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Le petit livre rouge de Mao, une rhétorique au service de la révolution

Mao’s Little Red Book, a rhetoric in the service of the revolution
Il piccolo libro rosso di Mao, una retorica al servizio della rivoluzione
Qingya Meng

Résumés

L’ouvrage écrit en chinois intitulé Citations du président Mao Tsé-Toung, plus connues sous le nom du « petit livre rouge », paraît en 1964 ; il est destiné au peuple chinois afin de l’exhorter à faire la révolution. Il est publié en français à la fin décembre 1966, à une époque où les intellectuels prochinois découvrent avec enthousiasme les écrits idéologiques de Mao. Dans le même temps, une partie de la jeunesse française, en quête d’un nouvel idéal politique, se tourne vers une Chine maoïste idéalisée, s’empare du petit livre rouge pour tenter de mettre en œuvre une révolution idéologique. L’Orient forge alors un imaginaire de subversion. En nous appuyant sur le petit livre rouge, nous chercherons à interroger la posture des intellectuels maoïstes ou sympathisants, enthousiasmés par la théorie marxiste de Mao mais aussi de celle de la jeunesse française qui a su forger un imaginaire de la révolution à partir des citations de Mao.

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Texte intégral

  • 1 La Révolution culturelle déclenchée par Mao a pour objectif de mettre un terme au passé de la Chine (...)
  • 2 « La Pensée chinoise », Tel Quel, n°48/49, printemps 1972, p. 3-7, p. 3. 

1En 1949, Mao devient le premier président de la République populaire de Chine. Dix ans plus tard, il est écarté de la direction du Parti communiste chinois après l’échec de sa politique économique, le fameux « Grand Bond en avant » (1958-1960), qui a asphyxié l’organisation de l’agriculture, provoquant deux graves famines et la mort de dizaines de millions de paysans. En 1964, alors que Mao tente de reconquérir le pouvoir, apparaît la publication du petit livre rouge avec l’accord de ce dernier et supervisé par le vice-président Lin Piao. En chinois, le livre est connu du peuple sous le nom de Hongbaoshu, qui signifie en français le Livre-trésor rouge. Cet ouvrage, imprimé à plus d’un milliard d’exemplaires, réunit des citations des discours de Mao depuis son entrée en politique dans les années 1920, afin d’exhorter le peuple chinois à faire la révolution. Deux ans plus tard, Mao lance la Révolution culturelle (1966-1976)1 afin de mettre en marche, sur le plan idéologique, le « renouveau du marxisme-léninisme »2. Il encourage le fanatisme des jeunes Gardes rouges qui représentent son bras armé, prêts à mourir pour lui, le petit livre à la main. Néanmoins, ces dix années de Révolution culturelle vont contribuer à la multiplication des pires exactions commises à l’encontre du peuple chinois, arrestations arbitraires, condamnations à mort, camps de rééducation.

  • 3 « La Pensée chinoise », op. cit., p. 4.
  • 4 Simon Leys, Essais sur la Chine, Paris, Robert Laffont, 1998, p. 13.
  • 5 Ibid.

2Pendant cette période, en France, la Révolution culturelle chinoise donne matière à penser à de nombreux intellectuels de gauche qui rêvent de révolution pour transformer l’Occident en un monde meilleur. Ainsi la revue de littérature d’avant-garde Tel Quel prend position dès 1966 en faveur de la Révolution culturelle chinoise comme ayant « valeur d’exemple pour tout mouvement et toute pensée révolutionnaire dans le monde »3. Ce désir de révolution qui se propage notamment parmi les jeunes, convoque de nouveaux débats politiques au sein de la gauche française d’autant que le Parti communiste français amorce son déclin. Opposé à l’idéologie maoïste développée par Tel Quel, le sinologue Simon Leys (1935-2014) précise que la Révolution culturelle « n’eut de révolutionnaire que le nom, et de culturel que le prétexte tactique initial »4. Il ajoute qu’elle « n’a été qu’une lutte pour le pouvoir, menée au sommet entre une poignée d’individus, derrière le rideau de fumée d’un fictif mouvement de masses »5.

3Ces deux positions antagonistes justifient notre recherche qui vise à interroger la dénomination « révolution » à travers la rhétorique du petit livre rouge ; nous chercherons d’abord à appréhender la dimension langagière de la rhétorique de Mao. En effet, ce dispositif d’écriture s’articule autour de différents procédés stylistiques qui confèrent au discours sa puissance idéologique. Cette approche vise aussi à comprendre en quoi le succès du petit livre rouge en France participe à un désir de révolution. Il s’agit donc d’interroger la posture des intellectuels maoïstes ou sympathisants, enthousiasmés par l’étude de la théorie de Mao mais aussi de celle des jeunesses occidentales qui ont forgé un imaginaire de la révolution à partir des citations du petit livre rouge.

Le petit livre rouge : un discours idéologique

4Le petit livre rouge se compose de 427 citations de Mao classées en 33 chapitres, chacun se rapportant à un thème. Le sommaire présenté ci-dessous donne un aperçu du discours révolutionnaire qui caractérise cet ouvrage.

I. Le Parti communiste

II. Les classes et la lutte des classes

III. Le socialisme et le communisme

IV. La juste solution des contradictions au sein du Peuple

V. La guerre et la paix

  • 6 En chinois, le « Tigre en papier » est un animal féroce, cruel et puissant ; cette expression est e (...)

VI. L’impérialisme et tous les réactionnaires sont des tigres en papier6

VII. Oser lutter, oser vaincre

VIII. La guerre populaire

IX. L’armée populaire

X. Le rôle dirigeant des comités du Parti

XI. La ligne de masse

XII. Le travail politique

XIII. Les rapports entre officiers et soldats

XIV. Les rapports entre l’armée et le Peuple

XV. Les « trois démocraties »

XVI. L’éducation et l’entraînement des troupes

XVII. Servir le Peuple

XVIII. Le patriotisme et l’internationalisme

XIX. L’héroïsme révolutionnaire

XX. Édifier le pays avec diligence et économie

XXI. Compter sur ses propres forces et lutter avec endurance

XXII. Méthodes de pensée et de travail

XXIII. Enquêtes et recherches

XXIV L’auto-éducation idéologique

XXV. L’unité

XXVI. La discipline

XXVII. La critique et l’autocritique

XXVIII. Les communistes

XXIX Les cadres

XXX. Les jeunes

XXXI. Les femmes

XXXII. La culture et l’art

  • 7 Citations du président Mao Tsé-Toung, Pékin, Foreign Languages Press, 1966, p. 349-351.

XXXIII. L’étude7

  • 8 François Fejtö, « La pensée de Mao et la révolution culturelle », Esprit, n°414, juin 1972, p. 943- (...)

5En 1964, le Parti communiste chinois donne l’ordre à toute l’armée d’étudier la pensée de Mao ; puis en 1966, cette injonction s’étend à tout le peuple chinois, enfants, jeunes, adultes et personnes âgées. La phase de l’« endoctrinement »8 des masses voulue par Mao est en marche.

  • 9 François Fejtö, op. cit., p. 948.

6Pour bien comprendre l’importance du petit livre rouge, il faut rappeler des éléments de la théorie de Mao. Comme l’explique le sinologue François Fetjö, à partir de 1958, Mao entraîne « le parti et l’administration, ainsi que les masses paysannes et ouvrières dans une offensive générale contre le sous-développement avec les mots d’ordre frappant l’imagination »9. Dans ce contexte, il donne

  • 10 Citations du président Mao Tsé-Toung, op. cit., p. 281.

7la priorité au politique, ce par quoi il voulait dire que la politique, la volonté concentrée au sommet du pouvoir, sa capacité de mobiliser les masses doit avoir la priorité sur toutes les autres réalités10.

8Le terme « masse » est un mot clé de la théorie maoïste, reproduit cent trente-huit fois dans le petit livre rouge. Il désigne tout à la fois le peuple chinois, les paysans, les ouvriers, les cadres, les intellectuels, les étudiants, les jeunes, sans distinction de classe. Même si la Révolution culturelle ne démarre qu’en 1966, tous les ingrédients sont réunis dans le petit livre rouge pour édifier la société révolutionnaire, fondée sur le système communiste chinois qui s’est mis à distance à cette époque du Parti communiste soviétique (ex URSS).

9Cet opuscule décrit l’organisation de la société communiste qui repose sur une relation tripartite : le Parti, le Peuple, l’Armée. Dans le petit livre rouge, on peut lire qu’il faut

  • 11 Ibid.

réaffirmer les règles de la discipline du Parti : 1) soumission de l’individu à l’organisation ; 2) soumission de la minorité à la majorité ; 3) soumission de l’échelon inférieur à l’échelon supérieur ; 4) soumission de l’ensemble du Parti au Comité central. Quiconque viole ces règles sape l’unité du Parti11.

10La règle d’or de cette organisation, c’est le strict respect des valeurs morales qui président à l’édification du système communiste chinois, à commencer par le patriotisme, la discipline, l’unité, l’éducation idéologique, l’héroïsme révolutionnaire.

11Puis l’ouvrage expose également les méthodes à adopter pour réaliser le projet de la société révolutionnaire chinoise, à savoir la critique et l’auto-critique, l’éducation et la rééducation, la lutte des classes ou celle contre l’impérialisme américain mais aussi le révisionnisme soviétique.

12Sur le plan phénoménologique, le texte du petit livre rouge est conçu pour être appris par cœur par ses lecteurs. Le principe de la concision des citations facilite une telle obligation. Les citations de Mao fonctionnent comme des formes textuelles autonomes les unes par rapport aux autres. Car le dispositif d’écriture se compose uniquement d’extraits des discours et des Œuvres choisies de Mao. C’est un genre littéraire très singulier qui s’appuie sur un agencement spécifique entre les citations et leurs sources toujours mentionnées. Aucun commentaire ne figure dans le texte. De même, aucun lien n’existe entre les différentes citations.

  • 12 Ce livre contient les aphorismes de Confucius (551-479 av. J.-C.) ainsi que les discussions entre l (...)
  • 13 Anne Cheng, « Un classique qui n’en finit pas de faire parler de lui. Les “Entretiens” de Confucius (...)

13Un tel procédé permet d’évoquer la relation d’analogie entre le petit livre rouge et Les Entretiens de Confucius, ou les Analectes de Confucius (Lunyu)12. Selon la sinologue Anne Cheng, Les Entretiens « apparaissent comme des bribes – voire des miettes – de la conversation du Maître Confucius »13. Le propos, remarquable par sa concision, vise avant tout à énoncer une vérité pour éduquer les disciples, qu’il est impossible de mettre en doute.

  • 14 Pierre Fontanier, Les figures du discours, Paris, Champs Flammarion, 1977 [1830], p. 99.
  • 15 « Qui écoute les deux côtés aura l’esprit éclairé, qui n’écoute qu’un côté restera dans les ténèbre (...)
  • 16 « Pour connaître réellement un objet, il faut embrasser et étudier tous ses aspects, toutes ses lia (...)

14Par ailleurs, Mao recourt également au procédé citationnel dans ses discours puisqu’il introduit fréquemment des proverbes ou dictons chinois, mais peut aussi emprunter une phrase prononcée par un haut dignitaire de la Chine impériale. Le linguiste Pierre Fontanier (1765-1844) résumait la spécificité du procédé de la façon suivante : « Présenter une idée sous le signe d’une autre idée plus frappante et plus connue qui, d’ailleurs, ne tient à la première par aucun autre lien que celui d’une certaine conformité ou analogie. »14 Mao cite à cet égard Wei Tcheng, premier ministre de la dynastie des Tang de la Chine impériale15 mais aussi Lénine16 ou des philosophes et historiens chinois.

  • 17 Ibid., p. 13.
  • 18 Ibid., p. 70.
  • 19 Ibid., p. 76.

15Les discours de Mao sont remplis d’aphorismes. On en retrouve donc quelques-uns dans le petit livre rouge. L’aphorisme est par nature un élément du discours facile à mémoriser parce que suggestif. Ainsi « la révolution n’est pas un dîner de gala »17 signifie qu’une révolution est une insurrection, une action violente d’une classe pour renverser une autre classe ; « le pouvoir est au bout du fusil »18 justifie que le pouvoir ne peut être remporté que par la force ; « le vent d’est l’emportait sur le vent d’ouest »19 indique que le communisme a acquis une force supérieure à l’impérialisme occidental. Autant d’expressions qui confirment le pouvoir de la métaphore, parce que l’image est plus lisible que la pensée traduite par les mots.

  • 20 Ibid., p. 73.
  • 21 Ibid., p. 217.

16Autre instrument linguistique, c’est le slogan, forme textuelle très concise pour asséner une vérité en une seule phrase. « Pour qu’il n’y ait plus de fusils, il faut prendre le fusil »20 désigne qu’il faut soutenir et participer à la guerre juste pour l’élimination définitive de la guerre ; « l’avenir est radieux, mais notre chemin est tortueux »21 résume la dialectique maoïste : malgré les obstacles, la société avance toujours, car avancer et se développer constituent les principaux mots d’ordre pour le peuple révolutionnaire chinois.

Textualité et révolution

17Le processus citationnel fait donc partie de la rhétorique chinoise. Elle n’est pas spécifique au langage politique de Mao. Les Lettrés de la Chine impériale en font souvent usage, car la citation fonctionne comme un renforcement de la pensée, elle souligne certains aspects de l’énoncé dont le but ultime est de convaincre le lecteur ou l’auditeur. Ce procédé citationnel dans le petit livre rouge confirme, si besoin est, la stratégie qui préside à cette publication. Il s’agit de convaincre, persuader le peuple chinois que la révolution en marche est la seule voie possible pour atteindre « l’avenir lumineux » de la Chine.

  • 22 Roland Barthes, « Théorie du texte » in Encyclopédia Universalis, vol. 17, Paris, Encyclopédia Univ (...)
  • 23 Philippe Sollers, « Écriture et révolution » in Tel Quel (dir.), Théorie d’ensemble, Paris, Édition (...)
  • 24 Pierre-Marc de Biasi, « De l’intertextualité à l’exogenèse », Genesis, n°51, 2020, p. 11-28, p. 13.
  • 25 Ibid., p. 17.

18La révolution de Mao prend tout son sens à travers deux postures : la lecture et l’étude. Dès 1949, Mao décrète l’éducation élémentaire pour plus de 800 millions de Chinois. Lire et étudier constituent deux activités complémentaires, qui vont permettre à terme aux masses populaires de comprendre le texte. En nous appuyant sur la remarque de Barthes selon laquelle « le texte, c’est ce qui est écrit »22, on peut alors considérer que le petit livre rouge désigne un texte, lui-même constitué d’autres textes. Il s’inscrit dans une intertextualité centrée sur un seul objet, la révolution. Ce concept d’intertextualité, selon Philippe Sollers, reprenant la théorie de Mikhaïl Bakhtine (1895-1975), désigne tout texte qui « se situe à la jonction de plusieurs textes dont il est à la fois la relecture, l’accentuation, la condensation, le déplacement et la profondeur »23. Or le petit livre rouge montre des traits caractéristiques d’une « interaction textuelle qui se produit à l’intérieur d’un seul texte »24 selon le chercheur Pierre-Marc de Biasi (1950-). En ce sens, le petit livre rouge se définit comme l’espace singulier d’une écriture qui « ne tire ses ressources que d’elle-même »25 comme on vient de le voir lorsque d’autres citations apparaissent dans la citation proprement dite. D’où un mode d’écriture qui ne s’appuie ni sur la reformulation ni sur la transformation d’un texte précédent.

  • 26 Citations du président Mao Tsé-Toung, op. cit., p. 203.
  • 27 Ibid.
  • 28 Ibid., p. 180.
  • 29 Ibid., p. 287.
  • 30 Ibid., p. 143.
  • 31 Ibid., p. 13.
  • 32 Ibid., p. 13.
  • 33 Ibid., p. 142.

19Le destinataire du message contenu dans le petit livre rouge, c’est le peuple ou encore les masses. Ce destinataire est présent dans le texte sous la forme de trois pronoms personnels, le « nous », le « vous », le « tu » : « Vous êtes des modèles pour la nation chinoise tout entière »26 ou bien « Nous qui formons la nation chinoise, nous sommes prêts à combattre l’ennemi jusqu’à la dernière goutte de notre sang »27, mais aussi « Ne tais rien de ce que tu sais, ne garde rien pour toi de ce que tu as à dire »28 ou encore « Si tu as des défauts, corrige-toi ; si tu n’en as pas, surveille-toi »29. Cet emploi alterné du « vous » et du « tu » justifie un destinataire collectif qui peut être à la fois singulier et pluriel. Alors que le « vous » et le « tu » désignent le peuple, les masses, le « nous » désigne principalement les membres du Parti communiste. Les Chinois reçoivent comme obligation de lire le petit livre rouge tous les jours et de l’apprendre par cœur. De cette façon, le texte vise à une pratique subversive dont le seul objectif est d’exhorter le peuple à « passer à l’action »30, à produire « un soulèvement »31, c’est- à-dire « un acte de violence par lequel une classe en renverse une autre »32 pour reprendre les mots de Mao. Il esquisse un projet de société de type collectiviste fondé sur la discipline, l’éducation, l’égalité entre les hommes et les femmes, mais aussi sur une éthique rigoureuse selon laquelle « il faut s’intégrer aux masses »33 afin de demeurer simple et humble.

  • 34 Ibid., p. 150.
  • 35 Ibid., p. 299.
  • 36 Ibid., p. 1.
  • 37 Ibid., p. 16.

20Un autre procédé stylistique est à noter : celui de l’emploi du mode affirmatif dans la phraséologie, dont l’usage prévaut par rapport au mode négatif. Plus on affirme que cela est, plus la vérité véhiculée par le texte s’impose au lecteur. L’affirmation passe aussi par des usages linguistiques récurrents du type « il faut », « c’est », « celui qui » : « Il faut faire comprendre aux masses que nous représentons leurs intérêts »34 ; « Il faut encourager chaque camarade à tenir compte des intérêts de l’ensemble »35 ; « Le noyau dirigeant de notre cause, c’est le Parti communiste chinois »36 ; « Celui qui se range du côté du peuple révolutionnaire est un révolutionnaire »37.

  • 38 Ibid., p. 121.
  • 39 Ibid., p. 123.

21Enfin, la langue idéologique passe aussi par un emploi du mode verbal à l’impératif. La phrase injonctive devient une parole idéale. Par exemple, « Mettez les problèmes sur le tapis… Ne faites pas de critique par derrière »38 et « Soyez élèves avant d’être maîtres ; consultez les cadres des échelons inférieurs avant d’émettre des ordres »39 désignent des méthodes qui permettent d’établir une communication honnête et ouverte entre les cadres du Parti.

Les intellectuels chinois : des réactionnaires à rééduquer

  • 40 Ibid., p. 347.

22Depuis la fondation de la nouvelle République populaire de Chine en 1949, Mao impose une série de réformes en vue d’instaurer une société communiste favorable au peuple, néanmoins méfiante à l’égard de la bureaucratie et des intellectuels. Aucun chapitre du petit livre rouge n’est destiné à ces derniers, mais dans l’avant-dernier chapitre consacré à l’art et la culture, il est fait état du comportement que le peuple doit avoir envers les intellectuels chinois. L’ordre leur est donné de s’intégrer aux masses populaires de façon à adopter « le langage du patriotisme et du socialisme, mais probablement aussi le langage de la conception communiste du monde, et notre travail à tous en sera sûrement beaucoup mieux fait »40.

  • 41 Ibid., p. 324.
  • 42 Ibid.

23Mao craint la présence de ceux qu’il qualifie de « réactionnaires » car « bien que les nombreux intellectuels révolutionnaires chinois jouent un rôle d’avant-garde et servent de pont, tous ne sont pas révolutionnaires jusqu’au bout »41. Les réactionnaires sont « enclins au subjectivisme et à l’individualisme, […] leurs idées sont stériles et […] ils se montrent hésitants dans l’action »42. C’est pourquoi, selon Mao, il faut les rééduquer :

  • 43 Ibid., p. 169.

24Nos camarades doivent comprendre que la rééducation idéologique est une affaire de longue haleine, qu’il faut mener patiemment et minutieusement ; il ne faut pas espérer que quelques leçons ou quelques réunions puissent changer une idéologie qui s’est formée au cours d’une vie de plusieurs décennies. On ne peut convaincre que par la persuasion et non par la contrainte43.

  • 44 Alexander C. Cook, « The spiritual atom bomb and its global fallout », in Alexander C. Cook (dir.),(...)

25Cette rééducation invoquée par Mao s’appuie, entre autres, sur le phénomène de la mémorisation obligatoire du petit livre rouge par les cadres et intellectuels. Ce qui justifie la remarque de l’historien Alexander C. Cook qui rappelle que cet opus était surnommé la « bombe atomique spirituelle »44. Cette remarque sert de transition pour aborder la seconde étape de l’étude qui vise à se demander dans quelle mesure le petit livre rouge a pu jouer le rôle d’un instrument subversif.

La réception du petit livre rouge chez les intellectuels et les étudiants

  • 45 Jean Levêque, « Les intellectuels en France au XXe siècle », jean-leveque.fr, consulté le 18 mars 2 (...)
  • 46 Kefei Xu, « Le maoïsme de Tel Quel autour de Mai 68 », Transtext(e)s Transcultures 跨文本跨文化 [En ligne (...)
  • 47 Richard Wolin et Michel Kail, « Le moment maoïste parfait de Sartre », L’Homme & la Société, n°187- (...)

26Selon le philosophe français Jean Levêque (1930-2019), « l’intellectuel est un homme qui appartient à la sphère du culturel, qui est mise en situation d’homme du politique et qui se présente comme médiateur ou producteur d’idéologie »45. Le processus de la révolution chinoise attire l’attention de plusieurs intellectuels de gauche des années 1960-1970, comme Althusser, Sartre, Beauvoir, Sollers, Glucksmann, Benny Levy, lesquels s’enthousiasment pour la théorie communiste de Mao qui ouvre une nouvelle voie à la pensée marxiste-léniniste. Pour Sollers, la Chine de Mao incarne le « nouveau centre de l’action révolutionnaire mondiale »46, écrit Kefei Xu. Sartre témoigne de sa fascination pour l’« ardeur révolutionnaire »47 de la Chine de Mao. Richard Wolin et Michel Kail précisent qu’à l’instar d’autres intellectuels français

  • 48 Ibid., p. 253.

l’épisode maoïste de Sartre fut une étape et un rite de passage qui lui permirent d’échapper aux structures politiques du marxisme orthodoxe. Plus encore, son compagnonnage avec les maoïstes lui permit de penser dans le détail le rôle de l’intellectuel, sur lequel il s’interrogeait depuis des années déjà. Bien que Sartre fût l’intellectuel français accompli du XXe siècle, il se sentait très mal à l’aise dans ce rôle48.

27De fait, on pourrait considérer l’engagement pro-chinois des intellectuels français comme une posture purement opportuniste face à la pensée marxiste déclinante du Parti communiste français.

  • 49 Nous faisons ici référence à des intellectuels du groupe Tel Quel qui ont fait volte-face par rappo (...)

28Dans ce contexte, les intellectuels de gauche tournent leurs regards vers l’Orient rouge, et découvrent des nouvelles normes de la pensée communiste chinoise qui puise sa source, non seulement dans les textes de Marx et de Lénine, mais aussi et surtout dans la tradition confucéenne. Or c’est sans doute sur ce point que la Chine de Mao, opérant une alliance entre pensée révolutionnaire et pensée traditionnelle, devient trop complexe à appréhender pour les Occidentaux qui, le moment venu, vont profiter de la moindre faille du pouvoir chinois pour se mettre à distance de celui-ci après l’avoir célébré49.

  • 50 Conférence de Jean-Pierre Bompied, « Le parcours sinologique et philosophique de J-F Billeter », ph (...)
  • 51 Ibid.

29Le sinologue suisse Jean-François Billeter donne un éclairage dans son livre intitulé La Chine trois fois muette, que le chercheur Jacques Bompied a analysé de la façon suivante en 2021 : pour Billeter, l’histoire de la Chine est « l’histoire de la domestication de la pensée par le pouvoir. En Chine, depuis plus de deux millénaires, il n’y a pas d’Église, mais il y a un État »50. Pour Billeter, cet État tout puissant « contrôle la culture en la recyclant constamment au moyen d’un corps de fonctionnaires soigneusement formés, d’une bureaucratie savante. Un État stratège, très en avance dans son organisation sur les États européens »51. Plus encore, en s’appuyant sur la pensée du sinologue, Bompied précise que :

  • 52 Ibid.

Le socialisme chinois post-maoïste, complètement pragmatique en économie, fabricant de milliardaires obéissants, mais inflexible en politique, est fondé idéologiquement sur l’amnésie ou plutôt la réécriture officielle du passé. Comme dans les chroniques de la vieille Chine où chaque dynastie réécrivait l’histoire de la précédente52.

  • 53 En Chine, le « Mouvement d’éducation socialiste », créé en 1962 prévoir le déplacement de milliers (...)

30Cependant des figures prochinoises radicales persistent, comme celle de la sinologue Michelle Loi, professeur d’université, traductrice de nombreux poèmes de la Chine ancienne, collaboratrice de la revue Tel Quel, et proche du philosophe Althusser. Celle-ci témoigne, après un séjour en Chine en 1971, de son enthousiasme pour le système des « écoles du 7 mai »53. Michèle Loi a visité l’une d’entre elle à Nannniwan, dans le nord-ouest de la Chine :

  • 54 Michelle Loi, L’intelligence au pouvoir, Paris, Maspéro, 1973, p. 153-154.

les paysans qui initient les élèves [au travail manuel] sont les mêmes, mais les élèves ne sont pas des jeunes gens, ce sont les cadres du département de Xi’an : présidents ou vice-présidents du Comité révolutionnaire des villes, chefs de communes populaires, médecins, chirurgiens, dentistes, proviseurs, directeurs d’écoles primaires54.

  • 55 Ibid., p. 158.

31Michelle Loi ne se lasse pas de louer une Chine communiste radieuse où, écrit-elle, l’intelligence prend le pouvoir, mais pas n’importe quelle intelligence, précise-t-elle, car il s’agit de « l’intelligence des masses »55. Cependant, l’universitaire, en particulier dans ses contributions publiées par la revue Tel Quel, jamais ne se réfère au petit livre rouge. Il en va de même pour les intellectuels pro-chinois français de cette époque. Alors même que Michelle Loi est convaincue que le fait d’étudier la pensée de Mao et d’apprendre le travail manuel contribuent à un enrichissement personnel, elle n’interroge pas la privation des libertés à laquelle sont soumis ses collègues universitaires chinois dans le système de rééducation des élites. Chez Loi comme chez Sollers et les collaborateurs de la revue Tel Quel, il y a un véritable engouement pour la théorie collectiviste de Mao tout au long des années 1970.

  • 56 Nanni Balestrini et Edouardo Sanguineti, « L’Opéra de Pékin », Tel Quel, n°48/49, printemps 1972, p (...)
  • 57 Richard Wolin et Michel Kail, « Le moment maoïste parfait de Sartre », op. cit., p. 275.
  • 58 Pascale Nivelle, Histoire du petit livre rouge, Paris, Tallandier, 2016, p. 56.

32L’exemple de la parution du numéro double 48-49 de la revue Tel Quel intitulé La Chine et publié en 1972 est significatif de l’adhésion d’un certain nombre d’intellectuels de gauche à l’idéologie maoïste. Cette publication est l’occasion pour les collaborateurs de la revue d’étudier les différents axes de la Révolution culturelle et de reprendre à leur compte l’un des principes de la pensée de Mao selon lequel la révolution cible principalement « l’impérialisme et en conséquence son idéologie et sa culture qui est l’ennemi de la classe directe et globale et non pas la culture féodale fossilisée »56. Néanmoins, ce numéro spécial ne fait pas référence à la publication du petit livre rouge publié en français à la fin de décembre 1966, qui remporte un immense succès dans les trois librairies pro-chinoises de Paris. Selon Richard Wolin, « presque toute l’intelligentsia parisienne se laissa grisée et fascinée par le maoïsme »57 et dans le journal Le Monde, on peut lire : « Le petit livre rouge a l’intention de conquérir le monde. »58 Sur la quatrième de couverture de l’ouvrage publié par les éditions du Seuil est inscrit :

  • 59 Ibid., p. 72.

Un document exceptionnel. Lu et commenté en de multiples circonstances de la vie quotidienne, brandi par des centaines de milliers de bras lors des manifestations des gardes rouges, il est devenu le livre par excellence des Chinois d’aujourd’hui : à la fois arme politique et symbole de la Révolution culturelle59.

  • 60 Pascal Boniface, « ”Histoire du petit livre rouge”– 3 questions à Pascale Nivelle », pascalboniface (...)
  • 61 Pascale Nivelle, Histoire du petit livre rouge, op. cit., p. 16.
  • 62 Ibid.

33Autrement dit, il apparaît bien une fracture entre les intellectuels pro-chinois et les étudiants qui se revendiquent maoïstes. Pascal Boniface tente de comprendre le « mystère »60 de l’enthousiasme des intellectuels français pour la figure de Mao, ses discours, sa révolution. Selon le chercheur, le mystère peut être appréhendé à la lumière du comportement d’une grande partie de la jeunesse française de cette période, une jeunesse en train de rompre avec tous les héritages. Comme l’explique Pascale Nivelle, les jeunes rêvent d’un monde meilleur. Soit ils regardent vers l’ouest, les États-Unis, la culture underground, le rock’n’roll, les « paradis artificiels, le monde sans entrave »61. Soit ils regardent vers l’est, la Chine de Mao, le monde communiste, mais aussi « tiers-mondiste, anticolonialiste, humaniste, idéaliste, utopiste »62. Le petit livre rouge symbolise l’accès à un autre monde ; par sa lecture, on découvre les mots nécessaires pour aller faire la révolution dans la rue pendant mai 1968. Il persuade ses lecteurs que la révolution est possible.

34La révolution devient un rêve à la mode, à la fois chez les intellectuels pro-chinois et une partie de la jeunesse en quête d’un autre monde, qui n’est sans doute pas semblable à celui que propose Mao à son peuple. Dans le film La Chinoise de Jean-Luc Godard (1967), des étudiants de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm à Paris se réunissent chaque soir pour étudier la pensée marxiste-léniniste de Mao. La caméra les filme dans un appartement aux murs tapissés de photos, d’affiches prochinoises, et tout un tas d’autres signes de la maoïsation ambiante comme autant d’accessoires à connotation « Chine de Mao ». Godard montre ainsi l’impact de la propagande maoïste sur des étudiants bourgeois qui lisent et récitent chaque jour le petit livre rouge.

  • 63 « André Malraux : “Mao est la plus grande figure historique de notre époque” », radiofrance.fr, 05/ (...)
  • 64 Ibid., p. 39.
  • 65 Pascale Nivelle, Histoire du petit livre rouge, op. cit., p. 40.

35Au moment où André Malraux proclame que « Mao est la plus grande figure historique de notre époque »63, les témoignages dont nous disposons aujourd’hui montrent qu’il existait un véritable effet de mode circonscrit aux milieux étudiants parisiens appartenant à ce « triangle d’or » entre la Sorbonne, l’École normale supérieure de la rue d’Ulm et les cafés de Saint-Germain-des-Prés. Certains intellectuels s’engagent dans une étude approfondie des écrits de Mao, au détriment du petit livre rouge jugé « trop basique, trop simpliste pour l’élite intellectuelle de la France »64, ou considéré comme étant fait « pour les gens qui ne lisent pas les livres »65. Cependant l’historien et universitaire Stéphane Courtois, alors étudiant à Nanterre dans les années 1968-1970, convient que ses camarades maoïstes et lui-même, en apprenant par cœur les slogans du petit livre rouge, s’enfermaient dans « un délire révolutionnaire ». Sans aller jusqu’à mettre en œuvre une vraie révolution en France, le petit livre rouge a réussi à diffuser cette ardeur révolutionnaire nécessaire et suffisante pour redynamiser la pensée marxiste affaiblie par le parti communiste français. Plus particulièrement, ce sont des jeunes à la recherche d’un nouvel idéal de vie, en révolte contre les États Unis et la guerre au Vietnam, qui se tournent vers l’Orient. Le petit livre rouge devient alors un symbole subversif, et partant de là, un objet de culte reconnaissable à sa couleur rouge, à ce petit format idéal pour être glissé aisément dans un sac ou dans la poche d’une veste.

  • 66 Emmanuel Hecht, « Simon Leys, le passe-Muraille de Chine », L’Express, 2016, consulté le 22 mars 20 (...)

36À cette époque, un seul intellectuel tente de dénoncer le fanatisme chinois des intellectuels de gauche, c’est Simon Leys. Son livre paru en 1971, Les Habits neufs du Président Mao, lui vaut d’être « mis au ban d’une intelligentsia française »66. Stéphane Courtois indique à propos de cet ouvrage qu’il s’agissait d’une « bombe atomique » pour l’intelligentsia maoïste française. En effet, Leys écrit que la révolution culturelle n’a jamais été qu’une guerre civile qui a fait des millions de morts, et précise :

  • 67 Simon Leys, Essais sur la Chine, op. cit., p. 402.

La mode maoïste qui prévaut aujourd’hui dans certains milieux intellectuels d’Occident est étonnamment semblable dans tous ses mécanismes à la chinoiserie du XVIIIe – celle des pagodes de jardins et des magots de cheminées. C’est un nouvel exotisme67.

37Cette interprétation qui donne matière à réfléchir convoque l’imaginaire, seul motif capable de justifier l’enthousiasme suscité par le petit livre rouge. La Chine est à l’autre bout du monde, c’est pourquoi elle impose une distanciation tout à fait favorable à la fascination. Faire la révolution consiste alors à scander des slogans extraits de l’ouvrage, ou pour reprendre l’expression de Stéphane Courtois, des « mantras ». Peu à peu, le rêve de la révolution va s’identifier à la Chine de Mao, comme une image.

  • 68 Pascale Nivelle, Histoire du petit livre rouge, op. cit., p. 74.

38Au terme de cette étude, on peut considérer que le petit livre rouge fait partie d’un phénomène de mode adopté principalement par la jeunesse étudiante. Mais il est difficile de mesurer le pouvoir d’attraction de cet opuscule. Il traduit à la fois une sorte d’« idolâtrie » qui s’empare d’une partie des maoïstes et la « maomania » qui déferle sur une partie des jeunes à l’exemple de Claude Maggiori qui dira, quelques années plus tard : « J’ai étudié Mao comme un dingue […] Grâce au petit livre, on apparaissait comme un puits de science ! Ça marchait pour tout, draguer les filles, s’imposer en public… »68.

  • 69 Pascal Boniface, « ‘Histoire du petit livre rouge’– 3 questions à Pascale Nivelle », art. cit.
  • 70 Du 12 avril au 3 mai 1974, Sollers, Kristeva, Barthes sont invités par le Parti communiste chinois (...)
  • 71 Il s’agit d’une version enregistrée de l’entretien de Julia Kristeva
  • 72 Pascale Nivelle, Histoire du petit livre rouge, op. cit., p. 74.

39Mao meurt en 1976. En 1979, son successeur à la tête de la République populaire de Chine, Deng Xiaoping, interdit le petit livre rouge, obligeant à la destruction de cent millions d’exemplaires69. En France, la mode Mao s’efface, ce qui contribue à un retournement de situation. Dans un entretien réalisé en 1996, Kristeva, qui a participé au voyage en Chine de 1974 avec Sollers et Barthes70, précise que l’intérêt pour la Chine dans les années 1970 correspond à « une tentative de s’approprier une sorte de subjectivité non-européenne qui se plaçait dans notre utopie à nous en dissidence par rapport aux occidentaux, c’était une manière d’interroger l’Occident à travers l’Orient »71. Les intellectuels pro-chinois font volte-face, comme Serge July, ancien directeur du journal Libération qui confie : « C’était très théâtral, le petit livre rouge. C’est à cause de lui qu’on a été catalogués maos, alors qu’au fond, on ne l’était pas vraiment […]. »72

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Bibliographie

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Notes

1 La Révolution culturelle déclenchée par Mao a pour objectif de mettre un terme au passé de la Chine, la débarrasser de ses références les plus traditionnelles et les plus anciennes. Au début de 1960, l’une des premières étapes de cette révolution chinoise entraîne un vaste déplacement géographique de tous les Chinois instruits, les professeurs et les étudiants, installés dans les villes, vers les campagnes pour être formés par les paysans aux activités agricoles. Les événements politiques de cette époque témoignent de rivalités fortes au plus haut sommet de la direction du Parti, lesquelles vont éclater violemment à partir d’août 1966 et ne s’arrêteront qu’au moment de la mort de Mao en 1976. Ces tensions vont donc se prolonger durant les « dix ans de la Révolution culturelle ».

2 « La Pensée chinoise », Tel Quel, n°48/49, printemps 1972, p. 3-7, p. 3. 

3 « La Pensée chinoise », op. cit., p. 4.

4 Simon Leys, Essais sur la Chine, Paris, Robert Laffont, 1998, p. 13.

5 Ibid.

6 En chinois, le « Tigre en papier » est un animal féroce, cruel et puissant ; cette expression est employée pour caractériser la faiblesse d’une chose, malgré son apparence forte. En français, elle équivaut à « un colosse aux pieds d’argile ».

7 Citations du président Mao Tsé-Toung, Pékin, Foreign Languages Press, 1966, p. 349-351.

8 François Fejtö, « La pensée de Mao et la révolution culturelle », Esprit, n°414, juin 1972, p. 943-964, p. 946.

9 François Fejtö, op. cit., p. 948.

10 Citations du président Mao Tsé-Toung, op. cit., p. 281.

11 Ibid.

12 Ce livre contient les aphorismes de Confucius (551-479 av. J.-C.) ainsi que les discussions entre lui et ses disciples.

13 Anne Cheng, « Un classique qui n’en finit pas de faire parler de lui. Les “Entretiens” de Confucius : un aperçu des traductions du XXe siècle en langues européennes », Revue Bibliographique de Sinologie, vol. 17, 1999, p. 471-479, p. 471.

14 Pierre Fontanier, Les figures du discours, Paris, Champs Flammarion, 1977 [1830], p. 99.

15 « Qui écoute les deux côtés aura l’esprit éclairé, qui n’écoute qu’un côté restera dans les ténèbres », Citations du président Mao Tsé-Toung, op. cit., p. 240.

16 « Pour connaître réellement un objet, il faut embrasser et étudier tous ses aspects, toutes ses liaisons et “médiations” », ibid., p. 241.

17 Ibid., p. 13.

18 Ibid., p. 70.

19 Ibid., p. 76.

20 Ibid., p. 73.

21 Ibid., p. 217.

22 Roland Barthes, « Théorie du texte » in Encyclopédia Universalis, vol. 17, Paris, Encyclopédia Universalis, 1985, p. 997-1000, p. 997.

23 Philippe Sollers, « Écriture et révolution » in Tel Quel (dir.), Théorie d’ensemble, Paris, Éditions du Seuil, 1968, p. 69-82, p. 75.

24 Pierre-Marc de Biasi, « De l’intertextualité à l’exogenèse », Genesis, n°51, 2020, p. 11-28, p. 13.

25 Ibid., p. 17.

26 Citations du président Mao Tsé-Toung, op. cit., p. 203.

27 Ibid.

28 Ibid., p. 180.

29 Ibid., p. 287.

30 Ibid., p. 143.

31 Ibid., p. 13.

32 Ibid., p. 13.

33 Ibid., p. 142.

34 Ibid., p. 150.

35 Ibid., p. 299.

36 Ibid., p. 1.

37 Ibid., p. 16.

38 Ibid., p. 121.

39 Ibid., p. 123.

40 Ibid., p. 347.

41 Ibid., p. 324.

42 Ibid.

43 Ibid., p. 169.

44 Alexander C. Cook, « The spiritual atom bomb and its global fallout », in Alexander C. Cook (dir.), Mao’s little red book: A global history, Cambridge, Cambridge University Press, 2015, p. 1-22, p. 1.

45 Jean Levêque, « Les intellectuels en France au XXe siècle », jean-leveque.fr, consulté le 18 mars 2022. URL : http://jean-leveque.fr/specific/formats/page.jsp?id=543.

46 Kefei Xu, « Le maoïsme de Tel Quel autour de Mai 68 », Transtext(e)s Transcultures 跨文本跨文化 [En ligne], n°6, 2011, consulté le 18 mars 2022.

47 Richard Wolin et Michel Kail, « Le moment maoïste parfait de Sartre », L’Homme & la Société, n°187-188, 2013, p. 253-290, p. 276.

48 Ibid., p. 253.

49 Nous faisons ici référence à des intellectuels du groupe Tel Quel qui ont fait volte-face par rapport à leur engagement maoïste. Voir « “Tel Quel” et ses volte-face politiques (1968-1978) » de François Hourmant.

50 Conférence de Jean-Pierre Bompied, « Le parcours sinologique et philosophique de J-F Billeter », philo63.org, 12/20/2021, consulté le 4 juin 2022. URL : http://www.philo63.org/pages/sujets-traites/j-f-bille.html

51 Ibid.

52 Ibid.

53 En Chine, le « Mouvement d’éducation socialiste », créé en 1962 prévoir le déplacement de milliers d’universitaires, de cadres d’entreprises, de professeurs de lycée, de directeurs d’école et de jeunes vers les usines et les campagnes, pour y être rééduqués par les paysans et les ouvriers. Le 7 mai 1966 Mao lance un appel pour que se multiplient à travers toute la Chine des écoles de la révolution dans lesquelles les intellectuels et les cadres seront rééduqués par les paysans. Les écoles du 7 mai ne sont ni plus ni moins que des camps de travail.

54 Michelle Loi, L’intelligence au pouvoir, Paris, Maspéro, 1973, p. 153-154.

55 Ibid., p. 158.

56 Nanni Balestrini et Edouardo Sanguineti, « L’Opéra de Pékin », Tel Quel, n°48/49, printemps 1972, p. 156-165, p. 161.

57 Richard Wolin et Michel Kail, « Le moment maoïste parfait de Sartre », op. cit., p. 275.

58 Pascale Nivelle, Histoire du petit livre rouge, Paris, Tallandier, 2016, p. 56.

59 Ibid., p. 72.

60 Pascal Boniface, « ”Histoire du petit livre rouge”– 3 questions à Pascale Nivelle », pascalboniface.com, 2017, consulté le 22 mars 2022. URL : https://www.pascalboniface.com/2017/01/27/histoire-du-petit-livre-rouge-3-questions-a-pascale-nivelle/.

61 Pascale Nivelle, Histoire du petit livre rouge, op. cit., p. 16.

62 Ibid.

63 « André Malraux : “Mao est la plus grande figure historique de notre époque” », radiofrance.fr, 05/02/2016. URL : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-nuits-de-france-culture/andre-malraux-mao-est-la-plus-grande-figure-historique-de-notre-epoque-6238572

64 Ibid., p. 39.

65 Pascale Nivelle, Histoire du petit livre rouge, op. cit., p. 40.

66 Emmanuel Hecht, « Simon Leys, le passe-Muraille de Chine », L’Express, 2016, consulté le 22 mars 2022. URL : https://www.lexpress.fr/culture/livre/simon-leys-le-passe-muraille-de-chine_1762209.html.

67 Simon Leys, Essais sur la Chine, op. cit., p. 402.

68 Pascale Nivelle, Histoire du petit livre rouge, op. cit., p. 74.

69 Pascal Boniface, « ‘Histoire du petit livre rouge’– 3 questions à Pascale Nivelle », art. cit.

70 Du 12 avril au 3 mai 1974, Sollers, Kristeva, Barthes sont invités par le Parti communiste chinois (PCC) à venir séjourner en Chine pendant 3 semaines.

71 Il s’agit d’une version enregistrée de l’entretien de Julia Kristeva

Kristeva, Julia

avec Shan Bensonen sur Antonin Artaud

Artaud, Antonin

en 1996. URL : https://www.youtube.com/watch?v=pKrYtnNAVXI.

72 Pascale Nivelle, Histoire du petit livre rouge, op. cit., p. 74.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Qingya Meng, « Le petit livre rouge de Mao, une rhétorique au service de la révolution »TRANS- [En ligne], 28 | 2022, mis en ligne le 02 novembre 2022, consulté le 14 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/trans/7707 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/trans.7707

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Auteur

Qingya Meng

Université des études étrangère du Guangdong, Canton, Chine

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