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De la page à la scène, de la scène à la page. L’hybridité des écritures de soi chez Bill Kouélany et Dieudonné Niangouna

From page to stage, from stage to page. The hybridity of self-writing in Bill Kouélany and Dieudonné Niangouna
Dalla pagina alla scena, dalla scena alla pagina. Le scritture ibride di Bill Kouélany e Dieudonné Niangouna
Adelaide Pagano

Résumés

Cet article vise à étudier les écritures hybrides des auteurs et metteurs en scène congolais Bill Kouélany (1965) et Dieudonné Niangouna (1976). Dans cette étude, l’hybridisme est conçu comme une tendance de la production littéraire contemporaine qui cherche à abolir les frontières entre genres, médias et formes artistiques. Dans ce cas, l’attention est portée vers les combinaisons entre la narration autobiographique et la performance. L’étude interroge la production des deux artistes et tente de saisir les hybridités stylistiques et formelles entre les deux genres, à partir d’une réflexion théorique sur l’autobiographie, la performance et leur fusion. Kouélany combine ses talents littéraires, théâtraux et artistiques dans son récit de soi Kipiala, ou la rage d’être soi (2021), où elle intègre un texte précédent conçu pour le théâtre. Niangouna, quant à lui, incorpore des éléments autobiographiques dans ses pièces de théâtre, utilisant un protocole d’écriture qui exploite diverses influences et médias, telles que la musique, comme dans l’œuvre Les inepties volantes (2009). L’article propose d’analyser ces productions, en soulignant les métissages formels et génériques qui les caractérisent.

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Texte intégral

Introduction

  • 1 Waberi Abdourahman Ali, « Les enfants de la postcolonie : Esquisse d’une nouvelle génération d’écri (...)
  • 2 Bill Kouélany, Kipiala ou la rage d’être soi, Paris, Les Avrils, 2021.
  • 3 Dieudonné Niangouna, Les inepties volantes. Suivi de Attitude Clando, Besançon, Les Solitaires Inte (...)
  • 4 Diane Chavelet, « Le texte au corps: Dieudonné Niangouna et Bill Kouélany : de l’écriture à la perf (...)
  • 5 Susanne Gehrmann, Vom Entwerfen des Ich im Erinnern des Wir? Überlegungen zur Autobiographik in Afr (...)
  • 6 « The popularity of autobiography as a genre in contemporary Black cultures can be accounted for it (...)
  • 7 Magali Nachtergael, « Écritures plastiques et performances du texte : une néolittérature ? », dans (...)

1Dans le contexte littéraire africain francophone, les voix de Dieudonné Niangouna et de Bill Kouélany, tous les deux originaires de la République du Congo, réinterprètent l’héritage de Sony Labou Tansi et du dramaturge Tchicaya U Tam’si en ayant recours à différents médias et genres. Ces « enfants de la post-colonie »1 expérimentent la violence du conflit civil congolais ayant éclaté en 1997, et qui devient objet et source d’inspiration dans leurs créations artistiques et littéraires. Le récit de soi qui relate les événements de la guerre s’hybride dans leurs productions avec la performance : c’est précisément ce mélange entre l’autobiographisme et sa mise en scène qui fait l’objet de cette étude. Nous nous efforcerons de décrire les modalités par lesquelles les deux auteurs fusionnent ces deux genres, tant sur le plan formel que sur le plan stylistique. Kouélany, autrice, peintre et scénographe, explore le procédé du récit de soi en parsemant ses ouvrages de références à l’univers intime et personnel : l’emploi des différentes formes d’expressions pour reconstruire le soi devient un fil rouge de son autobiographie Kipiala, ou la rage d’être soi2. Niangouna, au contraire, réorganise les événements liés à la période des guerres congolaises dans son œuvre Les inepties volantes3, mise en scène au Festival d’Avignon en 2009 avec les musiques de l’accordéoniste Pasqual Contet, ce qui montre bien la nécessité du dramaturge de construire une narration de soi qui soit polyexpressive. Pour les deux artistes, écrire « est un geste performatif. Chez Bill Kouélany, c’est un processus qui se déploie au prisme d’un éclatement textuel ; et chez Dieudonné Niangouna, c’est une dialectique du corps traversé »4. Ces deux auteurs confirment ainsi une tradition issue d’Afrique où le récit de soi est associé à la forme orale : Sushanne Germhann, par exemple, souligne comment les formes écrites des histoires personnelles n’y apparaissent qu’après la colonisation5. De même, Alabi Adetayo montre que « la popularité de l’autobiographie en tant que genre dans les cultures noires contemporaines peut s’expliquer par sa prévalence dans les sociétés africaines traditionnelles. Là, le genre, comme d’autres genres littéraires, était oral et remplissait plusieurs fonctions dans les traditions de narration de diverses communautés africaines »6. La performance autobiographique se lie donc intimement à cette tradition de l’expression de soi, où l’écrit et l’oralité se rencontrent et, dans le cas de Kouélany et Niangouna, s’ouvrent vers d’autres manifestations artistiques, ce qui fait de leurs œuvres des exemples de littérature plastique7.

  • 8 Cette recherche s’encadre dans le sillages des études conduit par le groupe de recherche VISAGE (Va (...)
  • 9 Magali Nachtergael, op.cit.

2Étant donné la complexité du sujet, l’analyse de la notion de « performance autobiographique » sera définie à partir d’une réflexion théorique autour de l’écriture de soi et de la performance8. Loin d’être des formes fixes et morphologiquement définies, ces deux genres possèdent une nature plastique qui permet à tout autre type d’expression de les traverser, de se juxtaposer à eux, et de les transformer. Cela ouvre des possibilités infinies à la création, où les frontières entre la narration personnelle et l’interprétation scénique deviennent floues, créant ainsi un espace d’interaction entre le texte et ses débordements artistiques. Ensuite, l’enquête se concentrera sur les œuvres de Kouélany et Niangouna qui, par des approches variées, non seulement combinent les deux formes, mais explorent également d’autres univers expressifs, devenant des exemples emblématiques de la production de la néolittérature9. Ainsi, Kouélany réécrit son autobiographie à partir d’un ouvrage précédent qu’elle avait représenté sur la scène, et dont les traces se retrouvent dans le style de son récit, où elle exploite des procédés du langage oral. De même, l’œuvre de Niangouna prend sa dimension complète à travers la voix et la musique. Le rôle de se raconter n’est plus confié exclusivement au texte, mais à la convergence de tous les médias exploités.

Autobiographie et performance : déconstruire les frontières.

  • 10 Philippe Lejeune, Le pacte autobiographique, Paris, Seuil, 1975, p. 14.
  • 11 Ibid., p. 36.

3Décrire l’autobiographie et la performance pose un défi évident, car il s’agit de genres susceptibles d’hybridation et à la nature poreuse. Cependant, des définitions ont bien été proposées afin d’établir un point de départ théorique univoque. Philippe Lejeune, par exemple, considère l’autobiographie comme un « récit rétrospectif en prose qu’une personne réelle fait de sa propre existence, lorsqu’elle met l’accent sur sa vie individuelle, en particulier sur l’histoire de sa personnalité »10. Selon le théoricien, cette narration s’appuie sur un « pacte » entre le lecteur et l’auteur : ce dernier s’engage à raconter des événements authentiques, qu’il entend comme la « ressemblance au vrai »11. De l’autre côté, nous pouvons définir la performance comme

  • 12 Patrice Pavis, Dictionnaire de performance et du théâtre contemporain, Paris, Armand Colin, 2018, 2(...)

toute action, activité, opération, […] que l’on peut accomplir. […] Performance ou théâtre est le fait d’accomplir une action par l’acteur ou par tous les moyens de la scène. C’est là à la fois le processus de fabrication et de résultat final. […] La performance est la réalisation d’une action ou d’un texte, c’est l’événement qui en résulte12.

  • 13 Louis Patrick Leroux, « Théâtre autobiographique : quelques notions », Jeu, vol. 111, n°2, 2004, p. (...)

4Ces définitions, bien qu’elles permettent de situer la question dans des contours plus ou moins établis, ne tiennent pas compte de la plasticité des deux genres. Par exemple, le « récit en prose » exclut tout texte en vers, donc la poésie, ainsi que les écrits conçus pour la scène : « la tentation de nier la possibilité de la proposition paradoxale d’un théâtre autobiographique serait grande, et pourtant, ce théâtre existe »13.

  • 14 Françoise Simonent-Tenant (éd.), Dictionnaire de l’autobiographie, Paris, Honoré Champion, 2018.
  • 15 Ibid., p. 434.
  • 16 Patrice Pavis, op. cit.
  • 17 Ibid., p. 359.
  • 18 Françoise Simonent-Tenant (éd.), op. cit., p. 435.
  • 19 Patrice Pavis, op. cit., p. 359.
  • 20 Jean-Loup Amselle, Branchements : anthropoloque de l’universalité des cultures, Paris, Flammarion, (...)

5Cette coexistence entre récit de soi et représentation semble avoir lieu parce que les deux genres échappent à la cristallisation morphologique et sont de plus en plus creusés par d’autres formes artistiques. En effet, ce n’est pas un hasard si le Dictionnaire de l’autobiographie14 présente un large éventail de pratiques de narration de soi, qui se déploient sous différentes formes et sur différents supports, tout en accordant au terme « hybridisme » un espace de réflexion important. Ce mot appartenant au champ lexical de « la botanique et de [la] zootechnie désigne un composé de deux éléments de la nature différente anormalement réunis »15. Dans le Dictionnaire de la performance16, Patrice Pavis se penche lui aussi sur le même terme, le classifiant comme « un mélange des races, des espèces, dans le règne animal ou végétal »17. Ce qui surprend est que, si dans le domaine des études sur la narration de soi l’hybridisme est conçu comme une fusion « de deux textes de nature générique différente »18, dans le travail de Pavis, la définition de ce mot considère plutôt l’aspect culturel des performances post-modernes : il s’agit alors « d’un mélange d’éléments culturels, voire de leur juxtaposition »19, qui renvoie au multiculturalisme et à l’hybridisme étudié par Amselle20.

  • 21 « Any stricter definition would immediately negate the possibility of performance itself ». La trad (...)
  • 22 Bruno Péquignot, « De la performance dans les arts. Limites et réussite d’une contestation », Commu (...)

6Contrairement aux études sur le genre autobiographique, qui admettent son hybridation avec d’autres formes et médias, la performance se configure comme un art vivant et poreux. Goldberg affirme que « toute définition plus stricte nierait immédiatement la possibilité même de la performance »21, et Péquignot ajoute qu’« aucun concert, aucune représentation théâtrale, aucun ballet n’est identique à un autre, même si une partition, un texte, voire des indications d’exécution d’un ballet ou de mise en scène théâtrale, sont fixés par des consignes »22. Donc, par sa nature, la performance échappe aux classifications formelles et se définit plutôt par un acte pragmatique consistant à « accomplir une action ». C’est en cela qu’elle se rapproche de l’autobiographie qui, selon Cèspedes, repose elle aussi sur un « pacte »:

  • 23 Jaime Cèspedes, « Le problème ontologique de l’autobiographie », Cahiers de Narratologie. Analyse e (...)

L’autobiographie n’a pas de forme particulière et si elle est un genre ce n’est pas à cause de sa forme, mais grâce à […] un acte de confiance selon lequel le lecteur lit une autobiographie comme racontant la réalité et non comme un roman23.

  • 24 Françoise Simonent-Tenant (éd.), op. cit., p. 93.
  • 25 Ibid., p. 98.
  • 26 Patrice Pavis, op. cit., p. 91.

7En étendant l’analyse terminologique, l’adjectif « autobiographique » présente encore plus de facettes et englobe « peu ou prou […] tout ce qui pourrait concerner la vie de l’auteur et ses sentiments ou, du moins, [...] tout ce que le lecteur croit pouvoir interpréter comme tel »24. Ayant une dénotation plus large, ce terme définit les « diverses modalités de présence du sujet et d’essai de mise en récit de soi […] dans le texte »25 et s’associe à d’autres formes d’art et à d’autres médias, comme dans le cas de « performance autobiographique ». Cette dernière est classifiée par Pavis comme l’écriture d’un auteur sur lui-même, une tâche complexe au théâtre où la narration de soi est médiatisée par d’autres éléments – la scénographie, la musique, l’éclairage – et de manière polyphonique, ce qui rend l’œuvre non seulement une « écriture de soi », mais aussi une « monstration de soi »26.

8Pavis développe davantage ce point en définissant également l’auto-performance :

  • 27 Ibid.

Lorsque ce qui est dit de soi est simultanément incarné ou montré par un acteur (un « performeur »), on parle d’auto-performance*. Dans ce cas, l’acteur peut devenir un performeur. Ce dernier prétend qu’il n’est que lui-même, qu’il ne représente pas un personnage mais parle directement de sa propre vie : il a troqué la représentation pour la présentation* de soi27.

9L’auto-performance, donc, se rapproche de l’acte autobiographique tel que Lejeune l’a théorisé : ici, ce qui est raconté est incarné et montré par un interprète qui ne se contente pas de jouer son rôle, mais exprime en même temps quelque chose de lui-même et de sa propre vie. La « présentation de soi » sur scène révèle une vérité intime et personnelle, au-delà des stratégies dramaturgiques.

  • 28 Régis Durand, « Une Nouvelle Théâtralité: La Performance », Revue Française d’études Américaines, 1 (...)
  • 29 « Autobiographical work, community and applied drama, oral narrative, and oral performance, verbati (...)
  • 30 Magali Nachtergael, op.cit.

10Ainsi, la performance incorpore des éléments du théâtre dans les différentes formes d’expression, tout en explorant la théâtralité inhérente à ces pratiques artistiques28 pour les enrichir et les transformer. Il en résulte que son hybridation avec l’autobiographie peut être envisagée comme un déploiement de ce genre qui prend des formes multiples – « œuvres autobiographiques, théâtre communautaire et appliqué, récit oral et performance orale, théâtre documentaire […] »29 – et qui alimente l’approche « panoramique ou visualiste de la littérature contemporaine»30, exploitée également par Bill Kouélany et Dieudonné Niangouna.

Bill Kouélany: une artiste à la croisée des arts

11Comme Diane Chavelet le souligne,

  • 31 Diane Chavelet, « Du texte au corps », op. cit., p. 256.

Bill Kouélany définit son rapport intermédiatique à l’art comme une possibilité de dépassement de toutes les formes de déterminismes. Par là même, l’objet d’art devient geste de résistance poétique, en ce qu’il transgresse les attendus ‘d’engagement’ politique et interdit en même temps toute tentative de récupération réductrice du texte, de la toile, du spectacle31.

  • 32 Ses productions artistiques attirent progressivement l’attention du public et de la critique, jusqu (...)
  • 33 Pour cette étude nous faisons référence aux travaux de Diane Chavelet qui a publié des petits extra (...)

12En effet, la production artistique de l’auteure s’inscrit dans une convergence de pratiques, de formes expressives et de différents médias, allant des installations vidéo à la danse circassienne, en passant par l’écriture. Née Eulalie-Brigitte Kouélany en 1965 à Brazzaville, son parcours, ses relations familiales, les fractures politiques et sociales sont racontées dans son autobiographie Kipiala, ou la rage d’être soi. Ce texte se configure comme un véritable chemin de l’écrivaine qui raconte son émergence progressive en tant qu’artiste, jusqu’au moment de la création des Ateliers Sahm à Brazzaville. L’attention à la dimension intime et personnelle caractérise sa production plastique, notamment son œuvre exposée aux Documenta 12 de Kassel en 2007 : Untitled32. Il s’agit d’une évocation des conséquences de la guerre civile au Congo dans les années 1990 : un mur de papier mâché est parsemé d’extraits de divers journaux internationaux et de vidéos déformées de son visage. Le conflit civil est également au centre de son œuvre inédite Extrait d’acte de naissance33, mise en scène aux Ateliers du Plateau à Paris en 2015. Là encore, l’attention est portée sur le moi de l’auteure : il s’agit d’une autobiographie fleuve, ou plus précisément d’un monologue où le sujet reflète son chaos identitaire, métaphore du choc politique et social qui traumatise les Congolais.

13Point de convergence entre les différents ouvrages, l’autobiographie Kipiala décrit une quête identitaire qui sous-tend la recherche artistique et qui se nourrit d’expériences aussi bien littéraires que relationnelles et sexuelles : c’est le récit d’une identité indéfinie qui se constitue à partir de l’art, de la peinture et de la littérature. Pour ces raisons, ce livre se constitue comme un véritable point de confluence de plusieurs formes d’art et de la tentative de la part de l’auteure de dépasser la dimension de l’écrit. Par exemple, l’œuvre performative Extrait d’un acte de naissance est complètement englobée dans la narration, ce qui nous amène à nous questionner sur la cannibalisation, soit l’appropriation des caractéristiques, du texte performatif par celui autobiographique.

14Kipiala est un récit rétrospectif en prose à la première personne où narrateur-protagoniste et auteur coïncident. La structure même de l’œuvre suit une progression chronologique, divisée en chapitres qui vont de l’enfance, dominée par la sphère familiale, à l’âge adulte, où l’attention se porte de plus en plus sur la dimension artistique. La page initiale et celle qui clôt l’ouvrage encadrent l’histoire du point de vue géographique : le Congo est lui aussi un personnage, dont les changements, les divisions politiques et sociales constituent un écho des déchirures intimes et physiques subies par l’auteure. Dans l’excipit, celle-ci fait le bilan de sa vie :

  • 34 Bill Kouélany, Kipiala, op. cit., p. 342.

Au loin….
Au loin apparaissait Mougali.
Au loin apparaissait Bacongo.
Au loin apparaissait Kindamba.
Au loin apparaissait Djambala.
Au loin apparaissait Brazzaville.
Le Congo!34

15Cette évocation poétique de son pays s’associe à l’image, placée au tout début du livre, de la carte géographique du Congo, qui d’un côté crée une circularité dans le texte et, de l’autre, ancre la recherche de l’identité artistique de l’auteure à son pays. Cependant, la juxtaposition de ces deux expressions inscrit la narration autobiographique dans une forme plurielle qui ne se borne pas à la seule dimension textuelle.

  • 35 Ibid., 67.

16Le récit procède ainsi à travers cinq macro-sections, dont la première – intitulée « ET LA GUERRE DE COMMENCER » – est consacrée à l’enfance de l’auteure et se termine, de manière emblématique, par la découverte de sa passion pour la peinture et par le choix de se nommer Bill, un nom qu’elle adopte pour « déstabiliser, désorienter, faire bouger les lignes, ethniques, sexistes ou culturelles »35. Les macro-sections sont introduites par un fragment liminaire dans lequel le « Je » se présente devant les yeux du lecteur, et qui est en fait une reproduction du texte d’Extrait d’un acte de naissance.

  • 36 Bill Kouélany, Extrait d’acte de naissance, tapuscrit, 2007, p. 4-5. Cité par Diane Chavelet, « Du (...)

Si j’avais été une vraie enfant comme savent l’être les vrais enfants, avec une vraie mère, en ce soir de 1980, j’aurais su ajuster mes pas sur les empreintes du passé, et être sauvée de Naissance. (...)
Si j’avais été une vraie Africaine comme savent l’être les vraies Africaines, dans une vraie belle-famille africaine, j’aurais su lâcher un pet, puis deux pets et le lari, cette langue du coin, aurait facilité le glissement, terminé la besogne. (...)
Si j’avais été une vraie dépressive, comme savent l’être les vraies dépressives dans une vraie société constipée, j’aurais pu comme Chronos dévorant ces enfants, m’auto dévorer36.

17Il faut remarquer ici la similitude avec l’incipit du texte :

  • 37 Bill Kouélany, Kipiala, op. cit., p. 11-12.

J’aurais dû rester sur mes gardes cette nuit-là, J’aurais dû jouer les cauris et déjouer les signes de la parturition. Mais il y eut ce grand désarroi en revenant sur ma terre natale. Il n’avait pas suffi de m’en éloigner pour être guérie. Si j’avais été une vraie enfant, comme savent l’être les vrais enfants avec leur vraie mère, en foulant de nouveau la terre de Brazzaville en ce soir de juillet 1980, j’aurais su ajuster mes pas sur les empreintes du passé et être sauvée de ma naissance. […]
Si j’avais été une vraie Congolaise, comme savent l’être les vraies Congolaises, dans une vraie belle-famille congolaise, j’aurais appris à parler le lari, la langue du coin et celle de mes parents, et cela aurait facilité bien des choses. […]
Si j’avais été une vraie dépressive, comme savent l’être les vraies dépressives dans une vraie société constipée, j’aurais pu, comme Chronos dévorant ces enfants, m’auto-dévorer37.

18Non seulement l’incipit, mais toute la première partie semble coïncider avec Extrait d’un acte de naissance. Par exemple, le moment de l’accouchement est évoqué dans les deux textes :

  • 38 Bill Kouélany, Extrait d’acte de naissance, tapuscrit, 2007, p. 57. Cité par Diane Chavelet, « Du t (...)

« Au vu et au su de tout le monde » me reprochera plus tard Nick : un accouchement se fait dans la discrétion. Les autres ne doivent pas savoir quand et comment naît un enfant. Un enfant doit apparaître aux yeux de tous, tout fait, tout propre. Sans trace de crasse, d’obscurité, de matière incontrôlée. Une architecture sans trace du couturé. Une grammaire impeccable, irréprochable. Un livre pudique, sobre. Une langue propre38.

19Là encore, il y a plusieurs changements :

  • 39 Bill Kouélany, Kipiala, op. cit., p. 82.

Un taxi vint me chercher devant la maison, «au vu et au su de tout le monde», me reprocha plus tard Nick. Pour Nick, comme pour beaucoup, un accouchement doit se faire dans la discrétion, et l’enfant apparaître aux yeux de tous tout fait, tout propre. Sans trace de crasse, d’obscurité, de doute, de matière incontrôlée. Une grammaire impeccable. Une langue irréprochable. Une œuvre pudique et sobre. Mon œuvre sera de l’ordre de la crasse, de l’obscurité, du doute, de la matière incontrôlée, des coutures volontairement grossières. [...]39

20Non seulement le texte est parfaitement cohérent avec celui de la performance, au point que nous pouvons les considérer comme identiques, mais la première section porte en elle les traces d’une écriture influencée par l’oralité.

  • 40 Ibid., p. 16.
  • 41 Ibid., p. 49.
  • 42 Bill Kouélany, Kipiala, op. cit., p. 13.

21L’auteure transpose sur papier un conte oral qui avance et recule dans le temps, anticipant certains événements ou détails qui seront repris plus tard. Ainsi, lorsqu’elle aborde le thème du combat civil dans le premier chapitre de la première section, elle interrompt le récit pour renvoyer le lecteur à un moment ultérieur dans l’histoire : « Mpila est aussi un quartier résidentiel à forte connotation politique ; c’est depuis ses grandes maisons bien gardées que le Congo est dirigé. […] Mpila, c’est le lieu d’où les guerres qu’éprouveront les Congolais dans leur chair dans les années 1990 ont été pensées. Mais je n’en suis pas encore là… »40. Cet expédient revient plusieurs fois, toujours lorsqu’elle fait allusion au conflit : « Et le prix à payer sous le commandement de Kolélas sera très élevé au cours des guerres civiles de 1993-1997. Mais pas trop vite… »41. Le désir de l’auteure de retarder et d’avancer lentement vers le point central de la narration, qui sera précisément le moment des luttes fratricides, ressort par le biais d’une mimesis de l’oral. De plus, l’écrivaine exploite la répétition de phrases, qui sont insérées dans le texte comme un refrain, cadençant le passage du temps de l’existence de l’artiste et rappelant, d’autre part, l’événement traumatique qui est sur le point d’éclater. L’énoncé « ET LA GUERRE DE COMMENCER 42», s’insinue dans les plis du récit, comme le tic-tac d’une horloge endeuillée qui rapproche ce destin malheureux au fur et à mesure qu’il se profile. D’ailleurs, la répétition qui fait allusion au conflit reflète le développement de la conscience de l’auteure et s’associe toujours à des moments clés de sa vie où elle éprouve de nouvelles émotions :

  • 43 Ibid., p. 83-84.

Dans la chambre, je nourrissais Chris au sein […] Assise sur le lit, le petit bien calé dans mes bras, je lisais mes leçons à haute voix, lui parlais d’Héraclite, de Platon, de Socrate et de Sartre. Lui gazouillait à la vibration de ma voix. Puis vint le moment où ses yeux durent s’ouvrir au monde et, avec eux, la porte de la chambre…
Et la guerre de commencer43.

  • 44 Ibid., p. 112.

22Ou encore : « Un jour le mot “amour” arrive. Il arrive toujours, quoi qu’on dise ou fasse. Et la guerre de commencer … Quand commence la guerre, se défendre ne sert à rien. Très tôt, j’ai pris le parti de la fuite »44. Donc, bien que la phrase puisse initialement servir de présage de l’événement traumatique, créant une tension et une anticipation, elle acquiert au fil de la narration des significations supplémentaires. En reflétant les expériences et les émotions personnelles de l’auteure à mesure que le conflit se rapproche, elle révèle une dimension intime d’un combat intérieur, qui se manifeste de manière extrême dans la violence collective.

  • 45 Bill Kouélany, op. cit., p. 85.

23Donc, le texte de Bill Kouélany, qui fusionne l’autobiographisme et l’oralité, se présente comme un espace dynamique où l’auteure hybride les genres à travers une narration oscillant continuellement entre la prose et la langue vivante. Les interruptions stratégiques du discours, qu’imite le flux et le reflux de la parole, permettent à l’écrivaine de renvoyer aux lecteurs la complexité de l’expérience intime ainsi que la difficulté de sa maturation en tant qu’artiste. La réécriture de l’ouvrage performatif ne correspond pas à un effacement total de ce dernier, mais, au contraire, Extrait d’un acte de naissance est subtilement intégré dans l’autobiographie, reflétant ainsi l’identité artistique « multiforme »45 de Kouélany.

Dieudonné Niangouna : un écrivain-performeur sans protocoles

24Dieudonné Niangouna a toujours refusé toute classification pour sa production et n’a jamais revendiqué de protocole d’écriture, comme il le dit lui-même :

  • 46 Olivier Neveux, « Clandestin du théâtre. Entretien avec Dieudonné Niangouna, réalisé par Olivier Ne (...)

si je mets en place un protocole je vais empêcher d’autres hérésies de me parler. Mes aïeux les Grecs pourraient s’exprimer mais pas mes autres aïeux les Bntous car le protocole leur aurait exigé un visa que le consulat du même protocole n’a pas voulu leur octroyer … […] Je me lâche tel que je suis – l’esprit à poil, les triples à l’air -, ça veut dire quoi ? Théâtre, cinéma, contes de ma grand-mère … tous rentrent dans ce temple, on a ouvert les portes. Et l’extase créera46.

  • 47 « Dieudonné Niangouna, lauréat du Prix du Jeune théâtre Beatrix Dussane – André Roussin », Artecena(...)

25Né dans la ville de Brazzaville en 1976, adolescent il montre sa vocation pour le théâtre qui le conduit à fonder en 1997 la compagnie Les Bruits de la rue, avant d’être reconnu à l’étranger. Dès le début de sa carrière il mêle la langue classique à la populaire47, se présentant ainsi comme un auteur ouvert à toutes confluences. Son véritable procédé consiste en effet à fusionner l’écrit à la parole dans l’acte de la création artistique :

  • 48 Olivier Neveux, op. cit., p. 25.

je marche beaucoup et je parle, dans la vie je parle quand je marche, pas seulement quand je travaille, dans n’importe quelle situation. Et quand je parle qu’est que je fais ? Je suis déjà en train d’écrire. […] Et je sais très bien que je suis en train d’écrire. Il n’y a pas d’état second. Je suis conscient de cette énergie et je la pense et la questionne. […] C’est cela un acteur de l’écriture48.

  • 49 Ibid., p. 26.
  • 50 Niangouna Dieudonné, Le Kung-fu, Besançon, Les Solitaires Intempestifs, 2014a.

26L’acte d’écriture et celui de parole ne sont pas simplement mis côte à côte, mais se chevauchent en créant une interaction dynamique. Cette superposition enrichit le processus créateur intégrant la spontanéité et l’expressivité de voix à l’écrit. Plutôt que de se concentrer sur la perfection formelle – structure, style, rythme –, l’objectif est de laisser les idées couler librement49. Cela permet de capturer l’essence brute et authentique de son imagination, avant que toute analyse ou révision n’intervienne. De même qu’il n’adopte aucun procédé d’écriture spécifique, de même il rejette toute catégorisation ou étiquette pour son théâtre. Cette absence de classification ne nous empêche pas de remarquer que les ouvrages de Niangouna sont imprégnés de son vécu et de ses expériences personnelles. Par exemple, dans Le Kung-Fu50, où « Je » sur la scène est performé par l’auteur lui-même, il relate les influences culturelles, cinématographiques et littéraires vécues pendant sa jeunesse :

  • 51 Ibid., p. 11.

Quand j’étais gamin, je regardais des films d’auteur avec mon père sur le canapé […] Lorsque mon père a pris connaissance de ma passion pour le kung-fu, il m’a dit : « Écoute, fiston, je vais t’envoyer en Chine pour apprendre au temple Shaolin. […] » J’attendais et rien ne se faisait. […] Et finalement, un jour, il est mort51.

  • 52 Ibid., p. 51.

27L’autobiographie des influences cinématographiques de Dieudonné Niangouna se déploie à travers sept fragments, où les répliques de films célèbres côtoient les récits d’événements à la première personne, jusqu’à la conclusion du texte : « Ne m’appelle plus Dieudonné Niangouna./ Appelle-moi Jack Sparrow.// My name is Ajax. Jake LaMotta. Mon nom est Pecos. /Je suis Keyser Söze52 ». L’identité de Dieudonné se mêle aux personnages fictifs du cinéma, créant ainsi un collage d’identités qui superpose sa réalité à l’invention cinématographique. En associant son nom à des héros fictifs, Niangouna explore les facettes multiples et complexes de son être, fusionnant son histoire personnelle avec les archétypes et les mythologies créés par le cinéma.

28La question autobiographique se pose de manière évidente dans Les Inepties Volantes qui décrit la survie du dramaturge pendant la troisième guerre civile ethnique au Congo-Brazzaville entre 1997 et 1999. Il évoque le conflit entre les « Cobras » – milices de l’ex-président Pascal Lissouba – et les « Nindjas » – groupe armé du président Denis Sassou Nguesso. La fracture sociale s’exprime dans un monologue en treize fragments dont la rupture est accentuée par une écriture orale brute et fragmentée, tant sur le plan thématique que sur le plan syntaxique. En effet, la pièce est saturée de virgules et de points de suspension, dès le début :

  • 53 Niangouna Dieudonné, Les inepties volantes, op. cit., p. 13.

… Sortie du Marché Total, avenue de L’OUA, au coin l’école Saint-Exupéry sur l’avenue Tchicaya-U-Tam-si, je longe le goudron du poète qui finit par tomber sur les bras de la télévision, une fois viré à droite et quand on se trouve au pied de la télé une Joël en diagonale se précipite dans la vallée, passe une rigole, je grimpe la pente légère et me retrouve dans les bois, mais déjà il fait moins froid que l’atmosphère sinistre de ce février 1994, le moindre battement d’ailes s’étend à des échos-lumière, rare est le gazouillement d’un insecte récalcitrant, la peur fait craquelés les écorces des arbres qui s’immobilisent dans leur sens de parcours aussi muets que le temps moisi du suspens, mes pas éjectent le qui-vive, vagabond je dépose ma conscience sur une pierre et c’est un robot dire une massue par-dessus la pacotille, le cœur net comme s’il sortait d’une carrosserie de bagnole, l’attitude tellement peu importe interpelle quelques maîtres du lieu qui se voient obligé de me ramener à la ligne, n’eût été leurs sifflets ponctués de quelques chargements rapide de Kalashnikov je n’aurais pas fait la con et sciences de la première barricades […]53

  • 54 Théâtre contemporain, « Entretien croisé avec Dieudonné Niangouna et Pascal Contet », Théâtre conte (...)

29Le texte procède ainsi sans aucun signe de point final, ce qui produit un flou continu de mots qui fait éclater le rythme. Les seuls points sont ceux qui ouvrent et clôturent chaque partie : ainsi, le récit intime prend la forme d’un discours fragmenté, coupé, laissant entrevoir l’impossible à dire, qui reflètent le chaos et le trauma du conflit. C’est en effet le non-dit de son histoire personnelle vis-à-vis du devoir de témoignage qui le pousse vers la réalisation de Les Inepties Volantes : « Je crois que c’est en regardant ma fille grandir que je me suis soudainement dit “ta fille ne sait pas qui tu es” […] Quelque part, c’est un peu comme si je racontais une histoire à ma fille tout en essayant de partager cette expérience avec une multitude de gens inconnus »54. Niangouna insiste néanmoins sur l’élément de fiction qui imprègne cet ouvrage, expliquant comment la matière autobiographique a nécessairement subi une métamorphose à chaque étape de la rédaction :

  • 55 Ibid.

J’ai donc essayé de me souvenir de ces instants terribles, de les trier, de choisir les plus flagrants, les plus touchants, les plus significatifs. Ensuite, quand je l’ai écrit, c’est obligatoirement devenu une fiction puisque mon écriture modifie les images du souvenir, d’autant plus que je l’ai fait quinze ans après les événements. Je ne fais pas du reportage ou du théâtre documentaire. On est donc très loin du réel mais tout proche d’une vérité qui traverse les déchirures de ma propre vie et celles de tous ceux qui ont vécu ces trois guerres civiles55.

  • 56 Ibid.

30De ce point de vue, on comprend la perception que Niangouna a du récit autobiographique lorsqu’il est soumis à la représentation : l’auteur ne cherche pas à créer ici un théâtre documentaire, mais plutôt à transmettre un sentiment de vérité qui va au-delà de la simple transposition du réel. Cette « vérité » est une mise en scène de ses expériences personnelles et des émotions qui y sont associées, lesquelles peuvent être partagées avec le public à travers son travail artistique. L’accent est mis ici sur la différence entre le « réel », c’est-à-dire la réalité objective des événements, et la « vérité », qui se réfère à la connaissance subjective de ses expériences vécues : « C’est le sentiment de la douleur que je veux exprimer »56. Le théâtre filtre donc inévitablement le souvenir et l’événement autobiographique pour restituer au spectateur non pas les faits réels, mais leur perception émotionnelle.

  • 57 Ibid.
  • 58 Ibid.
  • 59 Catherine Mazauric, « Les débords musicaux du texte: Vers des pratiques transartistiques de la dés (...)
  • 60 Jean-François Perrier, op. cit.
  • 61 Catherine Mazauric, op. cit., p. 104.

31En effet, on peut relire le choix de Niangouna d’accompagner la représentation du texte d’intervalles musicaux sous la direction du compositeur Pascal Contet, et voir ce que cela apporte de plus. Les Inepties volantes sur scène se présente comme un duetto : « la musique vient en contrepoint d’une sorte de basse continue qui serait le texte. Ce sont les interstices des deux formes, musicale et textuelle, qui permettront aux spectateurs d’avoir, en fin de parcours, une perception globale de l’œuvre »57. Comme l’expliquent les deux artistes: « Notre accord était total autour de l’idée que le texte devait avoir un aspect musical et la musique un aspect textuel. La rythmique des textes de Dieudonné est perceptible à la première lecture » 58. Musique et mots, comme le souligne Mazauric, sont « soumis à une relative plasticité »59 mais confluent à donner à la parole une dimension dominante : « certaines parties sont essentiellement textuelles, d’autres où la musique est prépondérante. En écoutant la musique de Pascal, j’ai eu envie parfois que ce soit la musique qui enclenche ma parole, qu’elle soit prioritaire. Tout notre travail consiste à établir un vrai dialogue entre le texte et la musique »60. En agissant ainsi, l’écriture autobiographique se lie complètement à la musique, devenant presque une partition61 : en l’absence d’exécution, un sentiment d’ « inachèvement » se produit chez le lecteur, qui se limite à la dimension de l’écrit et ne fait pas la même expérience de l’œuvre de la même manière que le spectateur lors de la représentation.

Conclusions

32Les exemples de Kouélany et de Niangouna illustrent clairement comment la narration de soi s’hybride dans le style et la forme à travers la pratique de la performance. La performance étant extrêmement fluide et ouverte à diverses expressions, elle se combine avec l’écrit de différentes manières pour ces écrivains. Dans l’autobiographie de Bill Kouélany, l’œuvre théâtrale est intégrée et fusionnée dans le récit du soi, laissant cependant des traces évidentes dans le style de l’auteure. L’écriture de Kouélany s’ouvre à de multiples instances artistiques, inscrivant l’ouvrage dans une dimension plurielle et polymorphe. Le texte pour la scène s’intègre dans l’autobiographie « canonique » selon la définition de Lejeune, mais, en même temps, il ne disparaît pas complètement, continuant à résonner dans le récit comme une voix vivante. Si pour Kouélany l’hybridisme consiste à contaminer l’écrit par les traces de l’oral, pour Dieudonné Niangouna la parole est le point de départ de sa création artistique. Le sujet qui s’expose dans son œuvre ne se limite pas à la seule dimension textuelle, mais se manifeste à travers d’autres formes, comme la musique, en illustrant comment l’autobiographisme et sa fixation sur le support de l’écriture ne sont plus un point de départ ou d’arrivée, mais un élément transitif qui participe à une expression polyphonique du moi.

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Bibliographie

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Notes

1 Waberi Abdourahman Ali, « Les enfants de la postcolonie : Esquisse d’une nouvelle génération d’écrivains francophones d’Afrique noire », Notre Librairie, n°135, 1998, p. 8-15.

2 Bill Kouélany, Kipiala ou la rage d’être soi, Paris, Les Avrils, 2021.

3 Dieudonné Niangouna, Les inepties volantes. Suivi de Attitude Clando, Besançon, Les Solitaires Intempestifs, 2010.

4 Diane Chavelet, « Le texte au corps: Dieudonné Niangouna et Bill Kouélany : de l’écriture à la performance », Po&sie vol. 3, n°157-158, 2016, p. 248, consulté le 19/04/2022, https://0-www-cairn-info.catalogue.libraries.london.ac.uk/revue-poesie-2016-3-page-247.htm?ref=doi.

5 Susanne Gehrmann, Vom Entwerfen des Ich im Erinnern des Wir? Überlegungen zur Autobiographik in Afrika ; Antrittsvorlesung, 21. April 2004, Humboldt-Universität zu Berlin, Philosophische Fakultät III, Institut für Asien- und Afrikawissenschaften, Berlin, Humboldt-Univ, 2005 ; Susanne Gehrmann, Autobiographik in Afrika, Trier, WVT Wissenschaftlicher Verlag Trier, 2021 ; Gehrmann Susanne et Claudia Gronemann (éds), Les enjeux de l’autobiographique dans les littératures de langue française : du genre à l’espace, l’autobiographie postcoloniale, l’hybridité, Paris, Budapest, Kinshasa, l’Harmattan, 2006.

6 « The popularity of autobiography as a genre in contemporary Black cultures can be accounted for its prevalence in traditional African societies. There, the genre, link other literary genres, was oral, and it served several functions in the storytelling traditions of various African communities ». La traduction dans le texte est de l’auteure. Adetayo Alabi, Telling Our Stories : Continuities and Divergences in Black Autobiographies, New York, Palgrave Macmillan, 2005, p. 2.

7 Magali Nachtergael, « Écritures plastiques et performances du texte : une néolittérature ? », dans Elisa Bricco (éd.), Le bal des arts, Macerata, Quodlibet, 2015, https://0-books-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/quodlibet/506.

8 Cette recherche s’encadre dans le sillages des études conduit par le groupe de recherche VISAGE (Variazioni e Ibrisismi delle Scritture Autobiografiche nelle Letterature di LinGua FrancESe) et le sous-groupe Dopo il primato, de l’Osseratorio sul Romanzo Contemporaneo qui étudie les tendances thématiques, morphologiques et théoriques des écritures de soi dans l’espace français et francophone et dont les premiers résultats ont été récemment publiés : AA.VV., Le scritture del sé nel romanzo francese e francofono contemporaneo : osservazioni su un cantiere aperto, «Aura. Rivista letteratura e storia delle idee», 4, 2023, pp. 103-141, https://www.aurarivista.it/4-2023/3962/.

9 Magali Nachtergael, op.cit.

10 Philippe Lejeune, Le pacte autobiographique, Paris, Seuil, 1975, p. 14.

11 Ibid., p. 36.

12 Patrice Pavis, Dictionnaire de performance et du théâtre contemporain, Paris, Armand Colin, 2018, 2ème éd., p. 535.

13 Louis Patrick Leroux, « Théâtre autobiographique : quelques notions », Jeu, vol. 111, n°2, 2004, p. 75.

14 Françoise Simonent-Tenant (éd.), Dictionnaire de l’autobiographie, Paris, Honoré Champion, 2018.

15 Ibid., p. 434.

16 Patrice Pavis, op. cit.

17 Ibid., p. 359.

18 Françoise Simonent-Tenant (éd.), op. cit., p. 435.

19 Patrice Pavis, op. cit., p. 359.

20 Jean-Loup Amselle, Branchements : anthropoloque de l’universalité des cultures, Paris, Flammarion, 2001.

21 « Any stricter definition would immediately negate the possibility of performance itself ». La traduction est de l’auteure. RoseLee Goldberg, Performance Art, Londres, Thames and Hudson, 1979, p. 9.

22 Bruno Péquignot, « De la performance dans les arts. Limites et réussite d’une contestation », Communications, n°92, 2013, p. 10.

23 Jaime Cèspedes, « Le problème ontologique de l’autobiographie », Cahiers de Narratologie. Analyse et théorie narratives, vol. 10, n°1, 2001, p. 275, consulté le 12 mars 2024 : https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/narratologie/6952.

24 Françoise Simonent-Tenant (éd.), op. cit., p. 93.

25 Ibid., p. 98.

26 Patrice Pavis, op. cit., p. 91.

27 Ibid.

28 Régis Durand, « Une Nouvelle Théâtralité: La Performance », Revue Française d’études Américaines, 10, 1980, p. 199–207, consulté le 30 Mars 2024, http://0-www-jstor-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/stable/20872783.

29 « Autobiographical work, community and applied drama, oral narrative, and oral performance, verbatim drama, documentary drama, testimonial performance, […] ». La traduction est de l’auteure. Deirdre Heddon, Autobiography and Performance. Performing selves, London, Bloomsbury, 2007.

30 Magali Nachtergael, op.cit.

31 Diane Chavelet, « Du texte au corps », op. cit., p. 256.

32 Ses productions artistiques attirent progressivement l’attention du public et de la critique, jusqu’à l’amener à exposer au Documenta 12 à Kassel, en devenant ainsi la première personne de l’Afrique subsaharienne à exposer dans ce prestigieux contexte artistique international (https://universes.art/en/documenta/2007/aue-pavilion/bill-kouelany).

33 Pour cette étude nous faisons référence aux travaux de Diane Chavelet qui a publié des petits extraits de l’œuvre inédite.

34 Bill Kouélany, Kipiala, op. cit., p. 342.

35 Ibid., 67.

36 Bill Kouélany, Extrait d’acte de naissance, tapuscrit, 2007, p. 4-5. Cité par Diane Chavelet, « Du texte au corps », op. cit., p. 249.

37 Bill Kouélany, Kipiala, op. cit., p. 11-12.

38 Bill Kouélany, Extrait d’acte de naissance, tapuscrit, 2007, p. 57. Cité par Diane Chavelet, « Du texte au corps », op. cit., p. 252.

39 Bill Kouélany, Kipiala, op. cit., p. 82.

40 Ibid., p. 16.

41 Ibid., p. 49.

42 Bill Kouélany, Kipiala, op. cit., p. 13.

43 Ibid., p. 83-84.

44 Ibid., p. 112.

45 Bill Kouélany, op. cit., p. 85.

46 Olivier Neveux, « Clandestin du théâtre. Entretien avec Dieudonné Niangouna, réalisé par Olivier Neveux », Théâtre Public, « Dieudonné Niangouna », 232, Avril-Juin 2019, p. 20-33, p. 25.

47 « Dieudonné Niangouna, lauréat du Prix du Jeune théâtre Beatrix Dussane – André Roussin », Artecena, consulté le 23 avril 2023, https://www.artcena.fr/fil-vie-pro/dieudonne-niangouna-laureat-du-prix-du-jeune-theatre-beatrix-dussane-andre-roussin

48 Olivier Neveux, op. cit., p. 25.

49 Ibid., p. 26.

50 Niangouna Dieudonné, Le Kung-fu, Besançon, Les Solitaires Intempestifs, 2014a.

51 Ibid., p. 11.

52 Ibid., p. 51.

53 Niangouna Dieudonné, Les inepties volantes, op. cit., p. 13.

54 Théâtre contemporain, « Entretien croisé avec Dieudonné Niangouna et Pascal Contet », Théâtre contemporain, consulté le (24 mars 2024), https://www.theatre-contemporain.net/spectacles/Les-Inepties-volantes/ensavoirplus/.

55 Ibid.

56 Ibid.

57 Ibid.

58 Ibid.

59 Catherine Mazauric, « Les débords musicaux du texte: Vers des pratiques transartistiques de la désappartenance (Léonora Miano, Dieudonné Niangouna) », Nouvelles Études Francophones, 1, 27, Printemps 2012, p. 99-114, p. 104.

60 Jean-François Perrier, op. cit.

61 Catherine Mazauric, op. cit., p. 104.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Adelaide Pagano, « De la page à la scène, de la scène à la page. L’hybridité des écritures de soi chez Bill Kouélany et Dieudonné Niangouna »TRANS- [En ligne], 30 | 2024, mis en ligne le 03 octobre 2024, consulté le 14 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/trans/9865 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12ewg

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