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Dossier

Histoire, culture et territoire dans les collections documentaires. Le cas allemand dans le contexte européen autour de 1900

History, culture, and territory in documentary collections. The German case in the European context, circa 1900
Christian Joschke
p. 40-49

Résumés

Si, dans de nombreux pays, le mouvement des enquêtes photographiques et des collections documentaires s’est développé de manière concomitante à partir du début des années 1890, il existe des disparités notables quant aux objets collectés dans les différents contextes nationaux. Les collections ne recouvrent pas, loin s’en faut, le même périmètre et les mêmes catégories d’objets d’un pays à l’autre. Objets d’art et d’histoire, témoignages de la culture vivante, relevés architecturaux ou topographiques : autant de sujets de documentation photographique. La question des méthodes de constitution des objets pose en réalité celle des réseaux, acteurs et institutions investis dans l’entreprise documentaire, de leurs visées – régionalistes ou universalistes – et de leur traditions scientifiques – sciences de la culture ou histoire. Cet article insiste tout particulièrement sur les cas de la Grande-Bretagne, plus intéressée par son histoire, et de l’Allemagne, davantage tournée vers l’idée du peuple (Volk) et de son folklore, et donne une explication sociale à ces différences culturelles.

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Texte intégral

  • 1 À propos d’une « internationale pictorialiste » voir les publications en ligne : <piktorialismus.sm (...)
  • 2 Thomas Theye, Der geraubte Schatten. Eine Weltreise im Spiegel der ethnographischen Photographie, M (...)

1Il est désormais admis que la diffusion de la photographie dans les cercles d’amateurs entre le milieu des années 1880 et la fin des années 1910 a eu lieu de façon concomitante dans de nombreux pays occidentaux, suivant un même développement technique, des réseaux de sociabilité interdépendants, des pratiques artistiques et documentaires similaires, des discours sur les images comparables d’une nation à l’autre. Les réseaux de ce qu’on peut appeler une « internationale des photographes amateurs » ne se limitaient pas à l’élite pictorialiste1, mais dépendaient de tout un système de communication multi-vectoriel qui favorisait l’échange sur les pratiques, les usages, les fonctions des images techniques. Correspondances entre sociétés savantes2 – géologie, archéologie, anthropologie, physiologie et médecine –, salons pictorialistes, expositions internationales, revues photographiques : autant de réseaux où s’exprimait collectivement une civilisation des images. On ne s’étonnera donc guère que le développement des idées et pratiques de collections ou musées « documentaires » aient eu lieu de façon parallèle en France, aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Suisse et en Allemagne notamment. Quelle que fût la vocation de ces musées, documentation locale ou archive du monde contemporain, musée d’histoire ou collection d’ethnographie régionale, chacun d’entre eux pouvait trouver son homologue quelque part à l’intérieur ou au-delà des frontières de son pays. Étaient-ils cependant identiques ? Leur conception reposait-elle sur les mêmes principes de formation du « document » ? Les concepts opératoires qui déterminaient les catégories appliquées à la prise de vue ou les critères de choix des images étaient-ils transposables d’un cadre national à l’autre ? Les exemples britannique et allemand nous permettront de répondre partiellement à ces questions et nous éclaireront non seulement sur la spécificité des réseaux de photographes mais aussi sur la structure du discours par l’image des identités nationales et régionales dans les deux pays.

Acteurs et réseaux des transferts culturels

  • 3 Elizabeth Edwards, The Camera as Historian. Amateur Photographers and Historical Imagination, 1885- (...)
  • 4 Voir « Illustrated Cities », Amateur Photographer, nº 1, avril 1888, p. 211, cité par Elizabeth Edw (...)
  • 5 William Jerome Harrison, « On the Work of a Local Photographic Society », Amateur Photographer, 13  (...)
  • 6 William Jerome Harrison, A Proposal for a National Photographic Record and Survey, Londres, Harriso (...)

2Si les pratiques de documentation photographique de même que la constitution de collections et de musées documentaires relevaient d’un phénomène transnational, c’était davantage par un effet de concomitance que du fait d’une quelconque coordination des projets. Les travaux d’Elizabeth Edwards permettent désormais de dater précisément la mobilisation des photographes amateurs en faveur de la constitution d’archives visuelles de villes, de régions ou de nations tout entières3. C’est du Camera club de Boston que provint la première impulsion, avec une lettre publiée dans Amateur Photographer en avril 18854. Puis l’idée fut portée à Birmingham en juin 1885, avec la première allocution publique de William Jerome Harrison, devant la Société photographique de Birmingham5. C’est là que fut exprimée pour la première fois l’idée de demander aux photographes amateurs de documenter le tissu urbain, les monuments et les paysages d’une région, voire d’étendre cette initiative au pays tout entier. Une nouvelle conférence, celle de 1892, fit l’objet d’une brochure et d’une publication en diverses langues6 ; elle inaugura le Photographic Survey Movement fort déjà de nombreux groupes : Liverpool, Birkenhead, Sheffield, Birmingham et d’autres encore s’étaient constitués entre 1886 et 1892.

  • 7 À propos du musée, voir Irene Ziehe, « „ Dem Trachtenmuseum zu Berlin gewidmet…“. Die Anfänge der F (...)
  • 8 À propos de Gustav Fritsch, voir Keith Dietrich, Andrew Bank (dir.), An Eloquent Picture Gallery. T (...)

3 En Allemagne, à défaut d’un appel aux amateurs, ce fut l’anthropologue Rudolf Virchow qui, inaugurant le 27 octobre 1889 le premier musée de folklore de Berlin – Museum für Volkstrachten und Erzeugnisse des Hausgewerbes (Musée des costumes et des produits de l’artisanat domestique), à l’adresse de la Klosterstrasse 36 et qui deviendra le Museum für Volkskunde (Musée d’ethnographie régionale) –, décida la même année de soutenir la formation d’un club de photographes amateurs comprenant une partie de son cercle d’amis anthropologues, la Freie photographische Vereinigung (Association photographique libre)7. Virchow, fondateur en 1867 de la Société d’anthropologie de Berlin, comptait parmi ses collègues de nombreux photographes amateurs, qui s’étaient déjà illustrés par de copieuses enquêtes photographiques : Gustav Fritsch avait photographié en Égypte, en Éthiopie et en Afrique du Sud ceux qu’il appelait les types autochtones et composé un glaçant atlas raciologique8 ; Richard Neuhauss appliquait la photographie à la craniométrie ; Felix von Luschan s’était lui aussi adonné à cette pratique. La constitution d’une collection de folklore remontait au Congrès de la Société d’anthropologie de 1886 et Virchow prévoyait pour ce musée une documentation photographique des populations allemandes, dont il fut d’ailleurs l’un des auteurs, avec Franz Goerke, Max Bartels et de nombreux autres anthropologues et folkloristes, photographiant principalement l’architecture vernaculaire et les costumes populaires, les fêtes et l’artisanat (fig. 1).

1. Rudolf Virchow, « Maisons de Rastede Oldenburg », Berlin, s. d.

1. Rudolf Virchow, « Maisons de Rastede Oldenburg », Berlin, s. d.

Photographies marouflées sur carton, panneau « Allemagne », entre 60 x 185 mm et 117 x 190 mm. Berlin, Museum für Europäische Ethnographie (P11883 à P11888).

4On peut donc moins parler de diffusion du modèle britannique du Photographic Survey Movement que d’un développement parallèle de ces initiatives documentaires. Ce ne fut qu’un peu plus tard que le mouvement de création de telles institutions s’accéléra à la faveur des transferts culturels propres aux milieux photographiques. L’idée d’une contribution générale des amateurs au projet documentaire n’était d’ailleurs pas encore formulée en Allemagne. Il s’agissait d’abord d’initiatives institutionnelles qui, comme d’autres musées, le Musée de folklore de Dresde ou des musées d’histoire des villes notamment, s’enrichirent rapidement de la contribution des photographes amateurs à la documentation. En effet, le mouvement des photographes amateurs ne se consolida dans l’espace germanique qu’à partir des années suivantes. Né à Vienne en 1887 avec la création du Camera Club et de la revue Photographische Rundschau, il ne prit de l’ampleur qu’à partir de 1891. Il s’en fallut donc que Virchow ne fasse appel aux amateurs des clubs photographiques régionaux en plus des anthropologues déjà mobilisés.

  • 9 Irene Ziehe, « „Dem Trachten-museum zu Berlin gewidmet…“ », op. cit.

5Les deux instigateurs de ces projets documentaires, Virchow et Harrison, se rencontrèrent pour la première fois à Chicago, lors de l’Exposition universelle de 1893. Virchow y présentait les objets de son musée de folklore dans la « salle allemande » : on pouvait y découvrir des mannequins de cire en taille réelle vêtus de costumes populaires, le tout dans un intérieur rustique sur les murs duquel étaient suspendues des photographies9 (fig. 2). Rudolf Virchow rencontra alors W. Jerome Harrison et le Français Léon Vidal. Tous trois échangèrent sur l’idée de constituer, chacun dans son pays, un « musée de photographies documentaires ». Mais si ce projet semblait émaner d’un commun élan, il s’agissait là d’un malentendu productif. La notion de « musée de photographies documentaires » recoupait pour chacun des trois personnages des idées et des expériences très différentes.

2. Anonyme, Exposition universelle de Chicago, village allemand, Chicago, 1893

2. Anonyme, Exposition universelle de Chicago, village allemand, Chicago, 1893

Tirage argentique marouflé sur carton, 120 x 80 mm (165 x 105 mm avec carton). Berlin, Museum für Europäische Ethnographie.

  • 10 Voir supra, p. 30 sq.
  • 11 Elizabeth Edwards, The Camera as Historian, op. cit., p. 52.
  • 12 Ibid., p. 22.
  • 13 Du titre de l’ouvrage de Eric Hobsbawm, Terence Ranger (dir.), The Invention of Tradition, Cambridg (...)

6Comme le montre Éléonore Challine dans son article10, la notion de musée documentaire avait chez Vidal une signification moins patriotique qu’universaliste, et il fut perçu par ses contemporains comme une entreprise à la fois éclectique et ambitieuse, plutôt personnelle que collective. À l’inverse, et en dépit de son caractère disséminé, le mouvement de documentation engagé en Grande-Bretagne jouissait d’une cohérence quant à la définition du périmètre de ses objets : il s’agissait de relever les traces d’un passé localisé, d’une histoire ancrée dans le territoire, à laquelle les habitants des régions concernées étaient sensibles. Les usages des représentations du passé montrent une instrumentalisation approximative de l’histoire dans les cercles de photographes amateurs œuvrant au Survey Movement. L’histoire favorisait l’identification à un collectif, elle avait une fonction mythologique. Comme le souligne Elizabeth Edwards11, le XIXe siècle avait cultivé l’amour du Moyen Âge et de l’époque Tudor tandis que le début du XXe siècle voyait dans la période Stuart les racines de la prospérité, de la grandeur et de l’indépendance de l’Angleterre, suivant ainsi les écrits de George Macauley Trevelyan. Cette vision élargie, souple, quelque peu fantasmée de l’histoire avait une fonction dans la construction identitaire. Les campagnes d’inventaires photographiques jouaient le rôle d’opérateurs de réconciliation entre le passé et l’avenir. C’était moins la peur de la disparition des marqueurs culturels, de la destruction des monuments, que la volonté de leur donner un sens pour l’avenir qui mobilisait les amateurs12. La photographie historicisait le présent et actualisait le passé dans un mouvement de contraction temporelle, à travers le filtre d’une vision sélective de la tradition. L’image « inventait » la tradition, pour reprendre une formule célèbre13, et, de ce fait même, réduisait l’épaisseur du temps, annulait la différence entre le passé et le présent.

  • 14 Elizabeth Edwards, The Camera as Historian, op. cit., p. 91.

7Ni planifié, ni centralisé, en tout cas jusqu’à la création par Benjamin Stone de la National Photographic Record Association en 1897, le mouvement en Grande-Bretagne mettait en scène une série de configurations locales qui, pour spécifiques qu’elles fussent, avaient en commun les rapports qu’entretenaient les associations de photographie amateur avec les sociétés d’histoire locale. Si l’agenda des photographes ne peut pas être décrit comme une commande des sociétés savantes, il n’en reste pas moins guidé par une vision de l’histoire britannique transmise par un tissu d’historiens locaux. Il arrivait, comme l’a montré Elizabeth Edwards, qu’une société de photographie s’opposât à la société savante relevant de son district à propos des priorités de prises de vue. Ce fut le cas à Leicester où la société de photographie, qui fut à l’origine du Leicester Survey en 1898, rompit ses liens avec la Leicester Literary and Philosophical Society, forcée de lancer son propre projet en 1901, sans les moyens techniques nécessaires et ignorante des pratiques photographiques14. Mais dans des cas moins rares, les campagnes d’inventaires, dont l’initiative et l’encadrement tant technique que théorique revint en principe aux sociétés de photographie, furent menées en bonne entente avec les sociétés d’histoire ou les sociétés littéraires. Il en découle une forte détermination historique de ces collections documentaires, résultat d’une intériorisation de l’histoire par les acteurs, doublée d’un ancrage territorial, souvent local, de la conscience historique. L’intérêt pour le tissu architectural des villages ou des petites villes, les églises paroissiales et, dans une moindre mesure, les pratiques populaires associait le regard historien sur le patrimoine à des pratiques excursionnistes qui inscrivaient dans le temps des loisirs la recherche des traces du passé.

L’image du peuple

  • 15 Ulrich Pohlmann, « Die vergessenen Fotomuseen. Zur Geschichte realisierter und unausgeführter Vorha (...)
  • 16 Alon Confino, The Nation as a Local Metaphor. Württemberg, Imperial Germany, and National Memory, 1 (...)

8Si l’on en juge par la postérité des projets évoqués lors de cette rencontre entre Virchow, Harrison et Vidal à l’Exposition universelle de 1893, les projets de musées documentaires pouvaient avoir des résonnances très différentes en fonction des configurations nationales et régionales. La photographie documentaire enrichissait les collections des musées d’ethnographie et des musées locaux, sans que toutefois elle ne fût considérée comme objet d’exposition à part entière. Il s’agissait d’un accompagnement pour des collections d’objets historiques ou vernaculaires. Dans les grands musées d’ethnographie européenne (Berlin, Vienne et Bâle), les archives photographiques accumulaient les images d’amateurs comme de professionnels. Il en va de même pour une autre catégorie d’institutions, les musées d’histoire locale, comme le Museum der Stadt Hamburg (Musée de la ville de Hambourg), le Focke Museum de Brême, le Historisches Museum Dresden (Musée historique de Dresde), le Märkisches Museum de Berlin (Musée de la Marche de Brandebourg), le Westpreußisches Provinzialmuseum dirigé par Hugo Conwentz (Musée de la province de Prusse Occidentale)15. Dans tous ces cas, les réseaux de photographes amateurs étaient mis à contribution pour documenter les régions couvertes par chaque musée. Loin d’une instrumentalisation verticale de forces productives bénévoles, les musées subissaient en retour l’influence des catégories opératoires de la documentation photographique amateur. Or le sens de cette documentation était moins historique que folklorique. Du côté allemand, le mouvement fut en effet moins enclin à véhiculer un intérêt pour l’histoire qu’un attachement au peuple figé dans une identité immémoriale. Cette identité présentait davantage les caractères du territoire que ceux de l’évolution historique. Les collections elles-mêmes recouvrent, certes, en partie des sujets similaires : l’architecture urbaine ou vernaculaire, les arts décoratifs, le paysage. Mais il n’en demeure pas moins que l’attachement des notables et des amateurs à la documentation locale passe bien davantage par les critères d’une ethnographie régionale que par ceux d’une entreprise patrimoniale à caractère national16.

  • 17 Fr. Schiffner, « Der Amateur-Photograph als Photogrammeter », Photographische Rundschau, vol. 5, nº (...)
  • 18 Albrecht Meydenbauer, « Die kleine Messbildkamera », Photographische Rundschau, vol. 8, nº 2, févri (...)
  • 19 Christian Joschke, « L’image d’une ville. Le Regard sur Brême d’un photographe amateur. Hermann Kip (...)

9Si, en Grande-Bretagne, on cultivait volontiers le goût de l’histoire et des ruines anciennes, en Allemagne, le corpus commun était fondé sur la quête du « peuple » (Volk). Les nouvelles classes moyennes investies dans l’activité photographique – des ingénieurs, des commerçants, des pharmaciens – manquaient pour la plupart d’érudition historique et produisaient leur propre discours identitaire. Ils montraient de l’indifférence tant vis-à-vis du discours savant des historiens de la nation allemande qu’au regard des normes visuelles de l’inventaire photographique. Les membres de ces clubs photographiques locaux participaient, certes, à valoriser le patrimoine de leur région, mais ils étaient loin de se considérer comme des relais d’une politique de l’État central. On peut évoquer, pour en témoigner, l’exemple de la photogrammétrie vulgarisée, échec s’il en est de l’industrie photographique. Dès 1891, soit cinq années après la création de l’Institut prussien de photogrammétrie par Albrecht Meydenbauer, le professeur Fr. Schiffner vantait dans la revue Photographische Rundschau les mérites de l’appareil photogrammétrique pour amateurs17. Il voyait dans les photographes amateurs, que rien ne pouvait selon lui distinguer des professionnels, des géomètres en puissance. La représentation – ici topographique – du territoire devait servir de but pour les pratiques d’amateurs. Meydenbauer renchérissait en 1894 en saluant un nouvel appareil qui leur était destiné – » le petit appareil de photogrammétrie18 ». Malgré de nombreux articles dans la presse pour amateurs, cet appareil connut peu de succès et ces derniers continuèrent de photographier au format 9 x 12 cm avec des appareils plus légers et moins précis. Au musée Focke, le musée d’histoire locale de Brême, les photographies de l’inventaire du vieux Brême faites par l’amateur Hermann Kippenberg ne suivaient nullement les conseils de Meydenbauer19.

  • 20 Harm Klueting, « Die Rückwärtigkeit des Örtlichen – Individualisierung des Allgemeinen. Heimatgesch (...)

10On peut trouver à cette résistance plusieurs raisons : d’abord, la technique était contraignante et les amateurs n’en percevaient pas l’utilité immédiate ; ensuite cette technique s’appliquait davantage aux monuments singuliers qu’au tissu urbain ; elle livrait une image fort peu pittoresque quand le modèle de la peinture naturaliste continuait d’exercer une grande influence sur les amateurs ; enfin, la photogrammétrie était surtout une technique de capture symbolique du patrimoine, ordonnée par le pouvoir central. Autrement dit, les canons de la photographie du patrimoine tels qu’ils avaient été adoptés chez les amateurs se distinguaient de la culture savante des historiens architectes de l’État central. Ces amateurs éprouvaient le besoin d’adapter leur discours sur le patrimoine à leurs aspirations régionalistes, de s’affranchir de la grande histoire nationale20. La conséquence de ce besoin d’adaptation, c’est l’invention d’une iconographie propre de la culture régionale et la transformation des rapports entre les notions d’histoire, de culture et de territoire.

  • 21 Thorstein Veblen, Théorie de la classe de loisir, Louis Évrard (trad.), précédé de « Avez-vous lu V (...)
  • 22 Klaus Bergmann, Agrarromantik und Grossstadtfeindlichkeit. Studien zur Grossstadtfeindschaft und „L (...)
  • 23 Georg Kunz, Verortete Geschichte. Regionales Geschichtsbewußtsein in den deutschen historischen Ver (...)

11L’irruption de la photographie amateur fit entrer de nouveaux acteurs dans le tissu associatif local. Avec les clubs photographiques et les associations excursionnistes, apparaissait une nouvelle classe moyenne d’ingénieurs, d’instituteurs, de pharmaciens, d’architectes, une nouvelle « classe de loisir » pour reprendre l’expression de Thorstein Veblen21. Or ces nouveaux acteurs aspiraient à une certaine autonomie tout en visant l’intégration locale. Il n’est pas rare qu’après avoir fait leurs études dans des universités ou écoles techniques de villes moyennes, ils ne revinssent au pays avec l’idée de préserver l’identité locale contre les menaces de l’urbanisation constatée ailleurs et les dangers de l’harmonisation politique nationale22. Mais loin de s’inféoder à la génération des aînés, celle des notables locaux déjà investis dans les sociétés d’histoire locale23, ils aspiraient à inventer eux-mêmes un nouveau discours sur l’identité régionale. Ce discours était fondé sur deux socles : l’ethnographie et la photographie, la photographie servant d’outil pour l’ethnographie régionale.

Crowdsourcing

  • 24 Silke Göttsch, « „Die schwere Kunst des Sehens“. Zur Diskussion über Amateurfotografie in Volkskund (...)
  • 25 Ingeborg Weber-Kellermann parle du mouvement des sociétés d’ethnographie allemande dans Deutsche Vo (...)
  • 26 Oskar Schwindrazheim, Kunst- Wanderbücher. Eine Anleitung zu Kunststudien im Spazierengehen, 3 volu (...)

12L’essor des sociétés savantes de folklore et celui des clubs photographiques étaient concomitants, et ces deux types de sociétés mobilisaient souvent les mêmes personnes24. Entre la fin des années 1880, soit au moment de la création de la revue d’ethnographie régionale (Zeitschrift für Volkskunde, 1888) et les années 1900, de nombreuses sociétés de folklore virent le jour dans toutes les régions d’Allemagne25 : l’Association d’ethnographie régionale de Bade (Vereinigung für Volkskunde in Baden, 1893), la Société d’ethnographie de Silésie (Schlesische Gesellschaft für Volkskunde, 1894), l’Association bavaroise d’ethnographie et d’étude de la culture orale (Verein für Bayerische Volkskunde und Mundartenforschung, 1894), l’Association d’ethnographie saxonne (Verein für sächsische Volkskunde, 1896), l’Association d’ethnographie de Basse-Saxe (Niedersächsischer Verein für Volkskunde, 1896), la Société juive d’ethnographie (Jüdische Gesellschaft für Volkskunde, Hambourg, 1898), l’Association d’ethnographie du Wurtemberg (Württembergische Vereinigung für Volkskunde, 1899), la Société d’ethnographie d’Allemagne du Nord (Gesellschaft für niederdeutsche Volkskunde, 1902), l’Association d’ethnographie régionale et d’art populaire (Verein für Volkskunst und Volkskunde, Munich, 1903), l’Association d’ethnographie de la Rhénanie et Westphalie (Verein für rheinische und westfälische Volkskunde, 1903), et l’association fédérant toutes les autres, la Fédération des associations allemandes d’ethnographie (Verband der deutschen Vereine für Volkskunde, créé par Karl Weinhold en 1904). En pratiquant dans les territoires régionaux des enquêtes de terrain, des relevés, en constituant des collections, ces sociétés introduisaient dans la pratique de la photographie documentaire des critères différents pour le choix des objets à photographier, critères fondés sur les traditions vivantes et la culture populaire, plus proche du naturalisme tardif des amateurs. L’observation de la culture populaire correspondait mieux au goût des amateurs pour l’excursionnisme, les paysages, les villages ruraux. Oscar Schwindrazheim popularisait ce nouveau regard documentaire et naturaliste dans des guides intitulés Kunstwanderbücher – guides de promenades artistiques26.

13L’itinérance était au principe de l’enquête d’ethnographie depuis les origines de cette discipline. Wilhelm Heinrich Riehl, le fondateur de la Volkskunde en Allemagne décrivait ainsi la méthode de l’ethnographe :

  • 27 Wilhelm Heinrich Riehl, Naturgeschichte des Volkes als Grundlage einer deutschen Sozialpolitik, Stu (...)

Le chercheur qui s’intéresse à la vie du peuple doit avant tout voyager, écrivait-il en 1854. Cela va de soi. Quand je dis « voyager », cela veut dire « partir à pied », mais pour beaucoup cela ne va pas de soi […]. De même que l’historien qui ne se contente pas de puiser ses sources dans les livres mais va vérifier dans les archives, de même j’exige dans une contribution à la Volkskunde allemande, au moins une « étude itinérante ». L’« itinérance » signifie se déplacer à pied, voir avec ses yeux, écouter avec ses oreilles27.

14Si les ethnologues allemands des années 1890 ne se référaient pas principalement à Riehl, ils en reprenaient tout au moins ce principe d’itinérance et partageaient le goût de la découverte du territoire avec de nombreux photographes amateurs. L’enquête ethnographique put ainsi se populariser sous les espèces de l’excursion dominicale.

  • 28 Wolfgang Settekorn, « L’école de Hambourg », op. cit.
  • 29 Un autre exemple est la collection photographique de Victor Geramb : Helmut Eberhard, « Zwischen Re (...)
  • 30 Voir Arnold van Gennep, Chroniques de folklore d’Arnold van Gennep. Recueil de textes parus dans le (...)
  • 31 Wolfgang Settekorn, « L’école de Hambourg », op. cit., p. 70.

15De même, l’ethnographie régionale, comme les études des langues romanes d’ailleurs28, s’était orientée vers l’examen des manifestations matérielles de la culture de sorte à encourager toute initiative de collecte de données sur l’architecture, les costumes, les objets des cultures rurales29. Cette tendance était d’ailleurs critiquée par Arnold van Gennep qui reprochait aux romanistes allemands de faire l’impasse sur les manifestations non réifiées de la culture : rites de passages, pèlerinages, mythes, etc.30 Aussi, avec ce nouvel intérêt pour la culture matérielle, comme le souligne Wolfgang Settekorn, « le regard [était devenu] le mode central de perception » des études romanes de Hambourg et Graz, qui « s’attachaient à la conception visuelle de l’objet31 ». On observait, avec l’introduction de la photographie dans ces deux écoles de romanistes, une sorte de néo‑positivisme.

  • 32 Ibid., p. 75.

L’acquisition du document photographique comme représentation objective et authentique des « choses » provoqua une orientation conservatrice et descriptive de la recherche sur les « choses ». Faire la synthèse, rassembler, classer les données et les choses en fonction de modèles dont la systématique correspondait aux structures d’ordre des références matérielles, était considéré comme une réalisation scientifique de la recherche sur les choses32.

C’est la concentration sur la culture matérielle qui donnait à cette démarche l’illusion d’objectivisme et d’exhaustivité.

16La tendance à l’enquête photographique chez les ethnographes les incitait à s’associer aux clubs photographiques en lançant des « appels aux amateurs » dans la presse spécialisée. En 1895, dans la Zeitschrift für österreichische Volkskunde, Moritz Hoernes publia une adresse aux amateurs et aux touristes :

  • 33 Moritz Hoernes, « Vereinsnachrichten », Zeitschrift für österreichische Volkskunde, vol. 1, nº 4, 1 (...)

Je propose, pour la période estivale de voyage : 1. la production et la collection de clichés photographiques des calvaires, et ce : a) des panneaux agrandis b) des panneaux pris sur fond du paysage environnant […].
2. Le même procédé (mutatis mutandis) pour les images votives et les objets de dévotion dans les églises de pèlerinage et autres églises [dans le but] d’une collection de documents qui pourra être livrée aux personnes suffisamment compétentes pour la traiter. La rédaction demande à ceux qui, parmi nos lecteurs, sont photographes amateurs, d’accorder à ces objets une attention particulière et d’avoir l’amabilité d’envoyer des tirages de leurs clichés33.

  • 34 Michael Haberlandt, « Die Photographie im Dienste der Volkskunde », Wiener Photographische Blätter, (...)

17Un autre appel vint un peu plus tard de Michael Haberlandt, ethnologue de Vienne, qui appelait à renforcer la coopération entre amateurs et ethnographes34. Il existait déjà à l’intérieur du Camera Club une section d’histoire de l’art en contact direct avec la Commission centrale pour la conservation et la recherche sur les anciens monuments architecturaux et artistiques de l’administration impériale (Kommission zur Erhaltung und Erforschung alter Bau- und Kunstdenkmäler), et Haberlandt proposait ici d’élargir la base de cette collaboration en introduisant des sujets ethnographiques. Il fallait collectionner en premier lieu les images de « types raciaux », puis d’architecture et de « manières d’habiter », de costumes, d’objets de culte, de scènes de jeu et de théâtre, enfin, de travail agricole.

  • 35 Gerhard Kratzsch, Kunstwart und Dürerbund. Ein Beitrag zur Geschichte der Gebildeten im Zeitalter d (...)
  • 36 Hugo Conwentz fut aussi l’instigateur d’un mouvement de protection du paysage en Prusse : Hugo Conw (...)

18Ainsi l’enquête ethnographique prenait symboliquement le dessus sur les inventaires strictement historiques et patrimoniaux. Elle offrait un modèle plus actuel, plus vivant d’enquête et des critères nouveaux pour la définition des identités locales, des critères fondés sur l’observation des traditions vivantes de la culture populaire d’un certain territoire. Tout se passait comme si les nouvelles élites locales se détournaient de l’historisme de la génération précédente, marquée par une culture savante et une connaissance des annales, prônant une nouvelle définition de l’historisme marquée par l’ethnographie, une vision idéalisée de la culture populaire, associant archaïsme et modernité : modernité d’un discours faisant l’éloge de la jeunesse et la critique de la civilisation35 ; archaïsme des traditions populaires. Les liens sont nombreux entre ces modèles savants et les aspirations à la valorisation des identités locales. Au moment où l’historien Kurt Lamprecht cherchait à valoriser l’étude de l’histoire de la culture populaire et où le géographe Friedrich Ratzel inventait le concept de géographie humaine, la vocation des musées d’histoire locale édifiés dans les années 1900 prenait un tournant ethnographique sous l’influence des sociétés Heimatschutz (sociétés de protection du patrimoine) et des photographes amateurs investis dans ces missions. À Dantzig, le Westpreussisches Provinzialmuseum dirigé par Hugo Conwentz réalisa avec Franz Goerke, photographe amateur et membre de la Société d’anthropologie de Berlin, un voyage en bateau à vapeur sur la Vistule pour documenter les villes et les campagnes de la Prusse occidentale36 (aujourd’hui la Pologne). Dans un article de 1903, il revenait sur ses réalisations :

  • 37 K. W. Wolf-Czapek, « Die Ziele und Leistungen der Freien photographischen Vereinigung », dans Franz (...)

Pour ce qui me concerne, je suis par exemple actuellement occupé à illustrer la Spree de la source jusqu’à l’embouchure. De la même façon, les autres cours d’eau de la Marche [de Brandebourg], la Havel, l’Oder et même l’Elbe, pour autant qu’elle irrigue le domaine de la Marche, peuvent constituer le sujet d’une mission entière. Les lacs de la Marche, qui regorgent de motifs, constituent un thème tout aussi beau et utile, puis les châteaux, les cloîtres de la Marche, et surtout ses villes et ses villages avec leurs vestiges médiévaux, leurs fortifications, leurs portes, leurs hôtels de ville, leurs églises et leurs habitations privées. Ici aussi, des services précieux peuvent être rendus à la science, à l’histoire de l’art, à l’archéologie37.

  • 38 Oscar Seyffert, « Das Landesmuseum für Sächsische Volkskunst », Mitteilungen des Vereins für Sächsi (...)
  • 39 Anonyme, réponse de M. Lichtwark à l’article d’Alfred Paris : « Die Photographie im Dienste der Lan (...)
  • 40 Land und Leute der Niederelbe, Hambourg, 1912.
  • 41 Christian Joschke, « L’image d’une ville », op. cit.

19À Dresde, Oscar Seyffert, professeur à l’école des arts décoratifs et membre du Bund Heimatschutz (Ligue pour la protection du patrimoine), associé à Gustav Kuhfahl, archéologue amateur, président du club de photographie amateur, œuvrait à enrichir les collections du Landesmuseum für sächsische Volkskunst édifié en 191338. À Hambourg, le rapprochement entre le musée d’histoire de la ville et les photographes amateurs datait de la première exposition de photographie en 1893, à l’occasion de laquelle Alfred Lichtwark avait lancé l’idée d’une telle coopération : « ainsi pourrait-on préserver une image de notre temps comme il en existe des autres époques39. » Quelques années plus tard, à l’occasion de l’exposition de Dresde en 1909 (fig. 3 et 4), Ernst Juhl prit en charge une enquête photographique sur Hambourg et ses alentours, dont les plus beaux clichés de paysage furent réunis dans un portfolio en 1912. La campagne se prolongea jusqu’en 191440. À Brême, grâce à la participation du photographe amateur Hermann Kippenberg, instituteur puis professeur de lycée technique, le musée Focke s’enrichit de reproductions photographiques de monuments, de rues de Brême et de paysages alentour, et s’ouvrit à la culture populaire de l’arrière-pays selon les préceptes du mouvement Heimatschutz (fig. 5 et 6) : il fallait sortir de la vision maritime de la ville pour l’ancrer dans le territoire régional41.

3. Anonyme, vue de la section « Bosnie-Herzégovine » dans la partie « Länder- und Völkerkunde » de l’Exposition internationale photographique de Dresde, 1909

3. Anonyme, vue de la section « Bosnie-Herzégovine » dans la partie « Länder- und Völkerkunde » de l’Exposition internationale photographique de Dresde, 1909

Tirage argentique marouflé sur carton. Vienne, Albertina, dépôt de la Höhere Graphische Bundes-Lehr- und Versuchsanstalt (FotoGLV2000/20366/13).

4. Anonyme, vue de la salle conçue par Otto Prutscher pour les procédés de reproduction photographique dans le pavillon autrichien, Exposition internationale photographique de Dresde, 1909

4. Anonyme, vue de la salle conçue par Otto Prutscher pour les procédés de reproduction photographique dans le pavillon autrichien, Exposition internationale photographique de Dresde, 1909

Tirage argentique marouflé sur carton. Vienne, Albertina, dépôt de la Höhere Graphische Bundes-Lehr- und Versuchsanstalt (FotoGLV2000/20366/17).

5. Hermann Kippenberg, Ansgarikirchhof 18, devant la tour et nef sud de l’église Sankt Ansgarii, Brême, 1910

5. Hermann Kippenberg, Ansgarikirchhof 18, devant la tour et nef sud de l’église Sankt Ansgarii, Brême, 1910

Tirage argentique à partir d’un négatif sur verre, 180 x 130 mm. Brême, Staatsarchiv Bremen (10, B-Kartei-1528).

6. Erich Wilhelm Prosch, fontaine avec figures (évêque et mendiant) dans la Buchtstrasse 61, pension pour veuves Saint‑Pierre, Brême, 1906

6. Erich Wilhelm Prosch, fontaine avec figures (évêque et mendiant) dans la Buchtstrasse 61, pension pour veuves Saint‑Pierre, Brême, 1906

Tirage argentique à partir d’un négatif sur plaque de verre. Brême, Staatsarchiv Bremen (10, B-Kartei-1661).

20Dans toutes ces initiatives muséales, la collaboration entre différents milieux de notables conduisit à un compromis intellectuel entre une vision historiciste et une vision ethnographique de la culture. Ce compromis était le résultat de l’influence croisée d’une multiplicité de mouvements qui traversaient cette classe moyenne éduquée si active sur le plan culturel régional : Heimatschutz, ethnographie régionale et photographie s’influençaient mutuellement pour faire émerger une vision de la culture fondée sur l’idée de traditions à préserver. Le présent était désormais le passé de l’avenir et plutôt que d’observer, comme en Grande-Bretagne avec le Survey Movement, les couches temporelles d’une région, la vision documentaire de la photographie amateur développée en Allemagne comprimait l’épaisseur du temps sur une seule strate, celle des traditions vivantes menacées, à conserver pour l’avenir. La notion de culture se définissait désormais davantage par sa dimension territoriale qu’historique.

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Notes

1 À propos d’une « internationale pictorialiste » voir les publications en ligne : <piktorialismus.smb.museum>.

2 Thomas Theye, Der geraubte Schatten. Eine Weltreise im Spiegel der ethnographischen Photographie, Munich, Bucher, 1989 ; Elizabeth Edwards (dir.), Anthropology and Photography, 1860-1920, New Haven/Londres, Yale University Press / Royal Anthropological Institute, 1992 ; Constantin Goschler, « Wissenschaftliche Vereinsmenschen », dans Constantin Goschler (dir.), Wissenschaft und Öffentlichkeit in Berlin 1870-1930, Stuttgart, F. Steiner, 2000, p. 31‑63.

3 Elizabeth Edwards, The Camera as Historian. Amateur Photographers and Historical Imagination, 1885-1918, Durham, Duke University Press, 2012. Voir également Elizabeth Edwards, supra, p. 18 sq.

4 Voir « Illustrated Cities », Amateur Photographer, nº 1, avril 1888, p. 211, cité par Elizabeth Edwards, The Camera as Historian, op. cit., p. 32.

5 William Jerome Harrison, « On the Work of a Local Photographic Society », Amateur Photographer, 13 mars 1885, p. 425‑426, cité par Elizabeth Edwards, The Camera as Historian, op. cit., p. 31.

6 William Jerome Harrison, A Proposal for a National Photographic Record and Survey, Londres, Harrison and Co., 1892.

7 À propos du musée, voir Irene Ziehe, « „ Dem Trachtenmuseum zu Berlin gewidmet…“. Die Anfänge der Fotosammlung des Museums für Volkskunde Berlin », Fotogeschichte, vol. 14, nº 52, 1994, p. 15‑26 et Ulrich Hägele, Foto-Ethnographie. Die visuelle Methode in der volkskundlichen Kulturwissenschaft, Tübingen, Tübinger Vereinigung für Volkskunde, 2007. À propos de la Société photographique de Berlin, voir Christian Joschke, Les Yeux de la nation. Photographie amateur et société dans l’Allemagne de Guillaume II. 1888-1914, Dijon, Les presses du réel, 2013, chap. 5 et Enno Kaufhold, Bilder des Übergangs. Zur Mediengeschichte von Fotographie und Malerei in Deutschland um 1900, Marburg, Jonas, 1986.

8 À propos de Gustav Fritsch, voir Keith Dietrich, Andrew Bank (dir.), An Eloquent Picture Gallery. The South African Portrait Photographs of Gustav Theodor Fritsch, 1863-1865, Auckland Park, Jacana Media, 2008.

9 Irene Ziehe, « „Dem Trachten-museum zu Berlin gewidmet…“ », op. cit.

10 Voir supra, p. 30 sq.

11 Elizabeth Edwards, The Camera as Historian, op. cit., p. 52.

12 Ibid., p. 22.

13 Du titre de l’ouvrage de Eric Hobsbawm, Terence Ranger (dir.), The Invention of Tradition, Cambridge, Cambridge University Press, 1983.

14 Elizabeth Edwards, The Camera as Historian, op. cit., p. 91.

15 Ulrich Pohlmann, « Die vergessenen Fotomuseen. Zur Geschichte realisierter und unausgeführter Vorhaben in Deutschland », Fotogeschichte, vol. 35, nº 10, 1990, p. 14‑21 et Ulrich Hägele, Foto-Ethnographie, op. cit., p. 54‑57.

16 Alon Confino, The Nation as a Local Metaphor. Württemberg, Imperial Germany, and National Memory, 1871-1918, Chapel Hill, University of North Carolina Press, 1997.

17 Fr. Schiffner, « Der Amateur-Photograph als Photogrammeter », Photographische Rundschau, vol. 5, nº 12, décembre 1891, p. 427‑432.

18 Albrecht Meydenbauer, « Die kleine Messbildkamera », Photographische Rundschau, vol. 8, nº 2, février 1894, p. 53‑56.

19 Christian Joschke, « L’image d’une ville. Le Regard sur Brême d’un photographe amateur. Hermann Kippenberg (1863-1940) », dans Robert Beck, Anna Madoeuf (dir.), Divertissements et loisirs dans les sociétés urbaines à l’époque moderne et contemporaine, actes du colloque de Tours, Tours, Presses universitaires François-Rabelais, 2005, p. 99‑117.

20 Harm Klueting, « Die Rückwärtigkeit des Örtlichen – Individualisierung des Allgemeinen. Heimatgeschichtsschreibung (Historische Heimatkunde) als unprofessionnelle Lokalgeschichtsschreibung neben der professionnellen Geschichtswissenschaft », dans Edeltraut Klueting (dir.), Antimodernismus und Reform. Zur Geschichte der deutschen Heimatbewegung, Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 1991, p. 50‑89.

21 Thorstein Veblen, Théorie de la classe de loisir, Louis Évrard (trad.), précédé de « Avez-vous lu Veblen ? » par Raymond Aron, Paris, Gallimard, 1970.

22 Klaus Bergmann, Agrarromantik und Grossstadtfeindlichkeit. Studien zur Grossstadtfeindschaft und „Landflucht“ – Bekämpfung in Deutschland seit dem Ende des 19. Jahrhunderts, Meisenheim, Hain, 1970.

23 Georg Kunz, Verortete Geschichte. Regionales Geschichtsbewußtsein in den deutschen historischen Vereinen des 19. Jahrhunderts, Göttingen, Vandenhoeck & Rupprecht, 2000.

24 Silke Göttsch, « „Die schwere Kunst des Sehens“. Zur Diskussion über Amateurfotografie in Volkskunde und Heimatbewegung um 1900 », dans Carola Lipp (dir.), Medien popularer Kultur. Erzählung. Bild und Objekt in der volkskundlichen Forschung, Francfort-sur-le-Main/New York, Campus, 1995, p. 395‑405.

25 Ingeborg Weber-Kellermann parle du mouvement des sociétés d’ethnographie allemande dans Deutsche Volkskunde zwischen Germanistik und Sozialwissenschaft, Stuttgart, Metzler, 1969.

26 Oskar Schwindrazheim, Kunst- Wanderbücher. Eine Anleitung zu Kunststudien im Spazierengehen, 3 volumes, Hambourg, Gutenberg Verlag, 1907.

27 Wilhelm Heinrich Riehl, Naturgeschichte des Volkes als Grundlage einer deutschen Sozialpolitik, Stuttgart/Tübingen, 1854-1869, p. 3 sq., cité par Wolfgang Settekorn, « L’école de Hambourg. Implications scientifiques et idéologiques », dans Klaus Beitl (dir.), Mots et choses de l’ethnologie de la France. Regards allemands et autrichiens sur la France rurale dans les années 30, Paris, MSH, 1997, p. 65‑87, ici p. 73. Voir également Jean-Louis Georget, Dominique Lassaigne, « L’Allemagne à l’épreuve de la Volkskunde. Justus Möser et Wilhelm Heinrich Riehl », Cadmos, nº 1, printemps 2002, p. 29‑48.

28 Wolfgang Settekorn, « L’école de Hambourg », op. cit.

29 Un autre exemple est la collection photographique de Victor Geramb : Helmut Eberhard, « Zwischen Realität und Romantik. Die Viktor-Geramb-Fotosammlung am Institut für Volkskunde in Graz », Zeitschrift für Volkskunde, nº 81, 1985, p. 1‑21.

30 Voir Arnold van Gennep, Chroniques de folklore d’Arnold van Gennep. Recueil de textes parus dans le Mercure de France. 1905-1949, préface de Jean-Marie Privat, Paris, Éditions du Comité des Travaux historiques et scientifiques, 2001, p. 166.

31 Wolfgang Settekorn, « L’école de Hambourg », op. cit., p. 70.

32 Ibid., p. 75.

33 Moritz Hoernes, « Vereinsnachrichten », Zeitschrift für österreichische Volkskunde, vol. 1, nº 4, 1895, p. 126, cité par Ulrich Hägele, « Visuelle Tradierung des Popularen. Zur frühen Rezeption volkskundlicher Fotografie », Zeitschrift für Volkskunde, vol. 93, nº 2, 1997, p. 159‑187, ici p. 169.

34 Michael Haberlandt, « Die Photographie im Dienste der Volkskunde », Wiener Photographische Blätter, 3‑5 mai 1895, p. 97‑100.

35 Gerhard Kratzsch, Kunstwart und Dürerbund. Ein Beitrag zur Geschichte der Gebildeten im Zeitalter des Imperialismus, Göttingen, Vandenhoeck und Ruprecht, 1969.

36 Hugo Conwentz fut aussi l’instigateur d’un mouvement de protection du paysage en Prusse : Hugo Conwentz, Die Gefährdung der Naturdenkmäler und Vorschläge zu ihrer Erhaltung, Berlin, Gebrüder Borntraeger, 1911.

37 K. W. Wolf-Czapek, « Die Ziele und Leistungen der Freien photographischen Vereinigung », dans Franz Goerke (dir.), Denkschrift anlässlich des zwanzigjährigen Bestehens der Freien photographischen Vereinigung zu Berlin, Halle-sur-la-Saale, Wilhelm Knapp, 1910, p. 9‑16, ici, p. 16.

38 Oscar Seyffert, « Das Landesmuseum für Sächsische Volkskunst », Mitteilungen des Vereins für Sächsische Volkskunde und Volkskunst, vol. 8, nº 11, 1922. Voir également Ulrich Pohlmann, « Die vergessenen Fotomuseen », op. cit., p. 14‑21.

39 Anonyme, réponse de M. Lichtwark à l’article d’Alfred Paris : « Die Photographie im Dienste der Landes- und Volkskunde », Die Heimat, vol. 10, nº 10, octobre 1900, p. 215‑216.

40 Land und Leute der Niederelbe, Hambourg, 1912.

41 Christian Joschke, « L’image d’une ville », op. cit.

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Table des illustrations

Titre 1. Rudolf Virchow, « Maisons de Rastede Oldenburg », Berlin, s. d.
Légende Photographies marouflées sur carton, panneau « Allemagne », entre 60 x 185 mm et 117 x 190 mm. Berlin, Museum für Europäische Ethnographie (P11883 à P11888).
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/transbordeur/docannexe/image/348/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 630k
Titre 2. Anonyme, Exposition universelle de Chicago, village allemand, Chicago, 1893
Légende Tirage argentique marouflé sur carton, 120 x 80 mm (165 x 105 mm avec carton). Berlin, Museum für Europäische Ethnographie.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/transbordeur/docannexe/image/348/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 1,0M
Titre 3. Anonyme, vue de la section « Bosnie-Herzégovine » dans la partie « Länder- und Völkerkunde » de l’Exposition internationale photographique de Dresde, 1909
Légende Tirage argentique marouflé sur carton. Vienne, Albertina, dépôt de la Höhere Graphische Bundes-Lehr- und Versuchsanstalt (FotoGLV2000/20366/13).
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/transbordeur/docannexe/image/348/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 400k
Titre 4. Anonyme, vue de la salle conçue par Otto Prutscher pour les procédés de reproduction photographique dans le pavillon autrichien, Exposition internationale photographique de Dresde, 1909
Légende Tirage argentique marouflé sur carton. Vienne, Albertina, dépôt de la Höhere Graphische Bundes-Lehr- und Versuchsanstalt (FotoGLV2000/20366/17).
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/transbordeur/docannexe/image/348/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 629k
Titre 5. Hermann Kippenberg, Ansgarikirchhof 18, devant la tour et nef sud de l’église Sankt Ansgarii, Brême, 1910
Légende Tirage argentique à partir d’un négatif sur verre, 180 x 130 mm. Brême, Staatsarchiv Bremen (10, B-Kartei-1528).
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/transbordeur/docannexe/image/348/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 832k
Titre 6. Erich Wilhelm Prosch, fontaine avec figures (évêque et mendiant) dans la Buchtstrasse 61, pension pour veuves Saint‑Pierre, Brême, 1906
Légende Tirage argentique à partir d’un négatif sur plaque de verre. Brême, Staatsarchiv Bremen (10, B-Kartei-1661).
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/transbordeur/docannexe/image/348/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 1,0M
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Pour citer cet article

Référence papier

Christian Joschke, « Histoire, culture et territoire dans les collections documentaires. Le cas allemand dans le contexte européen autour de 1900 »Transbordeur, 1 | 2017, 40-49.

Référence électronique

Christian Joschke, « Histoire, culture et territoire dans les collections documentaires. Le cas allemand dans le contexte européen autour de 1900 »Transbordeur [En ligne], 1 | 2017, mis en ligne le 01 octobre 2024, consulté le 17 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/transbordeur/348 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12gw9

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Auteur

Christian Joschke

Christian Joschke est maître de conférences à l’Université Paris Nanterre et chargé de cours à l’université de Genève. Il a été assistant de Hans Belting au Collège de France en 2003, ATER à l’université de Strasbourg de 2004 à 2006, maître de conférences à l’Université Lumière Lyon 2 de 2007 à 2012 et Professeur suppléant à l’université de Lausanne en 2009-2010 et en 2016-2017. Il a publié récemment Les Yeux de la nation. Photographie amateur dans l’Allemagne de Guillaume II (Les presses du réel, 2013) et La Guerre 14-18 (Photo Poche, 2014).
Christian Joschke is a lecturer at the Université de Paris Nanterre and the Université de Genève. He was the assistant of Hans Belting at the Collège de France in 2003, research assistant at the Université de Strasbourg from 2004 to 2006, lecturer at the Université Lumière Lyon 2 from 2007 to 2012, and substitute professor at the Université de Lausanne in 2009-2010 and 2016-2017. He recently published Les Yeux de la nation. Photographie amateur dans l’Allemagne de Guillaume II (Les presses du réel, 2013) and La Guerre 14‑18 (Photo Poche, 2014).

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