Navigazione – Mappa del sito

HomeNumeri193 (LXV | I)Rassegna bibliograficaOttocento a) dal 1800 al 1850George Sand, Œuvres complètes

Rassegna bibliografica
Ottocento a) dal 1800 al 1850

George Sand, Œuvres complètes

Valentina Ponzetto
p. 228-229
Notizia bibliografica:

George Sand, Œuvres complètes, dir. B. Didier, 1872, Francia, édition critique par A. Camenisch, Paris, Honoré Champion, 2018, 226 pp.

Testo integrale

1Rédigé entre le19 janvier et le 4 avril 1871, soit entre le siège de Paris après la capitulation de Napoléon III et les premiers soulèvements de la Commune, publié en trois feuilletons (les 1er mai, 15 mai et 1er juin) la même année dans la “Revue des Deux Mondes”, puis en volume dans la série des Œuvres complètes chez Michel Lévy l’année suivante, Francia est un bref roman historique ou une «nouvelle», selon une définition de Sand dans une lettre à l’éditeur. Il raconte l’histoire de l’héroïne éponyme, une jeune grisette parisienne, sur fond de l’occupation de Paris par les troupes alliées au mois d’avril 1814, suivi d’un court épilogue situé l’année suivante, lors des Cent Jours. Ayant reconnu dans un bel officier qui la bouscule lors de l’entrée triomphale des troupes Russes dans Paris l’homme qui lui avait sauvé la vie deux ans auparavant lors de la désastreuse retraite de Russie de la Grande Armée, Francia entre en contact avec lui espérant qu’il pourra l’aider à trouver sa mère disparue, finit par s’éprendre sincèrement de lui et par devenir sa maîtresse, puis le tue dans un accès de folie. Inconsciente de son crime, elle vit encore une année, avant de s’éteindre, emportée par la phtisie, au moment même où Napoléon rentre à Paris le 21 mars 1815.

2Le prénom fortement symbolique de l’héroïne et le cadre temporel de la diégèse et de la composition suffiraient pour mettre en évidence les enjeux principaux de l’œuvre: un roman historique qui est en réalité surtout un roman patriotique aux fortes résonances sociales et morales ancrées dans l’actualité de son contexte de rédaction. C’est à ce sujet qu’Annie Camenisch consacre la première partie de son introduction, évoquant les nombreux points de contact que le lecteur est appelé à tracer entre les deux époques, reflet d’une «transposition volontairement transparente de l’histoire contemporaine: la chute d’un empire, une défaite, l’invasion par des troupes étrangères» (p. 11). La porosité des deux époques, parfois brouillées par l’intervention du narrateur, font ainsi du roman une sorte de palimpseste, un «miroir déformant d’un présent incertain» (p. 16). Exutoire des angoisses présentes de la romancière, selon une thèse de David Powell reprise par Annie Camenish, Francia se révèle aussi un roman patriotique à travers la glorification de l’héroïsme des parisiens résistant face à l’ennemi, à travers la ridiculisation de ce dernier et à travers le destin des deux protagonistes: Francia, déchirée par les remords puis par la folie dans son dilemme insoluble entre amour et patrie, et le petit Théodore, transformé et comme transfiguré de gamin flâneur et querelleur en jeune héros positif et témoin de la viabilité d’un esprit républicain par l’éveil de son orgueil patriotique.

3La deuxième partie de l’introduction est ainsi consacrée aux personnages principaux, ou plutôt à la manière dont ils incarnent des figures typiques de la tradition romanesque du xixe siècle, entre continuités et subtiles différences. Francia est une grisette, personnage typiquement parisien, que Sand considère une «proletairesse» (lettre à H. Harrisse, [8 novembre 1872]) par son statut socio-économique incertain et une «fille déchue» par sa liaison avec le prince Mourzakine. Si Annie Camenish considère qu’à travers elle Sand «déconstruit le stéréotype de la grisette et garde une distance ironique avec ce modèle» (p. 25), on regrette vivement que modèle et incarnation sandienne n’aient pas été mis en contraste de manière plus approfondie et dialectique. Il est en effet dommage que le stéréotype littéraire qui s’est solidement construit au cours du xixe siècle ne soit présenté qu’à travers les exemples de Paul de Kock et Champfleury, reléguant Musset avec sa Mimi Pinson dans une note et Balzac, Murger, Sue et une riche moisson de physiologies, sans compter les essais critiques modernes, aux oubliettes. D’ailleurs, si anachronisme il y a bien certainement dans le télescopage évoqué entre premier et second Empire, il est mal avisé d’en fonder le diagnostic sur l’expression «figure chiffonnée», déjà bien connue et employée des romanciers de la fin du xviiie siècle comme Louvet de Couvret, Rétif de la Bretonne ou Sade (éventuellement dans sa variante «minois chiffonné») précisément pour désigner une beauté plus piquante que classique et appartenant aux filles de basse extraction sociale. On se demande enfin pourquoi l’A. ne compare Francia qu’à sa consœur Marguerite dans Césarine Dietrich sans prendre en compte les autres figures de grisettes sandiennes, Geneviève dans André et Marthe dans Horace, renvoyant sans plus de commentaire à l’étude de Simone Vercoutre (“Les Amis de George Sand” 12, 1991).

4Décidément plus réussie est l’analyse de Théodore, le frère cadet de Francia, avatar du gamin de Paris, qu’Annie Camenish compare à l’incontournable Gavroche hugolien et au sujet duquel elle partage l’admiration inconditionnelle de Flaubert saluant le premier «gamin de Paris vrai […] ni trop généreux, ni trop crapule, ni trop vaudevilliste» (p. 216). La critique montre également la manière dont Sand s’écarte du stéréotype grâce à l’évolution du personnage, qui propose finalement «un modèle viable intégré à l’ordre bourgeois, par l’éveil d’une conscience morale et d’un esprit civique, qui passe de l’individualisme à l’unité sociale» (p. 29).

5Quant au prince russe Mourzakine, il incarne à la fois une caricature de Russe barbare et vainqueur et une plus subtile personnification de l’étranger, servant à faire ressortir par contraste, dans le contexte identitaire et patriotique évoqué, les vertus et les valeurs des Français et en particulier des Parisiens.

6La troisième et dernière partie de l’introduction est consacrée à la structure narrative du roman, dont l’A. souligne le caractère atypique au sein de la production sandienne. Il s’agit en effet d’une narration hétérodiégétique, distanciée et légèrement ironique, permettant des focalisations éclatées sur les événements et les personnages de l’histoire, et des incursions du narrateur venant apporter des jugements de valeur et une perspective historique. Enfin, le court épilogue du roman propose un dénouement à la fois multiple et ambigu. Multiple, car avec peu de traits il fournit une clôture aux différents filons présents dans le texte: roman patriotique, par la mort du prince russe, roman social par l’aperçu sur le devenir des différents personnages, roman moral, par les conclusions tirées par les voix narratives. Ici s’installe l’ambigüité. Car à côté du narrateur extradiégétique, qui semble d’ailleurs se confondre in fine avec la voix de l’auteur, c’est le docteur Faure, personnage secondaire, qui devient narrateur à son tour, posant la question du libre arbitre et racontant à ses amis, comme en bouclant une boucle, «l’histoire de Francia» (p. 145). L’ambiguïté aurait d’ailleurs été encore plus marquée et rare chez Sand si l’éditeur n’avait pas censuré pour cause d’amoralité les commentaires des grisettes sur la mort de l’héroïne, restitués au style direct, dans une audacieuse polyphonie qui aurait sans doute mérité plus ample commentaire: «Elle est morte pour avoir voulu travailler. Voilà ce que c’est que le travail! Autant mourir après avoir vécu!» (Annexe 2, inédit 5, p. 145)

7Le volume est complété par trois annexes: des extraits des sources historiques de Sand, 5 variantes inédites fort significatives, qui n’avaient pas été rayées du manuscrit ni des épreuves corrigées par Christine Buloz, mais qui ont été coupées en vue de la publication, et le retour très élogieux de Flaubert dans sa lettre à George Sand du 26 novembre 1872, saluant un livre «très spirituel et très juste».

Torna su

Per citare questo articolo

Notizia bibliografica

Valentina Ponzetto, «George Sand, Œuvres complètes»Studi Francesi, 193 (LXV | I) | 2021, 228-229.

Notizia bibliografica digitale

Valentina Ponzetto, «George Sand, Œuvres complètes»Studi Francesi [Online], 193 (LXV | I) | 2021, online dal 01 juillet 2021, consultato il 14 janvier 2025. URL: http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/studifrancesi/44044; DOI: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/studifrancesi.44044

Torna su

Diritti d'autore

CC-BY-NC-ND-4.0

Solamente il testo è utilizzabile con licenza CC BY-NC-ND 4.0. Salvo diversa indicazione, per tutti agli altri elementi (illustrazioni, allegati importati) la copia non è autorizzata ("Tutti i diritti riservati").

Torna su
Cerca su OpenEdition Search

Sarai reindirizzato su OpenEdition Search