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Dossier central

En marge des genres : l’écrit « au fil du pinceau » (zuihitsu) au Japon et sa lecture moraliste en France

André Laidli

Résumés

En marge des grands genres que sont le récit, le texte religieux et la poésie, le zuihitsu occupe une place particulière dans la littérature japonaise. Nous nous proposons d’interroger en détail la question de son genre. Pour cela, nous reviendrons notamment sur sa réception française. Ces textes japonais ont été, en effet, constamment rapprochés d’une lignée littéraire avec laquelle ils partagent en partie leur marginalité, leur écriture et leur enquête sur la vie humaine : celle des moralistes français.

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Texte intégral

  • 1  Revon, Michel, Anthologie de la Littérature Japonaise des Origines au xxe siècle, Paris, C. Delgra (...)
  • 2  Aston, William George, Littérature japonaise, trad. H.-D. Davray, Paris, Armand Colin, 1902.
  • 3  Voir la recension de Noël Péri, « Michel Revon : Anthologie de la littérature japonaise des origin (...)
  • 4  Lafond, Jean, « Préface », Moralistes du xviie siècle, dir. Jean Lafond, Paris, Éditions Robert La (...)
  • 5  Parmentier, Bérangère, Le siècle des moralistes, Paris, Éditions du Seuil, 2000, p. 8.

1En 1910 fut publié un ouvrage important dans l’histoire de la réception française de la littérature japonaise : l’Anthologie de la Littérature Japonaise des Origines au xxe siècle de M. Revon1 (1867-1943). Bien que le public français disposât déjà, dès 1902, d’une anthologie (la traduction de la Japanese Literature de W. G. Aston2) et bien que le travail de M. Revon ait pu faire dans le détail l’objet de débats3, l’Anthologie qu’il fit paraître marqua cependant le début d’une double tendance dans la lecture française de la littérature japonaise : d’une part, la considération de plus en plus importante apportée à un genre littéraire difficilement identifiable, au croisement du roman, de la poésie et de l’essai : le zuihitsu (l’« écrit au fil [ou au gré] du pinceau ») ; d’autre part, la proximité de plus en plus avérée et soulignée (parfois à la faveur d’une confrontation extraits par extraits) du zuihitsu avec les œuvres classiques des moralistes français, des Essais de Montaigne aux Caractères de La Bruyère. Au-delà des ressemblances thématiques et de certaines concordances frappantes au niveau des contenus philosophiques et moraux, nous y reviendrons, il semble que les raisons du travail de rapprochement entrepris très tôt par la critique française entre le zuihitsu et certains textes moralistes (sans appeler, bien entendu, à une véritable assimilation ou à une conformité parfaite) soient également à chercher du côté de la forme et du genre. Comme avec le zuihitsu au Japon, il existe effectivement en France une lignée d’auteurs aux marges de la philosophie et de la littérature fictionnelle (des « métis d’écrivain et de philosophe4 », comme les qualifie J. Lafond) qui, tout en utilisant sous de multiples formes des éléments parfois difficilement compatibles – théologiques, autobiographiques, philosophiques, narratifs, rhétoriques, poétiques, etc. –, ont proposé une réflexion morale et anthropologique à travers des textes plus ou moins hétérodoxes et divers : essais, pensées, fragments, maximes, remarques, caractères, réflexions diverses ou encore aphorismes. Comme le note B. Parmentier, le moraliste français se présente bien comme un auteur « mal aimé des philosophes, et que pourtant on a peine à ranger dans le domaine de la littérature5 ».

  • 6  Revon, Michel, Anthologie de la Littérature Japonaise des Origines au xxe siècle, op. cit., p. 195
  • 7  Sei Shônagon, Notes de chevet, éd. André Beaujard, Paris, Gallimard, 1966.

2Sur ce point, M. Revon a posé dès 1910 les jalons d’une lecture moraliste du zuihitsu japonais : « Ce sont des livres d’impressions, écrit-il, qui ne relèvent que de la fantaisie personnelle, des mélanges qui tiennent à la fois de nos "Essais", de nos "Pensées", de nos "Caractères", de nos "Mémoires", et où triomphe, comme on pouvait s’y attendre, l’art délicat des Japonais6. » Les titres cités ici par l’auteur renvoient explicitement à des œuvres moralistes, y compris les « Mémoires », qui peuvent certes faire référence au cardinal de Retz ou à Saint-Simon, mais tout aussi bien aux Mémoires de La Rochefoucauld (1662), l’auteur des célèbres Maximes (1678 pour la dernière édition). C’est d’ailleurs à ce dernier, ainsi qu’à La Bruyère, que M. Revon se réfère lorsqu’il s’agit pour lui de définir le style de l’auteur qui inaugure, selon les histoires classiques de la littérature, le genre du zuihitsu dans les lettres japonaises, Les notes de chevet (Makura no sôshi) de Sei Shônagon7 (vers l’an 1000) :

  • 8  Revon, Michel, Anthologie de la Littérature Japonaise des Origines au xxe siècle, op. cit., p. 199

En lisant telles maximes concises où Sei Shônagon, femme du monde hardie qui pousse la franchise jusqu’au cynisme, marque d’un trait mordant quelque vice hypocrite, on songe à La Rochefoucauld ; et quand on voit surtout tant de pages profondes où la terrible rieuse, si prompte à saisir tous les ridicules de la ville et de la cour, a mis en jouant une pensée que signerait le meilleur des moralistes ou un portrait qui dresse devant nous l’image d’un caractère éternel, on ne peut s’empêcher de penser que le vieux Japon a eu aussi son La Bruyère8.

  • 9  Urabe Kenkô, Les heures oisives, suivi de Kamo no Chômei, Notes de ma cabane de moine, trad. Charl (...)
  • 10  « Personne au Japon ne peut parler de Kenkô sans évoquer Montaigne », indique la quatrième de couv (...)
  • 11  Grosbois Charles et Yoshida Tomiko, « Préface » à Urabe Kenkô, Les heures oisives, op. cit., p. 23
  • 12  Ce point mériterait une étude à part entière. Voir par exemple dans les Heures oisives les paragra (...)

3À la suite de M. Revon, les éditions de référence en France des textes classiques relevant du zuihitsu – outre, donc, Les notes de chevet, il faut citer le Hôjô-ki, les Notes de ma cabane de moine, de Kamo no Chômei (achevées en mars 1212), et le Tsurezure-gusa, Les heures oisives, d’Urabe Kenkô9 (vers 1330), souvent considéré comme le « Montaigne japonais10 » – inscrivent par conséquent le genre dans un rapport parfois très étroit (c’est notamment le cas de l’édition des Heures oisives) avec la tradition moraliste. On peut évidemment alléguer ici des raisons culturelles. Pour rendre davantage lisible un texte provenant d’une littérature considérablement éloignée dans l’espace et par l’histoire de la nôtre, il y a tout lieu de souligner, avec toutes les vigilances méthodologiques nécessaires, les points de convergence avec certains textes de notre tradition littéraire, comme le notent les éditeurs du Tsurezure-gusa : « À ce propos, il va sans dire que lorsque nous citerons parfois des "Moralistes français", il ne s’agit pas, pour d’évidentes raisons, de comparer. Nous nous bornons à confronter des pensées qui, élaborées dans des temps, des circonstances, des arrière-plans culturels et religieux très différents, peuvent se rejoindre chaque fois que se pose aux hommes la question du "comment vivre"11. » Ce rapprochement avec les moralistes explique d’ailleurs le choix des traducteurs, qui restituent dans une langue parfois très proche de celle de Montaigne ou La Bruyère les textes de Sei Shônagon ou d’Urabe Kenkô12.

  • 13  Ferrier, Michaël, Japon : la barrière des rencontres, Nantes, Éditions Cécile Defaut, 2009, p. 243
  • 14  Quignard, Pascal, « Un collectionneur de roman », Le Débat, n° 54, mars-avril 1989, Gallimard, p.  (...)

4Les concordances entre deux corpus littéraires étrangers l’un à l’autre sont toujours riches d’enseignement pour les deux parties ainsi rapprochées ; en observant par exemple ce qui, aux yeux des premiers lecteurs, a pu paraître « moraliste » dans les Notes de chevet ou les Heures oisives, nous apprenons également quelque chose sur la conception française du texte « moraliste ». Peut-être pourrions-nous même, en passant par le Japon et certains de ces textes, lire d’une nouvelle manière, à partir d’autres critères et d’autres attentes, les textes moralistes. Ce qui est en jeu ici est donc la question de la marginalité : deux lignées littéraires – ou, pour être plus précis, « philosophico-littéraires », mais le terme de « philosophie », provenant de notre héritage grec, doit être employé ici avec vigilance – ont en commun de ne pas s’enraciner totalement dans l’un des grands genres, du moins rétrospectivement : le roman (monogatari, pour le récit classique, shôsetsu, pour le roman moderne), la poésie, le traité ou le système. Sans doute est-ce d’abord cette position délicate dans le champ littéraire qui a valu au zuihitsu ce rapprochement avec le texte moraliste, et qui a demandé aux interprètes d’employer des grilles d’analyse souvent fort similaires à celles utilisées pour les Essais ou les Caractères, nous allons le voir, en insistant sur la polyphonie du texte, le mélange des genres ou encore l’intertextualité. Sur ce point, le message commun des moralistes et du zuihitsu ne serait-il pas d’inviter à toujours « décloisonner » (M. Ferrier13) ou « déprogrammer » (P. Quignard14) la littérature ? À l’ouvrir sans cesse au métissage des autres formes, des autres genres et des autres savoirs ? C’est donc à travers cette question du genre que nous interrogerons le zuihitsu ainsi que sa lecture française.

Le genre du zuihitsu au miroir des moralistes français

  • 15  Voir Sakaï, Anne, « Présentation » de De la paresse de Tanizaki Jun’ichirô, in Cent ans de pensée (...)

5Commençons par observer plus en détail le zuihitsu en tant que tel. Le zuihitsu, ou « écrit au fil du pinceau », est une catégorie littéraire importante au Japon, qui réunit un ensemble très divers de textes de Sei Shônagon (considérée comme l’inauguratrice du genre) à nos jours, où sa pratique a été réactualisée en partie à partir de l’ère Meiji15 (des écrivains importants comme Nakae Chômin, Natsume Sôseki ou Tanizaki Jun’ichirô ont pratiqué le zuihitsu). Il tend à correspondre à ce que la littérature occidentale a cristallisé autour du genre de l’« essai ». Comme dans l’essai, la question de la frontière avec la narration ou la fiction, la place des éléments autobiographiques, enfin le rapport avec les études savantes ou la philosophie forment l’essentiel des problèmes identitaires et génériques du zuihitsu.

  • 16  Pigeot, Jacqueline, « Postface », Kamo no Chômei, Notes de ma cabane de moine, Paris, Le Bruit du (...)
  • 17  Van Delft, Louis, « Les recueils des moralistes comme encyclopédies existentielles », L’Entreprise (...)
  • 18  L’expression est notamment utilisée par Barbara Carnevali, « L’observatoire des mœurs. Les coutume (...)
  • 19  Notes de ma cabane de moine, p. 263 de l’édition de référence.

6Le zuihitsu se présente généralement à la première personne comme une recherche « philosophico-littéraire » de dimension assez courte et dont les résultats ou la vérité sont toujours à prendre au conditionnel. Le zuihitsu classique, comme les Heures oisives d’Urabe Kenkô, se distingue en effet des textes bouddhistes par son refus d’une visée programmatique, idéologique ou doctrinale, et par sa libre utilisation, tout au contraire, des matériaux du confucianisme, du taoïsme, de la poésie, des romans (par exemple le célèbre Genji Monogatari) et – surtout – de l’expérience personnelle de l’auteur à côté de ceux du bouddhisme traditionnel. De même qu’avec les textes moralistes, il est difficile de caractériser très nettement le statut des zuihitsu classiques : sans être des textes moraux (prescriptifs ou normatifs), les écrits d’auteurs comme Kamo no Chômei ou Urabe Kenkô traitent pourtant d’un sujet qui n’est pas sans rapport avec la morale (J. Pigeot parle ainsi d’une forme de « réflexion morale16 »). Mais comment qualifier un texte qui porte sur l’indétermination et la complexité de la vie morale (sans vouloir légiférer dans ce domaine) et qui ne se réduit cependant pas à ces seules questions (on trouve chez Sei Shônagon, comme chez la plupart des auteurs qui nous intéressent ici, des digressions, des considérations esthétiques, des historiettes, des listes, de la poésie, etc.) ? Le problème se pose dans les mêmes termes pour les Essais de Montaigne ou les Caractères de La Bruyère qui, derrière la « peinture du moi » chez le premier et la peinture des caractères chez le second, laissent en fin de compte apparaître des entreprises beaucoup plus complexes et importantes, de véritables « encyclopédies existentielles17 » de la vie quotidienne. Peut-être pourrions-nous alors parler, pour distinguer l’entreprise moraliste et celle du zuihitsu d’une entreprise morale, d’une « phénoménologie de la vie humaine18 » sous toutes ses formes. Comme le moraliste classique, l’auteur du zuihitsu offre ainsi une réflexion à la fois anthropologique et existentielle où « l’humain voyage » (homo viator), avec ses troubles, sa confusion et sa difficulté, occupe la place centrale. Les premières lignes célèbres des Notes de Kamo no Chômei, si souvent rapprochées d’Héraclite et de Montaigne, en offrent peut-être le résumé le plus condensé et le plus poignant : « La même rivière coule sans arrêt, mais ce n’est jamais la même eau. De-ci, de-là, sur les surfaces tranquilles, des taches d’écume apparaissent, disparaissent, sans jamais s’attarder longtemps. Il en est de même des hommes ici-bas et de leurs habitations19. »

  • 20  Van Delft, Louis, Le moraliste classique. Essai de définition et de typologie, Genève, Librairie D (...)
  • 21  Origas, Jean-Jacques, La lampe d’Akutagawa. Essais sur la littérature japonaise moderne, Paris, Le (...)
  • 22  Montaigne, Michel (de), Essais, éd. Pierre Villey, revue par Verdun-Louis Saulnier, Paris, PUF, 19 (...)
  • 23  Origas, Jean-Jacques, La lampe d’Akutagawa, op. cit., p. 176.

7Parmi les thèmes qui justifient cette lecture moraliste du zuihitsu, notons enfin cet attachement au vécu qui caractérise en partie, selon la définition canonique donnée en France par L. Van Delft, le moraliste français : « Nous appellerons moraliste l’écrivain qui traite des mœurs et (ou) s’adonne à l’analyse, en ne s’interdisant pas de rappeler des normes ; qui adopte très généralement pour forme soit le traité, soit le fragment ; dont l’attitude consiste à se maintenir avant tout à hauteur d’homme, du fait du vif intérêt qu’il porte au vécu20. » Or, c’est en des termes tout à fait similaires que J.-J. Origas définit l’une des caractéristiques essentielles du zuihitsu : « L’essai au fil du pinceau naît du temps présent. Et il se développe à partir de "l’ici". En ce sens, il est fait tout bonnement du vécu quotidien de l’auteur qui prend l’initiative de raconter, sur le mode intimiste, la réalité qui lui est la plus proche21. » Cette proximité avec le vécu le plus quotidien et le plus ordinaire, dans le texte moraliste comme dans le zuihitsu, implique, nous allons le voir, d’élaborer une forme textuelle moins stricte que le roman ou le traité. Non seulement les formes changeantes de l’homme (« divers et ondoyant », comme le décrit Montaigne22) exigent un texte plastique, ouvert à la contradiction et à la répétition, mais le contenu même du « vécu », dont l’extension est considérable – que faut-il entendre, en effet, par « vécu » ? Le temps présent, mais aussi les souvenirs, les anecdotes et les « choses vues » (Victor Hugo), les mouvements intimes du cœur comme les phénomènes sociaux peuvent prétendre à ce titre –, demande le plus souvent de refuser l’ordre linéaire et progressif afin d’explorer d’autres techniques d’écriture, plus marginales : variations, digressions, évocations, ou encore ce que J.-J. Origas appelle, en se souvenant peut-être de l’auteur des Essais (« J’aime l’allure poétique, à sauts et gambades », écrivait Montaigne, III, 9, p. 994), des « sauts » : « [Le zuihitsu] procède par sauts. Il rebondit en cours de route. Avec des bonds tout à fait inconcevables dans un roman23. » Le « vécu », en effet, ne s’épuise pas dans une formule synthétique, dans une page longuement préparée à l’avance, et encore moins dans un texte achevé et définitif ; considérablement multiforme et imprévu, il « rebondit », enchaîne une anecdote à un souvenir, s’observe dans un moment présent et fugace, se trouve dans une histoire ou un petit conte, et semble au fond sans commencement ni fin : « Qui ne voit, écrit Montaigne, que j’ai pris une route, par laquelle sans cesse et sans travail, j’irai autant qu’il y aura d’encre et de papier au monde ? » (III, 9, p. 945)

  • 24  Derrida, Jacques, Parages, Paris, Galilée, 1986.
  • 25  Origas, Jean-Jacques, La lampe d’Akutagawa, op. cit., p. 177.
  • 26  Van Delft, Louis, Les moralistes. Une apologie, Paris, Gallimard, 2008, p. 127.
  • 27  Compagnon, Antoine, La seconde main ou le travail de citation, Paris, Éditions du Seuil, 1979, p.  (...)

8En ce sens, le zuihitsu, tout comme le texte moraliste, se présente en partie comme un « hors-la-loi » du genre (J. Derrida parlait, dans un article célèbre, de la « loi du genre24 »). Il l’est dans la mesure où il nous apparaît résister rétrospectivement à toute forme d’étiquetage classique : ni tout à fait philosophique, ni totalement littéraire (ou du moins fictionnel) ; à mi-chemin de l’abstrait et du concret (ou, comme l’écrit J.-J. Origas, pratiquant un « va-et-vient constant entre le concret et l’abstrait25 »). Il est difficile, en effet, de préciser nettement s’il se présente comme l’autre du genre (à l’écart des grands genres), et donc toujours en partie indéfinissable – dans ce cas, il faudra accepter ici ce que L. Van Delft appelle justement, pour cerner les moralistes, « une part indécidable26 » ; ou s’il ne se présente pas plutôt comme un genre au carrefour de tous les autres, un « entre-deux genres27 » : non pas un non-genre, mais celui qui les cumule tous, et s’autorise à être à la fois poétique, narratif, philosophique, etc. ? Nous y reviendrons à la fin de ce travail.

Zuihitsu / texte moraliste : essai de typologie comparée

9À présent que le rapport entre le zuihitsu et le texte moraliste a été exposé plus en détail, nous pouvons présenter les grandes lignes typologiques où ces deux formes de texte se rejoignent en définitive. Nous nous intéresserons avant tout ici aux espaces discursifs et linguistiques particuliers du zuihitsu et du texte moraliste (autrement dit, à leur dispositif littéraire) ; la proximité et les différences, au niveau des thèmes, de la sensibilité et des idées, qui rapprochent mais distinguent également en dernier lieu un texte comme les Notes de chevet des Maximes de La Rochefoucauld nécessitant une enquête plus approfondie qui dépasserait le cadre de ce travail, nous nous limiterons par conséquent ici à la question des formes littéraires. De même, la confrontation que nous proposons entre des textes japonais et des textes français suppose que nous parlions par convention d’un « texte moraliste » et du « zuihitsu », sans ignorer la diversité toujours problématique des textes auxquels ces catégories renvoient. L’important étant pour nous de relever les grandes lignes d’une écriture le plus souvent marginale où des auteurs parfois très différents se rejoignent.

10Six points principaux permettent de caractériser le zuihitsu comme un texte plus ou moins hétérodoxe manifestant une grande proximité avec le texte moraliste.

  1. Un texte discontinu. Semblable aux Maximes et aux Caractères, le zuihitsu se présente le plus souvent comme un ensemble décousu sans ordre ni transitions où les aphorismes (ou « passages », dan) semblent distribués au hasard sur la page (on parlerait aujourd’hui d’un texte « parataxique »). Les Notes de chevet de Sei Shônagon proposent ainsi un certain nombre de listes (162), le plus souvent accompagnées de titres : « Choses dont le nom est effrayant », « Choses rares », « Choses qui égayent le cœur », etc. Les Heures oisives sont quant à elles constituées de 243 aphorismes sans titre mais sous dont les formes sont très diverses (de quelques lignes à plusieurs pages). Notons que les Notes de ma cabane de moine font ici exception. Le texte de Kamo no Chômei est, en effet, continu et se présente selon un plan traditionnel : introduction (constat universel sur la vie humaine), description détaillée des calamités qui s’abattent sur les hommes et les villes, retraite de l’auteur du monde des hommes, conclusion méditative. Reste que les Notes se distinguent, par leur ton autobiographique et par l’absence d’exposé doctrinaire, des textes bouddhistes classiques, et choisissent de parler sur le mode littéraire du vécu (de « l’humain voyage ») d’un homme comme les autres. De même, le zuihitsu moderne, par exemple chez Nakae Chômin et Natsume Sôseki, prendra davantage la forme d’un texte continu, mais conçu de la manière la plus ouverte et la plus souple possible.

  2. Une forme brève. Dans la continuité du point précédent, le zuihitsu se présente par ailleurs comme un texte souvent assez court (parfois ne dépassant pas une dizaine de pages). Les Notes de ma cabane de moine de Kamo no Chômei tiennent ainsi en quinze pages dans l’édition française de référence.

    • 28  Bakhtine, Mikhaïl, Esthétique et théorie du roman, Paris, Gallimard, 1975.

    Un texte contradictoire. Tout comme le texte moraliste, le zuihitsu ne recherche pas la contradiction en tant que telle ; néanmoins, tout auteur attentif à la complexité du vécu et aux formes changeantes des mœurs et du cœur humain – intermittences, inconstances, détails, irrégularités, labilité et confusion des sentiments, etc. – se voit dans l’obligation d’accepter la contradiction au sein de son texte (il lui en coûterait sinon de manquer certaines dimensions importantes du vécu). Tout le problème est de savoir si le texte doit imposer un ordre logique aux choses (auquel cas l’ajustement vient des phénomènes, qui doivent se conformer aux grilles de lecture), ou si les phénomènes peuvent plaider pour eux-mêmes (et dans ce cas, le texte doit simplement enregistrer les observations sans chercher à les corriger). En choisissant dans la plupart des cas cette seconde option, le zuihitsu possède par conséquent un caractère pour le moins « phénoménologique » (M. Revon parle de « livres d’impressions » pour signifier la priorité donnée à l’observation sur l’analyse ou la doctrine). La question de la contradiction se révèle ici d’une importance capitale, car l’accepter ou non revient à choisir entre un discours plutôt « polyphonique » ou « dialogique » (au sens de Mikhaïl Bakhtine28, nous y reviendrons) sur la réalité ordinaire et un discours davantage « monologique » ou programmatique. Sur ce point, la proximité avec les textes moralistes est très importante. Parmi de multiples occurrences, citons par exemple Montaigne : « Les contradictions donc des jugements ne m’offensent, ni m’altèrent ; elles m’éveillent et m’exercent. » (III, 8, p. 924)

  3. Un texte répétitif. Le zuihitsu n’hésite pas à revenir sur un thème déjà traité auparavant, voire à se répéter. Cet aspect participe à nouveau d’une phénoménologie non contraignante (c’est-à-dire enregistrant les phénomènes tels qu’ils se présentent) de la vie humaine.

  4. Pratique de la digression. Avec l’acceptation de la contradiction et de la répétition, la pratique de la digression forme l’un des trois points importants d’une réflexion morale sur la réalité humaine qui se veut non linéaire et progressive, et donc non programmatique ou doctrinale. Au modèle classique comprenant définitions, distinctions, démonstrations et conclusion, le zuihitsu propose une logique plus marginale et à première vue plus faible : variations, contradictions, répétitions et, donc, digressions. Mais à nouveau dans la perspective d’une attention au vécu sous toutes ses formes.

    • 29  Origas, Jean-Jacques, La lampe d’Akutagawa, op. cit., p. 189.
    • 30  Ferrier, Michaël, Japon : la barrière des rencontres, op. cit., p. 245.
    • 31  Struve, Daniel, « Les "Heures oisives" et le xviie siècle », Éloge des sources. Reflets du Japon a (...)

    Mélange des genres. La pratique littéraire du zuihitsu a pu évoquer chez certains interprètes l’art de la « combinaison » (J.-J. Origas29), du « mixage » et du « métissage » (M. Ferrier30) entre des éléments poétiques, spirituels (ou religieux), romanesques (ou fictionnels), philosophiques (ou conceptuels) et autobiographiques. La faiblesse du dispositif littéraire du zuihitsu – son absence de genre nettement marqué, la plasticité de sa parole, l’ouverture de son texte à des éléments très divers – serait par conséquent sa force : en marge de tous les genres, il représente paradoxalement une forme de « supra-genre », les accueillant tous en son sein. D. Struve évoque par exemple « l’attitude syncrétique » des Heures oisives d’Urabe Kenkô sur la question religieuse, « où s’allient les différentes voies du confucianisme, du bouddhisme et du taoïsme31 » (ici se dessine d’ailleurs une autre métaphore : celle de l’« alliage »).

« Métissage textuel » : un texte polyphonique

11Cette difficulté à caractériser le zuihitsu apparaît dès les Notes de chevet. À quel genre, en effet, rattacher le livre de Sei Shônagon ? Au journal intime (nikki bungaku), qui occupe une place importante à l’époque ? Bien que les éléments autobiographiques soient prépondérants, il est difficile d’inscrire le Makura no sôshi dans cette seule catégorie : aucune chronologie n’est présente, et l’auteur multiplie à côté des éléments relevant du genre des mémoires des listes (qui constituent l’un des versants importants du livre), des portraits, des anecdotes, des historiettes, etc. Or, pour la même raison, le genre des listes, introduit par la littérature chinoise (notamment avec Li Chang-yin) et que les contemporains de Sei Shônagon ont pu connaître, ne suffit pas : quelle que soit cette influence sur les Notes de chevet (qui reste encore contestable), c’est la diversité des genres qui règne, plutôt que la pratique d’un seul.

12Ainsi, l’auteur des Notes de chevet aurait-elle pu écrire comme Montaigne (II, 8, p. 385) : « C’est le seul livre au monde de son espèce, d’un dessein farouche et extravagant » (l’ouvrage a d’ailleurs été connu pendant longtemps sous le simple nom de Sei Shônagon no ki : « Le livre de Sei Shônagon »). Le problème de la qualification du premier zuihitsu n’est pas sans évoquer d’ailleurs le problème tout à fait similaire qu’a rencontré la littérature européenne pour qualifier ce livre « extravagant » qu’est le livre de Montaigne. À quel ouvrage antérieur, en effet, pouvons-nous rapporter les Essais ? Aux dialogues (platoniciens), aux lettres (notamment celles de Sénèque), aux mélanges (Miscellanea de Politien, Elegantia de Valla, par exemple), aux leçons (épîtres, exempla, mais on peut penser également aux Adagia d’Érasme) ? En écrivant les Essais, Montaigne initie un genre nouveau, mais dont le modèle reste après lui pratiquement inimitable. Si les moralistes de l’âge classique descendent bel et bien de Montaigne, ce n’est pas en reprenant tel quel le dispositif littéraire des Essais, mais au contraire en élaborant à partir de genres préexistants (comme la maxime ou le caractère) des formes littéraires ouvertes et souples qui pratiquent à leur façon, mais dans la lignée de Montaigne donc, ces formes de combinaison ou de métissage textuel que nous évoquions. Si bien que les Caractères de La Bruyère, par exemple, ne se réduisent plus aux seuls caractères : on y trouve des maximes, des réflexions, des portraits, des contes, des pastiches, des observations, ou encore des dialogues, avec cet aspect hétéroclite qui caractérise les Heures oisives d’Urabe Kenkô.

  • 32  Van Delft, Louis, Les spectateurs de la vie : généalogie du regard moraliste, Laval, Les Presses d (...)

13On ne peut qu’être frappé, en conséquence, par la similitude des deux situations qui nous intéressent ici ; sur la question du genre des Essais, et des textes moralistes en général, la littérature européenne rencontre des difficultés semblables à celles de la caractérisation du zuihitsu au Japon. Dans les deux cas, les auteurs ont élaboré des textes pour le moins nouveaux, utilisant des éléments divers et hétérogènes, en vue de former une enquête anthropologico-morale sur la vie humaine. De même, c’est en pratiquant des formes de combinaison ou de métissage que ces textes obtiennent, paradoxalement, leur propre identité. On sait combien, par exemple, les Essais de Montaigne comportent des éléments épicuriens, stoïciens et sceptiques, sans pour autant se réduire à aucun d’eux, et conservent une voix propre, à la fois libre et curieuse. C’est que toute phénoménologie de la vie humaine, qu’elle soit du côté des moralistes ou du côté du zuihitsu, et donc inscrite dans des présupposés et des arrière-fonds culturels très différents, implique d’élaborer et d’employer des formes textuelles similaires : un genre de « livre-creuset » (L. Van Delft32) ou de « livre-métis », si l’on se souvient ici de la définition donnée par J. Lafond du moraliste : « métis d’écrivain et de philosophe ».

Conclusion

  • 33  Van Delft, Louis, Les moralistes. Une apologie, op. cit., p. 44.
  • 34  Ferrier, Michaël, Japon : la barrière des rencontres, op. cit., p. 243.
  • 35  Quignard, Pascal, « Un collectionneur de roman », Le Débat, n° 54, mars-avril 1989, Gallimard, p.  (...)
  • 36  Parmi les nombreuses références aux moralistes et au zuihitsu dans l’œuvre de Pascal Quignard, ret (...)

14« L’heure est assurément venue, écrit L. Van Delft dans Les moralistes. Une apologie, de solides comparaisons entre la "sagesse", les grands thèmes de la réflexion morale dans l’Europe des xvie-xviiie siècles, et leur équivalent dans des civilisations très éloignées dans le temps et (ou) l’espace33. » Or, jusqu’à présent, cette comparaison ne s’est effectuée que dans un seul sens : c’est en traduisant et en présentant les Notes de chevet, les Notes de ma cabane de moine ou les Heures oisives, que les interprètes se sont autorisés à construire un certain nombre de ponts avec la littérature morale française, sans conduire plus loin leur analyse. Bien qu’avant tout redevable aux études « dix-septiémistes », le travail des critiques sur les textes des moralistes français de l’âge classique gagnerait aujourd’hui à s’ouvrir à des traditions littéraires différentes, éloignées dans l’espace et le temps, où se retrouvent parfois les mêmes exigences stylistiques et formelles, le même souci d’enquêter sur la vie humaine, de semblables « livres-creusets » où s’allie l’ensemble des cultures philosophiques et religieuses d’une époque (christianisme, notamment augustinien, rationalisme moderne et sagesses antiques en ce qui concerne les textes moralistes ; bouddhisme, confucianisme et taoïsme pour le zuihitsu, en particulier chez Urabe Kenkô) au sein d’un texte pratiquant avec une grande liberté et une grande souplesse une forme de métissage textuel. Et c’est cette logique combinatoire ou ce caractère « polyphonique » qui permet au zuihitsu de se présenter, non pas comme un genre inférieur, insuffisamment déterminé ou étiqueté par « la loi du genre » dont parle J. Derrida, mais peut-être comme la forme littéraire par excellence. Comme le note précisément M. Ferrier, cette indétermination ou ce mélange des genres « aboutit à une remise en cause de tout discours régulateur. Elle vise à dessiner un champ d’expression toujours plus décloisonné et toujours plus vaste, une littérature qui refuse de se trouver enclose dans une forme définie ni soumise aux contraintes conventionnelles, mais libère à chaque page, à chaque nouvel ouvrage, une puissance de feu remodelée, la liberté d’une création permanente34 ». On croirait lire ici l’écrivain P. Quignard qui invite non à « décloisonner », comme M. Ferrier, mais, en un sens tout à fait proche, à « déprogrammer » la littérature : il en appelle à une littérature « décatégorisée », où la question des genres tendrait à disparaître par le mixage des formes textuelles et la libre circulation des éléments non-littéraires : « Nous avons besoin de cesser de rationaliser, de cesser d’ordonner ceci, de cesser de s’interdire cela. Ce dont nous avons besoin, c’est qu’un peu de lumière neuve vienne tomber de nouveau, comme un “privilège”, sur les “sordidissimes” de ce monde. Ce dont nous avons besoin, c’est d’une déprogrammation de la littérature35. » Rien d’étonnant dès lors à ce que l’auteur des Petits traités se réclame dans cette perspective à la fois de la tradition des moralistes français et de celle du zuihitsu, dont il est l’un des plus fervents défenseurs et, quelque part, continuateurs en France36.

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Bibliographie

Ferrier, Michaël, Japon : la barrière des rencontres, Nantes, Éditions Cécile Defaut, 2009.

Montaigne, Michel (de), Essais, éd. Pierre Villey, revue par Verdun-Louis Saulnier, Paris, PUF, 1978.

Moralistes du xviie siècle, dir. Jean Lafond, Paris, Éditions Robert Laffont, 1992.

Origas, Jean-Jacques, La lampe d’Akutagawa. Essais sur la littérature japonaise moderne, Paris, Les Belles Lettres, 2008.

Parmentier, Bérangère, Le siècle des moralistes, Paris, Éditions du Seuil, 2000.

Quignard, Pascal, « Un collectionneur de roman », Le Débat, n° 54, mars-avril 1989, Gallimard, p. 77-88.

Revon, Michel, Anthologie de la Littérature Japonaise des Origines au xxe siècle, Paris, C. Delgrave, 1910.

Sei Shônagon, Notes de chevet, éd. André Beaujard, Paris, Gallimard, 1966.

Sieffert, René, La littérature japonaise, Paris, Publications orientalistes de France, 1973.

Struve, Daniel, « Les "Heures oisives" et le xviie siècle », Éloge des sources. Reflets du Japon ancien et moderne, dir. J.-A. Kyburz, F. Macé, C. von Verschuer, Paris, Éditions Philippe Picquier, 2004, p. 207-239.

Urabe Kenkô, Les heures oisives, suivi de Kamo no Chômei, Notes de ma cabane de moine, trad. Charles Grosbois, Tomiko Yoshida et le R.P. Sauveur Candau, Paris, Gallimard, 1968.

Van Delft, Louis, Le moraliste classique. Essai de définition et de typologie, Genève, Librairie Droz, 1982.

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Notes

1  Revon, Michel, Anthologie de la Littérature Japonaise des Origines au xxe siècle, Paris, C. Delgrave, 1910.

2  Aston, William George, Littérature japonaise, trad. H.-D. Davray, Paris, Armand Colin, 1902.

3  Voir la recension de Noël Péri, « Michel Revon : Anthologie de la littérature japonaise des origines au xxe siècle », Bulletin de l’École française d’Extrême-Orient, tome 11, 1911, p. 226-231.

4  Lafond, Jean, « Préface », Moralistes du xviie siècle, dir. Jean Lafond, Paris, Éditions Robert Laffont, 1992, p. XIX.

5  Parmentier, Bérangère, Le siècle des moralistes, Paris, Éditions du Seuil, 2000, p. 8.

6  Revon, Michel, Anthologie de la Littérature Japonaise des Origines au xxe siècle, op. cit., p. 195.

7  Sei Shônagon, Notes de chevet, éd. André Beaujard, Paris, Gallimard, 1966.

8  Revon, Michel, Anthologie de la Littérature Japonaise des Origines au xxe siècle, op. cit., p. 199.

9  Urabe Kenkô, Les heures oisives, suivi de Kamo no Chômei, Notes de ma cabane de moine, trad. Charles Grosbois, Tomiko Yoshida et le R.P. Sauveur Candau, Paris, Gallimard, 1968. Toutes nos références se feront dans cette édition. Notons par ailleurs qu’André Beaujard, auteur de l’édition de référence en France des Notes de chevet, est justement un ancien élève de Michel Revon.

10  « Personne au Japon ne peut parler de Kenkô sans évoquer Montaigne », indique la quatrième de couverture des Heures oisives. Voir également René Sieffert, La littérature japonaise, Paris, Publications orientalistes de France, 1973, p. 93 : « Dans un siècle soumis aux violents, il est le parfait honnête homme, libre, fin, sceptique, un Montaigne de l’Extrême-Asie. »

11  Grosbois Charles et Yoshida Tomiko, « Préface » à Urabe Kenkô, Les heures oisives, op. cit., p. 23.

12  Ce point mériterait une étude à part entière. Voir par exemple dans les Heures oisives les paragraphes LXXXV (p. 89), XCI (p. 92) et CXLIII (p. 123).

13  Ferrier, Michaël, Japon : la barrière des rencontres, Nantes, Éditions Cécile Defaut, 2009, p. 243.

14  Quignard, Pascal, « Un collectionneur de roman », Le Débat, n° 54, mars-avril 1989, Gallimard, p. 88.

15  Voir Sakaï, Anne, « Présentation » de De la paresse de Tanizaki Jun’ichirô, in Cent ans de pensée au Japon, éd. Y.-M. Allioux, Paris, Éditions Philippe Picquier, 1996, t. 1, p. 170.

16  Pigeot, Jacqueline, « Postface », Kamo no Chômei, Notes de ma cabane de moine, Paris, Le Bruit du temps, 2010, p. 69.

17  Van Delft, Louis, « Les recueils des moralistes comme encyclopédies existentielles », L’Entreprise encyclopédique, Littérales, n° 21, 1997, p. 113-135.

18  L’expression est notamment utilisée par Barbara Carnevali, « L’observatoire des mœurs. Les coutumes et les caractères entre littérature et morale », Pensée morale et genres littéraires de Montaigne à Genet, dir. Jean-Charles Darmon et Pierre Desan, Paris, PUF, 2009, p. 168.

19  Notes de ma cabane de moine, p. 263 de l’édition de référence.

20  Van Delft, Louis, Le moraliste classique. Essai de définition et de typologie, Genève, Librairie Droz, 1982, p. 108, nous soulignons.

21  Origas, Jean-Jacques, La lampe d’Akutagawa. Essais sur la littérature japonaise moderne, Paris, Les Belles Lettres, 2008, p. 175.

22  Montaigne, Michel (de), Essais, éd. Pierre Villey, revue par Verdun-Louis Saulnier, Paris, PUF, 1978, I, 1, p. 9. Nos références à Montaigne se feront dans cette édition. I, 1, p. 9 renvoie au premier chapitre du premier livre, p. 9. L’orthographe a été modernisée.

23  Origas, Jean-Jacques, La lampe d’Akutagawa, op. cit., p. 176.

24  Derrida, Jacques, Parages, Paris, Galilée, 1986.

25  Origas, Jean-Jacques, La lampe d’Akutagawa, op. cit., p. 177.

26  Van Delft, Louis, Les moralistes. Une apologie, Paris, Gallimard, 2008, p. 127.

27  Compagnon, Antoine, La seconde main ou le travail de citation, Paris, Éditions du Seuil, 1979, p. 302.

28  Bakhtine, Mikhaïl, Esthétique et théorie du roman, Paris, Gallimard, 1975.

29  Origas, Jean-Jacques, La lampe d’Akutagawa, op. cit., p. 189.

30  Ferrier, Michaël, Japon : la barrière des rencontres, op. cit., p. 245.

31  Struve, Daniel, « Les "Heures oisives" et le xviie siècle », Éloge des sources. Reflets du Japon ancien et moderne, dir. J.-A. Kyburz, F. Macé, C. von Verschuer, Paris, Éditions Philippe Picquier, 2004, p. 214.

32  Van Delft, Louis, Les spectateurs de la vie : généalogie du regard moraliste, Laval, Les Presses de l’université Laval, 2005, p. 157.

33  Van Delft, Louis, Les moralistes. Une apologie, op. cit., p. 44.

34  Ferrier, Michaël, Japon : la barrière des rencontres, op. cit., p. 243.

35  Quignard, Pascal, « Un collectionneur de roman », Le Débat, n° 54, mars-avril 1989, Gallimard, p. 88.

36  Parmi les nombreuses références aux moralistes et au zuihitsu dans l’œuvre de Pascal Quignard, retenons son texte sur La Bruyère, Une gêne technique à l’égard des fragments (Paris, Fata Morgana, 1986), et son « petit traité » sur Sei Shônagon, « L’oreiller de Sei », Petits traités II, Paris, Gallimard, 1998.

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Pour citer cet article

Référence électronique

André Laidli, « En marge des genres : l’écrit « au fil du pinceau » (zuihitsu) au Japon et sa lecture moraliste en France »TRANS- [En ligne], 13 | 2012, mis en ligne le 11 mai 2012, consulté le 18 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/trans/517 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/trans.517

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Auteur

André Laidli

Doctorant en philosophie à l’Université Lyon 3 Jean Moulin, il poursuit en parallèle une licence de japonais à l’INALCO. Ses recherches portent sur le genre de l’essai (notamment à partir des auteurs qui favorisèrent sa diffusion en Europe : les moralistes français) et visent à comparer à terme l’essai européen à son équivalent japonais, le zuihitsu (à partir des auteurs classiques, Kamô no Chomei et Yoshida Kenkô, puis le renouveau contemporain, avec notamment Tanizaki).

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