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Le futur sera étrange ou ne sera pas

Au pays des murs-vivants

Vers un futur habitable ?
Laying bricks for liveable futures: experimenting with living beings for tomorrow’s building
Juliette Salme
p. 198-213

Résumés

À partir d’une enquête ethnographique réalisée auprès d’architectes membres d’un laboratoire de mycologie amateur en Belgique, cet article porte sur les manières dont la question du futur se donne constamment à voir dans leurs pratiques de fabrication de matériaux alternatifs élaborés à partir de mycélium de champignon. Cette contribution décrit comment, pendant et en amont de moments de valuation, ce collectif cherche à rendre présent à la fois discursivement et matériellement différentes versions de l’avenir, dans lesquelles l’intégration des champignons au domaine de la construction est rendue acceptable.

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Texte intégral

Au pays des murs-vivantsAfficher l’image
Crédits : Benjamin Rouzaud 2023 - HEAR
  • 1 Eleanor Cummins, « Your Next House Could Be Made of Mushrooms. A Delicious Development in Sustainab (...)
  • 2 Ed Cunningham, « Could Cities Soon be Made of Mushrooms ? », Time Out, 3 mai 2022.
  • 3 Anthony Morel, « Et si le futur c’était la maison… en champignons ? », BFM avec RMC, 10 mai 2021.
  • 4 La formulation de ce terme revient à Phil Ross, co-fondateur de la société MycoWorks en 2013, l’un  (...)

1Habitera-t-on demain dans des maisons faites en champignon ? C’est la question que posait en mars 2020 le magazine Architectural Digest, dans un article intitulé « Your Next House Could Be Made of Mushrooms1 ». Des interrogations similaires sur les promesses d’applications du mycélium dans les domaines de l’architecture et du design surgissent périodiquement dans les médias : Time Out, par exemple, titrait en mai 2022 « Could Cities Soon Be Made of Mushrooms ?2 » tandis que, un an plus tôt, c’est même la chaîne française d’information en continu BFM TV qui consacrait une capsule vidéo à se demander « Et si le futur, c’était la maison… en champignon ?3 » Des avancées dans le traitement de la dépression à partir de la psilocybine, substance contenue dans les champignons hallucinogènes, à la dépollution des sols à l’aide de certaines espèces fongiques dans le cas de la mycoremédiation, la figure du champignon comme allié des projets humains connaît ces dernières années un certain succès – et le secteur de l’architecture ne fait pas exception. Si les développements de cette « mycotecture4 » semblent aujourd’hui s’accélérer et toucher un public plus large que celui des initiés, notons que cela fait une bonne décennie que des laboratoires de recherche se penchent sur la question. En 2014, par exemple, l’équipe Redhouse Architecture envisageait déjà, en collaboration avec la NASA, des constructions en champignon comme solution à explorer pour d’éventuelles futures habitations sur Mars.

  • 5 Ce laboratoire est l’un des principaux sites de l’ethnographie réalisée dans le cadre de ma thèse d (...)
  • 6 Pour une définition plus détaillée de la biologie do-it-yourself, également dite « de garage », voi (...)

2Des bâtiments construits à partir de champignons, donc : l’idée a de quoi surprendre à priori.
Pour beaucoup, cette perspective revêt même l’apparence de la pure (science-)fiction. Pourtant, une fois ôté le vernis spectaculaire des formulations utilisées dans la presse, elle n’est ni fantaisiste ni fictionnelle. À première vue, rien ne distingue non plus les expériences auxquelles s’adonnent les architectes du collectif Bento de celles que l’on peut observer en poussant la porte de n’importe quel autre laboratoire. Flux laminaire, autoclave, microscopes : autant d’instruments bien éloignés de leur discipline de prédilection et avec lesquels ils ont dû se familiariser, afin de pouvoir entamer leurs recherches sur ce qu’ils appellent des matériaux de construction « vivants ». Installé en périphérie de la région Bruxelles-Capitale, le laboratoire5 dont ces architectes sont des membres actifs s’inscrit dans ce qui s’apparente à de la biologie do-it-yourself6. Dans l’optique de démocratisation de la science chère à cette mouvance, ce laboratoire voit se croiser et collaborer amateurs comme professionnels, designers comme microbiologistes. Ce sont surtout les questions environnementales qui animent les membres de cet espace particulier, dont la majorité des expérimentations s’est rapidement articulée autour du mycélium, soit la partie végétative et essentiellement souterraine des champignons.

  • 7 Pour un aperçu de leur genèse et une étude de cas reprenant leurs grands principes, voir par exempl (...)

3Il est difficile de situer précisément l’émergence des pratiques alliant design et mycologie7 pour fabriquer des artefacts alternatifs et écologiques, mais nous pouvons considérer que c’est un petit peu avant le tournant des années 2010 que sont apparues et qu’ont été médiatisées les premières concrétisations, telles que les substituts aux emballages en plastique ou en polystyrène. Ces activités sont à mettre en lien avec le développement une quarantaine d’années plus tôt d’une « mycologie DIY », liée au mouvement psychédélique, qui a popularisé le fait de cultiver à domicile des champignons, d’abord psilocybes. À partir des années 2000, ce mouvement s’est répandu, notamment via l’effort de vulgarisation et les propositions d’applications originales des champignons proposées par Paul Stamets (2005), considéré comme précurseur du mouvement et dont les ouvrages restent des références en la matière (Steinhardt 2018).

  • 8 Chiffres de 2020 fournis par Febelcem, la fédération de l’industrie cimentière belge.

4C’est dans cette lignée que s’inscrivent les activités du laboratoire, fondé par une designer textile et un mycologue amateur travaillant à l’élaboration de cuirs fongiques, qu’ont rejoint les membres de Bento. Le mycélium est au cœur du projet car il présente de nombreux avantages : les champignons sont déjà présents aux alentours du laboratoire, ainsi la production est locale et biosourcée. Le processus de fabrication est quant à lui peu gourmand en ressources et en énergie, et l’alimentation des champignons est constituée de déchets produits par les industries agricoles. Les recherches sur les mycomatériaux portées par le collectif d’architectes partent en effet du constat suivant, aujourd’hui bien admis : le secteur de la construction est, à l’échelle mondiale, l’un des plus polluants. C’est le béton, et plus précisément l’un de ses principaux composants, le ciment, qui est en question : son extraction et sa fabrication sont particulièrement énergivores, nécessitant notamment une cuisson à plus de 1 400 °C et produisant beaucoup de CO2. La production de ciment représente à elle seule 4 à 7 % des émissions de gaz à effet de serre. En Belgique, elle représente 3,6 %, soit 3,9 millions de tonnes d’émissions8. De plus en plus de corps de métier dans le domaine de la construction cherchent donc, désormais, à recycler ces matériaux ou à les remplacer, en tout ou en partie, dans leurs chantiers.

  • 9 Les prénoms ont été modifiés.
  • 10 Certaines grandes enseignes du luxe et de la mode commencent à faire appel à elles. Relevons, en Eu (...)

5C’est le cas de Loïc, Thomas et Xavier9, architectes de métier qui, depuis trois ans, ont décidé de complètement revoir leur manière de travailler en développant parallèlement à leur activité professionnelle principale une recherche sur des matériaux alternatifs et durables. Sur le papier, leur projet répond ainsi aux impératifs de la circularité : les matériaux produits localement sont voués, en bout de chaîne, à retourner à la terre où ils se décomposeront sans difficulté. Le programme est donc prometteur. Toutefois, il convient de noter qu’en dehors de la production de certains matériaux spécifiques et de réalisations à petite échelle, des dalles ou des panneaux par exemple, le développement de cette mycotecture en est encore, pour l’essentiel, au stade expérimental. Si certaines sociétés sont parvenues à déposer des brevets et à relever le défi de la scalabilité10, pour d’autres il reste d’importants efforts à faire avant d’asseoir une filière propre au mycélium ou d’envisager la commercialisation de certains produits, dont le processus de stabilisation reste à acquérir afin de répondre aux normes en vigueur. C’est le cas de Bento, comme de beaucoup de designers et scientifiques qui expérimentent avec du mycélium. Mais les premières réalisations concrètes sont bien là, et les membres de Bento sont persuadés du potentiel et de la faisabilité des prochaines. Selon eux, la progression de leur projet tient à ce que soient prises au sérieux, dès aujourd’hui, leurs propositions expérimentales orientées vers l’avenir.

  • 11 Pour un historique et des perspectives méthodologiques concernant l’intérêt de l’anthropologie pour (...)

6Explicitement ou en filigrane, la question du futur est toujours présente dans les activités de fabrication de mycomatériaux des architectes de Bento : elle oriente leurs pratiques et constitue leur raison d’être. Suivre leur travail invite donc à « ethnographier les futurs dans les présents » (Wathelet 2020), tant les futurs sont convoqués par les acteurs et ont des effets sur leurs actions quotidiennes (Bryant & Knight 2019)11. Par une démarche ethnographique attentive à la fois aux discours et aux rapports sensibles tels qu’ils se tissent dans la pratique, cet article porte sur les manières dont ces architectes cherchent à rendre présents, discursivement et matériellement, ce que je propose d’appeler des futurs habitables. Après un rapide examen du procédé de fabrication des mycomatériaux, nous verrons comment Bento s’applique à rendre envisageable l’intégration des champignons à la construction, via des actions de publicisation. L’examen d’occasionnelles prises de distance avec un futur réaliste permettra ensuite de souligner comment ces activités impliquent un chevauchement de temporalités, et nécessitent la mise en place d’une écologie temporelle véritablement attentive au vivant.

Étape par étape, brique par brique

7Résumons à grands traits le processus de fabrication des mycomatériaux. Un substrat est préparé, à partir de sciure de bois ou de paille. Les champignons sélectionnés sont saprophytes et se nourrissent donc de cette matière organique morte, qui est riche en carbone, minéraux et oligo-éléments. Une fois stérilisé ou pasteurisé, le substrat nutritif est ensuite inoculé avec le mycélium, qui aura préalablement été récolté et mis en culture. Ce mélange est placé dans un moule de la forme finale souhaitée (rectangulaire, par exemple, dans le cas d’une brique) dans lequel le mycélium va s’étendre par prolifération en agissant comme une sorte de colle, liant tous les éléments ensemble jusqu’à former ce qu’on appelle le mycocomposite.

8S’ensuit une période de croissance dans un environnement contrôlé. Après une vingtaine de jours, une fois la forme, la consistance et la texture désirées obtenues, le matériau composite est séché ou cuit afin que son développement s’arrête et qu’il se fige. Des techniques de post-traitement peuvent éventuellement venir compléter le processus – l’application de vernis protecteur par exemple. En dehors de quelques grands principes de base – une incubation à une température avoisinant les 26 °C pour une durée d’environ trois semaines –, toute variable est susceptible de faire l’objet de modifications, le moindre changement pouvant avoir un impact significatif sur le résultat obtenu. Car si les techniques de base sont bien éprouvées, les recettes restent continuellement en perfectionnement : des recherches supplémentaires sont sans cesse nécessaires pour comprendre quels déchets résiduels ont la faveur de quels champignons, quelles espèces fongiques sont les plus adaptées à quelles fins, ou encore quelles conditions d’incubation sont les plus propices.

  • 12 Si le caractère évolutif des mycomatériaux de construction est ici manifeste, il faut toutefois not (...)

9Le caractère relativement lent et incertain de la fabrication de ces matériaux, en comparaison à leurs concurrents industriels, la rend aujourd’hui difficilement conciliable avec les exigences de la planification d’un chantier de construction et notamment la nécessité de prévoir les différentes interventions les unes par rapport aux autres. Difficile, en effet, de rivaliser avec des matériaux directement disponibles, produits en masse et dont l’efficacité technique n’est plus à prouver. Qui plus est, ceci concerne les mycomatériaux dont la fabrication est déjà opérationnelle. Mais ce qui intéresse le plus les trois architectes, et ce à quoi ils travaillent pour l’avenir, c’est d’explorer la capacité latente que possède le mycélium à se « réactiver » lorsque sont réunies les conditions adéquates de température et d’humidité pour, à nouveau, proliférer. Il s’agit ainsi de pleinement embrasser le caractère « vivant » des mycomatériaux et d’édifices qui « pousseraient » plus qu’ils ne seraient construits : c’est toute la dynamique constructive qui s’en verrait ainsi modifiée. Or, un bâtiment capable de se régénérer est aussi un bâtiment en constante évolution, qui demande à être entretenu12 avec vigilance et en continu, ce qui peut sembler contre-intuitif actuellement pour le secteur. Car si quelques matériaux, comme les étanchéités, ont une durée de vie et une garantie limitées, les matériaux durs ou plus structurels (dalles, maçonnerie, ossatures, etc.) sont supposés ne nécessiter aucune intervention future, sauf défaut ou vice de construction. Tout se passe donc comme si les avantages des mycomatériaux mis en avant, par exemple celui de pouvoir entièrement se décomposer, devaient en fait être considérés comme des inconvénients dans leurs champs d’application.

  • 13 À la suite de Callon 2009.

10On voit bien que ce qui est en jeu, pour les architectes, c’est de convaincre de l’intérêt de leur projet, et de celui de matériaux qui ne sont pas encore tout à fait présents. Je m’appuierai dans les prochaines lignes sur la manière dont Morgan Meyer et Rebecca Wilbanks (2017) mobilisent le concept de valuation13 pour interroger la formation de la valeur et sa mesure simultanée dans le cadre de projets de biologie do-it-yourself. La bio DIY se prête en effet bien à ce cadre d’analyse : d’une part, ses productions ne sont pas encore des biens marchands et n’ont pas forcément vocation à le devenir, ainsi la valeur qui leur est attribuée n’est pas seulement économique mais également sociopolitique, et d’autre part on y accorde à la communication et aux médias une importance cruciale. Meyer et Wilbanks invitent à prêter attention aux moments où la valeur d’un projet est rendue explicite et discutable par une mise en scène matérielle et discursive, spatialement et temporellement délimitée : « la légitimité se construit surtout devant – et par – un public » (p. 130), insistent-ils, car le processus de valuation se doit d’opérer à l’intérieur et au-delà de la communauté de la bio DIY. Cette performance publique représente, au jour le jour, une part importante des activités de Bento. Face à des jurys d’experts, aux visiteurs d’expositions, aux médias ou même via des publications soigneusement organisées sur les réseaux sociaux, les architectes présentent leurs réalisations en mettant en avant certaines valeurs (écologiques, innovantes, économiques, locales, etc.) plutôt que d’autres selon les contextes de démonstration.

Faire sentir le(s) futur(s)

11La fabrication des blocs de mycocomposite, qui peut sembler moins ambitieuse que l’exploration du potentiel régénératif, est bien maîtrisée pour le moment. Parce qu’elle demande énormément de travail, d’essais et d’erreurs, l’élaboration de ces briques est aussi profondément formatrice, et permet le perfectionnement des recettes de fabrication. Elle présente par ailleurs un véritable intérêt : celui de proposer un produit tangible, transportable, et qui peut pratiquement être produit en série. Lors d’une réunion à laquelle j’assiste, Xavier énonce ce que j’avais déjà eu l’occasion de remarquer sur le terrain : « Présenter des blocs, ça permet de se projeter, c’est concret, même si ce n’est pas vraiment le plus intéressant [par rapport au potentiel du mycélium pour la construction] ». De fait, lors des différentes conférences auxquelles ils sont invités, qu’elles soient académiques ou grand public, les trois architectes ont pris l’habitude d’emporter des blocs de taille adéquate, afin de pouvoir les sortir au moment opportun. « Allez-y, touchez ! » proposent-ils au public, qui manipule ainsi les briques, les soupèse, s’étonne de leur solidité ou encore, ai-je entendu plusieurs fois, souligne que cela permet de se rendre compte d’un projet au demeurant difficile à imaginer. Exposer des blocs permet non seulement d’affiner les techniques (par la répétition du processus) mais aussi de poser des jalons pour faire appréhender un matériau dans ses particularités. À petite échelle, quelques briques peuvent également être assemblées entre elles, sans utiliser de mortier, ce qui donne un aperçu du potentiel régénératif susmentionné et de la capacité du mycélium à agir comme un liant. Ces petits artefacts permettent en fin de compte d’évoquer les ambitions plus larges du projet. Car, au-delà de convaincre de sa faisabilité technique, il s’agit également de faire accepter les perspectives qu’il ouvre pour l’avenir.

  • 14 Voir à ce propos Hathaway 2022. Cette distinction était déjà évoquée par Claude Lévi-Strauss (1958) (...)

12Or, l’idée même de faire envisager une cohabitation avec du mycélium représente aujourd’hui un véritable défi. C’est que, malgré l’intérêt renouvelé qu’il suscite aujourd’hui, le champignon a mauvaise presse. La distinction entre cultures mycophiles et mycophobes14 se retrouve couramment dans mes observations ethnographiques. Hors contexte culinaire, le champignon demeure bien souvent associé à l’image d’un parasite, d’un pathogène ou d’une moisissure répugnante voire dangereuse. Dans la construction, en particulier, il est synonyme de détérioration : Loïc m’explique que lorsqu’il présente ses recherches à des collègues, il n’est pas rare que référence soit faite à la mérule, cette espèce courante qui attaque les boiseries des maisons et représente une hantise dans le secteur du bâtiment.

13Les membres du laboratoire ont bien conscience de ce rejet et œuvrent à faire changer cette image. Ils organisent notamment des mises en contact avec des espèces fongiques, à l’occasion d’activités de fabrication de kits de pleurotes à cultiver chez soi par exemple. Pour les architectes de Bento, cette dédiabolisation du champignon passe aussi par un travail sur les qualités visuelles et tactiles des matériaux, avec lesquelles il s’agit de ruser. Un jour, nous sommes attablés dans l’atelier à observer les variations de consistance de quelques-unes de leurs expériences, et Thomas m’explique qu’un produit bien aéré fera un bon isolant thermique, mais sera plus fragile qu’un produit plus dense qui, lui, fera un meilleur isolant acoustique. À côté de nous, l’un des mycocomposites attire particulièrement l’attention de Loïc, qui me le fait toucher. À sa surface, la fine couche de mycélium d’un blanc presque immaculé est très douce, pratiquement duveteuse. Il sait que c’est un résultat intéressant, car si elles ne garantissent rien des propriétés du mycomatériau en question, cette apparence et cette texture peuvent être des atouts qu’il serait judicieux d’apprendre à reproduire. Lui et ses collègues l’ont bien remarqué : en comparaison, un mycomatériau au coloris brunâtre, ou dont on verrait le fruit du champignon ayant poussé à la surface, peut s’avérer tout aussi intrigant que repoussant selon les individus qui les observent ou les touchent. « L’idée, c’est de montrer qu’on peut faire du propre avec du crade », résume avec humour Thomas.

14Certaines caractéristiques qualifiées « d’imparfaites » (une légère fructification, de l’irrégularité, une couleur non uniforme) peuvent être recherchées par mes interlocuteurs et par une partie du public, notamment parce qu’elles rappellent le caractère organique des matériaux, et ainsi leur dimension écologique. Toutefois, lorsqu’il s’agit de convaincre le grand public, qui n’est en général pas familier des mycomatériaux, ce niveau de suggestion doit rester à un seuil tolérable, et surtout ne pas évoquer la moisissure. Lors des différentes présentations de leurs travaux auxquelles j’ai pu assister, il n’était pas rare en effet de relever quelques visages froncés et des interjections mi-rieuses mi-dégoûtées à l’évocation de cette perspective d’une proximité future avec les champignons. Que ce soit lors d’expositions dans des centres artistiques ou lors de concours auxquels ils participent afin d’obtenir des financements, les membres de Bento exposent leurs réalisations concrètes, mais invoquent aussi parfois un futur imaginaire.

Pas des utopistes, mais…

15L e collectif revendique sa recherche autour des mycomatériaux comme rationnelle et profondément ancrée dans le réel. « Nous ne sommes pas des utopistes », se défendent les architectes lorsqu’est évoqué l’aspect surnaturel ou fantastique du projet : une partie des productions sont déjà en application, et les techniques en cours de développement devraient l’être à court ou moyen terme. Toutefois, il arrive que, à certaines occasions, l’on prenne un petit peu plus de distance que d’ordinaire avec l’ici et maintenant. Lors de la préparation d’un événement d’architecture d’envergure, Bento et ses collaborateurs décident d’exposer une imposante structure essentiellement construite en mycomatériaux, et d’inviter à imaginer par une mise en fiction ce que pourrait être un bâtiment en champignon, capable de pousser tout seul et de s’autoréparer. Si les capacités régénératrices du mycélium ne sont pas encore maîtrisées, cela n’empêche pas de les mettre en scène matériellement et discursivement : dans le texte spéculatif accompagnant l’exposition, ce sont bien des maisons en champignon auxquelles on fait allusion, ainsi que dans certains des artefacts, dont la présentation a nécessité certains
subterfuges. En effet, la simulation ainsi que la nécessité de maintenir en état les mycomatériaux pendant toute la durée de l’exposition impliquent de tricher un peu : utilisation de colle plutôt que du pouvoir liant du mycélium, « arrêt » de celui-ci plutôt que maintien en vie, etc.

  • 15 Structure monumentale en briques de mycélium présentée par The Living au MoMA (New York, 2014) et œ (...)

16À la manière de la célèbre installation Hy-Fi15, qui n’était pas faite pour perdurer ni pour fonctionner comme un véritable bâtiment, il faut déceler dans ces artefacts particuliers une valeur de démonstration du potentiel virtuellement contenu dans ces matériaux – qui pour Hy-Fi n’en étaient qu’aux balbutiements de leur recherche et développement. Selon Bento, la construction de telles installations, d’œuvres artistiques ou de fiction permet de créer des amorces spéculatives pour des innovations à venir, de donner une consistance matérielle à des « prises sur le futur » (Chateauraynaud 2012). Le bâtiment en champignon n’existe pas (encore), comment s’y projeter ? Et qu’est-ce que cette perspective peut produire ? Les réalisations du collectif se rapprochent en cela des pratiques d’anticipation décrites par Francesca Cozzolino (2018) dans le champ du design, à la lisière d’une tendance prospective, articulée autour de l’innovation, et d’une tendance critique qui mobilise la fiction en tant qu’outil conceptuel pour critiquer le présent. Par le biais des sens et de l’expérience directe, ces mises en situation offrent un aperçu des développements en cours dans le domaine des matériaux alternatifs, ainsi qu’une critique de la ville d’aujourd’hui, de sa gestion des flux de déchets ou encore de sa politique de construction et de démolition des bâtiments. Il s’agit de donner consistance à un futur non encore envisageable, qui ne le sera peut-être jamais, et, par-là, de susciter de la curiosité à travers une forme de valuation sociopolitique articulée autour de valeurs écologiques. Ce qui importe, c’est moins le réalisme de la proposition que sa capacité à faire voir, à faire toucher et à faire imaginer les futurs possibles que renferme une technologie, et qui remettent en question nos modes de production actuels.

  • 16 Pour Mark Brightman et Jerome Lewis (2017), cette orientation est ce qui caractérise les pratiques (...)

17Par l’ouverture des possibles (p. 131) qu’elles convoquent à partir d’expériences locales, et les prises alternatives sur le futur (p. 128) qu’elles fabriquent, les activités de Bento se rapportent à ce que Francis Chateauraynaud et Josquin Debaz (2019 : 128, 131) ont appelé les « contre-anthropocènes » dans leurs travaux sur les différentes visions du futur caractérisant la période contemporaine. Ils y décrivent trois autres régimes d’énonciation et d’action : la perspective d’un effondrement systémique, le technoprogressisme, caractérisé par de nouvelles ruptures technologiques, et la réduction et gouvernance des risques. Par leur plasticité, précisent les sociologues, ces différents régimes peuvent s’influencer mutuellement et se superposer, parfois chez les mêmes acteurs. Ainsi, l’appartenance manifeste de Bento au régime des contre-anthropocènes n’empêche pas la surimposition d’autres discours : on y évoque parfois un monde qui court incontestablement à sa perte, ou au contraire s’oriente vers l’horizon du progrès16. On y envisage un futur « susceptible d’accueillir une action efficace, outillée par des objets techniques » (Monnin & Allard 2020 : 23) et des innovations technologiques.

  • 17 Malgré le partage de valeurs générales au sein du collectif, ce rapport au vivant varie d’un indivi (...)

18La coexistence de visions optimiste et pessimiste est également relevée par Madeleine Sallustio (2022) dans son ethnographie de collectifs néo-paysans, pour qui la possibilité d’une perspective alternative découle de l’acceptation de la catastrophe à venir. Elle y mobilise également la notion « d’écologie temporelle » (Grossin 1996) pour penser la manière dont ses interlocuteurs cherchent à faire coexister des temporalités parfois antinomiques, et à s’éloigner ainsi de celle qu’impose le mode de production capitaliste. L’écologie temporelle reconnaît l’orchestration entre une temporalité dominante, des trajectoires biographiques individuelles, et des rythmes naturels comme ceux des saisons et des organismes. Elle « donne une place légitime au fait de revendiquer le droit d’embrasser pleinement cette multiplicité des temporalités » (p. 67). C’est ce à quoi aspire le collectif Bento. La « philosophie qui l’anime » (p. 84) tient à un rapport au vivant particulier17 et à la reconnaissance d’une « puissance d’agir » (Latour 2015) des êtres vivants impliqués dans la fabrication des mycomatériaux.

Le temps que ça prend

  • 18 Livable est le terme utilisé dans la version originale du texte, que l’on peut également traduire p (...)

19Les futurs habitables qui transparaissent des réalisations de Bento se veulent donc non seulement possibles, mais aussi souhaitables. Cette habitabilité dépend du caractère simultanément faisable, par la mise en œuvre de techniques de fabrication et l’efficacité des mycomatériaux, et acceptable, par les représentations et perceptions qui y sont associées. Elle implique également leur caractère soutenable. En première acception, celui-ci est à entendre comme permettant d’assurer la pérennité d’un environnement vivable. Mais les spécialistes de la durabilité, ou de la soutenabilité, se sont généralement concentrés sur des manières anthropocentrées d’envisager des futurs, relevant en particulier d’un ethnocentrisme occidental (Cielemecka & Daigle 2019) quand bien même ces questions concernent en fait une multitude d’espèces différentes (Tsing 2017). Pourtant, selon une acception plus radicale formulée par l’anthropologue Anna Tsing (2017), ce sont bien les actions croisées et diverses d’une multiplicité d’organismes qui conditionnent la vie sur terre, et qui rendent nos mondes habitables18. La soutenabilité est donc le rêve de léguer une terre habitable aux futures générations d’humains et de non-humains. Ainsi les modes de vie humains ne seront véritablement maintenus dans la durée qu’à condition qu’ils s’accordent aux dynamiques créées par la prise en compte d’un modèle multispécifique. Or c’est bien ce rapport au vivant, lié aux temporalités, qui est au centre des activités de Bento. Au temps long de l’Anthropocène, qui justifie l’existence du projet et pose la question de l’apparente incommensurabilité entre les temporalités humaine et géologique (Irvine 2014), se superpose le rythme des relations interspécifiques vécues au jour le jour, qui donne son orientation au présent.

20Des forêts avoisinantes où ils les récoltent au laboratoire où ils les manipulent, la relation des architectes aux champignons donne le ton du déroulement des activités. Pour les fréquenter depuis longtemps, les membres du laboratoire connaissent bien les aléas du travail avec ces organismes. Ils savent quoi faire pour mettre un mycélium dans les conditions favorisant le mieux son développement, et quoi éviter. Ils savent aussi que ces connaissances acquises par la pratique sont rarement valables une fois pour toutes : des surprises, bonnes comme mauvaises, surviennent constamment. Par exemple, les contaminations par toute une série de microorganismes et par d’autres champignons sont courantes et font partie intégrante du processus, bien qu’elles soient difficiles à prévoir. Le développement des mycomatériaux demande une attention continue. Dans l’obscurité et la chaleur de la salle d’incubation, entre des étagères où sont alignées des dizaines d’expériences contenues dans des boîtes de Pétri, des bocaux et des raviers numérotés, Loïc me montre une grande bassine dans laquelle prolifère du mycélium. Par sa taille et sa forme, cette réalisation représente un nouveau défi. Il s’agit d’une commande, comme il arrive que Bento en prenne parfois dans le cadre de collaborations ponctuelles. En me racontant la manière dont les échanges se sont déroulés avec les collaborateurs, qui avaient en tête une deadline bien précise pour le produit fini, Loïc m’indique que, comme très souvent, « les gens ne réalisent pas le temps que ça prend ». Ce n’est pas seulement que la maturation est longue, en comparaison à la fabrication d’autres matériaux ; c’est aussi qu’il peut y avoir des imprévus, et que des informations manquent encore. Les recettes s’élaborent en fonction des résultats espérés et de ceux obtenus, et sont à adapter en continu. Difficile de savoir à l’avance comment les choses vont prendre. Loin d’être un éloge absolu de la lenteur, cette phrase capture bien la nécessité, pour les architectes de Bento, de prendre en compte des rythmes parfois difficiles à conjuguer.

21La mise en place d’une écologie temporelle attentive au vivant ne va donc pas de soi, mais c’est aussi ce à quoi invitent les champignons et leurs effets sur ceux qui expérimentent avec eux. La temporalité des mycéliums, non linéaire et substantiellement autre qu’humaine, implique un rapport au temps complexe. La possibilité de mettre en pause la vie d’un organisme ouvre, pour les architectes de Bento, des perspectives pour l’avenir qui participent à en modifier les représentations. Les futurs vers lesquels ils orientent leurs pratiques sont en effet pluriels : à la fois en crise et gorgés de promesses, lointains mais ne relevant pas moins de l’urgence, réalistes mais aussi imaginaires – la fabulation étant autorisée par la distance, sans toutefois être nécessaire car l’avenir est avant tout un espace d’anticipations concrètes. Outre des représentations contrastées de l’avenir, cette écologie temporelle implique des rapports au passé, puisque ces activités s’inscrivent dans le lourd héritage des sociétés industrielles, de leur pollution et de leur bétonnage massif, et doit composer avec les nombreuses contraintes du présent, qui touchent en partie aux rapports aux champignons. En travaillant à construire des futurs autant que possible habitables, c’est toute une proximité avec des êtres pour l’essentiel invisibles mais bien présents que Bento cherche à repenser.

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Bibliographie

BRIGHTMAN MARK & JEROME LEWIS (dir.), 2017.
The Anthropology of Sustainability: Beyond Development and Progress, New York, Palgrave Macmillan.

BRYANT REBECCA & DANIEL M. KNIGHT, 2019.
The Anthropology of the Future, Cambridge, Cambridge University Press.

CALLON MICHEL, 2009.
« Postface : La formulation marchande des biens », in François Vatin, Évaluer et valoriser : Une sociologie économique de la mesure, Toulouse, Presses universitaires du Mirail, p. 247‑269.

CHATEAURAYNAUD FRANCIS, 2012.
« Des prises sur le futur. Regard analytique sur l’activité visionnaire », in Dominique Bourg, Pierre-Benoît Joly & Alain Kaufmann, Du risque à la menace. Penser la catastrophe, Paris, Presses universitaires de France, p. 287‑310.

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Notes

1 Eleanor Cummins, « Your Next House Could Be Made of Mushrooms. A Delicious Development in Sustainability », Architectural Digest, 18 mars 2020.

2 Ed Cunningham, « Could Cities Soon be Made of Mushrooms ? », Time Out, 3 mai 2022.

3 Anthony Morel, « Et si le futur c’était la maison… en champignons ? », BFM avec RMC, 10 mai 2021.

4 La formulation de ce terme revient à Phil Ross, co-fondateur de la société MycoWorks en 2013, l’un des pionniers aux États-Unis de l’expérimentation avec le mycélium, au croisement entre sciences et art.

5 Ce laboratoire est l’un des principaux sites de l’ethnographie réalisée dans le cadre de ma thèse de doctorat.

6 Pour une définition plus détaillée de la biologie do-it-yourself, également dite « de garage », voir notamment Delgado 2013, Meyer 2012.

7 Pour un aperçu de leur genèse et une étude de cas reprenant leurs grands principes, voir par exemple Karana & Camere 2019.

8 Chiffres de 2020 fournis par Febelcem, la fédération de l’industrie cimentière belge.

9 Les prénoms ont été modifiés.

10 Certaines grandes enseignes du luxe et de la mode commencent à faire appel à elles. Relevons, en Europe, Mogu pour Balenciaga, aux États-Unis MycoWorks pour Hermès et Ecovative dans un partenariat avec Bolt Threads pour Stella McCartney et Adidas.

11 Pour un historique et des perspectives méthodologiques concernant l’intérêt de l’anthropologie pour le(s) futur(s), voir Wathelet 2020, Bryant & Knight 2019, Salazar et al. 2017.

12 Si le caractère évolutif des mycomatériaux de construction est ici manifeste, il faut toutefois noter que, à d’autres échelles et selon d’autres temporalités, un travail souvent peu visible et visibilisé de maintenance est nécessaire pour tout bâtiment. À ce propos, voir notamment Denis & Pontille 2022.

13 À la suite de Callon 2009.

14 Voir à ce propos Hathaway 2022. Cette distinction était déjà évoquée par Claude Lévi-Strauss (1958), qui plaçait la majorité des sociétés occidentales dans la deuxième catégorie, appuyant sa réflexion sur Wasson & Wasson 1957.

15 Structure monumentale en briques de mycélium présentée par The Living au MoMA (New York, 2014) et œuvre emblématique de l’engouement récent pour les applications fongiques dans les domaines du design et de l’architecture.

16 Pour Mark Brightman et Jerome Lewis (2017), cette orientation est ce qui caractérise les pratiques relevant de la sustainability (de la durabilité/soutenabilité).

17 Malgré le partage de valeurs générales au sein du collectif, ce rapport au vivant varie d’un individu à l’autre, en fonction par exemple des situations professionnelles ou de la fréquentation des salles de laboratoires et des non-humains dont elles sont peuplées.

18 Livable est le terme utilisé dans la version originale du texte, que l’on peut également traduire par « vivable ».

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Pour citer cet article

Référence papier

Juliette Salme, « Au pays des murs-vivants »Terrain, 79 | 2023, 198-213.

Référence électronique

Juliette Salme, « Au pays des murs-vivants »Terrain [En ligne], 79 | 2023, mis en ligne le 06 novembre 2023, consulté le 03 octobre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/terrain/25896 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/terrain.25896

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Auteur

Juliette Salme

Université de Liège, Laboratoire d’anthropologie sociale et culturelle

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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