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II · Les ateliers

L’atelier de restauration de peintures du musée du Louvre pendant la Seconde Guerre mondiale

The Louvre’s painting restoration workshop during the Second World War
Isabelle Cabillic
p. 53-60

Résumés

L’atelier de restauration de peintures du musée du Louvre, créé en 1935, a continué à fonctionner activement durant la Seconde Guerre mondiale, plus particulièrement dans trois dépôts de défense passive, au nord et au sud de la Loire. Malgré les difficultés de la vie quotidienne, et notamment d’approvisionnement en matériaux de restauration, les restaurateurs ont poursuivi le programme de travail entrepris par le musée du Louvre à la fin des années 1930. Les interventions encadrées par les conservateurs du département des Peintures et le chef de l’atelier ont pu, en partie, être soumises à la seule Commission de restauration qui s’est tenue pendant la guerre, en 1940 ; des rapports de restauration ont été rédigés et des prises de vue photographiques effectuées : rigueur humaine et rigueur scientifique ont ainsi tenté de s’adapter aux contraintes de cette période troublée.

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Texte intégral

  • 1 Jacques Jaujard, directeur des musées nationaux, a imaginé dès 1938 un plan très détaillé et minuti (...)
  • 2 Valland, 1997, p. 6.

1Septembre 1939 est marqué par la déclaration de guerre. Le musée du Louvre se voit contraint d’évacuer ses collections1 dans différents châteaux du nord de la France puis, très vite, dans le sud, en zone libre. Du 27 août au 28 décembre 1939, 37 convois de cinq à huit camions chacun prennent la route d’Orléans, chargés de peintures, sculptures et objets d’art des collections nationales et privées pour gagner le château de Louvigny ou le château de Chambord, « sorte de gare de triage et de répartition des œuvres d’art »2 vers les dépôts de défense passive.

  • 3 P.V. conservé à la Documentation du C2RMF.
  • 4 Bazin, 1992, p. 30.

2Certains de ces dépôts ont abrité des ateliers de restauration, lieux d’intense activité qui ont appliqué les décisions prises lors de la Commission de restauration du 23 janvier 19393 et par le conservateur en chef du département des Peintures, René Huyghe, qui « avait décidé qu’on ne resterait pas inactif et qu’on poursuivrait les travaux du département des Peintures en temps de paix. Déjà, dès le temps de la guerre froide, il avait installé une antenne de restauration à La Pelice, où travaillait notamment le peintre Zezzos. [...] Les tableaux du Louvre étaient alors, pour la plupart, couverts de « vernis musée » qui avait tourné au jaune ou au chocolat. Nous mettions donc au point les techniques d’allègement des vernis que nous allions opposer, les décennies suivantes dans la commission internationale de l’Unesco, aux méthodes de décapage drastique des Anglo-saxons »4.

  • 5 AMN, R30, Louvigny : le Livre-journal de Louvigny laisse entendre, les 8 et 20 mars 1940, que P. Mi (...)
  • 6 Différentes notes (aux AMN et au C2RMF) et les journaux de bord des dépôts, dans la série R30 aux A (...)

3Si quelques restaurations semblent avoir été conduites au château de Chèreperrine5, les principaux ateliers ont pris place au château de La Pelice de 1939 à 1940, au château de Sourches de 1940 à 1946, et à Montauban de 1940 à 1943. S’y sont succédé ou ont travaillé de concert le chef d’atelier, Jean-Gabriel Goulinat, et ses proches collaborateurs : Edgard Aillet, Lucien Aubert, René Longa, Pierre Michel, Pierre Paulet, Jacques Roullet et Georges Zezzos ; les « rentoileurs », Marc-Rodolphe Müller, Paul Maridat, Raymond Lepage, J. Moroné6.

Un atelier de restauration au château de La Pelice de septembre 1939 à juin 1940

  • 7 AMN, R30, La Pelice, lettre de J. Jaujard datée du 25 mai 1940, adressée à G. Huisman, secrétaire g (...)

4Réquisitionné en 1939, le château de La Pelice dans la Sarthe, propriété du comte d’Aillières, abrite, sous la responsabilité de Pierre Pradel, conservateur adjoint au musée des Monuments français, une partie du département des Peintures, soit 824 œuvres, dont la Belle Ferronière, Le Portrait de Charles VII ou La Bataille de San Romano ; il est considéré par Jacques Jaujard comme « un des dépôts les plus importants du département des peintures du Louvre7 » (fig. 1).

Fig. 1. La Bataille de San Romano est portée dans le château de La Pelice

Fig. 1. La Bataille de San Romano est portée dans le château de La Pelice

© Musée Résistance et Déportation - ville de Montauban.

  • 8 Selon le témoignage de sa fille, Goulinat, 1974, p. 75.
  • 9 AMN, R2 A4, Rapport à Monsieur le Directeur général des Beaux-arts sur les mesures récentes prescri (...)
  • 10 Bazin, 1992, p. 15-16.
  • 11 C2RMF, « Atelier de restauration, 2e semestre 1939-1945 » [1940] : Liste des tableaux vus par Monsi (...)
  • 12 Le C2RMF et les AMN conservent le procès-verbal de cette commission.
  • 13 Il faut attendre juin 1947 pour que le rythme des commissions retrouve une régularité.

5L’atelier de restauration, implanté dans ce dépôt, a été le lieu d’une activité soutenue et structurée où « Jean-Gabriel Goulinat et ses sept collaborateurs menèrent [...] une existence assez monacale, continuant le travail qu’ils exécutaient avant la guerre au Louvre8 ». Ce que confirme Jacques Jaujard en janvier 1940, en soulignant qu’« il importe d’exécuter le programme des restaurations prévues par les musées nationaux pour le bon entretien des œuvres. Ces restaurations sont effectuées sur les crédits ouverts au titre des grands travaux9 ». Une jeune chargée de mission du département des Peintures, Jeanne-Marie Troude, assure « le secrétariat de l’antenne de restauration10 » (fig. 2). Tout en traitant des œuvres, Goulinat organise11 et encadre le travail de ses collaborateurs qu’il soumet, le samedi 2 mars 1940, à la « Commission restreinte de restauration12 », seule commission à s’être tenue pendant la guerre et qui donne lieu, selon l’usage, à un procès-verbal13. Outre le chef d’atelier, elle réunit Georges Huisman, directeur général des Beaux-Arts, Albert S. Henraux, président de la société des Amis du Louvre, Jacques Jaujard, René Huygue, Germain Bazin, Édouard Michel et Lucien Aubert. Quarante-et-un tableaux sont ainsi examinés, parmi lesquels Le Paradis de Tintoret (Inv. 570), La Pêche et La Chasse de Carrache (Inv. 209 et 210) restaurés par Zezzos ; La Bataille de San Romano d’Uccello (MI 469), Guillaume Jouvenel des Ursins par Fouquet (Inv. 9619), nettoyés par Aubert ; Les Fêtes vénitiennes de Guardi (Inv. 319 à 325 et Inv. 20009) ; Le Jeune Mendiant de Murillo (Inv. 933), La Fuite de Loth par Véronèse (Inv. 136) traités par Longa ; La Mélancolie de Feti (Inv. 281) et Jeanne d’Aragon de Raphaël (Inv. 612) restaurés par Paulet ; La Vierge au lapin (Inv. 743), L’homme au gant (Inv. 757) et La Femme au miroir (Inv. 758) de Titien, Le Portrait d’un sculpteur de Bronzino (Inv. 131), Hélène Fourment et ses enfants (Inv. 1795) restaurés par Goulinat. Si l’ensemble de ces interventions est unanimement approuvé, R. Huyghe et G. Bazin estiment cependant utile de rappeler les principes édictés à l’atelier du Louvre, principes selon lesquels « les restaurateurs laissent toujours avant achèvement du tableau un témoin de l’état ancien prouvant d’un côté la nécessité du nettoyage entrepris et de l’autre la prudence du restaurateur conservant toujours une couche de vernis suffisante pour protéger la matière picturale du tableau. À l’unanimité, cette manière de procéder est adoptée ». La question de l’allègement des vernis demeure en effet au cœur des préoccupations des responsables du département des Peintures.

Fig. 2. Jeanne Troude et Jean-Gabriel Goulinat entourés de l’équipe des restaurateurs devant le château de La Pelice, hiver 1939-1940

Fig. 2. Jeanne Troude et Jean-Gabriel Goulinat entourés de l’équipe des restaurateurs devant le château de La Pelice, hiver 1939-1940

© Musée Résistance et Déportation - ville de Montauban.

  • 14 En réalité, comme nous l’apprennent les fiches de santé (conservées au C2RMF) de ces quatre tableau (...)
  • 15 Par le photographe Searl qui a son studio dans le VIIIe arrondissement de Paris.

6Le programme de 1940 est ensuite soumis à la Commission. Sont concernés quatorze tableaux de Poussin dont Le Paradis terrestre (Inv. 7303), Le Déluge (Inv. 7306) ou Eliézer et Rébecca (Inv. 7270), sept tableaux du Lorrain dont Ulysse remet Chryséis à son père (Inv. 4718), Port de mer, effet de brume (Inv. 4319), des œuvres de Zurbaràn, de Titien et de Véronèse... Il est acté de transposer quatre tableaux : Les Échevins de Philippe de Champaigne (MI 911), la Pieta du Rosso (Inv. 594), Moïse frappant le rocher de Valerio Castello (MI 863) et Le Martyre de saint Pierre de Subleyras (Inv. 8003)14. « À la fin de l’inspection, M. Georges Huisman donne son approbation pour tout ce qui a été entrepris jusqu’à ce jour par l’Atelier de restauration du Louvre et félicite chacun des restaurateurs pour le tact et la prudence avec lesquels ils ont conduit leur travail. Tous les membres présents s’associent pleinement aux paroles du directeur général des Beaux-Arts. » Le procès-verbal nous apprend enfin qu’une documentation photographique est effectuée15 afin de garder des témoignages des interventions ; la guerre n’empêche pas la rigueur scientifique.

  • 16 Nous renvoyons vers le mémoire de M. Sido qui présente en détail les travaux de restauration exécut (...)

7Si le programme de travaux est ainsi fixé, il apparaît toutefois que certaines opérations sont conduites en dehors de ces décisions ; elles s’expliquent par des accidents survenus lors de l’évacuation ou de la mise en réserve dans les dépôts successifs16.

  • 17 Germain Bazin est chargé le 18 mai par J. Jaujard de cette évacuation dont il rend compte dans un r (...)

8En juin 1940, la menace des événements et l’avancée des troupes ennemies obligent la direction des musées nationaux à envisager de porter les œuvres plus au sud de la Loire17, si bien que, trois mois après la tenue de cette commission, le château de La Pelice est évacué...

La restauration au château de Sourches de juin 1940 à juillet 1946

9Propriété du marquis des Cars, le château de Sourches, situé sur la commune de Saint-Symphorien dans la Sarthe, est réquisitionné dès septembre 1939 par les musées nationaux afin d’y conserver les collections publiques du département des Peintures du Louvre et plus particulièrement les grands formats tels L’Atelier de Courbet (fig. 3), les tableaux de Rubens de la galerie Médicis, Le Radeau de la Méduse de Géricault ou Les Romains de la décadence de Couture, pour n’en citer que quelques-uns ; des musées de Versailles et d’Art moderne, mais également des collections provenant d’établissements publics ainsi que des collections particulières (David-Weill et Wildenstein) dont certaines firent l’objet de saisies par l’Einsatzstab Reichleister Rosenberg, principal service allemand chargé des spoliations. Ce dépôt est placé sous la responsabilité de Germain Bazin.

Fig. 3. La Manipulation de L’Atelier de Courbet au château de Sourches, en présence de Germain Bazin

Fig. 3. La Manipulation de L’Atelier de Courbet au château de Sourches, en présence de Germain Bazin

© Archives des musées nationaux.

  • 18 AMN, R30, Sourches, carton n° 7, R 30 I 4, « Vie du dépôt », Courrier n° 52, 2 p. dact.

10Dès le début de la guerre, Sourches accueille un atelier de restauration, dont un atelier de rentoilage, qui fonctionne parallèlement à celui de La Pelice et, plus tard, à celui de Montauban. Bazin, qui déplore qu’il n’y ait « aucun dossier de restauration à Sourches »18, organise la répartition du travail : des interventions de nature esthétique sur des œuvres accidentées lors de leur transport ; le traitement de grands formats en raison des « facilités exceptionnelles qu’offre le dépôt de Sourches pour faire exécuter par plusieurs restaurateurs à la fois la restauration de tableaux de grandes dimensions dont la manipulation est difficile au Louvre [...]. En gros, en partant de la base de 80.000 Frs disponibles, le crédit serait réparti ainsi : 20.000 Frs à Monsieur Goulinat que son talent recommande pour les tableaux les plus importants, 10.000 Frs à chacun des autres restaurateurs. Le surplus pourrait être consacré à des achats de cadres et à la fabrication d’étiquettes ».

  • 19 AMN, R30, Sourches, carton n° 6, R 30 I 4, « Vie du dépôt », Journal du dépôt ; Sido, 2001, p. 23-2 (...)
  • 20 AMN, R30, Journal du dépôt, 6 juin 1941.
  • 21 AMN, R30, Loc-Dieu, Bazin, Journal de l’évacuation des dépôts de la Sarthe ; Sido, 2001, p. 25 et 3 (...)
  • 22 C2RMF, « Atelier de restauration, 2e semestre 1939-1945 », « Restauration 1942-1943 », 2 p. ms + 2  (...)

11Aubert, Michel, Paulet, Longa, Roullet, Zezzos ; les restaurateurs de support toile Maridat, Moroné, Müller et Lepage19 travaillent activement « aux tableaux sous la direction de Mr le conservateur »20 et sous l’œil attentif de Goulinat21 qui planifie le travail de l’équipe22 tout en restaurant plusieurs œuvres. Citons parmi les multiples restaurations fondamentales menées dans ce lieu, la transposition de Saint Bruno reçoit un message du pape et Saint Bruno distribuant des biens (Inv. 8039 et 8031) de Le Sueur assurée par Müller et celle de la Pêche miraculeuse de Jouvenet (Inv. 5487) par Müller et Lepage ; le nettoyage de Saint Bruno au sermon de R. Diocrès et de Saint Bruno en prière (Inv. 8024 et 8027) de Le Sueur par L. Aubert, alors que P. Paulet nettoie et réintègre Raymond Diocrès après sa mort (Inv. 8026) (fig. 4) ou le Combat de cerfs de Courbet (RF 326) ; l’allègement de vernis par Zezzos de plusieurs tableaux de Guardi (RF 2252 et Inv. 322) ou d’Eliézer et Rébecca (Inv. 7270) de Poussin ; le nettoyage du Roi boit de Jordaens (Inv. 1406) et les nettoyage et réintégration de L’Arc de triomphe d’Orange, La Maison carrée, Les Arènes et la tour Magne à Nîmes, Intérieur du Temple de Diane à Nîmes, Le Pont du Gard (Inv. 7647, 7648, 7649 et 7650) d’Hubert Robert par Goulinat.

Fig. 4. Examen des tableaux de La Vie de Saint Bruno de Le Sueur sur une terrasse du château de Sourches

Fig. 4. Examen des tableaux de La Vie de Saint Bruno de Le Sueur sur une terrasse du château de Sourches

© Archives des musées nationaux.

  • 23 Dont celui de la transposition de ce tableau ou de Saint Bruno reçoit un message du pape de Le Sueu (...)

12Parfois, les restaurateurs adoptent une liberté de travail propre à des circonstances exceptionnelles. On apprend ainsi que le 27 juin 1940, « La Pêche miraculeuse de Jouvenet est sortie et placée sur l’herbe pour permettre aux rentoileurs de terminer le refixage. Puis ce tableau est porté dans la cour d’honneur où il est enlevé de son châssis et enroulé sur des rouleaux de la salle à manger, enfin le tableau est mis sur la table de rentoilage. Ces différentes opérations sont exécutées en présence de Monsieur le conservateur, Chef de dépôt » qui rédige lui-même certains rapports de restauration.23 Le photographe Searl est également présent pour documenter les travaux.

  • 24 AMN, R30, Sourches, Journal de bord.
  • 25 Ibid.

13Cet atelier fonctionne tout au long de la guerre et un peu au-delà puisqu’on trouve notamment trace de la présence de Maridat en février 1946 « venu renforcer le châssis du Radeau de la Méduse de Géricault24 », dans la perspective de son retour vers Paris ; le 31 juillet 1946 marque « la fin du dépôt de Sourches25 ».

  • 26 Goulinat, 1946, p. 8.
  • 27 AMN, P16, 1937-1941, Lettre n° 52 de G. Bazin à J. Jaujard du 25 septembre 1940, 2 p. dact.
  • 28 AMN, R30, Loc-Dieu, nombreux courriers et notes de G. Bazin, R. Huyghe, L. Hautecœur et rapport de (...)
  • 29 Ibid., Lettre de 2 p. dact. ; Mazauric, 1967, p. 116 ; Goulinat, 1946, p. 8.
  • 30 AMN, R2 B36, Lettre ms. de J.-G. Goulinat à J. Jaujard, pour lui proposer de transformer le musée I (...)

14La recherche de nouveaux lieux dans le Sud-Ouest qui permettent à la fois de stocker un important volume d’œuvres, d’assurer leur sécurité et de rendre possible leur restauration donne lieu à moultes réflexions26. S’il est un temps envisagé de créer un atelier de restauration dans l’abbaye aveyronnaise de Loc-Dieu27, proche de Villefranche-de-Rouergue, ses conditions climatiques inadaptées28 conduisent à retenir le musée Ingres de Montauban29, selon la suggestion de Jean-Gabriel Goulinat30.

  • 31 AMN, R30, Loc-Dieu, G. Bazin, Journal de l’évacuation des dépôts de la Sarthe, juin 1940, p. 10.
  • 32 Valland, 1997, p. 15.
  • 33 Bazin, 1992, préface de R. Huyghe, p. 9.
  • 34 AMN, R30, Montauban, Carton 4, « Vie du dépôt, restauration », 2 p. ms ; Ibid, Lettre de Goulinat à (...)

15Dès le 8 juin 1940, les camions prennent la route du sud. Le 13, « Mlle Troude est envoyée à La Pelice pour ramener du matériel et le personnel, rassembler le matériel qui reste et mettre le dépôt en ordre […] : dans le salon du château sont tous les chevalets de l’atelier de restauration31 ». Le 17 juin, les convois franchissent la Loire, moins d’une demi-journée avant la fermeture des ponts à la circulation32. Certains grands formats demeurent cependant en zone occupée, car leur transfert est considéré comme trop périlleux33 ; le dépôt de Sourches est conservé. Depuis Loc-Dieu, en liaison avec le chef d’atelier qui réside à Réalville, à une trentaine de kilomètres de Montauban, René Huyghe tente de planifier le calendrier des travaux des restaurateurs et notamment « l’achèvement des rentoilages et transpositions [...] et la restauration des dégâts causés par l’évacuation de Juin ». Le nettoyage des tableaux n’est pas oublié, car si « la plupart des tableaux ont été soignés, il en reste qui feront une tache très ‘pain d’épice’34 ».

L’atelier de restauration au collège Saint-Théodard et à l’Institut Calvin de Montauban

  • 35 AMN, R30, Montauban, carton 2. Un inventaire précise que sa chambre abrite un Portrait de femme de (...)
  • 36 AMN, R30, Montal, carton 3, Courrier du directeur des musées nationaux au secrétaire général des Be (...)
  • 37 Accueilli le 6 par L. Hautecoeur et J. Jaujard.
  • 38 AMN, R30, Montauban, carton 4, « Vie du dépôt : correspondance, devis divers ».

16Tout est à nouveau à organiser : le stockage des œuvres – la place est tellement comptée qu’on range certains tableaux dans la chambre de Zezzos35 –, le logement du personnel, l’atelier de restauration. Le dépôt de Montauban, placé sous la responsabilité de Huyghe, réunit près de 3 500 chefs-d’œuvre du département des Peintures (fig. 5) dont la Joconde, les objets les plus précieux du département de l’Égypte et tous les objets de la collection Maurice et Robert de Rothschild acquis par préemption par les musées nationaux36. En novembre 1940, Huyghe fait procéder à l’ouverture des caisses, en vue de la venue du maréchal Pétain37 : sur un cahier d’écolier, il en note le contenu et dresse des constats d’état très rapides38.

Fig. 5. Réserves de tableaux dans le musée Ingres à Montauban

Fig. 5. Réserves de tableaux dans le musée Ingres à Montauban

© Archives des musées nationaux.

  • 39 Goulinat, 1974, p. 76 ; Mazauric, 1967, p. 133.
  • 40 C2RMF, « Atelier de restauration, 2e semestre 1939-1945 », Installation d’un atelier de rentoilage (...)
  • 41 Goulinat, 1946, p. 9-10.

17Toutefois, il apparaît que, faute de place, le musée ne peut, en réalité, accueillir l’atelier de restauration. À l’issue de multiples recherches, le collège Saint-Théodard et l’Institut Calvin, situés sur le quai du Tarn à proximité du musée, offrent des espaces à un atelier39 et notamment un lieu dédié au rentoilage40 où « des photographies directes et des photographies aux rayons ultra-violets, des radiographies, complètent chaque dossier, qui peut s’enrichir sans cesse »41. Certains travaux commencés à La Pelice sont poursuivis à Montauban ; d’autres y sont entrepris.

  • 42 Pérignon, 2007, p. 33-39.

18Les restaurateurs du Louvre répondent une nouvelle fois présents42 : Aillet, Aubert, Goulinat, Lepage, Longa, Müller, Zezzos se succèdent dans ces lieux. Lepage transpose Les Aveugles de Jéricho de Poussin (Inv. 7281) – avant qu’Aubert ne les nettoie et ne les réintègre –, ainsi que La Grosse Tour de Salomon van Ruysdaël (RF 1483) que Goulinat nettoie sélectivement, réintègre et harmonise. Zezzos traite l’Intérieur de cuisine par Drolling (Inv. 4097), nettoie la Fillette au faucon (Inv. 1148) de Philippe de Champaigne, nettoie et réintègre la Jeune Femme lisant une lettre de Raoux (MI 1100), transposée par Lepage ; Aillet nettoie vernis et repeints du Maître-Autel de Notre-Dame-de-Paris par Jouvenet (Inv. 5502) et allège le vernis de Moïse frappant le rocher de Valerio Castello (MI 863). Goulinat restaure plusieurs œuvres de Corot : La Nymphe jouant avec l’Amour (Inv. 1782) et Le Vésuve (RF 1633) ; de Poussin : La Mort de Saphire, L’Autoportrait, La Femme adultère et L’Enlèvement des Sabines (Inv. 7286, 7302, 7282 et 7290) et réintègre Hélène Fourment et ses enfants (Inv. 1795) de Rubens. Le chef de l’atelier réintègre également L’Indifférent de Watteau (MI 1122), qu’il a expertisé en juin 1939 après son vol et sa « restauration » intempestive par Serge Bogousslawsky, et que René Longa a nettoyé après sa restitution au Louvre.

  • 43 AMN, R30, Montauban, carton 4, « Vie du dépôt, correspondance, devis divers », Lettre de R. Huyghe (...)
  • 44 Ibid., Note de Jaujard à Huyghe, 19 septembre 1941, 1 p. dact.
  • 45 Ibid., Lettre de J. Jaujard à R. Huyghe, 3 novembre 1941.
  • 46 Ibid., carton 4, « Vie du dépôt, Protection », Examen des tableaux après les dégâts causés par la t (...)
  • 47 Ibid., Note anonyme pour M. Huyghe, [1941], 1 p. dact.
  • 48 Bazin, 1992, p. 65.

19Se posent toutefois des problèmes de différente nature : manque d’espace conséquent pour la restauration des grands formats, tel le Saint François de Giotto qui ne peut être transporté du musée Ingres vers l’atelier sans risque43 ; problème de santé d’un restaurateur – Aillet, souffrant, doit subir une importante intervention chirurgicale et ne « pourra se rendre à Montauban avant un assez long délai44 », ce qui entraîne une modification de la répartition des crédits entre les dépôts de Sourches et de Montauban45 ; accident climatique : une tornade s’abat sur la ville et affecte 69 œuvres46, dont La Raie de Chardin, L’Immaculée Conception de Murillo ou le Saint Sébastien de Mantegna. Une note adressée à Huyghe en 1941, prouve néanmoins que la restauration et sa gestion financière se poursuivent : « Les Travaux de restauration exécutés au dépôt de Montauban devront être examinés dans le courant de janvier de manière à ce que les mémoires puissent être adressés à la Direction des Musées pour le 15 janvier au plus tard47 ». Bazin se rend à Montauban – à une date non identifiée – pour y faire « avec René Huyghe une dernière inspection des travaux effectués par Jean-Gabriel Goulinat »48 avant de regagner le dépôt de Sourches dont il a la charge.

  • 49 AMN, R30, Montauban, carton 4, « Vie du dépôt, Restauration », 2 p. dact. ; Goulinat, 1946, p. 12.
  • 50 Bazin, 1992, p. 77 ; Valland, 1997, p. 18.
  • 51 Malgré la volumineuse documentation que possèdent les AMN sur le dépôt de Montal notamment, puisque (...)
  • 52 C’est-à-dire Lucie Mazauric.

20L’évacuation du dépôt est envisagée à la fin de l’année 1942, car la région de Montauban s’avère désormais trop dangereuse49. Différents lieux sont prospectés et les châteaux de Montal, Latreyne, Bétaille, Vayrac et Loubejac retenus50. On ne trouve plus trace de restaurations dans ces dépôts51 bien que l’on ait mention de laissez-passer au nom de Goulinat, de Mme Chamson52 et du photographe Searl vers le château de Montal. Si des interventions ponctuelles y ont été menées, on peut cependant considérer qu’après le départ de Montauban, il n’y a plus d’atelier de restauration en zone libre.

L’organisation matérielle et humaine des ateliers

  • 53 Sido, p. 25-26 et Cabillic, p. 180-182, 213-214 et 217-218.
  • 54 AMN, P 16, 1937-1941, Lettre de Bazin à Jaujard, 2 p. dact.
  • 55 AMN, R30, Montauban, carton 4, « Vie du dépôt, correspondance, devis divers », lettre de 2 p. ms. d (...)
  • 56 AMN, P16, 1937-1941, Lettre (107) de Bazin à Goulinat, 25 novembre 1941, 1 p. dact.
  • 57 AMN, P16, 1942-1956, Note du 15 octobre 1942 de R. Huyghe à J. Jaujard, qui rend compte de la distr (...)
  • 58 AMN R30, Montauban, carton 4, « Vie du dépôt, Restauration ». Bazin précise ultérieurement, lors de (...)
  • 59 AMN, P16, 1942-1956, Lettre adressée à J. Jaujard, 3 septembre 1943, 1 p. dact.

21La mise en place de ces campagnes de restauration s’avère délicate53, en cette période de pénurie générale ; nombre de notes et courriers soulignent des besoins de différente nature tels les produits « [...] indispensables à nos sept restaurateurs pour les travaux qu’ils doivent exécuter pour nous pendant le premier semestre 1941. Il serait utile de demander aux Services français ou allemands des distributions de matières premières de nous fournir ces produits [...] » : essence de térébenthine, alcool à 95° non coloré, acétone, acétate d’amyle, vernis Lefranc, etc., sont alors énumérés54. La toile est également une denrée rare et précieuse ; c’est pourquoi Marc-Rodolphe Müller interroge Germain Bazin, en novembre 1940, avant de se rendre à Montauban, au sujet du nombre d’œuvres à traiter afin de « n’emporter que la quantité de toile nécessaire, car vous le savez Monsieur le conservateur, celle-ci est peut-être encore plus rare que le beurre, le savon, ou l’huile et j’en ai fait une provision qui hélas ne sera pas inépuisable. Le Louvre m’a assuré que la toile que j’avais envoyée à La Pelice se trouvait à Chambord, mais il est impossible d’aller la chercher55 ». En novembre 1941, l’atelier de rentoilage de Montauban ne peut fonctionner, faute de matériaux56. En octobre 1942, 450 000 F sont destinés aux rentoilages exécutés à Sourches et Montauban57, mais les difficultés d’approvisionnement s’amplifiant, on tente d’employer des matériaux de substitution, avec peu de bonheur, selon un courrier de Germain Bazin à Goulinat : « [...] je ne sais si vous êtes au courant des raisons qui ont malheureusement retardé notre campagne de rentoilage à Sourches. Nous avons eu de gros déboires à cause du manque de gaze et son remplacement à l’aide de papier a donné de si mauvais résultats que nous avons été contraints d’interrompre les travaux entrepris sur les Le Sueur. Nous cherchons actuellement de la gaze et les rentoilages ne pouvant recommencer à Montauban que lorsque nous en aurons terminé avec ceux de Sourches, il me paraît difficile d’en prévoir maintenant la date58. » Un an plus tard, la pénurie de toile persiste, au grand dam de Germain Bazin : « Sur les 1 554 m de toile que j’avais fait stocker au Louvre en prévision des travaux de rentoilage à exécuter après la guerre, il ne reste plus actuellement que 580 m. Plus de 1 000 m ont été distribués depuis deux ans à divers services notamment au musée de Versailles et aux copistes des monuments français ainsi qu’aux dépôts de Sourches et de Montauban59. » Les campagnes de restauration doivent donc s’adapter aux contingences matérielles.

  • 60 1967, p. 83. Ce que confirme Louis Hautecoeur dans la note qu’il adresse à M. Cortot, à la directio (...)
  • 61 AMN, R30, Montauban, Circulaire du 12 juillet.

22La place pour loger toutes les personnes qui accompagnent les œuvres et les restaurent est un problème récurrent, – L. Mazauric insiste sur ce point : « A Loc-Dieu comme à Chambord, comme plus tard à Montauban puis à Latreyne, nous avons été hantés par le problème de la vie quotidienne des personnes. Nous étions 250 à Loc-Dieu »60. René Huygue le confirme lorsqu’il écrit en juillet 1941 depuis Montauban61 qu’« étant donné la possibilité restreinte de logement, je préférerais que les restaurateurs viennent par équipe successive de deux, à moins que certains d’entre eux puissent loger selon leurs propres moyens ».

  • 62 On a ainsi la trace de relevés d’hygrométrie effectués à Montauban en 1941, qui indiquent un taux d (...)
  • 63 AMN, R30, Sourches.
  • 64 C2RMF, « Atelier de restauration, 2e semestre 1939-1945 », lettre du 3 novembre 1941.
  • 65 Ibid.

23Les lieux ne sont pas toujours adaptés à leur nouvelle fonction, malgré le soin apporté par les conservateurs62. Sourches s’avère humide, si bien que le 19 juin 1941, des « traces d’humidité constatées le 17 juin ont entraîné une inspection des tableaux : La Pêche miraculeuse de Jouvenet « sera sorti[e] et refixé[e] »63 ; en juillet et en août, le journal du dépôt signale une humidité parfois décroissante ou qui « continue au sous-sol ». En novembre 1941, Bazin recommande à Paulet et Michel de ne point se rendre à Sourches où « le séjour [...] est devenu pénible par suite du froid.64 » Et Pierre Michel s’inquiète de savoir si « nous pourrons être éclairés à l’électricité65 ».

  • 66 Difficultés soulignées dans le Livre Journal de La Pelice ou dans plusieurs courriers : AMN, R30, L (...)
  • 67 AMN, R30, La Pelice, Lettre de J. Jaujard au comte d’Aillières, 4 mars 1940, 2 p. dact ; AMN, R30, (...)
  • 68 AMN, R30, Montauban, carton 4, « Vie du dépôt, correspondance, devis divers », Lettre du 26 novembr (...)
  • 69 AMN, R30 : Moire, Lettre du 10 mai 1940 de M. Poli au directeur des Beaux-Arts ; Louvigny, Livre-jo (...)
  • 70 AMN, R30 : Chambord, carton 19, Vie du dépôt, note du 15 mai ; Louvigny, Livre- journal, 3 février (...)

24Des difficultés de cohabitation surgissent entre les propriétaires des lieux et les restaurateurs66. Ainsi, au château de la Pelice, Jaujard promet-il à M. d’Aillières qu’« aucun travail de rentoilage ne sera effectué dans [sa] propriété », alors qu’un atelier de rentoilage a été installé dans la salle à manger67. Le 26 novembre 1940, Müller indique68 que « l’expérience de la Pelice a été assez négative. Mon rentoileur Raymond est parti pendant 15 jours et n’a pu y rester, le rentoilage y étant impossible à cause du froid et de l’opposition des propriétaires du château à tout travail ». On comprend mieux alors les recherches effectuées pour installer l’atelier de rentoilage dans un autre lieu, notamment au château de Moire69. La création d’une « salle de rentoilage » a été également envisagée au château de Blois, mais cette idée, sans doute matériellement trop complexe à concrétiser, a été abandonnée70. Seuls, le château de Sourches et le collège Théodard et l’Institut Calvin de Montauban ont en réalité abrité ce type d’atelier.

  • 71 Ibid., lettres de P. Paulet du 21 mars 1941 et de P. Michel du 20 mars 1942 adressées à R. Huygue.
  • 72 AMN, R30, Montauban, carton 4, « Vie du dépôt, correspondance, devis divers », Lettre de R. Huyghe (...)

25Enfin, les restaurateurs doivent s’adapter à ces multiples déménagements, ce qui n’est pas sans les gêner ou les contraindre. Ainsi Pierre Michel en mars 1941 ou Pierre Paulet en mars 1942 expriment-ils leur incapacité momentanée à quitter Paris pour Sourches en raison d’engagements pris auprès des Monuments historiques71, alors que Raymond Lepage est retenu au château de Versailles, au printemps 1941, par une campagne de rentoilage72.

  • 73 C2RMF, Dossier P433, rapport de restauration rédigé par G. Bazin.
  • 74 Selon les termes d’Edmond Sidet, directeur des musées de France, dans un courrier adressé à J.-G. G (...)

26L’atelier de restauration des peintures du Louvre a donc travaillé ardemment durant ces années de conflit. Conservateurs et restaurateurs, animés d’une volonté inébranlable de remplir la mission qui leur était impartie avant la guerre, d’un optimisme et d’une énergie incontestables, pour une question de survie aussi peut-être, ont assuré, contre vents et marées, ces importantes campagnes de restauration et de conservation pour le département des Peintures du Louvre. On identifie en effet près de 150 restaurations fondamentales, dont une quinzaine de transpositions (La Pêche miraculeuse de Jouvenet a même subi deux transpositions, à Sourches, en 194273). Tous les acteurs de cette période troublée se sont adaptés aux contingences matérielles pour faire fonctionner l’atelier de restauration et ont veillé à garder un témoignage des interventions menées afin de préparer la réouverture du Louvre après la paix. Ils ont fait fi, du moins en partie, de la violence du contexte historique pour affirmer notamment ce principe cher à « l’École française de restauration » de l’allègement des vernis74.

  • 75 Notre patrimoine d’art après l’épreuve : un entretien avec J.-G. Goulinat. In France-Soir ( ?), 16 (...)
  • 76 Procès-verbal de la Commission.

27Dès novembre 1945, les restaurateurs retrouvent l’atelier au sein du palais ; Goulinat rend alors hommage au rôle mené pendant ces années sombres par les divers protagonistes de la restauration, René Huyghe et Germain Bazin, et « l’équipe des huit restaurateurs qui, menant une existence monacale, ont eu à cœur de rendre à nos chefs-d’œuvre une vie nouvelle. Puisque l’occasion m’en est offerte, je ne dirai assez avec quel dévouement mes confrères et amis se sont donnés de tout leur cœur à une tâche qui n’est pas un métier, mais un sacerdoce75. » Il faut attendre le 2 juin 1947 pour qu’une Commission de restauration se réunisse à nouveau, donnant l’occasion à Georges Salles, directeur des musées de France, de féliciter « les restaurateurs de leur travail. Grâce à eux, le Louvre montre un exemple de prudence qui fait exception avec les outrances dans le dévernissage trop souvent pratiqué à l’étranger »76.

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Bibliographie

Bazin, G., 1992, Souvenirs de l’exode du Louvre 1940-45, Somogy, Paris.

Cabillic, I., 2006, Jean-Gabriel Goulinat, chef de l’atelier de restauration des peintures des musées nationaux, 1935-1971, Paris IV-Sorbonne, mémoire de master 2 sous la dir. de B. Jobert.

Goulinat, A.-M., 1974, Jean-Gabriel Goulinat, sa vie, sa carrière, Carrefour des lettres, Paris.

Goulinat, J.-G., 1946, Le Musée du Louvre à travers la tourmente, Le Dessin, nouvelle série, 12e année, n° 1, p. 5-14.

Le Creff, S., 2001, Conservation et restauration des tableaux du Louvre de 1939 à 1946. I. Mesures de protection des tableaux, dans le contexte de la guerre et de l’Occupation, École du Louvre, Paris, mémoire de muséologie sous la dir. de N. Volle et C. Pincemaille.

Mazauric, L., 1967, Ma vie de châteaux, Librairie académique Perrin, Paris.

Paris, musée du Louvre, 2009, Le Louvre pendant la guerre : regards photographiques 1938-1947, Louvre Éditions, Paris.

Perignon, A. de, 2007, La Conservation et la restauration de la collection de peintures du musée du Louvre pendant la seconde guerre mondiale au dépôt de Montauban, École du Louvre, Paris, mémoire de muséologie sous la dir. de N. Volle et I. Cabillic.

Rayssac, M., 2007, L’Exode des musées. Histoire des œuvres sous l’Occupation, Paris, Payot.

Sido, M., 2001, Conservation et restauration des tableaux du Louvre de 1939 à 1946. II. Essais de synthèse des travaux effectués dans les dépôts de défense passive de La Pelice et de Sourches (Sarthe), École du Louvre, Paris, mémoire de muséologie sous la dir. de N. Volle et C. Pincemaille.

Valland, R., 1997, Le Front de l’art, défense des collections françaises : 1939-1945, RMN, Paris.

Sources

Paris, Archives des musées nationaux (AMN) : séries P16, R2, R30.

C2RMF, Versailles, Fonds d’archives de la restauration.

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Notes

1 Jacques Jaujard, directeur des musées nationaux, a imaginé dès 1938 un plan très détaillé et minutieux d’évacuation des œuvres. La série R5.1 1 des Archives des musées nationaux (AMN) témoigne de cette organisation. Cf. Le Creff, 2001, qui explicite les procédures d’évacuation.

2 Valland, 1997, p. 6.

3 P.V. conservé à la Documentation du C2RMF.

4 Bazin, 1992, p. 30.

5 AMN, R30, Louvigny : le Livre-journal de Louvigny laisse entendre, les 8 et 20 mars 1940, que P. Michel exerce à Chèreperrine, mais on n’a pas trouvé trace d’activité particulière de restauration dans ce château. Précisons que chaque dépôt se voit doté d’un journal de bord tenu par le responsable du dépôt ou les agents de surveillance afin de rendre compte de la vie quotidienne du lieu.

6 Différentes notes (aux AMN et au C2RMF) et les journaux de bord des dépôts, dans la série R30 aux AMN, nous renseignent sur leur présence.

7 AMN, R30, La Pelice, lettre de J. Jaujard datée du 25 mai 1940, adressée à G. Huisman, secrétaire général des Beaux-Arts.

8 Selon le témoignage de sa fille, Goulinat, 1974, p. 75.

9 AMN, R2 A4, Rapport à Monsieur le Directeur général des Beaux-arts sur les mesures récentes prescrites pour assurer la sécurité des collections des musées nationaux dans les dépôts d’évacuation, p. 5 d’un rapport dact. de 17 p. daté du 18 janvier 1940.

10 Bazin, 1992, p. 15-16.

11 C2RMF, « Atelier de restauration, 2e semestre 1939-1945 » [1940] : Liste des tableaux vus par Monsieur René Huyghe et désignés pour la restauration, 5 p. ; Dépôt de la Défense passive de la Pelice, Liste des tableaux à restaurer, 2 p. ; Tableaux à diriger sur La Pelice pour restauration ou rentoilage, 3 p. dact.

12 Le C2RMF et les AMN conservent le procès-verbal de cette commission.

13 Il faut attendre juin 1947 pour que le rythme des commissions retrouve une régularité.

14 En réalité, comme nous l’apprennent les fiches de santé (conservées au C2RMF) de ces quatre tableaux, seul le tableau de Castello sera traité à Montauban à l’automne 1942 ; les autres œuvres seront restaurées à l’issue de la guerre, dans l’atelier du Louvre.

15 Par le photographe Searl qui a son studio dans le VIIIe arrondissement de Paris.

16 Nous renvoyons vers le mémoire de M. Sido qui présente en détail les travaux de restauration exécutés à La Pelice et à Sourches, 2001, p. 22-49.

17 Germain Bazin est chargé le 18 mai par J. Jaujard de cette évacuation dont il rend compte dans un rapport détaillé au ministre de l’Éducation nationale : AMN, R30, Loc-Dieu, Journal de l’évacuation des dépôts de la Sarthe, juin 1940, 12 + 2 p. dact. et « Vie du dépôt, correspondance administrative », note de 4 p. dact.

18 AMN, R30, Sourches, carton n° 7, R 30 I 4, « Vie du dépôt », Courrier n° 52, 2 p. dact.

19 AMN, R30, Sourches, carton n° 6, R 30 I 4, « Vie du dépôt », Journal du dépôt ; Sido, 2001, p. 23-24.

20 AMN, R30, Journal du dépôt, 6 juin 1941.

21 AMN, R30, Loc-Dieu, Bazin, Journal de l’évacuation des dépôts de la Sarthe ; Sido, 2001, p. 25 et 38-46.

22 C2RMF, « Atelier de restauration, 2e semestre 1939-1945 », « Restauration 1942-1943 », 2 p. ms + 2 p. ms.

23 Dont celui de la transposition de ce tableau ou de Saint Bruno reçoit un message du pape de Le Sueur, conservés au C2RMF.

24 AMN, R30, Sourches, Journal de bord.

25 Ibid.

26 Goulinat, 1946, p. 8.

27 AMN, P16, 1937-1941, Lettre n° 52 de G. Bazin à J. Jaujard du 25 septembre 1940, 2 p. dact.

28 AMN, R30, Loc-Dieu, nombreux courriers et notes de G. Bazin, R. Huyghe, L. Hautecœur et rapport de J.-G. Goulinat ; Cabillic, 2006, p. 199-206.

29 Ibid., Lettre de 2 p. dact. ; Mazauric, 1967, p. 116 ; Goulinat, 1946, p. 8.

30 AMN, R2 B36, Lettre ms. de J.-G. Goulinat à J. Jaujard, pour lui proposer de transformer le musée Ingres en réserve et en atelier de restauration, 4 juin 1940, 2 p. et Première Note sur les locaux pouvant abriter des tableaux des musées nationaux, 6 p ; AMN, R2 A4, Résumé des notes adressées par J.G. Goulinat, (Réalville, Tarn-et-Garonne) à Mr le Directeur des Musées nationaux au sujet de huit châteaux ou domaines dans la région de Montauban, susceptibles d’abriter utilement les collections des peintures des musées , 6 p. ms ; AMN R30, Montauban, Carton 4, « Vie du dépôt, restauration », courriers évoquant les avantages du lieu, tant en termes de logement du personnel que de restauration.

31 AMN, R30, Loc-Dieu, G. Bazin, Journal de l’évacuation des dépôts de la Sarthe, juin 1940, p. 10.

32 Valland, 1997, p. 15.

33 Bazin, 1992, préface de R. Huyghe, p. 9.

34 AMN, R30, Montauban, Carton 4, « Vie du dépôt, restauration », 2 p. ms ; Ibid, Lettre de Goulinat à R. Huyghe, 6 p.

35 AMN, R30, Montauban, carton 2. Un inventaire précise que sa chambre abrite un Portrait de femme de Miervelt, Les Trois grâces de Pellegrini et Moïse changeant en serpent la Verge d’Aaron de Poussin.

36 AMN, R30, Montal, carton 3, Courrier du directeur des musées nationaux au secrétaire général des Beaux-Arts, 30 janvier 1943.

37 Accueilli le 6 par L. Hautecoeur et J. Jaujard.

38 AMN, R30, Montauban, carton 4, « Vie du dépôt : correspondance, devis divers ».

39 Goulinat, 1974, p. 76 ; Mazauric, 1967, p. 133.

40 C2RMF, « Atelier de restauration, 2e semestre 1939-1945 », Installation d’un atelier de rentoilage à Montauban 1940-1942, note ms. et liste dact., 1 p., 30 septembre 1940 ; Note ms. de Müller du 17 février 1941, 1 p. ms.

41 Goulinat, 1946, p. 9-10.

42 Pérignon, 2007, p. 33-39.

43 AMN, R30, Montauban, carton 4, « Vie du dépôt, correspondance, devis divers », Lettre de R. Huyghe à J. Jaujard, novembre 1941, 2 p. dact.

44 Ibid., Note de Jaujard à Huyghe, 19 septembre 1941, 1 p. dact.

45 Ibid., Lettre de J. Jaujard à R. Huyghe, 3 novembre 1941.

46 Ibid., carton 4, « Vie du dépôt, Protection », Examen des tableaux après les dégâts causés par la tornade du 31 Août 1942 par Monsieur Goulinat, chef de l’Atelier de restauration des peintures des musées nationaux, 9 p. dact. et Lettre du 24 septembre 1942, 2 p. dact.

47 Ibid., Note anonyme pour M. Huyghe, [1941], 1 p. dact.

48 Bazin, 1992, p. 65.

49 AMN, R30, Montauban, carton 4, « Vie du dépôt, Restauration », 2 p. dact. ; Goulinat, 1946, p. 12.

50 Bazin, 1992, p. 77 ; Valland, 1997, p. 18.

51 Malgré la volumineuse documentation que possèdent les AMN sur le dépôt de Montal notamment, puisque 10 cartons lui sont consacrés dans la série R 30.

52 C’est-à-dire Lucie Mazauric.

53 Sido, p. 25-26 et Cabillic, p. 180-182, 213-214 et 217-218.

54 AMN, P 16, 1937-1941, Lettre de Bazin à Jaujard, 2 p. dact.

55 AMN, R30, Montauban, carton 4, « Vie du dépôt, correspondance, devis divers », lettre de 2 p. ms. datée du 26 novembre 1940.

56 AMN, P16, 1937-1941, Lettre (107) de Bazin à Goulinat, 25 novembre 1941, 1 p. dact.

57 AMN, P16, 1942-1956, Note du 15 octobre 1942 de R. Huyghe à J. Jaujard, qui rend compte de la distribution du crédit de 450 000 F.

58 AMN R30, Montauban, carton 4, « Vie du dépôt, Restauration ». Bazin précise ultérieurement, lors de la commission de restauration du 18 février 1965 que la qualité des « farines trop blutées qui laissaient passer beaucoup de saletés » est sans doute également à l’origine des difficultés rencontrées lors des transpositions des tableaux de Le Sueur.

59 AMN, P16, 1942-1956, Lettre adressée à J. Jaujard, 3 septembre 1943, 1 p. dact.

60 1967, p. 83. Ce que confirme Louis Hautecoeur dans la note qu’il adresse à M. Cortot, à la direction générale des Beaux-Arts du ministère de l’Éducation nationale à Vichy. AMN, R30, Loc-Dieu, Note datée du 15 juillet 1940, 3 p. dact.

61 AMN, R30, Montauban, Circulaire du 12 juillet.

62 On a ainsi la trace de relevés d’hygrométrie effectués à Montauban en 1941, qui indiquent un taux d’humidité relative compris entre 70 et 75 %. AMN, R30, Montauban, carton 4.

63 AMN, R30, Sourches.

64 C2RMF, « Atelier de restauration, 2e semestre 1939-1945 », lettre du 3 novembre 1941.

65 Ibid.

66 Difficultés soulignées dans le Livre Journal de La Pelice ou dans plusieurs courriers : AMN, R30, La Pelice.

67 AMN, R30, La Pelice, Lettre de J. Jaujard au comte d’Aillières, 4 mars 1940, 2 p. dact ; AMN, R30, Louvigny, Livre- journal ; ce Livre-journal est antérieur à celui de la Pelice, qui débute le 1er mars 1940. Le château de Louvigny abrite une partie du département des Peintures, dont L’Indifférent de Watteau ou la Joconde, jusqu’en 1940.

68 AMN, R30, Montauban, carton 4, « Vie du dépôt, correspondance, devis divers », Lettre du 26 novembre 1940, 2 p. ms., adressée à G. Bazin.

69 AMN, R30 : Moire, Lettre du 10 mai 1940 de M. Poli au directeur des Beaux-Arts ; Louvigny, Livre-journal, 3 février 1940.

70 AMN, R30 : Chambord, carton 19, Vie du dépôt, note du 15 mai ; Louvigny, Livre- journal, 3 février 1940.

71 Ibid., lettres de P. Paulet du 21 mars 1941 et de P. Michel du 20 mars 1942 adressées à R. Huygue.

72 AMN, R30, Montauban, carton 4, « Vie du dépôt, correspondance, devis divers », Lettre de R. Huyghe à J. Jaujard, 13 mars 1941.

73 C2RMF, Dossier P433, rapport de restauration rédigé par G. Bazin.

74 Selon les termes d’Edmond Sidet, directeur des musées de France, dans un courrier adressé à J.-G. Goulinat en 1959. AMN O30 547, Lettre du 22 avril.

75 Notre patrimoine d’art après l’épreuve : un entretien avec J.-G. Goulinat. In France-Soir ( ?), 16 novembre 1945.

76 Procès-verbal de la Commission.

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Table des illustrations

Titre Fig. 1. La Bataille de San Romano est portée dans le château de La Pelice
Crédits © Musée Résistance et Déportation - ville de Montauban.
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Fichier image/jpeg, 180k
Titre Fig. 2. Jeanne Troude et Jean-Gabriel Goulinat entourés de l’équipe des restaurateurs devant le château de La Pelice, hiver 1939-1940
Crédits © Musée Résistance et Déportation - ville de Montauban.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/techne/docannexe/image/20570/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 212k
Titre Fig. 3. La Manipulation de L’Atelier de Courbet au château de Sourches, en présence de Germain Bazin
Crédits © Archives des musées nationaux.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/techne/docannexe/image/20570/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 412k
Titre Fig. 4. Examen des tableaux de La Vie de Saint Bruno de Le Sueur sur une terrasse du château de Sourches
Crédits © Archives des musées nationaux.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/techne/docannexe/image/20570/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 388k
Titre Fig. 5. Réserves de tableaux dans le musée Ingres à Montauban
Crédits © Archives des musées nationaux.
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Pour citer cet article

Référence papier

Isabelle Cabillic, « L’atelier de restauration de peintures du musée du Louvre pendant la Seconde Guerre mondiale »Technè, 33 | 2011, 53-60.

Référence électronique

Isabelle Cabillic, « L’atelier de restauration de peintures du musée du Louvre pendant la Seconde Guerre mondiale »Technè [En ligne], 33 | 2011, mis en ligne le 01 juin 2011, consulté le 12 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/techne/20570 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12hy3

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Auteur

Isabelle Cabillic

Ingénieur d’études, C2RMF (isabelle.cabillic[at]culture.gouv.fr).

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