effets sur l’insertion professionnelle (Gosselin, Turan-Pelletier, 2015)9. La section 1 confirme que les personnes entrant dans l’IAE sont en moyenne plus éloignées de l’emploi que celles bénéficiant de contrats aidés. Elle montre également qu’à la variété des types de SIAE correspondent celles des publics accueillis et des degrés d’intensité des parcours d’insertion proposés. La construction d’une typologie permet de mettre en évidence l’ajustement de l’accompagnement et de la formation aux problèmes spécifiques rencontrés par les salariés en parcours d’insertion, et de montrer que cet ajustement va au-delà de ce qui pourrait être attendu compte tenu de l’activité et des parcours d’insertion généralement proposés par chaque grand type de structure (section 2). La typologie permet également d’étudier les conséquences des actions conduites (section 3) : les effets subjectifs du passage par l’IAE en termes de satisfaction globale, de sentiment d’avoir acquis de nouvelles compétences et/ou d’avoir résolu certaines difficultés sociales, sont plus marqués chez les salariés les plus éloignés de l’emploi et les plus accompagnés.

Encadré 2
L’enquête IAE 2012

La Dares a mené en 2012 une enquête auprès de salariés et d’employeurs du secteur de l’IAE, qui avait pour principal objectif d’améliorer la connaissance des parcours d’insertion des personnes accueillies par les différentes structures (EI, ETTI, AI et ACI) et de recueillir leur opinion sur ce dispositif. Le volet « salariés » de l’enquête a consisté à interroger par téléphone, entre février et août 2012, un échantillon de salariés entrés en parcours d’insertion entre septembre et décembre 2010 et restés au minimum un mois dans une structure de l’IAE de métropole ou des Dom. Ce sont ainsi 6 943 personnes qui ont répondu à l’enquête, soit un taux de réponse de 41 %.
En parallèle, entre mai et septembre 2012, l’ensemble des responsables des structures conventionnées au titre de l’IAE en 2010 sur le territoire métropolitain et dans les Dom ont été sollicités pour répondre à un questionnaire en ligne. Le champ de l’enquête a été restreint aux structures encore en activité en 2012 et toujours conventionnées à cette date. Le taux de réponse global à l’enquête est de 71 %, les réponses de 2 657 employeurs ayant été collectées. La non-réponse a été corrigée grâce à une méthode d’imputation par le plus proche voisin, méthode permettant de conserver la structure des données.
Pour mener à bien cette étude, les deux volets de l’enquête ont été appariés, conduisant à un effectif d’environ 6 500 salariés en insertion répartis dans 1 900 structures. Les SIAE de certains salariés enquêtés n’entraient pas dans le champ du volet « employeurs » de l’enquête, mais pour les autres, toutes leurs réponses ont été conservées, que leur structure ait ou non répondu au questionnaire, l’imputation permettant effectivement de construire des réponses pour les structures non-répondantes. Ce choix permet de conserver le plus d’informations possibles sur les salariés en insertion, leur taux de réponse étant relativement faible au regard de celui des responsables de structures. Les réponses d’environ 1 600 salariés de structures porteuses d’ACI, 1 450 salariés d’EI, 1 800 salariés d’AI et 1 650 salariés d’ETTI ont ainsi été prises en compte. Le parcours d’insertion étant d’une durée théorique de 24 mois, environ 2 000 salariés en insertion n’étaient pas sortis de la structure à la date de l’enquête.
Le volet « employeurs » de l’enquête permet de bien identifier les actions mises en œuvre par les responsables de structures pour accompagner et former leurs salariés (désignation d’un tuteur, fréquence des entretiens de suivi, actions mises en œuvre pour préparer la sortie de la structure, etc.). Si le volet « salariés » donne une description moins complète de l’accompagnement et de la formation, il permet en revanche d’apprécier leurs effets de manière objective et subjective grâce à de nombreuses variables de résultat (situation professionnelle à la date de l’enquête, satisfaction à l’égard du passage par la structure, compétences professionnelles acquises, confiance en soi retrouvée, etc.).

Des publics et des parcours d’insertion très différents selon le type de structure

Des entrants dans l’IAE plus éloignés de l’emploi que les bénéficiaires de contrat aidé…

  • 10  Les contrats aidés sont des dispositifs subventionnant l’embauche de personnes rencontrant des dif (...)

6L’IAE s’adresse à des personnes rencontrant des difficultés particulières d’accès à l’emploi, dont certaines ne seraient pas en mesure de participer directement à un dispositif classique de politique de l’emploi. Un moyen de mettre en évidence la spécificité des salariés entrant dans l’IAE est de comparer leurs caractéristiques à celles des personnes recrutées en contrats aidés sur la même période10 (tableau 1). La part des bénéficiaires de minima sociaux parmi les personnes entrant dans les structures de l’IAE est bien supérieure à celle observée parmi les bénéficiaires de contrats aidés, y compris dans le secteur non marchand où ils sont traditionnellement plus éloignés de l’emploi. Les salariés entrant dans l’IAE sont également moins diplômés. En revanche, l’ancienneté de leur inscription à Pôle emploi se situe entre celle des bénéficiaires d’un contrat aidé non marchand et celle des bénéficiaires d’un contrat aidé marchand. Néanmoins, les catégories administratives ne suffisent pas pour juger des difficultés rencontrées par les entrants dans l’IAE. Ces derniers sont confrontés à de nombreux problèmes sociaux (de logement, de garde d’enfants, de santé, administratifs, etc.) et d’accès à l’emploi (mobilité ou niveau de formation insuffisants, etc.). Ils les cumulent d’ailleurs souvent (Avenel, Rémy, 2014). Leur parcours professionnel est particulièrement heurté : la majorité d’entre eux ont connu soit une succession d’emplois temporaires, soit un ou plusieurs épisodes de chômage après une première phase d’emploi stable (Avenel, Rémy, 2014).

Tableau 1 : Caractéristiques des personnes entrant en contrat aidé et dans une SIAE

Tableau 1 : Caractéristiques des personnes entrant en contrat aidé et dans une SIAE

* L’ancienneté de l’inscription à Pôle emploi est calculée sur les salariés recrutés par une SIAE en 2011 car cette variable n’était pas disponible en 2010. Néanmoins, la structure des embauches étant relativement stable, cette ancienneté est probablement proche de celle qui aurait été observée en 2010. Note : les salariés des ACI sont comptabilisés à la fois dans les 1re, 3e et 4e colonnes puisqu’en 2010 les ACI recrutaient encore en contrat aidé. Ils représentaient alors 17 % des entrées en contrat aidé du secteur non marchand. Lecture : 33 % des entrants en EI et en ACI sont des femmes. Champ : pour l’IAE, les salariés en parcours d’insertion recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée et n’ayant pas cessé son activité à la date de l’enquête ; pour les contrats aidés, les entrants en contrat aidé en 2010.

Sources : pour l’IAE, enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares, et base des conventions individuelles d’embauches en contrat aidé et fiches « salariés » des EI, AI et ETTI, Agence de services et de paiement (ASP) ; pour les contrats aidés, base des conventions individuelles d’embauches en contrat aidé, ASP.

7Une certaine hétérogénéité existe parmi les personnes accueillies par les SIAE. Si, de manière générale, ces structures doivent concilier deux objectifs – l’insertion de publics en difficulté et la pérennité de leur activité – elles développent des stratégies différentes en termes de public accueilli, d’accompagnement et de développement économique (cf. pour la Belgique, Davister et al., 2012 et pour la France, Rémy, 2017a). Chaque type de structure se spécialise dans des domaines différents : les ACI dans les métiers verts, les AI dans les emplois de maison et les ETTI dans les emplois d’ouvrier du bâtiment, un quart de leurs salariés en insertion exerçant ce type de métier (Avenel, Rémy, 2015). Les salariés des EI ont en revanche des métiers plus divers : ils sont aussi nombreux à occuper un poste d’agent de tri ou de conditionnement qu’un poste d’agent d’entretien. Par ailleurs, si les EI et les ACI sont des structures de production, les AI et les ETTI sont des structures de mise à disposition et leurs salariés doivent pouvoir être placés en mission auprès d’entreprises ou de particuliers, ce qui nécessite une certaine autonomie. Ces différentes contraintes se traduisent dans les caractéristiques des personnes qu’elles accueillent. Ainsi, les salariés des AI et des ETTI sont plus proches de l’emploi que ceux des ACI et EI : ils étaient plus souvent en emploi avant leur entrée dans la structure, tandis que les seconds étaient davantage au chômage (tableau 1). Les salariés des AI et des ETTI bénéficiaient également moins fréquemment d’un minimum social et cumulaient moins de difficultés sociales ou d’accès à l’emploi (Avenel, Rémy, 2014).

… et ayant un parcours très différent selon la SIAE vers laquelle ils sont orientés

  • 11  Plus précisément, les enquêtés ont été interrogés sur l’accompagnement reçu au sein de la structur (...)

8À leur entrée dans une structure de l’IAE, les personnes entament un parcours d’insertion dont l’objectif principal est de favoriser leur accès à un emploi « classique ». Selon leurs difficultés, elles peuvent bénéficier de contacts réguliers avec le personnel permanent de la structure, qui est disponible pour les accompagner dans différents domaines11 : pour leur donner des conseils sur le travail à effectuer (ce que nous désignons dans la suite de l’article par l’expression « accompagnement sur le poste de travail ») ; pour les aider à régler des problèmes personnels – soutien dans les démarches administratives, résolution de problèmes de santé, de logement, etc. – ou pour définir un projet professionnel (« accompagnement professionnel »). Les différents types d’accompagnement sont liés : d’après Maryline Meyer (2009), les problèmes sociaux des salariés en insertion peuvent se révéler lors de l’exercice de l’emploi et être résolus par la suite, ce qui en retour améliore leur intégration au travail et facilite l’accompagnement sur le poste de travail.

  • 12  Il peut même être quotidien dans les EI et les ACI, les salariés travaillant au sein de la structu (...)

9Les salariés des ACI et des EI, plus éloignés de l’emploi, déclarent plus souvent avoir bénéficié d’un accompagnement (tableau 2). Néanmoins, la fréquence de l’accompagnement est aussi liée à la nature du travail effectué ou à la durée du parcours d’insertion. Les ETTI proposant des missions auprès d’entreprises clientes et les AI des mises à disposition auprès de particuliers, le travail se déroule essentiellement à l’extérieur de la structure d’accueil. Les contacts avec leur personnel y sont par conséquent moins fréquents qu’au sein d’un ACI ou d’une EI, où le travail s’effectue généralement sur place. De plus, les parcours y sont en moyenne moins longs, ce qui limite les possibilités d’instaurer des relations rapprochées avec le personnel permanent (Avenel, Rémy, 2014). Ces facteurs jouent également sur la nature et l’intensité de l’accompagnement dispensé. Les salariés des ACI et des EI bénéficient ainsi de l’accompagnement le plus diversifié. L’accompagnement social y est plus répandu, en lien avec le public accueilli. Quel que soit le type de structure de l’IAE considéré, le rythme de l’accompagnement sur le poste de travail est le plus soutenu12, tandis que celui de l’accompagnement social dépend davantage des besoins des salariés (Rémy, 2017b).

Tableau 2 : Nature de l’accompagnement reçu et des formations suivies par les salariés

Tableau 2 : Nature de l’accompagnement reçu et des formations suivies par les salariés

1. Formation au certificat d’aptitude à la conduite en sécurité, hygiène et sécurité ou gestes et postures, aux premiers secours ou autre formation (ménage, repassage, etc.). 2. Formation au permis de conduire ou en informatique (Internet, Word, Excel, etc.). 3. Formation de remise à niveau (en mathématiques, en français, etc.) et cours pour apprendre le français. 4. Formation pour obtenir un diplôme ou une qualification. Lecture : 80 % des salariés des EI et des ACI ont bénéficié d’au moins un accompagnement et 61 % d’un accompagnement sur leur poste de travail. Champ : salariés en parcours d’insertion recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée et n’ayant pas cessé son activité à la date de l’enquête.

Source : enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares.

10Les formations proposées par les SIAE sont de nature très diverse : de la formation directement liée au poste de travail à la formation qualifiante, en passant par celle permettant d’acquérir des compétences clés comme une remise à niveau en français ou en mathématiques. Elles diffèrent de la formation professionnelle « classique » au sens où elles visent moins à augmenter la productivité du travailleur sur son poste qu’à lui permettre de devenir autonome, de se sentir compétent et de favoriser son insertion sociale (Meyer, 2009). Ceci explique qu’elles soient plus fréquentes et plus diversifiées. Ce sont d’ailleurs les salariés des ACI et des EI qui ont cumulé le plus de formations, quelle que soit leur nature, au cours de leur parcours. Comme mentionné plus haut, les caractéristiques des salariés en insertion, la durée de leur parcours ou encore la nature de l’activité des différentes SIAE peuvent expliquer ces différences d’accès à la formation. D’autres facteurs peuvent également intervenir. Du côté des SIAE, il peut s’agir de difficultés pour financer ou monter les formations, difficultés qui sont plus souvent mentionnées par les responsables des AI (Rémy, 2017a). Le moindre accès à la formation peut également être lié aux salariés : certains ont peut-être déjà suivi les formations proposées et n’ont pas souhaité les suivre de nouveau ; d’autres ont pu simplement les refuser, notamment en raison de situations d’échec ou de décrochage au cours de leur parcours scolaire antérieur (Claudon et al., 2013).

  • 13  Pour l’accompagnement, l’écart avec les bénéficiaires d’un contrat aidé marchand est de 33 points (...)

11De manière générale, les salariés de l’IAE sont davantage accompagnés et formés que ceux passés par un contrat aidé du secteur marchand et même non marchand, bien que dans ce dernier secteur les salariés bénéficient d’un meilleur suivi13 (voir tableau 2 et Bayardin, 2013). Toutefois, nous l’avons vu, l’accès à l’accompagnement et à la formation dépend du type de SIAE vers lequel s’orientent les salariés en insertion. Nous précisons ces éléments dans la section suivante, en montrant de plus qu’il existe une certaine variabilité au sein même de chaque type de SIAE.

Des accompagnements et des formations adaptés aux difficultés des salariés en insertion

12Afin de mieux analyser les parcours proposés aux salariés en insertion selon les problèmes auxquels ils sont confrontés, une typologie a été élaborée à l’aide d’une classification ascendante hiérarchique (encadré 3). Cette classification est réalisée sur l’ensemble des salariés, qu’ils soient employés par une EI, une ETTI, une AI ou encore un ACI, pour identifier sans a priori la manière dont ces structures accueillent et prennent en charge les personnes entrées dans le dispositif. Cinq types de profils de salariés en insertion se dégagent en fonction de leurs caractéristiques, des difficultés qu’ils rencontrent et des parcours d’accompagnement et de formation dont ils bénéficient.

Encadré 3
La construction de la classification ascendante hiérarchique (CAH)

  • 14  Cette classification est dite ascendante car elle part de l’individu pour remonter successivement (...)
  • 15  Cette méthode permet de faire en sorte que chaque catégorie de variables retenue ait la même influ (...)

La typologie en cinq groupes a été élaborée à l’aide d’une classification ascendante hiérarchique (CAH). Une analyse factorielle multiple (AFM) a d’abord permis, à partir des relations entre les différentes variables retenues pour l’analyse, de projeter les données relatives aux caractéristiques des salariés en insertion et à leur parcours dans un espace de dimension plus réduite, structuré autour de différents axes. Les coordonnées des salariés en insertion sur les neuf premiers axes de l’AFM, qui résument 40 % de l’information initiale, ont ensuite été utilisées pour réaliser la CAH14 (avec la méthode de Ward pour regrouper les individus). Deux catégories de variables actives ont été mobilisées dans cette AFM15 :
– les caractéristiques objectives des individus connues par le prescripteur : sexe, âge, nationalité, niveau de formation, handicap, perception d’un minimum social, bénéfice de la couverture maladie universelle (CMU), problèmes de santé, situation familiale, conditions de logement, parcours professionnel antérieur, situation avant l’entrée dans la structure ;
– les différentes composantes du parcours d’insertion : durée du parcours, type de formation, présence et fréquence d’un accompagnement sur le poste de travail, personnel ou professionnel.
Le type de structure n’a pas été retenu comme variable active, afin d’avoir une vision d’ensemble du dispositif sans segmenter les groupes selon cette dimension et ainsi de pouvoir regrouper les salariés ayant les caractéristiques et les parcours les plus proches indépendamment du type de structure qui les a employés. Des variables supplémentaires, non mobilisées lors de l’élaboration des groupes, ont été introduites pour illustrer les différents groupes : difficultés rencontrées pour trouver un emploi déclarées par les salariés en insertion, type de structure, métier exercé par le salarié dans la structure, etc.
Les déclarations des employeurs ont également été rapprochées de celles de leurs salariés. En effet, l’enquête permet de connaître la manière dont les premiers caractérisent leurs pratiques en matière d’accompagnement et de formation et de les mettre en regard du ressenti du salarié quant au déroulement de son parcours. Néanmoins, les déclarations des employeurs concernent l’ensemble de leurs salariés et non spécifiquement le ou les salariés interrogés dans le volet « salariés » de l’enquête. Il est donc possible que les déclarations des deux parties diffèrent, le salarié interrogé ayant pu ne pas bénéficier des actions généralement entreprises par son employeur.

Une première classe composée d’individus proches de l’emploi et peu accompagnés

  • 16  Les difficultés sociales mentionnées aux employeurs comme pouvant donner lieu à une prise en charg (...)

13Cette première classe regroupe 38 % des salariés en insertion et compte le plus de couples avec enfants. La majorité d’entre eux a connu un parcours professionnel marqué par l’emploi, que ce soit sur une longue période ou juste avant l’entrée dans la structure (tableau 3). Ce sont ceux qui rencontraient le moins de difficultés pour trouver un emploi avant leur entrée dans la structure, qu’il s’agisse des différents freins à l’emploi (absence de travail dans la branche, niveau de formation insuffisant, etc.) ou des problèmes de mobilité (absence de permis de conduire, de véhicule, impossibilité de déménager). Leur motif d’entrée dans le dispositif est plus souvent économique : près de 45 % d’entre eux y sont entrés principalement pour percevoir un salaire, contre un tiers dans les autres classes. Leur parcours d’insertion a généralement été court (tableau 4), ce qui contribue à expliquer qu’ils soient les moins nombreux à avoir bénéficié d’un accompagnement ou d’une formation, quelle que soit leur nature (au-delà de leur moindre éloignement du marché du travail). Cette relative faiblesse de l’accompagnement et de la formation est confirmée par les déclarations de leurs employeurs, qui sont moins nombreux à indiquer les accompagner sur leurs différentes difficultés sociales16, à mettre en place des entretiens de suivi de parcours et des bilans socioprofessionnels fréquents ou encore à leur désigner un tuteur.

Tableau 3 : Caractéristiques des salariés en insertion en fonction des cinq classes (1/2)

Tableau 3 : Caractéristiques des salariés en insertion en fonction des cinq classes (1/2)

Lecture : 51 % des salariés de la classe « individus proches de l’emploi peu accompagnés » sont des femmes. Champ : salariés en parcours d’insertion recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée et n’ayant pas cessé son activité à la date de l’enquête.

Sources : base des conventions individuelles d’embauches en contrat aidé et fiches « salariés » des EI, AI et ETTI, ASP ; enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares.

Tableau 3 : Caractéristiques des salariés en insertion en fonction des cinq classes (2/2)

Tableau 3 : Caractéristiques des salariés en insertion en fonction des cinq classes (2/2)

Lecture : 51 % des salariés de la classe « individus proches de l’emploi peu accompagnés » sont des femmes. Champ : salariés en parcours d’insertion recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée et n’ayant pas cessé son activité à la date de l’enquête.

Sources : base des conventions individuelles d’embauches en contrat aidé et fiches « salariés » des EI, AI et ETTI, ASP ; enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares.

Tableau 4 : Caractéristiques du parcours des salariés en fonction des cinq classes (1/2)

Tableau 4 : Caractéristiques du parcours des salariés en fonction des cinq classes (1/2)

Lecture : 9 % des salariés de la classe « individus proches de l’emploi peu accompagnés » travaillent dans une EI. 64 % des SIAE employant les salariés de cette classe déclarent leur désigner un tuteur en interne. Champ : salariés en parcours d’insertion recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée et n’ayant pas cessé leur activité à la date de l’enquête.

Sources : base des conventions individuelles d’embauche en contrat aidé et fiches « salariés » des EI, AI et ETTI, ASP ; enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares.

Tableau 4 : Caractéristiques du parcours des salariés en fonction des cinq classes (2/2)

Tableau 4 : Caractéristiques du parcours des salariés en fonction des cinq classes (2/2)

Lecture : 9 % des salariés de la classe « individus proches de l’emploi peu accompagnés » travaillent dans une EI. 64 % des SIAE employant les salariés de cette classe déclarent leur désigner un tuteur en interne. Champ : salariés en parcours d’insertion recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée et n’ayant pas cessé leur activité à la date de l’enquête.

Sources : base des conventions individuelles d’embauche en contrat aidé et fiches « salariés » des EI, AI et ETTI, ASP ; enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares.

Une classe de bénéficiaires de minima sociaux accompagnés selon leurs besoins

14D’après nos données, 11 % des salariés en insertion font partie de cette classe composée à parts égales d’hommes et de femmes, qui sont par ailleurs un peu plus souvent de nationalité étrangère et ont davantage de problèmes pour comprendre le français. Ils bénéficient plus fréquemment de minima sociaux. Plus nombreux à vivre seuls avec un ou plusieurs enfants, leur parcours professionnel comprend plus souvent un passage par le chômage. Les salariés de cette classe sont particulièrement confrontés à des difficultés sociales (problèmes de logement, financiers, de garde d’enfants, etc.). Ils restent plus longtemps dans leur structure d’insertion, ce qui permet la mise en place d’un accompagnement systématique ainsi que de nombreuses formations. La diversité des formations proposées est confirmée par les déclarations de leurs employeurs. Dans cette classe, la fréquence de l’accompagnement n’est pas définie a priori par la structure mais adaptée aux besoins des salariés. Leurs responsables déclarent d’ailleurs plus souvent leur désigner un tuteur et réaliser des entretiens de suivi de parcours et des bilans socioprofessionnels rapprochés. La fréquence de l’accompagnement professionnel déclaré par les salariés recoupe les actions mises en place par leurs employeurs. Ces derniers sont plus nombreux à faire appel à Pôle emploi pour préparer la sortie de leurs salariés (évaluation en milieu de travail, ateliers de recherche d’emploi, bilans de compétences, etc.) et les aident davantage à maintenir leur lien avec cet organisme afin qu’ils ne se trouvent pas isolés après leur sortie. Les salariés de cette classe sont les plus nombreux à travailler dans une EI, tandis que les ACI en emploient près de la moitié (contre un tiers en moyenne).

Une classe de bénéficiaires de minima sociaux systématiquement accompagnés

  • 17  Les SIAE employant les salariés de cette classe sont d’ailleurs celles qui déclarent les entretien (...)

15Dans cette classe regroupant 20 % des salariés en insertion, sont surreprésentés les hommes seuls, les personnes ayant un niveau de diplôme inférieur ou égal au CAP et les bénéficiaires de minima sociaux. Plus souvent au chômage avant leur entrée dans la structure, les salariés de cette classe rencontrent autant de difficultés que ceux de la classe précédente, notamment sociales. Ils évoquent en revanche davantage l’impossibilité de déménager pour trouver un travail. Ils sont moins souvent entrés dans la structure pour des raisons purement monétaires, puisqu’ils ne sont qu’un quart à évoquer la perception d’un salaire comme motif principal d’entrée. Leur parcours d’insertion est relativement long : plus de 90 % d’entre eux ont passé au moins six mois dans la structure. Cette durée de parcours favorise la mise en place d’un accompagnement quasi-systématique dispensé à une fréquence déterminée par la structure17 et non en fonction des besoins comme dans la classe précédente. Les salariés ont plus souvent bénéficié de formations, en particulier aux savoirs de base et généralistes, une caractéristique également mentionnée par leurs employeurs. Alors que la formation professionnelle favorise traditionnellement plus les salariés les plus qualifiés (Gossiaux, Pommier, 2013), les SIAE semblent ainsi former davantage les travailleurs les plus en difficulté. Il s’agit plus souvent ici d’ACI.

Une classe de jeunes plus qualifiés, qui sont accompagnés professionnellement

  • 18  Leurs employeurs déclarent d’ailleurs assez souvent que la durée des parcours est insuffisante pou (...)

16Cette classe, comptant 20 % des salariés, est constituée très majoritairement de jeunes hommes, de niveau CAP-BEP. Les salariés de cette classe sont moins souvent bénéficiaires d’un minimum social. Leur jeune âge contribue à expliquer cette situation ainsi que leur cohabitation très fréquente avec leur famille : ils sont logés par celle-ci ou à titre gratuit dans 90 % des cas, contre 10 % pour les autres classes. Leur parcours professionnel antérieur est plus souvent marqué par l’inactivité. De fait, ils étaient plus souvent en formation ou inactifs juste avant leur entrée dans la structure. Un peu plus nombreux que les autres salariés à évoquer l’absence de travail dans leur branche, ils sont les moins concernés par les difficultés sociales. Leur parcours d’insertion au sein de la structure dure généralement moins de douze mois18 et ils sont d’ailleurs les plus nombreux à en être sortis à la date de l’enquête. Même s’ils ont été moins souvent formés que l’ensemble des salariés en insertion, ils l’ont été un peu plus souvent que ceux de la première classe (« individus proches de l’emploi peu accompagnés »). Rares sont ceux qui ont bénéficié de formations générales et aux savoirs de base, ce que confirment leurs employeurs, qui les leur proposent moins souvent. En revanche, la moitié d’entre eux a bénéficié d’un accompagnement (souvent unique), ce qui n’est pas sans lien avec le fait que leurs employeurs leur désignent souvent un tuteur. Ils sont plus fréquemment salariés d’une ETTI.

Une dernière classe composée de seniors accompagnés une fois sur deux

  • 19  La mesure objective de l’état de santé est réalisée grâce à deux questions de l’enquête : l’une su (...)
  • 20  Leurs employeurs déclarent moins souvent les accompagner exclusivement en interne sur ces difficul (...)

17Dans cette classe, qui regroupe 11 % des salariés en insertion, les personnes âgées de cinquante ans ou plus, en situation de handicap et en mauvaise santé19 sont surreprésentées. Les problèmes de santé sont d’ailleurs plus fréquemment mentionnés parmi les difficultés d’accès à l’emploi – par plus de cinq salariés sur dix contre moins d’un sur dix dans les autres classes. Ces salariés sont les plus touchés par les problèmes de discrimination et par les difficultés sociales, et vivent plus fréquemment seuls. Leur parcours professionnel antérieur est plus souvent marqué par l’emploi ou par un épisode d’emploi long précédant une ou plusieurs périodes de chômage. Du fait de leur âge et de leur expérience, leur entrée dans la structure d’insertion vise moins l’acquisition d’une expérience professionnelle. La moitié des salariés de cette classe bénéficie d’un accompagnement, qui est un peu plus souvent de nature sociale20 et moins souvent professionnel que dans la classe précédente. Les SIAE qui les emploient déclarent d’ailleurs moins souvent encourager le maintien de leur lien avec Pôle emploi, notamment via des entretiens réalisés au sein de la structure. Un tiers d’entre eux a suivi une formation, alors majoritairement au poste de travail, comme ceux de la classe précédente. Lorsqu’ils ont été dispensés, accompagnement et formation ont été le plus souvent uniques.

18Ces différentes classes mettent en évidence le fait que, dans l’ensemble, les structures adaptent l’accompagnement et la formation dispensés aux caractéristiques des salariés embauchés, réservant l’accompagnement le plus resserré à ceux présentant le plus de difficultés sociales ou d’accès à l’emploi. Une telle graduation de l’accompagnement et de la formation dispensés en fonction des difficultés rencontrées par les bénéficiaires existe également chez les employeurs de salariés en contrat aidé (Benoteau, Rémy, 2015).

Des effets subjectifs plus marqués pour les salariés les plus éloignés de l’emploi

  • 21  Cette section ne permet pas de mesurer isolément l’effet des parcours proposés par les structures (...)

19Dans quelle mesure le fait d’avoir tel ou tel profil de bénéficiaire (c’est-à-dire d’appartenir à telle ou telle classe) joue-t-il, « toutes choses égales par ailleurs », sur l’insertion professionnelle à la sortie de la structure de l’IAE et sur l’appréciation que l’on porte sur le parcours en son sein21 ? Cette section entend apporter des éléments de réponse à cette question en analysant différentes variables de résultat (situation professionnelle, mais aussi sentiment d’avoir acquis de nouvelles compétences, d’avoir résolu certaines difficultés sociales, etc.) en contrôlant d’autres facteurs susceptibles de les affecter : les difficultés sociales et professionnelles des salariés, l’objectif poursuivi lors de leur embauche dans la SIAE, la manière dont ils y sont entrés (orientation par Pôle emploi, bouche-à-oreille, etc.), les caractéristiques de la SIAE qui les a employés (taille, secteur, etc.).

  • 22  La question associée est la suivante : « Par rapport à votre situation avant votre entrée dans la (...)

20La situation professionnelle du salarié en insertion n’est connue qu’à la date d’interrogation et par le biais de la question suivante : « que faites-vous aujourd’hui ? ». Dix modalités de réponse sont prévues dans l’enquête, distinguant l’emploi obtenu selon son type (CDD, CDI, etc.), le chômage, l’inactivité ou encore la reprise d’études, une formation ou un stage. D’autres variables de résultat plus subjectives sont également disponibles, comme la perception de l’évolution de la situation professionnelle suite au passage par la structure22 ou encore la satisfaction à l’égard de ce passage. En effet, si les résultats en termes d’insertion dans l’emploi de l’IAE peuvent paraître décevants à court terme par rapport à d’autres dispositifs de politique de l’emploi, ce dispositif, par la nature globale de l’accompagnement proposé, peut permettre aux bénéficiaires de lever leurs principales difficultés d’accès à l’emploi et ainsi de retrouver confiance en eux. Même si l’équilibre retrouvé peut parfois être fragile, ce sont autant d’obstacles susceptibles d’être levés pour un futur accès à l’emploi. Précisément, les salariés sont invités à donner leur appréciation sur l’éventuelle survenue de plusieurs changements positifs : « Ce passage vous a permis… d’avoir un emploi, d’acquérir de nouvelles compétences, de retrouver confiance en vous et de vous sentir utile, etc. ».

  • 23  Les responsables des ressources humaines d’entreprises d’insertion belges qu’ils ont interrogés es (...)

21De manière générale, les salariés des classes « bénéficiaires de minima sociaux accompagnés selon leurs besoins » et « bénéficiaires de minima sociaux systématiquement accompagnés » portent le regard le plus favorable sur leur passage par l’IAE et ce quelle que soit la variable de résultat considérée (tableaux 5, 6a et 6b). Ces salariés plus accompagnés et formés que les autres tirent le plus de bénéfices de leur parcours d’insertion, que ce soit en termes d’amélioration de leur situation personnelle ou professionnelle, de satisfaction globale ou encore d’avantages spécifiques comme la levée de freins sociaux. Les différences par rapport aux autres classes sont particulièrement marquées en matière d’acquisition des compétences, de confiance en soi retrouvée ainsi qu’à l’égard du règlement des problèmes administratifs. Le fait que les salariés les plus en difficulté profitent davantage de leur passage par la SIAE a déjà été mis en évidence par A. Platteau et M. Nyssens (2004)23. Par ailleurs, sachant que les salariés de la classe « individus proches de l’emploi peu accompagnés » sont les plus proches de l’emploi, le fait que les « bénéficiaires de minima sociaux accompagnés selon leurs besoins » et les « bénéficiaires de minima sociaux systématiquement accompagnés » ne s’en différencient pas au regard de l’accès à l’emploi est un bon résultat, puisqu’ils s’insèrent aussi bien qu’eux malgré une situation initiale sur le marché du travail moins favorable.

Tableau 5 : Situation professionnelle des salariés selon la classe à laquelle ils appartiennent (odds ratio)

Tableau 5 : Situation professionnelle des salariés selon la classe à laquelle ils appartiennent (odds ratio)

1. L’emploi stable est ici défini comme l’obtention d’un CDI, le fait d’être à son compte ou d’avoir créé son entreprise. Note : ne sont ici présentés que les résultats concernant l’appartenance à une classe donnée de la typologie. Le modèle estimé est un logit multinomial avec le chômage comme situation de référence (situation qui concerne 48 % des salariés sortis). Il comprend également comme variables de contrôle (pour les résultats détaillés voir Rémy, 2017b) : les difficultés rencontrées par le salarié avant son entrée dans la SIAE, son objectif principal lors de l’entrée, le métier exercé dans la SIAE, la taille de cette dernière, son ancienneté dans l’IAE, son secteur d’activité ainsi que son type (EI, AI, ETTI ou ACI). Les symboles *, ** et *** représentent les seuils de significativité statistique à 10, 5 et 1 %. Champ : salariés en parcours d’insertion, sortis de la structure à la date de l’enquête et recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée en 2010 et n’ayant pas cessé son activité à la date de l’enquête.

Source : enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares.

Tableau 6a et 6b : Estimation de la probabilité d’une réponse positive aux variables de résultat (odds ratios)

Tableau 6a et 6b : Estimation de la probabilité d’une réponse positive aux variables de résultat (odds ratios)

Note : ne sont ici présentés que les résultats concernant l’appartenance à une classe donnée de la typologie. Les modèles logistiques estimés pour chaque variable de résultat comprennent les mêmes variables de contrôle que celles du tableau précédent, auxquelles s’ajoute la situation à la date de l’enquête (encore dans la SIAE, en emploi, au chômage, etc.). Les résultats détaillés des estimations sont disponibles dans Rémy (2017b). Les symboles *, ** et *** représentent les seuils de significativité statistique à 10, 5 et 1 %. Cham : salariés en parcours d’insertion recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée en 2010 et n’ayant pas cessé son activité à la date de l’enquête.

Source : enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares.

22Les salariés de la classe « seniors accompagnés une fois sur deux » portent le jugement le plus sévère sur leur passage par une structure de l’IAE et estiment notamment moins souvent qu’il leur a permis d’améliorer leur situation professionnelle et personnelle. Ceci peut en partie s’expliquer par le fait que ces bénéficiaires sont moins souvent en emploi à la date de l’enquête que la moyenne des autres salariés en insertion, et qu’ils sortent plus souvent vers l’inactivité. De plus, compte tenu de leurs caractéristiques – ils étaient plus expérimentés et plus souvent en emploi avant leur entrée –, ils sont probablement plus exigeants à l’égard de leur passage par l’IAE. Ils sont de fait moins nombreux à considérer que le dispositif leur a permis de retrouver confiance en eux et de se sentir utile. Cela peut notamment s’expliquer par le fait qu’ils ont été moins souvent accompagnés et formés (que ceux des deux classes de bénéficiaires de minima sociaux en particulier), deux dimensions qui jouent sur l’opinion des salariés concernant le dispositif (Avenel, Rémy, 2014 et 2015 ; Benoteau, Rémy, 2015). Enfin, ils sont en moins bonne santé et de précédents travaux ont montré qu’un état de santé dégradé allait de pair avec une moindre satisfaction à l’égard de la situation professionnelle ou personnelle (Benoteau, Rémy, 2013 ; Avenel, Rémy, 2015).

23Comme leurs aînés, les jeunes de la classe « jeunes qualifiés accompagnés professionnellement » accèdent moins souvent à l’emploi mais sont plus satisfaits des compétences professionnelles acquises. Le passage par l’IAE constitue pour certains une première expérience professionnelle. Ils enchaînent également plus souvent sur une formation à l’issue de leur parcours d’insertion (comme les salariés des deux classes de bénéficiaires de minima sociaux). À l’image de ces derniers également, ils estiment plus souvent que le passage par le dispositif leur a permis de régler leurs problèmes administratifs. En revanche, ils déclarent moins fréquemment que leurs conditions de logement se sont améliorées (ils étaient en partie hébergés dans leur famille et n’ont pas nécessairement acquis les moyens d’une autonomie résidentielle confortable) et se disent moins souvent très satisfaits de leur parcours d’insertion. Ceci pourrait s’expliquer, pour ceux qui sont sortis de la structure, par leur moindre accès à l’emploi ou encore par leur niveau de formation. Ils sont un peu plus diplômés et un niveau de diplôme plus élevé va de pair avec davantage d’exigences à l’égard des dispositifs de politique de l’emploi (voir les travaux précédemment cités). Par ailleurs, certains travaux ont montré que les jeunes en « emplois jeunes » se déclaraient moins satisfaits de leurs conditions de travail que les autres bénéficiaires de contrats aidés non marchands, du fait d’attentes professionnelles plus fortes (Simonin, 2002).

24La richesse des informations disponibles dans l’enquête menée par la Dares sur le secteur de l’IAE permet d’étudier de manière approfondie l’accompagnement et la formation dont les salariés bénéficient au cours de leur parcours d’insertion. Une classification réalisée sur l’ensemble de ces salariés permet de souligner leur diversité et de distinguer cinq profils, qui montrent que les salariés sont généralement orientés vers les structures les plus à même de les accompagner.

25Les moyens que les responsables de structures déclarent employer pour accompagner et former leurs salariés sont cohérents avec la perception qu’en ont leurs salariés. Ces derniers ne portent pas le même regard sur le dispositif selon la classe à laquelle ils appartiennent. L’enquête permet en effet d’élargir l’évaluation du dispositif à des dimensions plus subjectives (satisfaction, levée des freins d’accès à l’emploi, etc.), au-delà des indicateurs usuels d’insertion professionnelle. Ce sont les salariés les plus en difficulté qui, ayant bénéficié de l’accompagnement le plus resserré et du plus grand nombre de formations, estiment que le passage par l’IAE leur a le plus apporté, que ce soit en termes d’acquisition de compétences professionnelles, de résolution de difficultés sociales ou encore d’évolution de leur situation personnelle. Les effets sur la situation professionnelle à la sortie de la structure sont moins positifs, même si « toutes choses égales par ailleurs », ces salariés ne sont pas moins souvent en emploi que les salariés les moins suivis (qui sont pourtant dans une situation initiale plus favorable à l’égard du marché du travail). Ainsi, au-delà de l’accès à l’emploi à court terme, l’IAE permet à ses bénéficiaires de poser un regard plus positif sur leur situation globale et de retrouver confiance en eux, et ce d’autant plus que leur situation initiale était défavorable.

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Notes

1  Les travaux du réseau de chercheurs émergence des entreprises sociales (Emes) ont constaté le même type d’évolution dans la plupart des pays européens. Ce réseau a défini le concept d’« entreprise sociale d’insertion » ou Work Integration Social Enterprise (WISE) qui couvre les structures de l’IAE et permet de comparer les structures existant dans les différents pays et d’analyser leurs évolutions. D’après ces travaux, le nombre de structures de l’IAE a augmenté dans les années 1970 et 1980, sous l’impulsion d’acteurs de la société civile (travailleurs sociaux, syndicats, militants associatifs, etc.) pour pallier les manques de la politique de l’emploi traditionnelle vis-à-vis des personnes défavorisées sur le marché du travail et ces structures ont ensuite été légitimées par la plupart des États. Le champ des travaux couvrait les 15 États membres de l’Union européenne au moment de la constitution du réseau en 1996 (Nyssens, Defourny, Gardin, Laville, 2012).

2  Ce conventionnement est la base du contrat entre l’État et les structures de l’IAE et permet la reconnaissance juridique de ces dernières. Il est accordé sur la base du projet d’insertion proposé par la structure, pour une durée d’un à trois ans, et réalisé par les services de l’État au niveau départemental.

3  La réforme de 2014 a simplifié et harmonisé le financement accordé par l’État aux différentes structures de l’IAE. Depuis cette réforme, les ateliers et chantiers d’insertion (ACI) ne recrutent plus en contrat aidé mais en contrat à durée déterminée d’insertion (CDDI). Seuls les personnels permanents de la structure autres que les salariés en insertion peuvent être recrutés en contrat aidé. Toutefois, la baisse annoncée de l’enveloppe dédiée aux contrats aidés ne devrait a priori pas non plus affecter le personnel permanent du secteur, puisque les structures de l’IAE sont mentionnées parmi les employeurs ayant la priorité sur ces contrats.

4  À partir d’entretiens qualitatifs réalisés auprès de salariés et du personnel en charge de leur accompagnement dans huit structures, ces auteurs étudient le contenu de l’accompagnement proposé par les SIAE. Ils montrent que cet accompagnement doit concilier deux dimensions : les « règles d’en bas », liées à l’apprentissage du métier « sur le tas », et les « règles d’en haut », fixées par les principes du parcours d’insertion (contrat à durée limitée, suivi social du salarié, mise en place de formations selon ses besoins). Ils concluent que l’accompagnement réalisé pendant le parcours produit des effets bénéfiques en matière de difficultés sociales et de formation tant que les salariés sont dans la structure, mais ne leur permet pas d’améliorer leur situation à la sortie.

5  C’est-à-dire un emploi en contrat à durée indéterminée (CDI), un emploi en contrat à durée déterminée (CDD), une mission d’intérim de longue durée (par exemple de plus de six mois), une titularisation dans la fonction publique, ou une création d’entreprise.

6  Les auteures montrent que la formation dispensée par les SIAE peut notamment augmenter les chances d’accès à une formation ultérieure.

7  Des travaux qualitatifs existent, mais sont centrés sur la spécificité des entreprises sociales (cf. par exemple Davister et al., 2004 ; Gomel, 2004 et Defourny, Nyssens, 2013). Ces auteurs font pour la plupart partie du réseau européen EMES mentionné dans la note de bas de page 1.

8  L’étude porte donc sur la situation du secteur avant la réforme de 2014, dont on peut toutefois penser qu’elle n’a pas profondément modifié le mode de fonctionnement de ce dernier.

9  Selon les auteurs de ce rapport, le critère de l’accès à l’emploi (voire à l’emploi durable) actuellement retenu par l’État n’est pas suffisant pour apprécier la performance d’une SIAE. L’insertion sociale (résolution des problèmes de logement, d’endettement, familiaux, etc.) et les gains en autonomie des salariés doivent également être pris en compte. La réforme récente du financement des structures va dans ce sens, en prévoyant que l’aide soit modulée, notamment en fonction des efforts d’accompagnement socioprofessionnel des structures.

10  Les contrats aidés sont des dispositifs subventionnant l’embauche de personnes rencontrant des difficultés d’accès à l’emploi. Ils peuvent être conclus par des entreprises (contrats aidés « marchands ») ou par des collectivités locales, des associations et des établissements du secteur public (contrats aidés « non marchands »), les premiers étant moins subventionnés que les seconds.

11  Plus précisément, les enquêtés ont été interrogés sur l’accompagnement reçu au sein de la structure de la manière suivante : « depuis que vous êtes arrivé dans la structure, avez-vous eu des contacts réguliers avec des personnes de la structure chargées de… ? ». Étaient ensuite cités les trois domaines d’accompagnement commentés dans le texte. Le salarié est considéré comme ayant été accompagné s’il a bénéficié de contacts réguliers avec le personnel permanent dans au moins un des trois domaines.

12  Il peut même être quotidien dans les EI et les ACI, les salariés travaillant au sein de la structure et étant suivis sur leur poste par des encadrants techniques chargés de leur faire acquérir des habitudes de travail.

13  Pour l’accompagnement, l’écart avec les bénéficiaires d’un contrat aidé marchand est de 33 points et de 14 points avec ceux d’un contrat aidé non marchand. Dans le cas de la formation, les écarts sont respectivement de 21 et 8 points.

14  Cette classification est dite ascendante car elle part de l’individu pour remonter successivement jusqu’à l’ensemble des individus, et hiérarchique car chaque groupe d’individus constitué est inclus dans le groupe suivant.

15  Cette méthode permet de faire en sorte que chaque catégorie de variables retenue ait la même influence. Par exemple, même si la première catégorie de variables contient davantage de variables, elle aura la même influence dans l’analyse que la seconde.

16  Les difficultés sociales mentionnées aux employeurs comme pouvant donner lieu à une prise en charge étaient les suivantes : problèmes d’addiction, de santé, familiaux, d’isolement social, de mobilité, d’endettement, de logement, problèmes administratifs ou d’accès aux droits, pour comprendre le français et avec la justice. Plus de 40 % des SIAE employant les salariés de cette classe déclarent que leur fréquence d’accompagnement de leurs salariés sur ces difficultés est faible, contre 30 % de celles des autres classes (pour une définition précise de cet indicateur, voir Rémy, 2017b).

17  Les SIAE employant les salariés de cette classe sont d’ailleurs celles qui déclarent les entretiens et les bilans les plus fréquents et délivrent le plus souvent à leurs salariés un relevé des compétences acquises à leur sortie de la structure. De manière générale, elles les préparent également davantage à leur sortie (aide à la recherche d’un emploi auprès de partenaires, techniques de recherche d’emploi, etc.).

18  Leurs employeurs déclarent d’ailleurs assez souvent que la durée des parcours est insuffisante pour consolider les parcours.

19  La mesure objective de l’état de santé est réalisée grâce à deux questions de l’enquête : l’une sur le fait d’être confronté à des problèmes de santé chroniques ou de caractère durable ; l’autre sur le fait d’être limité par un problème de santé, fortement ou non, depuis au moins six mois, dans des activités habituelles. Plus de 80 % des salariés de cette classe sont concernés par ces difficultés, contre au plus 11 % de ceux des autres classes. Plus d’un tiers d’entre eux déclare être en situation de handicap, contre 1 % des autres salariés.

20  Leurs employeurs déclarent moins souvent les accompagner exclusivement en interne sur ces difficultés, mobilisant davantage des organismes extérieurs. Néanmoins, la fréquence de l’accompagnement sur les différentes difficultés sociales diffère peu de celle déclarée par les employeurs de la classe précédente.

21  Cette section ne permet pas de mesurer isolément l’effet des parcours proposés par les structures de l’IAE, puisque, compte tenu des variables retenues pour la classification, ces parcours sont en effet adaptés aux difficultés rencontrées par les personnes.

22  La question associée est la suivante : « Par rapport à votre situation avant votre entrée dans la structure, diriez-vous qu’à présent votre situation professionnelle est… ? Meilleure, identique ou moins bonne ».

23  Les responsables des ressources humaines d’entreprises d’insertion belges qu’ils ont interrogés estiment que l’amélioration des compétences est plus marquée pour les salariés les plus en difficulté, probablement du fait d’une marge de progression plus importante que celle des autres salariés.

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Table des illustrations

Titre Tableau 1 : Caractéristiques des personnes entrant en contrat aidé et dans une SIAE
Légende * L’ancienneté de l’inscription à Pôle emploi est calculée sur les salariés recrutés par une SIAE en 2011 car cette variable n’était pas disponible en 2010. Néanmoins, la structure des embauches étant relativement stable, cette ancienneté est probablement proche de celle qui aurait été observée en 2010. Note : les salariés des ACI sont comptabilisés à la fois dans les 1re, 3e et 4e colonnes puisqu’en 2010 les ACI recrutaient encore en contrat aidé. Ils représentaient alors 17 % des entrées en contrat aidé du secteur non marchand. Lecture : 33 % des entrants en EI et en ACI sont des femmes. Champ : pour l’IAE, les salariés en parcours d’insertion recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée et n’ayant pas cessé son activité à la date de l’enquête ; pour les contrats aidés, les entrants en contrat aidé en 2010.
Crédits Sources : pour l’IAE, enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares, et base des conventions individuelles d’embauches en contrat aidé et fiches « salariés » des EI, AI et ETTI, Agence de services et de paiement (ASP) ; pour les contrats aidés, base des conventions individuelles d’embauches en contrat aidé, ASP.
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Titre Tableau 2 : Nature de l’accompagnement reçu et des formations suivies par les salariés
Légende 1. Formation au certificat d’aptitude à la conduite en sécurité, hygiène et sécurité ou gestes et postures, aux premiers secours ou autre formation (ménage, repassage, etc.). 2. Formation au permis de conduire ou en informatique (Internet, Word, Excel, etc.). 3. Formation de remise à niveau (en mathématiques, en français, etc.) et cours pour apprendre le français. 4. Formation pour obtenir un diplôme ou une qualification. Lecture : 80 % des salariés des EI et des ACI ont bénéficié d’au moins un accompagnement et 61 % d’un accompagnement sur leur poste de travail. Champ : salariés en parcours d’insertion recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée et n’ayant pas cessé son activité à la date de l’enquête.
Crédits Source : enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares.
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Titre Tableau 3 : Caractéristiques des salariés en insertion en fonction des cinq classes (1/2)
Légende Lecture : 51 % des salariés de la classe « individus proches de l’emploi peu accompagnés » sont des femmes. Champ : salariés en parcours d’insertion recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée et n’ayant pas cessé son activité à la date de l’enquête.
Crédits Sources : base des conventions individuelles d’embauches en contrat aidé et fiches « salariés » des EI, AI et ETTI, ASP ; enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares.
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Titre Tableau 3 : Caractéristiques des salariés en insertion en fonction des cinq classes (2/2)
Légende Lecture : 51 % des salariés de la classe « individus proches de l’emploi peu accompagnés » sont des femmes. Champ : salariés en parcours d’insertion recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée et n’ayant pas cessé son activité à la date de l’enquête.
Crédits Sources : base des conventions individuelles d’embauches en contrat aidé et fiches « salariés » des EI, AI et ETTI, ASP ; enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares.
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Titre Tableau 4 : Caractéristiques du parcours des salariés en fonction des cinq classes (1/2)
Légende Lecture : 9 % des salariés de la classe « individus proches de l’emploi peu accompagnés » travaillent dans une EI. 64 % des SIAE employant les salariés de cette classe déclarent leur désigner un tuteur en interne. Champ : salariés en parcours d’insertion recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée et n’ayant pas cessé leur activité à la date de l’enquête.
Crédits Sources : base des conventions individuelles d’embauche en contrat aidé et fiches « salariés » des EI, AI et ETTI, ASP ; enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares.
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Titre Tableau 4 : Caractéristiques du parcours des salariés en fonction des cinq classes (2/2)
Légende Lecture : 9 % des salariés de la classe « individus proches de l’emploi peu accompagnés » travaillent dans une EI. 64 % des SIAE employant les salariés de cette classe déclarent leur désigner un tuteur en interne. Champ : salariés en parcours d’insertion recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée et n’ayant pas cessé leur activité à la date de l’enquête.
Crédits Sources : base des conventions individuelles d’embauche en contrat aidé et fiches « salariés » des EI, AI et ETTI, ASP ; enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares.
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Titre Tableau 5 : Situation professionnelle des salariés selon la classe à laquelle ils appartiennent (odds ratio)
Légende 1. L’emploi stable est ici défini comme l’obtention d’un CDI, le fait d’être à son compte ou d’avoir créé son entreprise. Note : ne sont ici présentés que les résultats concernant l’appartenance à une classe donnée de la typologie. Le modèle estimé est un logit multinomial avec le chômage comme situation de référence (situation qui concerne 48 % des salariés sortis). Il comprend également comme variables de contrôle (pour les résultats détaillés voir Rémy, 2017b) : les difficultés rencontrées par le salarié avant son entrée dans la SIAE, son objectif principal lors de l’entrée, le métier exercé dans la SIAE, la taille de cette dernière, son ancienneté dans l’IAE, son secteur d’activité ainsi que son type (EI, AI, ETTI ou ACI). Les symboles *, ** et *** représentent les seuils de significativité statistique à 10, 5 et 1 %. Champ : salariés en parcours d’insertion, sortis de la structure à la date de l’enquête et recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée en 2010 et n’ayant pas cessé son activité à la date de l’enquête.
Crédits Source : enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/travailemploi/docannexe/image/7694/img-7.png
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Titre Tableau 6a et 6b : Estimation de la probabilité d’une réponse positive aux variables de résultat (odds ratios)
Légende Note : ne sont ici présentés que les résultats concernant l’appartenance à une classe donnée de la typologie. Les modèles logistiques estimés pour chaque variable de résultat comprennent les mêmes variables de contrôle que celles du tableau précédent, auxquelles s’ajoute la situation à la date de l’enquête (encore dans la SIAE, en emploi, au chômage, etc.). Les résultats détaillés des estimations sont disponibles dans Rémy (2017b). Les symboles *, ** et *** représentent les seuils de significativité statistique à 10, 5 et 1 %. Cham : salariés en parcours d’insertion recrutés entre septembre et décembre 2010 en France entière par une SIAE conventionnée en 2010 et n’ayant pas cessé son activité à la date de l’enquête.
Crédits Source : enquête appariée employeurs-salariés de l’IAE 2012, Dares.
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Pour citer cet article

Référence papier

Véronique Rémy, « L’insertion par l’activité économique »Travail et Emploi, 151 | 2017, 29-51.

Référence électronique

Véronique Rémy, « L’insertion par l’activité économique »Travail et Emploi [En ligne], 151 | juillet-septembre 2017, mis en ligne le 11 juillet 2019, consulté le 23 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/travailemploi/7694 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/travailemploi.7694

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Auteur

Véronique Rémy

Mission animation de la recherche (Mar), Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), Ministère du Travail ; veronique.remy@travail.gouv.fr

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Droits d’auteur

CC-BY-SA-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-SA 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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