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Odeurs

Odeur des morts et esprit de famille (Anôsy, Madagascar)

Dominique Somda
p. 35-50

Résumés

Les Tanôsy du sud de Madagascar s’efforcent de réprimer l’expression, à la fois déplaisante et honteuse, de la mauvaise odeur des vivants. La puanteur cadavérique, elle, n’est ni éliminée ni masquée : aux funérailles, les morts sont longuement exposés, aucun parfum ne dissimule les miasmes de leur décomposition. C’est le devoir des participants (parents, voisins et amis) que de les endurer. Il est ici montré comment l’odeur des morts, toutefois, fait l’objet d’un traitement. La cuisine funéraire est une conversion sensorielle et une production symbolique : cuisinières et convives transforment la viande des bœufs, substituts du défunt, en mets savoureux. L’élaboration et la consommation des repas funéraires manifestent un changement du sens des célébrations : le chagrin de la perte fait place à la jouissance de la fête.

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Texte intégral

1Les Malgaches sont connus pour leur contact direct avec les morts. Les témoignages ethnographiques, les guides touristiques et les productions médiatiques ont rendu familiers les « retournements des morts », à l’occasion desquels des foules en liesse manipulent les restes défaits de proches depuis longtemps inhumés. L’horreur de la putréfaction et de son odeur, précédant ces étreintes joyeuses, a toutefois été soulignée. Pareil corps à corps est le prix de l’établissement de l’autorité des aînés et de la bénédiction ancestrale (Bloch 1971, 1982), de l’oubli des ancêtres et de l’assomption de l’individu (Graeber 1995). Dans certaines régions de Madagascar, terreur et répulsion n’exemptent pas du soin des chairs putréfiées (qu’il s’agit de meurtrir, de presser, de vider), se prolongeant des semaines ou des mois, parfois jusqu’à dessiccation complète des cadavres (Beaujard 1983 ; Feeley-Harnik 1991 ; Middleton 2000 ; Rahamefy 1997). Il sera ici montré que pour les Tanôsy, habitants de l’Anôsy, région montagneuse et rizicole à ’extrême sud-est de Madagascar, la contradiction du contact et de l’horreur est l’instrument efficace d’une transformation symbolique.

2David Howes (1986) oppose deux types de cultures : les unes odoriphobes, les autres odoriphiles. Les premières exècrent les mauvaises odeurs, qu’elles tâchent d’éliminer, quand les secondes valorisent toutes les perceptions olfactives. Les sociétés dont il considère les exemples se distinguent encore par l’intérêt ou le désintérêt qu’elles manifestent « à décoder la cryptographie de l’odorat ». Dans le premier type de culture, l’interprétation des signes olfactifs importe moins que leur maîtrise. La répression de la puanteur est associée à une dévaluation de la sensation olfactive. À cette aune, les Tanôsy semblent devoir être comptés au nombre des sociétés odoriphobes. La langue tanôsy ne distingue guère que deux types d’odeurs : les odeurs agréables et les mauvaises odeurs.

  • 1  Les deux premières qualifient respectivement l’urine et le pourri, la troisième le lait et le pois (...)

3Dan Sperber (1974) explique qu’il n’existe nulle part de taxinomie des odeurs. Comme il le remarque justement, les termes désignant ou qualifiant les odeurs sont généralement métonymiques. Il n’y a d’odeur que de ceci ou de cela. Puanteur et parfum seraient les seules catégories de base. Dans certaines sociétés, des principes de classification plus nombreux ont pourtant été décrits. Les Sereer Ndut du Sénégal distinguent cinq catégories d’odeurs perceptibles, chacune nommée, dans lesquelles sont répartis êtres vivants, plantes et objets (Dupire 1987)1. Des sociétés amazoniennes emploient les nombreuses classes d’odeurs dont elles disposent non seulement pour distinguer les espèces, mais aussi les tribus et les classes sociales. Les odeurs y expriment des règles de la vie sociale et même des principes cosmologiques (Classen 1990, 1992).

4En Anôsy, l’opposition du puant et de l’odorant autorise deux modes de discrimination. Les êtres vivants occupent, en premier lieu, une position singulière entre un pôle parfumé et un pôle puant. L’odeur est propre à une espèce : les bœufs ont une odeur de bœuf, les chiens une odeur de chien. Les différences entre ces émanations spécifiques ne sont pas de simples nuances, leur valeur d’agrément ou de gêne tendant toujours aux extrêmes. Les Tanôsy ne classent pas toutes les espèces : les bœufs (suaves) et les chiens (puants) peuvent être considérés comme les prototypes selon lesquels les autres espèces sont évaluées. La différence de régime alimentaire (herbivore ou carnivore) suffit généralement à rendre compte de l’opposition. L’odeur des hommes est jugée plus semblable à celle des chiens qu’à celle des bœufs.

5Il existe une autre manière de considérer les différences d’odeur, impliquant l’opposition du sec et de l’humide, du frais et du pourri. La puanteur vient de l’intérieur des corps, émanant de tous ses orifices, inhérente aux décompositions métaboliques. Au sein d’une espèce, des écarts sont dus à l’âge, au sexe, à l’état de santé. Les femmes sentent moins bon que les hommes, les personnes âgées et souffrantes sont plus nauséabondes que les individus jeunes et bien portants. Vieillesse et maladie hâtent la corruption des corps, augmentant leur fétidité. La porosité des femmes explique la puanteur que, bien plus que les hommes, elles sont réputées exhaler. La féminisation peut en effet être décrite comme l’ouverture causée par la succession des cycles menstruels et surtout des enfantements. D’une femme sur le point d’accoucher, on dit ainsi qu’elle est « encore garçon ». Les grossesses répétées accusent la différence entre hommes et femmes, jusqu’au point où les corps féminins sont à nouveau clos.

6Puer fait honte. Les pratiques ordinaires d’hygiène et de toilette sont l’effort de limiter l’expression des odeurs du dedans : les cheveux des femmes sont tressés, ceux des hommes coupés, et les poils – des uns et des autres – régulièrement épilés. Les soins sont adaptés aux idiosyncrasies particulières. Les femmes devraient être vigilantes à se baigner chaque jour, quand les hommes pourraient, sans encourir de déplaisantes conséquences, espacer leurs ablutions de plusieurs semaines. La lutte contre la puanteur n’est jamais un simple cosmétique, dissimulant la puanteur sous une parure agréable. Au contraire, le recours excessif aux parfums fait suspecter un état morbide et contagieux.

7La délivrance est l’occasion d’un strict contrôle de la puanteur. Elle fait l’objet d’une absolue réserve. Les femmes assistant la parturiente n’en disent rien, excepté si celle-ci s’est rendue indigne (en se débattant ou en geignant). Les matières excrétées (sang, placenta) sont soigneusement enveloppées et enfouies. Les femmes récemment accouchées, du fait de leurs plaies internes et des pertes qu’elles subissent, seraient particulièrement malodorantes. Leur puanteur est l’une des justifications aux longs mois de leur réclusion. Les femmes contraintes de sortir sont camouflées dans d’épaisses couvertures. De cette discrétion extrême, les exigences prophylactique (prévenir les hémorragies et l’insinuation du vent) et curative (réchauffer les corps) rendent compte pour une part. Mais la retraite des jeunes accouchées évite surtout la honte de l’odeur, insiste-t-on.

Les morts exposés

8L’odeur la plus honnie est sans conteste celle des cadavres. Des sensations éprouvées au contact de ceux-ci, l’olfaction est en outre la plus pénible. Un ami, revenant de funérailles où il était chargé de la préparation du tombeau, décrivit, murmurant, une expérience cénesthésique : grouillement des vers rampant le long des jambes, bourdonnement des mouches, spectacle affreux des corps putrides. Rien, cependant, ne valait la puanteur atroce. Grimaçant, il désignait les ongles de ses mains étendues et, saisissant son nez, se plaignait de l’impression rémanente. Le malaise que suscite la pestilence des morts ordinaires n’est toutefois pas comparable aux nuisances causées par les morts abandonnés. L’exemple d’un mort inconnu, découvert au bord d’une rivière, souligna cette différence. Le corps gonflé empestait, aussi refusa-t-on son transport au village : le village, curieux de l’événement, vint à lui. Les jours suivants, nombreux eurent à regretter le contact morbide, responsable, avançait-on, de tourments physiques et moraux. L’odeur était funeste : elle « abîmait l’esprit ».

9« Chien mort » est l’équivalent du français « charogne ». C’est une injure grave, lorsqu’elle n’est pas adressée en plaisanterie à des familiers. Le devenir des chiens (ni enterrés ni consommés mais seulement évités) est le comble de l’ignominie. L’allusion à l’existence de revenants suscite, chez leurs proches, une honte plus grande encore. Quittant le tombeau après l’inhumation, leur apparence reste inchangée : leur puanteur seule trahit un état cadavérique. La possibilité de leur engendrement (ressusciter est une tare congénitale) fait l’objet d’une crainte obsessive. La dissipation de leur puanteur serait, en outre, délétère à la communauté endeuillée. Les cadavres devenus charognes ne sont pas seulement déplaisants (pour ceux qui les rencontrent) ou outrageants (pour leur famille). Les morts abandonnés répandent des miasmes non traités que l’on ne peut tolérer.

  • 2  Les funérailles auxquelles j’ai participé ont duré de trois à quatre jours. Cette durée est consid (...)

10La répression de l’odeur des morts est, selon Howes, un critère essentiel révélant la dominance d’un caractère odoriphobe. Dans les exemples qu’il retient, maints procédés assurent la dissimulation de la puanteur : les corps sont isolés dans des cercueils hermétiquement scellés, les émanations combattues par l’usage d’encens. L’abolition de cet indice de putréfaction protège les vivants de l’influence néfaste des défunts ou préserve l’image idéale des ancêtres. La gestion de l’odeur des morts est le point où achoppe la comparaison avec l’exemple tanôsy. Si l’invisibilité des morts est toujours préservée (les cadavres sont présentés aux visiteurs recouverts d’un drap), les funérailles sont l’occasion d’une exposition olfactive des cadavres. La puanteur cadavérique contribue à l’établissement du contexte funéraire, comme le parfum participe de la séduction (Gell 1977) : elle en constitue l’efficacité. Aucun parfum ne serait employé dans la toilette mortuaire ; le formol l’est avec parcimonie, au motif de son coût élevé. Les cadavres ne sauraient être trop promptement enterrés. Ils finissent ainsi toujours par empester2. Soutenir la puanteur tiendrait du devoir filial. « L’odeur de nos morts est sainte », fait-on valoir. Les funérailles assurent sa diffusion graduée.

Les perspectives olfactives

11Dans l’espace funéraire, les individus sont disposés en vue de perceptions distinctes. Tous n’ont pas à souffrir la même proximité avec le cadavre. L’âge et le sexe déterminent l’assignation des perspectives. Un contexte sensoriel unit dans un égal effort les participants de chaque catégorie : femmes âgées, proches parents du défunt, cuisinières, hommes, jeunes et enfants. Les positions relatives sont distribuées en cercles dont le cadavre constitue le centre commun. Les funérailles éprouvent l’endurance des participants : partir trop vite serait démériter. Plus faible est la distance séparant du cadavre, plus est forte l’obligation à résister.

  • 3  « La tâche des femmes-sentinelles est considérable », répète-t-on ainsi hors du contexte funéraire (...)

12À l’intérieur de la maison cérémonielle, les femmes-sentinelles font face au mort. Ces femmes âgées, protégeant le défunt, sont les plus affectées par les odeurs du cadavre. Leur résignation est exemplaire3. Elles demeurent silencieuses et gardent les yeux clos. Les femmes-sentinelles tentent, accusent certains, de se préserver de l’invasion des vapeurs fétides. Elles n’hésiteraient pas à placer, dans leurs oreilles et leurs nez, de petits bouts d’étoffes ou de coton. Au plus près du cadavre, leurs corps seraient barricadés et leurs sens comme en sommeil. Ces soupçons témoignent du caractère insoutenable du contact auquel elles consentent. Les femmes-sentinelles sont les emblèmes du travail funéraire.

13Les parents du défunt sont installés dans une pièce attenante à la chambre mortuaire, dans une case voisine ou à l’entrée de la maison cérémonielle. Accueillant les visiteurs nouvellement arrivés, ils écoutent calmement leurs condoléances solennelles, consignent avec scrupule les contributions. Après l’intense activité des soins au mourant et de la préparation du cadavre, ils sont, l’espace domestique une fois ouvert aux étrangers, repliés en une certaine passivité. C’est l’honneur des maîtres des morts, dit-on, d’être ici plus patients qu’agents.

  • 4  Les enfants des femmes (zanak’ampela) sont les descendants des filles et des sœurs des membres du (...)

14Aux alentours de la maison cérémonielle règne un certain affairement. Des bœufs sont abattus par les « enfants des femmes4 ». Les animaux sont dépecés à l’extérieur et les morceaux sont, avant d’être distribués, entreposés dans une maison ou une pièce affectée à cet usage. Une cuisine est aménagée pour l’occasion, orientée à l’ouest, parfois accolée à la maison cérémonielle. Là, de jeunes femmes préparent les repas. Les hommes (à l’exception des porteurs de viande) en sont généralement absents. Aux funérailles, les jeunes femmes ne sont jamais de simples convives. Après avoir quelques instants pleuré auprès du cadavre, elles entreprennent un travail harassant. Les pagnes ternes et délavés dont elles ceignent leurs reins – les mêmes qu’elles revêtent dans leur ménage quotidien – sont les insignes de leur fonction, et non des vêtements de deuil. Les plus jeunes femmes assurent les corvées : elles puisent l’eau, nettoient la viande, font la vaisselle.

15Face à la maison cérémonielle dont les portes restent ouvertes, les hommes, assis sur des bancs ou des nattes, attendent, au premier jour ou au second, d’être reçus par l’un des maîtres du mort. Les hommes se répartissent suivant la hiérarchie, la provenance ou l’affinité, à une même distance du cadavre. Les premières heures sont les plus silencieuses. Elles ne sont pas austères : les conversations (débats politiques, échanges de rumeurs, badinages) n’ont pas la gravité des discours formels offerts aux parents affligés.

16Les jeunes hommes se tiennent en périphérie de la scène funéraire. Ils se montrent peu assidus, surtout le premier jour. Dispensés des visites aux proches parents, dont leurs aînés ont la charge, ils ne sont astreints à aucune tâche. Aussi vont-ils à leur gré, observant notamment la découpe des bœufs. Ils quittent fréquemment l’espace funéraire pour vaquer à leurs occupations ordinaires. Les enfants, eux, n’interrompent pas leurs jeux, proposant parfois à la vente quelques friandises, non loin de la maison cérémonielle. Les plus jeunes, suivant leurs mères dans les premières heures des funérailles, sont vite confiés à leurs frères et sœurs.

17Hors de l’espace villageois, les fossoyeurs, aussitôt le décès constaté, se chargent de la préparation du tombeau (qu’il faut aménager, consolider, réparer). Comme les hommes préparant la viande, les fossoyeurs sont recrutés parmi les enfants des femmes. Ils affrontent au tombeau la puanteur des morts récents – au mieux, ils ont affaire à l’atmosphère humide et moisie des morts anciens.

De l’odeur aux saveurs

18La consommation alimentaire constitue essentiellement la célébration de la mort. L’incapacité à préparer les repas funéraires est aussi honteuse que le manque de tombeau. La provision d’ustensiles (marmites, vans, verres et couverts) et de vivres (bœufs, riz, rhum) est une dépense à laquelle chacun doit consentir. La transformation culinaire est un médium efficace : la transposition des odeurs en saveurs libère la parole. Le sarcasme est une tentation à laquelle on ne résiste guère si l’on traverse l’espace funéraire d’un village étranger. Les participants diffèrent néanmoins leurs plaintes : durant les funérailles, le secret du cadavre (maintenu à l’abri des regards) retient leurs mots. La viande de bœuf fait l’objet de transactions explicites, et son accommodement de commentaires plus nombreux que les chairs du défunt.

19Quand le mort entre dans la maison cérémonielle, un bœuf est tué et immédiatement cuisiné. C’est un grand mâle prélevé dans le troupeau des organisateurs (ou acheté par eux). Une explication du terme « fampindray » me fut proposée, qui jouait de son étymologie supposée : il serait la contraction de l’expression « ampiana indray » (« encore un »). La mort du bœuf répéterait celle du défunt. Une homologie entre le bœuf et le cadavre est clairement établie. Aux funérailles, les morts sont mangés dit-on. Pour rendre compte de la substitution du cadavre, d’aucuns citent un épisode historique : les morts eux-mêmes auraient été consommés, autrefois. La population ayant crû, l’obtention d’un nombre suffisant de parts s’avérait impossible ; les ancêtres décidèrent de substituer à la chair des défunts la viande des bœufs qu’ils abattraient désormais. Cette explication se retrouve dans plusieurs régions de Madagascar. Louis Molet proposa une lecture littérale de propos comparables recueillis en Imerina et en pays betsileo (Molet 1956). Il les tenait pour preuves de pratiques nécrophages. Maurice Bloch a montré que ces discours n’attestaient en rien d’une pratique disparue ; il en explora les significations métaphoriques dans le contexte merina (Bloch 1985).

20De la continuité entre perception olfactive et consommation alimentaire, l’attribution des tripes est assez exemplaire. Cette viande n’empesterait pas moins que le cadavre. Les tripes ne font pas honneur et l’on hésite à en offrir aux étrangers. Elles sont, par différence, la seule viande impartie aux femmes-sentinelles : une mauvaise dentition les vouerait à la consommation de cette pièce tendre, ironise-t-on. En fait, elle leur échoit comme un devoir, à l’instar de la proximité du cadavre. La viande consommée aux funérailles est, dans d’autres régions de Madagascar, appelée « viande mauvaise » (Molet 1956), parfois jugée « amère » (Mangalaza 1998). Elle se distingue en Anôsy de la « viande parfumée » – préparée et consommée après les funérailles par les proches du défunt (Colin 1943) – et de la « bonne viande » (Randriansolo 1989) consommée lors des célébrations heureuses (mariages, inaugurations de maisons cérémonielles, circoncisions). De même, le riz funéraire embaume rarement : il n’est jamais estimé assez doux.

21Si l’habileté des cuisinières (assurant une juste cuisson, maintenant les proportions) est reconnue, leurs apprêts ne semblent pas destinés à stimuler le désir. Elles n’ajoutent aucun aromate (ni ail, ni gingembre, ni poivre), pas (ou peu) d’huile ou de concentré de tomates. Le bœuf est bouilli, à peine salé. La cuisine funéraire diffère à la fois de la cuisine quotidienne, pour laquelle une cuisson en daube est préférée, et de la cuisine festive, plus riche, requérant souvent une friture. Pour celle-ci, du reste, des viandes réputées plus grasses que le bœuf sont choisies : mouton, volaille et surtout porc. L’art des cuisinières, aux funérailles, est toutefois de rendre comestible le puant. L’odeur du cru et du pourri indispose, elle est parfois considérée comme l’indice d’une toxicité. Les tripes avant leur cuisson sont ainsi soigneusement vidées et lavées dans une eau vive.

  • 5  La parenté « à plaisanterie » est ici une alliance entre membres de deux lignages impliquant insol (...)

22Aucun participant n’est exclu du repas funéraire, dont la vertu intégrative est louée. Il semble pourtant consister en l’épreuve de leur différence. De petits groupes de commensaux sont formés. Des parts de viande et des mesures de riz sont données, crues, aux parents n’habitant pas le village (des ustensiles leur sont également fournis) et à des voisins (préparant chez eux leurs repas). Les autres participants reçoivent les repas préparés à la cuisine principale. L’attribution des parts de viande (crues et cuites) distingue les convives. L’étiquette ne varie pas : les fossoyeurs reçoivent la langue, le chef de lignage la culotte, les jeunes hommes la tête, les « parents à plaisanterie5 » la poitrine. Les discussions, dans lesquelles la répartition est décidée, sont l’occasion d’une réévaluation des relations de parenté. La consommation du bœuf-substitut est interdite au conjoint du défunt et à ses enfants. Leurs repas, préparés en un foyer séparé, sont plus insipides encore que ceux des autres convives. Des mets délicieux ne conviendraient guère aux parents affligés, précisa une cuisinière extrayant d’une boîte les maigres sardines destinées à la veuve. Elle veillait seulement à obtenir un riz suffisamment sec, pour ne pas ajouter à l’effet amollissant du chagrin. Les individus, déjà disposés dans l’espace en vue d’une perception, sont orientés par la distribution des repas.

Des transformations relationnelles

23La substitution du cadavre par le bœuf modifie la configuration initiale. Les positions de consommation sont moins nombreuses que les perspectives olfactives. En dépit de la fragmentation induite par les règles de distribution des repas, l’effet d’ensemble est la coalescence des catégories de participants en deux points : la scène funéraire semble réduite au face-à-face des organisateurs et des convives.

  • 6  Par l’expression « feu ancestral », on entend l’ensemble des convives.

24La rhétorique funéraire souligne toujours une opposition. Les discours d’accueil, précédant les repas aux occasions festives, formulent l’excuse de ne pouvoir offrir aux amis et parents assemblés qu’un peu de riz et d’eau. Les mets présentés sont pourtant plus variés et mieux accommodés que ceux des funérailles : il s’agit, alors, d’éviter la honte de donner trop peu. Aux funérailles, par différence, les hôtes sont des proies dont la voracité est constamment blâmée. « Ceux qui assistent aux funérailles sont heureux : ils n’achètent pas de viande pendant une semaine. Si l’on n’a pas de bœuf gras à offrir, le feu ancestral6 s’éteint vite » : l’ironie de ces mots témoigne d’un sentiment commun.

25Les convives, eux, pestent inévitablement contre les cuisinières en retard. Le repas à peine entamé, ils signalent leur satiété. Il ne faut pas se faire prier, concèdent-ils cependant, et manger sans rechigner. Entre les repas, ils n’hésitent pas à manifester leur appétit en se délectant d’amuse-gueules, qu’ils en aient fait provision ou se les procurent au lieu même des funérailles. Ces collations contrastent avec les repas fades servis par les organisateurs : arachides grillées ou caramélisées, achards de légumes bien assaisonnés, biscuits ; une partie de la viande crue distribuée sert à confectionner des brochettes grillées et des bouchées frites délicieusement parfumées. Les friandises ne sont pas partagées, mais consommées en petits groupes. À la consommation du rhum de fabrication locale distribué par les organisateurs, ils ajoutent s’ils en ont les moyens celle d’alcools de meilleure qualité. Le plaisir éprouvé dans cette commensalité restreinte efface le désagrément du repas funéraire.

26Deux tendances contradictoires sont en outre réalisées, produisant un véritable chassé-croisé : une force centripète attire les parents au centre (vers le cadavre), une force centrifuge détourne les femmes et parents utérins (vers la fête). Les femmes et les parents utérins étaient les plus exposés à la puanteur – celle des morts (comme les femmes-sentinelles dans la maison cérémonielle et les fossoyeurs au tombeau) et celle de la viande crue (comme les jeunes femmes et enfants des femmes participant à la préparation de la viande). Dans le repas funéraire, les proches parents prennent place au plus près du cadavre : ils font désormais corps avec lui. Les funérailles constituent une dispendieuse obligation. Remplacé par le bœuf, le mort est symboliquement consommé. Ses proches le sont plus directement, en raison de l’excès des convives. Les proches parents déplorent sans cesse leur incontinence dont les maux de ventre, du reste, avertissent. L’interdit du bœuf-substitut, auquel les organisateurs se soumettent, souligne l’impossibilité de la confusion des deux positions. L’amaigrissement des proches parents témoigne de leur vertu.

27Si les femmes et les enfants des femmes soulageaient, dans un premier temps, les proches parents de la peine de l’odeur, ils semblent désormais ambivalents. Affliction et jouissance sont opposées dans le vis-à-vis des convives et des organisateurs. Une même opposition semble ressortir des différences observées entre femmes-sentinelles et fossoyeurs d’un côté, jeunes femmes et enfants des femmes participant à la préparation de la viande de l’autre.

28Femmes-sentinelles et cuisinières paraissent ainsi des figures contraires. Les femmes-sentinelles, « presque mortes », sont au-delà de la sexualité (« à nouveau vierge, à nouveau mademoiselle ») et de la consommation alimentaire (ces « édentées » sont l’antithèse de prédateurs). La passivité perceptive des femmes-sentinelles contraste avec l’activité transformative des cuisinières, fournissant à l’assemblée un substitut au cadavre. La maison cérémonielle où les femmes-sentinelles veillent les morts est appelée « maison froide », opposée au feu nourri des cuisinières. La cuisine principale est toujours animée. Cet entrain évoque l’atmosphère des rizières aux jours de repiquage, lorsqu’une vingtaine de femmes travaillent ensemble. Leurs propos, parfois grivois, sont émaillés de gestes bouffons. Les funérailles sont l’une des occasions où les jeunes femmes manifestent le moins de pudeur. Ces femmes en âge d’être mère semblent davantage du côté de la consommation des convives que de la défense impavide des femmes-sentinelles.

29Cette disjonction est seulement apparente. Femmes-sentinelles et fossoyeurs font subir aux proches parents un véritable chantage. La diligence manifestée à leur endroit semble le gage de leur dévouement. Les cuisinières sont toujours attentives à faire servir leur repas en premier, un surcroît d’alcool et de café leur est accordé. Des compensations spéciales leur sont également octroyées. Les femmes-sentinelles perçoivent ainsi la recette d’une vente des linceuls offerts aux organisateurs. Les exigences des fossoyeurs ne sont pas moindres. Ainsi, j’assistai à une scène où ceux-ci menaçaient d’abandonner la préparation du tombeau si des bœufs ne leur étaient pas remis. Un ami, en une autre occasion, se vantait d’avoir obtenu de son oncle maternel une somme considérable au motif de la présence d’un mort récent au tombeau où il devait entrer.

30D’abord auxiliaires des proches du défunt, femmes et parents utérins se font les complices des convives dont ils égalent l’avidité. Créateurs du parfum qui compense la puanteur du cadavre, ils sont eux-mêmes sujets à conversion. Les simples visiteurs, moins atteints que les proches parents, femmes et enfants des femmes par la puanteur du cadavre, se résignent, un temps, à l’austérité du repas. Ils transforment, pour finir, le repas funèbre en festin. Les jours passant, ils tendent à se confondre avec les jeunes hommes, participants initialement les plus extérieurs à la scène funéraire. C’est à un renforcement de l’opposition des convives et des organisateurs qu’on assiste alors.

La victoire de la fête

31Les veillées attirent un grand nombre de jeunes et d’enfants. Aucune des occupations diurnes ne les disperse plus. En dehors des bals exceptionnellement organisés par la commune, les funérailles sont les seules occasions de rassemblements nocturnes. Musiciens et chanteurs animent l’espace funéraire. Ces divertissements, simples intermèdes durant le jour, sont continus la nuit venue. Les funérailles rendent audacieux. Ceux qui s’y rendent avouent en escompter des plaisirs : les buveurs se réjouissent de l’ivresse à venir, les séducteurs de possibles conquêtes. Veilles et ivresses répétées contribuent à faire de la dernière nuit l’acmé des funérailles. L’ordre des perspectives est alors défait. Les participants, négligemment étendus ou adossés (aux arbres, aux voitures, aux maisons), s’assemblent en petits groupes : ils s’observent, se raillent, s’interpellent parfois. Les convives se détournent de la maison cérémonielle. Le cadavre n’est plus au centre de l’espace funéraire.

32Les danses sont des occasions joyeuses et sensuelles. Les femmes, pendant le jour, forment inopinément des cortèges entraînants. Aux veillées, la cuisine se transforme en aire de danse. Les jeunes femmes chargées d’animer le foyer sont ravies du spectacle qui les tient éveillées. L’apparition des danseurs de belamaky (un rythme tanôsy) suscite une grande excitation. Filles et garçons osent des figures séductrices. Les adultes s’avouent d’ordinaire embarrassés de s’adonner à cette danse trop suggestive. Aux funérailles, ils se joignent aux jeunes danseurs. Certains, néanmoins, jugent le belamaky démoniaque : les danseurs « attaqueraient » le cadavre. Lors d’une veillée organisée par une famille très pieuse, une troupe de belamaky fut ainsi violemment repoussée des abords de la maison cérémonielle. Les danseurs se déplacèrent à l’extérieur de l’ensemble résidentiel, suivis de dizaines de convives.

33Les organisateurs s’indignent toujours de l’assimilation des funérailles à de simples fêtes. Les plus sévères seraient protestants. Mœurs chrétiennes et païennes sont constamment opposées. L’ennui des funérailles organisées par des adeptes trop fervents est déploré. Toutefois, pratiques chrétiennes et païennes sont généralement alliées : « Les chrétiens boivent du café, tandis que nous dansons », accordait une amie. La participation des chrétiens est soumise à restriction. Les chefs de lignages chrétiens interdisent notamment la consommation excessive d’alcool. L’affrontement des chrétiens et des païens répète l’opposition des organisateurs et des convives. Aux veillées, les chanteurs des chorales chrétiennes (des deux sexes et de tous âges) se placent ainsi du côté des proches du défunt : installés devant la porte de la maison cérémonielle, entre les femmes-sentinelles et les hommes, ils offrent au cadavre un supplément de protection.

34Chacun s’assure d’être dans son rôle. Les parents semblent ici plus que consentir à l’agression des convives, veillant à les attirer en nombre. Ils sont attentifs à disposer les appâts (viande et alcool), préoccupés du confort (installant abris, bancs et éclairages), prévoyants dans l’animation (invitant les troupes de danseurs et de chanteurs, s’assurant de la sonorisation). Quant aux convives, ils justifient la violence de leur consommation par la nécessité d’une consolation. Quand les jeunes hommes s’invitent à la lutte, enhardis par les acclamations de l’assistance et les danses des jeunes filles, c’est, disent-ils, pour distraire les proches de leur douleur. Les moments choisis sont ceux où elle est le plus susceptible de se manifester : à la sortie du corps de la maison cérémonielle, lorsque des femmes hurlent à défaillir ; au tombeau, avant et après la mise en terre, où des hommes entonnent des plaintes déchirantes.

35La transformation du dispositif funéraire avait été décrite comme un mouvement des femmes, parents utérins et simples visiteurs vers la périphérie, renforçant l’affrontement des convives et des organisateurs. Il s’agit, finalement, d’un déplacement du centre : la fête l’emporte sur le chagrin. L’œuvre des convives est de changer la célébration lugubre en occasion festive. Ils n’ignorent pas le service qu’ils rendent, ce faisant, aux parents affligés.

Expulser la mort

36Par une ultime translation, la scène funéraire est projetée hors de l’espace villageois. Le tombeau devient le centre des célébrations et le principal foyer de puanteur. La réduction engagée est sur le point d’être achevée : ceux qui se rendent au tombeau sont les deux parties extrêmes : les proches parents d’une part, les hommes (jeunes et vieux, à l’exclusion des enfants) de l’autre. Les femmes ne s’y déplacent guère. Leur présence est proscrite ou limitée en de nombreux sites funéraires ; la vision des tombes ouvertes est souvent interdite à celles des jeunes femmes qui n’ont jamais été mères. Amis et alliés des organisateurs prennent la relève des parents utérins, se chargeant du transport et de l’inhumation du défunt. Le service des femmes-sentinelles, des cuisinières et des enfants des femmes est accompli. La maison du défunt est vidée. Les visiteurs se dispersent une fois le mort enseveli.

37Les proches parents reprennent possession de l’ancienne scène funéraire, redevenant simple espace domestique. Il s’agit, en outre, de signifier la séparation de la maison et du tombeau. Avant de franchir le seuil de la maison du défunt, les proches parents, de retour du tombeau, ont à prévenir l’âme du mort de l’impossibilité du retour. L’avertissement concerne aussi les esprits prédateurs. Ceux-ci hantent d’ordinaire les bois entourant les tombeaux. Lors des funérailles, ils sont également redoutés au village. Les parts de viande emportées par les convives éloigneraient certains de ces esprits (attirés par leur odeur) de la maison des organisateurs. La dernière nuit des funérailles est encore destinée à les repousser. Le dîner est alors plus intime que les précédents repas : les hôtes ne sont plus bienvenus. Seuls des importuns se risqueraient encore à réclamer leur part.

38Les parents du défunt sont eux-mêmes transformés. L’expulsion de la mort est, pour eux, un retour progressif au parfum. Les célébrations achevées, ils consomment la viande parfumée, opposée à la mauvaise viande du repas funéraire. Leur association à la puanteur du cadavre est entièrement dissoute lorsqu’ils quittent le deuil. Celui-ci oblige, des semaines durant, à l’inversion des règles de l’hygiène : les vêtements ne sont pas lavés, les hommes cessent de se raser et les femmes s’abstiennent d’oindre leurs cheveux d’huile parfumée. La levée du deuil est signifiée par l’application d’huile, par une aînée, aux femmes présentes. Les vêtements de deuil sont enfin plongés dans l’eau des rizières.

Un procès de substitution

39La puanteur est un signe de décomposition dont il s’agit, pour vivre, de se débarrasser. Le temps des funérailles cependant, les Tanôsy font le choix de la supporter. Le cours de la dégradation (la putréfaction du cadavre et l’aggravation de la peine des proches) est infléchi par la substitution du cadavre. La cuisine du bœuf enclenche la transformation. Le développement de l’action funéraire peut être divisé en trois phases : les participants absorbent, aux positions qui sont les leurs, les émanations nauséabondes du cadavre ; le bœuf est abattu et sa viande distribuée aux convives ; le plaisir de la consommation remplace la contrition initiale. On se gardera de présenter un déroulement trop linéaire. Des va-et-vient sont sans cesse accomplis, témoignant de la tension qui subsiste entre les deux pôles du parfum et de la puanteur, de la fête et du chagrin. On ferait valoir, à juste titre, la persistance d’un contraste entre le jour et la nuit. L’opposition des première et deuxième phases renvoie, en un sens, à celui-ci. Les nuits manifestent la victoire de la fête quand les journées sont plus empreintes de tristesse. Tout se passe comme si, les jours passant, l’esprit de la nuit gagnait sur celui du jour.

40Le procès des funérailles est le déplacement du mort du pôle puant au pôle odorant, celui du bœuf. Le fumet de la viande ne constitue pas seulement un écran, une diversion ou un appât. Si l’apparition du bœuf ne fait pas disparaître le cadavre, l’équivalence du mort et du bœuf (stipulée par les organisateurs) est bien mise en acte par le repas funéraire. Le mode de distribution des repas (notamment l’interdit du bœuf-substitut aux proches et l’attribution des tripes aux femmes-sentinelles) comme leur appréciation (le dégoût que ne manquent jamais de manifester les convives) réalisent l’assimilation. En introduisant de nouveaux modes de cuisson (grillades, fritures) et de consommation (en dégustant les parts de viande crue qu’ils reçoivent entre les repas), les convives modifient la valeur du bœuf.

41Aussi, le passage de la puanteur au parfum n’est pas seulement l’expression métaphorique d’un retour à la vie. La viande de bœuf est la matière sur laquelle s’exerce la volonté des participants de convertir les funérailles en célébration joyeuse, occasion de danses, d’ivresse et de sexualité. L’accomplissement de leur dessein est, de fait, le recouvrement des conditions de la vitalité. Les parents, à l’initiative de la substitution, recueillent les bienfaits des changements opérés par les convives.

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Notes

* Je remercie Maurice Bloch pour ses remarques et suggestions.

1  Les deux premières qualifient respectivement l’urine et le pourri, la troisième le lait et le poisson ; la quatrième rassemble les odeurs acides et désagréables, la cinquième, enfin, les odeurs agréables.

2  Les funérailles auxquelles j’ai participé ont duré de trois à quatre jours. Cette durée est considérée comme typique. Les célébrations peuvent être écourtées (si l’on est trop pauvre) mais sont plus souvent prolongées (dans l’attente de parents absents ou d’un jour faste). La décomposition des cadavres est souvent hâtée par une grande chaleur.

3  « La tâche des femmes-sentinelles est considérable », répète-t-on ainsi hors du contexte funéraire, pour dénoter une puanteur à laquelle on ne peut se soustraire.

4  Les enfants des femmes (zanak’ampela) sont les descendants des filles et des sœurs des membres du patrilignage. Astreints à des corvées dans la vie quotidienne, ils doivent un service rituel dans un grand nombre de célébrations.

5  La parenté « à plaisanterie » est ici une alliance entre membres de deux lignages impliquant insolence lors des rencontres quotidiennes, outrage et brutalité dans le contexte rituel. Si la relation de « plaisanterie » entre ces alliés (pifanopa) n’est pas toujours symétrique, une obligation d’assistance mutuelle est généralement reconnue.

6  Par l’expression « feu ancestral », on entend l’ensemble des convives.

* Je remercie Maurice Bloch pour ses remarques et suggestions.

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Pour citer cet article

Référence papier

Dominique Somda, « Odeur des morts et esprit de famille (Anôsy, Madagascar) »Terrain, 47 | 2006, 35-50.

Référence électronique

Dominique Somda, « Odeur des morts et esprit de famille (Anôsy, Madagascar) »Terrain [En ligne], 47 | 2006, mis en ligne le 15 septembre 2010, consulté le 06 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/terrain/4240 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/terrain.4240

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Auteur

Dominique Somda

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