Le triangle Paris- Bonn- Londres et le processus d’adhésion britannique au marché commun, 1969-1973 : quel rôle pour le trilatéral au sein du multilatéral ?
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1Le cadre chronologique permet de comprendre la nature politique et économique d’un triangle franco-germano-britannique. Il va de l’affaire Soames via le sommet européen de la Haye de 1969, où les chefs d’Etat et de gouvernement des Six se sont implicitement prononcés pour l’élargissement du Marché Commun, en passant par la réouverture officielle des négociations entre les quatre candidats à l’adhésion et la CEE le 30 juin 1970, à l’adhésion définitive du Danemark, de la Grande-Bretagne et de l’Irlande le 1er janvier 1973.
2En ce qui concerne la réalisation concrète de ce travail de recherche, il s’appuie sur des sources primaires allemandes, britanniques, françaises et communautaires. Il est surtout question des documents gouvernementaux non publiés.
3Cette thèse de doctorat est divisée en quatre parties thématiques qui ne se suivent pas systématiquement d’une façon chronologique.
4La première partie traite de la route du triangle Paris-Bonn-Londres vers l’élargissement qui commence dans les années 1960. L’affaire Soames est considérée comme moment important sur le chemin vers l’entrée britannique, car il s’agit d’une tentative d’ouverture à la française sans succès. La réaction allemande à l’affaire Soames est particulièrement intéressante puisque la RFA remplit une certaine fonction de médiateur entre les deux protagonistes hostiles, la France et la Grande-Bretagne. D’une part, Charles de Gaulle n’est en effet pas si isolé et si opposé à élargissement qu’il n’y parait au sein du marché commun. D’autre part, même après le départ du président de Gaulle et la prise de fonction de Georges Pompidou, la route vers l’élargissement de la CEE n’est pas sans obstacles. D’abord, les préparations internes en France et en Allemagne pour le sommet de la Haye de décembre 1969 l’illustrent et, ensuite, l’élaboration d’une position commune sur l’élargissement au sein du marché commun au début de l’année 1970.
5La deuxième partie se focalise autour de la diplomatie britannique et des négociations qui se jouent sur plusieurs registres : le national, le bilatéral, le trilatéral et le multilatéral. Le triangle Paris-Bonn-Londres n’a pas de sérieux concurrent ni durant les pré-négociations d’élargissement ni pendant les véritables pourparlers multilatéraux. Ni les autres membres de la Communauté, comme les Pays-Bas ou la Commission Européenne, ni les autres candidats à l’adhésion, ni le Commonwealth ou les Etats-Unis ni d’autres tiers ne perturbent sérieusement cette relation à trois, même si cette relation reste sans cesse à définir entre les trois protagonistes. En outre, le jeu de la négociation multilatérale est affaibli par l’absence de discrétion des « moulins à rumeurs » à Bruxelles. Il y a même un véritable espionnage en faveur de Londres. L’absence de secret à Bruxelles facilite donc des stratégies de négociations bi- ou trilatérales, qui nécessitent, par moment, des cartes cachées.
6La troisième partie s’atèle au couple franco-allemand pendant la préparation des négociations d’élargissement et durant celles-ci, du début de l’année 1970 au début de l’année 1972. Les relations franco-allemandes sont analysées à l’épreuve des différents niveaux de la diplomatie, à savoir le national, le binational et le supranational. Dans cette partie, le côté national prend une importance particulière, car il aide à expliquer pourquoi il s’agit d’une amitié en crise apparente, sur le plan bilatéral et surtout supranational, à Bruxelles et à Luxembourg. Dans l’arène supranationale, Allemands et Français opposent leur jeu de négociation parce que les uns se montrent avocats de la cause britannique et les autres négocient très fermement. Même si l’adhésion britannique s’annonce difficile sous ces conditions et constitue un test pour l’amitié franco-allemande, une sérieuse rupture des relations étroites n’est jamais à l’ordre du jour.
7La quatrième et dernière partie de la thèse essaie d’expliquer la réussite des négociations d’élargissement grâce à l’entente franco-britannique dont le sommet Pompidou-Heath de mai 1971 est le moment fort. D’une part, la tenue du sommet Pompidou-Heath favorise le dénouement formel des crises durant les négociations multilatérales. D’autre part, les préparatifs du sommet bilatéral se font difficilement et une stratégie du secret et de la centralisation des contacts franco-britanniques, en contournant le Ministère des affaires étrangères français, semble s’imposer. En outre, même si des thèmes communautaires sont traités en bilatéral, le Président français et le Premier Ministre britannique considèrent leur rencontre davantage comme supplément qu’en tant que Ersatz des pourparlers à Bruxelles et à Luxembourg. En effet, même si l’affaire de la livre sterling est résolue grâce à une entente franco-britannique en juin 1971, l’essentiel concernant l’entrée britannique dans la CEE se décide au niveau communautaire l’été de la même année. La dernière partie démontre aussi la relativité de l’europhilie du gouvernement d’Edward Heath : Sous Heath, la demande officielle de renégociation de la part de Harold Wilson puis du « juste retour » de Margaret Thatcher se prépare déjà.
8Il en résulte quatre grandes lignes de conclusions. Premièrement, la continuité du triangle Paris-Bonn-Londres n’est pas remise en cause. Deuxièmement, le triangle participe à la réussite des pourparlers multilatéraux. Troisièmement, d’autres relations bi- ou trilatérales existent, mais elles ne remettent pas en cause la primauté du triangle Paris-Bonn-Londres. Enfin, en raison des divergences au sein des administrations nationales, la réussite des pourparlers d’adhésion n’était pas acquise d’avance.
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Katrin Rücker-Guitelmacher, „Le triangle Paris- Bonn- Londres et le processus d’adhésion britannique au marché commun, 1969-1973 : quel rôle pour le trilatéral au sein du multilatéral ?“, Trajectoires [Online], 3 | 2009, Online erschienen am: 16 Dezember 2009, abgerufen am 13 Dezember 2024. URL: http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/trajectoires/363; DOI: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/trajectoires.363
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