Skip to navigation – Site map

HomeNuméros43-2La vague touristique du surfLes vagues surfées en Bretagne Su...

La vague touristique du surf

Les vagues surfées en Bretagne Sud : ressources nautiques et territoriales

Surfing waves in South Brittany: nautical and territorial resources
Stephen Berrou and Antoine Marsac

Abstracts

Surfing waves in Southern Brittany : nautical and territorial resources. This article analyzes the process of building surfing territories in Southern Brittany and their development as destinations. Involved in renewing the nautical vocation of Brittany’s coastal areas, surfers are integrating tourism as a sector of activity that comes with regional stakes. Some areas have chosen to be identified by the “Surf City” label. The survey is based on two localities bearing that label, Plomeur and Guidel. While these towns share the same ambitions in terms of tourism and the environment, they also reveal the different ways in which waves and spots are appropriated, highlighting the historical, political, and social characteristics specific to each local context. A qualitative analysis combining interviews with professionals and surfers, and ethnographic observations, sheds light on the strategies behind the interplay of actors, making Plomeur and Guidel territories that are being recomposed under the effect of dynamics linked to lifestyles, public authorities, and the emergence of the sport and leisure culture of surfing which are gradually weaving a social order.

Top of page

Full text

1Importé dès 1970, le surf est aujourd’hui une activité majeure en Bretagne, bien que le foyer de structuration soit l’Aquitaine (Guibert, 2007). Depuis l’avènement des stations balnéaires bretonnes, les ressources maritimes et littorales sont exploitées pour le tourisme, plaçant aujourd’hui la région en tête des choix des destinations des Français pour les séjours en bord de mer. Les enjeux socioéconomiques liés au secteur du nautisme sont importants, compte tenu de son chiffre d’affaires annuel de 137 millions d’euros. Parallèlement à la voile, qui reste le premier support de valorisation des littoraux avec plus de 160 ports de plaisance, 400 zones de mouillages collectifs et plus de 170 clubs et centres de voile (Bernard, 2016), le surf prend une place importante. Comptant 85 structures dédiées à l’enseignement, la pratique connaît l’une des plus fortes croissances depuis 20171. Le nombre de villes de surf sur le territoire, avec la création du label en 2015 par la Fédération française de surf (FFS), révèle cette tendance. Ce dispositif « Ville de Surf » récompense les politiques mises en place par les communes pour promouvoir ce sport. Il procède d’une reconnaissance et d’un classement des espaces de jeu entre les territoires (Berrou et Marsac, 2022). Charles Brides, secrétaire général de la FFS, au moment de l’enquête, explique :

La FFS met en place les labels dans le souci de développer une charte de qualité dans la pratique et les services aux usagers et d’augmenter l’attractivité des sites labellisés. La conformité au cahier des charges est le principal critère, mais l’attribution reste sous la compétence de la commission de labellisation qui peut prendre en compte d’autres paramètres, comme celui du potentiel de développement territorial.

2La Bretagne est la première région de France en nombre de communes labellisées : en 2019, date des premiers recueils de données, le territoire comptait cinq villes de surf sur les dix existantes à l’échelle nationale. L’identification de territoires résulte d’une adéquation entre le renouvellement des pratiques et l’identité balnéaire bretonne portée sur le nautisme.

3Rappelons que dès la seconde moitié du XXe siècle, la Bretagne est une région rurale déstabilisée par le passage au marché mondial :

« après la crise de la pêche, avec la crise de l’agriculture et celle de l’électronique, la Bretagne voit s’effondrer des pans de son économie sans toujours avoir les moyens de réagir. Elle se trouve, en outre, placée en situation de concurrence quasi déloyale avec les autres régions européennes, dans la mesure où elle ne dispose pas des mêmes pouvoirs budgétaires et politiques. » (Le Coadic, 2002)

4Dans ce contexte, le secteur nautique est un atout de la région. Avec ses 2700 kilomètres de littoraux, la Bretagne est la première région maritime de France. La vocation nautique du littoral se révèle à la fin du XXe siècle. Mais quels sont les facteurs décisifs qui ont permis l’essor du surf ?

5Trois étapes historiques sont repérées. La première renvoie à la phase de balnéation à la fin du XIXe siècle. Importée sur les plages de l’Atlantique par une élite acculturée, le phénomène balnéaire apparaît dans la construction de l’identité. Créateur d’images maritimes, il met en avant l’authenticité, le caractère préservé des littoraux. Faute d’actions des promoteurs immobiliers, la trajectoire des stations balnéaires s’oppose à celle d’autres stations françaises qui se transforment pour devenir des villes d’agréments au cours du XXe siècle (Clairay et Vincent, 2008). Cette singularité contribue à ancrer des normes, qui, aujourd’hui, influencent le processus de territorialisation des villes de surf. Il en résulte une typologie qui tient compte du modèle de station balnéaire du territoire. La deuxième étape concerne l’avènement de la culture nautique qui est un vecteur de découverte de « spots » et de conquête de nouveaux espaces (Anderson, 2022). À partir des années 1970, la recherche d’une harmonie avec la nature montre la volonté de s’affranchir des cadres institutionnels. Ce mouvement touche la planche à voile, dont « l’un des bassins de diffusion en Europe fut la Bretagne du Sud » (Lacombe, 2002). Emmenés par l’aventure, les pratiquants se lancent dans la découverte de nouveaux sites. La Bretagne est un terrain d’exploration sans équivalent. La troisième étape renvoie à la diffusion de la pratique du surf permise par son institutionnalisation au cours du XXe siècle. Comme en Pays basque, elle est introduite par des acteurs dotés de ressources sociales élevées. Des cadres quimpérois sont les premiers à ramener une planche depuis l’Aquitaine, où la discipline se structure dès les années 1960.

6Aujourd’hui, la vague constitue un objet convoité participant à renouveler la vocation nautique des espaces littoraux. Elle se déploie dans un espace perçu, le spot, qui ne présente pas forcément un caractère extensif. Dans ce contexte, la houle comme situation éphémère constitue une ressource territoriale (Gumuchian et Pecqueur, 2007) au regard de l’équilibre entre les pratiquants et les espaces. Cette référence y est mobilisée pour comprendre comment les acteurs d’une ville, d’un site, d’une agglomération s’appuient sur ses qualités géographiques, économiques et patrimoniales. Ces aspects sont des avantages cumulés pour les territoires par rapport aux autres dans un jeu de concurrence entre destinations. Il s’agit de mettre en avant ses atouts et de mobiliser les apports de l’offre touristique dans/par l’environnement local. Mais les « spots » font l’objet d’appropriations différenciées, suscitant des jeux parfois conflictuels entre les parties prenantes. Des équilibres ont été élaborés au sein des acteurs, mais d’autres problématiques, révélées par la crise sanitaire, apparaissent. Si ce cadre théorique permet de comprendre les logiques spatiales à l’œuvre, il comporte des limites. Bien qu’heuristique, il engage une appréhension descriptive de l’objet à partir de ses principales caractéristiques. Or le concept de ressource territoriale se présente comme un principe qui s’avère cumulatif car reposant sur les structures et infrastructures au détriment d’une centration sur les acteurs qui sont à l’origine des processus de diffusion au sein du territoire. Le modèle des configurations spatiales (Löw, 2015) pour étudier les acteurs des « spots » via les vagues permet de déceler des logiques socio-spatiales qui les sous-tendent. Cette approche par polarité analyse les opérations plus ou moins équilibrées entre les parties concernées. L’espace est alors pensé comme relationnel. Ce concept appréhende l’espace comme une ressource pour l’action des habitants face aux contraintes imposées par les codes moraux et politiques. Cette perspective théorique consiste à interagir avec les enquêtés en les interrogeant sur leur rapport à l’espace. La parole des acteurs y tient une place centrale dans la mesure où leur discours constitue une source à analyser in situ. Afin de retracer les étapes qui ont conduit à l’émergence des villes de surf, nous adoptons une perspective généalogique. L’étude des configurations entend fournir une approche processuelle là où l’entrée par les ressources territoriales repose sur un état à un certain moment, incapable de rendre compte de la longue construction des dynamiques sociales.

7Les localités de Plomeur et de Guidel sont les deux terrains d’enquête choisis. D’une part, Plomeur abrite un haut lieu de la glisse, le spot de La Torche, tandis que Guidel fait partie des rares communes françaises à être gratifiées de deux étoiles pour son haut degré de conformité aux exigences du label. D’autre part, Plomeur et Guidel sont des territoires qui donnent à voir des similitudes dans la façon dont ils se recomposent sous l’effet de l’émergence du surf comme nouvelle pratique, de la transformation des modes de vie et d’une dynamique liée aux pouvoirs publics. Ils présentent des situations différenciées de territoires situés entre le rural et l’urbain, qui s’inscrivent et se définissent à une échelle plus large : l’agglomération lorientaise pour Guidel, et la communauté de commune du pays bigouden pour Plomeur.

8Le pays bigouden se caractérise par un maillage fort de petites communes et une importante façade maritime dont 1200 hectares sont la propriété du Conservatoire du littoral. Il s’est historiquement construit sur l’interconnaissance, la proximité spatiale, et une mobilité atypique et intense des personnes entre communautés villageoises (Segalen, 1985). En plus de subir l’influence urbaine et républicaine de Quimper, le territoire est soumis à une irrésistible modernisation depuis le milieu du XXe siècle. Celle-ci se lit par le déclin inexorable de la démographie depuis 1930 qui est corrélé à l’émigration des jeunes vers les villes, par la tertiarisation du travail, par le développement de la pêche et des conserveries, ainsi que par l’émergence d’une filière touristique. Plomeur se caractérise par sa culture rurale et sa portion littorale réduite, comparativement aux communes voisines qui bénéficient de traits de côte plus conséquents et ont développé leur culture balnéaire (telle Loctudy). L’obtention du label « Ville de Surf » par Plomeur, commune qui n’a pas les attributs d’une station historique établie à partir d’un port ou d’une ville, permet d’analyser, plus qu’ailleurs, les spécificités et les marqueurs d’attraction.

9L’agglomération lorientaise regroupe 25 communes montrant des espaces variés, allant du rural à l’urbain. Elles sont réparties autour du pôle urbain de Lorient, et forment un échelon territorial uni par un projet commun et des compétences partagées. L’agglomération lorientaise est un laboratoire d’observation du processus de construction des territoires infrarégionaux. Plus qu’une injonction technocratique, le territoire se veut être « l’expression d’un véritable choix, issu de l’histoire, de la géographie, de la sociologie aussi, de partager la fierté d’appartenir au « pays de Lorient » (Fabrice Loher, président de Lorient agglomération, maire de Lorient, site Internet de présentation de Lorient agglomération). La physionomie de Guidel se caractérise par deux zones agglomérées (Guidel ville et Guidel plage) qui indiquent la présence d’un bourg ancien et d’un front de mer créé a posteriori au cours du XXe siècle, situé au sud, à l’embouchure de la Laïta. La commune s’inscrit dans une stratégie de valorisation de ses ressources naturelles dans un contexte marqué par l’injonction du développement durable (Borne et Ponting, 2017). En témoigne l’offre d’hébergement diversifiée (hôtels, résidences de tourisme, centres d’hébergement, campings), les équipements sportifs et de voiries (9 km de pistes piétons-vélos et 60 km de sentiers de randonnées), et les 700 hectares d’espace boisé classé. Le développement d’activités comme le surf s’inscrit dans la recomposition territoriale. Ces caractéristiques expliquent l’attraction actuelle de la commune au sein de l’agglomération et le flux de déplacements des Lorientais. L’habitat y est récent puisque 84,6 % des résidences principales ont été construites après 1970. Ces mouvements centrifuges de population des agglomérations vers des localités satellites participent « à l’ère de la ville archipel marquée par des discontinuités urbaines malgré une relative continuité des modes de vie et de culture » (Augustin, 2010).

  • 2 Ibid.

10Les spots de surf correspondent à des espaces ouverts qui donnent un rôle actif au non-bâti dans chaque localité, en référence à son centre urbanisé. « L’espace ouvert offre un large champ des possibles en termes de pratiques, de représentations, de projets. Il laisse une opportunité à l’expression des individus comme des groupes sociaux et à une démarche de projet évolutive, voire réflexive, qui élargit les possibilités d’usage et d’intervention. » (Banzo, 2016) Une approche sociologique et ethnographique, au plus près des individus, est privilégiée. L’un des auteurs du présent article (S. Berrou) est un surfeur pratiquant habitué des spots du Finistère sud. Une participation observante, riche d’une expérience personnelle acquise sur le terrain, a pu être menée entre 2019 et 2022 sur les lieux de pratiques et les espaces annexes (plages, bâtiments…) afin de mettre en exergue les interrogations centrales. La participation observante correspond à la démarche de recherche qui s’appuie sur des expériences subjectives pour déterminer les connaissances existentielles de la perspective des pratiquants les plus « engagés » dans l’activité (Bastien, 2007). De plus, vingt entretiens semi-directifs ont été conduits auprès de trois catégories d’acteurs : des élus communaux, des professionnels du surf issus de structures privées et associatives et des pratiquants assidus. La grande majorité s’est déroulée dans un cadre d’interconnaissance du fait de l’appartenance de l’auteur au groupe de surfeurs locaux. Ont été sélectionnés des acteurs inscrits de longue date sur le territoire qui sont à la fois des témoins et des parties prenantes du processus de recomposition territoriale. Ils se distinguent néanmoins par leurs logiques d’actions. Les élus sont officiellement impliqués dans la production du territoire. Les professionnels représentent les compétences nécessaires à l’exploitation de la ressource. Ils interviennent dans la production du territoire et dans l’appropriation. Les pratiquants possèdent le savoir empirique lié à la pratique et aux vagues, et sont les premiers à s’approprier (ou à initier) les actions menées en faveur de l’institutionnalisation du surf dans la commune. L’analyse thématique des entretiens réalisés typifie les rôles et les rapports de force des parties prenantes du territoire et les façons dont sont réceptionnées les transformations induites par la ressource sur les « spots ». Une attention est portée à la forme du lien social qui unit ou oppose les acteurs. Les aspects biographiques des diverses parties prenantes sont pris en compte pour comprendre les dispositions des acteurs et leurs postures. Les thèmes du localisme, de la labellisation et du rapport à la pratique sont abordés dans les grilles d’entretiens pour cerner la territorialisation. Le point de vue des acteurs est considéré pour mettre en évidence les usages et les perceptions variés de la ressource. En complément, pour repérer les événements marquants des dernières décennies, des articles de la presse quotidienne et spécialisée ont été analysés à partir d’une recherche par mots clés, ainsi que des sites Internet qui ont trait à la promotion du territoire2.

11L’étude vise à contextualiser un développement local par un loisir sportif : le surf. La première partie s’intéresse à l’émergence de la ressource touristique mobilisant le surf et les vagues des deux localités. Puis, la seconde analyse les jeux d’acteurs inhérents aux différentes appropriations des « spots ». La question du partage de la ressource est révélatrice des enjeux contemporains.

Le surf en Bretagne : d’une pratique informelle à l’émergence d’une ressource touristique

12Plomeur et Guidel sont des « scènes surf » anciennes de la région. Ces localités sont des laboratoires d’observation de la manière dont le surf constitue un ressort de la dynamique territoriale. L’émergence des vagues comme ressource territoriale correspond à une phase d’évolution contemporaine au cours de laquelle des actions élaborées de la part des acteurs sont développées. Dans ce processus, Plomeur et Guidel donnent à voir des déclinaisons variées qui prennent forme en fonction des « actifs » territoriaux disponibles. En intégrant le réseau des villes de surf, ces territoires sont aujourd’hui officiellement identifiés.

Plomeur : la vague comme symbole

13Le cas de Plomeur est un exemple contemporain de la façon dont un lieu peut être promu par des symboles qui lui sont associés. La naissance du « spot » est corrélative à ses attributs. Ceux-ci permettent, plus qu’ailleurs, d’incarner l’exploit individuel et la performance par le progrès technique. Dans ce processus, la vague polarise l’attention et devient l’objet qui particularise l’emplacement du spot de Plomeur. Suscitant un imaginaire riche, la vague de La Torche est photographiée, illustrée et utilisée sur une multitude de supports promotionnels… Les nombreux visiteurs du site attestent de la fonction symbolique du lieu. La Torche bénéficie d’une configuration géomorphologique très favorable aux activités de vagues, et concentre des atouts environnementaux distingués sur lesquels les promoteurs du territoire s’appuient pour tirer profit de la configuration.

Illustration 1

Illustration 1

Le promontoire rocheux naturel de la pointe de La Torche.

Photo : Roland Chatain, 2012.

14La consistance des vagues ainsi que la présence d’une pointe rocheuse stabilisant les bancs de sable essentiels à un déferlement propice de la houle permettent de surfer plus de 300 jours par an. D’une part, la vague de La Torche est considérée comme remarquable par sa taille, sa forme et sa courbure. Elle permet une pratique accessible à tous les niveaux. D’autre part, les conditions restent très correctes malgré les vents souvent défavorables. La présence d’un courant le long des rochers, que les surfeurs empruntent pour se rendre au large sans efforts, est un atout considérable pour la pratique et son ouverture au plus grand nombre.

Illustration 2

Illustration 2

Un surfeur en action à La Torche dans des conditions de vagues habituelles. En arrière-plan la ville de Penmarc’h encadre au sud la baie où viennent déferler les vagues.

Photo : Laurent Tosetti, 2013.

15Pour que La Torche se présente comme un « haut lieu », il est nécessaire que s’expriment de nouvelles pratiques sportives et de loisirs, une esthétique liée à l’utilisation d’engins et de matériel permettant de capter l’énergie des éléments naturels. Les coupes du monde de windsurf de 1984 et 1986 sont les événements fondateurs. Des grands champions repoussent les limites de leur discipline. Ils consacrent aussi l’utilisation de nouveaux matériaux pour la fabrication de planches. De nombreuses manifestations sportives, comme les championnats du monde junior, s’organisent comme autant de célébrations du caractère exceptionnel du « spot ».

16En associant à ce lieu des faits héroïques, les événements ont des effets transformateurs sur le territoire. En marge des rencontres officielles, d’autres exploits s’accomplissent, notamment le surf de grosses vagues. Appréhendé comme discipline distinctive dans la catégorie des sports de vagues, son rôle est symboliquement essentiel.

Illustration 3

Illustration 3

La plus grosse vague surfée en Bretagne à ce jour par R. au large de Penmarc’h, aux abords du spot de La Torche.

Photo : Erwan Crouan, 2011.

17En étant l’épicentre du développement sportif du surf à l’échelle régionale, La Torche est un point remarquable de l’espace littoral breton qui identifie le lieu touristique. Des acteurs clés s’établissent à Plomeur au cours des années 1980 et investissent la problématique de la structuration du surf. Y. est l’une de ces figures locales. En 1987, il fonde le Koala Surf Club et crée dans la foulée la ligue de Bretagne en 1988. En 1994, D. et R. créent l’École de surf de La Torche et fondent un réseau d’enseignement du surf sur la région. B. lance le premier atelier de fabrication de planches de surf à Plomeur à cette même période. « Il avait fait un peu le tour du monde… Il nous faisait rêver avec ses planches, avec ces gars qui venaient de partout… » (D., gérant d’école de surf, Plomeur) Leurs actions novatrices témoignent du succès des groupements professionnels.

18La Torche est marquée par une orientation politique en faveur de la protection des espaces naturels. La baie d’Audierne (y compris le site de La Torche) est la propriété du Conservatoire du littoral depuis 1982. La plage s’étale sur 642 hectares et offre à la vue un panorama dépouillé. Géré par la communauté de communes, le site fait l’objet d’une gestion concertée.

Je me suis rendu à Lacanau, qui est une « Ville de Surf », et le seul point commun que l’on a entre Lacanau et La Torche, c’est la pratique du surf, c’est le sport, les vagues, la plage on va dire, mais c’est à peu près tout… La Torche se distingue par son cadre environnemental, son cadre exceptionnel. (R., élu de la communauté de commune du pays bigouden)

19Plomeur montre que la situation de « bout du monde » peut être aussi une position sur le marché touristique. Cette dimension confère aux acteurs une marge de liberté additionnelle pour se distancier des standards qui régissent l’économie du centre, celle des destinations touristiques connues (Savelli, 2012). La Torche bénéficie d’une conjoncture politique favorable grâce au Conservatoire du littoral, le lieu est protégé d’éventuelles ambitions aménagistes de responsables politiques. La trajectoire du site s’est inscrite, dès 1982, dans une perspective de développement durable (Borne et Ponting, 2017) avant que cette thématique ne soit incontournable. Son attractivité est liée au fait que le site offre une expérience touristique recherchée, alliant performance et contemplation, et répond aux évolutions des aspirations sociales des individus, marquées par une tendance au retrait provisoire de la ville.

20La candidature de La Torche pour l’accueil de l’épreuve de surf des Jeux olympiques de Paris 2024 a confirmé pour le « spot » le statut de scène dominante du surf régional. « Le dossier de candidature de La Torche a permis de se mettre autour de la table. C’est vrai qu’il y avait certaines crispations avant notamment sur l’utilisation des parkings et des accès, mais y’a rien de tel qu’une bonne discussion en présence de tous les acteurs. » (R., élu de la communauté de commune du pays bigouden, Plomeur) Le choix du site a fait l’unanimité et a permis à des chaînes de solidarité de se créer entre parties prenantes régionales et locales.

Guidel : la vague au cœur de convergences d’intérêts

21Guidel donne à voir un autre cas de localité où les dynamismes économique et sportif produits par les professionnels rencontrent les velléités des dirigeants politiques dont le souci majeur est l’attractivité touristique et résidentielle. La commune reste dans l’ombre de la station balnéaire voisine de Larmor Plage qui concentre les ressources et les aménités maritimes (le centre nautique de Larmor Plage est l’un des plus grands centres européens en termes de fréquentation). Par ailleurs, la position géographique excentrée de Guidel dans l’agglomération lorientaise maintient la commune en dehors des circuits principaux de mobilité du territoire. Présentés par les élus comme ressources, les vagues et les spots sont appropriés pour un marketing territorial et placés au centre d’enjeux dépassant le cadre sportif : attirer les touristes comme les néo-résidents, et participer à la mouvance de métropolisation comme territoire péri-urbain. La qualité du caractère naturel de la ressource est moindre qu’à Plomeur. L’exposition sud diminue la consistance des vagues, et les plages subissent les fortes houles et certaines orientations de vent, ce qui rend la gamme des conditions de pratiques moins variée. L’intérêt du « spot » réside principalement dans la succession de quatre plages, accolées les unes aux autres, dont certaines sont idéales pour de l’initiation ou pour des niveaux intermédiaires.

Illustration 4

Illustration 4

La configuration du littoral de Guidel et, notamment, la succession de plages exposées à la houle de l’Atlantique.

Photo : Xavier Dubois, 2010.

Illustration 5

Illustration 5

Les conditions courantes de pratique sur le spot principal, « Le Loch ».

Photo : Thomas Deregnieaux, 2015.

22En raison de la présence de la station balnéaire, les pouvoirs publics sont prédisposés à savoir « faire commerce » des ressources. Les élus manifestent un volontarisme politique en matière de développement du nautisme dans une démarche destinée à proposer une expérience touristique ou résidentielle distinguée. Dès 1992, ils votent la construction d’un bâtiment sur le littoral dans une zone dunaire pour l’établissement d’un centre de voile. Cette mesure va se révéler inadaptée à la configuration de la côte guideloise :

En 89, j’étais moniteur de planche à voile au Fort-Bloqué. Moi j’ai loué des catamarans au Fort-Bloqué mais y avait des vagues, c’était une catastrophe. Ça partait dans tous les sens, c’était n’importe quoi, T’auras plus jamais ça maintenant, c’est fini, la planche à voile ou le cata, ça se fait dans les zones où c’est bien plat ! (p. , membre actif de club, Guidel)

23Les espoirs projetés sur la voile sont déçus, le surf s’institutionnalise dans les localités alentours. Ce constat corrobore ce travail mené sur le premier âge du surf en Aquitaine : « Larmor Plage a toujours été la station un peu huppée, donc les gens venaient de là-bas plutôt, ils avaient un peu plus de pouvoir d’achat… Guidel, c’étaient les agriculteurs quoi, les ploucs. » (p. , membre de club, Guidel) Le premier club de surf du territoire, la BZH association (BZHA), est créé dès 1986 par un groupe de pratiquants habitant la station balnéaire historique de Larmor Plage et bénéficiant de ressources sociales qui leur permettaient d’entretenir une proximité avec les élus de la ville. « La mairie de Larmor Plage donnait une belle subvention même si y avait pas trop de vagues chez eux… Tout le monde allait surfer à Guidel, parce que les vagues c’était sur Guidel. » (Ibid.) Dès 1995, des cours ont lieu à l’initiative de Ph., qui obtient son brevet d’État pour répondre à la demande de familles du club. Guidel est un des premiers territoires de Bretagne où des pratiquants qualifiés enseignent le surf contre rémunération.

  • 3 École Surf West, nom fictif inventé par souci d’anonymisation.

24La Société nautique du Fort-Bloqué ferme en 1999. En faisant la démonstration de la plus-value que représente leur présence pour la localité, les membres du club obtiennent l’accès aux locaux du centre nautique restés vacants. Le bâtiment, situé face aux vagues, permet de poursuivre d’autres ambitions. L’école intègre le réseau des structures ESW3 : « Ça nous a permis au début de lancer le truc et qu’on ait moins de travail à faire bénévolement […] Heureusement qu’on a eu ce fonds de roulement de l’été qui nous permet de vivre à l’année et de payer des gens à l’année. » (Ibid.) Cette étape est importante pour comprendre la trajectoire exemplaire de la BZHA qui continue, aujourd’hui encore, de réunir autour de 400 adhérents, et de fédérer les pratiquants. Les membres ont toujours su se maintenir à distance d’une logique « productiviste » qui donne la priorité à l’économie de marché, au profit. En valorisant les notions « d’équité, de rationalité sociale, de solidarité, et de priorité à l’être », le club est resté proche d’une logique plus « existentielle » (ibid.) et davantage en lien avec l’objet social qui le définit. L’impact de ce club institué sur le territoire se situe par une présence permettant d’entretenir un climat social serein d’entente entre les acteurs du surf, et ainsi de préserver l’environnement économique lié aux vagues. Aux yeux des pouvoirs publics, ces ressources sont pourvoyeuses d’émulation pour le dynamisme sportif et l’attractivité touristique.

25Le surf se présente comme une opportunité pour atteindre les ambitions qui étaient, à l’origine, cristallisées autour de la voile. Les vagues sont mobilisées telles des produits d’appel pour se distinguer, comme le montre cet extrait d’entretien avec S., un élu municipal : « Donc pour notre fonctionnement sportif local, je dirai que c’est très positif et aussi en termes d’image sur le pays de Lorient […] Nous, à Guidel, on est moins dans l’élitisme, je ne sais pas si ça se dit, on est plus dans la démocratisation, la découverte… » La valorisation de la vague s’inscrit en cohérence avec une accumulation de diverses reconnaissances que cette ville utilise comme attributs distinctifs. La valorisation du surf réactive l’identité balnéaire de la commune, amorcée dès le milieu du XXe siècle et poursuivie maladroitement au début des années 1990 avec le nautisme. « C’est important le volet touristique parce qu’on passe de 12 000 habitants en hiver à 30 000 en été. On voit bien que le critère sportif est aussi un choix pour des gens qui viennent de l’extérieur, et c’était pas le cas avant… » (élu municipal à Guidel) La présence de vagues est utilisée pour concurrencer la station de Larmor Plage. Par ailleurs, une convergence d’intérêts entre acteurs du surf réunis autour du club fait l’unanimité.

Le label « Ville de Surf » : une reconnaissance officielle de territoire de surf

26Plomeur et Guidel font partie des premières communes bretonnes à avoir candidaté pour recevoir le label « Ville de Surf » de la FFS, créé en 2015. La présence d’écoles de surf et de clubs associatifs pour assurer l’enseignement est prioritaire. Immergé dans un territoire rural, Plomeur s’est ouvert tardivement au tourisme. L’écosystème socioéconomique suscité par la renommée du site de La Torche comporte des logiques de fonctionnement qui, bien souvent, échappent aux responsables politiques locaux. À Plomeur, la gestion des problématiques internes liées aux conflits d’usage de la ressource prédomine sur celles relatives à un accroissement du rayonnement de la localité. À Guidel, les pouvoirs publics travaillent à positionner leur commune au sein de l’agglomération de Lorient, notamment en essayant de devenir attractif comme territoire péri-urbain. Les enjeux qui portent sur les échanges avec les territoires alentours sont prioritaires. L’appui sur le label « Ville de Surf » est alors une stratégie judicieuse. Il est mis en avant sur de nombreux supports de communication que la ville utilise pour promouvoir le mode de vie.

Illustration 6

Illustration 6

Exemple de panneau d’affichage public que l’on retrouve à plusieurs endroits de la commune.

Photo : Stephen Berrou, 2020.

Ainsi, la valeur d’usage du label est différemment utilisée. À Guidel, l’ambition d’être le plus conforme possible aux exigences fédérales est centrale ; en témoigne l’engagement affiché en matière d’environnement, de soutien au club et de mise en valeur des écoles de surf. À Plomeur, les pouvoirs publics sont moins disposés à entreprendre une démarche de valorisation de la ressource maritime. Sur ces deux terrains, la structuration et la visibilité sportive précèdent le développement d’une filière touristique.

Illustration 7

Illustration 7

Quelques dates clés du processus d’émergence de la vague comme ressource à Guidel et Plomeur.

Conception : Stephen Berrou, avril 2021.

27La renommée de Guidel et de Plomeur induit un changement de statut. Inévitablement, le partage de la ressource vague, limitée dans l’espace et le temps, intervient à mesure que ses usages s’y développent et s’y diffusent. Le nombre d’adeptes reste difficile à comptabiliser. Les observations montrent néanmoins que le nombre de pratiquants locaux ne cesse de croître ; en témoigne le nombre de « formules club » vendues par les écoles de surf sur la période hors saison touristique. Ces produits correspondent à des abonnements trimestriels pour des cours de surf hebdomadaires : ils s’adressent aux habitants résidant à proximité du spot et montrent que la pratique du surf s’inscrit dans les habitudes de vie. Les clubs de Plomeur intègrent dans leurs prestations des services de transport depuis Quimper pour les adhérents. Les aménagements de la desserte routière depuis Lorient permettent aujourd’hui aux citadins de cette ville de rejoindre les « spots » de Guidel. Les déplacements effectués dépendent aussi du rapport au surf. La recherche des meilleures conditions de vagues amène les plus assidus à traverser les départements du Morbihan ou du Finistère. Toutes ces données sont difficiles à chiffrer du fait du caractère ouvert de l’espace.

Les acteurs et la ressource territoriale : jeux consensuels vs conflictuels

  • 4 Site Nautisme en Bretagne, op. cit.

28À Guidel comme à Plomeur, le surf se caractérise par une fréquentation grandissante, par le développement d’un écosystème socioéconomique relié aux vagues et par une diversification des supports de pratiques et des usages des sites. Avec treize prestataires, La Torche concentre les structures d’encadrement. Guidel en compte cinq répartis sur différentes plages4. Les configurations spatiales variées permettent de surfer tous les jours grâce à des plages courbées ou coupées par des têtes rocheuses, et présentant différentes expositions. « En Aquitaine, si le vent vient du nord-ouest, d’ouest, les vagues sont écrasées. Ici, on a de la chance avec ces plages orientées différemment. » (Cudennec-Riou, 2021) Les acteurs locaux sont donc amenés à se positionner par rapport à la gestion de l’activité afin de l’organiser dans l’optique d’un développement plus ou moins partagé. Cette question est délicate car l’organisation de ce sport se réalise hors structure d’encadrement (en 2020 en France, la FFS estime à 680 000 les pratiquants pour seulement 80 000 licenciés). Dans ce contexte, des collaborations émergent localement, mais certains acteurs s’y opposent.

Les divergences entre acteurs

29La crise de la COVID‑19 agit comme un révélateur des tensions latentes. Un projet de territoire institutionnalisé, comme celui des villes de surf, se heurte aux perceptions différentes de l’usage de la ressource. Les données recueillies révèlent quatre formes de divergences entre acteurs.

30Une divergence entre la FFS et les élus à propos de l’usage du label. Entendu comme un levier politique, la fédération l’utilise pour augmenter sa capacité d’action dans les villes à distance (Honta, 2017). « Cela permet à la FFS de veiller à ce que les clubs affiliés, l’âme de la fédération, disposent de garanties matérielles et financières, et ce afin de les protéger de la concurrence des structures privées commerciales avec un minimum de soutien. » (Ibid.) Sensibles à la politique de la fédération à laquelle ils adhèrent, de nombreux pratiquants tiennent à ce que le surf figure sur l’agenda politique de leur ville. Mais les maires des communes littorales, qui sont la cible de la fédération, s’approprient le label pour servir le marketing territorial et relèguent, bien souvent, la dimension sportive au second plan. S., qui est gérant d’un club et d’une école de surf à Plomeur, déplore cette situation :

« Parce que y a aucune implication de la part des élus, aucune volonté de développer l’activité sur la commune… Incapacité de prise de rendez-vous par exemple avec le maire… Donc ‘Ville de Surf’ heu… Moi je ne suis jamais reçu par le maire. On demande à voir le maire, il ne veut pas nous recevoir ! »

31Les objectifs poursuivis au travers du label par l’acteur fédéral sont en décalage avec la façon dont il est utilisé et les effets produits.

32La deuxième forme de divergence est culturelle. Étant néophytes, les élus se maintiennent à distance des professionnels, ce qui limite les collaborations potentielles. À Plomeur, le contexte rural accentue davantage encore l’écart entre parties prenantes, comme l’exprime ce pratiquant du club de la commune :

Ici, notamment à La Torche, on a un modèle qui est encore très agricole, de culture intensive et tout ça, et… ça pourrait changer, ne serait-ce qu’avec le tourisme et l’économie que peut générer le surf. Mais je vois que c’est encore beaucoup ancré dans les communes, c’est le foot et dans l’entourage souvent des mairies, c’est le milieu agricole. (p. , Plomeur)

33Le constat est plus nuancé à Guidel. Le membre d’un club évoque malgré tout le décalage qu’il ressent dans ses rapports avec les élus :

Il faut que des élus surfeurs soient en place, c’est tout… Moi, depuis le temps que je suis là, j’ai fait des réunions en mairie, j’ai été président du club pendant je ne sais pas combien d’années donc… […] C’est les élus qui demandent au club de surf comment faire quoi ! L’adjoint, il commence à connaître un peu mais c’est un footballeur, et le maire, lui à Guidel, c’est un ancien donc voilà… (p. , Guidel)

34La posture des élus consiste à miser sur une auto-régulation des espaces de pratique, selon une délégation de gestion aux professionnels de l’activité.

35Une autre divergence renvoie à la différence entre espace résidentiel et espace touristique. Des catégories d’acteurs se dessinent à l’aune de cette distinction. Ceux qui séjournent temporairement sur le territoire se différencient de ceux qui y vivent à l’année. Les communautés locales de pratiquants se composent de locaux, de néo- et bi-résidents, et de touristes de passage. Pour les premiers cités, le rapport au territoire se définit par une présence permanente et active, et une proximité spatiale qui valorise une logique d’interconnaissance. Ils éprouvent un sentiment de dépossession du lieu avec lequel ils ont construit un rapport « domestique » :

Ce n’est plus ce que c’était à l’époque où on a commencé… La démocratisation a fait qu’il y a de plus en plus de surfeurs à pratiquer […] Quand on a débuté, y avait beaucoup de respect, t’allais pas au « pic » juste parce que tu avais 14 ans et puis que… Y a plus ce respect-là… Alors qu’avant tout le monde se parlait, tout le monde se connaissait… (S., Plomeur)

36À l’inverse, les autres ne considèrent pas l’enracinement comme indispensable à une implication sur le territoire. Ces derniers valorisent la mobilité dans le quotidien. Ils sont engagés dans un processus d’individuation. Cet antagonisme cristallise des tensions entre les pratiquants, tel que l’exprime cet habitant de Plomeur : « Y a plus de monde et aussi des gens qui ne sont pas de la côte font du surf quoi. C’est exactement comme un gars de la mer qui vient à la montagne et qui n’a pas les codes du montagnard quoi… Des gens qui sont venus d’ailleurs et qui n’ont pas cette culture de l’océan. » (S., Plomeur)

37Dans cette deuxième catégorie, on retrouve davantage de cadres bénéficiant du télétravail pour passer la semaine sur le littoral, ou de toute profession suffisamment rémunératrice pour acquérir une résidence secondaire sur le territoire de surf. Les villes de surf, depuis la crise sanitaire, véhiculent un idéal de style de vie, organisé autour de l’immersion dans la nature.

38Une divergence d’ordre économique est visible également entre les prestataires d’enseignement du surf. Elle renvoie aux différences des entrepreneurs dirigeants. La particularité des rapports entre dirigeants d’école de surf est qu’ils partagent le même espace. À Plomeur, la configuration du site rend sa capacité plus importante pour l’accueil simultané de moniteurs. De ce fait, le sujet de tensions entre prestataires porte sur les statuts juridiques des entreprises, comme l’exprime ce gérant : « Je pense que si des structures itinérantes venaient s’installer devant les écoles de voiles qui sont souvent des centres nautiques municipaux […], les gens seraient choqués. Apparemment, dans le surf, ça choque personne. » (R., directeur d’école de surf, Plomeur)

39À Guidel, les divergences touchent aux différentes « logiques d’action » des entrepreneurs, pouvant s’exprimer par des démarches productives opposées. La vision manichéenne du salarié du club illustre la manière dont elles sont interprétées :

En fait, y a deux types d’écoles pour moi, si on parle des privées… Mais y a de très bonnes écoles qui pour moi gardent le fil conducteur de la passion du surf et l’envie… Et qui se disent voilà comment je vais faire pour travailler dans de bonnes conditions… Et à quoi je vais plafonner quoi… Et ceux qui ont des dollars un peu dans les yeux ! Ils se rendent plus compte et ils outrepassent la ligne parce que eux, ce qui les intéresse c’est… Un moniteur je le mets sur la plage, il me rapporte combien l’été, si je peux en mettre cinq en mettre sept, en mettre huit, etc. (D., salarié de club, Guidel)

40Les divergences qui s’expriment entre les professionnels découlent du caractère limité et inextensible de la ressource, support de leur activité. Les usages variés de la vague posent la question de la capacité des acteurs à coopérer.

Régulations et stratégies d’acteurs

41Afin d’analyser les comportements des acteurs et les réponses qu’ils élaborent pour dépasser les divergences, une approche systémique s’avère intéressante. Le processus d’identification des territoires de surf en Bretagne Sud officialise l’entrée du politique dans le système d’acteurs. La coopération nécessaire au fonctionnement et la pérennité du système est directement dépendante d’un équilibre des intérêts concurrents d’acteurs.

42Une catégorie d’acteurs bénéficie de la maîtrise de la ressource « vague ». Cela passe par la possession de la compétence qui permet son utilisation et son exploitation. Les professionnels qui capitalisent sur le savoir-faire propre à l’activité surf et l’expérience des sites de pratique émergent comme étant les acteurs les plus influents localement. Les gérants et les responsables d’écoles de surf participent à l’ancrage des codes propres à la culture sportive et de loisir du surf. Le discours d’un élu le montre :

Ce sont de vrais sportifs ! […] Déjà parce qu’ils savent quand est-ce qu’ils peuvent aller sur l’eau, quand c’est praticable… […] Après moi je travaille pas tout seul, notamment quand je ne connais pas donc c’est les gens des clubs, je vous dis, ils sont plus au fait que moi, enfin moi je me tiens quand même informé, et je me fais éduquer sur ce qu’il est possible de faire et de ne pas faire. (Élu municipal, Guidel)

43Un autre acteur politique mentionne : « un équilibre qu’il faut trouver. Ce que je trouve bien c’est que les pros, c’est-à-dire ceux qui ont des écoles de surf, ont compris que l’avenir, leur avenir leur appartenait, donc ils ont cette intelligence de réguler les choses. » (Élu, pays bigouden)

44Par la position privilégiée qu’ils occupent, les professionnels prennent part aux décisions concernant l’utilisation commerciale de la plage. À Guidel, l’établissement d’une convention s’est fait à la demande d’un club de surf. Il s’agit avant tout d’un contrat coécrit et cosigné par les professionnels du surf qui précise les règles d’occupation du « spot ». Plus qu’un document ayant valeur juridique, c’est un engagement moral et sur l’honneur qui scelle une entente locale. Les élus encouragent au regroupement d’acteurs associatifs et privés, les incitant à se fondre dans un mode de gouvernance.

Ça a hyper bien fonctionné pendant dix ans, on a réussi à trouver des terrains d’entente dans des réunions… Ça s’est quand même très très bien passé, même avec le kite parce que parfois on partage les mêmes espaces et ça peut être compliqué… Mais grâce à cette communication, d’échanger, de rédiger une convention morale, un cadre. (D., salarié de club, Guidel)

45Cette configuration peut surprendre car l’occupation du domaine public de la plage par un commerce répond aux conditions fixées par l’autorité administrative en charge de sa gestion, généralement la commune. En Aquitaine, elle nécessite une autorisation d’occupation temporaire (AOT) du domaine public, qui prend la forme d’un arrêté. Le ménagement des élus en direction des professionnels du surf est l’une des conditions importantes de la préservation des intérêts des acteurs locaux. Les connaissances techniques dont disposent les professionnels sont autant d’arguments utilisés pour préserver leur marge de liberté, selon ce gérant d’école de surf à Plomeur : « L’extrême, c’est-à-dire faire des AOT… Hyper rigides, hyper figés, ça colle pas avec l’activité… Y a un marnage (l’influence de la marée), les conditions évoluent au fil de la journée, d’un jour à l’autre, donc c’est pas une pratique comme dans un gymnase quoi. » (R., Plomeur) En se positionnant comme de réelles parties prenantes du système, les professionnels participent à la régulation des usages des espaces, et à instituer des ententes informelles pour préserver leurs intérêts.

46Néanmoins, nombre de pratiquants locaux ne cherchent pas à mettre en œuvre des stratégies visant à récupérer des profits issus du développement du surf sur leur territoire. En ce sens, ils participent d’une résistance au processus d’acculturation relatif à la mise en tourisme des espaces de pratique. Cette évolution des rapports correspond à l’expression contemporaine d’une forme d’opposition entre pratiquants sur laquelle les groupes sont historiquement construits. Les « spots » sont d’abord des espaces vécus comme relationnels, identitaires et historiques. Dès le départ, les surfeurs se divisent sur la question de l’institutionnalisation (Falaix, 2012). Ce phénomène est consubstantiel au surf qui utilise la ressource vague, limitée et éphémère par essence. Des pratiquants se mettent à distance de l’espace convoité des vagues et tentent de garder le contrôle de l’information sur l’environnement. Cela consiste à ne pas divulguer les connaissances importantes sur les « spots », c’est-à-dire toute une gamme de paramètres entrant en ligne de compte pour la « bonne » pratique du surf. Des comportements sont considérés comme transgressifs du pacte tacite de non-divulgation des informations et cristallisent des tensions. La publication de photos sur les réseaux sociaux est un sujet clivant. Il n’est pas rare de faire disparaître, grâce à des outils informatiques, des éléments des décors ou de l’arrière-plan de l’image qui donneraient des indices de la localisation exacte d’une vague dans les alentours des sites « connus ». Un phare, une balise ou d’autres éléments distinctifs du paysage sont volontairement masqués sur les photos de surf amateur publiées. La préservation d’une dimension informelle de la pratique du surf à Guidel et à Plomeur est corrélative à une volonté d’entretenir un rapport « domestique » aux espaces de pratique. La capacité à décrypter l’espace à partir de dispositions fines est le résultat d’une longue initiation, qui n’est partagée que partiellement. Des acteurs comme Ph. à Guidel cumulent un capital social et symbolique. Présents depuis plusieurs décennies sur les « spots », ceux-ci exercent un pouvoir en disposant d’une légitimité charismatique. Ces figures individuelles s’imposent comme les garants de la dynamique du surf en Bretagne, en incarnant à la fois le savoir légitime des techniques par un ethos de responsabilité et une praxis, tout en étant des référents pour les élus locaux. Cette implication personnelle et cette double reconnaissance collective sont au fondement de l’exploitation de la ressource. Acteurs régulièrement consultés, ils prodiguent des conseils bien qu’ils gardent des informations confidentielles pour la poursuite d’intérêts économiques.

47Par ailleurs, le volet environnemental émerge comme étant un pivot du système, permettant de rassembler les différentes catégories d’acteurs autour d’une cause commune. La culture surf renvoie à une disposition aiguë à la sensibilité environnementale. La protection des espaces de pratique compose l’ethos du surfeur. L’exemple de l’association Surfrider Foundation engagée politiquement au nom de la protection de la vague est assez parlant (Weisbein, 2017). À l’échelle des deux localités, des écoles de surf multiplient des initiatives écologiques de « ramassage des plages ». L’environnement est une dimension que les élus investissent pour exercer leur pouvoir. Les extraits suivants montrent combien la préoccupation environnementale est présente pour les décideurs politiques tant à Guidel qu’à Plomeur :

On essaie de garder cette image naturelle-là, qu’il y ait pas des bungalows, des structures… le long de la côte, à part le centre nautique, on a pas de structures qui viennent s’implanter, c’est préservé. On travaille avec le conservatoire mais c’est aussi notre politique locale en termes d’optique environnementale sur le littoral, on est vigilant aussi quoi. (Élu municipal, Guidel)

48Un autre élu va dans le même sens à Plomeur :

Ce site est considéré comme remarquable au niveau environnemental, il faut absolument qu’on préserve cela, et c’est aussi pour le bonheur de ceux qui viennent surfer, d’avoir un cadre de ce type. Après les conditions de vagues, c’est une autre chose, mais je pense que c’est un atout formidable. C’était vraiment une spécificité de ce site, et on y tient. (R., élu municipal, Plomeur)

49Les pouvoirs publics font évoluer leur pratique d’une orientation communicationnelle vers une orientation stratégique. La labellisation renvoie à un processus d’assimilation à une référence extérieure. Cela suscite des stratégies qui prennent forme en fonction du degré de distance à maintenir à l’égard des critères d’attribution. Pour apparaître plus conforme, la valorisation du volet environnemental, mentionnée dans le cahier des charges de la fédération, constitue un levier à investir dans la reconnaissance et la visibilité de la localité et son cadre de vie.

50Le compromis entre acteurs s’avère nécessaire pour dépasser les divergences. Le ménagement des pouvoirs publics en direction des professionnels du surf, le maintien d’une dimension informelle relative à la pratique et les préoccupations environnementales sont constitutifs de réponses élaborées collectivement et d’ententes nouvelles nécessaires à la pérennité des systèmes locaux institués autour de la ressource « vague ».

Conclusion

51Le secteur nautique fait l’objet d’une structuration socio-spatiale en Bretagne. Ses acteurs travaillent à la gouvernance régionale des activités nautiques. Pratique sportive majeure, le surf permet le renouvellement de la vocation nautique des espaces littoraux bretons.

52L’identification de territoires de surf se réalise, en partie, par la valorisation des vagues. Leur présence est associée à une ressource territoriale pour les localités. À Plomeur, une symbolisation de l’espace par les sports de vague permet la construction d’un haut lieu, et les acteurs sont à l’avant-garde du développement sportif et touristique de la discipline. À Guidel, la possibilité de s’approprier le surf et les « spots » est constitutive d’un processus de territorialisation distinct. L’obtention du label résulte d’une logique de production du « spot » dans laquelle les élus locaux, les moniteurs et les membres actifs du club associatif local sont parties prenantes : elle se caractérise par un processus d’institutionnalisation du surf sur la commune. L’exemple de ces localités, à la différence de communes peu touchées par le tourisme, montre qu’elles ont développé un particularisme territorial.

53Comme villes de surf, elles matérialisent des espaces où s’opère une mise en scène de ce qui est garant d’un ordre établi. Des acteurs aux perceptions et aux dispositions variées engagent une transaction sociale. Ces jeux d’acteurs se nouent autour de problématiques émergentes en lien avec la dimension officielle du surf sur la commune et les enjeux associés : elles obligent à des « compromis de coexistence » (Remy, 2005) qui tiennent compte du caractère limité de la ressource « vague ».

54À Guidel, l’équilibre du système d’acteurs dépend d’une forme de ménagement des élus en direction des professionnels, tandis qu’à Plomeur il semble davantage lié au maintien d’une dimension informelle à la pratique. Les pratiquants locaux et les professionnels en sont les garants. Leurs connaissances et dispositions acquises, résultant d’une expérience longue, leur confèrent un avantage concurrentiel sur les autres groupes sociaux pour exploiter la ressource vague à plusieurs niveaux.

55Une conscience environnementale est activée face au développement du tourisme. Les fréquentations accrues sur les sites préoccupent les locaux quant à la pérennité de la ressource. Partagée par les acteurs, elle réduit la distance symbolique séparant les parties prenantes. L’appui sur le volet environnemental est une voie potentielle d’avenir pour préserver la ressource vague et empêcher sa surexploitation. En ce sens, les villes de surf de Bretagne Sud sont des territoires en construction dans lesquels les acteurs font face aux défis du monde contemporain. La méthodologie employée pour l’enquête tient peu compte des usagers récents des sites et des stratégies collectives des pratiquants locaux pour la sauvegarde de leur espace de jeu. Avec la massification du surf, le maintien d’une position dominante ou l’accès à celle-ci dans le système localisé d’acteurs devient une préoccupation majeure. Les professionnels de l’activité investissent de plus en plus des rôles de « gardiens » des sites. Le sauvetage côtier et la préservation de l’environnement naturel sont des problématiques qui concernent directement les localités et qu’il est essentiel d’étudier pour aller plus loin dans la compréhension des jeux d’acteurs dans ces microcosmes que sont les villes de surf.

Top of page

Bibliography

Anderson, Jon, 2022, Surfing Spaces, Londres, Routledge.

Augustin, Jean-Pierre, 2010, « Lacanau-Océan : vers une station touristique de troisième génération », Sud-Ouest européen, n° 29, p. 43‑52.

Banzo, Maité, 2016, « L’espace ouvert pour recomposer avec la matérialité de l’espace urbain », Articulo, Journal of Urban Research, numéro spécial 6.

Bernard, Nicolas, 2016, Géographie du nautisme, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Espace et territoires », n° 12.

Berrou, Stephen et Antoine Marsac, 2022, « La labellisation de deux ‘villes de surf’ de Bretagne Sud : enjeux de territoires », Nature et Récréation n° 13, p. 52‑64.

Borne, Gregory et Jess Ponting, 2017, Sustainable Surfing, Londres, Routledge.

Clairay, Philippe et Johan Vincent, 2008, « Le développement balnéaire breton : une histoire originale », Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest : Anjou, Maine, Poitou-Charentes, Touraine, vol. 115, n° 4, p. 201-233.

Cudennec-Riou, Valérie, 2021, « Écoles de surf : la Bretagne victime de son succès », Le Télégramme, 30 avril 2021.

Falaix, Ludovic, 2012, « Des vagues et des hommes : la glisse au cœur des résistances et contestations face à l’institutionnalisation des territoires du surf en Aquitaine », Carnets de géographes, n° 4.

Guibert, Christophe, 2007, « Le premier âge du surf en France : un sport socialement sélectif », Science & motricité, n° 61, p. 89-100.

Gumuchian, Hervé et Bernard Pecqueur, 2007, La ressource territoriale, Paris, Economica.

Honta, Marina, 2017, « (Re)penser les rapports du surf institué aux espaces du politique : représentations des intérêts et logiques d’engagements dans l’action publique », dans Ludovic Falaix (dir.), Surf à contre-courant : une odyssée scientifique, Bordeaux, Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine, p. 267-289.

Lacombe, Philippe, 2002, « La planche à voile », Techniques & Culture. Revue semestrielle d’anthropologie des techniques, n° 39.

Le Coadic, Ronan, 2002, Bretagne, le fruit défendu ? Rennes, Presses universitaires de Rennes.

Löw, Martina, 2015, Sociologie de l’espace, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme.

Remy, Jean, 2005, « Négociations et transaction sociale », Négociations, vol. 1, n° 3, p. 8195.

Savelli, Nicolas, 2012, « Géopolitique touristique d’un ‘bout du monde’. Le développement territorial du Valgaudemar en questions », Revue de géographie alpine, vol. 100, n° 2, p. 137-149.

Segalen, Martine, 1985, Quinze générations de Bas-Breton. Parenté et société dans le pays bigouden sud, 1720-1986, Paris, Presses universitaires de France.

Soulé, Bastien, 2007, « Observation participante ou participation observante ? Usages et justifications de la notion de participation observante en sciences sociales », Recherches qualitatives, vol. 27, n° 1, p. 127-140.

Weisbein, Julien, 2017, « S’engager en politique au nom de la vague : l’exemple de Surfrider Foundation Europe », dans Ludovic Falaix (dir.), Surf à contre-courant : une odyssée scientifique, Bordeaux, Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine, p. 289-305.

Top of page

Notes

1 Voir le site de Nautisme en Bretagne : <https://www.nautismebretagne.fr> (consulté en novembre 2022).

2 Ibid.

3 École Surf West, nom fictif inventé par souci d’anonymisation.

4 Site Nautisme en Bretagne, op. cit.

Top of page

List of illustrations

Title Illustration 1
Caption Le promontoire rocheux naturel de la pointe de La Torche.
Credits Photo : Roland Chatain, 2012.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/teoros/docannexe/image/12879/img-1.jpg
File image/jpeg, 346k
Title Illustration 2
Caption Un surfeur en action à La Torche dans des conditions de vagues habituelles. En arrière-plan la ville de Penmarc’h encadre au sud la baie où viennent déferler les vagues.
Credits Photo : Laurent Tosetti, 2013.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/teoros/docannexe/image/12879/img-2.jpg
File image/jpeg, 426k
Title Illustration 3
Caption La plus grosse vague surfée en Bretagne à ce jour par R. au large de Penmarc’h, aux abords du spot de La Torche.
Credits Photo : Erwan Crouan, 2011.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/teoros/docannexe/image/12879/img-3.jpg
File image/jpeg, 214k
Title Illustration 4
Caption La configuration du littoral de Guidel et, notamment, la succession de plages exposées à la houle de l’Atlantique.
Credits Photo : Xavier Dubois, 2010.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/teoros/docannexe/image/12879/img-4.jpg
File image/jpeg, 376k
Title Illustration 5
Caption Les conditions courantes de pratique sur le spot principal, « Le Loch ».
Credits Photo : Thomas Deregnieaux, 2015.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/teoros/docannexe/image/12879/img-5.jpg
File image/jpeg, 447k
Title Illustration 6
Caption Exemple de panneau d’affichage public que l’on retrouve à plusieurs endroits de la commune.
Credits Photo : Stephen Berrou, 2020.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/teoros/docannexe/image/12879/img-6.jpg
File image/jpeg, 532k
Title Illustration 7
Caption Quelques dates clés du processus d’émergence de la vague comme ressource à Guidel et Plomeur.
Credits Conception : Stephen Berrou, avril 2021.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/teoros/docannexe/image/12879/img-7.jpg
File image/jpeg, 327k
Top of page

References

Electronic reference

Stephen Berrou and Antoine Marsac, Les vagues surfées en Bretagne Sud : ressources nautiques et territorialesTéoros [Online], 43-2 | 2024, Online since 31 December 2024, connection on 17 March 2025. URL: http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/teoros/12879

Top of page

About the authors

Stephen Berrou

Doctorant,
Laboratoire « Analyse comparée des pouvoirs », École doctorale « Culture et société », stephenberrou[at]hotmail.fr

Antoine Marsac

Maître de conférences
Laboratoire « Analyse comparée des pouvoirs », Université Gustave Eiffel, antoine.marsac[at]univ-eiffel.fr

By this author

Top of page

Copyright

CC-BY-NC-ND-4.0

The text only may be used under licence CC BY-NC-ND 4.0. All other elements (illustrations, imported files) are “All rights reserved”, unless otherwise stated.

Top of page
Search OpenEdition Search

You will be redirected to OpenEdition Search