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La Nature mise en scène

Les paysagistes anglais vus par les commentateurs allemands au XIXe siècle : copistes fidèles ou extravagants dramaturges

Violaine Gourbet

Résumés

La peinture de paysage joue un rôle central dans la réception de l’art anglais par les critiques allemands du XIXe siècle. L’époque voit le genre se renouveler différemment selon les pays et leurs traditions. Les nouveaux rapports que les paysagistes anglais entretiennent à la nature et à sa mise en scène picturale provoquent ainsi des réactions contrastées de la part des commentateurs allemands ; nous tenterons ici de les mettre en lumière et de définir plus précisément leur spécificité, notamment en les comparant aux réactions françaises face aux nouveaux courants venus d’outre-Manche.

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Texte intégral

1Si la réception de la peinture anglaise en France au XIXe siècle a déjà fait l’objet de plusieurs études (en particulier Jobert, 1995), les rapports de l’Allemagne à l’art anglais ont jusqu’ici été fort peu traités. Les tableaux anglais étant rarement exposés dans l’Allemagne du XIXe siècle, et quasiment absents des collections privées, on en a souvent conclu à une indifférence pure et simple des Allemands à la peinture anglaise, à l’exception de certains courants comme le préraphaélisme (Westendorff, 1992). La réalité est cependant plus nuancée : si l’on se penche sur les textes de l’époque, on se rend compte qu’une réception, au moins critique, a bien eu lieu. Se distinguant peu en cela de leurs confrères français, les commentateurs allemands insistent d’abord sur l’incapacité des peintres anglais à représenter l’histoire, et sur leur maîtrise des genres inférieurs dans la hiérarchie traditionnelle, en d’autres termes, la peinture de genre, le portrait et le paysage.

2La question de la réception de la peinture de paysage anglaise est centrale, dans la mesure où le tournant du XIXe siècle voit s’opérer une transformation de la conception du paysage et du rôle du paysagiste. La peinture de paysage est le lieu privilégié de la mise en scène de la nature : le paysage, a fortiori peint, est une construction humaine, l’agencement d’un espace par une instance qui la domine, et ce pour l’offrir aux yeux d’un spectateur. L’artiste, en créant un paysage, limite la nature, la contient, l’aliène, en un sens, en la modelant à son gré (Roger, 2017 : 4 sq.). C’est la peinture de paysage classique, celle du XVIIe siècle français, qui, revenant à la leçon des peintres de la Renaissance et à une vision de l’art comme représentation idéalisée du réel, fait du concept de mise en scène, dans son sens le plus strict, le plus concret, son élément fondateur : le paysage est spatialement une scène, un espace construit, compréhensible à l’œil du spectateur, où peut se déployer l’action humaine : un paysage-théâtre, donc (Mérot, 2009 : 99-112). Or, à l’aube du XIXe siècle, le paysage classique s’efface peu à peu, laissant émerger de nouveaux rapports à la nature et à sa recréation picturale, de nouvelles formes de mise en scène, qui diffèrent selon les pays.

  • 1 On entend par ce terme l’ensemble hétérogène des personnalités lettrées de l’époque —critiques et h (...)

3Dans ce contexte de renouvellement du genre, la peinture de paysage anglaise provoque des réactions contrastées de la part des commentateurs allemands1 confrontés à un rapport nouveau de l’art à la nature. L’étude de ces réactions, qui constituera le cœur de cette réflexion, ne prend tout son sens que si on l’inscrit dans un contexte plus large : dans quelle mesure la réception de la peinture de paysage anglaise en Allemagne se distingue-t-elle de la réception en France, où les paysages anglais, à partir des années 1820, occupent une place importante sur la scène artistique ? C’est en faisant dialoguer les textes allemands avec leurs pendants français qu’on pourra infirmer ou confirmer l’hypothèse d’un discours national spécifique face aux paysages anglais.

4On tentera d’abord de mettre en lumière la vision résolument binaire que les auteurs allemands ont de la peinture anglaise, celle-ci oscillant, selon eux, entre une conception naturaliste de la représentation et un penchant pour la fantaisie, qui ferait de la nature, avant tout, un spectacle, en se demandant dans quelle mesure elle est partagée en France. On suggérera ensuite une autre interprétation, celle de la persistance du modèle classique : si la conception du paysage comme espace scénique est battue en brèche au XIXe siècle, elle ne disparaît pas tout à fait et offre, dans les textes allemands, un contre-point, discret mais indéniable, dont l’analyse viendra compléter notre étude.

  • 2 Cf. bibliographie pour le détail du corpus.

5La variété des sources utilisées reflète la diversité des acteurs qui se sont fait l’écho, sous forme écrite, de cette réception : nous nous sommes appuyés sur des articles de revues d’art et de périodiques, des traités et des encyclopédies spécialisés, ainsi que sur des récits de voyage2.

  • 3 Nous pensons en particulier à Johann David Passavant (1787-1861) et Gustav Friedrich Waagen (1794-1 (...)

6Notre étude portera sur la période s’étendant entre 1816 et 1887. C’est en 1816 qu’est créé le Kunstblatt, première grande revue d’art allemande ; ses nombreux articles consacrés à l’Angleterre influencent considérablement la vision globale de la peintre anglaise en Allemagne et ce d’autant plus qu’ils sont régulièrement rédigés par des érudits considérés par leurs contemporains comme des spécialistes des îles britanniques3. 1886, date de la Berliner Jubiläumsausstellung, où les Britanniques sont à l’honneur, marque une rupture dans la perception allemande de la peinture de paysage anglaise : on commence à considérer les paysagistes britanniques du premier XIXe siècle, en ce siècle finissant, comme les précurseurs des modernes, et en particulier des impressionnistes français, et les catégories à l’aune desquelles ils étaient jusque-là jugés, et que nous voulons tenter de mettre en lumière, sont laissées de côté.

Le naturalisme anglais, authenticité charmante ou imitation sans âme ?

« Man befindet sich [...] in der freien Luft » : le paysage comme miroir du monde

  • 4 « Authenticité parfaite », « extraordinaire » (Toutes les traductions sont de l’auteur).
  • 5 « Ses charmants paysages peints d’après nature semblent avoir été transportés depuis leur emplaceme (...)
  • 6 On pense bien évidemment à la célèbre formule de Stendhal définissant le roman comme « un miroir qu (...)

7C’est d’abord la fidélité des paysagistes anglais à la nature qui est soulignée dans les textes allemands. Le terme et ses dérivés reviennent souvent sous la plume des spécialistes de l’art anglais, en particulier Gustav Friedrich Waagen : les peintres John Constable (1776-1837), Frederick Lee (1798-1879), ou John Linnell (1792-1882) se distinguent par leur « perfect » ou « extraordinary » « truthfulness »4 (Waagen, 1854 : 385-388). Les peintures de paysages anglaises sont vraies, en ce qu’elles reproduisent au plus près la nature — et le verbe reproduire n’est pas anodin, dans la mesure où il suppose une relation directe, immédiate, entre le sujet et le tableau : le peintre réduit au maximum la médialité de la peinture, son rôle d’instance créatrice. Cette immédiateté est bien rendue par la métaphore du miroir, que l’on retrouve dans un rapport de l’Illustrirte Zeitung de 1843, dont l’auteur décrit ainsi les tableaux du peintre Thomas Creswick (1811-1869) : « [...] seine lieblichen Landschaften nach der Natur scheinen wie durch einen Zauberspiegel von ihrer Stelle auf die Leinwand des Malers versetzt worden zu sein. Man befindet sich bei ihrem Anblick so zu sagen in der freien Luft. »5 (1843/Nr. 25 : 397). Cette métaphore de la peinture et du réalisme, si elle a souvent été utilisée6, présente ici un certain intérêt, puisqu’elle souligne la position de retrait du peintre, effaçant les traces de sa présence dans le tableau, se refusant, en d’autres termes, à la mise en scène, ou du moins, puisque le simple fait de peindre implique une mise en scène, rendant la sienne invisible. Plus d’ordonnancement réfléchi donc, plus de composition soignée. L’acte de peindre est réduit à son expression la plus pure.

L’esquisse et le microscope : trop de détails, ou pas assez ?

8Mais à l’admiration devant l’authenticité des paysages anglais se mêle la plupart du temps la critique, et ce d’abord sur un plan strictement technique. Deux tendances opposées se succèdent, caractérisant, peu ou prou, la première puis la seconde moitié du XIXe siècle.

  • 7 « Laisser-aller », « négligence ».
  • 8 « Mais l’authenticité se cantonne à l’aspect général. Celui qui attendrait un traitement plus profo (...)

9Les peintres anglais de la première moitié du XIXe siècle se rendent coupables, aux yeux des critiques, d’une trop grande liberté de touche, d’un goût immodéré pour l’esquisse au détriment du détail. « Flüchtigkeit », « Nachlässigkeit »7, tels sont les termes qui reviennent le plus souvent pour qualifier la peinture anglaise. Les paysagistes n’échappent pas à ce reproche : dès 1808, Johann Dominik Fiorillo reproche à Thomas Gainsborough (1729-1788) son manque d’application (« Fleiss »), reproche repris par Waagen (Fiorillo, 1808 : 660, Waagen, 1837 : 236). Les paysagistes anglais se contentent d’esquisser les grandes lignes du paysage. « Die Treue geht aber nur auf das Allgemeine », peut-on lire en 1828 dans le Berliner Kunstblatt. « Wer ein tieferes Eingehen verlangte, würde sich unbefriedigt finden. »8 (1828 : 154). Si authenticité il y a, elle est superficielle — l’adjectif est souvent employé pour qualifier la peinture anglaise — et ne permet pas d’appréhender suffisamment la nature : l’intimité du paysagiste avec le paysage ne résisterait pas à un examen attentif du tableau, le miroir sur le monde ne présentant plus qu’une image brouillée au spectateur. Le commentateur du Berliner Kunstblatt poursuit :

  • 9 « Même lorsqu’il s’agit de copier le réel, on en reste à l’ébauche de ce qui présente un intérêt pa (...)

« Selbst bei dem Copiren des Wirklichen genügt die Andeutung dessen, was es in irgend einer Beziehung besonders werth macht, so dass keinem Gegenstande sein volles Recht geschieht. Eben deshalb mangeln den Künstlern fast durchgängig jene gründlicheren Studien der Natur, die allein zu Meisterschaft führen können [...] »9

10L’esquisse constituerait donc un obstacle à la bonne compréhension du réel. Cette critique appuyée de la manière anglaise est aussi une façon, en creux, de renforcer la définition d’une peinture allemande fondée sur le dessin et la maîtrise de la ligne.

11Elle s’inscrit donc dans un discours national spécifique, de même qu’en France, les réactions à la manière anglaise se lisent à la lumière d’une actualité artistique bien française, celle de la bataille entre la jeune génération romantique et les tenants de l’école davidienne. Plusieurs critiques, en particulier ceux de la revue l’Artiste, prennent fait et cause pour les paysagistes anglais qu’ils associent aux romantiques dont ils se font les porte-drapeaux, tandis que le Journal des Artistes, du moins dans un premier temps, s’oppose à ces nouvelles tendances (Jobert, 1995 : 67 et 68). Les réactions à la peinture de paysage anglaise sont donc, au moins autour de la décennie 1830, beaucoup plus hétérogènes en France qu’en Allemagne : l’heure étant à l’affrontement esthétique, les paysages anglais constituent autant de munitions dans la bataille entre classiques et romantiques. Dans le même temps, de jeunes paysagistes français, les futurs peintres de Barbizon, assimilent la leçon naturaliste de leurs aînés anglais, facilitant ainsi la familiarité naissante avec la manière anglaise, qui, dans les décennies suivantes, est considérée comme allant de soi et est plus rarement commentée.

  • 10 Au sujet du réalisme et de la représentation de la nature telle qu’elle est pratiquée par les paysa (...)

12Ce n’est plus le goût de l’esquisse mais l’excès inverse qui est reproché aux paysagistes de la génération suivante. Après de longs débats sur l’incapacité des peintres anglais à dessiner, et en particulier sous l’influence des Préraphaélites, la manière libre et la touche large des peintres anglais se trouve quelque peu bridée : la ligne s’affine, les contours s’affermissent, les détails prennent de l’importance10. Le changement est perceptible dans la peinture de paysage — sans toutefois faire taire les critiques allemandes, les commentateurs déplorant cette fois un réalisme par trop photographique, un amour disproportionné du détail : un critique des Dioskuren ironise en 1862 :

  • 11 « Une œuvre d’art n’a de chance de succès que si elle porte un nom connu [...] ou représente au dét (...)

« [...] ein Kunstwerk hat nur dann Aussicht auf Erfolg, wenn es entweder einen berühmten Namen trägt [...] oder wenn es die ganz reale Natur : Pferde, Hunde, Katzen, Rosen und Radischen, Vergißmeinnicht und Kohlrüben nebst den obligaten Käfern und Maden, Schmetterlingen und Schmeißfliegen zum Täufchen ähnlich darstellt. »11 (1862/22 : 169).

  • 12 Nous employons ici le terme tel qu’il est utilisé à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle pou (...)

13La référence aux insectes vise d’une part à tourner en ridicule la volonté des peintres de tout représenter, c’est-à-dire de renoncer au geste premier de l’artiste choisissant de laisser certains éléments de côté, de privilégier l’harmonie interne de l’œuvre à l’impératif naturaliste12 et d’autre part à pointer du doigt la trivialité qui en résulte : le refus de la mise en scène, comprise ici comme sélection sur le réel, entraîne l’utilisation de motifs dérogeant, selon le commentateur, aux normes esthétiques. On peut relier cet agacement pour la précision photographique des paysagistes anglais — la comparaison avec la photographie naissante revient plusieurs fois dans les textes de l’époque — à l’influence des nouveaux courants venus de France et l’intérêt grandissant, outre-Rhin, pour les paysagistes de Barbizon, eux-mêmes fortement marqués, dès les années 1830, par la leçon des peintres anglais de la première génération, Constable en particulier. L’appréciation de la touche large et du style libre autrefois sévèrement reprochés aux Britanniques se reporte sur leurs héritiers, tandis qu’en Angleterre, les jeunes peintres se détournent des modèles de la génération précédente, s’attirant ainsi la foudre des critiques.

14Cette critique se retrouve dans les textes français, qui regrettent globalement la fidélité excessive au modèle, à la différence près que s’y ajoute une conscience plus aiguë d’une évolution dans l’histoire de la peinture de paysage anglaise, d’un décalage entre deux générations de peintres, les paysagistes de la première moitié du siècle faisant déjà figures de modèles : « Le paysage anglais est une véritable photographie, plus la couleur » déclare un contributeur à L’Appel : journal littéraire, artistique et scientifique, avant de protester : « Ce n’est point pourtant ainsi que procédaient Constable et Turner » (1855) tandis que Paul Mantz déclare à propos de la théorie préraphaélite, dans la Gazette des Beaux-Arts :

« Il est fâcheux que cette doctrine, qui consiste en réalité à substituer à l’œil humain le verre grossissant d’une loupe, commence à exercer ses ravages sur les paysagistes. Combien elle est contraire cependant à la tradition de l’école, combien elle eût été désapprouvée par Gainsborough, par Turner, par Constable, qui aimaient la nature, eux, mais qui n’avaient pas besoin de s’armer du microscope pour en sentir le charme enivrant ! » (La Gazette des Beaux-Arts, 1862/2 : 220).

15La critique française, marquée par la présence à Paris, dans les années 1820, de John Constable, entre autres, place les peintres anglais de la deuxième génération dans une continuité historique, dans l’évolution de l’école anglaise au fil des décennies.

D’habiles imitateurs, de bons techniciens

  • 13 « Ils ne savent insuffler aucune fantaisie à un paysage, mais ils savent magistralement reproduire (...)
  • 14 « [...] copistes mécaniques de la nature, cette nature qui a semble-t-il créé le peuple anglais alo (...)
  • 15 « une imitation servile de la nature ».

16Cette critique du réalisme excessif des paysagistes anglais de la seconde génération s’inscrit dans une vision globale de la peinture anglaise comme étant fondamentalement dénuée de toute spiritualité. Le reproche de superficialité mentionné plus haut s’applique ici plus largement, ne soulignant plus seulement une faiblesse technique mais remettant en question l’essence même de la peinture anglaise : le talent naturaliste des paysagistes apparaît en effet dans plusieurs textes comme une sorte de pis-aller ne pouvant masquer l’incapacité anglaise à créer. L’admiration pour l’authenticité du rapport à la nature bascule alors en son contraire, un dédain face à ce qui est considéré comme un mimétisme primaire. Dès 1825, un certain mépris se mêle à l’admiration pour l’art anglais du paysage. L’auteur d’un article du Kunstblatt remarque à propos des peintres britanniques : « Phantasie wissen sie in keine Landschaft überzutragen, aber den Charakter, den eine schöne Landschaft durch sie selber hat, verstehen sie meisterhaft auf der Leinwand darzustellen [...] »13 (1825/6 : 278). Le naturalisme tente donc de pallier le manque d’imagination créatrice des Anglais. Le paysagiste, en refusant d’imposer sa marque au paysage, en se dérobant donc au rôle traditionnel du peintre-metteur en scène, se voit dénier tout talent artistique : ce n’est plus un peintre, mais un copiste ; il ne crée pas, il imite. C’est ce que sous-entend un contributeur aux Dioskuren en 1861, lorsque dans un article sur l’exposition de la Royal Academy il compare les paysagistes anglais à des copistes, « mechanischen Kopisten der Natur, jener Natur, die, wie es scheint, in ihrer unpoetischen Laune den Britten geschaffen hat. »14 (1861/29 : 251). Le manque de poésie : ce reproche est d’autant plus souvent répété qu’il permet aux commentateurs allemands de définir en creux leur art national ; de la même manière que l’évocation des faiblesses techniques de la peinture anglaise permet de mettre en valeur les talents de dessinateurs des peintres allemands, l’insistance sur l’absence de spiritualité anglaise contribue à la définition d’une peinture allemande profondément philosophique, où l’imagination créatrice des peintres peut se déployer et s’exprimer à loisir. Les Anglais, eux, sont pieds et poings liés au réel, et leur art, « eine sklavische Naturnachahmung »15 (Dioskuren, 1856/8 : 76). L’individualité et la liberté artistique disparaissent : le peintre n’est plus qu’un technicien. Cette critique du naturalisme anglais fait écho, plus largement, au jugement mentionné plus haut selon lequel les Anglais sont incapables de produire une peinture d’histoire digne de ce nom, incapables donc d’atteindre ce qui est encore considéré comme l’expression la plus noble de l’art : une peinture narrative, riche de sens, où l’intellect du peintre est à l’œuvre.

17Ce dédain face à la simplicité des représentations anglaises se retrouve moins souvent dans les textes français. Au contraire, c’est parfois justement cette simplicité, ou plutôt la capacité à rendre cette simplicité intéressante, artistique, qui est jugée admirable par certains auteurs : « Ce n’est rien, mais ce rien était exquis de transparence et de finesse » déclare ainsi un critique de la Gazette des Beaux-Arts à propos d’une aquarelle de Bonington représentant des roseaux (1860/1 : 117). Par ailleurs, la spécialisation des Anglais dans les genres inférieurs est certes mentionnée, mais elle n’est pas toujours interprétée comme un manque ou une faiblesse : pour certains commentateurs, c’est le génie singulier de l’Angleterre qui s’exprime dans cette particularité. « Il y a peu de sujets grecs et romains », déclare ainsi un contributeur au Journal des débats au sujet de l’exposition de Manchester en 1857. « Je ne m’en plains pas. Je suis venu ici, comme Yoreck en France, pour voir autre chose que ce que nous y voyons tous les jours. Les Grecs et les Romains n’ont pas réussi dans ce pays ; le génie de la race anglo-normande s’y oppose [...] » (1857, 20 juillet).

Une fantaisie débridée

« Mehr Natur, mehr Natur ! » La trahison du paysage

18A cette première conception de la peinture de paysage anglaise s’oppose cependant une autre vision, au naturaliste succède le fantaisiste laissant libre cours à son imagination. Mais si le naturaliste est accusé de trahir l’essence de la peinture en se contentant de copier la nature, le fantaisiste, lui, est accusé de trahir la nature en offrant aux spectateurs une vision non conforme au réel. La réception critique de l’œuvre de John Mallord William Turner (1775-1851) est à cet égard particulièrement frappante. Les paysages que les commentateurs qualifient de chef d’œuvre sont ceux de la première période, et c’est leur naturel, leur impression de vérité qui sont mises en valeur. A l’inverse, le principal défaut des œuvres de la maturité est le manque de réalisme, les spectateurs étant incapables de se projeter dans le tableau comme dans un paysage. Fiorillo reproche à Turner de ne pas avoir vu les chutes du Rhin qu’il représente pour la première fois en 1802 (Fiorillo, 1808 : 832) ; l’ancrage dans le réel n’est plus assuré, la nature n’est plus le point de départ du tableau. De la même manière, Johann Valentin Adrian remarque à propos de La Destruction de Pompéi et d’Herculanum de John Martin (1789-1854) :

  • 16 « Si l’on ajoute que le peintre n’a jamais vu l’éruption du Vésuve, accompagnée d’une pluie de cend (...)

« Nimmt man doch hinzu, daß der Ausbruch des Vesuvus, von einem zerstörenden Aschenregen begleitet, nie vom Maler gesehen worden ist, mithin die Darstellung des Naturereignisses selbst ganz seiner Phantasie überlassen blieb : so lässt sich wohl mit einiger Sicherheit schliessen, dass das ganze Gemälde in der Hauptsache nur ein üppiges Spiel mit Farbe und Beleuchtung seyn kann. »16 (Kunstblatt 1822/60238 ; Fig. 1).

  • 17 « Plus de nature, plus de nature ! »

19Ce n’est plus un paysage qui est représenté sur la toile, déplorent les critiques, c’est la rêverie, voire l’hallucination du peintre, qui brouille les repères et fait disparaître le réel dans une nuée multicolore. L’idéal de clarté, de lisibilité que le modèle classique prisait par-dessus tout se trouve foulé aux pieds et le spectateur dérouté cherche en vain des repères familiers et s’écrie : « Mehr Natur, mehr Natur ! »17 (Illustrirte Zeitung/25 : 397).

« Der Natur den Vorrang abzulaufen »

  • 18 « Bref, voici l’erreur de toute ces peintures : pour reprendre l’expression d’un écrivain plein de (...)
  • 19 Voir en particulier le rapport de Wilhelm von Seidlitz consacré à la Royal Jubilee Exhibition en 18 (...)

20On aurait pu penser que l’expression dans le paysage de l’individualité de l’artiste trouverait grâce aux yeux des commentateurs ; la poétisation du réel, dont les paysages naturalistes manquent selon eux cruellement, est ce qui, selon certains auteurs français des années 1830, définit les paysages de Francis Danby (1793-1861) ou de Turner, ce dernier considérant la nature comme une matière première, une toile vierge : « Il la brode et l’embellit, et la plie à son gré. » (L’Artiste, 1833, Tome V : 162). Mais c’est justement ce que lui reprochent les commentateurs allemands, qui soulignent, de façon générale, l’exagération, le caractère excessif de la peinture anglaise : privée de la longue tradition des écoles continentales, elle ne connaîtrait aucune règle ni aucune limite. Le terme d’exagération revient très souvent dans les articles consacrés à Turner : on dénonce la représentation excessive d’un élément naturel, la lumière, au détriment de tout le reste, de sorte que le paysage, rompant à nouveau avec l’idéal classique, n’est plus un lieu d’harmonie et d’équilibre. La nécrologie de Turner publiée dans le Deutsche Kunstblatt fait la part belle à une anecdote mettant en scène le sculpteur Chantrey qui, en visite chez Turner, tendit les mains devant un tableau comme pour se réchauffer devant une cheminée (1852/3 : 27). On retrouve une anecdote semblable dans plusieurs articles consacrés à Constable, présenté dans les textes allemands non pas comme un peintre naturaliste copiant sans relâche son Suffolk natal, mais comme le peintre des averses, au point qu’Heinrich Füssli, sortant pour lui rendre visite, aurait pris soin d’enfiler un imperméable (Passavant 1833 : 316 ; Fig. 2). Les paysagistes anglais se rendent donc coupables de distorsion du réel, en tentant de dépasser la nature, en rendant le soleil plus lumineux, la pluie plus torrentielle, les montagnes plus gigantesques encore : Adrian, décrivant l’œuvre de Martin, écrit : « Kurz, der Fehler aller dieser Gemälde ist, da, nach dem Ausdrucke eines geistreichen Schriftstellers, die Kunst hier ihre Siebenmeilen-Stiefel anzieht und es für möglich hält, der Natur den Vorrang abzulaufen »18(Kunstblatt, 1823/103 : 410). Le peintre démiurge, s’arrogeant le droit de remodeler la nature à son gré, fait preuve d’hybris : l’artiste-metteur en scène n’a pas tout pouvoir sur le réel. Ce n’est que dans les dernières décennies du siècle que le regard sur ce qui est alors perçu comme une excentricité typiquement anglaise se modifie quelque peu et que les critiques allemands reconnaissent à certains paysagistes anglais, notamment Constable, une capacité à projeter dans le paysage leur intimité créatrice19.

21Ici, on note à nouveau une différence avec les réactions françaises : si l’excentricité de certains peintres, surtout Turner, est régulièrement dénoncée, en des termes parfois sévères, un décalage s’opère dans l’analyse de paysages jugés bizarres, excessifs : l’excentricité de la peinture, pour certains auteurs français, ne fait que reproduire l’excentricité de la nature elle-même, et si l’artiste fait preuve d’excès en peignant, c’est que son appréhension de la vie naturelle est trop intense : en d’autres termes, il ne pêche pas par dédain du réel, mais par excès de connaissance ; le barbouilleur excentrique obsédé par les averses est en fait un visionnaire vivant en communion avec la nature :

« Il a si bien le respect de la vie universelle », écrit ainsi le contributeur à la Gazette des Beaux-Arts Philippe Burty à propos de Constable, « qu’il ignore un peu l’art des sacrifices, et que ses tableaux, pétillants et détaillés depuis le dernier plan jusqu’à l’horizon, sont trop intéressants, trop curieux pour le spectateur [...] Mais quel artiste, quel poëte ne demeurerait saisi de respect devant une œuvre où surabonde à ce degré le sentiment de la vie ? » (1862/2 : 123).

Le paysage comme spectacle : la nature mise en scène

22L’exagération des peintres anglais est aux yeux de nombreux critiques allemands liée à la volonté de transformer la nature en spectacle — en d’autres termes, à une mise en scène dans son sens le plus fort : le paysage est d’abord peint pour le spectateur, de la même façon qu’une représentation théâtrale se déroule à son intention et vise à provoquer sa réaction.

  • 20 « Recherche de l’effet ».
  • 21 « [...] sous le pinceau d’un Martin, d’un Danby et de quelques autres, le paysage est là aussi deve (...)

23La peinture anglaise est généralement considérée par les commentateurs allemands comme une peinture de l’effet ; le « Haschen nach Effekt »20 est constamment vilipendé et apparaît dans certains textes comme la caractéristique principale de l’art anglais. Peinture de l’effet, grandiloquente, théâtrale : la métaphore de la scène et du théâtre court en filigrane le long des textes critiques. En 1831, on peut ainsi lire dans le Kunstblatt : « [...] unter den Händen eines Martin, Danby und einiger andern, ist die Landschaft auch melodramatisch, blosser scenischer Prunk geworden [...»21 (1831/89 : 354). Les contrastes violents de lumière, les formes gigantesques sont les ingrédients d’une peinture outrée, fardée, les critiques utilisant d’ailleurs volontiers la métaphore du maquillage : les « arc-en-ciel surchargés de poudre » des paysages de Turner font ainsi éternuer les spectateurs (Illustrirte Zeitung, 1843/25 : 397).

24Le thème du théâtre et de la grandiloquence apparaît rarement dans les textes français et si c’est le cas, les critiques comprennent différemment l’idée d’un paysage-spectacle : à nouveau, le rôle du peintre se résume à celui du connaisseur de la nature, qui est capable de la saisir dans tout son éclat, et l’extravagance du tableau n’est pas créé par sa fantaisie : en effet, si théâtralité il y a, c’est la théâtralité de la nature elle-même, qui est simplement reproduite par les peintres ; en d’autres termes, la nature est un spectacle en soi : en 1867, le critique Philippe Burty écrit ainsi au sujet du paysagiste Peter Graham (1836-1921) : « Le bizarre ne déplaît point aux paysagistes écossais et je ne les en blâme pas. La nature semble se jouer pour elle-même des fééries avec flammes de Bengale, explosions de bouquets de feux d’artifice, changements à vue et coups de théâtre » (Gazette des Beaux-Arts/2 : 94). Le peintre est alors celui qui sait reconnaître le moment où la nature se met elle-même en scène.

La nature est une scène de théâtre : la persistance du modèle classique

Tout n’est qu’ordre et beauté

  • 22 « Beauté des lignes, chromatismes clairs, bonne compréhension des plans et partout une rigueur et u (...)

25Naturalistes plats, fantaisistes excentriques : il semble que chaque tendance de la peinture de paysage anglaise provoque son lot de critiques de la part des commentateurs allemands. Il est cependant deux peintres qui font l’objet d’une approbation sans réserve : Augustus Callcott (1779-1844) et Clarkson Stanfield (1793-1867) sont évoqués avec admiration autant par Passavant que par Waagen et Nagler. Si l’on passe en revue les qualités soulignées par les critiques, on se rend compte que ce sont surtout la rigueur de la composition, la clarté de la perspective et l’harmonie générale du paysage qui entrent en ligne de compte : « Schönheit der Linien, klare Färbung, richtige Verständnis der Pläne und in allen Theilen eine lobenswerthe Strenge und Ausführung »22, s’extasie ainsi Passavant à propos de Callcott (Passavant, 1833 : 316). Le paysage est avant tout une construction ordonnée, où les plans se succèdent avec régularité, où la ligne de fuite amène naturellement le regard jusqu’à l’horizon —on retrouve ici les critères du paysage classique (Fig. 3).

Le paysage à l’arrière-plan : un cadre à l’action humaine

  • 23 « La côte richement peuplée de figures d’une heureuse invention. »

26D’autre part, tant Callcott que Stanfield accordent un rôle important aux figures humaines. Leurs paysages mettent en scène des batailles navales, des pêcheurs sur la plage, des contrebandiers chargés de leur butin, comme ne manquent pas de le souligner les critiques : Waagen, décrivant une marine de Callcott, évoque avec approbation « die Küste reich mit Figuren von glücklicher Erfindung belebt »23 (Waagen, 1837 : 551). Le paysage se conçoit donc comme un cadre où peuvent se déployer les faits et gestes des personnages : l’idéal classique de la nature comme scène de théâtre est complètement réalisé. Il est d’ailleurs intéressant de noter que Stanfield a commencé sa carrière en peignant des décors de théâtre, pratique qui a considérablement influencé le reste de son œuvre : ses paysages, du moins à l’origine, ont donc vocation d’arrière-plan devant lequel l’action humaine peut avoir lieu, et c’est justement ce que les commentateurs allemands apprécient, comme le montre cette description du tableau Capture of smuggled goods on the old Antrim road, Ireland, représentant des soldats poursuivant des contrebandiers :

  • 24 « Un navire de guerre est amarré devant une mer affreusement déchaînée. Son équipage qui a débarqué (...)

« Auf fürchterlich erregter See liegt ein Kriegsschiff vor Anker. Seine an’s Land gegangene Mannschaft bildet einen Theil jener bunten Kavalkade, die dort, links vom Beschauer, den schmalen Weg längs der hohen Felswand einherzieht. [...] wir blicken auf jene sehr bespülten Felswände, die ganz danach aussehen, als ob sie schon oft auf solch’ grauenvoll nächtliches Treiben in ihren dunklen Schluchten niedergeblickt haben24. » (Dioskuren, 1861/6 : 292)

27Ici, le paysage, les falaises à l’arrière-plan, n’ont pas d’intérêt pour eux-mêmes mais se font les témoins muets de l’action humaine, en l’occurence des crimes des contrebandiers. Le caractère même du paysage, son aspect dramatique et menaçant, sert l’économie de l’histoire : la narration est au centre du tableau.

28En France, les opinions sont plus partagées. Si Callcott et Stanfield recueillent dans l’ensemble des suffrages favorables, Stanfield n’est même pas cité dans l’ouvrage d’Ernest Chesneau sur la peinture anglaise (1882) et Théophile Toré, dans le Constitutionnel, évalue son œuvre en une phrase lapidaire, dont la brièveté même est accablante : « Mr. Stanfield, l’Anglais si apprécié à Londres, n’est pas de meilleure qualité. » (1846, 17 mars) Quant aux analyses du rapport entre le paysage et l’action humaine, elles varient selon les critiques et leur orientation esthétique : si le sculpteur italien Raffaele Monti, partisan d’un art relativement classique, déplore la désertification des paysages anglais qui gagneraient à s’allier à la peinture d’histoire (Gazette des Beaux-Arts, 1860/2 : 105), Philippe Burty, plus intéressé par les courants modernes et qui soutiendra notamment les impressionnistes, critique la tendance du paysagiste James Clark Hook (1819-1907) à surpeupler ses premiers plans (Gazette des Beaux-Arts, 1868/2 : 72) et les critiques à l’encontre de Stanfield évoquées par un auteur de l’Art en province visent justement la théâtralité de ses toiles, reprenant les griefs des auteurs allemands, mais dans un sens tout à fait différent (1835 : 118). A nouveau, selon les orientations esthétiques, les critiques diffèrent plus qu’en Allemagne.

29A l’issue de cette analyse, plusieurs tendances s’esquissent, formant les grandes lignes d’une réception qui, si elle présente certains points communs avec les réactions que l’on peut observer en France, est en partie spécifique à l’espace allemand. A la lecture des textes critiques, des récits de voyage, on est d’abord frappé par l’homogénéité des réactions. Tandis qu’en France, la découverte de la peinture anglaise provoque rapidement des débats, les critiques et les amateurs se rangeant dans deux camps opposés, la majorité des auteurs allemands partagent les mêmes opinions face à l’art britannique : perplexité, incompréhension, approbation parfois mais qui se teinte souvent de dédain, voilà les sentiments que provoque en Allemagne la peinture anglaise, essentiellement perçue comme un art insulaire, donc non-européen, fondamentalement étranger.

30Perplexité, d’abord, face à ce qui est considéré longtemps, non comme une école, mais comme une coexistence fragmentée d’individus aux personnalités artistiques parfaitement indépendantes les unes des autres. L’idée n’est pas absurde : rares sont les peintres anglais à avoir véritablement fait école ; mais les filiations et les évolutions que les peintres français remarquent dès la moitié du siècle ne deviennent part de la réflexion allemande que dans les deux dernières décennies du siècle. Cette vue fragmentée s’explique sans doute par les conditions matérielles de la réception : les peintres anglais exposant moins souvent en Allemagne, il manque aux auteurs la vue d’ensemble dont ont pu bénéficier les Français grâce notamment aux expositions de 1855, 1867 et 1878 (Jobert, 1995 : 78 sq.).

31Cette perception d’un système chaotique, où l’identité nationale se perdrait dans une sorte de fragmentation artistique, se reflète dans la perception des œuvres mêmes : la représentation de la nature par les Anglais est chaotique, perturbante, car elle passe d’un extrême à l’autre, refusant, en d’autres termes, l’harmonie de la mesure : à des représentations volontairement simples de la campagne anglaise, que l’on admire pour leur authenticité, tout en soulignant leur peu de grandeur artistique, succèdent des fantasmagories où le lien avec la nature se fait de plus en plus ténu. Si on retrouve certaines de ces critiques en France, les réactions y sont plus mêlées, et nuancées ; certes, l’œuvre de certains paysagistes, Turner au premier chef, se heurte à l’incompréhension des critiques français ; mais les textes expriment aussi bien souvent une admiration non seulement pour le talent mimétique des paysagistes anglais, qu’on retrouve également en Allemagne, mais, plus profondément, pour leur puissance créatrice qui leur permet de saisir l’essence même de la nature.

  • 25 La charge nationale des critiques d’art n’est pas une spécificité allemande, et les critiques franç (...)

32Surtout, la réception allemande de la peinture de paysage anglaise reflète les préoccupations artistiques d’un espace aux contours politiques encore flous, mais qui s’efforce, tout au long du XIXe siècle, de définir son identité culturelle et artistique : ainsi, l’Allemagne, marquée par la figure tutélaire de Dürer, s’inscrit dans une tradition picturale liée à la gravure, où la ligne, plus que la couleur, est fondatrice, où la narration est centrale. La critique d’art étant un moyen parmi d’autres de renforcer l’identité nationale, les particularités de la peinture anglaise — couleur plutôt que ligne, représentation d’une nature non narrative, voire rêvée — sont pointées du doigt, et, logiquement, dénigrées25. C’est, de manière révélatrice, Clarkson Stanfield, un peintre dont, selon un critique français, « la manière n’est pas plus anglaise que le sujet » (Revue étrangère de la littérature, des sciences et des arts, 1843 : 164) qui, avec quelques autres, recueille la majorité des suffrages allemands.

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Bibliographie

Revues

L’Appel : journal littéraire, artistique et scientifique (1855). Paris.

L’Art en province (1835-1859). Moulins.

L’Artiste (1831-1904). Paris.

Berliner Kunstblatt, Herausgegeben unter Mitwirkung der Königlichen Akademie der Künste und des Wissenschaftlichen Kunstvereins (I.1828-2.1829). Berlin.

Le Constitutionnel (1819-1914). Paris.

Deutsches Kunstblatt. Zeitung für bildende Kunst und Baukunst. Organ der deutschen Kunstvereine (1.1850-9.1858). Stuttgart (Ebner und Seubert).

Die Dioskuren (I.1856-20.1875). Berlin (Nicolai).

Gazette des beaux-arts (1ère période, I.1859-25.1868 ; 2ème période, I.1869-38.1888). Paris

Illustrirte Zeitung. Wöchentliche Nachrichten über alle Ereignisse, Zustände und Persönlichkeiten der Gegenwart (1843-1944). Leipzig (Weber).

Le Journal des Artistes (1827-1870). Paris.

Le Journal des débats politiques et littéraires (1814-1944). Paris.

Kunstblatt (1816-1849). Stuttgart, Tübingen (Cotta).

Revue étrangère de la littérature, des sciences et des arts (1832-1863). Saint-Pétersbourg.

Zeitschrift für bildende Kunst, (I.1866-65.1931/32). Leipzig (Seemann).

Récits de voyage

Kohl, Ida et Johann Georg (1845) : Englische Skizzen, Dresden (Arnold).

Passavant, Johann David (1833) : Kunstreise durch England und Belgien : nebst einem Bericht über den Bau des Domthurms zu Frankfurt a. M. ; Mit 10 Abbildungen. Frankfurt a. M.

Waagen, Gustav Friedrich (1838) : Kunstwerke und Künstler in England und Paris / 1 : Kunstwerke und Künstler in England, Band 2. Berlin (Nikolai).

Ouvrages critiques et encyclopédies

Fiorillo, Johann Dominik (1808) : Geschichte der zeichnenden Künste von ihrer Wiederauflebung bis auf die neuesten Zeiten. 5. Bd., die Geschichte der Mahlerey in Großbritannien enthaltend. Göttingen (Rosenbusch).

Nagler, Georg Kaspar (1835-1852) : Neues allgemeines Künstler-Lexicon oder Nachrichten von dem Leben und Werken der Maler, Bildhauer, Baumeister, Kupferstecher, Formschneider, Lithographen, Zeichner, Medailleure, Elfenbeinarbeiter, etc. 25 vol. Leipzig.

Springer, Anton (1858) : Geschichte der bildenden Künste im neunzehnten Jahrhundert. Leipzig (F.A. Brockhaus).

Littérature secondaire

Jobert, Barthélémy (1995) : La réception de l’école anglaise en France, 1802-1878 : un aspect des relations artistiques franco-britanniques au dix-neuvième siècle. Lille (Atelier national de Reproduction des Thèses).

Mérot, Alain (2009) : Du paysage en peinture dans l’Occident moderne. Paris (Gallimard).

Roger, Alain (1997) : Court traité du paysage. Paris : (Gallimard).

Waagen, Gustav Friedrich (1837) : Kunstwerke und Künstler in England und Paris / 1 : Kunstwerke und Künstler in England, Band 1. Berlin (Nikolai).

Westendorf, Brigitte (1992) : Englische Präraffaeliten in deutschen Augen. Francfort (Peter Lang).

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Notes

1 On entend par ce terme l’ensemble hétérogène des personnalités lettrées de l’époque —critiques et historiens d’art surtout, mais également érudits voyageurs dont les récits de voyage ont été en leur temps lus par un large public.

2 Cf. bibliographie pour le détail du corpus.

3 Nous pensons en particulier à Johann David Passavant (1787-1861) et Gustav Friedrich Waagen (1794-1868).

4 « Authenticité parfaite », « extraordinaire » (Toutes les traductions sont de l’auteur).

5 « Ses charmants paysages peints d’après nature semblent avoir été transportés depuis leur emplacement sur la toile par un miroir enchanté. A leur vue, on se retrouve pour ainsi dire à l’air libre. »

6 On pense bien évidemment à la célèbre formule de Stendhal définissant le roman comme « un miroir qu’on promène sur une grande route ». Voir Le Rouge et le Noir, (1830), Chapitre XIX, p. 232 dans l’édition Le Divan de 1927.

7 « Laisser-aller », « négligence ».

8 « Mais l’authenticité se cantonne à l’aspect général. Celui qui attendrait un traitement plus profond resterait sur sa faim. »

9 « Même lorsqu’il s’agit de copier le réel, on en reste à l’ébauche de ce qui présente un intérêt particulier, de sorte qu’aucun objet n’est traité comme il le mériterait. C’est bien pour cela qu’il manque presque toujours aux artistes cette étude plus approfondie de la nature, qui seule peut mener à la maîtrise de l’art [...] »

10 Au sujet du réalisme et de la représentation de la nature telle qu’elle est pratiquée par les paysagistes anglais et en particulier les préraphaélites, voir les écrits de John Ruskin, notamment Modern Painters (1851-1860).

11 « Une œuvre d’art n’a de chance de succès que si elle porte un nom connu [...] ou représente au détail près la nature tout à fait réelle : chevaux, chiens, chats, roses et radis, myosotis et choux-raves côtoient scarabées et asticots, papillons et mouches bleues. »

12 Nous employons ici le terme tel qu’il est utilisé à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle pour désigner la peinture de paysage fondée sur une pratique du plein air et une recherche d’authenticité et de simplicité.

13 « Ils ne savent insuffler aucune fantaisie à un paysage, mais ils savent magistralement reproduire sur la toile le caractère qu’un beau paysage a en soi. »

14 « [...] copistes mécaniques de la nature, cette nature qui a semble-t-il créé le peuple anglais alors qu’elle n’était pas d’humeur poétique. »

15 « une imitation servile de la nature ».

16 « Si l’on ajoute que le peintre n’a jamais vu l’éruption du Vésuve, accompagnée d’une pluie de cendres destructrice, que son imagination fut donc laissée libre de représenter cette catastrophe naturelle ; on peut en conclure avec assez de certitude que le tableau ne peut être au fond qu’un jeu exubérant avec la couleur et l’éclairage. »

17 « Plus de nature, plus de nature ! »

18 « Bref, voici l’erreur de toute ces peintures : pour reprendre l’expression d’un écrivain plein de finesse, l’art chausse ses bottes de sept lieues, et croit qu’il est possible de l’emporter sur la nature. »

19 Voir en particulier le rapport de Wilhelm von Seidlitz consacré à la Royal Jubilee Exhibition en 1887 (Repertorium für Kunstwissenschaft, 1888 : 277).

20 « Recherche de l’effet ».

21 « [...] sous le pinceau d’un Martin, d’un Danby et de quelques autres, le paysage est là aussi devenu mélodramatique, se réduisant à un simple apparat de mise en scène. »

22 « Beauté des lignes, chromatismes clairs, bonne compréhension des plans et partout une rigueur et une facture louables. »

23 « La côte richement peuplée de figures d’une heureuse invention. »

24 « Un navire de guerre est amarré devant une mer affreusement déchaînée. Son équipage qui a débarqué forme une partie de cette cavalcade multicolore, qui là-bas, sur la gauche du spectateur, progresse sur un étroit sentier le long de la haute falaise. [...] nous regardons vers ces falaises inondées, qui semblent avoir souvent contemplé de telles actions horribles commises nuitamment dans l’obscurité de leurs gouffres. »

25 La charge nationale des critiques d’art n’est pas une spécificité allemande, et les critiques français effectuent régulièrement des comparaisons entre peintres français et anglais, au bénéfice des premiers ; mais l’influence des paysagistes anglais sur les artistes français étant rapidement reconnue, la comparaison se porte sur d’autres domaines.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Violaine Gourbet, « Les paysagistes anglais vus par les commentateurs allemands au XIXe siècle : copistes fidèles ou extravagants dramaturges »Trajectoires [En ligne], 12 | 2019, mis en ligne le 01 février 2019, consulté le 25 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/trajectoires/2807 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/trajectoires.2807

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Auteur

Violaine Gourbet

Doctorante contractuelle en histoire de l’art, Université François-Rabelais de Tours, Ludwig-Maximilians-Universität de Munich, violaine.gourbet@univ-tours.fr

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Droits d’auteur

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