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Recensions

Alexandra Ariotti, Qasr al-Buleida: a Late Roman-Byzantine Fortified Settlement on the Dead Sea Plain, Jordan

Laurent Tholbecq
p. 451-452
Référence(s) :

Alexandra Ariotti, Qasr al-Buleida: a Late Roman-Byzantine Fortified Settlement on the Dead Sea Plain, Jordan (BAR IS 2009), Archaeopress, Oxford, 2009, 29,6x 21cm, xvi + 185p., ill. cartes, ISBN: 978-1-4073 0585.

Texte intégral

1On saluera la publication par Alexandra Ariotti de travaux réalisés en 2002 et en 2004 à Qasr al-Buleida (Ghawr-Jordanie), modeste établissement situé sur la rive droite de la mer Morte, au débouché occidental du Wadi Kérak et occupé entre le ive et le vie s. Ce site à caractère militaire et agricole s’est épanoui en Provincia Arabia, face à la Palaestina Prima et à proximité de la frontière de la Palaestina Tertia. Situé dans l’aride plaine du Ghawr, il bénéficiait des ressources en eau du Wadi Kérak et constituait par ailleurs un point d’accès stratégique au plateau transjordanien. Il était constitué de plusieurs structures indépendantes réparties sur moins de 2 km2, comprenant trois fermes fortifiées (sites 45, 46 et 47), deux tours de guet (sites 47.1 et 47.2), deux aqueducs (sites 47.3 et 47.5), un barrage (site 47.4) et des terrasses agricoles (site 47.5). Ces vestiges d’apparence modeste se sont développés en amont d’un site qualifié de nabatéen sur la base céramique mais malheureusement non fouillé (47.6). Réalisée en marge du projet « Environment of the Dead Sea Plain » mené conjointement par La Trobe University et l’Arizona State University, l’étude recourt utilement à l’analyse des macro-restes végétaux (mais pas du tout à l’archéozoologie).

2A. Ariotti développe en dix chapitres une étude visant à établir la chronologie et la fonction de ce complexe rural, étudie les ressources et les produits agricoles du site, et tente de rapprocher ses résultats de ce que nous connaissons du Ghawr à l’époque byzantine. Répondant à un souci méthodologique, les données archéologiques sont présentées isolément pour chacun des sondages. Les vestiges architecturaux et la stratigraphie sont décrits, de même que les assemblages mobiliers de chacune des unités stratigraphiques (monnaies, céramique et datations C14). Si les quantités sont modestes — 12 monnaies pour l’ensemble du site, 1 331 tessons provenant de contextes stratifiés, dont seulement 175 considérés comme diagnostiques et 9 datations C14 — l’échantillonnage paraît a priori suffisant pour fonder une étude diachronique.

3Le site 45 est un bâtiment carré de 27 x 26 m associant une tour et une série de pièces distribuées autour d’une cour. Le site 46, de taille similaire, est constitué d’une cour dont deux côtés au moins sont bordés de pièces, accessible par une entrée flanquée de deux pièces (peut-être des tours ?) en avant-corps. Le site 47 associe de son côté une tour et une cour sur laquelle s’articulent trois pièces (les illustrations 5.1 à 5.15 relatives à ce site sont malheureusement erronées, et identiques aux figures 4.1 à 4.15 du chap. iv). Ces structures en dur, munies d’un étage en briques crues, associent ainsi des tours de surveillance à une cour distribuant des pièces d’habitat, des étables et des espaces de stockage. Ces trois sites se répartissent sur moins d’1 km2, en contrebas d’une pente, dans un espace alimenté par un aqueduc associé à une prise d’eau située sur le Wadi Kérak (47.3). En amont, le défilé du wadi est protégé par deux tours construites sur sa rive droite (47.1 et 2). Plus haut encore, un second aqueduc alimente des cultures en terrasses (47.5).

4A. Ariotti s’attarde ensuite sur la céramique, présentant les vingt types de pâtes identifiés sur le site et leurs parallèles régionaux, d’époques nabatéenne, romaine ou byzantine (p. 85-95). On regrettera peut-être que leur présentation soit chronologique et ne reflète pas le degré de représentativité des pâtes dont seulement une petite moitié des types est attestée de manière significative (voir le tableau 7.3, p. 89). Plus de 80 % de la céramique est datée d’une période allant du ive s. au début du viie s. Le reste du matériel est représenté par des productions de tradition nabatéenne, généralement associées aux ier s. et iie s. (voire au iiie s.) mais qu’A. Ariotti propose de descendre aux ive et ve s. Ceci appelle un petit commentaire. Les tableaux 7.1 et 7.2 (p. 89) prouvent la présence massive de cette production dans les assemblages (la céramique nabatéenne commune constitue jusqu’à 40 % de certains d’entre eux), ce qui semble indiquer que ce matériel ne peut être considéré comme résiduel. La datation des fermes fortifiées entre le ive et le vie s., sur la base des monnaies et des parallèles céramiques, paraît effectivement légitime, mais quelques nuances doivent être introduites. On ne peut, par exemple, pas exclure que la tour de guet 47.1 remonte effectivement à l’époque nabatéenne (elle est datée des « ier et iie s. », p. 69-70). Et il y a de bonnes raisons de penser que les pentes furent occupées avant l’époque byzantine (les vestiges de taille au pic sur l’aqueduc 47.5 peuvent en témoigner), parallèlement au site « nabatéen » 47.6 non fouillé. De fait, la continuité de la tradition céramique nabatéenne a été établie par ailleurs mais on ne peut toutefois pas totalement exclure la présence de céramique nabatéenne résiduelle dans des niveaux effectivement datés de l’époque byzantine. La proposition d’étalement chronologique de la production de tradition nabatéenne est donc légitime mais demande confirmation par la publication d’assemblages provenant d’autres sites et datés indépendamment. Cette analyse globale est suivie d’une présentation détaillée des assemblages diagnostiques, par site, pâte et forme (p. 95-133). Les parallèles renvoient aux deux rives de la mer Morte, suivant trois axes, la vallée du Jourdain et le Wadi Arabah (Pella, Aqaba), le plateau transjordanien et ses contreforts occidentaux (par exemple Pétra, Dhiban, Dharih, Gharandal), et la rive occidentale de la mer Morte (par exemple En-Geddi, En-Boqeq, Jérusalem).

5On aurait pu faire l’économie du chapitre suivant intitulé « Identifying the Ethnic and Cultural Status of the Qasr al-Buleida Settlement » qui renvoie aux cadres théoriques de la thèse telle qu’elle est pratiquée dans le monde anglo-saxon et dont la conclusion est une accumulation de poncifs, A. Ariotti ne pouvant que constater l’impossibilité de répondre à cette question sur la base de ses seules sources archéologiques (p. 141-150). Dans le dernier chapitre du livre, le site prend place dans une discussion élargie relative au caractère plurifonctionnel du limes romain (protection des points d’eau, sécurisation des axes, police, contrôle fiscal). Qasr al-Buleida apparaît dès lors n’être que l’un des maillons d’une chaîne constituée par de très nombreux sites similaires découverts en prospection par diverses équipes dans le Ghawr et sur les contreforts occidentaux du plateau (p. 153-154). On regrettera l’absence de cartographie précise de la région qui aurait permis de visualiser leur étonnante densité, ce dont témoigne en revanche la carte du réseau des routes transversales reliant le plateau à la mer Morte, entre le Wadi Mujib et le Wadi el-Hasa (fig. 10.5, p. 158). Étendant ses comparaisons aux autres sites byzantins fortifiés de la région possédant aqueducs et traces de mise en valeur des terres, A. Ariotti insiste enfin sur le caractère agricole de ce réseau de points d’appui militaires.

6A. Ariotti nous livre ainsi un ouvrage particulièrement fécond qui, sur la base de sondages modestes, restitue une image éclairante de la péninsule du Lisân et du Ghawr byzantins, non plus limitée aux informations textuelles et à quelques sites clefs, mais reflétant une occupation, à la fois dense et intégrée, d’un espace intensément sillonné par une foule bigarrée de militaires, de commerçants, de pasteurs et de pèlerins.

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Pour citer cet article

Référence papier

Laurent Tholbecq, « Alexandra Ariotti, Qasr al-Buleida: a Late Roman-Byzantine Fortified Settlement on the Dead Sea Plain, Jordan »Syria, 89 | 2012, 451-452.

Référence électronique

Laurent Tholbecq, « Alexandra Ariotti, Qasr al-Buleida: a Late Roman-Byzantine Fortified Settlement on the Dead Sea Plain, Jordan »Syria [En ligne], 89 | 2012, mis en ligne le 01 juillet 2016, consulté le 07 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/syria/1070 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/syria.1070

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