- 1 Pour présenter le projet de Martine Aubry, nous nous appuyons ici sur le relevé des débats qui ont (...)
1Fin 1997, Martine Aubry, alors ministre de l’Emploi et de la Solidarité, lance une nouvelle mesure 1 pour lutter contre le chômage très élevé des jeunes. Les emplois jeunes ne constituent pas selon leur initiatrice une action en faveur de sans-emploi en difficulté « soit parce qu’ils ont connu des situations familiales et sociales difficiles, soit parce qu’ils sont au chômage depuis longtemps, soit parce qu’ils ont sombré, souvent par désespérance, dans la délinquance ou même dans la drogue, sortant peu à peu des marges de notre société. Pour ceux-là, les emplois jeunes ne sont pas la réponse […]. Je dis très clairement les choses, les emplois que nous vous proposons de créer sont ouverts à tous les jeunes, qualifiés ou non, capables de travailler et prêts à occuper un emploi à temps plein, car ce sera la règle » (Aubry, Sénat, 1997). Seuls les jeunes immédiatement disponibles et aptes à occuper un poste sont concernés par le programme dénommé « Nouveaux emplois, nouveaux services ». Cet intitulé renferme toute l’originalité du dispositif pour lequel l’Etat s’engage à financer pendant cinq ans de nouvelles activités qui devront répondre à des besoins non satisfaits. Cet investissement sur plusieurs années est jugé nécessaire pour permettre aux employeurs de contribuer à la naissance de vrais métiers. Les aides ne seront d’ailleurs accessibles qu’aux porteurs de projet qui présenteront « les conditions prévisibles de la pérennisation des activités et des dispositions de nature à assurer la professionnalisation des emplois » (Journal officiel, loi n° 97-940).
- 2 « Si le programme est centré sur les jeunes de moins de 26 ans, il reste ouvert à des personnes de (...)
- 3 Les notions Achieved et Ascribed sont citées par Rocheblave-Spenlé (1969) qui les emprunte à R. Lin (...)
2Avec du recul, il semble que le cœur de ces dispositions recouvre des aspects dont l’articulation pose question. Le gouvernement entend impulser la création de métiers durables et institués. Pour ce faire, il amorce le processus via un financement étalé sur soixante mois en espérant que les activités soient à terme absorbées par le secteur marchand. La mise en œuvre de ce projet requiert l’embauche et l’implication d’une main-d’œuvre ciblée suivant un critère d’âge. Seules les personnes âgées de 18 à moins de 25 ans (et les 25 à moins de 30 ans avec dérogation 2) sont autorisées à occuper les postes ainsi créés, dits « emplois jeunes ». Or, ce titre octroie à celui qui le porte un statut hybride. La notion d’emploi renvoie en effet aux statuts conquis (achieved 3) qui « ne se distinguent par aucun trait extérieur particulier et ne peuvent pas être reconnus directement. Ainsi, le statut de professeur ne se manifestera qu’à travers des conduites spécifiques constituant le rôle joué ». La notion de jeune, quant à elle, correspond aux statuts assignés (ascribed), « tels le sexe, l’âge, qui frappent directement l’observateur grâce aux particularités physiques qu’ils impliquent : ainsi, le statut de femme peut être reconnu directement, avant d’apparaître dans des conduites particulières » (Rocheblave-Spenlé 1969 : 57).
3Tout se passe comme si la jeunesse était considérée comme une compétence potentiellement constitutive d’une activité professionnelle. En d’autres termes, il semble que la loi de 1997 compte sur des ressources « naturelles » pour voir émerger un processus de professionnalisation.
4Afin d’analyser les effets de la mise en pratique de tels principes, nous avons choisi d’examiner plus précisément le cas des emplois jeunes qui exercent dans le secteur de la médiation sociale. Ce domaine se prête d’autant plus à notre questionnement que les fonctions qu’il recouvre s’appuient explicitement sur la jeunesse des médiateurs. Ces derniers se présentent en effet souvent comme « des jeunes qui parlent aux jeunes ».
5Dans un premier temps, la question de l’âge en tant que construction sociale sera abordée notamment à travers les catégories d’âge indigènes des médiateurs, catégories à travers lesquelles ils lisent le milieu social où ils évoluent. Il est à noter que, dans cette classification, ils ne se rangent pas aux côtés des adultes. Les raisons de ce choix seront développées dans la seconde partie ; il apparaît que l’état d’emploi jeune les place dans une sorte d’espace d’expérimentation ou de socialisation professionnelle où ils demeurent dans l’attente d’un emploi durable. En dernier lieu, nous verrons que socialisation ne rime pas forcément avec professionnalisation, processus peu favorisé, notamment à cause de la prédominance donnée aux caractéristiques personnelles, telles que la jeunesse, plutôt qu’à des compétences professionnelles.
6Les résultats présentés ici reposent sur un travail de terrain réalisé de septembre à décembre 2000, auprès de deux équipes de médiateurs implantées pour l’une en région parisienne et pour l’autre en Haute-Normandie.
7Les agents sont chargés d’assurer une présence dissuasive et rassurante. Ils exercent leur activité sur certains lieux publics tels que les transports en commun, les gares ou les arrêts de bus et de métro, les sorties de collèges et lycées, ou encore certains quartiers de cités défavorisées d’où les agents sont d’ailleurs issus en majeure partie.
- 4 Animateurs ou formateurs.
- 5 CDS : contrat départemental de sécurité.
8Dans le premier cas de figure (site n° 1), les 70 agents ont signé un contrat à durée indéterminée et perçoivent un salaire de 20 % supérieur au SMIC. Ils sont répartis dans trois équipes. Nos observations ont été centrées plus particulièrement sur l’activité de l’une d’entre elles, la plus ancienne comptant 20 médiateurs et qui avait huit mois d’existence à notre arrivée. L’employeur, une association d’éducation populaire (de plus de cinquante ans d’existence), s’est engagé à intégrer les médiateurs dans des métiers classiques 4 si leur activité actuelle ne se pérennisait pas au terme de l’emploi jeune. Le Conseil général a été à l’initiative de la mise en place du dispositif dans le cadre d’un CDS 5 et contribue de ce fait à son financement.
- 6 CLS : contrat local de sécurité.
9Sur le second site (site n° 2), les 66 agents sont embauchés en contrat à durée déterminée. Leur salaire équivaut au SMIC, rehaussé de 3 % par année d’ancienneté. Les agents les plus anciens ont d’abord été employés dans le cadre de contrats emplois ville, transformés en contrats emplois jeunes en septembre 1998, date de création de l’association qui les emploie. Le dispositif a été mis sur pied dans le cadre d’un CLS 6 passé entre l’Etat,le district d’agglomération et une compagnie de transport en commun qui sont les financeurs du projet. Le site compte six équipes qui se déploient sur plusieurs communes en fonction des lignes de métro et de bus où elles interviennent.
10Le recueil des données s’est tout d’abord déroulé par observation non participante. Afin de comprendre ce que recouvre l’activité des médiateurs, nous avons suivi chaque équipe pendant plusieurs semaines, simplement en les accompagnant au jour le jour dans leurs occupations. Le travail des médiateurs comprend parfois des interventions imprévisibles et délicates, mais en grande partie leur temps est employé à exercer une veille active sans qu’aucun trouble ne survienne. Ces moments où « il ne se passe rien » sont propices à de longues conversations à bâtons rompus au cours desquelles nous avons pu glaner des informations certes décousues, mais foisonnantes sur l’organisation du travail, sur les représentations des médiateurs, sur leurs activités, tout en assistant aux échanges entre agents, ainsi qu’à la régulation implicite de leurs actions. Cette méthode exige une attention soutenue du déroulement plus ou moins rapide d’événements parfois insignifiants. Dès que la situation se prêtait à la prise de notes, les observations étaient consignées dans un carnet de route. Cependant, les médiateurs ont souvent été intrigués par ce qui relevait pour eux d’une « drôle de manie ». Certains ont demandé à lire les notes prises régulièrement. Il a donc fallu dans de nombreux cas attendre d’être seule pour coucher sur le papier les remarques et questions que suscitaient les observations, sachant que de tels commentaires risquaient de biaiser le cours spontané des situations si les protagonistes en avaient eu connaissance.
11La phase d’observation a été complétée par des entretiens semi-directifs enregistrés qui ont notamment fourni l’occasion de revenir sur certains faits que les jeunes commentaient a posteriori.
12L’intitulé « emploi jeune » met l’accent sur la notion de jeunesse qui va être prise en considération à travers un examen, d’une part, des catégories « administratives, des codifications officielles et normatives » et, d’autre part, des catégories « pratiques, du langage “naturel” des acteurs, sujets ou individus étudiés à travers leurs productions langagières » (Demazière & Dubar 1997).
13Pour sa part, le législateur donne une définition précise des emplois jeunes en référence à l’âge biologique. Il en résulte que les jeunes concernés doivent appartenir à une tranche d’âge au final assez large comprise entre 18 et moins de 30 ans. Les termes de la loi sont en fait très succincts puisque le seul critère appliqué est quantitatif et dépend d’une date de naissance.
14Les médiateurs, quant à eux, s’autodésignent comme jeunes, notamment parce que leur contrat de travail et leur titre viennent instituer cette identité sociale. Toutefois, les agents ont affiné cette catégorie grossière et distinguent plusieurs sortes de jeunes. Ces distinctions se font jour à travers leur mode de relation aux publics qui diffère selon le groupe d’âge auquel appartiennent leurs interlocuteurs.
- 7 Les médiateurs sont tous désignés sous des prénoms d’emprunt.
15Les contacts les plus aisés se déroulent avec les « petits ». Les tranches d’âge sont moins précises que celles du législateur, mais approximativement les « moins grands » ont entre 10 et 12 ans. Leurs aînés font partie des « ados » dont l’âge moyen tourne autour de 14-15 ans. Ces deux groupes fréquentent un établissement scolaire, soit un collège, soit un lycée. Les premiers ne posent pas de difficultés aux médiateurs qui ont auprès d’eux un rôle éducatif, alors que les « ados » demandent plus d’égards : « A cet âge-là, on peut leur dire : “Ne fais pas ça, ne fais pas ci !” On peut leur dire, on est plus grand qu’eux ! On a un rôle de grand frère ! Là, c’est plus les 12, 11, 10 ans. Tu vois, cinquième, sixième. Un petit peu avant l’adolescence, on peut se permettre de dire : “Tu peux pas faire, tu vas faire…” Ils peuvent accepter ça, leur ego accepte encore. Quand ils sont adolescents, non, non ! Là, c’est une autre pédagogie. Là, on lui dit : “Regarde, tu es un garçon respectable, tes parents, ils sont contents de toi, ils sont fiers de toi. Tu voudrais qu’ils changent d’avis ?” » (James 7, site n° 1).
16Les « gamins » reconnaissent une certaine autorité aux médiateurs et leur obéissent volontiers. Il en va tout autrement avec leurs aînés, les « ados », qui adoptent souvent des comportements provocateurs envers les médiateurs. C’est ainsi que Maxime et Dom (site n° 1), à un arrêt de bus, sont abordés par un garçon d’environ 14 ans qui tient ostensiblement une bombe lacrymogène à la main. « Je vais taguer tout le bus ! Après, j’irai en prison ! » s’exclame le garçon en agitant sa bombe à proximité des deux médiateurs qui choisissent de ne pas relever le défi. La scène prendra fin à l’arrivée du bus. Maxime reconnaît son impuissance devant ce genre d’incident : « Et puis là, qu’est-ce qu’on pouvait faire ? On n’a pas le pouvoir de lui enlever son arme. Il risque de gazer quelqu’un simplement en frimant ! Il n’est pas méchant, mais il peut faire des conneries ! »
17La catégorie des jeunes se compose d’un dernier groupe, celui des « grands » ou des « plus grands ». Ce qui les caractérise n’est pas l’appartenance à un âge précis, mais plutôt le fait de ne plus être scolarisés. Les grands sont en emploi, au chômage ou inactifs. De ce fait, les médiateurs considèrent appartenir à cette classe d’individus avec lesquels les relations sont plutôt sereines. Ils rencontrent d’ailleurs fréquemment des jeunes de leur génération avec qui ils ont entre autres fréquenté l’école. Les grands ne sont pas à l’origine de troubles dans les lieux publics : ils ont passé l’âge du chahut et des bagarres que les « ados » savent si bien organiser, notamment à la sortie du collège.
18La jeunesse cesse à cette frontière imprécise et laisse la place à la catégorie des « grandes personnes ». Ce terme est très fréquemment utilisé par les médiateurs qui pour certains ont presque 30 ans. Ils emploient également d’autres qualificatifs tels que les « vieux » ou les « adultes ». Avec eux, les relations sont plus problématiques pour les médiateurs. Alors qu’ils tutoient systématiquement tous les jeunes, le vouvoiement s’impose avec les adultes. Il leur est plus difficile de nouer des contacts spontanément, alors qu’ils vont au-devant des jeunes sans hésitation. Les médiateurs estiment à ce propos que les contacts avec un jeune inconnu sont beaucoup plus faciles à établir qu’avec un adulte connu (personne rencontrée tous les jours au même endroit, commerçants, chauffeurs de bus, etc.).
19Enfin, il faut ajouter une dernière catégorie, celle des « personnes âgées » qui se révèlent souvent être des « petites grands-mères ». Les médiateurs éprouvent plutôt de la sympathie envers elles, mais certaines ont au premier abord des réactions de méfiance ou de peur face à ces jeunes.
- 8 On notera au passage que les enfants de moins de 10 ans ne font pas partie du public des médiateurs (...)
20Les catégories d’âge indigènes produites par ces médiateurs mettent donc en évidence que pour eux la jeunesse ne représente pas un bloc indifférencié 8, mais divisé en groupes d’âge construits entre autres par rapport au monde scolaire. L’autoclassement des médiateurs dans le groupe des « grands », et non dans celui des adultes, engendre certains effets repérables au niveau de leurs pratiques professionnelles.
21Il apparaît tout d’abord que les équipes de médiateurs étudiées entretiennent principalement des contacts avec des jeunes, d’une part par choix, et d’autre part parce que nombre de leurs lieux d’intervention (sorties d’école, maisons de quartier, etc.) les amènent à rencontrer cette population. Par ailleurs, les fauteurs de trouble dans les transports en commun sont le plus souvent des jeunes qui, par exemple, fument au fond du véhicule ou mettent leurs pieds sur les sièges. Les agents de médiation jouent alors avec aisance le rôle du « grand frère » auprès des « petits » et des « ados ». Ce rôle leur procure une reconnaissance, une légitimité parce qu’il leur permet de faire valoir un principe de séniorité entre jeunes, c’est-à-dire dans un rapport de domination, qui se doit en l’occurrence d’être diplomatique, entre aînés et cadets (Galland 1997).
22Une autre conséquence de leur appartenance au groupe des « grands » se traduit par un rapport juvénile au travail. De manière générale, ils adoptent des comportements et des attitudes dilettantes, décontractés et parfois ludiques. Ils se conduisent plus ou moins comme des « grands » et non comme des « grandes personnes », au moins pour deux raisons. D’une part, les médiateurs se retrouvent pour certains entre amis ou « ennemis » d’enfance puisqu’ils sont issus des mêmes quartiers. Ils se considèrent alors difficilement entre collègues de travail. D’autre part, les nombreux contacts avec un public jeune, qui se compose parfois d’amis, non seulement entretiennent, mais imposent un comportement juvénile. Cette attitude leur permet en effet de mieux faire accepter leur mission de maintien de la tranquillité publique. Dans ce but, ils doivent éviter tout rapport de force pour désamorcer les conflits ou pour corriger les comportements déviants.
23Par ailleurs, les plaisanteries ou encore les scènes de drague, plus ou moins masquées, constituent une part non négligeable de leurs occupations. Ils connaissent les « combines » des jeunes des quartiers où se déroulent leurs tournées. Ainsi, à un arrêt de métro du site n° 2, peut-on entendre fréquemment retentir la sonnerie du téléphone public installé là. Les jeunes présents ne sont pas surpris et, lors d’un nouvel appel, l’un d’eux se dévoue pour décrocher le combiné, comme par cet après-midi de novembre. Un jeune d’environ 16 ans se décide à prendre l’appel. Après quelques secondes, il crie à la cantonade : « Est-ce que Estelle est là ? » Comme personne ne répond, il indique au correspondant avant de raccrocher : « Désolé, elle n’est pas là ! » Les médiateurs me diront par la suite que certains d’entre eux donnent ce numéro de téléphone à leurs conquêtes pour ne « pas être embêtés sur leur portable ».
24En définitive, l’analyse du rapport à la jeunesse, et de sa catégorisation chez les médiateurs, permet de déceler que ces derniers connaissent un ralentissement de leur vieillissement social. Puisque « l’effet de l’âge sur les conduites sociales ne peut être indépendant de l’inscription sociale de l’âge » (Attias-Donfut 1988), il apparaît que l’état d’emploi jeune place les titulaires dans une phase d’attente, avant de pouvoir faire partie des adultes. Ils gardent un habitus de « grands » qui transparaît dans leur vocabulaire ; il est en effet assez étonnant d’entendre des individus de 25 ans ou plus, par ailleurs parfois pères ou mères de famille, utiliser les termes de « grandes personnes » pour désigner des personnes guère plus âgées qu’eux. Seule l’« inscription sociale » de l’âge éclaire leur positionnement ; l’emploi jeune ne procure pas une situation professionnelle à part entière. A ce propos, Jordane (site n° 1), en parlant de médiateurs qui sont devenus chauffeurs de bus, souligne qu’ils « sont passés de l’autre côté ».
25La jeunesse de leurs salariés conduit les employeurs et encadrants à les considérer en phase d’adaptation au monde du travail. De ce fait, ils veillent à la socialisation des médiateurs en tentant de rectifier des comportements inadaptés.
- 9 Ces critères semblent avoir été appliqués de manière assez générale. Un récent rapport remis au min (...)
- 10 L’équipe du site n° 1 compte 5 filles et 15 garçons ; celle du site n° 2, 8 filles et 58 garçons.
26Les critères de sélection des médiateurs sur les sites considérés 9 ont favorisé l’embauche de jeunes qui résident dans les quartiers dits sensibles, c’est-à-dire économiquement et culturellement défavorisés. Un tel recrutement local a entraîné la surreprésentation de jeunes issus de l’immigration. Entre autres caractéristiques sociodémographiques, ils sont peu diplômés et majoritairement du sexe masculin 10. Tous les employeurs et responsables de proximité formulent le même constat : les jeunes embauchés ne sont que partiellement adaptés au milieu du travail. Un faisceau de facteurs explique cette inadaptation : manque d’expérience professionnelle, comportements ou présentation de soi non professionnels, difficultés scolaires et/ou familiales, démêlés avec la justice, problèmes de santé, etc. Ces « handicaps » se traduisent par des manifestations très éloignées des attentes des employeurs qui se heurtent à des « habitus caractéristiques des formes contemporaines de la culture de rue propres aux jeunes sans capital scolaire ni expérience professionnelle et sans autres ressources que leur force physique et/ou morale » (Mauger 2001 : 13).
27Les encadrants sont obligés au quotidien de faire face à des comportements et attitudes inadéquats. Parfois pris au dépourvu, ils traitent au coup par coup ces dérives et tentent de modifier des schèmes d’action inappropriés.
28Le directeur de l’association du site n° 2, qui emploie 66 agents, est souvent confronté à des réactions liées à des normes et des valeurs des cités où par exemple « se sourire, ça veut dire se foutre de la gueule de l’autre ! ». Il évoque notamment le déroulement laborieux des réunions de travail : « Ce qui m’a un peu surpris au début… C’est dans les réunions de coordinateurs, entre les coordinateurs, ou dans les réunions de secteur entre les agents… Les précautions oratoires qui étaient prises avant de dire les choses ! Je caricature à peine, mais quand un coordinateur faisait une remarque à l’autre ou des agents entre eux, ils commençaient toujours par dire : “Bon écoute, ce que je vais te dire, c’est pas vis-à-vis de toi que j’en ai, c’est par rapport à ce qui s’est passé, mais je te respecte, je respecte ta personne, patati, patata…” Avant de lui dire : “Là, tu as fait un truc où je suis pas d’accord !” Mais ils faisaient sortir la situation de la relation entre les deux personnes ! Et à partir de ce moment-là, ils pouvaient parler. Mais autrement, ça voulait dire que l’autre s’il se sentait, lui, mis en cause, c’était plus possible de communiquer ! »
29Ce directeur intervient lors d’échanges entre médiateurs afin de réduire leurs dispositions à établir un rapport de force pour les encourager à parler et à argumenter leur point de vue : « Par exemple, il y a eu des problèmes entre Mario et Abdel. Je les ai vus tous les deux ensemble, ça a été une réunion très rapide de dix minutes, un quart d’heure. Je leur ai dit : “Il faut que vous preniez des faits que vous avez gérés de façon différente, et là, vous ne parlez que de la situation en étant capables de vous écouter !” »
30Au sein de l’association, les conversations dans la salle des médiateurs portent très fréquemment sur les retards, les absences injustifiées, et donnent lieu à des contestations de la part des agents qui se voient sanctionnés. Sur ce site (n° 2), les 66 agents sont répartis dans cinq groupes, chacun encadré par un coordinateur en emploi jeune, anciennement médiateur. Les coordinateurs ont été choisis pour leur sérieux et leur compétence à prendre en charge une équipe. Ils sont donc conformes au modèle professionnel et usent de leur influence ou de leur autorité pour corriger les « imperfections » de leurs subordonnés.
31Ainsi Dany se débat-il quasi quotidiennement pour éradiquer le problème des retards qu’il analyse en ces termes : « Parce que c’est le travail aussi, il fait que, par exemple, si on est en retard, ça n’a pas d’importance ! Parce que je veux dire, c’est pas une question de vie ou de mort ! On peut pas se responsabiliser à fond ! Mais pour eux, arriver en retard, pratiquement, c’est rien ! Je veux dire par là, on lui dit : “Oui, t’arrives dix minutes en retard !”, lui, il va te dire : “Vas-y, dix minutes, c’est pas la mer à boire !” Pourtant dans une entreprise, n’importe quelle entreprise, dix minutes de retard, quand même, ça compte ! Dix minutes ! Je veux dire que c’est pour ça que c’est hyper-difficile à gérer, c’est qu’on va faire la comparaison, par exemple, avec un chauffeur de bus, un agent de médiation qui arrive dix minutes en retard, et un chauffeur qui arrive dix minutes en retard, ça n’a pas les mêmes conséquences ! Le chauffeur, il va être dix minutes en retard, il va mettre tout le monde en retard ! C’est une organisation qui est faite pour que tout le monde soit à l’heure ! Là, le mec il arrive en retard… Bon, bah, il arrive en retard, c’est pas… Voilà, il prendra le bus d’après ! C’est vrai que c’est pas évident ! Il faut se battre ! Je crois qu’un des gros problèmes, c’est celui-là ! » Manifestement, Dany a intégré les contraintes et obligations professionnelles et œuvre pour les transmettre à ses collègues.
32L’encadrant de l’équipe du site n° 1, quant à lui, n’est pas en emploi jeune. Agé de 40 ans, il représente l’adulte qui accompagne quotidiennement les médiateurs. Sa présence en continu lui permet d’être témoin de leurs agissements. Il réalise un travail en profondeur qui passe, par exemple, par le rappel de principes moraux qu’il illustre avec la lecture d’extraits de livres traitant de la vie en groupe, du respect de la vie humaine, de l’autre, de soi, etc. Son modelage s’effectue également par des rectifications qu’il apporte lorsque l’occasion se présente. Ainsi, un matin pendant la pause, un petit groupe de médiateurs discutent joyeusement. Soudain, Akli mime une parade de défense d’un quelconque sport de combat. Les spectateurs sont ravis et s’esclaffent. Mais à cet instant, l’encadrant surgit et, visiblement en colère, claque des doigts et tend un index menaçant vers Akli : « La prochaine fois, j’en prends un pour taper sur l’autre ! », puis s’en va. Akli reste les bras ballants, vexé par cette réprimande. Il se met à l’écart du groupe et laisse échapper un commentaire à voix basse : « On se croirait à l’école ! » Lors d’une discussion avec l’encadrant, celui-ci explique que cet épisode l’a contrarié parce que la scène s’est déroulée à l’entrée du local, devant une porte vitrée, à une heure où ses supérieurs hiérarchiques sont susceptibles de passer : « Ils vont encore dire : “C’est les petits jeunes qui chahutent, c’est pas sérieux !” » Leur comportement juvénile risque de nuire à leur image et de saper le crédit de l’équipe que l’encadrant s’efforce de construire petit à petit.
33De bien des manières, donc, le dispositif emplois jeunes procure aux médiateurs un « espace d’expérimentation au travail » où se déroulent des processus de « socialisation professionnelle » (Nicole-Drancourt & Roulleau-Berger 2001).
34Toutefois, dans le domaine de la médiation sociale, il ne s’agit pas pour les agents uniquement de se conformer plus ou moins consciemment à un modèle de conduite professionnelle socialement attendu et acceptable dans leur milieu de travail, justement parce que leur milieu de travail ne se résume pas aux relations avec leur hiérarchie. Leur activité principale consiste à intervenir auprès d’un public qu’ils connaissent bien puisqu’ils appartiennent au même milieu social. Ils ont d’ailleurs en grande partie été choisis pour leur familiarité avec la population concernée. Le travail de socialisation qui s’opère chez les médiateurs se révèle en fait très complexe. Il leur faut intérioriser des habitudes, notamment corporelles, cognitives, gestuelles et langagières, qui ont cours dans le milieu social de leurs responsables dont on peut grossièrement dire qu’ils appartiennent à la classe moyenne. Mais parallèlement, ils doivent mobiliser leurs schèmes d’action « naturels », c’est-à-dire de leur milieu social d’origine, pour être acceptés par leur public dans leur mission de prévention et de dissuasion. Cette mission est particulièrement délicate puisqu’ils ne disposent d’aucun pouvoir et d’aucun moyen de sanction. Le succès de leurs interventions ne dépend donc que de la confiance qu’ils inspirent et de leur intelligence des situations. Aussi leur approche doit-elle être spontanément en concordance avec les codes de leurs interlocuteurs. En tant qu’observateur extérieur, on peut parfois être surpris de certaines réactions des médiateurs. Maxime (site n° 1) adopte systématiquement un air goguenard devant une scène de bagarre qui met aux prises deux ou plusieurs « petits ». Il n’hésite pas à leur adresser quelques commentaires tels que : « Vas-y, nique-le ! » Cette attitude est en fait parfaitement adaptée aux circonstances. Les médiateurs savent en effet très bien repérer si une querelle « va dégénérer » ou non, si l’altercation est sérieuse ou ludique. Il serait particulièrement mal venu de s’interposer dans une bagarre rituelle, et ce même si les coups portés sont violents.
35Néanmoins, il serait faux de croire que les médiateurs se laissent entièrement porter par leur habitus. Ils sont certes « naturels », mais s’efforcent de maintenir une distance entre eux et les jeunes rencontrés : « Copains, non, faut pas qu’il y ait la même intimité ! Faut bien qu’ils comprennent qu’il y a une distance entre nous. Faut pas qu’ils perdent la confiance ! C’est parler, discuter, être gentil, mais on peut aussi être autoritaires. S’il y a une relation de copains, c’est fini, il n’y aura plus de respect, il nous insulteront… » (Babeth, site n° 1). Les médiateurs sollicitent donc leur sens pratique tout en introduisant une rupture dans les ajustements pré-réflexifs de la vie quotidienne (Lahire 1998). Dans leur rôle de médiateurs, ils ont perçu qu’une certaine maîtrise de leur spontanéité s’imposait. Ils parviennent en quelque sorte à instrumentaliser en partie leur habitus pour remplir leur rôle professionnel.
36D’après ce qui précède, le dispositif emplois jeunes peut donner l’occasion à des jeunes de se familiariser avec le monde du travail. Ils apprennent et intériorisent des règles et des contraintes formelles et informelles, non pas spécifiques à un domaine professionnel, mais transversales à différentes situations de travail. Les médiateurs intègrent (plus ou moins facilement) la ponctualité, découvrent les démarches administratives à mener, par exemple en cas d’arrêt maladie ou de demande de congé. Ils sont confrontés au pouvoir hiérarchique, aux sanctions en cas d’« insubordination » et se rodent pour certains à des exercices de négociation avec l’employeur. Par ailleurs, les responsables leur imposent des codes relationnels à respecter entre collègues ou instaurent des règles de vie en collectivité concernant par exemple l’utilisation et l’entretien du matériel et des locaux.
- 11 La notion de groupe professionnel renvoie ici à la définition de Y. Lucas et de C. Dubar : « Les gr (...)
37Cependant, ce processus de socialisation ne signifie pas pour autant que les médiateurs se professionnalisent, c’est-à-dire acquièrent la maîtrise d’une technicité, une qualification reconnue, ni qu’ils aient le sentiment d’appartenir à un « groupe professionnel 11 » qui serait en phase de constitution, étant donné les orientations de la loi de 1997 (prévoyant la création de nouveaux métiers).
38En effet, dans l’exercice de leur activité, les médiateurs s’appuient en grande partie sur des ressources personnelles liées à leur vécu, leur appartenance à une ethnie, à une culture et à un milieu social localisé dans les quartiers de banlieue. Ils ont des savoir-faire qu’ils appliquent en cas de besoin : « C’était pas nouveau de rentrer dans les conflits et de calmer parce que j’ai jamais été quelqu’un qui se bagarre. Dès que je voyais une bagarre, même si je suis pas médiateur, on y va pour essayer de calmer. Le fait qu’il y ait ce boulot-là, ça m’a intéressé parce que c’est un truc que je faisais naturellement ! Donc, pourquoi pas je le fais et puis je suis payé ! » (Slimane, site n° 2).
39En dehors des bagarres, les médiateurs interviennent également en cas de désaccords dénués de violence physique. Ils se réfèrent alors souvent à leurs propres principes moraux, sans toujours faire preuve de neutralité, notamment faute de code déontologique ou d’éthique professionnelle. Le récit de Maxime (site n° 1) laisse transparaître que, lors de la résolution de conflits, les médiateurs font valoir des arguments moraux en vigueur dans leur milieu, qu’ils partagent de ce fait avec leur public : « Il y a eu un jour, il y a eu un couple qui se sont tapé dessus. Enfin qui se sont tapé dessus, qui allaient se taper dessus ! En fait, c’était un jeune, il devait avoir mon âge environ, ou un petit peu plus vieux, entre 28, un truc comme ça… bon, je crois, que je sais pas… Il parlait mal à sa copine, il lui mettait la pression ou… c’est à peine qu’il la frappait pas ! Et en même temps, il y avait deux autres jeunes qui lui ont dit : “Ouais, écoute, ça se fait pas de parler comme ça à ta copine ! C’est bon, c’est une fille, euh… C’est bon, si elle a quelque chose, parle-lui, fais-lui comprendre, mais ça sert à rien que tu… que vous vous affichez comme ça devant tout le monde !” […] Ouais, c’était à la gare… après on a parlé aux jeunes, on a dit : “C’est bon, regardez-le, ça pourrait être votre grand frère. Là, il a bu, il est pas dans son état et tout ! C’est vrai, il vous parle mal et tout… je te comprends, même moi je permettrais pas qu’on me parle comme ça, mais laisse tomber, c’est pas grave ! On sait très bien qu’on peut lui donner une raclée, mais ça vaut pas le coup… laissez-le et tout, on va lui parler !” Après, on a parlé au gars, on a dit : “Ouais, je sais pas c’est quoi le problème exact entre toi et ta copine, mais, je sais pas, c’est ta copine, tu l’aimes ! Tu l’aimes ou tu la respectes ! Elle te respecte ! Si à un moment, on sait pas, y a peut-être eu un manque de respect à un moment donné, qu’il y a eu un problème, qu’il faut que tu te comportes comme ça avec elle ! Tu peux lui faire comprendre, en lui parlant calmement et même discrètement, que plutôt de chahuter comme ça ! Là, tu te fais passer pour un rigolo, un con, chose que t’es forcément pas et les gens ils vont penser que voilà… alors que c’est pas le cas ! Moi, je suppose que c’est pas du tout le cas avec toi !” On lui a bien parlé et tout et finalement, ça s’est bien passé ! »
40Le recours à des principes moraux personnels ne garantit pas l’application d’un traitement égalitaire du public. D’un médiateur à l’autre, les consignes peuvent différer. Certains fauteurs de trouble n’hésitent pas à mettre en exergue ces variations ou contradictions. Un fumeur de cannabis a ainsi pu contester les remontrances d’Abdel qui lui demandait de ne pas rouler son joint dans le bus. Le jeune s’étonne et lui signale que son collègue lui interdit uniquement de fumer dans le bus !
- 12 Vérificateurs dans les transports en commun.
41Le manque de références ou de directives précises n’est pas compensé par l’existence d’un programme de formation pour tous les médiateurs qui leur permettrait d’acquérir des compétences et une qualification professionnelles. Sur les deux sites pris en considération, les agents s’accordent pour dire que leur apprentissage s’est déroulé « sur le tas ». Les agents du site n° 1 ont construit leur activité en procédant en quelque sorte par « essais et erreurs ». Ils ont tiré des enseignements au fur et à mesure des problèmes rencontrés : « Parce que le fait qu’il y ait du monde autour, on l’a appris dès le début, le fait d’avoir du monde autour, ça incite les jeunes à se battre encore plus ! » (Babeth). Les nouveaux arrivés sur le site n° 2 bénéficient pour leur part de l’expérience des plus anciens qui leur transmettent leurs connaissances : « Moi Soya, je l’ai formée. Quand Soya est arrivée, on a recruté Soya parce que moi j’allais partir auprès des vérif 12, en tant qu’agent de médiation, donc on l’a recrutée et moi je l’ai formée pendant trois semaines, je lui ai appris toutes les bases, je lui ai appris les petites astuces, les petits trucs que je connaissais moi personnellement depuis trois ans. »
42Si les médiateurs ne peuvent faire valoir un niveau de qualification et obtenir par là une légitimité professionnelle, ils n’obtiennent pas non plus toujours de reconnaissance de la part de leur public. Ils souffrent en effet d’une stigmatisation due à leur titre et à la nature de leur activité.
43L’intitulé d’emploi jeune est en général très mal supporté par les médiateurs. Certains sont gênés si, par exemple, ce titre figure sur leur blouson et font disparaître l’inscription parce que « c’est trop la honte ! ». D’autres estiment qu’être étiquetés emploi jeune ne les rend pas crédibles ; cela suppose au contraire qu’ils bénéficient d’un emploi occupationnel : « Mais moi, j’ai envie de crier que c’est pas un emploi jeune ! J’aime pas le statut emploi jeune ! Emploi jeune, ça veut dire emploi fictif ! J’ai envie de dire, c’est pas ça ! Je suis pas emploi jeune ! Si je pouvais écrire : c’est pas un emploi jeune ! » (Isabelle, site n° 1).
44Le titre d’emploi jeune génère par ailleurs parfois des réactions dénigrantes ou ironiques. On serait tenté de croire que la fonction de médiateur met à l’abri des railleries, mais ce subterfuge ne semble pas efficace car, comme le souligne Dany, les gens ne sont pas dupes : « Pour draguer, faut pas dire que t’es médiateur ! Les filles, elles savent que derrière médiateur, il y a emploi jeune ! »
45Enfin, en assurant une présence sociale et une surveillance diffuse, les médiateurs donnent l’impression d’être inactifs. Ils essuient fréquemment des remarques plus ou moins désobligeantes telles que : « Ah, vous travaillez ! On ne dirait pas ! »
46Le rythme de travail des médiateurs suit en fait le cours de la vie urbaine dont ils se font les observateurs. Leur temps est « élastique » (Beaud 1997) : ils sont tributaires des événements perturbateurs dont la survenue imprévisible et soudaine les propulse dans l’action. En dehors de tout aléa, l’activité de veille redevient prédominante et s’avère également synonyme d’ennui.
- 13 Notamment chez les agents et leur encadrement, mais également chez des experts extérieurs comme Ber (...)
47Le rapport de ces salariés en contrat aidé à leur travail se révèle cependant plutôt positif. De manière générale, les médiateurs apprécient le côté relationnel de leur activité, et ce même si tous les publics ne sont pas abordés avec la même aisance, et même si l’ennui pèse parfois lourdement. Du point de vue de l’intégration professionnelle, leur positon correspond donc au type idéal de l’« intégration incertaine » qui conjugue satisfaction au travail et instabilité dans l’emploi (Paugam 2001). Ils se trouvent en effet dans une situation intermédiaire entre le chômage et l’emploi, en quelque sorte dans un emploi précaire de longue durée. Ils souhaiteraient voir disparaître l’étiquette stigmatisante de l’emploi jeune pour mettre en valeur un travail qui privilégie une approche préventive et dissuasive, plutôt que répressive. En effet, leur reconnaissance en tant que professionnels n’est pas acquise du fait de l’utilisation de ressources personnelles certes efficaces, mais qui demeurent non reconnues puisqu’elles n’ont pas été jusqu’à ce jour formalisées afin de mettre sur pied une formation qualifiante. Enfin, la jeunesse est très fréquemment conçue comme une caractéristique indispensable pour exercer l’activité de médiateur. Ce point de vue largement répandu 13 favorise l’idée d’une pérennisation des postes et d’une précarité pour des occupants temporaires. Le suivi de l’évolution des dispositifs de médiation dira si ces conditions sont propices à la construction d’un métier d’agent de médiation sociale.