1A.L. propose une histoire médiévale de la métaphore selon laquelle Dieu est une sphère infinie «dont le centre est partout, la circonférence nulle part», à partir d’Alain de Lille, le premier auteur français à exprimer la formule, dans le troisième quart du xii^e siècle; celle-ci sera souvent reprise, entre autres par Jean de Meung, cette fois dans un roman courtois et surtout en langue vulgaire. Le corpus retenu ici se prolonge jusqu’au début du xiv^e siècle, en couvrant divers domaines: théologie (Sermon sur la sphère intelligible et Règles de théologie d’Alain de Lille), littérature (Roman de la Rose), encyclopédie (Speculum maius de Vincent de Beauvais et ses traductions et abrégés français).

2La réflexion s’articule en trois moments. Une première partie, «Allégories, métaphores, mythe», interroge le rapport entre le caractère poétique d’une œuvre donnée et la présence de la métaphore de la sphère; la conclusion en est que le langage poétique marque tant les traités théologiques qu’encyclopédiques, ainsi que la partie du Roman de la Rose due à Jean de Meung; celui-ci s’en distingue néanmoins dans la mesure où il propose le dépassement de la philosophie antique par la religion. La seconde partie, «Inventaire des genres autour de la sphère», met l’accent sur la question de la différence générique entre les textes du corpus: il en émerge une certaine proximité entre l’encyclopédie de Vincent de Beauvais et le roman de Jean de Meung, malgré l’effort commun à tous les auteurs concernés pour exprimer la totalité du savoir. La dernière section, «Quelle idée de Dieu?», porte en revanche sur la question théologique au cœur de la métaphore et sur le concept de l’«infinité» de Dieu en rapport avec la conception médiévale de la nature.

3En annexe, un court extrait de l’Abrégé lorrain du Speculum historiale de Vincent de Beauvais (Paris, BnF, fr. 9558, f. 54v); ample bibliographie aux pp. 155-166.