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La tentation encyclopédique d’Éros

Documenter la production littéraire érotique, de l’Enfer de la Bibliothèque Nationale à la fondation F.I.N.A.L.E
The encyclopedic temptation of Eros. Documenting the erotic literary production, from the Enfer of the Bibliothèque Nationale de France to the F.I.N.A.L.E. foundation
Camille Moreau

Résumés

Le « savoir » érotique ne saurait se départir de la pratique ni se différencier de l’expérience. Pourtant, de tous temps les auteurs, aguerris comme dilettantes, n’ont eu de cesse de transcrire ces expériences dans une littérature riche et foisonnante. Dès lors, la simple tentation encyclopédique de l’érotisme est essentiellement littéraire, et les ouvrages sur le sujet se multiplient. Mais une telle profusion de productions littéraires se contredisant parfois les unes les autres ne démontre-t-elle pas que toute tentative d’encyclopédisme du sujet est vaine ? Nous sommes en droit de le penser. Cependant cette tentative est également nécessaire, car la seule manière de constituer un savoir érotique implique précisément ce processus. Bien que sa construction ne puisse se départir de subjectivité, cela n’en affaiblit pas moins la démarche encyclopédique qui est dépendante de cette richesse. 

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Texte intégral

Introduction

  • 1 Lou Andréas-Salomé, Éros, trad. de l’allemand Henri Plard, Paris, Éditions de Minuit, 1984, p.89.

1« C’est seulement par les effusions les plus délirantes d’amants de tous les temps et de tous les peuples que se complète l’inventaire de ce que l’homme a fait du sexe. » écrit Lou Andréas Salomé dans son article « L’Érotisme » publié en 1910 dans la revue Die Gesellschaft1 . En effet, en termes d’érotisme, l’expérience humaine ne cesse de s’enrichir, et de tous temps les auteurs aguerris comme dilettantes n’ont eu de cesse de transcrire ces expériences dans une littérature riche et foisonnante. Dès lors, nombre de fondations, collections particulières et autres bibliothèques se sont fait le devoir de rassembler, classifier, collectionner ces textes afin d’en dresser une encyclopédie licencieuse. Mais compte-tenu de la nature de l’érotisme, profondément subjective et liée à l’expérience, cette démarche est-elle vaine ou incroyablement fertile ?

2Peut-être la manière même dont ces institutions tentent de dresser l’encyclopédie de ces écrits peut-elle nous renseigner. Ainsi la Fondation Internationale d’Arts et Littératures Érotiques (F.I.N.A.L.E) située à Lausanne, en Suisse, rassemble-t-elle les textes et productions littéraires érotiques de manière organique, sans méthode ni classement, se fiant au seul hasard comme système. Que penser également de l’Enfer de la Bibliothèque Nationale de France (catalogue ici), qui sert de référence pour chaque démarche d’encyclopédie sur le sujet mais qui n’est pas complet, la plupart des publications se faisant sous le manteau avant la fin du XIXe siècle, échappant ainsi à toute tentative d’exhaustivité ? Les collections privées (comme la collection Les larmes d’éros d’Alexandre et Jocelyne Dupouy) se targuent de proposer un contrepoids à cet écueil en recensant lesdites publications ; le goût personnel du sujet collectionneur ne pouvant cependant qu’interférer dans le choix, mettant ainsi en péril la visée universelle.

3Mais justement, l’aspect lacunaire de toute démarche encyclopédique autour de l’érotisme enrichit le traitement du sujet, au lieu de l’appauvrir. Car il y a quelque chose qui tient de la carence dans l’expérience érotique, et la carence même de la démarche encyclopédique amène presque le lecteur à vivre cette expérience sensuelle que l’encyclopédie tente de circonscrire. Il convient désormais d’examiner les mécanismes de ce processus.

La littérature, mémoire de l’érotisme.

  • 2 Jean-Luc Marion, Le phénomène érotique, Paris, Grasset, 2003, p.22.
  • 3 Ibid.

4L’expérience érotique a cette particularité d’être à la fois universelle et essentiellement singulière : même dans le cas d’une abstinence de toute une vie, nous sommes issus d’une relation sexuelle, nous la connaissons de manière instinctive ; et pour peu que le désir nous ait poussé à quitter cette abstinence une fois l’adolescence venue, nous avons alors une expérience commune de ce moment particulier de l’expérience humaine. Et pourtant cette expérience est, également, fondamentalement unique. « De l’expérience érotique, nous ne savons pas la même chose, mais nous en savons tous autant2 », écrit Jean-Luc Marion dans Le phénomène érotique. Ce que nous savons de l’expérience érotique est pour chacun quelque chose de différent, qui est lié à l’unicité de notre expérience, de notre parcours dans la fresque sexuelle, de nos rencontres, de nos joies et de nos déceptions. « Devant lui, nous restons d’une égalité aussi parfaite que notre solitude3 », conclut Jean-Luc Marion, démontrant ainsi qu’il est impossible d’ériger une théorie de l’expérience érotique qui soit conceptuelle, unanime et commune à tous. Et comme souvent lorsque la pensée théorique fait défaut, la psyché se tourne alors vers cette autre forme de réflexion plus instinctive : l’art. Or dans le panel des arts, dont tous sont et ont été utilisés pour tenter de retranscrire l’expérience érotique, celui qui sera le plus à même de retranscrire cette expérience, c’est la littérature. Car il y a dans la littérature quelque chose d’indéterminé qui est également propre à la l’expérience érotique. C’est ce que souligne Denis de Rougemont lorsqu’il déclare, dans son Essai sur les mythes de l’amour :

  • 4 Denis de Rougemont, Comme toi-même, essai sur les mythes de l’amour, Paris, Albin-Michel, 1961, p. (...)

5La passion amoureuse est, de toutes, celle qui se prête le mieux au récit. […] La passion de l’Éros est vraie d’abord en rêve, et n’existe peut-être jamais mieux que dans l’élan lyrique de son récit4.

  • 5 « Comparons la toile de cinéma sur laquelle le film se déroule à celle du peintre. La dernière invi (...)

6Le film, la peinture, la photographie – en un mot l’image – ne possèdent pas la qualité interprétative de la littérature, car elle dirige l’œil et impose à l’imagination et à la libre réflexion la dictature de la réalité visible. En un mot, comme le disait Walter Benjamin, elle prend la sensibilité en otage5. En ce qui concerne l’expérience sexuelle et sensuelle, la littérature érotique possède trois fonctions principales : une fonction de déclencheur, une fonction d’éducation et une fonction mémorielle. C’est cette dernière qui nous intéresse dans le cadre de l’encyclopédisme, mais pour la circonscrire il convient également de comprendre les deux autres.

  • 6 À ce sujet, voir notamment Didier Costes et al. (dir.), Le Récit amoureux, Colloque au Centre cultu (...)

7La fonction de déclencheur d’expérience de la littérature érotique a été étudiée profondément par plusieurs théoriciens6. Parmi eux, retenons Roland Barthes, qui dans les Fragments d’un discours amoureux, place l’origine du sentiment érotique dans une perspective littéraire. Dans les pages inédites de ces Fragments, il écrit ceci :

  • 7 Roland Barthes, « Fragments d’un discours amoureux (pages inédites) » in Le discours amoureux, sémi (...)

L’amour vient du livre, l’amour est d’abord écrit. Je ne fais que le réécrire, à l’infini : je ne saurais qui désirer, je ne saurais quoi faire, sans livre pour me guider. Je rencontre toujours un livre qui donne corps (langage, anecdote, émoi) à mon désir7.

  • 8 C’est également ce que prétend démontrer Denis de Rougemont dans son œuvre autour de la littérature (...)
  • 9 Op.cit.
  • 10 Charles Grivel, « La place d’amour », in Didier Costes et al. (dir.), Le Récit amoureux, op.cit., p (...)

8L’écrit inaugure l’apparition du sentiment amoureux dans nos vies8, « on aime parce qu’il y a eu des livres9 », insiste Barthes. Mais on fait aussi des livres parce qu’on aime. « La place d’amour est un livre », affirme Charles Grivel lors du colloque sur le Récit amoureux qui s’est tenu à Cerisy-la-Salle en 1984. « Le livre représente ce lieu d’où je puis aimer ce que j’aime ; du reste, tous les livres lui sont de près ou de loin dédiés, à cet autre défaillant si constamment demandé10 », argumente-t-il ensuite. L’origine du sentiment érotique serait donc issue du livre, mais le livre serait également issu du sentiment érotique, impliquant la même relation entre les deux pôles dans ce système de pensée qu’entre l’œuf et la poule.

  • 11 Gaétan Brulotte, Œuvres de chair – figures du discours érotique, Laval, Presses de l'Université Lav (...)

9À cette fonction initiatrice s’ajoute, ensuite, une fonction d’éducation : « La fonction didactique de l’érographie est aussi importante, sinon plus, que sa fonction d’excitation : elle s’adresse au cognitif autant qu’au sensuel11 », écrit Gaëtan Brulotte – écrivain, docteur en littérature et élève de Roland Barthes – dans son ouvrage Œuvres de chair – figures du discours érotique. C’est la même chose que souligne Boris Vian, non sans humour, lors d’une conférence intitulée « Sur l’utilité de la littérature érotique » :

  • 12 Boris Vian, « Utilité d'une littérature érotique » in Écrits pornographiques, Paris, LGF, 1998, p.4 (...)

10Que demande-t-on à la littérature érotique ? Ou en d’autres termes, quelle est son utilité ? Je crois qu’elle doit être d’abord une préparation, une incitation et une initiation pour tous ceux que des circonstances défavorables, un milieu social inadéquat ou des nécessités diverses ont privés d’une cousine de seize ans ou d’une jeune maîtresse de piano ? Pour tous ceux dont les parents n’avaient qu’une bonne de soixante-quinze ans depuis cinq lustres dans la famille. Pour tous ceux enfin qui, vieillis avant l’âge par une instruction générale et obligatoire parfaitement absorbante, n’ont pu trouver le temps de s’instruire en particulier des devoirs de l’homme envers son corps... et le corps des autres12.

11La lecture de la littérature érotique, en plus de nous exciter et de nous pousser vers l’expérience, sert également à nourrir, enrichir et embellir cette expérience, permettant au lecteur d’avoir une pratique introspective autour de sa propre sexualité.

12De ces deux premières fonctions découle naturellement une troisième, qui est une fonction de mémoire. Il semble logique qu’après avoir été initiés puis éduqués à l’expérience érotique par la littérature, les auteurs aient le désir de déposer leurs souvenirs dans celle-ci également. Belinda Canone dans L’écriture du désir, formule l’importance du romancier dans cette tâche :

  • 13 Belinda Canone, L'écriture du désir, Paris, Gallimard, coll. Folio essai, 2001, p.41-42.

Le romancier est celui qui formule, à un moment donné, ces secrets de l’existence qu’en lisant nous nous disons avoir eus parfois sur le bout de la langue – les secrets communs13.

13Cette « chose commune » de l’expérience érotique, nous la trouvons par fragments dans les pages des écrits licencieux, ce qui nous amène à toujours plus fréquenter les livres, et particulièrement les livres érotiques. Ce qui fera dire à Barthes dans les pages inédites des Fragments d’un discours amoureux :

  • 14 Roland Barthes, « Fragments d’un discours amoureux (pages inédites) » in Le discours amoureux, op. (...)

Et pourtant revient toujours la question : « mais enfin, qu’est-ce que c’est, l’amour ? » Si vous êtes diabétique (ou croyez l’être) ; vous achetez fatalement un « que sais-je ? » sur le diabète. Si vous êtes amoureux, vous voulez des livres qui expliquent l’amour. […] Tous les romans d’amour, comme autant de « Que sais-je ? » sur l’amour14.

14Dès lors, la seule documentation possible de l’expérience érotique est la fiction ou le témoignage, et l’exploration d’un de leur medium le plus ancien – l’écriture – se fait indispensable. La volonté encyclopédique autour de ce sujet peut donc se mettre en œuvre par les livres, et leur inventaire. Plusieurs démarches ont, à ce jour, été menées dans ce sens-là.

La volonté encyclopédique de l’érographie, une affaire d’amateurs.

15Pour celui qui se donne la tâche de mener une encyclopédie sur le sujet, son seul salut se trouve alors du côté de la littérature. C’est en rassemblant les textes, les écrits, privés ou publics, édités ou non, que pourra s’ériger un panorama de la pensée humaine autour de l’érotisme. Nous avons vu précédemment que la mémoire de l’érotisme est principalement littéraire ; de ce fait, on comprend alors que la production d’écrits érotiques soit aussi ancienne que l’histoire de la littérature. Ainsi le psychiatre et sexologue Philippe Brenot déclare-t-il :

  • 15 Philippe Brenot, « Premiers écrits sur le sexe », in Danielle M. Lévy, Sexualité écriture, de l'ins (...)

Parmi les premiers écrits [de l’humanité] surgissent des écrits sur le sexe, à Sumer il y a près de quarante siècles. Dans la période Babylonienne, de 1900 à 1600 av. J.C, nous trouvons ainsi de nombreux textes littéraires qui décrivent très précisément les temps de l’amour, la séduction et l’acte sexuel, et même un véritable manuel érotologique de la période Assyrienne ancienne, datant du vingtième siècle avant J.C. […] Dès qu’apparaît l’écriture, on parle donc du sexe15.

  • 16 « Dans un souci de remise en ordre des catalogues, à partir de 1844, le bibliothécaire Paulin Richa (...)

16On peut donc imaginer que le nombre de textes sur le sujet soit indénombrable. Conséquemment, rassembler ces textes demande un dévouement incroyable. On comprend alors que derrière chaque tentative encyclopédique se cache une personne, en os mais surtout en chair, chez qui le sujet provoque assez d’attrait pour y sacrifier une partie de sa vie. Et c’est le cas même des tentatives les plus officielles, comme celle de l’Enfer16 de la B.N.F.

  • 17 Guillaume Apollinaire, Fernand Fleuret et Louis Perceau, L’Enfer de la Bibliothèque nationale, Pari (...)
  • 18 Pascal Pia, Les livres de l'enfer, Paris, Fayard, 1998 (1ère éd. 1978).
  • 19 Jean-Pierre Dutel, Bibliographie des ouvrages érotiques publiés clandestinement en français de 1650 (...)

17Pour ce qui est de ce dernier, nous en connaissons la teneur grâce au travail d’enquêteurs fervents et décidément passionnés, qui ont décidé de leur propre chef d’en rendre le contenu public dans des ouvrages bibliographiques. D’abord en 1913 Guillaume Apollinaire, Fernand Fleuret et Guillaume Perceau17, aidés par la notoriété du premier, tentent de dresser un premier catalogue de l’Enfer. Puis Pascal Pia18 entreprend la même démarche un demi-siècle plus tard en 1978, et enfin Jean-Pierre Dutel19 rouvre pour une dernière fois les portes sulfureuses de l’Enfer en 2005, en ajoutant à ces ouvrages ses propres découvertes. Dans les trois cas, nous ne pouvons donc en connaître le contenu que par le biais de chercheurs dilettantes dédiés à leur cause de manière informelle.

18À l’autre bout du spectre, nous trouvons aussi des associations dont la démarche est à la frontière entre privé et public. C’est le cas par exemple de la Fondation F.I.N.A.L.E, association privée qui a été déclarée par les autorités Suisses comme association de « pure utilité publique20 ». La volonté même de cette association est d’ordre scientifique :

  • 21 Collectif, Eros, indéfiniment, 20 ans de la fondation F.I.N.A.L.E, Lausanne (Suisse), HumuS, 2016, (...)

La Fondation Internationale d’Arts et Littératures Érotiques F.I.N.A.L.E. est une fondation culturelle à but non lucratif, créée le 12 décembre 1996 à Lausanne, au sens des articles huitante et suivants du Code Civil Suisse. La Fondation a pour but de réunir les créations inspirées par l’érotisme, sous forme d’écrits, d’œuvres d’art, d’objets ou de divers supports. La Fondation désire être un centre de documentation et de conservation des expressions érotiques et des comportements amoureux21.

19On retrouve le même désir de faire œuvre d’encyclopédie, cependant, même si une telle présentation semble vouloir démontrer une volonté de neutralité, il s’agit d’une collection montée par deux amateurs, Michel Froidevaux et Danièle Mussard, qui mettent leur dilettantisme (au sens fort de passion) au service de cette démarche encyclopédique.

  • 22 On a pu voir une partie de leur collection de jetons de bordel et de « guides roses de Paris » à l' (...)

20Enfin, d’une manière cette fois entièrement privée, la librairie Les Larmes d’Eros, fondée par Alexandre et Jocelyne Dupouy, affirment posséder des archives hors du commun, par ailleurs souvent exposées dans les musées22 :

Depuis plusieurs décennies, nous traquons l’art érotique ancien sous toutes ses formes : esthétique, historique, ethnographique, culturelle, témoin direct des siècles passés. Nous avons ainsi accumulé des milliers de documents autour de sujets très différents, allant de la bibliophilie érotique, des curiosa, des ouvrages sur les thèmes les plus divers de notre domaine23.

21Là également, nous pouvons constater le dévouement des collectionneurs, qui parlent en leur nom propre (« nous »), et ne se départissent pas d’un certain orgueil à mener à bien leur tâche. Car, contrairement à la littérature dite « blanche » (appellation donnée par les amateurs du genre à toute littérature ne parlant pas d’érotisme), le sujet traité dans ces livres fait toujours écho à la vie personnelle du lecteur, donc dans ces cas-là, de l’archiviste.

22On constate alors que, quel que soit le caractère de la collection, publique ou privée, spécialisée ou généraliste, il y a toujours à l’origine de cette démarche un individu animé de passion. Le fait qu’il n’y ait que très peu de démarches officielles est peut-être plus le signe de cette implication nécessaire de l’encyclopédiste qu’une certaine réserve liée au caractère sulfureux du sujet. Cela semble somme toute logique, dans la mesure où, comme nous l’avons souligné dans la partie précédente, l’érotisme ne se sépare jamais de l’expérience personnelle. Dès lors, cela assure à l’encyclopédie en train de se faire une certaine qualité, car qui d’autre qu’un chercheur entièrement impliqué dans son sujet pourra mener cette tâche à bien ? Cependant cette prégnance de la subjectivité indique aussi les limites de la démarche encyclopédique liée à l’érotisme, qui ne va pas sans diverses lacunes et carences.

Lacunes et déficiences de la démarche encyclopédique

23La démarche encyclopédique autour de la littérature érotique se heurte immédiatement à deux problèmes principaux, qui en empêchent la réalisation.

  • 24 L’Enfer de la BNF, après bien des péripéties, a été créé en 1836, sous l’impulsion de Louis-Philipp (...)
  • 25 L’importance de l’idée de transgression dans l’érotisme n’est pas à oublier, car elle contamine jus (...)

24D’une part, en ce qui concerne la tentative la plus officielle de faire œuvre d’encyclopédie autour de la littérature érotique, c’est-à-dire l’Enfer de la B.N.F, nous constatons que cette démarche, en plus d’être relativement récente24, est également bancale. L’Enfer ne rassemblait au départ que les ouvrages saisis par la justice. Mais pour un ouvrage saisi, combien d’autres étaient en circulation, de manière plus ou moins secrète ? Du fait de la multiplicité des ouvrages, de leur durée de vie très courte en librairie (à cause de la censure et des petits tirages, notamment) et de l’excitation de la clandestinité qui fait partie intégrante de la production littéraire érotique25, l’exhaustivité est impossible. Les publications se faisant souvent sous le manteau, avec des mentions de dates volontairement erronées pour décourager les éventuels censeurs, il est difficile de tenter d’en dresser un catalogue complet. Et c’est sans compter sur le fait que de nos jours, cet Enfer a vu son utilité décroître, jusqu’à disparition de son existence physique réelle. Ainsi, comme le soulignent les préfaciers du catalogue accompagnant l’exposition de 2007 :

  • 26 Marie-Françoise Quignard et Raymond-Josué Seckel (dir.), Éros au secret, l’Enfer de la Bibliothèque (...)

Les entreprises de rédaction des inventaires ont conduit à retirer de l’Enfer, depuis une centaine d’années, des pièces de graveurs qu’on réintègre progressivement dans leur œuvre complet. Ainsi l’Enfer des Estampes, à l’inverse de celui de la Réserve des livres rares, ne s’enrichit donc plus que de médiocres publications, livres, fascicules ou albums à caractère parfois pédophilique26.

25L’Enfer étant en partie dissous, du fait de l’amollissement progressif de la censure, plus grand chose ne vient l’alimenter, et, de surcroît, on en retire des ouvrages qui rejoignent peu à peu le catalogue général.

26L’espoir de l’exactitude scientifique se pose alors du côté des collections privées et des fondations. Mais là encore, du fait de l’importance, du caractère organique de la production, et des moyens réduits des propriétaires de ces collections, cette exactitude ne semble pas vouloir se manifester. Par exemple, la fondation F.I.N.A.L.E travaille de manière empirique, et lorsqu’en 2016 elle publie un catalogue de sa collection (pour accompagner une exposition retraçant vingt ans d’activité), il s’agit plus d’un capharnaüm ressemblant d’avantage aux mosaïques d’un patchwork que d’un ouvrage au fondement scientifique. Ainsi, dans une interview pour le journal suisse Le Temps, le journaliste Antoine Duplan fait remarquer à Michel Froidevaux le caractère désordonné de sa collection :

A.D : Eros, indéfiniment rassemble un formidable fatras thématique et iconographique…

  • 27 Antoine Duplan, « Erotisme : ces obscurs objets du désir, entretien avec Michel Froidevaux », Le Te (...)

M.F : L’idée est de ne pas filtrer, de ne pas s’ériger en arbitre des élégances ou des inélégances. Le domaine de l’éros est au carrefour de toutes sortes de recherches, de la médecine à l’ethnologie, en passant par la mode, la danse, le cinéma, la photo27.

27Le terme fatras est ici essentiel, et effectivement c’est l’impression que l’ouvrage donne. Mais il n’est pas le seul, et toutes les collections de ce type partagent cette même caractéristique plus proche de la caverne d’Ali Baba que d’une bibliothèque organisée par Dewey. Car comme le pointe justement Alexandre Dupouy à propos de la bibliographie établie par Apollinaire, Fleuret et Perceau, l’empirisme est le seul procédé de moisson envisageable pour récolter les textes érotiques :

  • 28 « Entretien avec Alexandre Dupouy », in Olivier Bessard-Banquy, Le livre érotique, Bordeaux, Presse (...)

Perceau a travaillé de manière très empirique, il a amassé un certain nombre de catalogues clandestins, d’ouvrages rares et inconnus qu’il a trouvés en chinant, ce qui est déjà très impressionnant. Seul Dutel est allé au bout de ce travail de manière approfondie pour donner quelque chose, sinon d’exhaustif, en tout cas de très complet28.

28Et même lorsqu’il s’agit d’une collection aussi remarquable que la sienne, Alexandre Dupouy lui-même confesse :

  • 29  Ibid., p.65.

29Des millions de livre ont été édités. Nous n’avons pas tout. Mais un amateur de livres grivois peut trouver chez nous une large gamme de titres de toutes les époques29.

30Ainsi, même lorsqu’il s’agit de passionnés pour qui cette recherche représente l’activité principale, toute tentative d’exhaustivité est avortée par le manque de moyens, de temps ou de visibilité sur la production réelle.

31Mais il y a également un deuxième écueil qui rend l’encyclopédisme autour de l’érotisme forcément bancal dans ces collections privées : il s’agit de la subjectivité de l’amateur qui s’est donné la tâche de rassembler ces ouvrages. Comme cela a été énoncé précédemment, la démarche encyclopédique est une affaire d’amateurs, ce qui fait entrer en jeu la subjectivité des amasseurs de trésors, des chasseurs de textes. Ce qui peut donc en sortir ne sera qu’un instantané d’une vision érotique, à un moment donné, depuis un sujet donné qui est un être humain avec sa propre sexualité, unique et inaliénable. Ainsi, malgré une volonté de spécialiste, Les Larmes d’Éros ne semblent pas s’attarder plus loin que le début du XXe siècle. Le résultat est donc, comme on le soulevait précédemment, simplement un instantané, une photographie d’un moment de l’histoire de la littérature érotique, tributaire du goût de l’encyclopédiste.

32 On constate donc que, d’une part, l’importance de la production et son caractère périodiquement clandestin freine le processus scientifique, et que d’autre part, la prégnance du goût du sujet encyclopédiste désamorce d’emblée toute volonté d’objectivité. Il se construit ainsi fatalement un objet encyclopédique incomplet, lacunaire et fortement subjectif, rendant la démarche encyclopédique essentiellement impossible. Revenons à Barthes et à son Plaisir du texte, dans lequel il énonce très clairement cette impossibilité :

  • 30 Roland Barthes, Le plaisir du texte, Paris, Seuil, 1973, p.48.

On pourrait penser à une immense moisson collective : on recueillerait tous les textes auxquels il est arrivé de faire plaisir à quelqu’un (de quelque lieu que ces textes viennent), et l’on manifesterait ce corps textuel (corpus : c’est bien dit), un peu comme la psychanalyse a exposé le corps érotique de l’homme. Un tel travail, cependant, on peut le craindre, n’aboutirait qu’à expliquer les textes retenus ; il y aurait une bifurcation inévitable du projet : ne pouvant se dire, le plaisir entrerait dans la voie générale des motivations, dont aucune ne saurait être définitive (si j’allègue ici quelques plaisirs de texte, c’est toujours en passant, d’une façon très précaire, nullement régulière). En un mot, un tel travail ne pourrait s’écrire. Je ne puis que tourner autour d’un tel sujet – et dès lors mieux vaut le faire brièvement et solitairement que collectivement et interminablement30.

33Mais ces lacunes, ces blancs, ces jeux dans l’architecture de l’encyclopédie servent la démarche érotique. Car c’est dans les interstices, les failles, que se développe la puissance de l’érotisme et la capacité du texte à se rapprocher de l’expérience. En mythologie, Éros est le fils de Penia, la pauvreté, et de Poros, l’abondance. Fils de la prodigalité et du manque, de l’excès et de la carence, Eros se construit entre ces deux pôles, et l’expérience érotique l’est peut-être justement car elle nous fait passer par ces sentiments successifs d’opulence et de disette. Le fait qu’il est impossible de documenter cette expérience, mais que pourtant nombre d’institutions ou de collectionneurs continuent à le tenter, nourrit la littérature érotique et lui confère une certaine richesse, inépuisable et constante. L’Érotisme est peut-être ce domaine de l’encyclopédisme qui ne pourra jamais être circonscrit, mais qui justement tire un bénéfice de cette impossibilité.

Conclusion

34Par l’analyse du désir encyclopédique autour de la littérature érotique, nous avons pu constater que cette volonté révèle de ce processus : en premier lieu, le texte est le medium encyclopédique privilégié de l’érotisme ; ce qui amène à penser en second lieu que la lacune encyclopédique est un défaut au service de l’érotisme même.

35En effet, on pourrait penser que la littérature érotique est obsolète. On peut parfaitement explorer la sexualité sous toutes ses formes par l’image. Depuis les peintures romaines – dont Pascal Quignard a montré la noire fascination dans Le Sexe et l’effroi (1994) – l’image est omniprésente dans ce domaine, et on pourrait penser que puisque la modernité nous a apporté des manières techniques d’enregistrer le réel, de capter en images la réalité de la relation sexuelle et amoureuse, nous n’aurions plus besoin des mots, qui ne restituent jamais aussi exactement le réel. Cependant, l’image est comme un dictateur dans la perception : ce qu’elle montre, le spectateur le prend comme tel et le questionne rarement. Elle s’impose, et comme elle peut s’enregistrer entièrement en un seul regard, elle ne laisse que peu de place à l’interprétation et à la projection de la subjectivité du spectateur.

  • 31 « Comment envisagent-ils [les lecteurs] tous ces mots, chatte, cul, queue, mouille, foutre, enculer (...)

36Or, l’érotisme est ce moment de la vie humaine le plus sujet à la subjectivité : en effet il n‘y a pas une expérience semblable à une autre dans le domaine de la sexualité, et l‘exploration de cette diversité est ce qui fait de l’érotisme une science humaine. Et si nous voulons que la représentation érotique soit justement l’instrument de cette science humaine, il faut que nous puissions y réfléchir librement. Les vacances laissées dans un texte, tout ce qui est de l’ordre de l’interprétatif, les métaphores, les non-dits, l‘implicite de certaines phrases, permettent au lecteur de mettre sa lecture en résonance avec sa pratique. Et tout ce qui est de l’ordre du jeu, au sens de vide, de carence (comme on dit d’une fenêtre fermant mal qu’il y a du ”jeu” dans son mécanisme), dans le texte, peut être comblé par la propre imagination du lecteur, qui interprètera ces vides avec ce qui lui dicte sa propre expérience31. Cette diversité est justement ce qui fait la richesse de l’érotisme.

37Voilà pourquoi on ne pourra jamais établir d’inventaire des possibilités érotiques humaines : elles sont proches de l’infini. Mais cette impossibilité de circonscrire l’expérience érotique est symbolique de toute volonté encyclopédique : impossible, et pourtant. Pourtant il faut le faire, tendre vers l’universel, afin que la démarche encyclopédique ne s’épuise jamais et qu’elle perdure au-delà des individus précis qui la mettent en œuvre, pour, finalement, enrichir de manière exponentielle le savoir humain.

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Bibliographie

Ouvrages bibliographiques :

APOLLINAIRE, Guillaume, FLEURET, Fernand et PERCEAU, Louis, L’Enfer de la Bibliothèque nationale, Paris, Mercure de France, 1913.

PIA, Pascal, Les livres de l’enfer, Paris, Fayard, 1998 (1ère éd. 1978).

QUIGNARD, Marie-Françoise et SECKEL, Raymond-Josué (dir.), Eros au secret, l’Enfer de la Bibliothèque, Paris, Éditions BnF, 2007.

COLLECTIF, Eros, indéfiniment, 20 ans de la fondation F.I.N.A.L.E, Lausanne (Suisse), HumuS, 2016.

NORMANN, Monique (dir.), Eros invaincu, la bibliothèque Gérard Nordmann, Paris, Cercle d’art, 2004.

DUTEL, Jean-Pierre, Bibliographie des ouvrages érotiques publiés clandestinement en français de 1650 à 1970, Paris, Éditions Jean-Pierre Dutel, 2005 (3 vol.).

Ouvrages philosophiques :

ANDRÉAS-SALOMÉ, Lou, Éros, trad. de l’allemand Henri Plard, Paris, Éditions de Minuit, 1984.

BARTHES, Roland, Le discours amoureux, séminaire à l’École Pratique des hautes études 1974-1976 suivi de Fragments d’un discours amoureux : inédits, Paris, Éditions du Seuil, 2007.

BARTHES, Roland, Le plaisir du texte, Paris, Éditions du Seuil, 1973.

BENJAMIN, Walter, L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique, trad. de l’allemand Lionel Duvoy, Paris, Allia, 2011.

BESSARD-BANQUY, Olivier, Le livre érotique, Bordeaux, Presses Universitaires de Bordeaux, 2010.

BRULOTTE, Gaétan, Œuvres de chair – figures du discours érotique, Laval, Presses de l’Université Laval/ Éditions L’Harmattan, 1998.

CANONE, Belinda, L’écriture du désir, Paris, Gallimard, coll. Folio essai, 2001.

COSTES, Didier et al. (dir.), Le Récit amoureux, Colloque au Centre culturel international de Cerisy-la-Salle, Seyssel, Champs Vallon, 1984.

DE ROUGEMONT, Denis, Comme toi-même, essai sur les mythes de l’amour, Paris, Albin-Michel, 1961.

DE ROUGEMONT, Denis, L’amour et l’occident, Paris, Plon, 1972.

LÉVY, Danielle M., Sexualité écriture, de l’inscrit au transcrit, Paris, Éditions L’Harmattan, 1996, p. 49.

MARION, Jean-Luc, Le phénomène érotique, Paris, Grasset, 2003.

VIAN, Boris, « Utilité d’une littérature érotique » in Écrits pornographiques, Paris, LGF, 1998, p.48-49.

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Notes

1 Lou Andréas-Salomé, Éros, trad. de l’allemand Henri Plard, Paris, Éditions de Minuit, 1984, p.89.

2 Jean-Luc Marion, Le phénomène érotique, Paris, Grasset, 2003, p.22.

3 Ibid.

4 Denis de Rougemont, Comme toi-même, essai sur les mythes de l’amour, Paris, Albin-Michel, 1961, p. 78.

5 « Comparons la toile de cinéma sur laquelle le film se déroule à celle du peintre. La dernière invite le spectateur à la contemplation ; devant elle, il peut laisser libre cours à ses associations d’idées. Ce qu’il ne peut faire devant la prise de vues cinématographique. A peine l’a-t-il saisie du regard qu’elle s’est déjà transformée. Elle ne peut pas être fixée. […] Je ne peux déjà plus penser ce que je veux. Les images mouvantes se substituent à mes propres pensées. » in Walter Benjamin, L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique, trad. de l’allemand Lionel Duvoy, Paris, Allia, 2011, pp. 83-84.

6 À ce sujet, voir notamment Didier Costes et al. (dir.), Le Récit amoureux, Colloque au Centre culturel international de Cerisy-la-Salle, Seyssel, Champs Vallon, 1984.

7 Roland Barthes, « Fragments d’un discours amoureux (pages inédites) » in Le discours amoureux, séminaire à l’École Pratique des hautes études 1974-1976, Paris, Éditions du Seuil, 2007, p. 653.

8 C’est également ce que prétend démontrer Denis de Rougemont dans son œuvre autour de la littérature et de la puissance du mythe, dont Comme toi-même, essai sur les mythes de l’amour (1961) et L’amour et l’Occident (1972).

9 Op.cit.

10 Charles Grivel, « La place d’amour », in Didier Costes et al. (dir.), Le Récit amoureux, op.cit., p. 120.

11 Gaétan Brulotte, Œuvres de chair – figures du discours érotique, Laval, Presses de l'Université Laval / Éditions L'Harmattan, 1998, p. 277.

12 Boris Vian, « Utilité d'une littérature érotique » in Écrits pornographiques, Paris, LGF, 1998, p.48-49.

13 Belinda Canone, L'écriture du désir, Paris, Gallimard, coll. Folio essai, 2001, p.41-42.

14 Roland Barthes, « Fragments d’un discours amoureux (pages inédites) » in Le discours amoureux, op. cit., p. 622.

15 Philippe Brenot, « Premiers écrits sur le sexe », in Danielle M. Lévy, Sexualité écriture, de l'inscrit au transcrit, Paris, Éditions L'Harmattan, 1996, p. 49.

16 « Dans un souci de remise en ordre des catalogues, à partir de 1844, le bibliothécaire Paulin Richard releva toutes les cotes des anciens catalogues dans l’ordre de chaque division, sans compter les livres entrés à partir de la Révolution, qui avaient fait l’objet d’un classement provisoire. C’est alors qu’apparut, dans la marge de la section des ouvrages licencieux rassemblés sous la lettre Y2, la mention spéciale “Enfer”, qui s’étendit à d’autres divisions que le roman, même si celui-ci restait le plus important en nombre. L’Enfer venait de naître. » in Marie-Françoise Quignard, « Où l’on ne parle pas encore d’Enfer mais d’ouvrages licencieux », in Marie-Françoise Quignard et Raymond-Josué Seckel (dir.), Éros au secret, l’Enfer de la Bibliothèque, Paris, Éditions BnF, 2007, p. 32.

17 Guillaume Apollinaire, Fernand Fleuret et Louis Perceau, L’Enfer de la Bibliothèque nationale, Paris, Mercure de France, 1913.

18 Pascal Pia, Les livres de l'enfer, Paris, Fayard, 1998 (1ère éd. 1978).

19 Jean-Pierre Dutel, Bibliographie des ouvrages érotiques publiés clandestinement en français de 1650 à 1970, Paris, Éditions Jean-Pierre Dutel, 2005 (3 vol.).

20 Selon son statut reconnu par le gouvernement Suisse, http://www.fondation-finale.art/index.php?page=presentation

21 Collectif, Eros, indéfiniment, 20 ans de la fondation F.I.N.A.L.E, Lausanne (Suisse), HumuS, 2016, p.9.

22 On a pu voir une partie de leur collection de jetons de bordel et de « guides roses de Paris » à l'exposition Splendeurs et Misère. Images de la prostitution, 1850-1910 qui s'est tenue au Musée d'Orsay en 2015.

23 Page d’accueil du site internet http://www.leslarmesderos.com

24 L’Enfer de la BNF, après bien des péripéties, a été créé en 1836, sous l’impulsion de Louis-Philippe Ier, pour y rassembler les textes saisis par la censure.

25 L’importance de l’idée de transgression dans l’érotisme n’est pas à oublier, car elle contamine jusqu’à la manière même de faire des livres. Plus un ouvrage est entouré de secret, plus il rencontre de succès. On en a vu un formidable exemple avec Emmanuelle, qui bien qu’interdit d’affichage et de publicité, a rencontré un franc succès en termes de vente (cf. Eric Losfeld, Endetté comme une mule ou la passion d’éditer, Paris, Belfond, 1979).

26 Marie-Françoise Quignard et Raymond-Josué Seckel (dir.), Éros au secret, l’Enfer de la Bibliothèque, op.cit., p. 16.

27 Antoine Duplan, « Erotisme : ces obscurs objets du désir, entretien avec Michel Froidevaux », Le Temps, 16 septembre 2016. En ligne : https://www.letemps.ch/culture/erotisme-obscurs-objets-desir

28 « Entretien avec Alexandre Dupouy », in Olivier Bessard-Banquy, Le livre érotique, Bordeaux, Presses Universitaires de Bordeaux, 2010, p.67.

29  Ibid., p.65.

30 Roland Barthes, Le plaisir du texte, Paris, Seuil, 1973, p.48.

31 « Comment envisagent-ils [les lecteurs] tous ces mots, chatte, cul, queue, mouille, foutre, enculer ? Quel impact ont ces mots dans le cerveau d'un homme de quarante-cinq ans, qui a probablement avec l'expérience attaché un signifié derrière tous ces signifiants ? Qu'évoque le mot “chatte” ? A quelle chatte pense-t-il lorsqu'il effleure sans bruit ses six lettres noires ? Quelle femme aura corrompu à jamais de son souvenir, de son odeur, de sa présence, chaque page de la littérature érotique ? » in Emma Becker, Mr., Paris, Éditions du Seuil, coll. « .2 », 2013, p. 179.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Camille Moreau, « La tentation encyclopédique d’Éros »TRANS- [En ligne], 23 | 2018, mis en ligne le 15 novembre 2018, consulté le 10 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/trans/1935 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/trans.1935

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Auteur

Camille Moreau

Doctorante en Esthétique et Sciences de l’art à Paris I Panthéon-Sorbonne (Institut ACTE-UMR 8218 Paris 1/CNRS). Ses recherches portent sur les correspondances entre réception esthétique et érotisme, plus spécialement dans le domaine de la littéraire. Sa thèse en préparation (« La chair du texte : l’écrit comme adjuvant, vecteur ou constituant de l’expérience érotique, au regard des exemples de la littérature des XXe et XXIe siècles »), est dirigée par Olivier Schefer. Elle a publié en 2016 un texte pour la revue Féros (« La chair des Mots ») qui fait un parallèle entre sensualité et écriture, et en 2017 un article dans le n° 58 de la Revue des sciences sociales de l’université de Strasbourg, sous le titre : « Publiciser et publier ses amours, fonctions de l’écriture sur l’intime chez deux couples d’auteurs contemporains ». Depuis 2014, elle enseigne la littérature érotique à l’Institut National de Formation des Libraires, à Montreuil.

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