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Rassegna bibliografica
Ottocento a) dal 1800 al 1850

Le Vaudeville à la scène, V. Heyraud et A. Martinez (éds.)

Michel Arrous
p. 363-364
Référence(s) :

Le Vaudeville à la scène, textes réunis et présentés par Violaine Heyraud et Ariane Martinez, Grenoble, ELLUG, 2015, 225 pp.

Texte intégral

1Le succès du Système Ribadier en 2013 et d’Un Chapeau de paille d’Italie en 2015 prouve que le vaudeville a la cote et que rien ne lui résiste, sur scène, où il fait figure de superstar, aussi bien qu’à l’Université. À l’histoire de ses triomphes, de ses mutations et de ses auteurs déjà balisée, ce recueil apporte du nouveau. Dans leur introduction (pp. 7-15), Violaine Heyraud et Ariane Martinez rappellent que cette «forme-caméléon», jusqu’au décret de 1864 sur la liberté des théâtres, sut s’adapter aux contraintes politiques comme aux fluctuations du goût du public, en dépit de la concurrence de l’opérette ou du café-concert. Dans les années 1960 le répertoire vaudevillesque n’a cessé d’être réinventé à travers des interprétations privilégiant tantôt la satire, tantôt l’incongruité. La première partie regroupe un ensemble d’enquêtes où est examiné de façon diachronique le traitement scénique du vaudeville, de la fin du xviiie siècle aux années 2000.

2Après un rappel bienvenu de l’histoire du mot, Guy Spielmann retrace les grandes étapes du genre (Le vaudeville, de la chanson au théâtre (xive-xviiie siècles), pp. 19-28). Au xviiie siècle se transforme la pratique du vaudeville, à la suite de son adoption par la comédie foraine, avec le soutien actif du public. Les records de production sont atteints entre 1800 et 1830 (plus de 4700 vaudevilles ou assimilés). Pour connaître l’écriture caractéristique du vaudeville, il suffit d’entrer dans Les coulisses de la fabrique du vaudeville dans les années 1800-1820 (pp. 29-36), avec Roxane Martin, qui d’ailleurs affine cette statistique en comptabilisant pas moins de 4000 pièces dans les vingt premières années du xixe siècle, sur des scènes qui lui furent réservées, en priorité celles de son grand temple, le Vaudeville (démoli en 1869) et les Variétés (où triompha plus tard l’opérette). L’esthétique scénique dans ces théâtres était déterminée par un espace restreint qui contraignait auteurs et acteurs à un langage codifié. Au sommet, la triade Scribe-Feydeau-Labiche. Éminent connaisseur du premier, Jean-Claude Yon considère la production en série à un rythme intensif et synchronisé qui caractérise Scribe vaudevilliste pour le Gymnase (pp. 37-45), soit 170 pièces dont une bonne part du succès s’explique par la performance des acteurs. Olivier Bara en donne une convaincante illustration avec l’association Labiche-Geoffroy («Le rire sympathique» de Geoffroy, ou le bourgeois bien tempéré de Labiche, pp. 47-58). De 1844 à 1862, au Gymnase, Geoffroy interpréta Labiche dans des rôles de second plan; à partir de 1862, au Palais-Royal, il devint le comédien de Labiche, s’illustrant dans les rôles de Célimare, de Champbourcy (La Cagnotte) ou de Caboussat (La Grammaire). On regrettera qu’ait été oublié «l’admirable Bouffé» (Stendhal) qui s’illustra au Gymnase après 1830. Dans son étude des modalités du jeu vaudevillesque Anne Pellois («De la grâce dans de la joie»: de quelques caractéristiques du jeu des premiers interprètes de Feydeau, pp. 59-70) distingue les emplois et le jeu d’ensemble, en tenant compte de ses rapports avec l’acteur vedette: ainsi Armande Cassive, la «Réjane du vaudeville», est «l’idéale Môme Crevette». Le jeu vaudevillesque est défini par un «paradigme récurrent et assez peu attendu»: finesse, sincérité, naturel et naïveté. La première de ces qualités va de pair avec la vérité dans la relation au rôle, sans laquelle il n’y a pas de force comique. Les questions de l’interprétation ou de la finesse du jeu comique recoupent celles sur le droit de regard du dramaturge quant à la mise en scène. À la question Feydeau, metteur en scène? Alice Folco répond par l’affirmative (pp. 71-80). La «compétence de la scène» chez l’auteur de La Dame de chez Maxim ne fait aucun doute, comme le prouvent ses didascalies en tête de chaque acte et ses annotations marginales, particulièrement les indications de régie qui lui permettaient de régler la représentation. Pour autant, préoccupé essentiellement des mouvements des personnages et de la disposition du matériel scénique afin de respecter le réalisme standardisé du Boulevard, Feydeau n’est pas un metteur en scène selon l’acception du xxe siècle. Romain Piana donne un bel exemple d’adaptation scénique réussie par un émule de l’avant-garde européenne (Labiche au pays des soviets. “Les Trente Millions de Gladiator”, mis en scène par Léon Mousinac au théâtre juif de Moscou (1934), pp. 81-88). Cette mise en scène selon l’esthétique révolutionnaire et moderniste, pour ne pas dire selon les règles du matérialisme dialectique, cible la société française capitaliste des années 1920. En 1941, l’entrée de Feydeau au répertoire de la Comédie-Française avec Feu la mère de madame annonce discrètement une nouvelle ère pour le vaudeville. (Gaston Baty y avait mis en scène Un Chapeau de paille d’Italie en 1938). Ariane Martinez retrace les étapes qui ont permis au vaudeville de recevoir ses lettres de noblesse (Jean-Louis Barrault: transformer Feydeau en classique, pp. 89-96). Grâce à Occupe-toi d’Amélie, qui a subi quelques coupes et infléchissements, le directeur du théâtre Marigny s’offre en 1948 le luxe d’un «scandale à succès». Barrault reviendra à Feydeau en 1950, puis en 1961 à l’Odéon, avec la volonté de le légitimer sur les scènes du théâtre d’art, non sans l’édulcorer. Suivent cinq études de la mise en scène du vaudeville de 1960 aux années 2000. Séverine Ruset (La programmation des vaudevilles: théâtre public / théâtre privé, pp. 97-108) constate que l’exploitation du vaudeville, contrairement à une opinion répandue, n’est plus l’apanage du théâtre privé depuis une cinquantaine d’années. Entrepreneur de gaudrioles ou / et peintre de la société bourgeoise? Bouffonnerie ou / et satire? Armelle Talbot s’interroge, après Ph. Soupault, sur le possible sens caché de l’œuvre d’un Labiche contestataire ou onirique, avec notamment l’exemple de L’Affaire de la rue de Lourcine montée par Chéreau en 1966 (Gros sel et eau de cuivre: les mises en scène de Labiche depuis les années 1960, pp. 109-124). Christophe Triau revient sur cette œuvre, dans la traduction d’Elfriede Jelinek, à la Schaubühne de Berlin en 1988, selon une théâtralité du discontinu à l’opposé d’une longue tradition scénographique («Mettre toujours l’imbécilité en position secondaire, jamais au centre»: “L’Affaire de la rue de Lourcine” mise en scène par Klaus Michael Grüber (1988), pp. 125-133). Aurélie Coulon et Sidonie Han analysent dans les spectacles contemporains les choix de modernisation de l’espace du vaudeville (Scénographies de vaudevilles dans les années 2000, pp. 135-144), tandis que Violaine Heyraud, évacuant le dilemme «rire» ou «penser», examine les mises en scène décalées qui révèlent, dans une dimension farcesque, les fantasmes d’une société bien-pensante ou les désastres du couple (Mettre en scène Feydeau dans les années 2000, pp. 145-156).

3On trouvera dans la deuxième partie un florilège de témoignages d’acteurs et metteurs en scène, ainsi qu’un utile index des artistes et de leurs rôles. À signaler, la présence d’un cahier d’illustrations, de 1813 à 2010, et la section dédiée au vaudeville et aux formes théâtrales comiques dans la bibliographie qui clôt ce recueil où se croisent l’exploration génétique et la réflexion esthétique.

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Pour citer cet article

Référence papier

Michel Arrous, « Le Vaudeville à la scène, V. Heyraud et A. Martinez (éds.) »Studi Francesi, 182 (LXI | II) | 2017, 363-364.

Référence électronique

Michel Arrous, « Le Vaudeville à la scène, V. Heyraud et A. Martinez (éds.) »Studi Francesi [En ligne], 182 (LXI | II) | 2017, mis en ligne le 01 août 2017, consulté le 06 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/studifrancesi/9972 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/studifrancesi.9972

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