Enseignement, préservation, et diffusion des identités numériques
Enseignement, préservation, et diffusion des identités numériques. Sous la direction de Jean-Paul Pinte, Hermès Lavoisier, 2014, 306 p.
Mai 2014
Texte intégral
1L’identité numérique, qu’elle soit individuelle ou collective, constitue désormais un avatar incontournable du quotidien tant domestique que professionnel. Cet ouvrage propose d’explorer les facettes de cette transposition virtuelle qui marque de son empreinte vie privée et espace public. A chacune de ses pérégrinations sur la Toile, l’individu ou le groupe est désormais sommé de choisir entre accès et souveraineté.
2Surgissent alors des questions qui convoquent nos institutions devant le tribunal de la cité, impliquant les affects et leur marchandisation, les libertés individuelles et le contrôle social, l’intimité et l’organisation de son spectacle, la traçabilité et la transparence.
3Parmi les contributions à cet ouvrage, celle d’O. Le Deuf analyse la place prise par les réseaux sociaux au sein du monde académique, préfigurant l’émergence de nouvelles littéracies ou capacités littéraires. La contribution de C. Alloing, analysant le cas de Twitter s’interroge sur le contexte d’émission de nos traces numériques et la modélisation de nos attributs identitaires, susceptible de définir une nouvelle forme d’autorité informationnelle sur la Toile et partant de nouvelles médiations mises en place par certains opérateurs comme La Poste s’interposant comme agent-facilitateur.
4Financé par l’Agence nationale de la Recherche dans le cadre d’un projet d’approche collaborative pour la détection d’attaques dans les réseaux Peer to peer (P2P), T. Cholez, I. Chrisment, O. Festor, G. Doyen et R . Fatoun se situe plus au plan technique pour analyser les faiblesses résultant de l’absence d’identification précise dans les réseaux de partage de contenus.
5Face aux menaces récurrentes venant exploiter les failles de sécurité de ces espaces virtuels, il est crucial de préserver une capacité d’anticipation dans la préservation de nos identités numériques. Ainsi, B. Birregah, C. Debard, M. Lemercier, et C. Perez nous entretiennent-ils des techniques d’élaboration d’identités numériques par investigation de smartphones et des potentialités d’enrichissement du profil par l’intermédiaire des réseaux sociaux. La mobilisation de cette méta-information identitaire suppose d’être en mesure d’évaluer la fiabilité de ces artefacts, ce qui soulève des questions plus institutionnelles et politiques.
6En effet, même si l’identité numérique ne possède pas encore (mais pour combien de temps ?) de définition juridique, le droit est de plus en plus fréquemment saisi des conséquences d’activités cyberdélinquantes usurpant l’identité numérique et portant atteinte à l’e-réputation des personnes et des groupes. M. Quéméner, brossant une typologie des activités cybercriminelles et des modes opératoires, analyse l’identité numérique comme un concept évolutif susceptible d’aménagements juridiques, notamment en ce qui concerne le droit à l’oubli.
7Scrutant sur Internet les échos des attentats du 11 septembre et du Printemps arabe dans les forums de discussion, A. Lamy nous montre comment les communications de masse interpersonnelles participent de la construction d’identités d’abord selon le mode déclaratif, puis de leur légitimation par leurs activisme numérique.
8Si la prise de conscience identitaire peut plus facilement dépasser les frontières territoriales grâce aux capacités d’Internet, cette réappropriation peut s’effectuer également au sein d’un espace national et d’un patrimoine culturel commun comme le montre S.Touhami dans le cas du Maroc et de la culture berbère.
9Les traits identitaires s’affichent en fonction des cibles de communication : c’est la leçon tirée par J. Bérard et V. Laroche de leur étude sur l’employabilité numérique basée sur l’insertion d’étudiants d’IUT et la création de portfolio électronique à l’échelle nationale, soutenu par la Mission pour l’enseignement numérique.
10Reprenant les réflexions de Serge Paugam sur la disqualification sociale, A. Boutet-Diéye cherche à définir la qualification numérique de l’identité en relation avec les trajectoires d’inclusion/exclusion c’est à dire à préciser, en termes d’expression statutaire, le lien entre les identités numériques et les conditions sociales vécues par les individus.
11Autre société, autres règles : E. Lelièvre nous invite à une plongée dans la matrice des jeux en ligne pour assister à la confrontation d’avatars au sein d’univers tri-dimensionnels où se glissent des millions de joueurs, au risque parfois de perdre leur véritable identité dans des fictions où s’abritent parfois trop aisément des déviances pathologiques.
12Cet ouvrage dirigé par Jean-Paul Pinte illustre parfaitement la tradition d’excellence éditoriale du Traité des sciences et techniques de l’information.
Pour citer cet article
Référence électronique
Robert Panico, « Enseignement, préservation, et diffusion des identités numériques », Terminal [En ligne], 116 | 2015, mis en ligne le 03 mai 2015, consulté le 09 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/terminal/728 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/terminal.728
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