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Hors thèmes

Tourisme et lutte contre la pauvreté : de la confusion des termes à la construction d’un discours scientifique ?

Bruno Sarrasin, Jonathan Tardif and Georgina Arreola Flores
p. 51-59

Abstract

Avec l'adoption en 2000 des objectifs du Millénaire pour le développement par les États membres de l’Organisation des Nations unies, la lutte contre la pauvreté est devenue indissociable du développement. Bien que la plupart des analyses s'attardent encore principalement à ses dimensions économiques, la pauvreté est maintenant comprise par les chercheurs, mais aussi par les institutions gouvernementales et non gouvernementales, comme une notion multidimensionnelle complexe qui interpelle toutes les disciplines. En raison notamment de sa croissance phénoménale dans les pays du Sud au cours de la dernière décennie, le tourisme est souvent envisagé par ces mêmes acteurs comme un vecteur de lutte contre la pauvreté, dont le tourisme « pro-pauvres » demeure l’exemple le mieux connu. À partir de la littérature scientifique publiée en anglais et en français depuis 1995, cet article propose un panorama de la recherche traitant des relations entre le tourisme et la pauvreté dans les pays du Sud. L’analyse de notre corpus confirme que cette relation est rarement abordée par les chercheurs et que ceux-ci contribuent très peu au renouvellement du débat sur le sujet, laissant non résolues les tensions entre la conceptualisation et l’opérationnalisation de ces notions.

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Full text

1Au cours des 15 dernières années, la lutte contre la pauvreté s'est imposée dans les discours et les actions associés au développement international. L’adoption en 2000 des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) par les États membres des Nations unies offre une apparence de consensus qui masque, dans le même temps, un débat sur la portée exacte de ces objectifs et des stratégies sous-jacentes de lutte contre la pauvreté (Ruggeri Laderchi et al., 2003). Malgré la difficulté, voire l’impossibilité à réaliser les OMD, l’intérêt de notre démarche ne repose pas sur une évaluation de l’efficacité des stratégies de lutte, mais bien sur la compréhension de la notion de pauvreté et de sa relation avec le tourisme de façon à pouvoir offrir un nouvel éclairage sur les divers « blocages » qu’on lui attribue. Le manque de consensus scientifique sur les causes, mais, aussi et surtout, sur le sens donné à la pauvreté s’explique à la fois par la diversité des disciplines invoquées et par la complexité du phénomène lui-même. Cet article vise précisément à clarifier le rôle joué par ces deux dimensions (diversité et complexité) à partir de la littérature scientifique des 15 dernières années dont l’analyse croise le tourisme et la lutte contre la pauvreté.

2En raison notamment de sa croissance phénoménale dans les pays du Sud au cours de la dernière décennie (Froger, 2010), le tourisme est souvent cité comme un vecteur de croissance économique (apport en devises, effet multiplicateur, etc.), de protection des ressources naturelles (aires protégées, écotourisme, etc.) et de développement local (création d’emplois, reconversion de la main-d’œuvre agricole, etc.) (Dwyer et al., 2010). En s’intéressant à la manière dont les chercheurs traitent des relations entre tourisme et pauvreté dans les pays du Sud, la discussion qui suit a pour objectifs de comprendre comment s’organise la réflexion scientifique sur le sujet, et de saisir la portée et les limites des analyses proposées par les chercheurs en les organisant en fonction des quatre perspectives de recherche identifiées par Regina Scheyvens (2011). Nous posons l’hypothèse que le paradigme économique dominant dans lequel s’insère l’essentiel des relations entre le tourisme et la pauvreté (questions posées, dimensions de ces questions, indicateurs de pauvreté, etc.) ne permet pas de renouveler le débat (les paramètres) sur le sujet.

3Notre démarche propose, à l’instar de Jean-Michel Berthelot (2001 : 203-204), d’être, d’une part, analytique et descriptif en cherchant à comprendre, au sein des disciplines appelées à la construction des liens entre le tourisme et la lutte contre la pauvreté, comment s’opère la production de connaissances ; quels sont les concepts clés qui sous-tendent la démarche de recherche et les théories analytiques ayant la lutte contre la pauvreté pour objet ; comment semble se constituer la communauté de recherche sur la lutte contre la pauvreté par le tourisme ; quelles sont les thématiques de recherche les plus souvent invoquées (c.-à.-d. écotourisme, rural, solidaire, équitable, communautaire). Nous suivons, d’autre part, une démarche interprétative et critique sur la valeur explicative que l’on peut accorder à la connaissance produite à partir d’un corpus d’articles scientifiques traitant du sujet.

Notion de pauvreté : la position des institutions internationales et son évolution

4Les racines de la notion de pauvreté et des débats qui y sont associés sont lointaines. Il faut pourtant attendre les accords de Bretton Woods et la création de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI) à la fin de la Seconde Guerre mondiale pour assister à l’émergence d’un discours dominant sur les causes et les solutions associées à la pauvreté. Dans les années 1950 et 1960, la pauvreté fait principalement référence au niveau de revenu et aux indicateurs macro-économiques (Hirschman, 1968 ; Rostow, 1962 ; Lewis, 1955). La croissance économique, qui s’appuie principalement sur des investissements massifs dans les infrastructures, y est vue comme la meilleure façon de venir en aide aux pauvres. La perception qui domine cette période mènera à la notion de trickle down effect (effet de ruissellement), qui suppose que toute forme de croissance économique finit par bénéficier aux pauvres (Ehrhart, 2006 ; Sarrasin, 1999). Dans bon nombre de pays du Sud cependant, la pauvreté de masse et les inégalités persistent en dépit d'une croissance économique qui peut être importante. Le discours dominant va donc évoluer au cours des années 1970 pour inclure la notion de « besoins essentiels » à celle de lutte contre la pauvreté. Comme le rappelle Ehrhart (2006 : 611), « le concept de pauvreté est donc élargi à des aspects non monétaires en définissant comme pauvre, [sic] toute personne (ou ménage) dont un ou plusieurs besoins essentiels ne sont pas satisfaits, indépendamment de son revenu ».

5En raison notamment des crises pétrolières et de l'instabilité financière et économique qui a suivi, les institutions de Bretton Woods relégueront la lutte contre la pauvreté au second plan (Ehrhart, 2006 ; Sarrasin, 1997). Le modèle économique néolibéral sur lequel s’appuient les programmes d’ajustement structurel mis en œuvre à partir des années 1980 replace l’équilibre macroéconomique au centre de ses préoccupations. C’est le rapport du Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF) sur « l’ajustement à visage humain », publié en 1987, qui amène les institutions multilatérales de financement à reconnaître l’existence de coûts sociaux de l’ajustement et la nécessité de faire une plus grande place à la lutte contre la pauvreté. À ce titre, l'année 1990 voit la publication du Rapport sur le développement dans le monde de la Banque mondiale et du premier Rapport mondial sur le développement humain du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) (Banque mondiale, 1990 ; PNUD 1990). Le premier représentait en quelque sorte « le consensus du moment que la croissance économique était nécessaire, mais non suffisante pour réduire la pauvreté » (Ehrhart, 2006 : 626). Le second présentait pour la première fois l’indice composite de développement humain (IDH) en cherchant à dépasser les limites d’une lecture du développement strictement associée aux revenus. Dans le rapport de la Banque mondiale cependant, et bien que la définition de pauvreté y soit élargie pour inclure notamment la privation de besoins fondamentaux (la santé, l'éducation, le logement, etc.), les analyses qu'on y trouve sont principalement d'ordre monétaire.

6Il faut attendre quelques années supplémentaires pour observer un véritable retour de la lutte contre la pauvreté à l'agenda de l’aide bilatérale et multilatérale, à partir de deux moments clés (Roe, 2008). D'abord, la publication en 1996 du rapport de l'OCDE, Le rôle de la coopération pour le développement à l'aube du XXIe siècle, présentait des cibles à atteindre en matière de développement international, lesquelles vont conduire à la formulation des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) en l'an 2000 (Nations unies, 2010). Le premier objectif prévoit réduire de moitié la pauvreté dans le monde, et la plupart des organisations internationales et des gouvernements se sont engagés en ce sens. Pour Storey et al. (2005 : 33), le rapport de l’OCDE « both reflected and defined the contemporary thinking on poverty reduction in the international development community ». Ensuite, l'adoption en 1999 par le FMI et la Banque mondiale des Cadres stratégiques de lutte contre la pauvreté a confirmé l'émergence d'un renouvellement du discours sur la pauvreté qui, sans remettre en cause le modèle économique sur lequel s’appuie l’ajustement structurel, fait intervenir « le sentiment d’impuissance [des pauvres] et l’incapacité à faire entendre sa voix dans les institutions de l’État et de la société, d’une part, et la vulnérabilité [...] aux chocs négatifs de différentes natures, d’autre part » (Ehrhart, 2006 : 628 ; Banque mondiale, 2000).

7En somme, la pauvreté, réduite depuis plusieurs années à ses dimensions économiques, est désormais reconnue comme une notion multidimensionnelle (Agrawal et Redford, 2006 ; World Bank, 2001 ; Sen, 2000), même par ceux — assez nombreux — qui se contentent d’en faire une analyse économique. Les différentes dimensions de la pauvreté ne sont pas indépendantes les unes des autres, sont difficiles à mesurer et présentent différents visages selon le contexte (Agrawal et Redford, 2006). Un des problèmes est alors de déterminer le poids à donner à chacune de ces dimensions (Maxwell, 1999). Nous pourrions ajouter qu'elles ne sont pas neutres. Par exemple, bien que l’on reconnaisse l’accès à l’éducation comme un élément participant à la diminution de la pauvreté, le type d’éducation reçu (qualité, contenu, etc.) peut avoir une forte influence sur la qualité de vie des personnes ou des collectivités (Illich, 1971). Ce n’est donc pas simplement en augmentant l’accès à l'éducation primaire que la pauvreté diminuera nécessairement.

8Cette complexité croissante dans l’analyse et le discours sur la pauvreté peut être comprise selon Maxwell (1999 : 2-3) comme une série de « lignes de faille » dans le débat sur le sujet. On peut par exemple choisir de mettre l'accent uniquement sur les aspects monétaires, souvent utilisés parce qu'ils sont perçus comme suffisants en eux-mêmes ou comme un bon indicateur de la pauvreté, ou y ajouter les aspects non monétaires. On peut également s'intéresser à la pauvreté absolue ou relative, objective ou subjective. Ruggeri Laderchi et ses collaborateurs (2003) vont dans le même sens. Ces auteurs sont d'avis qu'il est essentiel de définir la pauvreté mais que plusieurs problèmes sont associés à cet exercice. Quelle unité choisir pour définir la pauvreté (individu, ménage, groupe) ? Comment distinguer clairement les pauvres de ceux qui ne le sont pas ? Sur quel horizon temporel (court ou long) devrait-on s'attarder ? Définir la pauvreté est une chose, la mesurer en est une autre (Sunderlin et al., 2005 ; Angelsen et Wunder, 2003). Ainsi, le principal problème présent dans la plupart des articles analysant la pauvreté de manière empirique naît des nombreuses tensions entre sa conceptualisation, qui embrasse la complexité, et la nécessité de l'opérationnaliser, ce qui exige nécessairement une simplification (Sunderlin et al., 2005 : 1385). Comment alors réduire ces tensions ? Comment établir un lien opératoire entre ces deux dimensions ? Les recherches en tourisme contribuent-elles à résoudre ces problèmes ?

Tourisme et pauvreté : quel rôle pour le tourisme « pro-pauvres » ?

9Le tourisme est un des phénomènes socio-économiques majeurs du 21e siècle. Depuis le début des années 1950, il s'est ramifié, diversifié et multiplié au point de devenir l'un des plus importants secteurs économiques mondiaux et parmi ceux qui croissent le plus vite. En 2009, le nombre d’arrivées de touristes internationaux a atteint 880 millions et les recettes du tourisme international dans le monde se sont élevées à plus de 850 milliards de dollars US, soit l’équivalent de 2,3 milliards de dollars US par jour (UNWTO, 2010). Dans ce contexte, la plupart des gouvernements du Nord et du Sud considèrent le tourisme comme une activité économique stratégique et un outil de développement local (Sharpley et Telfer, 2008 ; Duffy, 2002). Par exemple, 80 % des 56 pays qui ont élaboré un document de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP) citent le tourisme comme vecteur de croissance économique, de création d'emplois et de réduction de la pauvreté (Hawkins et Mann, 2007). L’importance de ce rôle s’appuie sur une croissance particulièrement impressionnante dans les pays dits émergents et en développement dont la part de touristes internationaux est passée de 32 % en 1990 à 47 % en 2009 (UNWTO, 2010). Il n'est pas surprenant, dans ces conditions, de voir émerger depuis une dizaine d’années un discours associant activement le tourisme à la lutte contre la pauvreté dont le vocable le mieux connu est celui du « tourisme pro-pauvres » (Pro-Poor Tourism ou PPT).

10Comme le suggère Scheyvens (2007), l'intérêt grandissant pour le PPT découle du choix fait par « l'industrie du développement » de placer la lutte contre la pauvreté au centre de ses actions. L’énergie déployée autour des OMD participe à l'apparition d'un certain nombre d'approches dites « pro-pauvres » qui mettent explicitement l’accent sur les plus démunis d’une société, comme en témoignent les stratégies de croissance ou de conservation pro-pauvres (Roe et Elliott, 2006 ; Kakwani et Pernia, 2000). C'est ainsi qu’à la fin des années 1990, l'attention s'est tournée vers une forme de tourisme visant les pauvres en particulier avec la publication de deux rapports commandés par le Department of International Development (DFID) du Royaume-Uni (Deloitte & Touche et al., 1999 ; Goodwin, 1998). Reconnaissant le rôle central du marché et la croissance phénoménale de l'industrie touristique, ces documents attirent l'attention sur les façons de maximiser le potentiel du tourisme dans la lutte contre la pauvreté. Le tourisme pro-pauvres est défini comme un tourisme qui génère des « bénéfices nets » pour les pauvres, bénéfices qui peuvent être économiques, mais aussi sociaux, environnementaux ou culturels (Ashley et al., 2001). La définition ne dit rien sur la distribution relative de ces bénéfices. Ainsi, tant que les pauvres en tirent des « bénéfices nets », le tourisme peut être qualifié de pro-pauvres (Ashley et al., 2001). Ce type de tourisme n'est donc ni un produit spécifique ni un secteur particulier du tourisme, mais plutôt une approche de l'industrie. Les instigateurs du « mouvement » ont insisté dès le départ sur l'importance du marché et la viabilité commerciale comme base d’intervention, positionnant d'emblée le tourisme comme une activité émanant du secteur privé et se déployant dans un cadre capitaliste aux effets mitigés (Mitchell et Ashley, 2010 ; Goodwin, 2008a ; Ashley et al., 2001). En 2000, l’Overseas Development Institute (ODI), un groupe de réflexion britannique indépendant, lançait un projet de recherche dans le but d'analyser les bases théoriques du tourisme pro-pauvres et ses manifestations empiriques à travers six études de cas (Ashley et al., 2001). Cette recherche a été réalisée par le Pro-Poor Tourism Partnership (PPTP), une collaboration entre Harold Goodwin (International Centre for Responsible Tourism), Dilys Roe (International Institute for Environment and Development) et Caroline Ashley (Overseas Development Institute). Elle a mené au lancement de l'initiative Tourisme durable — Élimination de la pauvreté (ST-EP en anglais) en 2002 sous l'égide de l'Organisation mondiale du tourisme (OMT) et de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) (OMT, 2004).

11L’initiative ST-EP propose sept mécanismes permettant aux pauvres de profiter directement ou indirectement du tourisme (Yunis, 2004) : 1) Embauche de personnes pauvres par des entreprises touristiques ; 2) Fourniture de biens et de services à des entreprises touristiques par des pauvres ou par des entreprises employant des pauvres ; 3) Ventes directes de biens et de services aux visiteurs par des pauvres (économie informelle) ; 4) Création et gestion d'entreprises touristiques par des pauvres (économie formelle) ; 5) Taxes ou impôts sur les revenus ou sur les bénéfices tirés du tourisme, dont le produit bénéficie aux pauvres ; 6) Dons et aide volontaires d'entreprises touristiques et de touristes ; 7) Investissements d'infrastructure stimulés par le tourisme et dont les pauvres peuvent aussi bénéficier là où ils vivent. Ces mécanismes sont cependant à peu près tous axés sur la dimension économique de la pauvreté, et l'accent est mis sur la destination plutôt que sur les façons de modifier les relations entre les acteurs à l'échelle nationale ou globale.

12Quatre rapports ont été publiés par l'OMT depuis le lancement de cette initiative et plusieurs projets ont été initiés, notamment par SNV, l'agence néerlandaise de développement qui gère des projets de tourisme pro-pauvres dans 23 pays. Bien que l'attention portée au tourisme comme vecteur de lutte contre la pauvreté ne soit pas nouvelle (De Kadt, 1979), le discours qui met en scène le tourisme pro-pauvres « seem[s] to have led to a popular, simple, sharper and more appealing moral focus on the links poorer residents in destinations have with tourism enterprises » (Harrison, 2008 : 855). L’existence d’un consensus sur le rôle qu’a pu jouer jusqu’à présent le tourisme dans la réduction de la pauvreté n’est cependant toujours pas claire et Mitchell et Ashley (2010 : 7-8) identifient trois bonnes raisons de s'y intéresser : 1) Le tourisme est une composante importante de l’économie de la plupart des pays pauvres ; 2) Les perspectives de croissance sont très bonnes pour l’avenir ; 3) Le tourisme a démontré par le passé qu'il pouvait aider les plus démunis lorsque les conditions sont réunies. Ces éléments témoignent de l’importance et de la complexité des enjeux qui sous-tendent la relation entre le tourisme et la lutte contre la pauvreté. En conséquence, il serait utile de comprendre comment s’organise la réflexion scientifique sur le sujet et de saisir quelle est la portée et quelles sont les limites des analyses proposées par les chercheurs. La suite de cet article propose quelques éléments de réponse à ces questions.

Principales sources du discours scientifique

13Le corpus à l’étude est constitué d’articles publiés en anglais et en français entre 1995 et mai 2011 dans les revues dont les textes font l’objet d’une évaluation anonyme par les pairs — revues à comité de lecture (RAC). Nous cherchions les textes qui : 1) liaient tourisme et pauvreté et discutaient explicitement du concept de pauvreté ; ou 2) abordaient spécifiquement la question du tourisme pro-pauvres, de façon théorique ou empirique. La sélection des textes en anglais a été réalisée sur la plateforme multidisciplinaire Web of Science les 16 et 17 mai 2011. Celle-ci regroupe plus de 9 000 publications en sciences, en sciences sociales et en sciences humaines, la plupart évaluées par des comités de lecture. Nous avons utilisé les mots-clés suivants dans le champ sujet/thème (topic) du moteur de recherche : 1) tourism OR ecotourism AND poverty (120 résultats) ; 2) tourism OR ecotourism AND pro-poor (24 résultats). À partir des résultats ainsi obtenus, nous avons éliminé ceux n’ayant pas été publiés dans une RAC. En parcourant les résumés et les introductions, nous avons également retranché ceux qui ne traitaient pas explicitement de la notion de pauvreté ou du tourisme pro-pauvres dans les pays du Sud. Cette démarche a permis d’identifier 34 articles (théoriques et empiriques). Nous avons ajouté à cela deux textes publiés dans un numéro spécial de Current Issues in Tourism (volume 10, numéros 2 et 3, 2007) traitant de tourisme et pauvreté. Nous avons par ailleurs considéré un chapitre du livre de Mowforth et Munt (2009 : chapitre 11), souvent cité en référence dans les articles scientifiques, et deux livres récents sur le sujet : Tourism and Poverty, de Regina Scheyvens, paru en 2011, et Tourism and Poverty Reduction: Pathways to Prosperity, de Jonathan Mitchell et Caroline Ashley, paru en 2010. Considérant le peu de publications sur le sujet, le premier est remarquable par son traitement théorique exhaustif alors que le second est le dernier opus de deux des promoteurs du tourisme pro-pauvres.

14La sélection des textes en français a été réalisée de manière similaire sur les plateformes Cairn (2 090 articles), Francis (43 articles), Persée (784 articles), Repère (6 articles) et Revues.org (445 articles), du 16 mai au 23 mai 2011. Nous avons utilisé les mots-clés tourisme ET pauvreté dans le texte intégral avec un résultat de 3 368 articles. Nous avons ensuite écarté les articles ne provenant pas des RAC figurant sur la liste de l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES) pour le domaine Géographie-Aménagement-Urbanisme auquel le tourisme est associé. Seulement six articles correspondaient à l’ensemble de nos critères. Considérant le faible nombre de textes obtenus, ce corpus a été complété par l’ouvrage Tourisme et pauvreté, publié en 2010 à partir d’un colloque qui s’est déroulé au Maroc deux ans plus tôt et par les actes d’un autre colloque organisé la même année au Viêt Nam sur le même thème et réunissant plusieurs acteurs communs. Bien que ces publications n’aient pas fait l’objet d’une évaluation anonyme par les pairs, elles émanent des deux rares et récentes manifestations scientifiques francophones sur le sujet et méritent, à ce titre, d’être retenues. Le corpus total est donc composé de 42 articles théoriques et empiriques provenant de RAC, en anglais (86 %) et en français (14 %), complétés de cinq monographies dont trois sont anglophones. Ces références apparaissent toutes en bibliographie.

Analyse et discussion

Un domaine de recherche éclaté à partir d’un grand nombre de thématiques

15Tout domaine de recherche s’organise autour d’une communauté de chercheurs partageant des positions suivant différents modes de diffusion dont les RAC sont les plus reconnus. Le domaine de recherche qui lie le tourisme et la pauvreté s’est constitué progressivement et notre recensement des auteurs y ayant contribué permet d’en évaluer l’ampleur et le dynamisme. De manière générale, et comme en témoigne notre corpus, relativement peu de chercheurs se sont intéressés aux liens entre tourisme et pauvreté au cours des 15 dernières années, un fait que nous ne sommes pas les premiers à soulever (Mitchell et Ashley, 2010 ; Scheyvens, 2007). Par exemple, près des deux tiers des articles en anglais retenus apparaissent dans des revues en tourisme, mais presque rien n'a été publié dans les deux revues les mieux cotées dans le domaine, soient Annals of Tourism Research (deux articles abordent les aspects économiques de la pauvreté) et Tourism Management (aucun article). Plusieurs auteurs évoquent au passage la notion de pauvreté sans toutefois lui accorder une place centrale dans leur analyse. D'autres encore — et ils sont nombreux — vont traiter du tourisme en lien avec le développement au sens large, ce qui dépasse le cadre de notre article, bien que les liens qui unissent le développement et la pauvreté soient multiples.

16Nombreuses sont les raisons évoquées par les chercheurs pour s'attarder au tourisme comme outil de lutte contre la pauvreté. Certains évoquent le fait que plusieurs pays en développement ont un vaste — ou potentiellement vaste — marché touristique (Blake et al., 2008). Malgré la pauvreté qui y sévit, ces pays possèdent un avantage comparatif par rapport aux pays émetteurs de touristes concernant les attraits naturels et culturels (Chok et al., 2007 ; Spenceley et Goodwin, 2007). Le tourisme a cette particularité de voir le consommateur se rendre sur le lieu de production (vers le produit), ce qui permet d’élargir la consommation des produits et des services sur les lieux visités (Zapata et al., 2011 ; Donaldson, 2007 ; Leon, 2007 ; Spenceley et Goodwin, 2007) ; les impacts, qu'ils soient positifs ou négatifs, seront donc largement perceptibles à destination (Brown et Hall, 2008). Pris globalement, le tourisme est intéressant pour les pays économiquement pauvres qui ont peu d'alternatives en matière de produits d'exportation et qui cherchent à diversifier l'économie (d'un pays, d'une région, d'une destination) et les moyens de subsistance des pauvres ou à augmenter leur participation à l'économie globale (Croes et Vanegas, 2008 ; Goodwin, 2008b ; Leon, 2007 ; Schilcher, 2007 ; Negi et Nautiyal, 2003). D’autres évoquent finalement que le tourisme crée plus d’emplois que la plupart des autres secteurs (hors agriculture) et qu'une plus grande proportion des bénéfices vont aux femmes (Cabasset-Semedo, 2007 ; Spenceley et Goodwin, 2007). Bien qu'ils soient proportionnellement moins nombreux, des chercheurs évoquent les aspects socioculturels du tourisme, à travers la reconnaissance d'autres richesses que celle du niveau de vie, par la production de pratiques de sociabilité entre touristes et hôtes, et l’accroissement du pouvoir de participation des habitants d'un territoire aux décisions qui les concernent (Girard et Schéou, 2008).

17Comme nous l’avons soulevé dans notre mise en contexte, un certain dynamisme s'observe autour de l'approche en tourisme pro-pauvres telle que développée par le Pro-Poor Tourism Partnership (PPTP). Des études empiriques y font écho sur l’Asie (Suntikul et al., 2009 ; Bowden, 2005), sur l’Afrique (Spenceley et al., 2010 ; Mitchell et Faal, 2007 ; Spenceley et Goodwin, 2007) et sur l’Amérique latine (Croes et Vanegas, 2008 ; Van Der Duim et Caalders, 2008 ; Ashley et Roe, 2002). Bien que certains soient optimistes quant à l'avenir de l'approche pro-pauvres en tourisme (Mitchell et Ashley, 2010 ; Neto, 2003), plusieurs auteurs l'ont critiquée tant sur le plan conceptuel que pratique (Mowforth et Munt, 2009 ; Suntikul et al., 2009 ; Chok et al., 2007 ; Scheyvens, 2007). On reproche à cette démarche de favoriser notamment le statu quo néolibéral, d'être marginale sur le plan commercial et d'ignorer la notion d'équité. À la suite d'une analyse des caractéristiques de l’approche et des critiques qui lui sont faites, Harrison (2008) conclut à l’absence de justification de plusieurs de ces critiques. Il suggère cependant qu’une question centrale demeure posée : dans quelle mesure le tourisme pro-pauvres peut-il être considéré comme une approche proposant des méthodes distinctes et novatrices ? Pour Harrison (2008 : 865), « the conclusion reached here is that, on both counts, it is found wanting ». Il ajoute que les promoteurs du tourisme pro-pauvres ne possèdent pas, pour la plupart, de position académique permanente et publient peu dans les revues scientifiques, limitant leur contribution à ce domaine émergent de recherche. « They also tend to remain outside (and largely ignorant of) academic debates, with the added result that a huge body of academic writing is more or less ignored by PPT, for example, on enterprises and entrepreneurship, and the insights of adherents of PPT are similarly ignored or underrated in academic circles » (Harrison, 2008 : 859-860).

18Cette assertion révèle les fondements et les difficultés dans la construction et la reconnaissance d’un discours scientifique dans un domaine donné et montre que le tourisme pro-pauvres « … n’échappe pas à l’interrogation polémique sur sa prétention à la scientificité » (Berthelot, 2001 : 207). La difficile constitution d’un domaine de recherche qui lie le tourisme à la lutte contre la pauvreté révèle le paradoxe suivant : sa notoriété repose essentiellement sur le PPT produit par une dynamique d’acteurs « externes » dont les processus de production, d’organisation et de validation des connaissances reposent sur une volonté d’apporter des réponses pertinentes à des problèmes empiriques. Dans le même temps, la portée « interne » du PPT dans le débat épistémologique sur la question du tourisme et de la lutte contre la pauvreté demeure limitée puisque son objectif ne vise pas à alimenter le fonds de connaissances des sciences sociales en considérant comme premier public les chercheurs universitaires. Bien que la construction du domaine de recherche sur le tourisme et la pauvreté et les thèmes évoqués par notre corpus ne puissent être réduits au seul PPT, celui-ci s’est imposé à la communauté de chercheurs comme un point de discussion — et de position — obligé dans le discours scientifique sur le sujet. Par son caractère très empirique, le PPT impose une réflexion sur l’ensemble des dimensions constituant le phénomène de pauvreté lui-même et sur l’armature conceptuelle et méthodologique formant l’identité scientifique de ce domaine de recherche.

Les principales approches de recherche

19Un examen des thématiques de recherche dans le domaine qui lie le tourisme et la lutte contre la pauvreté permet de constater leur hétérogénéité. En effet, les recherches sont multiples tant dans les objets traités, les approches utilisées, les concepts mobilisés et les unités d’analyse choisies. Quelle que soit la thématique de recherche abordée, la particularité du domaine de recherche qui lie le tourisme et la lutte contre la pauvreté, et ce qui le distingue d’autres domaines de recherche, est l’utilisation de théories et d’approches particulières. À ce sujet, Scheyvens (2011, 2007) démontre de façon assez convaincante que la conception des relations entre tourisme et pauvreté est complexe et varie selon l'ancrage théorique ou la perspective adoptée par les auteurs. Les travaux de recherche, mais aussi les politiques, les stratégies et les projets qui se réclament notamment du tourisme pro-pauvres sont influencés à différents degrés par quatre perspectives théoriques proposées par l’auteure et que nous reprendrons pour traiter notre corpus (Scheyvens, 2007 : 236-242).

20Selon la perspective néolibérale, le développement du tourisme est encouragé à travers la libéralisation des marchés et une certaine forme de démocratisation et de décentralisation ; les investissements dans les pays en développement entraînent une présence accrue de compagnies étrangères dans ces nouveaux marchés touristiques ; le tourisme est vu principalement comme un secteur économique permettant de réduire ou d’éliminer la pauvreté ; les partenariats public-privé sont encouragés. Par exemple, dans leur étude sur les liens entre développement du tourisme, expansion économique et réduction de la pauvreté en Namibie, Croes et Vanegas (2008 : 102), qui s'en tiennent à une définition principalement économique de la pauvreté, sont d'avis que le développement du tourisme est bénéfique pour tous et concluent que « enthusiastic tourism development policies as a means of economic expansion and poverty reduction may be fully effective in that tourism development leads to poverty reduction, rather than the other way around ». Si l’on élargissait la définition de la pauvreté pour y inclure, par exemple, des dimensions socio-politiques, cette expansion « enthousiaste » et sans nuance du tourisme risquerait d'avoir des répercussions négatives sur plusieurs groupes sociaux, qu'ils soient marginalisés ou non. Pour sa part, Butcher (2011) suggère que l'intégration d'objectifs de conservation et de développement à travers des projets d'écotourisme à l'échelle strictement locale limite les possibilités pour les communautés de s'extraire de la pauvreté. Il faut plutôt selon lui ne pas avoir peur de miser sur le développement du tourisme de masse et une forte croissance économique. Cependant, l’étude de Dupont (2009) sur Haïti montre que la réduction de la pauvreté et la croissance économique engendrent du développement touristique dans ce pays et non l’inverse, ce que nuance Donaldson (2007) dans son analyse des impacts du tourisme sur la pauvreté dans deux provinces de Chine. Il montre qu'une croissance économique ne mène pas nécessairement à une réduction de la pauvreté (ici principalement comprise comme monétaire) et ajoute que la participation du gouvernement est nécessaire afin de maximiser les retombées positives sur les communautés pauvres. C'est à cette conclusion qu'en arrive aussi Cabasset-Semedo (2007) dans son étude sur le Timor Oriental où le faible engagement des organisations internationales dans le secteur du tourisme découle de l'absence de politiques et d'objectifs définis par l'État, nuisant ainsi au développement du marché.

21La perspective critique présente au contraire le tourisme comme un cheval de Troie dans les zones peu intégrées au capitalisme mondial, en insistant sur l’existence d’un fossé socio-économique entre les visiteurs et les visités (voir aussi Gibson, 2009). Aux enjeux de développement économique et humain, Schilcher (2007 : 167) ajoute celui du pouvoir « which perceives poverty as lying in people’s vulnerability and risk, as well as deprivation of socio-political voice ». L'auteur redéfinit ainsi le tourisme pro-pauvres comme celui qui apporte des bénéfices de manière « disproportionnée » aux pauvres afin de réduire ces inégalités qui limitent le potentiel dans la lutte contre la pauvreté. Cette vision est en décalage par rapport à celle du PPT, l’accent étant mis ici sur l'équité vue comme un préalable à la réduction de la pauvreté. Il importe selon Schilcher de défier le néolibéralisme qui accorde peu d'importance à la redistribution des bénéfices entre riches et pauvres. Pour lui, la recherche devrait mettre l'accent sur des solutions concrètes qui permettent de donner plus de pouvoir aux pauvres. Blake et al. (2008) et Wattanakuljarus et Coxhead (2008) abordent également la notion d'équité et suggèrent que la croissance du tourisme dans les pays en développement ne profite pas à tous également. Elle accentue plutôt l'écart entre les riches et les pauvres, à moins que le gouvernement n'intervienne, ce qui ne représente pas non plus une panacée comme le suggère l’implantation d’une aire protégée et la mise en place des infrastructures du tourisme en Asie du Sud-Est, contribuant plutôt à la marginalisation des représentants de communautés ethniques (Déry et Tremblay, 2008).

22Selon la perspective du développement alternatif, le tourisme offre aux communautés pauvres une façon de diversifier leurs moyens de subsistance et leurs perspectives d’avenir. Ces communautés sont par ailleurs invitées à participer activement au développement des projets touristiques, et le renforcement de leurs pouvoirs (empowerment) constitue un élément central des retombées attendues. Plusieurs des textes analysés s'inscrivent dans une telle perspective. Par exemple, dans son analyse des impacts socio-économiques du tourisme dans une communauté de Namibie, Lapeyre (2011) utilise des indicateurs environnementaux, sociopolitiques et économiques pour évaluer le partenariat entre un pavillon privé, une aire protégée et les communautés adjacentes. Il conclut qu'un tel partenariat peut s'avérer utile pour lutter contre une pauvreté aux dimensions plurielles. Son étude est cependant basée sur un seul partenariat et sur un nombre limité de répondants. De plus, l'auteur est peu attentif au contexte plus large (régional et national) dans lequel s'insère le partenariat. Ces limites ne s’appliquent pas à l’analyse de Girard et Schéou (2008 : 90) qui proposent d’explorer la contribution du tourisme solidaire au-dehors du paradigme socio-économique de la pauvreté qu’ils qualifient de « réduction utilitariste de la richesse ». Leur démarche socio-historique propose une reconceptualisation de la pauvreté où la personne humaine est placée au centre de nouvelles pratiques de sociabilité où l’accroissement du pouvoir de participation passe par l’existence d’autres richesses que celle du niveau de vie. Dans leur étude sur de petits projets locaux de tourisme de nature en Afrique du Sud, Hill et collaborateurs (2006) adoptent aussi une perspective axée sur le développement alternatif et en arrivent à la conclusion que de tels projets, bien que de bons outils pour réduire la pauvreté, ne doivent pas être considérés comme des panacées (voir aussi Fraisse, 2007). Pour leur part, Scheyvens et Momsen (2008), dans leur étude sur les petits États insulaires en développement, insistent sur l'importance de la participation des communautés, mais aussi sur celle du gouvernement dans les projets de tourisme pro-pauvres afin d'assurer un meilleur partage des retombées et une véritable prise en compte de la dimension sociale de la pauvreté.

23Finalement, Scheyvens propose une perspective poststructuraliste qui place le tourisme en dehors d’une logique manichéenne (le tourisme est bon ou mauvais). Selon cette démarche, le tourisme est vu comme un système complexe à l'intérieur duquel les communautés, comme les autres acteurs, peuvent — et doivent — exercer un certain pouvoir par de multiples moyens (Nadkarni, 2008 ; Desse, 2003). Par exemple, tout en reconnaissant les limites de leur approche, Zhao et Ritchie (2007) présentent un nouveau cadre théorique et appuient leur analyse sur la définition de la pauvreté présentée par la Banque mondiale (2000) (développement des opportunités, insertion, sécurité matérielle). Ils proposent la notion de « tourisme anti-pauvreté » en référence à tout développement touristique ayant la lutte contre la pauvreté comme objectif principal. Comme le rappellent les auteurs, « understanding both “poverty” and “poverty alleviation” is obviously beyond simply tracking economic measures, and inherently requires special treatment by more comprehensive research » (Zhao et Ritchie, 2007 : 123). Contrairement à la plupart des chercheurs dans ce domaine, ils considèrent le système touristique comme étant ouvert ; le tourisme doit se combiner à d'autres stratégies de lutte contre la pauvreté à destination et non pas simplement les remplacer. Dans le même esprit, Harrison et Schipani (2007) comparent deux projets de tourisme au Laos ayant adopté des modèles de développement différents : un projet d'écotourisme communautaire assisté par les organisations internationales et le développement touristique d'une île du sud du pays structuré par le secteur privé. Les auteurs, dont l’analyse est particulièrement bien documentée et témoigne d’une vision complexe et nuancée du développement du tourisme, montrent que les deux modèles ont leurs succès dans la lutte contre la pauvreté, chacun pouvant éclairer l'autre sur certains aspects. Ce type de lecture pourrait se résumer ainsi :

« [I]nstead of automatically assuming that tourism enterprises in the private sector are unwelcome and inferior competitors of “alternative” donor-assisted, community-based tourism projects, they might be considered as potential partners in tourism development, with their own expertise and links to the community, and with an entitlement to at least some of the financial and technical support provided, on a regular basis, by international aid agencies » (Harrison et Schipani, 2007 : 226).

24Le classement des articles de notre corpus dans l’une ou l’autre des perspectives ou approches proposées par Régina Scheyvens est, par définition, limité et certainement critiquable. Loin de vouloir réduire la portée de chacun des articles pris individuellement, notre démarche visait notamment à clarifier, malgré la diversité des analyses et la complexité du sujet, le sens donné à la notion de pauvreté et la nécessité d’en questionner les fondements. Si plusieurs auteurs reconnaissent le bien-fondé de cette démarche (Agrawal et Redford, 2006 ; Ruggeri Laderchi et al., 2003), rares sont les chercheurs des textes analysés qui proposent une définition explicite de la pauvreté. Par exemple, certains auteurs reconnaissent volontiers sa nature multidimensionnelle mais s’en tiennent à une analyse essentiellement économique (Mitchell et Ashley, 2010 ; Blake et al., 2008 ; Bowden, 2005), souvent réduite à sa plus simple expression, soit le seuil de pauvreté établi par les institutions financières internationales ou encore les gouvernements nationaux. Un bon exemple de cette approche apparaît dans l'article de Spenceley et Goodwin (2007) qui, pour des raisons de simplicité, préfèrent définir les pauvres comme l'ensemble des individus vivant avec moins de 1 $ US par jour (voir également Lepper et Goebel, 2010). Dans le corpus des textes francophones en particulier, Girard et Schéou (2008) sont les seuls auteurs à relancer le débat sur les fondements de la pauvreté en s’opposant à la conception « économique et utilitariste » utilisée explicitement ou non par la majorité des auteurs. Ils abordent la pauvreté de manière plus qualitative à partir de l'idée de privation matérielle qui renvoie à deux types de significations opposées, soit la privation déqualifiante — misère matérielle menant à l’état de « non-être » — et la pauvreté qualifiante comme « choix d'être » qui peut être envisagée soit au niveau individuel ou collectif. Ils évoquent par ailleurs la question de l'imputation de la pauvreté qui doit être vue comme une construction sociale résultant de rapports de pouvoir occultés par la grande majorité des auteurs consultés.

Conclusion

25L’analyse de notre corpus confirme ce que d'autres avaient déjà souligné, à savoir que la relation entre le tourisme et la lutte contre la pauvreté est peu abordée par les chercheurs en général et par ceux qui s’intéressent au tourisme en particulier (Zhao et Ritchie, 2007). Hormis quelques articles (Scheyvens, 2011, 2007 ; Zhao et Ritchie, 2007), la plupart des textes sont faiblement théorisés. Pour Zhao et Ritchie (2007 : 121), la complexité inhérente au concept de pauvreté (et à ses dérivés) pourrait expliquer le peu d’intérêt des chercheurs sur le sujet. À cette difficulté conceptuelle vient s’ajouter l’attitude paradoxale des scientifiques face aux définitions proposées par les institutions internationales — notamment la Banque mondiale — qu’ils estiment insuffisantes, mais dont ils font usage dans leurs publications et pour lesquelles ils endossent une certaine responsabilité. En conséquence, le discours provenant de la communauté scientifique demeure confus puisque, d’une part, il appelle à un renouvellement de la réflexion sur le sujet et, d’autre part, produit des analyses basées sur un type de relation entre le tourisme et la pauvreté largement réduit à ses dimensions économiques. Ces conditions confirment notre hypothèse suggérant que le paradigme économique dominant dans lequel s’insère l’essentiel des relations entre le tourisme et la pauvreté permet difficilement de renouveler le débat sur le sujet de résoudre les « lignes de faille » évoquées par Maxwell (1999).

26La construction des connaissances sur les liens qui unissent et opposent le tourisme et la pauvreté passe encore beaucoup par un positionnement pour ou contre le tourisme pro-pauvres. Celui-ci est cependant sur le point de perdre son élan. Pour Goodwin (2009 : 92), « the PPT Partnership was unsuccessful in asserting the importance of measuring net benefits for the poor and in maintaining the emphasis on engagement with the private sector. These were the radical elements of PPT but they were lost ». Il ajoute que les organisations, les consultants et les employés actifs sur le terrain ont rapidement adopté la rhétorique autour du tourisme pro-pauvres et de la lutte contre la pauvreté, tout en ne rompant pas avec les approches traditionnelles de développement du tourisme. Pour Chok et al. (2007 : 151), la crise du tourisme pro-pauvres s'apparente à celle entourant le développement durable, c'est-à-dire qu'il y a « widespread acceptance at a general or framework level but fierce political contest over its actual implementation ». Pour sortir de cette ornière, certains auteurs comme Girard et Schéou (2008) ont proposé de porter le débat en amont, en suggérant de s’extraire d'une conception utilitariste de la lutte de la pauvreté, de manière à analyser les problèmes en dehors des solutions proposées par le modèle économique dominant. Nous croyons que cette démarche peut contribuer à combler le « déficit épistémologique » sur les liens qui unissent et opposent le tourisme et la lutte contre la pauvreté.

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Bruno Sarrasin, Jonathan Tardif and Georgina Arreola Flores, Tourisme et lutte contre la pauvreté : de la confusion des termes à la construction d’un discours scientifique ?Téoros [Online], 31-2 | 2012, Online since 01 August 2015, connection on 14 February 2025. URL: http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/teoros/2329

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About the authors

Bruno Sarrasin

Professeur, Département d’études urbaines et touristiques, Université du Québec à Montréal, sarrasin.bruno@uqam.ca

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Jonathan Tardif

Doctorant, Département de géographie, Université de Montréal, jonathan.tardif.1@umontreal.ca

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Georgina Arreola Flores

Doctorante, Département d’études urbaines et touristiques, Université du Québec à Montréal, arreola_flores.georgina@courrier.uqam.ca

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CC-BY-NC-ND-4.0

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