Déhiérarchiser le savoir et interroger la nomination. L’Encyclopédie critique des mots de la mémoire et du témoignage, entre ambition encyclopédique et démarche littéraire
Texte intégral
L’Encyclopédie critique des mots de la mémoire et du témoignage est un projet mené par Luba Jurgenson et Philippe Mesnard depuis 2015. Il propose à des chercheurs de plusieurs disciplines d’interroger les mots associés à la mémoire et au témoignage, dans un souci d’élaboration critique et de mise en perspective des termes, les faisant jouer ensemble au moyen de liens hypertextes notamment. Ce projet, en ligne et disponible à l’adresse : http://memories-testimony.com, devra dans les années à venir être assorti d’une édition papier, ce qui reste en soi un pari étant donné la sensibilité intellectuelle du sujet et les enjeux critiques qu’il sous-tend.
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Cécile Rousselet : Comment en êtes-vous arrivés à construire ce projet ?
- 1 Philippe Mesnard a, depuis plusieurs années, posé l’hypothèse heuristique de « lieux communs » de l (...)
- 2 Bourdieu, Pierre, Esquisse d'une théorie de la pratique, Paris, Librairie Droz, 1972.
- 3 Terme forgé par Annette Wieviorka, in idem, L’ère du témoin, Paris, Hachette, 2002.
- 4 Terme repris à la doxa historienne d’Italie par Primo Levi, in idem, I sommersi e i salvati, Turin, (...)
- 5 Philippe Mesnard s’inscrit encore ici dans une perspective bourdieusienne, comme énoncée auparavant (...)
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Luba Jurgenson : Ce projet est né d’une volonté de se mettre d’accord sur des termes qu’on emploie entre différentes disciplines dans le champ du témoignage et de la mémoire. Souvent, on croit parler de la même chose, mais ce n’est pas le cas. L’étude de la mémoire impliquant de fait une démarche résolument interdisciplinaire, ce projet est apparu une nécessité. Par la suite, il a largement débordé du souci simplement terminologique pour se diriger vers une réflexion à la fois méthodologique, épistémologique et théorique : en effet, questionner les concepts implique en faire l’historique, mais aussi l’exposé de leurs mésusages et de leur évolution. Nous avons également souhaité réfléchir – et ceci constitue un pan important de notre démarche – à la circulation de ces concepts à travers les langues. Certains sont plus viables dans certaines langues, ou ne désignent pas nécessairement la même chose selon les sphères linguistiques. Il a donc fallu s’interroger sur les inflations et les dévaluations des concepts à travers leur vie. Tout ceci constitue les présupposés de notre entreprise, qui est de proposer une encyclopédie critique et pas uniquement terminologique.
Philippe Mesnard : Cela pose la question cruciale de la circulation du discours et des lieux communs1. Un certain nombre de termes circulent entre les chercheurs, qui néanmoins conservent un usage souvent individualisé, voire individualiste de ceux-ci. On constate également, de la part de ces chercheurs, une volonté de forger des termes qui dès lors sont souvent figés et symptomatiques d’un positionnement de champs, au sens bourdieusien du terme2, dans le paysage intellectuel, et plus particulièrement mémoriel. L’idée présidant à l’élaboration de cette Encyclopédie était de déconstruire non seulement le sens et la signification de ces termes, mais aussi leurs usages, de manière à pouvoir les évaluer autrement qu’en tant que symptômes. Par exemple, « l’ère du témoin3 », « la zone grise4 », la « boucherie de 14 »... sont des termes qui ont été très fréquemment identifiés à une personne, à un positionnement ou à une vision de l’histoire, sans être interrogés. Il faut ajouter que les usages de ces expressions ne sont pas seulement ceux des chercheurs, mais aussi ceux des étudiants qui, accordant peut-être trop de crédit à ceux auprès de qui ils viennent apprendre —qui sont des Sujets supposés savoir, pour reprendre l’expression lacanienne, auxquels on prête plus de savoir et de vérité qu’ils ne détiennent —, réutilisent celles-ci d’une façon qui ferme le champ5 et l’exigence d’ouverture que l’on peut espérer comme exigence première et éthique concernant la mémoire, et tout champ de connaissance — on peut étendre cette remarque à de nombreux chercheurs, dépourvus de sens critique, ce que notre époque encourage. D’une certaine manière, on peut lire une contradiction entre les usages de certains termes, qui tendent à les fermer, ainsi que le champ dans lequel ces usages s’inscrivent, qui, lui, se voudrait un champ de questionnements. La dimension critique de l’encyclopédie consiste ou consisterait alors à pouvoir soumettre ces termes, et chacun des mots du témoignage et de la mémoire, à une exigence d’ouverture critique. Cette même exigence permet de créer un lien entre les chercheurs et les étudiants, et dès lors de déhiérarchiser le savoir. Historiquement, et ce n’est pas un hasard, ce projet d’encyclopédie est né au moment d’un colloque, lieu où, même si ces moments universitaires ne sont pas toujours des échanges, les mots circulent.
Luba Jurgenson : Effectivement, il s’agissait du colloque « Des témoins aux héritiers », sur la périodisation de la littérature consacrée à la Shoah ; c’est seulement au terme de la seconde jour que nous avons enfin réussi à nous mettre d’accord sur le terme même de périodisation ainsi que d’autres mots utilisés au cours des débats. C’est de là l’idée de l’encyclopédie a émergé.
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Cécile Rousselet : Venons-en au cœur de cet entretien. Philippe Mesnard, vous êtes professeur de littérature comparée et Luba Jurgenson, professeure de littérature russe. Comment articulez-vous votre souci pour le fait littéraire et votre engagement dans cette Encyclopédie critique des mots de la mémoire et du témoignage ?
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Philippe Mesnard : Il est difficile de faire l’impasse, indépendamment de notre spécialité, sur le corps (et le core, tout autant) de notre travail, c’est-à-dire la littérature. À la différence des autres rapports au savoir, celle-ci offre la possibilité, qui n’est pas toujours exploitée autant qu’elle pourrait l’être, certes, de réinterroger le langage de l’intérieur, d’en retravailler la matière, possibilité qui inclut également celle de revisiter les normes du langage, ses particules et ses moules. Toute une part de la littérature mémorielle – et pas uniquement testimoniale – reproduit des schémas normatifs, des stéréotypes et des modèles d’écriture, sans se saisir de ce que la littérature peut offrir, non pas essentiellement, puisque ce n’est pas une question d’essence, mais intrinsèquement, à savoir la richesse de jouer avec l’expression et les images. Sans la littérature, l’encyclopédie risquerait de se cristalliser rapidement, et la littérature justement est l’élément dynamique et contradictoire, devenant par là même la condition de notre projet, une condition qui vient s’imposer aux autres disciplines et déranger leur disciplinarité qui tourne souvent, en France, à du disciplinarisme. Peut-être est-ce aussi pour cela que, finalement, le champ mémoriel est autant, de façon prépondérante, notamment en France, occupé par des historiens, dans la mesure où l’histoire permet de repousser ce dérangement que la littérature instille naturellement. Dans le projet encyclopédique, la littérature est donc absolument nécessaire.
- 6 Saussure, Ferdinand de, Cours de linguistique générale, Paris, Payot, 1995 [1916].
- 7 Lotman, Iouri, Universe of The Mind. A Semiotic Theory of Culture, Londres, I. B. Tauris, 1990.
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Luba Jurgenson : J’ajouterais à cela qu’en tant que littéraires, Philippe et moi, et en tant que littéraires qui nous intéressons à la modernité, et depuis quelques temps à la poésie, nous sommes amenés à nous confronter à la question de la nomination, qui est extrêmement importante, en particulier dans l’auto-réflexion des poètes modernistes sur eux-mêmes. Je pense bien sûr à Marina Tsvetaeva qui dit que le poète est celui qui rebaptise le monde. Mais c’est une pensée qu’on retrouve également chez Walter Benjamin. Effectivement, la poésie, mais aussi la littérature, de manière peut-être moins évidente et apparente, propose des images verbales et langagières qui permettent de voir quelque chose qui était là et qu’on n’avait pas vu auparavant ; c’est même le propre de l’image, qui se forge dans le langage avant même que le visuel puisse suivre. Par exemple, il est de nombreuses images langagières qui n’ont pas encore trouvé d’équivalent dans les arts visuels. Cette réflexion sur la nomination, sur le nom qui tire vers le visible quelque chose qui était là mais qui était noyé dans le quotidien, n’est pas sans interagir avec l’idée d’encyclopédie. On peut tisser un parallèle entre une réflexion sur la littérature et notamment sur la poésie, d’une part, et sur la vie des concepts, d’autre part. Un concept est la trace d’un travail de la pensée. Cette trace d’un parcours, lorsque le concept est clos, nous fait donc découvrir une idée qui n’existait pas ou n’étais pas accessible avant – ce que l’on appelle une idée nouvelle –, et qui pousse les murs du langage, de la culture, dans la mesure où tout est toujours dit dans un état actuel du langage. L’image de l’échiquier de Ferdinand de Saussure6 est pertinente : il existe un état de l’échiquier sur lequel tout est dit. C’est lorsqu’arrive un nouveau concept qu’on s’aperçoit que tout n’était pas déjà dit et qu’on est à la fois dans l’obligation de voir, et dans l’impossibilité de revenir à l’état d’avant, où l’on n’avait pas vu. Tout ceci explique les anachronismes : on interprète alors l’état des choses d’avant avec les outils reçus de ces nouveaux concepts. Ce nouveau concept est alors vivant : il peut faire l’objet d’une traduction, mais aussi celui d’une rétro-traduction. Là peut être testée la vitalité d’un concept. À force d’être utile, utilisé, réutilisé, à force de circuler et d’être dévalué, parfois on s’aperçoit qu’on ne peut plus le rétro-traduire. Je teste souvent la vitalité des concepts lorsque je donne cours, devant des étudiants : lorsque j’utilise un concept comme une évidence, si un étudiant m’en demande le sens, et que j’ai des difficultés à l’expliquer, alors c’est que ce concept est en train peut-être de se figer. Pour moi, le lien avec la littérature est absolument primordial. Il recouvre la question de la nomination des phénomènes, des images, des choses, avec leur bagage dynamique et cette question de rétro-traduction qui pour moi est essentielle au phénomène de la culture. Iouri Lotman7 propose l’idée selon laquelle un changement de paradigme est un moment où quelque chose qui était traduisible d’un état de l’échiquier vers un autre ne l’est plus, et où donc les générations ne se comprennent plus. Je considère que c’est le moment où l’on ne peut plus rétro-traduire des concepts, et donc que quelque chose a radicalement changé. La question des lieux communs nous amène peut-être aussi à réfléchir sur ces changements de paradigme qui font qu’un concept devient obsolète ou qu’il ne fonctionne plus comme il fonctionnait avant.
- 8 Voir le dossier critique du numéro 7 de la revue Mémoires en jeu / Memories at Stake.
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Cécile Rousselet : Il est intéressant de voir qu’en littérature, comme chez Borgès par exemple, les métaphores associées à l’idée d’encyclopédie sont des images spatiales. Luba Jurgenson, vous travaillez sur le paysage comme espace mémoriel8. Que pouvez-vous également nous dire sur la dimension topographique que l’encyclopédie peut concevoir et participer à construire ?
- 9 Voir Chalamov, Varlam, Récits de la Kolyma, Lagrasse, Verdier, 2003. Pour l'étude de l'œuvre, voir (...)
- 10 Desbois, Patrick, Porteur de mémoires : sur les traces de la Shoah par balles, Paris, Michel Lafon, (...)
- 11 Lanzmann, Claude, Shoah, film documentaire, 1985.
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Luba Jurgenson : La question de l’espace est forcément abordée à travers les concepts, dans la mesure où ceux-ci appartiennent à des espaces intellectuels, mémoriels. J’ai parlé de faire l’histoire des concepts, il faut également retracer la géographie des concepts. À ce titre, la notion de paysage, qui n’apparaît pas comme évidente dans une encyclopédie sur la mémoire, s’est imposée progressivement. Cette question m’est venue à la fois de différents lieux, de différentes disciplines, de différentes notions. D’une part, elle est très importante dans l’œuvre des témoins – je travaille sur Varlam Chalamov9 chez qui le paysage joue un rôle essentiel. D’autre part, il est une donnée importante de la production visuelle qui a été réalisée dans les camps et les lieux de détention, sur place, pendant les événements eux-mêmes ou après. Mais derrière cette question, il y a bien sûr aussi tout un travail que nous menons depuis plusieurs années de réflexion sur les espaces, sur les espaces de détention, d’extermination. C’est un très vaste sujet qui demanderait une historicisation et une étude sur leur renomination. Au moment de l’ouverture vers l’Est, par exemple avec le travail du Père Desbois10, il est apparu qu’à côté des paysages d’absence qui étaient montrés dans le film Shoah11 ou sur lesquels Claude Lanzmann a énormément insisté, il y a d’autres paysages qu’on a commencé tout d’un coup à prendre en compte. Une nouvelle topographie s’est ajoutée à la topographie occidentale de la Shoah. Donc il peut y avoir quelque part une rencontre entre les études mémorielles et les études sur le paysage, sur l’espace.
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Cécile Rousselet : Philippe Mesnard, vous travaillez sur les lieux communs dans les textes littéraires. En quoi ces lieux communs, eux-aussi, participent-ils à faire une cartographie, mais aussi une encyclopédisation des discours mémoriels ?
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Philippe Mesnard : La cartographie a aussi sa propre temporalité. Comme pour la traduction, il faut pouvoir restituer la tension épistémique et épistémologique entre les espaces, la représentation de ces espaces dans notre culture – dans la mesure où la représentation est une forme codifiée du réel par la culture – et leur évolution à travers le temps. Il faut donc maintenir la question de l’espace en tension avec ses propres temporalités et son évolution. La question des lieux communs est un des points de focalisation de mon travail de recherche, en ce qu’elle se situe au carrefour du langage et du discours, à savoir de la mise en acte du premier non seulement comme performance, mais aussi comme institution (potentiel, mais généralement réalisée) de pouvoir (là, on est du côté de Foucault). Il y a toute une évolution entre le moment où un terme va apparaître et sa constitution comme lieu commun et son instrumentalisation dans un discours institutionnel, qui n’est pas du tout antinomique avec l’individualisation du terme dont je parlais au début, mais qui, au contraire, va souvent de pair. Ce point m’intéresse particulièrement, et l’encyclopédie devient à la fois un espace mais aussi, en tant que dynamique, un flux pour revisiter, temporaliser, ces termes. Elle est un lieu qui peut évoluer dans sa relation entre support papier et support online et c’est cette évolution, et peut-être même cette déconstruction du terme « encyclopédie », qui est en jeu.
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Cécile Rousselet : Une dernière question. Que pouvez-vous nous dire des « tentations encyclopédiques » dans la littérature qui fait face à des questions mémorielles, dans les champs culturels et linguistiques dont vous êtes spécialistes ?
- 12 Philippe Mesnard, Témoignage en résistance, Paris, Stock, 2007.
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Philippe Mesnard : Les questions mémorielles n’ont pas toujours été présentes ni pertinentes pour la littérature, même lorsqu’elle concerne le passé. Je veux dire que ce qui touche le/au passé n’a pas toujours été, dans l’histoire de la littérature, formulé ou posé en tant que questions mémorielles comme l’on entend aujourd’hui. La réflexion sur les tentations encyclopédiques dans la littérature interroge notamment la distinction entre récit et inventaire. Il y a une part de la littérature, peu mise en évidence, mais portée avec une grande intelligence, par exemple, dans les œuvres respectives de Jorge Luis Borgès et de Georges Perec, où le récit n’est pas posé comme une espèce de forme hégémonique incontournable. Mais où il est sans cesse remis en question par sa tension avec la liste, l’inventaire, l’énumération ou par des descriptions qui ne constituent alors pas seulement des « auxiliaires » du récit, comme le dit Genette, mais qui existent en soi, devenant d’autres manières de mettre en forme et de dire le monde. Pour répondre à cette question, et en la sortant de l’actualité « mémorielle », la littérature – et c’est aussi dans ce qu’elle peut avoir de dérangeant, de subversif, d’ouverture pour revisiter les normes – porte en elle-même cette réinterrogation de la forme narrative dominante – dans toute la polysémie du terme – qu’est le récit à partir d’autres formes d’expression qui peuvent être en convergence avec la question de l’encyclopédie. La littérature est aussi – et cela vient déstabiliser aussi bien la notion d’encyclopédie que de mémoire – porteuse de non-savoir ou d’un savoir lacunaire12. Une (des) tradition(s) littéraire(s) travaille(nt) la matière du langage non pas pour montrer que celui-ci maîtrise le réel – donc produisant la double illusion et de la maîtrise et du réel –, mais pour désigner les limites du dicible, là où le langage accueille de l’extra-linguistique (le dehors) ou bien y donne accès, et cela a à voir avec, précisément, la violence, la violence extrême (que le mythe et/ou la tragédie ont pris en charge de façon intentionnelle). Cela échappe aux historiens, je veux dire, à leur position d’historien, aux psychologues, à leur position de psychologue, etc. – et c’est à la littérature de leur dire, ou plus exactement de le leur signifier.
- 13 Soljenitsyne, Alexandre, L’Archipel du Goulag, trad. Geneviève Johannet et al., Paris, Fayard, 2010 (...)
- 14 Rossi, Jacques, Le manuel du Goulag : dictionnaire historique, trad. Sophie Benech et Véronique Pat (...)
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Luba Jurgenson : La littérature est peut-être plus spécifiquement confrontée, depuis toujours, à la question du classement. Philippe a cité Georges Perec, on pourrait citer aussi, par exemple, Raymond Roussel. La littérature qui prend en charge les questions de violence est aussi confrontée à celle de l’organisation de cette mémoire. On peut par exemple citer Primo Levi et son « système périodique ». La littérature, en posant la question du classement, négocie sa place par rapport à la science. Souvent, les textes qui mettent en scène une forme de classement sont effectivement une façon de déconstruire le récit traditionnel, mais aussi de déconstruire le savoir scientifique, parfois dans la parodie. Cette question du classement des données de l’expérience se pose par exemple à un certain nombre de témoins écrivains, notamment ceux qui ont choisi la forme courte et ont donc fractionné leur expérience de la violence extrême en motifs, en images, en unités distinctes, qui doivent couvrir l’ensemble du vécu, voire pas seulement du leur. Alexandre Soljenitsyne, lorsqu’il écrit L’Archipel du Goulag13, propose en quelque sorte une encyclopédie des camps : parmi les définitions génériques que l’on a données de ce texte absolument inclassable, le mot encyclopédie a été utilisé. Jacques Rossi14, quant à lui, n’hésite pas à constituer un dictionnaire de l’univers concentrationnaire soviétique. Il raconte le Goulag rubrique par rubrique, donnant à son expérience une forme qui se situe entre le dictionnaire et l’encyclopédie.
Notes
1 Philippe Mesnard a, depuis plusieurs années, posé l’hypothèse heuristique de « lieux communs » de la mémoire, qui organisent, d’une certaine manière, l’espace discursif mémoriel en Europe notamment. Voir Mesnard, Philippe, « Les lieux communs du discours mémoriel », Mémoires en jeu / Memories at Stake, n° 8, à paraître. Cette note critique, ainsi que celles qui suivent, sont de Cécile Rousselet.
2 Bourdieu, Pierre, Esquisse d'une théorie de la pratique, Paris, Librairie Droz, 1972.
3 Terme forgé par Annette Wieviorka, in idem, L’ère du témoin, Paris, Hachette, 2002.
4 Terme repris à la doxa historienne d’Italie par Primo Levi, in idem, I sommersi e i salvati, Turin, Einaudi, 1986.
5 Philippe Mesnard s’inscrit encore ici dans une perspective bourdieusienne, comme énoncée auparavant.
6 Saussure, Ferdinand de, Cours de linguistique générale, Paris, Payot, 1995 [1916].
7 Lotman, Iouri, Universe of The Mind. A Semiotic Theory of Culture, Londres, I. B. Tauris, 1990.
8 Voir le dossier critique du numéro 7 de la revue Mémoires en jeu / Memories at Stake.
9 Voir Chalamov, Varlam, Récits de la Kolyma, Lagrasse, Verdier, 2003. Pour l'étude de l'œuvre, voir Jurgenson, Luba, l’Expérience concentrationnaire est-elle indicible ? : essai, Monaco, Éd. Du Rocher, 2003.
10 Desbois, Patrick, Porteur de mémoires : sur les traces de la Shoah par balles, Paris, Michel Lafon, 2007.
11 Lanzmann, Claude, Shoah, film documentaire, 1985.
12 Philippe Mesnard, Témoignage en résistance, Paris, Stock, 2007.
13 Soljenitsyne, Alexandre, L’Archipel du Goulag, trad. Geneviève Johannet et al., Paris, Fayard, 2010-2011.
14 Rossi, Jacques, Le manuel du Goulag : dictionnaire historique, trad. Sophie Benech et Véronique Patte, Paris, Le Cherche midi éditeur, 1997.
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Référence électronique
Cécile Rousselet, « Déhiérarchiser le savoir et interroger la nomination. L’Encyclopédie critique des mots de la mémoire et du témoignage, entre ambition encyclopédique et démarche littéraire », TRANS- [En ligne], 23 | 2018, mis en ligne le 11 novembre 2018, consulté le 16 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/trans/2210 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/trans.2210
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