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Littérature et radio

De l’adaptation radiophonique dans les années 1950

La mise en intrigue par la curiosité dans La Fin d’un homme d’O.-P. Gilbert (inr, 1956)
Christian Janssens
p. 85-98

Texte intégral

  • 1 Chambon (Joëlle), «  Nathalie Sarraute  : du roman au théâtre en passant par la radio  », dans Sk (...)

1Ces dernières années, plusieurs recherches ont pris pour objet les adaptations radiophoniques, réalisées souvent dans les années 1960, d’autrices et d’auteurs «  de production restreinte  » tels que Nathalie Sarraute, Peter Handke ou Georges Perec1. Par cette étude, nous souhaitons contribuer à l’élargissement du champ et attirer l’attention sur les adaptations, datant principalement des années 1950, d’un auteur belge «  de grande production  », O.-P. Gilbert.

  • 2 Bursens (Saskia), «  Le Fonds O.-P. Gilbert  », dans Piret (Pierre), dir., Textyles, n°  34, Simo (...)
  • 3 La Fin d’un homme, d’O.-P. Gilbert, mise en ondes par Fernand Abel, émission inr du 11 octobre 19 (...)

2Journaliste, romancier, scénariste de cinéma, Gilbert a adapté pour la radio – que ce soit en Belgique, en France et en Suisse – ses propres romans et nouvelles. Pour les émissions mises en ondes par l’inr, les traces écrites sont nombreuses  : une série de livrets d’émission est conservée dans le Fonds O.-P. Gilbert, déposé aux Archives & Musée de la littérature2. En revanche, les archives sonores sont rares  ; dans l’état actuel de la recherche, nous n’avons pu consulter que l’adaptation radiophonique, La Fin d’un homme, émise par l’inr en 1956, conservée et inventoriée par la Sonuma3.

3Dans la première partie de l’article qui suit, nous nous proposons de rappeler le contexte institutionnel belge dans lequel évolue Gilbert (le Service littéraire de l’inr) ainsi que son parcours d’auteur et d’adaptateur. Dans la seconde partie, nous analyserons La Fin d’un homme  ; l’intérêt de cette étude de cas repose sur le corpus étendu dont nous avons pu nous emparer  : nous avons rassemblé non seulement les documents relatifs aux étapes de l’adaptation (l’œuvre littéraire d’origine, le livret inr, l’émission inr), mais aussi deux intertextes du livret. En effet, avant d’être mis en ondes par l’inr en 1956, La Fin d’un homme l’a été par Radio-Lausanne en 1953 et par la Radiodiffusion française (rdf) en 1947. Pour ces deux adaptations, nous n’avons pu retrouver la trace des archives sonores, mais bien celle des livrets, lesquels viennent compléter le corpus.

  • 4 Raphaël Baroni différencie la mise en intrigue par la curiosité de celle par le suspense. La prem (...)

4Concernant l’analyse des livrets, il y a lieu de souligner que la version belge est la reprise des variantes suisse et française. En conséquence, nous nous attarderons principalement sur ces dernières  : nous tenterons de distinguer deux étapes dans l’adaptation, en lien – autant que faire se peut – avec la suite des émissions dans laquelle l’œuvre radiophonique est insérée  ; nous mettrons aussi en avant une stratégie récurrente  : celle de la mise en intrigue par la curiosité4. Concernant l’analyse de la mise en ondes, nous examinerons comment celle-ci conforte l’option prise dans les phases d’écriture qui l’ont précédée.

Le Service littéraire de l’inr, une institution en quête d’auteurs belges

  • 5 En France, les années où domine la radiodiffusion sont qualifiées d’«  ère Gilson  », du nom de P (...)

5Dans les pays industrialisés, les années 1950 sont une période particulièrement florissante pour la radiodiffusion. Média de masse dès les années 1930, elle reçoit, à la Libération, une nouvelle impulsion. Celle-ci se prolongera jusqu’au moment où la télévision s’emparera de la première place dans le paysage médiatique5.

  • 6 Caufriez (Philippe), Histoire de la radio francophone en Belgique, Bruxelles, crisp, 2015, p. 171 (...)
  • 7 Rapports annuels de l’inr [pour les exercices 1944/46-1960], Bruxelles, inr, 1949-1961.
  • 8 Homme de théâtre, Henri Billen débute en 1948 à l’inr-Radio avant de passer à l’inr-Télévision  ; (...)

6En Belgique, l’Institut national belge de radiodiffusion (inr) retrouve en 1945 ses prérogatives pour l’ensemble du territoire et bénéficie même d’un monopole de fait. Comme durant l’avant-guerre, il développe les missions de service public, dont celle de la démocratisation de la culture. Au sein de celle-ci, le «  littéraire  » occupe alors une place d’importance et le Service littéraire est l’un des principaux départements des Émissions parlées françaises6. Il est divisé en deux sections  : celle des «  Commentaires  » produit les émissions sur la littérature (rencontres avec les écrivains, actualités des lettres, histoire littéraire, agenda culturel) tandis que celle de la «  Mise en ondes  » est responsable de la réalisation des fictions radiophoniques (livrets originaux, adaptations de pièces de théâtre et d’autres œuvres littéraires, feuilletons) et de la captation des pièces jouées en salles7. Le Service dispose aussi d’un appareil de production performant, avec des studios d’enregistrement bien équipés, une équipe permanente de metteurs en ondes et une troupe dramatique à demeure8. Ses émissions sont régulièrement présentées dans Micro Magazine, le périodique institutionnel de l’inr.

  • 9 Dans ses rapports annuels, l’inr distingue les auteurs belges des auteurs étrangers – «  Service (...)
  • 10 Mollenard est mentionné parmi les «  créations d’auteurs belges  », dans Rapport annuel de l’inr (...)

7Étant donné le développement de son offre d’émissions, le Service recherche des «  auteurs pour la radio  », et parmi ceux-ci des auteurs belges9. Cette politique institutionnelle croise le parcours d’un écrivain qui peut se prévaloir de la nationalité belge, mais aussi de son aptitude à construire un récit dramatisé et de son expérience en matière radiophonique10.

O.-P. Gilbert, l’auteur et l’adaptateur

  • 11 Janssens (Christian), «  Gilbert, O.-P. (1898-1972)  », dans Nouvelle Biographie nationale, t. 15 (...)
  • 12 Mollenard, 1936  ; La Piste du Sud, 1937 – Paris, Gallimard, nrf.

8Gilbert, prénommé Oscar à l’état civil, est né en 1898 à Wanfercée-Baulet, près de Charleroi11. Wallon, il reste attaché au souvenir d’un pays minier qui lui inspirera, semble-t-il, le décor de plusieurs de ses romans (le cycle des Bauduin). Très tôt, Gilbert signe ses écrits Oscar-Paul Gilbert, puis O.-P. Gilbert. Son parcours se partage entre la Belgique et la France, où, dans les années 1920, il entame une carrière de journaliste. Durant les années 1930, il connaît la notoriété comme grand reporter en Asie et en Afrique du Nord pour Voilà et Paris-Soir, puis en tant que romancier chez Gallimard avec Mollenard et La Piste du Sud12. Ses écrits appartiennent le plus souvent à un genre hybride, associant roman d’aventures, roman psychologique et reportage.

  • 13 Mollenard, Production Édouard Corniglion-Molinier, réalisation de Robert Siodmak, avec Harry Baur (...)

9Gilbert adapte plusieurs de ses œuvres pour le cinéma  ; ainsi, en 1938, Mollenard, le film adapté du roman éponyme, est co-scénarisé par l’auteur lui-même et par Charles Spaak13. Plus tard, tout au long de son parcours, Gilbert prolonge cette pratique  : il transpose pour la radio, le théâtre ou encore la télévision, des histoires qui ont connu d’abord une forme journalistique ou littéraire.

10Les premières traces de son activité radiophonique peuvent être relevées en France, en 1940, pendant la «  drôle de guerre  ». Ce sont des émissions de quinze à trente minutes dont les sujets sont tirés de ses reportages comme, par exemple, les portraits des villes de Saïgon, Hong Kong ou Shanghai. Gilbert reste à Paris pendant l’Occupation. La première grande adaptation qu’il signe est celle de sa nouvelle Shanghai, Chambard and Co, diffusée par la Radiodiffusion française nationale (rn, sous le contrôle de Vichy) en neuf épisodes de trente minutes, d’avril à juin 1944. À la Libération, il collabore très activement avec les radios de l’espace francophone, en France avec la rdf et les organismes qui lui ont succédé, en Belgique avec l’inr ou en Suisse avec Radio-Lausanne.

  • 14 Voir en annexe la liste des œuvres radiophoniques de Gilbert mises en ondes par l’inr (1947-1960)
  • 15 Après 1960, d’autres émissions sont encore réalisées, sans doute jusqu’au décès de l’auteur, en B (...)

11La collaboration entre Gilbert et le Service littéraire de l’inr se déroule principalement entre 1947 et 1960, à raison d’au moins une œuvre par an, et peut être divisée en trois phases14. Entre 1947 et 1952, il adapte ses nouvelles ou ses romans édités chez Gallimard, puis chez Plon. Les trois années suivantes, il écrit des livrets originaux tels que des portraits de personnages tirés des fictions précédentes ou des sujets hors adaptations (la chronique historique Vingt siècles de Wallonie par exemple). Entre 1956 et 1960, il revient aux adaptations de romans ou de nouvelles15. Dans cet ensemble, nous analyserons La Fin d’un homme, tant ses livrets successifs que sa mise en ondes par l’inr.

La Fin d’un homme, la nouvelle publiée par Gallimard en 1937

  • 16 Courrier d’Asie, Paris, Gallimard, nrf, 1937.

12Grand reporter dans l’entre-deux-guerres, Gilbert tire de ses reportages en Asie orientale trois nouvelles, La Fin d’un homme, Les Pirates du rail et Shanghai, Chambard and C°, réunies dans le recueil Courrier d’Asie publié par Gallimard en 193716.

  • 17 «  La Fin d’un homme  », dans Courrier d’Asie, op. cit., p. 13-89.

13La nouvelle La Fin d’un homme17 est construite sur l’emboîtement des récits et comprend deux niveaux narratifs  : d’une part, un journaliste anonyme raconte qu’il a rencontré à Cholon, le quartier chinois de Saïgon, un homme en plein désarroi, Jean Dumont  ; d’autre part, celui-ci lui fait le récit de sa vie.

14Lieutenant sur un navire assurant la liaison régulière entre Singapour et la Chine, Dumont rencontre Marie, une Eurasienne qu’il épouse et avec laquelle il vit au Tonkin. Par son mariage, il se retrouve isolé entre la société coloniale raciste qui le rejette et le monde asiatique fréquenté par sa femme qu’il ne comprend pas. Par ailleurs, il s’endette pour combler Marie de cadeaux. À court d’argent, il accepte de devenir le capitaine et le complice de Ruiten, un trafiquant de main-d’œuvre entre la Chine et la Thaïlande. Ce criminel impitoyable fait transporter sur un bateau délabré, le Founing, dans des conditions inhumaines, des centaines de travailleurs chinois surexploités. Lorsque Ruiten fait part à Dumont de son projet de couler le navire avec sa cargaison humaine afin de toucher la prime d’assurance, celui-ci se révolte intérieurement, fait échouer le Founing sur un banc de sable, ouvre les cales et s’enfuit. De retour chez lui, il comprend que Marie, qui a été la compagne du trafiquant, l’a poussé à accepter ce contrat dégradant. Depuis lors, l’homme erre d’une ville à l’autre, comme «  une épave  », vivant dans la terreur de revoir Ruiten qui aurait survécu au naufrage et chercherait à se venger.

La Fin d’un homme, le livret de la rdf, 1947

  • 18 Robert Coulom (1900-1958), producteur, metteur en ondes, est cité pour la série Le Siècle en est (...)
  • 19 Les livrets des vingt-cinq émissions sont conservés par la Bibliothèque nationale de France, dont (...)
  • 20 «  La Radio. Mardi 3 juin [1947]. Programme parisien. 22 h. “La fin d’un homme”, par O.-P. Gilber (...)

15Dans l’élaboration de ce premier livret, Gilbert dispose d’une marge de manœuvre restreinte. Il n’est pas à l’initiative du projet radiophonique  ; il est choisi, avec d’autres auteurs, par Robert Coulom, producteur de la rdf, qui lance une série d’émissions liées par le même concept18. Rassemblées sous le titre «  Les Débutants célèbres  », vingt-cinq émissions sont diffusées, chaque mardi en soirée, entre le 8 décembre 1946 et le 17 juin 1947, par le Programme parisien de la rdf19. La vingt-troisième est La Fin d’un homme et passe à l’antenne le 3 juin 194720.

16Au début de l’émission, un rituel se répète  : présentation générale de la série sous la forme d’un billet lu par le speaker, énumération de la liste des interprètes, présentation du numéro particulier lors d’une courte interview de l’auteur.

«  Les Débutants célèbres  ». Une série au cours de laquelle vous entendrez chaque mardi un scénario dialogué écrit pour vous par un auteur célèbre qui n’est pas un spécialiste de la Radio et qui fait, à cette occasion, ses débuts d’auteur radiophonique original.

Le Débutant célèbre de ce soir sera O.P. Gilbert dont vous entendrez tout à l’heure «  La Fin d’un homme  » interprété par ordre d’entrée dans l’action par  : [texte manquant]

  • 21 La Fin d’un homme, livret rdf, op. cit., p. 1 – Le livret conservé ne mentionne pas la liste des (...)

La parole est à Mademoiselle la Secrétaire Provisoire des Ondes Perpétuelles, interprétée par Frédérique qui va adresser à O.P. Gilbert quelques mots de bienvenue sur les ondes. O.P. Gilbert lui répondra21.

  • 22 Les auteurs sélectionnés sont des journalistes ou d’anciens journalistes qui sont proches ou ont (...)

17Pour constituer son panel, Coulom joue sur le transfert de notoriété  : il entend tirer parti de la renommée des auteurs sélectionnés pour les déplacer d’un champ (le journalisme, la littérature, le théâtre, le cinéma) à un autre (la radio)22. Nous ne discuterons pas ici du choix de Coulom, du degré de notoriété de Gilbert ou de sa qualité d’auteur radiophonique «  débutant  ». Nous mettrons en évidence la directive énoncée par le producteur – qui est aussi le seul metteur en ondes de la série, ce qui lui confère une importance accrue dans l’entreprise  : écrire un «  scénario dialogué  ».

18La première étape de la transposition de la nouvelle à la radio est caractérisée par la «  mise en dialogue  »  : les personnages conversent entre eux, après élimination presque complète des encarts descriptifs, discours intérieurs ou commentaires. Hérité de l’œuvre source, l’emboîtement de récits est apparent  : les échanges entre le journaliste Jacques Pierson et Dumont – premier niveau narratif – se réduisent au bénéfice du monologue de l’ex-capitaine censé se dérouler en présence de son interlocuteur  ; ce monologue est entrecoupé d’analepses où dans le passé – deuxième niveau narratif –, Dumont converse avec Marie, Ruiten ou d’autres personnages.

19Nous examinerons, au premier niveau, les stratégies – elles aussi souvent héritées de l’œuvre source – utilisées pour susciter la curiosité  : l’ambiguïté de la situation narrative initiale, le déplacement de la focalisation d’un personnage à l’autre.

  • 23 «  Une voix, assez loin  : Pierson… Pierson, vous ne rentrez pas en ville  ? / Pierson  : Non. Pl (...)
  • 24 Dans le livret rdf, le port de Sunna n’est pas localisé. Alors que, dans la nouvelle, la rencontr (...)

20La situation narrative initiale est ambiguë  : l’identité des personnages, en particulier leur nomination, est incomplète ou retardée, leur fonction est obscure, une des composantes de la diégèse reste indéterminée. Ainsi, dans la première scène, un inconnu (désigné dans le livret par le terme «  une voix  ») interpelle un autre personnage par son nom puis s’éloigne  ; l’utilité de la scène est d’apprendre à l’auditeur virtuel que le personnage interpellé s’appelle Pierson23. Dans la deuxième scène, Pierson, à propos duquel les informations sont restreintes, entame un bref monologue où le lieu de l’action est vaguement désigné (Pierson dit avoir débarqué du paquebot le «  Bengale  » reparti pour la France, se trouver au bord d’une rivière et évoque le port de Sunna24). Dans la troisième scène, Pierson rencontre près de l’eau un nouveau personnage  : celui-ci tait son identité et déclare être menacé par un autre, dont il refuse tout autant de dire le nom. Par la suite, la désignation du protagoniste reste incertaine  : est-ce Pierson ou son interlocuteur  ? qui est cet «  homme  » dont la «  fin  » va être racontée  ? Enfin, qui est le personnage menaçant et quel danger représente-t-il  ?

21Dans un premier temps, la focalisation se porte sur Pierson, ce qui facilite l’intérêt de l’auditeur virtuel pour l’histoire. Devenant en quelque sorte le porte-parole de celui-ci, Pierson manifeste sa curiosité en interrogeant son compagnon sur son identité («  Qui êtes-vous  ?  ») ou sur celle du personnage mystérieux («  Mais qui [vous menace]  ?  »). Toutefois, la focalisation bascule au moment où Pierson en dit plus sur lui-même et où il est renvoyé à sa curiosité  :

Dumont  : […] Qu’est-ce que vous faites dans la vie  ?

Pierson  : Journaliste

Dumont  : Journaliste. Journaliste… Envoyé spécial en Asie  ?… ou quelque chose comme ça  ?… Magnifique, magnifique… Drôle de métier. Alors j’ai un moyen de vous payer. Je vous raconterai tout. Je satisferai votre sale curiosité et puis vous écrirez ça pour vos lecteurs […] (Livret rdf, 1947, p. 6-7).

  • 25 Dumont précise que le patronyme est usurpé mais que la fonction est exacte  ; l’information est s (...)

22Dès lors la focalisation se déplace de Pierson vers son interlocuteur, qui décline son identité  : «  Jean Dumont, 36 ans, né à Prémery (Nièvre), capitaine au long cours25  ». Dumont apparaît clairement comme le protagoniste et le narrateur de sa propre histoire. La suite du récit se fera par son seul intermédiaire, à travers le monologue entrecoupé d’analepses, lequel apportera progressivement les réponses aux questions provoquées par le déséquilibre narratif initial.

Cet homme n’était plus qu’une épave…, le livret de Radio-Lausanne, 1953

23Au début des années 1950, Gilbert est un auteur radiophonique bien reçu en Suisse francophone. En 1951 et 1952, Radio-Lausanne diffuse L’Autre Route de Mandalay, Le Docteur Bertrand de Dunkerque et Le Pont de Broadway. En octobre 1952, l’hebdomadaire Radio Télévision fait l’annonce suivante  :

La Légion des Vivants de O.-P. Gilbert – […]Radio-Lausanne a demandé à O.-P. Gilbert de lui donner d’autres productions du même genre, et celui-ci a écrit – sous le titre général de La Légion des Vivants – une série de récits radiophoniques qui mèneront les auditeurs des Antilles à l’Afrique, d’Europe en Extrême-Orient […]

  • 26 «  La Légion des Vivants de O.-P. Gilbert  », dans Radio Télévision. Hebdomadaire illustré, [Laus (...)

Ce que nous dit l’auteur – L’idée de la Légion des Vivants m’est venue du désir que j’ai de lutter contre le «  genre noir  ». Je ne veux pas «  donner des exemples  », mais seulement montrer des vies exemplaires […]26.

24À Radio-Lausanne, la position de Gilbert est plus affermie que lors de sa participation aux «  Débutants célèbres  »  : il est le seul auteur et le concepteur de la série, il en détermine la ligne générale et collabore avec trois metteurs en ondes (Pierre Walker, Benjamin Romieux, Marcel Merminod).

  • 27 «  Dimanche 31 mai [1953], 20.05-20.50, La Légion des Vivants  : Cet homme n’était plus qu’une ép (...)

25La série «  La Légion des vivants  » comprend dix émissions diffusées, le dimanche en soirée, par Radio-Lausanne, entre le 2 novembre 1952 et le 1er novembre 1953. Elle est constituée des adaptations de reportages, romans ou nouvelles de l’auteur, par exemple, Pierson, des Chemins de fer du Yunnan, inspiré des Pirates du rail, ou Les hommes de la plus grande solitude, de certains personnages de La Piste du Sud. Cet homme n’était plus qu’une épave – nouveau titre pour une version modifiée de La Fin d’un homme – est le huitième épisode diffusé le 31 mai 195327.

  • 28 Par exemple, la répétition concerne le protagoniste, le «  héros  » de la série.
  • 29 Deux épisodes Capitaine Ledru, honnête homme et La Seconde existence du Capitaine Ledru reprennen (...)
  • 30 Trois ans avant la série La Légion des vivants, Gilbert expérimente ce type d’ouverture dans l’ad (...)

26Dans les œuvres de «  grande production  », la «  mise en série  » est souvent associée à la répétition de composantes28. Dans le cas présent, afin d’assembler des épisodes différents et bouclés sur eux-mêmes29, Gilbert remanie un élément particulier de la structure narrative  : le segment d’ouverture. Déjà, précédemment, il avait expérimenté le type d’introduction qui consiste à faire dialoguer entre eux deux personnages secondaires, l’un étant supposé raconter à l’autre l’histoire qui suivra30. Il reprend et réitère le procédé dans La Légion des vivants. Huit épisodes sur dix sont introduits par une conversation préliminaire entre l’ex-grand reporter Pierre Pelletier et son amie Jeanne  : Jeanne demande à Pierre de lui raconter l’histoire de personnes qu’il a rencontrées de par le monde  ; Pierre acquiesce et commence à raconter l’histoire.

  • 31 Un exemplaire du livret portant l’indication «  R-L 19 V 53  » est conservé dans le Fonds O.-P. G (...)

27Le huitième épisode, Cet homme n’était plus qu’une épave, s’ouvre par un tel dialogue31. Ainsi, dans cette deuxième étape de l’adaptation, un nouvel effet de curiosité est amené par la superposition de récits emboîtés, laquelle est subordonnée à la «  mise en série  » et non plus à l’œuvre source. La succession des narrateurs potentiels (Pierre Pelletier, Jacques Pierson, Jean Dumont) provoque un nouveau déséquilibre de la situation narrative  : «  qui raconte l’histoire  ?  »

  • 32 Dans ce livret, le port de Sunna est situé dans l’île indonésienne de Célèbes. Nous n’avons pu re (...)

28Quatre niveaux narratifs sont à différencier. Au premier niveau se déroule la conversation entre Pierre et Jeanne  : au bord du Léman, Pierre raconte qu’il a rencontré à Singapour un certain Jacques Pierson, agent d’une compagnie maritime en Asie orientale. Le deuxième niveau est une conversation à l’hôtel Raffles de Singapour  : Pierre apprend de Pierson que celui-ci a recueilli l’histoire de Dumont à Sunna, au nord de Célèbes32. Les troisième et quatrième niveaux sont ceux du livret précédent  : rencontre et dialogue entre Pierson et Dumont, monologue de Dumont entrecoupé des analepses.

La Fin d’un homme, le livret de l’inr, 1956

  • 33 «  Jeudi 11 octobre [1956]. 20.00-22.00. Notre soirée théâtrale  : La Fille de Londres, La Fin d’ (...)

29Dans la grille des programmes de l’inr, «  Notre soirée théâtrale  » est la plage du jeudi soir dédiée aux fictions radiophoniques, qu’elles soient ou non liées à une œuvre dramatique. Depuis 1947, les œuvres de Gilbert y sont souvent programmées. La Fin d’un homme – qui a retrouvé son titre d’origine – passe sur antenne le 11 octobre 1956, en seconde partie, après La Fille de Londres de Pierre Mac Orlan et Armand Lanoux, émission en relais différé de la Radiodiffusion Télévision française (rtf)33. Les raisons de grouper les deux œuvres ne nous sont pas connues.

  • 34 La Fin d’un homme, livret, tapuscrit et notes manuscrites, s.l., [1956], 34 p., aml, ML 09114/002 (...)
  • 35 Ces dialogues sont prononcés tels quels lors de la mise en ondes, de sorte que le livret distribu (...)

30Comme dit précédemment, le contexte de l’émission n’influence pas l’élaboration du livret, lequel est la reprise de celui de Radio-Lausanne. Ceci est d’autant plus manifeste que le document conservé n’est pas le texte dactylographié par les services de l’inr, mais un avant-texte, à savoir un exemplaire du document lausannois sur lequel Gilbert a apposé des annotations34. La structure en récits emboîtés, les quatre niveaux narratifs sont identiques. Les principales modifications sont le changement de la localisation du dialogue entre Pierre Pelletier et Jeanne (qui se déroule quelque part près de la Mer du Nord ou de la Manche) et la réécriture partielle des dialogues, plus épurés, plus directs et dont les chutes sont plus incisives35.

La Fin d’un homme, la mise en ondes par l’inr, 1956

  • 36 Dans les années 1950, l’équipe permanente est composée de Georges Randax, Fernand Abel et Jean Ve (...)
  • 37 Entre 1947 et 1956, Fernand Abel a réalisé ou coréalisé Shanghai, Chambard & C°, Mollenard, Le Do (...)
  • 38 Pollet (Evelyne), «  Fernand Abel vous parle de Le Criminel était au rendez-vous et d’autres chos (...)

31Au sein de l’inr, Fernand Abel, l’un des metteurs en ondes permanents du Service littéraire36, est chargé de la réalisation de La Fin d’un homme. Abel connaît bien les œuvres de Gilbert  : il a réalisé ou coréalisé plusieurs d’entre elles et joué dans d’autres37. En outre, Abel est un homme d’expérience, passant d’un genre à l’autre, de l’œuvre historique telle que Christophe Colomb de Charles Bertin (Prix Italia, 1953) au feuilleton policier comme Le Criminel était au rendez-vous38.

  • 39 Deharme (Paul), Pour un art radiophonique, Paris, Le Rouge et le Noir, coll. Les Essais, 1930, p. (...)

32La mise en ondes conforte l’option prise dans le livret, celle de susciter la curiosité, non pas le suspense. L’ambiance générale est feutrée, invitant l’écoutant à s’immerger dans le récit, à prêter attention aux interrogations qu’il pose. Cette atmosphère correspond au caractère intimiste souvent attribué à la radio, de Paul Deharme à Gaston Bachelard  : l’écoute d’une voix humaine, qui semble s’adresser individuellement à chaque auditeur, tend à susciter une forme de rêverie39.

33Pour construire cette ambiance avec les moyens d’expression radiophoniques, ce sont les voix et les silences qui sont mobilisés, plus que la musique et les bruits utilisés de manière illustrative. Le ton de Pierre s’adressant à Jeanne, celui de Pierson parlant de Dumont, ou de Dumont racontant son histoire, est celui de la confidence. Quant à Marie, sa voix détimbrée et lointaine ajoute du mystère au personnage et concourt à l’attention à son égard.

Conclusion

34Dans cette étude, nous avons tenté de montrer que, dans le cas de l’adaptation radiophonique de La Fin d’un homme, la «  fabrication  » du livret est réalisée en deux étapes et qu’elle est liée à son insertion dans une série ainsi qu’à la marge de manœuvre dont dispose l’auteur Gilbert. Ces différentes phases d’écriture révèlent que la mise en intrigue par la curiosité est héritée de l’œuvre source, mais aussi de la «  mise en série  ».

  • 40 Vingt siècles de Wallonie est une série de vingt-quatre épisodes mêlant le documentaire et la fic (...)
  • 41 L’expression est de Umberto Eco, citée dans Baroni (Raphaël), Les Rouages de l’intrigue, op. cit.(...)
  • 42 L’exemple est celui de la série télévisée Columbo dont le téléspectateur connaît l’ouverture, mai (...)

35Pour l’auditeur occasionnel de La Fin d’un homme, la curiosité est éveillée autant par la succession des narrateurs que par les informations lacunaires à propos des personnages ou de l’histoire. Pour l’auditeur régulier de Gilbert, en particulier sur les antennes de l’inr, une curiosité supplémentaire découle de l’intertexte que l’œuvre entretient avec les émissions précédentes de l’auteur, comme Vingt Siècles de Wallonie40, la chronique historique diffusée un an avant La Fin d’un homme. L’ouverture (le dialogue entre Pierre et Jeanne) est connue, mais elle offre un éventail de prolongements possibles (Pierre et Jeanne ouvrent et ferment le récit, ils interrompent le récit emboîté pour le relancer ou deviennent des personnages de la diégèse qui conversent avec les autres personnages, etc.) Nous retrouvons là le plaisir de la redondance mêlée à des «  jongleries41  », un plaisir propre aux séries de «  grande production  », celui du retour du «  même  » toujours un peu différent42.

O.-P. Gilbert, Œuvres radiophoniques mises en ondes par l’inr, 1947-1960

36Sources  : inr, Micro Magazine, Micro Magazine Télévision

date d’émission

mises en ondes

format

1947, avril

Shanghai, Chambard & C°

3 x 2 h.

1947, juin

Le Journal tombe à cinq heures

1 x 2 h.

1947, octobre

Le Cercle des ombres

1 x 2 h.

1948, janvier

Mollenard

3 x 2 h.

1948, janv.-mars

De Zwarte Draak (nir)

9 x 30 min.

1949, janvier

La Piste du sud

3 x 2 h.

1950, juin

L’Unique Amour de Marie Lerque

3 x 2 h.

1951, octobre

Nord-Atlantique

1 x 2 h.

1952, mai

Bauduin des Mines

1 x 2 h.

1953, mai

Le Docteur Bertrand de Dunkerque

1 x 2 h.

1953, mai-nov.

Les Hommes dans le monde

6 x 30 min.

1954, avril

Anna Garice

1 x 2 h.

1954, mai-juillet

L’Envers du décor

9 x 45 min.

1954, juillet

Nord-Atlantique (rediffusion)

1 x 2 h.

1955, janv.-déc.

Vingt siècles de Wallonie

24 x 35 min.

1956, avril

Le Sens du pardon

1 x 2 h.

1956, octobre

La Fin d’un homme

1 x 50 min.

1957, oct.-déc.

Shanghai, Chambard et Cie (rediffusion)

11 x 30 min.

1958, juillet

Carpant

1 x 2 h.

1958, novembre

Les Prisonniers de l’Europe

1 x 75 min.

1959, octobre

Madeleine Bauduin

1 x 2 h.

1960, septembre

La Citadelle Bauduin

1 x 2 h.

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Notes

1 Chambon (Joëlle), «  Nathalie Sarraute  : du roman au théâtre en passant par la radio  », dans Skén&graphie, n° 3, 2015, p. 87-104  ; Nannicini Streitberger (Chiara), «  Les pièces radiophoniques expérimentales. L’exemple de Peter Handke et de Georges Perec (1968)  », dans Recherches en communication, n°  37, 2013, p. 57-72.

2 Bursens (Saskia), «  Le Fonds O.-P. Gilbert  », dans Piret (Pierre), dir., Textyles, n°  34, Simon Leys, 2008, p. 113-114 – Nous remercions Laurence Boudart et les équipes des Archives & Musée de la littérature de nous avoir facilité l’accès au Fonds O.-P. Gilbert (aml, ISAD 00067).

3 La Fin d’un homme, d’O.-P. Gilbert, mise en ondes par Fernand Abel, émission inr du 11 octobre 1956 (Sonuma, Les Archives audiovisuelles, Fonds rtbf, n° invent. 583424C2-7C54-11E7-ADD4-00199990B994) – Nous remercions Florence Huybrechts de nous avoir signalé l’existence de cette archive sonore. Il n’est pas exclu que subsistent d’autres archives sonores qui n’ont pu être prises en compte dans cette étude.

4 Raphaël Baroni différencie la mise en intrigue par la curiosité de celle par le suspense. La première suppose «  qu’au moins un de ces éléments [où et quand l’action se déroule-t-elle  ? qui agit  ? quel est le rôle du personnage dans l’histoire  ? quelles sont ses relations avec les autres personnages  ? etc.] apparaisse volontairement occulté, de manière que le lecteur soit obligé de formuler un diagnostic incertain à partir des indices disséminés dans le texte  »  ; la seconde est créée «  lorsque le développement, l’issue ou les conséquences d’un événement demeurent incertains, mais néanmoins partiellement prévisibles. L’interprète est alors encouragé à produire un pronostic sur le développement ultérieur [que va-t-il arriver  ? qui va gagner  ? le fera-t-il  ? etc.] de la séquence événementielle  » (Les Rouages de l’intrigue  : les outils de la narratologie postclassique pour l’analyse des textes littéraires, Genève, Slatkine, p. 74-75).

5 En France, les années où domine la radiodiffusion sont qualifiées d’«  ère Gilson  », du nom de Paul Gilson, directeur artistique, qui eut une influence déterminante sur les programmes hexagonaux (cf. Glevarec (Hervé), dir., Histoire de la radio  : ouvrez grand vos oreilles  !, Milan, Silvana  ; Paris, Musée des arts et métiers, 2012, p. 53).

6 Caufriez (Philippe), Histoire de la radio francophone en Belgique, Bruxelles, crisp, 2015, p. 171-178.

7 Rapports annuels de l’inr [pour les exercices 1944/46-1960], Bruxelles, inr, 1949-1961.

8 Homme de théâtre, Henri Billen débute en 1948 à l’inr-Radio avant de passer à l’inr-Télévision  ; il témoigne de l’activité du Service littéraire dans Van den Dungen (Pierre), De la scène à la lucarne. Pionniers de la télévision en Belgique francophone. Conversations avec Henri Billen, Bruxelles, Le Cri, 2009, p. 31-34.

9 Dans ses rapports annuels, l’inr distingue les auteurs belges des auteurs étrangers – «  Service littéraire. Mises en ondes. Nos soirées théâtrales (le jeudi de 20 à 22 h.)  : 18 émissions d’auteurs belges, 25 émissions d’auteurs français, 3 émissions d’auteurs étrangers. Les jeux radiophoniques  : 7 émissions d’auteurs belges, 7 émissions d’auteurs français et étrangers  », dans Rapport annuel de l’inr pour l’exercice 1949, Bruxelles, inr, 1951, p. 11.

10 Mollenard est mentionné parmi les «  créations d’auteurs belges  », dans Rapport annuel de l’inr pour l’exercice 1948, Bruxelles, inr, 1950, p. 10.

11 Janssens (Christian), «  Gilbert, O.-P. (1898-1972)  », dans Nouvelle Biographie nationale, t. 15, Bruxelles, Académie royale de Belgique, 2020, p. 177-179  ; «  O.-P. Gilbert, entre roman, reportage et cinéma (1932-1938)  », dans Klinkenberg (Jean-Marie), dir., Textyles, n°  54, Relire La Légende d’Ulenspiegel, 2019, p. 155-170.

12 Mollenard, 1936  ; La Piste du Sud, 1937 – Paris, Gallimard, nrf.

13 Mollenard, Production Édouard Corniglion-Molinier, réalisation de Robert Siodmak, avec Harry Baur, Gabrielle Dorziat, Albert Préjean, Pierre Renoir, 1938. Corniglion-Molinier est le producteur de Drôle de drame (Carné, Prévert, 1937) et de Sierra de Teruel/Espoir (Malraux, 1939/1945).

14 Voir en annexe la liste des œuvres radiophoniques de Gilbert mises en ondes par l’inr (1947-1960).

15 Après 1960, d’autres émissions sont encore réalisées, sans doute jusqu’au décès de l’auteur, en Belgique (La Mort de l’Oiseau de feu, rtb, 1966) ou en France (Les Hommes perdus, ortf, 1970).

16 Courrier d’Asie, Paris, Gallimard, nrf, 1937.

17 «  La Fin d’un homme  », dans Courrier d’Asie, op. cit., p. 13-89.

18 Robert Coulom (1900-1958), producteur, metteur en ondes, est cité pour la série Le Siècle en est là (1950) par Richard (Roger), «  Les étapes françaises de la radiodramaturgie  », dans La Nef, Nouvelle équipe française, n°  73-74, février-mars 1951, p. 79.

19 Les livrets des vingt-cinq émissions sont conservés par la Bibliothèque nationale de France, dont La Fin d’un homme, livret, tapuscrit, [rdf, 1947], 41 p., BnF, 4-YA RAD-4141.

20 «  La Radio. Mardi 3 juin [1947]. Programme parisien. 22 h. “La fin d’un homme”, par O.-P. Gilbert  », dans Combat, 3 juin 1947, p. 2.

21 La Fin d’un homme, livret rdf, op. cit., p. 1 – Le livret conservé ne mentionne pas la liste des interprètes ni le contenu de l’interview de Gilbert.

22 Les auteurs sélectionnés sont des journalistes ou d’anciens journalistes qui sont proches ou ont été proches, comme Gilbert, du théâtre ou du cinéma (Henri Jeanson, Pierre Scize, André Lang), des romanciers (Louis Martin-Chauffier), des auteurs dramatiques (Charles Vildrac).

23 «  Une voix, assez loin  : Pierson… Pierson, vous ne rentrez pas en ville  ? / Pierson  : Non. Plus tard / Une voix, plus loin  : Comme vous voudrez… Méfiez-vous des rôdeurs… les quais sont déserts…  » (livret rdf, op. cit., p. 2.)

24 Dans le livret rdf, le port de Sunna n’est pas localisé. Alors que, dans la nouvelle, la rencontre se déroule à Cholon, dans ce livret et les suivants, tous les noms de lieux liés au Vietnam (Cholon, Saïgon, le Tonkin…) sont supprimés et remplacés par des indications géographiques imprécises.

25 Dumont précise que le patronyme est usurpé mais que la fonction est exacte  ; l’information est suffisante pour donner une première caractéristique au personnage, lequel trouvera son épaisseur dans la suite.

26 «  La Légion des Vivants de O.-P. Gilbert  », dans Radio Télévision. Hebdomadaire illustré, [Lausanne], n°  44, 31 octobre 1952, p. 1693 – Précédemment, Gilbert a publié un ouvrage portant le même titre et construit sur le même principe de la série de portraits. Voir La Légion des vivants, Paris, Plon, 1941.

27 «  Dimanche 31 mai [1953], 20.05-20.50, La Légion des Vivants  : Cet homme n’était plus qu’une épave  », dans Radio Télévision, n°  22, 29 mai 1953, p. 863.

28 Par exemple, la répétition concerne le protagoniste, le «  héros  » de la série.

29 Deux épisodes Capitaine Ledru, honnête homme et La Seconde existence du Capitaine Ledru reprennent le même protagoniste pour deux histoires différentes.

30 Trois ans avant la série La Légion des vivants, Gilbert expérimente ce type d’ouverture dans l’adaptation de La Piste du Sud. Selon le livret, dans le prologue, Pierre Pelletier «  le voyageur  » rencontre un ami Jean «  le sédentaire  » et lui raconte une histoire dont il a été témoin, celle d’une femme à la recherche de l’assassin de son mari, au sud du Sahara – La Piste du sud, livret, tapuscrit, inr, 1949, un prologue et trois parties, 28, 50, 85 et 87 p., aml, ML 09103/0010-0013.

31 Un exemplaire du livret portant l’indication «  R-L 19 V 53  » est conservé dans le Fonds O.-P. Gilbert  : La Légion des vivants. VIII. Cet homme n’était plus qu’une épave…, livret, tapuscrit, [Radio-Lausanne], 1953, 34 p., aml, ML 09114/0026.

32 Dans ce livret, le port de Sunna est situé dans l’île indonésienne de Célèbes. Nous n’avons pu retrouver l’identité et l’emplacement actuels de la ville.

33 «  Jeudi 11 octobre [1956]. 20.00-22.00. Notre soirée théâtrale  : La Fille de Londres, La Fin d’un homme  », dans Micro Magazine Télévision, n°  600, 7 octobre 1956, p. 28 – La première diffusion de La Fille de Londres, livret de Pierre Mac Orlan et Armand Lanoux, mise en ondes de Georges Godebert, a lieu sur la Radiodiffusion Télévision française, Programme national, le 29 mars 1953 (Inathèque, ID Notice PHD99259912).

34 La Fin d’un homme, livret, tapuscrit et notes manuscrites, s.l., [1956], 34 p., aml, ML 09114/0027.

35 Ces dialogues sont prononcés tels quels lors de la mise en ondes, de sorte que le livret distribué aux comédiens correspond à l’avant-texte conservé.

36 Dans les années 1950, l’équipe permanente est composée de Georges Randax, Fernand Abel et Jean Velu  ; outre leurs activités à l’inr, Randax et Abel mènent une carrière d’acteur de théâtre – Sur Fernand Abel (1911-1998), éléments biographiques dans De Decker (Jacques), «  Mort d’un comédien à la drôlerie naturelle et au sens de l’absurde, Fernand Abel, un Roi à sa manière  », dans Le Soir, 14 avril 1998, [n.p.]

37 Entre 1947 et 1956, Fernand Abel a réalisé ou coréalisé Shanghai, Chambard & C°, Mollenard, Le Docteur Bertrand de Dunkerque, Le Sens du pardon  ; il a joué dans Le Journal tombe à cinq heures, La Piste du sud, Nord-Atlantique, Bauduin des Mines (Micro Magazine, Micro Magazine Télévision).

38 Pollet (Evelyne), «  Fernand Abel vous parle de Le Criminel était au rendez-vous et d’autres choses…  », dans Micro Magazine Télévision, n°  600, op. cit., p. 9. L’interview de Abel est publiée la semaine où est diffusée La Fin d’un homme, mais le metteur en ondes n’y fait pas allusion.

39 Deharme (Paul), Pour un art radiophonique, Paris, Le Rouge et le Noir, coll. Les Essais, 1930, p. 40-42  ; Bachelard (Gaston), «  Rêverie et radio  », dans La Nef, Nouvelle Équipe française, n°  73-74, op. cit., p. 15-20. Voir aussi les réflexions de Hugh Chignell, dans «  Intimacy  », Key Concepts in Radio Studies, Londres, Sage, 2009, p. 85-87.

40 Vingt siècles de Wallonie est une série de vingt-quatre épisodes mêlant le documentaire et la fiction  ; chaque épisode est introduit par les personnages de Pierre et de Jeanne. Voir «  Vingt Siècles de Wallonie. Une série d’émissions de O. P. Gilbert  », dans Micro Magazine Télévision, n°  508, 2 janvier 1955, p. 5 – La série a été écoutée comme en témoigne la centaine de lettres ou de cartes des auditeurs adressées à l’inr, dans Archives générales du Royaume, Archives de la Radiodiffusion Télévision Belge (rtb), 1928-1985, dossier n°  5925.

41 L’expression est de Umberto Eco, citée dans Baroni (Raphaël), Les Rouages de l’intrigue, op. cit., p. 178.

42 L’exemple est celui de la série télévisée Columbo dont le téléspectateur connaît l’ouverture, mais reste curieux de la soixantaine d’épisodes.

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Pour citer cet article

Référence papier

Christian Janssens, « De l’adaptation radiophonique dans les années 1950 »Textyles, 65 | 2023, 85-98.

Référence électronique

Christian Janssens, « De l’adaptation radiophonique dans les années 1950 »Textyles [En ligne], 65 | 2023, mis en ligne le 31 décembre 2023, consulté le 09 novembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/textyles/6498 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/textyles.6498

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