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L’émissaire

Pédagogie de la paix en Colombie [récit]
Gwen Burnyeat
Traduction de Josiane Massard-Vincent
p. 164-185
Cet article est une traduction de :
The envoy [en]

Résumé

En 2016, la Colombie a dit « Non » à la paix lors d’un référendum, suite à une campagne intense de désinformation. En réponse aux demandes de la société pour une information officielle sur l’accord de paix, le gouvernement a employé une stratégie appelée « Pédagogie de la paix » pour combattre les « mythes » de la campagne pour le « non » par des « réalités ». Mais peut-on vraiment savoir ce qui est quoi ? À partir d’une enquête ethnographique dans le bureau du gouvernement pour la paix, ce récit nous invite à nous mettre à la place d’un représentant du gouvernement et à celle d’une victime du conflit pendant une session de pédagogie de la paix, à imaginer ce qu’implique le fait de délivrer et de recevoir ce message officiel. Dans le cadre global de la politique des post-vérités, la pédagogie de la paix offre un outil de communication entre le gouvernement et la société dans des contextes de désinformation et de polarisation.

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Texte intégral

Filimón

1Le vieil homme est assis sur les gradins du stade et étire sa mauvaise jambe en diagonale. Son genou le fait souffrir s’il reste plié trop longtemps – trop d’années passées à monter aux cacaoyers et à transporter la lourde récolte dans un panier posé en porte-à-faux sur l’épaule – et il s’attend à ce que cette réunion dure encore un moment. L’humidité est entrée dans l’articulation. Sa femme lui répétait continuellement de ne pas aller ramasser quand la brume s’installait dans la vallée, mais il y allait toujours de toute façon : ils avaient besoin de chaque kilo de fèves de cacao pour payer la scolarité de leur fils. Maintenant, elle n’est plus là pour le lui dire, paix à son âme, mais il entend encore sa voix quand il part pour la cacaotera, panier d’osier en bandoulière, machette à la main.

2Les oiseaux chantent dehors, les cloches sonnent à l’église du village, et les genoux d’autres gens assis derrière lui labourent son dos. Il essuie une petite tache de boue sur le haut de ses bottes, il l’a manquée quand il les a nettoyées à la rivière près du village. Il aime être impeccable quand il va en ville. Autour de lui, il reconnaît des gens d’autres villages proches de la ville. On les a amenés dans des navettes louées par le gouvernement, mais aucun de ces bus ne passait devant chez lui : il était trop loin de la grande route et il n’avait pas l’argent pour payer une moto-taxi, alors il a marché, remplissant sa bouteille d’eau à la rivière. Il voit une étrange femme blonde assise deux rangs devant avec un ordinateur ; elle n’est pas d’ici. Peut-être une de ces personnes envoyées par les Nations unies pour aider le pays à faire la paix.

3Son voisin lui a dit qu’il perdait son temps.

4« À quoi ça sert d’aller écouter le gouvernement ? S’il y avait un bus qui passe, bien sûr, je le prendrais, je profiterais du trajet gratuit pour faire quelques courses et aller voir ma nièce, mais marcher trois heures par un soleil brûlant et manquer une journée de travail ? Tu es fou.

5— Je veux entendre parler du processus de paix.

6— Quelle paix, mon vieux ? Tu sais que c’est tout des foutaises.

7— J’ai entendu dire que les FARC [Forces armées révolutionnaires de Colombie] déposent les armes.

8— Les FARC peuvent déposer les armes mais ça veut pas dire la paix. Il y a encore les paramilitaires, et l’armée ne vaut pas mieux. Il n’y aura jamais la paix en Colombie.

9— Je veux juste savoir.

10— Y’a pas de processus de paix qui ramène les morts, don Filimón.

11— Je sais, mijo, je sais.

12— Bonne route mon ami. Tu peux me rapporter de l’huile de cuisine ?

13— Bien sûr. »

14Sur le plancher du stade, en face d’eux, une rangée de quatre tables est disposée, flanquée de deux gros haut-parleurs. Il voit les employés de la mairie s’agiter autour des câbles et d’un ordinateur qui tout à coup projette une image floue sur un écran. Ils tournent autour d’une fille. Est-elle la représentante du gouvernement ? Non, ce n’est pas possible, elle est si jeune, elle ne peut pas avoir plus de 25 ans – l’âge de son fils quand ils l’ont tué. Mais si pourtant. Elle montre des choses sur l’ordinateur et les employés de la mairie l’appellent doctora, c’est toujours comme ça qu’ils appellent les gens importants. Elle est si blanche. Ils sont toujours blancs, ceux qui viennent de Bogota. Pas comme les gens brunis par des années de labeur dehors sous le soleil des Tropiques. Le conflit s’est produit ici, dans les campagnes. Que peut-elle bien savoir sur la guerre ?

L’anthropologue

15Vous avez probablement entendu parler du processus de paix entre le gouvernement de Colombie et la guérilla des FARC. Il en a beaucoup été question dans les médias du monde entier. Un pays tristement célèbre pour le trafic de cocaïne, la guérilla, les enlèvements et la violence opérait enfin une transition vers l’après-conflit après trois tentatives de paix avortées. Pendant les négociations qui se sont tenues à La Havane de 2012 à 2016, la violence a reculé, le pays est devenu plus sûr, le tourisme a progressé et le journal The Economist a élu la Colombie « Pays de l’année » en 2016, l’année où le Président Juan Manuel Santos a reçu le prix Nobel de la paix pour avoir mené les négociations.

16Vous avez peut-être appris aussi qu’en 2016, année où les Oxford Dictionnaries ont déclaré mot de l’année le mot « post-vérité », la Colombie a voté « non » à la paix. L’accord de paix de La Havane a été soumis à un référendum national le 2 octobre, et les résultats – 50,2 % de « non » ; 49,8 % de « oui » et 60 % d’abstentions – furent inattendus, même pour ceux qui avaient fait campagne pour le « non », car les sondages avaient prédit une victoire du « oui ». Entre le Brexit et l’élection de Trump, le moment de « post-vérité » de la Colombie a impliqué une campagne virulente en faveur du « non », avec pour chef de file Alvaro Uribe Vélez, président de la Colombie de 2002 à 2010, et son parti politique, le Centre démocratique. Ils exigeaient, dans leur campagne, des changements dans l’accord et répandait de fausses informations à son sujet dans les médias traditionnels, sur les panneaux d’affichage et sur les réseaux sociaux : si le « oui » l’emportait, les FARC prendraient le pouvoir, détruiraient l’économie et feraient de la Colombie un pays communiste, le « prochain Vénézuela ». On déclarerait l’impunité pour les crimes contre l’humanité (en dépit des félicitations de la Cour pénale internationale à propos de l’accord). Et l’accord de paix contenait « l’idéologie du genre » qui, à l’école, apprendrait aux enfants à devenir homosexuels et qui démolirait la cellule familiale traditionnelle. Le directeur de la campagne pour le « non » révéla après coup qu’ils avaient délibérément cherché à ce que les gens « aillent voter en colère », en imaginant différents messages de campagne pour provoquer « l’indignation » parmi divers groupes sociaux et régionaux. La plus haute juridiction de Colombie a par la suite jugé que la campagne pour le « non » avait été fondée sur une « tromperie généralisée ».

17Vous n’avez peut-être pas entendu parler, toutefois, de la « pédagogie de la paix », un terme apparu pendant le processus de paix en Colombie pour décrire l’action consistant à expliquer l’accord de paix à différents publics, pour encourager les gens à prendre une décision informée lors du vote et pour remplacer les « mythes » de la campagne pour le « non » par des « réalités ». L’accord lui-même était un document complexe de 297 pages. Il comportait six points : 1) la réforme agraire pour lutter contre les inégalités dans les campagnes, une revendication centrale dans la lutte armée des FARC ; 2) la participation politique des FARC et, plus largement, l’élargissement de la base démocratique ; 3) la fin du conflit, le désarmement des FARC et leur réintégration dans la société ; 4) la lutte contre le narcotrafic qui avait alimenté et aggravé le conflit depuis les années 1980 ; 5) la reconnaissance des droits de plus de huit millions de victimes du conflit (y compris de plus de six millions de personnes déplacées de force dans le pays) à la vérité, à la justice, à la compensation et aux garanties de non-répétition, en accord avec les règles du droit international ; 6) la mise en place et la vérification de mécanismes, notamment la décision capitale de solliciter l’adhésion des citoyens au moyen du référendum.

18Pendant la période précédant le référendum, des centaines d’organisations de la société civile, d’universitaires, de journalistes, d’organismes internationaux et d’associations à l’échelon local ont travaillé sans relâche pour diffuser cette information via des conversations en tête-à-tête, des brochures, des vidéos, des réseaux sociaux, des programmes de radio, des tribunes publiques et une multitude de stratégies, allant des paroles de rap aux graffitis.

19Dès le début des négociations de paix, différents pans de la société colombienne – allant des universitaires au monde des affaires en passant par des organisations locales – ont fait pression sur le gouvernement pour qu’il informe les citoyens de l’avancée des négociations. Ce terme « pédagogie de la paix » a imprégné le discours gouvernemental. Une équipe désignée ainsi a été créée au sein du cabinet du Haut-Commissariat pour la paix, branche de la présidence chargée d’apporter le soutien technique à l’équipe gouvernementale qui négociait à La Havane, conduite par le Haut-Commissionnaire Sergio Jaramillo et le négociateur en chef, Humberto de la Calle. D’autres accords de paix internationaux ont été soumis à référendum, mais il n’y a aucun précédent pour une pédagogie de la paix gouvernementale, en Colombie ou ailleurs. L’équipe de pédagogie de la paix a été envoyée dans tout le pays, porteuse d’une information officielle à partager avec les Colombiens de différentes régions et de différents secteurs de la société.

20Tandis que la campagne d’opposition et de désinformation d’Uribe avançait, le concept de pédagogie de la paix se renforçait, se présentant comme un antidote technique et rationnel à une campagne passionnelle, populiste et politique. Les pédagogues de la paix étaient des émissaires, apportant à la société une information authentique venue de la table des négociations. Mais pouvons-nous réellement savoir ce qui est quoi ? En tant qu’anthropologue, j’ai été formée pour témoigner en un lieu et transmettre ce que je voyais en un autre – une autre catégorie d’émissaire –, mais aussi pour admettre toujours la subjectivité inhérente à mon récit et veiller à ne pas faire passer celui-ci pour une version objective des faits. Pourtant avons-nous vraiment atteint le stade où globalement nous ne pouvons pas parler d’une différence entre vérité et mensonges ? La « vérité » est-elle une revendication si problématique ?

21Après le référendum, une critique a commencé à circuler parmi certains Colombiens : « Le gouvernement n’a pas fait assez de pédagogie de la paix. » Ceux qui adhéraient à ce point de vue croyaient que ceux qui avaient voté « non » l’avaient fait parce qu’ils avaient été trompés et parce qu’ils n’avaient pas lu l’accord de paix, ou n’importe quelle brochure, vidéo, infographie ou résumé radiophonique produits par le gouvernement ou des associations de la société civile. L’accord de paix étant complexe, il incombait au gouvernement de le rendre accessible. La Cour constitutionnelle, ayant fixé les règles du référendum, avait même stipulé qu’il était du devoir du gouvernement d’informer même s’il n’était pas autorisé à faire campagne. Il devait pratiquer la pédagogie, pas la politique. Mais quelle est la différence, et qui décide de la ligne de démarcation entre l’explication et la propagande ?

  • 1 Institute for Integrated Transitions (IFIT), Los debates de La Habana. Una mirada desde adentro, B (...)

22Après la victoire du « non », le gouvernement a passé cinq semaines à rencontrer des opposants à l’accord pour enregistrer leurs objections et leurs propositions afin d’en modifier le contenu. Ils l’ont ensuite renégocié avec les FARC et ont signé une version remaniée le 24 novembre 2016 qui incorporait quasiment toutes les revendications de la campagne en faveur du « non ». Plutôt que de prendre le risque d’un second référendum, le Président Santos a décidé de présenter le nouvel accord de paix au Congrès, qui l’a ratifié. La mise en œuvre a commencé le 1er décembre 2016. Toutefois, l’échec du référendum, qui était censé conférer une légitimité sociale et politique à l’accord, a induit au lieu de cela un « déficit de légitimité1 » qui a nui à son application. Uribe et le Centre démocratique ont refusé de soutenir le nouvel accord et se sont abstenus lors du vote de ratification au Congrès. Ils ont décidé de capitaliser sur leur victoire au référendum en continuant à s’opposer au processus de paix porté par Santos pour engranger des soutiens en vue des élections législatives et présidentielles de 2018. Les citoyens continuent néanmoins d’être informés, aussi bien du contenu de l’accord que des avancées de la mise en œuvre – le désarmement de 13 000 membres des FARC dans vingt-six camps répartis dans le pays, la création d’agences chargées de mener à bien la réforme agraire et la mise en place d’institutions juridiques de transition.

23J’ai passé treize mois à accompagner les « pédagogues de la paix » dans ce contexte, et j’ai vu les difficultés croissantes qu’ils rencontraient en tant que porte-paroles du gouvernement Santos face à des publics méfiants, tandis que le processus de paix était contaminé par la polarisation politique née du référendum. C’est devenu ensuite l’enjeu central autour duquel se sont articulées les élections de 2018. La pédagogie de la paix, dans ce contexte, tentait encore d’être « rationnelle » et « technique » – visant à informer et, en informant, à encourager les Colombiens à voter pour un président qui mettrait en place l’accord de paix. Cependant, le parti d’opposition mené par Uribe se renforçait et son candidat, Ivàn Duque, en promettant d’apporter des changements substantiels à l’accord de paix, remporta les élections.

24Au moment où j’écris ces lignes, Duque est président de la Colombie depuis plus d’un an. Bien que la mise en place de l’accord continue avec beaucoup de difficultés, de nombreuses organisations colombiennes et internationales, ainsi que de nombreux observateurs, ont critiqué Duque pour avoir sapé le processus de paix et permis à un nouveau cycle de violence d’émerger. Des centaines d’ex-combattants des FARC qui avaient déposé les armes ont été assassinés, ainsi que des centaines de leaders sociaux favorables à la paix. En réalité, ces assassinats ont commencé après le référendum pour la paix. Tout comme après le Brexit il y a eu une flambée de crimes de haine au Royaume-Uni, le référendum a semblé donner une légitimité à la haine des gens contre les FARC et contre les activistes de la paix, et cela s’est renforcé sous Duque.

25Les choses auraient-elles été différentes si le gouvernement Santos avait pratiqué davantage de pédagogie de la paix, ou l’avait fait plus tôt, ou mieux ? Le référendum de 2016 aurait-il pu être gagné ? Un autre président, plus impliqué dans la mise en place de l’accord de paix, aurait-il pu gagner en 2018 ? Peut-être, peut-être pas. Je veux maintenant me focaliser sur une unique session de pédagogie de la paix, pour tenter de nous placer dans deux perspectives différentes et comprendre les complexités inhérentes à la transmission et à la réception du message de paix du gouvernement.

Pilar

26Ils ont finalement mis le Powerpoint en route. Elle peut s’en passer, mais c’est plus difficile de se rappeler l’ordre de sa présentation et elle pense que cela lui donne un caractère plus officiel ; les diapositives ont les noms et les numéros des décrets, et tout. Oui, cela représente beaucoup d’informations à assimiler, mais elle essaie d’expliquer simplement, comme si elle parlait à sa grand-mère, qui ne suit pas vraiment la politique. Son propos contient beaucoup de termes techniques, elle le sait, mais elle pense que c’est important que chacun connaisse la vérité. Il y a eu tellement de désinformation, le Centre démocratique a répandu tant de mensonges au moment du référendum. Les gens ont cru qu’ils votaient contre le communisme, contre l’homosexualité, même contre l’avortement – mais ils votaient contre la paix. Il faut rétablir la vérité.

27Combien de personnes y a-t-il face à elle ? Deux, trois cents ? On lui en avait promis six cents. Tout cet effort, les réunions dans toutes ces villes – toutes les dépenses, les vols, les hôtels, les bus –, ils sont probablement allés rendre visite à leur famille au lieu de venir à la présentation. Les gens ne comprennent pas combien c’est important de savoir ce qu’il y a vraiment dans l’accord de paix. Ils se plaignent que le gouvernement n’a pas fait assez de pédagogie de paix, ce qui expliquerait pourquoi les gens ont voté contre l’accord en 2016. Mais elle ainsi que son équipe ont fait un tel effort au moment du référendum, effort qu’ils poursuivent encore maintenant pour l’application de l’accord, en voyageant dans tout le pays pour diffuser le message. Pourtant les gens ne viennent pas. Bien sûr, il y a de la méfiance. Pas seulement le gouvernement mais l’État, dans son ensemble, ont abandonné ces régions de conflit pendant des années, il y a une absence de développement, pas de routes, c’est sûr, c’est pourquoi les FARC étaient devenus si puissants, ils étaient l’État en ces lieux. Mais elle est tellement lasse de toutes les critiques. Les gens doivent se rendre compte que c’est une chance, mais seulement si on travaille tous ensemble. Il est urgent d’amener les gens à soutenir le processus de paix – si on ne le fait pas, le Centre démocratique continuera à répandre des mensonges, de la peur et de la haine contre le processus de paix, et ils gagneront les élections présidentielles de 2018 l’année prochaine. Et on sera foutu.

28Il fait si chaud ici. Elle transpire déjà, son chemisier colle au dossier de la chaise en plastique, et le manque de sommeil lui donne le vertige ; elle s’est levée à 3 h du matin pour prendre le premier vol pour Medellín, puis elle a été conduite ici en voiture ; impossible de dormir pendant les cinq heures de trajet sur une route à virages et nids de poule. L’anthropologue britannique qui suit son équipe dit que cette pédagogie de la paix est une innovation totale, que nulle part ailleurs dans le monde, le personnel de l’administration d’un gouvernement n’a impliqué la société dans des stratégies d’information tout en réalisant en même temps un processus de paix. Elle jette un coup d’œil à ses notes. D’abord, aperçu général du processus de paix. Puis chacun des six points de l’accord – réforme agraire, participation politique, fin du conflit (cessez-le-feu et désarmement), trafic de drogue, droit des victimes, mise en place et suivi. Ensuite, expliquer l’avancée de l’application au jour d’aujourd’hui, et leur rappeler que cela n’arrivera pas en un jour, s’assurer qu’ils savent pourquoi ils doivent apprendre les six points, pour leur permettre de participer. Puis, questions et réponses, déjeuner, sauter dans la voiture climatisée en route pour la ville voisine, même chose de nouveau, dormir ensuite dans un hôtel miteux quelque part et tout recommencer le lendemain.

29Le maire commence à parler, souhaitant la bienvenue aux communautés. Sera-t-elle payée à temps ce mois-ci ? Elle n’a pas encore réglé son loyer et elle reçoit sur WhatsApp des messages furieux de son propriétaire. Mais elle a besoin de dépenser l’argent qui lui reste pour ses déplacements d’un village à un autre, le remboursement de ses frais prend plus de temps que son salaire. Rien ne fonctionne correctement avec l’État. Elle a pensé à changer pour le secteur privé, sa tante pourrait lui trouver un emploi dans une entreprise de cosmétiques. Mais elle croit au processus de paix, elle croit aux efforts du Président Santos pour mettre fin au conflit armé de cinquante ans avec les FARC, elle veut participer à la transformation de la Colombie, et le seul moyen de faire progresser l’État est que davantage de bonnes personnes viennent travailler pour lui. Les gens ici le critiquent toujours – c’est facile de critiquer de l’extérieur, leur dit-elle. Mais essayez de faire des choses en tant qu’État, et voyez comme c’est difficile. Il faut être à l’intérieur pour faire changer les choses. Elle a étudié les sciences politiques dans une université privée à Bogota ; elle sait bien qu’elle est privilégiée, mais elle veut utiliser ce privilège pour faire la différence. Le manque de perspectives de l’emploi n’incite pas à y rester. Et qui sait ce qu’il adviendra du processus de paix si le Centre démocratique gagne les élections ? Leur opposition au processus de paix est la pierre angulaire de la campagne présidentielle de Duque. On ne peut pas les laisser gagner, pense-t-elle. Nous devons nous assurer que le pays élise un président qui continuera à mettre en place l’accord de paix. N’importe quel autre candidat le fera. Mais pas Duque. Surtout pas Duque.

30L’hymne national résonne à travers les haut-parleurs. Elle se lève, de même que le public. Vient ensuite l’hymne départemental d’Antioquia, puis celui de la ville. Le nombre de personnes dans le public connaissant les paroles va décroissant d’un hymne à l’autre, elle pense que seul le maire chante réellement celui de la ville. Alors, ils s’asseyent et ce dernier lui donne le micro.

31« Merci beaucoup d’être venus. C’est avec vous, les communautés, que se construit la paix. Comme vous le savez, le gouvernement et les FARC ont signé un accord de paix en novembre. Mais l’application prendra quinze ans, et engage tout le monde, pas seulement le gouvernement et les FARC. »

32Tous les regards sont fixés sur elle.

33« Maintenant, nous ne pouvons pas signer un accord et s’attendre à ce que toutes ces transformations adviennent du jour au lendemain. Évidemment, ça ne marche pas comme ça. Les négociations à La Havane visaient à mettre fin au conflit entre le gouvernement et les FARC. À La Havane, ils n’ont pas signé la paix, la paix se construit dans les territoires, avec le peuple. On ne peut rester assis et attendre que l’État actionne une baguette magique et fasse un tas de transformations. On ne peut pas dire que c’est l’État qui doit se charger de tout. En tant que citoyens, nous devons participer au processus et travailler main dans la main avec l’État. »

34Elle espère que ça passe. Elle espère qu’ils se rendent compte qu’il leur faut se mobiliser, participer, afin de construire la paix.

35« Les experts internationaux disent que la construction de la paix peut durer même plus longtemps que le conflit. Donc, cela pourrait nous prendre plus de cinquante ans. »

36Elle mentionne toujours les experts internationaux. Ils ont besoin de comprendre que d’autres pays ont fait cela, une transition de la guerre vers la paix. Les gens disent toujours : « En Colombie, il n’y aura jamais la paix. » Mais d’autres pays y sont arrivés.

37Viennent ensuite les six points, chacun avec un schéma Powerpoint. C’est un accord de 310 pages, elle ne peut pas entrer dans les détails. Le texte sur lequel les membres de l’équipe de pédagogie de la paix du gouvernement se sont mis d’accord présente chacun des points et met en lumière quelques éléments saillants.

  • 2 Bien que cela ait été inclus dans l’accord de paix, le Congrès a ensuite rejeté la loi qui devait (...)

38Elle insiste, à propos de la réforme agraire, sur le fait que la banque foncière sera créée pour donner de la terre à ceux qui n’en ont pas, sur les projets participatifs de planification pour le développement rural et sur la mise à jour du cadastre. Au sujet du deuxième point – la participation politique –, elle explique le statut de l’opposition, la commission d’experts qui fera les recommandations en vue de la réforme électorale, et les seize circonscriptions spéciales de la paix, qui doivent permettre une meilleure représentation des régions les plus affectées par le conflit. Cette région va être l’une des circonscriptions concernées, donc les gens pourront voter pour un représentant2. Concernant le troisième point, elle leur parle des vingt-six zones de désarmement et de réintégration dans lesquelles 13 000 membres des FARC déposent actuellement leurs armes sous contrôle des Nations unies. À propos du trafic de drogue, elle mentionne les programmes de substitution de cultures pour les gens qui cultivent illégalement la coca, les programmes pour démanteler les groupes de narcotrafic, et la nouvelle politique sanitaire pour le traitement des consommateurs de drogue.

39Elle sait que, dans le public, nombreux sont ceux qui ont été victimes du conflit, aussi passe-t-elle plus de temps sur le cinquième point. Elle explique en détail son contenu juridique, la juridiction spéciale pour la paix, de même que les contenus non juridiques comme la Commission pour la vérité et l’Unité de recherche des personnes disparues. Elle rappelle que la communauté internationale a vanté les mérites de ce système qui équilibre paix et justice, et leur rappelle ce que dit toujours le Président Santos : à savoir que les victimes sont au cœur du processus de paix.

40Enfin, sur le point six, elle cite les commissions et explique comment elles assureront le suivi de la mise en place de l’accord. Elle veut qu’ils sachent qu’une méthodologie sérieuse est à l’œuvre pour s’assurer que, de chaque côté, on respecte les règles, ce n’est pas simplement une promesse de plus.

41Elle prend une gorgée d’eau. Elle voit l’anthropologue dans le public avec son ordinateur portable sur les genoux, transcrivant tout ce qu’elle dit. Elle espère qu’elle ne fait pas d’erreurs. Elle jette un coup d’œil à sa montre, elle parle depuis une heure déjà et il faut qu’elle réserve du temps à la session de questions-réponses avant le déjeuner, donc elle passe plus vite les dernières diapositives sur la mise en œuvre.

42« Parfois, les gens des régions concernées désespèrent de ne pas voir immédiatement les résultats concrets de l’accord. Mais d’abord, il faut créer les commissions, mettre en place les institutions et concevoir de nouvelles lois afin de pouvoir appliquer les différents points. »

43Elle leur parle du processus qui consiste à voter les lois au Congrès, leur donne quelques statistiques sur l’avancée du désarmement des FARC, cite les acronymes des nouvelles institutions qui ont été créées pour appliquer la réforme agraire et termine par l’anecdote de son supérieur sur le programme de déminage pilote. Comment, alors que les FARC et l’armée travaillaient ensemble à neutraliser des mines terrestres, deux hommes se sont reconnus. Ils s’étaient affrontés, armes à la main, dix ans auparavant ; maintenant, ils travaillaient ensemble pour la paix. C’est important de raconter des anecdotes, dit son supérieur, parce qu’il faut réussir à toucher les gens. La pédagogie ne concerne pas seulement des faits.

44Elle demande s’il y a des questions. Des mains se lèvent. La secrétaire du maire fait circuler un micro dans le public.

45Une femme demande : « Que va-t-il arriver en termes de sécurité quand les FARC seront partis ? L’accord dit que les zones libérées par les FARC seront occupées par l’État, mais jusqu’ici nous n’avons vu aucune présence de l’État. Combien de temps devrons-nous attendre ? »

46« La mise en œuvre ne peut arriver en un jour, dit-elle. Je n’ai pas de date à vous donner, mais la Commission sur les garanties de sécurité a été créée et travaille sur la question. »

47Un homme demande : « Quand commencera la réforme agraire ? Pouvons-nous déjà aller demander de la terre ? Où est cette terre ? »

48C’est la tâche d’une institution différente. « La banque foncière durera douze ans et a trois millions d’hectares », dit-elle. Elle a répondu à ces questions des dizaines de fois. « C’est le travail de l’Agence agraire nationale, ils enverront des représentants ici quand ils seront prêts à commencer et vous pourrez aller leur parler. »

49Un autre homme dit : « Tout ça a l’air bien joli, mais nous sommes habitués aux hommes politiques qui ne tiennent pas leurs promesses. Ici, les candidats aux élections municipales organisent des soirées, font des promesses, et nous oublient ensuite. Qui va s’assurer que tout cela se réalise ? »

50Tout le monde rit et applaudit. Cela arrive souvent ; les gens utilisent les rencontres publiques pour critiquer les maires. Il y a tant de clientélisme et de corruption dans la politique électorale locale. Elle comprend la méfiance, mais elle pense que les gens doivent changer d’attitude. Cessons de nous plaindre et agissons, comme dit toujours sa maman.

51« Bien, dit-elle, je vous ai parlé des différentes commissions de suivi qui vont s’assurer de la mise en application. Mais nous ne devrions pas penser que ce ne sera pas réalisé. Nous devons veiller à ce que les choses se fassent. Parce que l’option de ne pas les faire n’existe pas, nous devons les faire advenir. Oui, historiquement, il y a eu des défaillances de la part de l’État mais nous devons participer, nous ne pouvons pas continuer à croire que l’État ne réalise jamais ses promesses. Nous devons exiger qu’il le fasse. »

52Elle montre les boîtes en carton apportées de Bogota, bourrées de quelques centaines d’exemplaires du livret d’information bleu et blanc du gouvernement : L’accord de paix final. L’occasion de construire la paix.

53« Je vous invite tous à étudier l’accord. Nous devons faire notre propre suivi, et pas seulement penser, oh, les instances internationales vont s’en charger. Non ! Nous, les citoyens, les gens des territoires, nous sommes ceux qui sont affectés, nous devons suivre l’application des points. »

54Elle dit qu’il y a le temps pour une question encore, et le micro est donné à un vieil homme au chapeau de paille qui se lève avec un peu de difficulté, en étirant lentement sa jambe.

55« Je ne veux pas qu’il y ait d’autre guerre, jamais plus. » Il marmonne un peu et les gens autour de lui l’encouragent à parler plus fort. « J’ai perdu mon fils et ma femme dans la guerre. Mon fils et moi, nous étions en train de travailler dehors et les FARC sont venus chez nous, ils voulaient de l’eau, c’est tout ce qu’ils voulaient. Ma femme leur en a donné, elle était seule, elle ne pouvait pas refuser. Alors l’armée est venue et l’a tuée pour avoir collaboré avec la guérilla. Mon fils, il est devenu rancunier, aussi il a rejoint les FARC parce qu’il voulait se venger. Mais ils l’ont capturé et l’ont tué. Je ne crois pas en l’État. Vous, l’État, avez tué ma famille. J’étais plus lourd avant, regardez comme je suis maigre maintenant. Mais si vous allez faire la paix maintenant, c’est bon. Je ne veux pas que ce qui m’est arrivé arrive à quiconque en Colombie, plus jamais. »

56Elle a entendu tant d’histoires comme celle-ci dans ces réunions. Elle s’est habituée à ce que les gens s’adressent à elle en tant que « l’État », comme si elle était responsable de ce que l’armée a fait à son fils. Elle a appris à ne pas le prendre personnellement, mais elle aimerait que les gens ne se servent pas de cette occasion pour laisser libre cours à leurs émotions. Elle sait que c’est important d’écouter, en tant qu’État. Mais ce serait mieux si les gens se limitaient à poser des questions sur l’accord de paix. Parce que maintenant elle va partir et ils devront rapporter le message à leur communauté ; c’est une occasion pour qu’ils entendent toute la vérité. Mais il n’y a plus de temps pour d’autres questions. Elle remercie le public, serre la main du maire, et retire la clé USB de l’ordinateur portable municipal un peu lent.

Filimón

57Il est content d’avoir eu l’occasion de placer son histoire. Il voulait que la fille comprenne ce qui est arrivé aux gens ici et qu’elle reparte pour Bogota avec le récit, pour expliquer à ses supérieurs, les décideurs, pourquoi il est si important de faire la paix. Il n’aime pas ce président Santos qui était ministre de la Défense quand l’armée a tué sa femme, mais il veut croire que la paix est possible. Il est venu pour sa femme et son fils, pour raconter au gouvernement, en face-à-face, ce qu’il lui avait fait subir.

58Il attend patiemment son tour dans la file d’attente, pour emporter le déjeuner distribué par le personnel de la mairie – ragoût de riz et de poulet dans des boîtes de polystyrène et briques de jus tiède. Il étire plusieurs fois sa jambe, pour se préparer à la longue remontée vers la montagne.

L’anthropologue

59Je suis mal à l’aise au début, en écoutant Pilar. Son allure de citadine « classe moyenne » jure avec celle des gens du village. À leur expliquer pourquoi la paix est importante, alors qu’on voit bien qu’elle vient d’une famille qui n’a pas souffert du conflit, tandis que cette région, cette ville ont subi pendant quarante ans des assassinats, des déplacements forcés et des reprises en main violentes et répétées à la fois par la guérilla et par les paramilitaires.

  • 3 Joel Robbins, « Beyond the Suffering Subject. Toward an Anthropology of the Good », Journal of the (...)

60C’est facile de me mettre à la place du public qui m’entoure, « l’autre souffrant3 », les victimes de la violence, ceux qui vivent au cœur de la confrontation armée. En bien des façons, un gouvernement qui essaie de faire la paix est plus « autre » qu’une victime. Mais alors que j’ai du mal à garder le dos droit par cette chaleur, je me rappelle que l’anthropologie implique de conférer la même dignité interprétative à tous. Je dois aussi voir les choses selon la perspective de Pilar ; en travaillant dans son bureau, j’ai vu à quel point elle est sous pression et combien c’est difficile pour l’État de réaliser quoi que ce soit, compte tenu de toute la bureaucratie et des luttes politiques internes. Le défi consiste à prendre sérieusement en considération les expériences de l’équipe de pédagogie pour la paix du gouvernement sans perdre de vue ni leur privilège et leur pouvoir structurels dans la société colombienne, ni la responsabilité du gouvernement et de ses membres dans le futur de la Colombie.

61La paix, finalement, concerne l’État. C’est lui qui applique un accord de paix. La défiance vis-à-vis de l’État est courante dans les sociétés post-conflit. Dans des communautés comme celle-ci, les discours sur « l’abandon par l’État » sont profondément enracinés ; celui-ci a été un acteur du conflit et il y a historiquement une extrême méfiance envers lui. Je vois que tout ceci est projeté sur Pilar alors qu’elle fait face au public. Ce n’est pas de sa faute si les inégalités structurelles de la société colombienne sont imprimées sur son visage, ses vêtements, son accent. Elle est simplement un être humain, un produit du contexte qui l’a façonnée. Ce n’est pas facile pour elle ; les pédagogues de la paix n’ont pas le pouvoir d’agir ; leur unique rôle dans le gouvernement est de prendre un avion à Bogota, de prononcer un discours et de repartir. Pilar a raison. Pour protéger le processus de paix, l’État et la société doivent travailler ensemble ; cependant, la pédagogie de la paix révèle un gouffre dans la relation gouvernement/société qui, tout en ayant une dynamique propre au cas colombien, a peut-être des échos planétaires.

  • 4 Le 9 avril 2019, selon le Kroc Institute chargé du suivi de l’application. Voir le rapport en lign (...)

62Vous vous demandez peut-être où en est aujourd’hui le processus de paix. Nous pouvons dire, de façon juste, qu’il est maintenant suspendu. Des avancées ont été réalisées sur lesquelles il sera difficile de revenir, en particulier le désarmement de 90 % des FARC, leur transformation en un parti politique et la création d’un système juridique de transition. Mais le vide laissé par les FARC a été rempli par des groupes armés non étatiques. Les discussions avec les groupes de guérilla restants – l’Armée nationale de libération (ELN) – se sont interrompues sous la présidence Duque ; ce dernier a choisi le retour à l’éradication forcée des cultures illicites de coca plutôt que la substitution des cultures promise par le gouvernement, bouleversant ainsi la vie de pauvres paysans et intensifiant la violence dans les territoires plantés en coca. Le gouvernement de Duque a aussi coupé de manière drastique les budgets des mécanismes de transition juridique et a lancé des attaques répétées contre l’organe législatif présidant à la Juridiction spéciale pour la paix, une cour créée pour enquêter, juger, punir et sanctionner les principaux responsables de crimes graves commis des deux côtés pendant le conflit. Avec la réorganisation de groupes armés dans l’ensemble du pays, l’assassinat de plus de 500 leaders de communautés locales et de plus de 150 anciens combattants des FARC, certains de leurs chefs influents ont repris les armes. Au total, seul 35 % de l’accord de paix a été vraiment appliqué jusqu’ici4. Après l’élection de Duque, Pilar et ses collègues sont partis parce que le personnel gouvernemental change avec chaque mandature. La pédagogie de la paix n’est plus la priorité, et si c’était le cas le message serait tout à fait différent, compte tenu des vues du nouveau gouvernement sur la paix.

63Est-ce qu’une alliance gouvernement-société plus forte aurait pu empêcher cette tragédie ? Le gouvernement Santos a mené des centaines d’actions de pédagogie de la paix entre 2012 et 2018, en parcourant tout le pays pour informer les gens et répondre à leurs questions. Je pense que la manière de les concevoir présentait de nombreux problèmes, et non des moindres était celui du trop peu, trop tard. Finalement, la « pédagogie de la paix » est simplement un aspect de la communication et de la relation du gouvernement avec la société. Pourtant, cette « pédagogie politique », comme on pourrait plus largement l’appeler, peut constituer un schéma directeur pour transmettre une information pertinente à la société dans d’autres contextes marqués par la polarisation et la désinformation politiques. Une sorte de diplomatie du gouvernement vers la société, peut-être, mais qui exige une grande attention à la relation gouvernement-société, de même qu’une problématisation de l’idée de « vérités » rationnelles, techniques, objectives, sans que celle-ci soit déconstruite au point d’être précipitée dans l’oubli.

64Le futur du processus de paix dépend du soutien de la communauté internationale et des milliers de citoyens et d’organisations qui en Colombie continuent courageusement de faire le siège du gouvernement Duque pour obtenir l’application de l’accord de paix tel qu’il a été voté, avec une attention égale aux six points. Mon rôle, tel que je le vois, est de transmettre ce message, avec toutes les mises en garde possibles concernant la vérité vs la post-vérité, mais sans jamais perdre de vue la nécessité d’une solution négociée au conflit armé en Colombie. Peut-être cela est-il aussi, de manière modeste, une forme de pédagogie de la paix.

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Notes

1 Institute for Integrated Transitions (IFIT), Los debates de La Habana. Una mirada desde adentro, Bogota, IFIT, 2018, p. 24.

2 Bien que cela ait été inclus dans l’accord de paix, le Congrès a ensuite rejeté la loi qui devait permettre la création des circonscriptions.

3 Joel Robbins, « Beyond the Suffering Subject. Toward an Anthropology of the Good », Journal of the Royal Anthropological Institute no 19, 2013, p. 447-462, en ligne : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.1111/1467-9655.12044 [dernier accès, octobre 2020].

4 Le 9 avril 2019, selon le Kroc Institute chargé du suivi de l’application. Voir le rapport en ligne : https://kroc.nd.edu/assets/316152/190409 [dernier accès, octobre 2020].

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Pour citer cet article

Référence papier

Gwen Burnyeat, « L’émissaire »Terrain, 73 | 2020, 164-185.

Référence électronique

Gwen Burnyeat, « L’émissaire »Terrain [En ligne], 73 | 2020, mis en ligne le 09 octobre 2020, consulté le 04 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/terrain/20472 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/terrain.20472

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Auteur

Gwen Burnyeat

University College London

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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