Navigation – Plan du site

AccueilNuméros8Université invitéePrésentation du dossier « Univers...

Université invitée

Présentation du dossier « Université invitée » : Bruxelles prend la parole

Catherine Gobert

Notes de l’auteur

Je tiens à remercier A. Chimkovitch et le Professeur D. Acke pour leurs conseils et leur relecture patiente.

Texte intégral

1Non pas une seule, mais deux universités étrangères prennent place dans ce dossier qui leur est consacré : l’Université Libre de Bruxelles (ULB), fondée en 1834, et la Vrije Universiteit Brussel (VUB), université sœur néerlandophone de l’ULB, créée en 1970 à partir de cette dernière en tant qu’institution séparée. Malgré leur indépendance mutuelle, ces deux universités – qui partagent la même philosophie de « libre examen » et de refus de soumission aux dogmes – ne cessent d’œuvrer pour resserrer leurs liens et travaillent de concert sur de nombreux plans. Ce dossier offre l’opportunité de créer un pont interuniversitaire et transrégional supplémentaire, favorisant le dialogue entre les chercheurs de ces deux institutions.

  • 1  A la VUB, la littérature comparée est abordée de façon plutôt indirecte (dans le cadre des cours c (...)
  • 2  Orientations à l’intérieur de la faculté de « Philosophie et Lettres » (ULB)/« Letteren en Wijsbeg (...)
  • 3  Notons qu’il n'est pas possible, en Belgique, d’obtenir la mention de « Docteur en littérature gén (...)
  • 4  Mentionnons quelques unités de recherche : en ce qui concerne la recherche littéraire et la recher (...)

2Situées au cœur de Bruxelles, capitale de la Belgique trilingue (n’oublions pas la communauté allemande) et de l’Europe, les deux universités citées se caractérisent par leur ouverture au monde et à la pluriculturalité. Ainsi, bien que l’ULB et la VUB ne disposent pas de département consacré à la « LGC » et ne délivrent pas de diplôme pour ce type d’études, elles proposent bel et bien des cours de littérature générale et/ou comparée1 dans le cadre des cursus de« Langues et Littératures » et de « Taal-en Letterkunde »2. De même, sur le plan de la recherche3, la littérature générale et comparée est fortement représentée (et il en est de même pour les études interartistiques et, plus récemment, l’intermédialité)4. Les travaux que nous proposons dans ce dossier en sont la preuve : ceux-ci développent des sujets qui s’inscrivent de plein droit dans cette discipline, ou qui sont, du moins, susceptibles d’intéresser ses chercheurs.

3Dix textes – cinq par université – mettent en avant la fascinante multiplicité des axes de recherche occupant nos doctorants bruxellois. Ainsi, à l’image de la ville multiculturelle qu’est Bruxelles, les articles abordent une panoplie d’aires linguistiques et culturelles différentes. De plus, diverses disciplines, de nombreux genres littéraires et une belle variété d’autres domaines artistiques y sont également représentés.

4Nous ouvrons le dossier avec un article de Sophie Croiset (ULB). A partir de son étude de la « transidentité » de deux auteurs chinois d’expression française (Dai Sijie et Shan Sa) et de la façon dont ce positionnement identitaire complexe se manifeste dans leurs œuvres littéraires, elle souligne la nécessité d’une approche transculturelle et transdisciplinaire, indispensable dans le contexte actuel de globalisation, pour mieux comprendre ces écrivains qui se trouvent au carrefour de différentes langues et cultures. La question de l’« identité » complexe et multiple est aussi au centre de la réflexion de Karine Ancellin (VUB), cette fois-ci sur le plan des personnages romanesques : après un exposé étayé sur le phénomène de la « littérature musulmane » et son rapport avec l’Occident, notre chercheuse analyse pourquoi et comment, après les attentats du 9/11, certaines femmes auteurs d’origine musulmane et écrivant en anglais, créent des héros musulmans nouveaux, aux identités culturellement « hybrides », personnages « kaléidoscopiques » appartenant à différents mondes et en perpétuelle quête identitaire.

5La rencontre de l’Orient et de l’Occident est aussi abordée par Arthur Chimkovitch (VUB), bien que sous un angle très différent. Avec lui, nous traversons les siècles et les pays sur les traces du mythe des anges musulmans fornicateurs Harut et Marut, et ce, essentiellement au sein des productions écrites de l’Occident chrétien (non seulement littéraires, mais aussi théologiques, historiques, scientifiques, etc.), tout en apprenant comment et pourquoi celles-ci utilisèrent cet épisode surgi d’un ailleurs lointain.

6Katia Vandenborre (ULB) crée un pont supplémentaire entre l’Est et l’Ouest, et plus précisément entre la Pologne et la Belgique. Ayant étudié les rapports respectifs de Maeterlinck et Wyspiański à la tradition du conte germanique et polonais, elle compare la mise en scène de la féerie dans leurs deux théâtres symbolistes, afin de juger quel fut l’impact de l’auteur belge sur son confrère et en quelle mesure ce dernier développa une approche indépendante.

7Place est ensuite faite aux rapports qu’entretiennent les lettres et les arts visuels. Clément Dessy (ULB) ouvre cette partie. Dans son article, il nous expose le nouveau et fascinant dialogue qui s’instaure, à la fin du XIXe siècle, entre peinture et littérature au sein d’une revue littéraire française, ceci en soulignant « les projets et les philosophies de création artistiques communs » liant les écrivains de La Revue blanche et les peintres Nabis, collaborateurs de cette revue. L’interaction entre deux arts est aussi au centre de la réflexion de Noël Reumkens (VUB) qui examine, dans trois poèmes allemands contemporains (poèmes de Kling, Grünbein et Draesner), les « références intermédiales » à l’artiste Joseph Beuys et plus précisément au « framework » conceptuel et théorique à l’intérieur duquel œuvra cet artiste. Il montre ainsi comment ces poèmes reproduisent les stratégies artistiques propres à l’art conceptuel et demandent une réinterprétation de l’objet littéraire, à l’intérieur du cadre conceptuel beuysien.

8L’« intermédialité » étant un axe de recherche prisé par plusieurs jeunes chercheurs de la VUB, nous nous permettons un petit détour par cette problématique. Christophe Collard (VUB), qui se penche sur le problème de l’hybridation des médias modernes, propose d’utiliser le concept du « strange loop » (Hofstadter) comme modèle heuristique pour les « pratiques intermédiales » – non sans nous expliquer ce que nous devons exactement entendre par « intermédialité ».

9Ayant pénétré dans le domaine du cinéma, nous resterons dans cette sphère le temps de deux articles étudiant la problématique de l’adaptation du texte littéraire au grand écran. Consciente du problème que pose la variation sémiotique entre œuvre littéraire et film, Justine Kemlo (ULB) souligne que l’on peut arriver à une meilleure compréhension du processus de l’adaptation en considérant les films comme des textes multimodaux. Elle passe ensuite à un examen comparatif mettant en exergue la façon dont deux textes, littéraire et filmique (Les Liaisons dangereuses, roman et adaptation), temporellement et culturellement éloignés, génèrent du sens. Dès son introduction, Christian Janssens (ULB) exprime sa volonté de proposer une approche de l’adaptation cinématographique différente : son analyse, d’inspiration plutôt sociologique, sera celle de l’« ensemble d’arrivée » dans lequel s’inscrit un film donné (ici, la transposition cinématographique de L’Oiseau Bleu par Tourneur), étude permettant d’éclairer certains choix et expériences esthétiques du réalisateur dans sa pratique de l’adaptation.

10Ann Peeters (VUB) aborde également la question de l’adaptation, notamment celle d’une œuvre littéraire (le roman de Manzoni I Promessi sposi) à l’opéra lyrique. Après une introduction générale récapitulant les répercussions de ce roman dans la production littéraire italienne et dans les autres arts, notre chercheuse se penche sur trois réécritures pour l’opéra basées sur la première édition du texte (1827) et leurs caractéristiques spécifiques, tout en nous montrant comment leurs auteurs ont opéré des choix en fonction des possibilités scéniques, du contexte historique, de l’influence de certaines traditions artistiques, etc.

11Le lecteur remarquera que, malgré la multiplicité foisonnante des sujets abordés, une certaine unité se dégage de ce dossier : soit donc des questions, des problématiques partagées, des centres d’intérêt communs liant les articles entre eux dans le mouvement d’un grand dialogue transuniversitaire.

Haut de page

Notes

1  A la VUB, la littérature comparée est abordée de façon plutôt indirecte (dans le cadre des cours consacrés aux « littératures européennes », à la narratologie, etc.) Signalons aussi le « Master na Master in de Literatuurwetenschappen » (Master complémentaire en Sciences de la littérature), Master interuniversitaire (regroupant les universités flamandes de Gand, Louvain, Bruxelles et Anvers) à l’intérieur duquel est enseignée la « science de la littérature comparée ». Toute ma reconnaissance à Messieurs les Professeurs H. Vandevoorde et G. Martens (VUB) pour leur aide précieuse, ainsi qu’à Mademoiselle V. Demeuldre et au Professeur M. Couvreur pour les informations se rapportant à l’ULB.

2  Orientations à l’intérieur de la faculté de « Philosophie et Lettres » (ULB)/« Letteren en Wijsbegeerte » (VUB), pour lesquelles l’acquisition d’au moins deux langues (y compris leurs culture et littératures respectives) est impérative.

3  Notons qu’il n'est pas possible, en Belgique, d’obtenir la mention de « Docteur en littérature générale et comparée ».

4  Mentionnons quelques unités de recherche : en ce qui concerne la recherche littéraire et la recherche interartistique à la VUB, il y a le CREI (« Centre de Recherche : Esthétique, Imaginaire et Création »). Pour l’ULB, nous signalons l’unité de recherche (qui sera mis sur pied dès septembre) « Etudes littéraires, philologiques et textuelles ». N’oublions pas le GRAM (« Groupe de recherche sur l’art moderne »), qui se penche, entre autres, sur les relations entre image et écriture aux XIXe et XXe siècles. Mes remerciements à M. F. André (ULB), ainsi qu’à Messieurs les Professeurs M. Couvreur (ULB), D. Gullentops et J. Callens (VUB) pour leurs renseignements précis et pour leur aide.

Haut de page

Pour citer cet article

Référence électronique

Catherine Gobert, « Présentation du dossier « Université invitée » : Bruxelles prend la parole »TRANS- [En ligne], 8 | 2009, mis en ligne le 08 juillet 2009, consulté le 17 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/trans/332 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/trans.332

Haut de page

Auteur

Catherine Gobert

Prépare une thèse en cotutelle entre la Vrije Universiteit Brussel (« Taal- en Letterkunde : Romaanse Talen » - Langues et Littératures : Langues Romanes) et l’Université de la Sorbonne Nouvelle-Paris III (Littérature française et comparée), sous la direction des Prof. H. Merlin-Kajman (Paris III) et D. Acke (VUB). Titre de la thèse : « La mort et (l’) au-delà dans les utopies des XVIIe et XVIIIe siècles ». Unités de recherche : « Centrum voor de Studie van de Verlichting en het Hedendaags Humanisme » (VUB) et « Formes et idées de la Renaissance aux Lumières » (EA 174 - CERCLE 17-21, Paris III). Domaines de spécialisation : Culture et littérature françaises, littérature des XVIIe et XVIIIe siècles, utopies (littérature), histoire des représentations de la mort et de l’au-delà (sociologie, religion, littérature)

Haut de page

Droits d’auteur

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés), sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search