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Rassegna bibliografica
Letterature francofone

L’édition africaine et la fabrique de la littérature, dir. Jean-Michel Devésa

Emanuela Cacchioli
p. 730-731
Notizia bibliografica:

L’édition africaine et la fabrique de la littérature, dir. Jean-Michel Devésa, Limoges, Pulim, 2022, «L’un et l’autre en français», 190 pp. 

Testo integrale

1Les articles insérés dans ce volume sont le résultat des travaux présentés à l’occasion de la Journée d’études sur l’édition africaine et la fabrique de la littérature qui a eu lieu à Bordeaux en juin 2021. Dans son introduction, Jean-Michel Devésa constate que la critique littéraire concernant la littérature africaine se focalise souvent sur les thèmes abordés, sur le côté poétique et esthétique, alors qu’elle se penche rarement sur la portée idéologique des ouvrages. En outre, les considérations ont tendance à oublier l’impact des conditions sociologiques et économiques sur le processus de la production littéraire. Par conséquent, la réflexion critique ne progresse pas trop car elle se limite à aborder les textes comme une variation par rapport au champ littéraire français. Ce volume se propose donc de formuler des considérations à partir d’une triangulation qui a comme pôles l’Afrique, l’Europe et l’Amérique, tout en considérant l’apport de l’Asie et du Moyen-Orient, de l’Antiquité aux temps modernes. En définitive, il ne faut pas limiter la question de l’édition africaine à ses modalités de sélection, d’impression et de diffusion. En outre, l’activité critique ne peut pas se réduire à une analyse des critères commerciaux et médiatiques, mais elle doit privilégier l’écriture et ses exigences. Devésa conclut son article sur les trois éléments qui accompagnent ses travaux, c’est-à-dire le choix de la langue française et de son adaptabilité à la culture de la périphérie, la posture de l’écrivain dans les espaces littéraires médians et la tentative de fuir la subordination de l’ouvrage du centre. Toujours en guise d’introduction, l’article de Guy Lenoir revient sur le parcours qui a permis l’organisation du colloque dont les origines remontent aux liens d’amitié et de partage qui se sont développés à partir des années soixante-dix. La section d’ouverture est complétée par le poème Grande Afrique de Nirina Ralantoaritsimba. Il s’agit d’une production en vers qui retrace les thématiques concernant le plurilinguisme et la stratification culturelle caractérisant l’expression culturelle des créations conçues dans le contexte africain.

2Le volume se compose de quatre sections. La première partie, dont le titre est «Balises, repères et perspectives», réunit trois contributions. Céline Gahungu se concentre sur les productions théâtrales radiophoniques diffusées à l’occasion du Concours Théâtral interafricain qui a eu lieu entre 1967 et 1991. D’un côté, cette manifestation culturelle révèle une attitude encore coloniale, de l’autre côté, elle représente une démocratisation de la littérature, vu qu’elle permet aux auditeurs d’accéder à ces performances. Bien que radiophonique, le concours a un rapport avec l’édition parce qu’il s’agit d’une compétition qui permet aux jeunes talents de se faire connaître grâce à un médium considéré comme un support littéraire à part entière. L’article de Kathleen Gyssels porte sur les ouvrages de l’écrivain malien Yambo Ouologuem et sa relation avouée et cachée avec les textes d’André Schwarz-Bart. Si Devoir de violence est connu pour les accusations de plagiat, Les Mille et une Bibles du sexe, publié sous pseudonyme, considéré comme un texte marginal pour son érotisme obscène et pervers, est un autre exemple d’intertextualité. Dans une deuxième partie, Gyssels se focalise sur L’Étoile du matin, volume posthume où Schwarz-Bart fait preuve d’être un «réécrivain», c’est-à-dire qu’il reprend des motifs et des épisodes de ses romans précédents. Le troisième volet de l’article se penche sur la lettre K présente dans les ouvrages d’Ouologuem et de Schwarz-Bart: «Les deux “insoumis” dérogent aux attentes traditionnelles qu’une audience “traditionnelle”, respectivement juive et africaine, pourrait nourrir. Déjouant les stéréotypes “orthodoxes”, ils osent de surcroît les plus insensés fantasmes comme stratégie subversive contestant toute programmation d’une œuvre de fiction en fonction des appartenances ethniques et religieuses» (p. 38). La contribution de Boubacar Boris Diop se veut une réflexion sur la littérature sénégalaise: cette dernière voit le jour en langue française car les intellectuels résident en France et veulent témoigner la volonté de gagner le conflit contre le colonisateur, tout en introduisant dans son langage une autre vision du monde. Aujourd’hui la situation a changé: nous constatons une différence entre les écrivains qui publient leurs ouvrages en France, qui ont une renommée internationale, mais qui sont parfois peu connus au Sénégal, et les auteurs qui restent en Afrique et qui ont du mal à se faire connaître et éditer. En même temps, une littérature en langue nationale est en train de se développer, ainsi que des textes en langue wolophone en caractères arabes qui sont en train d’être translitérés afin de les rendre accessibles à un public plus vaste.

3La deuxième section du volume est consacrée à l’édition et à l’impression. Sylvain Mbondobari se focalise sur les pratiques éditoriales au Gabon. Le critique relève une tendance courante: après avoir édité quelques volumes, plusieurs écrivains choisissent de devenir éditeurs. Ces intellectuels franchissent la barrière car souvent il n’existe pas une stratégie politique nationale pour faire émerger un marché international en mesure de rivaliser avec les maisons d’éditions européennes. Les auteurs ont donc trouvé un moyen pour faire exister leurs ouvrages. L’article se penche sur les débats concernant la littérature gabonaise et les trajectoires suivies par les écrivains, en proposant quatre itinéraires distincts et les solutions adoptées. Kangni Alem raconte une expérience éditoriale au Togo qui a comporté des dangers, mais aussi des succès. L’article retrace la position des éditions Continents dans le contexte éditorial africain et notamment de la collection «Filbleu», qui se veut interdisciplinaire et qui accueille des nouvelles, des romans, des essais sur le théâtre, les arts plastiques et visuels et sur les débats contemporains. La contribution de Sami Tchak revient sur la question de l’auteur-éditeur et les conditions de travail. Publier sans un éditeur signifie ne pas bénéficier d’une relecture attentive et subjective du manuscrit. Cependant, l’intellectuel invite les jeunes chercheurs africains à s’intéresser aux écrivains inconnus en Europe, afin de saisir une portée littéraire qui existe grâce à ces auteurs. Cela constituerait une bonne occasion pour ouvrir la critique à de nouvelles pistes de réflexion qui s’éloignent des théories occidentales.

4«De nouveaux défis à relever?» est le titre de la troisième section. Frédérique Toudoire-Surlapierre s’interroge sur le type de littérature publiée en Afrique et les genres choisis par les maisons d’éditions. Elle identifie trois défis majeurs: le succès, la jeunesse et le passage au livre numérique qui a été accéléré par la crise sanitaire. La critique aborde ces trois pôles à partir aussi de l’autonomie des maisons d’éditions et des synergies impliquées dans les processus. La contribution se termine sur trois nouveaux défis qu’il faudra considérer pour les années à venir, c’est-à-dire l’impact du livre sur l’écologie, la présence des femmes dans le domaine de l’édition et la liberté d’éditer. L’article de Ferdulis Odome Angone se propose de vérifier l’état des lieux de l’industrie du livre en Afrique subsaharienne et notamment de répondre à la question suivante: où trouve-t-on des livres de littérature africaine en Afrique francophone? Après avoir analysé le cas de son essai Femmes noires francophones, elle parvient à une réponse qui se résume avec l’expression: «nulle part». À travers son expérience, elle démontre que le manque d’organisation logistique, politique et culturelle ne permet pas la diffusion de l’édition africaine. Flora Agnès Nda Zoa Meiltz offre au lecteur un autre parcours personnel et une ultérieure démarche à suivre. Après avoir fondé en 2005 l’association littéraire qui décerne le prix «Les Afriques», l’intellectuelle achète les droits des volumes primés afin de les rendre accessibles aux lycées et aux écoles de plusieurs pays africains. Comme les institutions éducatives réclament aussi des textes classiques, l'association se donne pour mission de repérer les droits des textes les plus célèbres et agrandit son entreprise pour éditer finalement ces volumes en Afrique.

5La dernière section du volume est consacrée au cas particulier de l’Algérie. Christiane Chaulet Achour retrace tout d’abord un aperçu historique de l’histoire de l’édition à partir des années de monopole d’état et l’impact de l’institution de la Société nationale d’édition et de diffusion (SNED). Puis, au fur et à mesure, des maisons d’édition spécialisées naissent et on remarque une diversité de textes publiés. En même temps, plusieurs écrivains choisissent des industries étrangères pour lancer leurs ouvrages. Le processus change progressivement à partir de la fin des années quatre-vingt et connaît une véritable explosion au début du nouveau millénaire. La création de prix littéraires et de revues spécialisées, ainsi que les émissions télévisées et radiophoniques, ont donné une impulsion encore plus forte à la «fabrique de la littérature». Cependant il est certainement nécessaire d’améliorer ces processus afin de passer de l’amateurisme au professionnalisme. L’article de Tristan Leperlier suggère de considérer la littérature comme un phénomène transnational car c’est à ce niveau que les littératures périphériques existent et que les études sur l’édition peuvent se renouveler. À partir de ce constat, le critique aborde la littérature algérienne des années quatre-vingt-dix qui comporte deux pôles: les publications en Algérie et celles en France par les Algériens. Cet espace éditorial transnational n’empêche pas la structuration du champ littéraire. En effet, on constate l’existence d’une littérature algérienne unifiée malgré son éparpillement géographique et linguistique. Toutefois, il existe une dissymétrie entre la littérature en langue française et arabe et il est possible de détecter plusieurs préjugés qui affectent les ouvrages publiés, en France tout comme en Algérie, que l’auteur déconstruit à l’aide d’exemples concrets. Dans la dernière contribution, Rebecca Grenouilleau-Loescher offre au lecteur le cas particulier de la publication d’Au commencement était la mer de Maïssa Bey. L’écrivaine algérienne a d’abord publié son roman dans une revue en 1996. Le texte est presque passé sous silence, mais l’auteure a pu se faire connaître du grand public grâce à ce passage éditorial. Ensuite, une première version en volume a été publiée en 2001, mais c’est finalement l’édition de 2003 chez L’Aube qui est devenue la référence des rééditions successives.

6L’ouvrage dirigé par Jean-Michel Devésa développe une réflexion concernant les processus de publication et les démarches qui soutiennent la «fabrique» de la littérature africaine en français. L’hétérogénéité des approches et des perspectives adoptées démontrent que cette thématique est encore peu explorée bien qu’il soit déjà possible de détecter des pistes de réflexions et des tendances communes qui méritent d’être approfondies.

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Notizia bibliografica

Emanuela Cacchioli, «L’édition africaine et la fabrique de la littérature, dir. Jean-Michel Devésa»Studi Francesi, 201 (LXVII | III) | 2023, 730-731.

Notizia bibliografica digitale

Emanuela Cacchioli, «L’édition africaine et la fabrique de la littérature, dir. Jean-Michel Devésa»Studi Francesi [Online], 201 (LXVII | III) | 2023, online dal 01 mars 2024, consultato il 08 février 2025. URL: http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/studifrancesi/56059; DOI: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/studifrancesi.56059

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Emanuela Cacchioli

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