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Dossier thématique

Pour des corpus transfictionnels à l'école : en quoi un récit multimédiatique peut-il servir l’enseignement ?

For transfictional corpora at school: how can a multimedia fiction serve teaching?
Sonia Castagnet-Caignec

Résumés

Les fictions contemporaines empruntent souvent la voie de l’intermédialité et offrent au lecteur-spectateur des parcours circulaires entre films, livres, BD et albums, dupliquant mais aussi démultipliant, l’univers fictionnel source. Ces fictions transfuges suscitent un plaisir certain chez les enfants et elles intéressent auteurs et éditeurs. Mais c’est davantage du point de vue didactique qu’elles seront ici interrogées.

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Texte intégral

1Si la littérature de jeunesse semble désormais bien installée dans l’institution scolaire, il n’en reste pas moins qu’une partie de sa production demeure invisible dans les pratiques de classe. En effet, les programmes officiels et les diverses listes de recommandation d’ouvrages forgent progressivement des classiques de la littérature de jeunesse contemporaine vers lesquels se tournent les enseignants. Ces derniers sont doublement motivés par le sentiment d’une prescription tacite et par l’effet de réputation de certains livres, devenus des titres emblématiques à l’école au cours des deux dernières décennies, selon un processus de classicisation relativement spécifique à ces œuvres très récentes. On songe par exemple aux albums d’Anthony Browne, à ceux d’Yvan Pommaux, de Pef, de François Place, de Philippe Corentin – et d’autres encore qu’on ne saurait tous citer –, qui figurent communément au premier rang des choix des enseignants. Pourtant, aussi riches et incontournables soient-ils, ces ouvrages, signés par des auteurs notoires, s’avèrent souvent éloignés des habitudes culturelles extrascolaires des élèves. Ils ne recouvrent pas forcément non plus la multiplicité des formes de création transmédiatique de l’édition jeunesse actuelle.

2Nous nous proposons ainsi d’envisager en quoi des œuvres dont la légitimité culturelle n’est pas reconnue par l’école peuvent trouver leur place dans l’espace scolaire et, au-delà, servir les objectifs d’enseignement dévolus à la didactique de la littérature.

Bref panorama de l’offre culturelle que les élèves fréquentent en dehors de la classe

  • 1 Richard Saint-Gelais, Fictions transfuges. La transfictionnalité et ses enjeux, Paris, Seuil, 2011.

3La création culturelle contemporaine est marquée par le métissage et les relations intermédiatiques ainsi que l’a analysé Richard Saint-Gelais en proposant le concept de fictions transfuges1. Les ouvrages de littérature de jeunesse que fréquentent les élèves correspondent bien à la définition de la transfictionnalité : le partage d’éléments fictifs entre deux ou plusieurs narrations qu’elles soient écrites, filmiques, bédéiques ou encore sérielles. Les fictions transfuges s’épanouissent dans le contexte médiatique en un essaimage aux ramifications multiples qui va jusqu’à l’appropriation de l’univers fictif par les fans au travers des réécritures amateures de fanfictions.

4La guerre des étoiles ou Star Trek constituent de bons exemples du déploiement multimédiatique des fictions transfuges : le cycle initial audio-visuel, en série télévisée ou en films, qui remonte aux années soixante pour Star Trek et à la fin des années soixante-dix pour Star Wars, a d’abord été adapté en récits écrits autrement appelés novélisations. Puis les univers fictifs ont été exploités en développant leur matière narrative, soit sous forme de continuation ou de prequel, pour donner lieu à de nouveaux épisodes cinématographiques et également à de nouvelles séries télévisuelles dérivées, dont des séries animées. Les dernières déclinaisons des deux univers respectifs de Star Wars et Star Trek, devenus des franchises et des marques, sont elles-mêmes prolongées par des livres, parfois édités dans plusieurs collections différentes pour un même titre, des jeux vidéo, des bandes dessinées. L’histoire est bien plus complexe et intriquée que ce court résumé mais il illustre la manière dont le spectateur-lecteur contemporain est invité à circuler à travers les œuvres et les espaces médiatiques et comment l’imaginaire autour d’un univers fictif se construit et se démultiplie dans un réseau aux frontières abolies entre culture écrite/culture cinématographique et télévisuelle et culture numérique.

  • 2 L’univers de Star Wars est emblématique pour illustrer le phénomène de circulation et de porosité e (...)

5Les deux exemples de transfictionnalité cités ci-dessus n’ont pas été choisis au hasard par rapport à la culture juvénile. En effet, l'édition jeunesse, elle aussi, regorge de fictions transfuges via les novélisations, notamment en série, à partir d’univers fictionnels issus du cinéma ou de la télévision, qui sont autant d'objets culturels fréquentés par les enfants en dehors de la sphère scolaire. Star Wars fait ainsi partie des grands succès auprès des jeunes – et moins jeunes – générations2. On observe ainsi que depuis le début des années 2000, les éditeurs jeunesse proposent un nombre pléthorique d’adaptations de séries animées ou télévisuelles à succès (Grand galop, Le Ranch, Foot 2 Rue, Totally Spies, Violetta, Miraculous, etc. et bien évidemment Star Wars). Les célèbres collections Bibliothèque rose et Bibliothèque verte chez Hachette se sont même en quelque sorte spécialisées dans le domaine : elles peuvent tirer jusqu’à 120 000 exemplaires par titre pour certaines des séries mentionnées à l’instant, et écoulent leur stock en librairies mais aussi et surtout en supermarchés, sur des dizaines de licences.

  • 3 Cinq millions de novélisations auraient été vendues pour la seule année 2006, grâce à la politique (...)
  • 4 Enquête IPSOS/Centre National du Livre de 2016, Les jeunes et la lecture, sur un panel représentati (...)

6Si on croise les chiffres de vente des maisons d’édition3 avec les résultats des enquêtes menées auprès des jeunes au sujet de leurs loisirs culturels et de leurs lectures privées4, on peut donc avancer que les élèves connaissent bien les séries audiovisuelles et consomment aisément la littérature qui en est issue. Ainsi, en 2016, malgré l’indétrônable Harry Potter cité en tête des huit livres préférés des 7-11 ans, se dégagent d’autres titres tels que Violetta, Pokémon, La Reine des neiges, soit des « romans du film » ou « des romans de la série » ainsi que l’indique souvent le sous-titre de ces ouvrages. Titeuf est aussi mentionné : certes, il s’agit originellement d’une série de bandes dessinées mais les BD ont été adaptées en une série animée à partir de 2001, puis en un film en 2011, que l’on retrouve également en courts romans novélisés dans la Bibliothèque rose depuis 2000.

Place de la transfictionnalité dans les classes : une tension entre la culture scolaire et les pratiques privées des élèves

7La culture scolaire hésite pourtant à proposer aux élèves des ouvrages de ce type. En effet, la bande dessinée, bien qu’élevée au rang de 9e art, les ouvrages en série, les « romans des films » ou des épisodes de séries, et plus globalement les produits issus de la culture de masse ne sont guère admis au sein des classes en tant qu’objets d’enseignement. Les fictions transfuges et intermédiatiques de la culture populaire jouent en effet de l’adaptation, de la réécriture et de la dérivation, dérogeant à l’idée de l’unicité et de la complétude de l’œuvre originale, ou devrait-on dire, ici, originelle, et à la représentation persistante de son primat.

  • 5 Est-il nécessaire de rappeler ici les cinq catégories transtextuelles conceptualisées par Gérard Ge (...)

8Pourtant, les travaux de Genette sur la transtextualité, et en particulier ceux concernant l’hypertextualité5, ont bien mis en évidence les relations entre hypotexte et hypertexte et les modes de transformation et d’imitation entre œuvre-source et œuvre dérivée. En vertu de ces principes ancrés dans les processus créatifs littéraires, on accepte dans les classes – voire on recherche – des réécritures, y compris à visée ludique, ou des versions abrégées et adaptées des textes patrimoniaux. Pour l’école primaire, cela se concrétise par un nombre important de parodies de contes, proposées aux élèves dès la fin de la maternelle et très fréquemment étudiées en élémentaire, mais ces réécritures–adaptations modernes sont légitimées car elles ne proviennent pas d’une industrie commerciale de masse du livre ou du film. Aussi, au moment où l’enseignant choisit les œuvres-support pour sa classe, une exploration-actualisation de mythes comme celle de Percy Jakson, titre indiqué par les enfants lors de l’enquête du CNL citée ci-devant, souffrira mal la concurrence avec d’autres réécritures telles, par exemple, qu’Un monde de cochons de Mario Ramos, auteur reconnu et accepté par l’institution, édité dans des collections et maison d’édition plébiscitées par la critique savante et le Ministère.

  • 6 Laurence Rosier, Marie-Christine Pollet (dir.), Les mauvais genres en classe de français ? Retour s (...)
  • 7 Nathalie Denizot, « Culture scolaire et culture des élèves en classe de français », Le français auj (...)

9Ainsi, les mauvais genres, traités entre autres par Rosier et Pollet6, qui sont rentrés dans les pratiques de la classe depuis les années 70-80, en vue notamment d’une certaine démocratisation de l’enseignement du français, n’en sont plus vraiment : la science-fiction, le polar ou le récit fantastique sont désormais bien établis dans les classes, sous couvert d’une dichotomie entre une littérature de genre acceptable et une paralittérature non autorisée. Nathalie Denizot rappelle à juste titre la « classicisation » des « bons » mauvais genres à l’école en expliquant que « l’introduction de la paralittérature dans les programmes et les manuels a en réalité servi d’alibi pour masquer la persistance du primat de la “vraie” littérature7 ».

  • 8 Anne Besson, spécialiste de la SFFF dans la littérature du xxe et xxie siècle, préfère le choix de (...)

10Les véritables mauvais genres à l’école pourraient donc actuellement résider dans la littérature de jeunesse de cycle et de série8, dans les romans sentimentaux, prioritairement adressés aux jeunes filles (chik lit aux thématiques déclinées en littérature vampirique, la bit lit, ou en « romans de la maladie », la sick lit) et bien entendu, dans les novélisations.

11Néanmoins, il ne s’agit pas d’intégrer absolument en classe des mauvais genres sous prétexte d’une idéologie faussement tolérante qui consisterait à rapprocher les pratiques scolaires des habitudes extrascolaires des élèves. La question de la qualité de ces ouvrages doit indubitablement se poser puisqu’il en va du respect de la mission de l’école et d’une responsabilité vis-à-vis des élèves : il s’agit bien d’assurer une conformité des enseignements dispensés à partir de tels ouvrages par rapport aux objectifs d’apprentissage prescrits par l’institution. Cependant, ce questionnement ne concerne pas la valeur littéraire en soi, objet clivant en raison d’une hiérarchisation tacite qui s’installe entre des produits issus de l’industrie commerciale et des œuvres publiées dans des circuits de l’édition, soit plus intimistes soit plus traditionnellement admis par la norme scolaire. Les positions sur la valeur littéraire resteront irréconciliables pour les tenants de ce débat contradictoire.

  • 9 L’ouvrage sous la direction de Catherine Tauveron, Lire la littérature à l'école : pourquoi et comm (...)

12En revanche, il s’agit bien d’évaluer les œuvres du point de vue du matériau et du potentiel didactique qu’elles représenteraient pour les élèves. En effet, la légitimité didactique et pédagogique de tels ouvrages est susceptible d’être mise en doute au regard des démarches communément pratiquées de compréhension-interprétation qui posent la résistance des textes comme une condition nécessaire aux apprentissages. Or les ouvrages de l’industrie commerciale du livre sont réputés faciles à lire. Ils ne correspondent a priori pas aux critères de prolifération ou de réticence du sens définis par Catherine Tauveron9 pour catégoriser les textes résistants opposés aux textes dits « lisses », au rang desquels on serait d’abord tenté de ranger les ouvrages en série, et encore plus ceux adaptés des séries télévisées.

Un lien possible entre la culture juvénile et les corpus scolaires

  • 10 Catherine Tauveron, « Comprendre et interpréter le littéraire à l’école : du texte réticent au text (...)

13Au-delà de l’opposition entre ouvrages « résistants » et « lisses », il est possible d’envisager la manière dont les fictions transfuges tissent un univers complexe qui enrichit l’imaginaire des élèves. Il est tout aussi vrai que les relations intersémiotiques qu’un ouvrage novélisé développe avec le discours audiovisuel qu’il adapte peuvent déclencher une activité réflexive de comparaison, de confrontation et de questionnement qui renvoie bien aux enjeux du travail en littérature puisque, selon la définition de Catherine Tauveron, « la lecture littéraire est une activité de résolution de problèmes, problèmes que le texte pose de lui-même ou que le lecteur construit dans sa lecture10. » Ainsi, en suivant le double mouvement ici suggéré qui va du texte au lecteur et du lecteur au texte, on pourrait à la rigueur admettre que les textes de la littérature transmédiatique adressée à la jeunesse ne posent pas de problème au lecteur – car ils se voudraient transparents, linéaires et explicites conformément à un soi-disant modèle de la littérature populaire et parce qu’ils ciblent un public et une tranche d’âge spécifiques. En revanche, les problèmes que le lecteur, lui, pose aux textes ne sont pas moins importants, moins intéressants à ses yeux que ceux que suscitent d’autres ouvrages jugés plus légitimes. Dans les deux cas, l’investissement interprétatif est identique de la part du lecteur, ainsi que des expérimentations menées en classe et présentées ci-après, le démontrent.

  • 11 Catalogue de l’École des loisirs, 2016, « les héros de l’École des loisirs s’échappent des livres » (...)

14Par ailleurs, si les fictions transfuges sont particulièrement visibles dans le cadre de la littérature populaire et que les déclinaisons multimédiatiques d’univers fictionnels s’épanouissent auprès du jeune public, la transfictionnalité touche toutes les littératures. Il est révélateur que la maison d’édition l’École des loisirs s’engage dans ce processus de circulation proliférante de la fiction en faisant sortir les héros de ses livres par des jeux : Elmer, le jeu des couleurs, Loulou le jeu, Tu bluffes Chien pourri11. Par le biais de Rue de Sèvres, la branche spécialisée en BD du groupe, l’École des loisirs propose également un nombre non négligeable d’adaptations bédéiques d’ouvrages renommés de ses différentes collections : Le journal d’Aurore, No pasaran, le jeu, Tempête au haras, Le journal d’un chat assassin, ce dernier titre étant préalablement devenu une série de récits. On constate donc qu’une maison d’édition entretenant des relations étroites et durables avec l’école et ses enseignants, grande pourvoyeuse d’œuvres recommandées par le ministère de l’Éducation nationale et, par là, reconnue par l’institution, n’échappe pas au principe de la transfictionnalité en empruntant des voies identiques à celles d’une littérature considérée comme plus populaire, et imite les pratiques éditoriales de l’industrie commerciale et des marques. L’argument des ventes explique en partie les similarités constatées dans les transferts imposés aux fictions d’origine (transformées en jeux de sociétés, en applications numériques ou autres produits dérivés comme des figurines). Une volonté marketing motive vraisemblablement la maison d’édition, soumise à des contraintes de rentabilité, et justifie l’adoption de stratégies qui correspondent à des tendances du marché et à une demande du public, mais l’éditeur revendique ouvertement des valeurs et des objectifs culturels et éducatifs qu’il porte historiquement et ce, jusque dans son nom, « école ».

15Force est de constater par ailleurs que, pour une partie des fictions transfuges, ce sont les auteurs eux-mêmes qui décident d’inventer des continuations ou de transposer leur œuvre sur d’autres médias. On peut reprendre l’exemple d’Elmer, qui est longtemps demeuré un album singulier avant que David McKee n’offre de nouvelles aventures à son personnage. Loulou se démultiplie également : Grégoire Solotareff publie d’abord son album en 1989, et ce dernier devient vite un best-seller de la petite enfance. Serge Elissalde, avec le concours de Solotareff, l’adapte en film d’animation seulement quatorze ans plus tard, en 2003. Le court-métrage a lui-même été réadapté en album sous le titre Loulou et Tom (2003), ouvrant la voie à deux autres albums, Loulou plus fort que le loup (2010) et Loulou à l’école des loups (2011), constituant ainsi une série qui a pris, là aussi, son temps. La série trouve des prolongements dans un second film, Loulou, l’incroyable secret (2013), qui devient cette fois le support d’une bande dessinée chez Rue de Sèvres (2013), novélisée par Solotareff et Jean-Luc Fromental à partir du film d’animation de Solotareff et Eric Omond. On se retrouve ici face à une déclinaison multimédiatique et un épaississement narratif de l’univers fictionnel de Loulou qui est alimenté par l’auteur d’origine, puisque celui-ci contribue à chacune des étapes du processus transfictionnel, y compris lorsqu’il y a transfert d’un médium à un autre et que Grégoire Solotareff s’auto-adapte. Les chemins suivis par Elmer et Loulou sont assez exemplaires des récits que les élèves – lecteurs hors de l’école et lecteurs en classe – peuvent fréquenter : par goût et culture personnelle, les enfants en lisent, mais l’institution est à même de leur en proposer par l’intermédiaire d’un éditeur légitimé.

  • 12 Müller définit le terme d’intermédialité par la co-présence d’œuvres sur des supports différents, i (...)

16Le détour par les ouvrages transfictionnels et transmédiatiques de l’École des loisirs démontre que ce type de fictions peut donc trouver légitimité à se constituer en objet d’étude en classe, tant le phénomène d’intermédialité12 traverse la création et la culture contemporaines et imprègne l’univers de référence des enfants et, plus largement, celui du public tout entier.

De quelques bénéfices constatés dans l’usage des récits multimédiatiques en classe

17Ainsi, entre 2012 et 2016, plusieurs expérimentations didactiques, impliquant des corpus multimédiatiques, ont été menées dans sept classes de primaire et du secondaire dont quatre classes d'élémentaire : un double niveau CE1-CE2, deux doubles niveaux CM1-CM2 et un triple niveau CE2-CM1-CM2, réunissant 102 élèves sur ces quatre niveaux d’enseignement. Les quatre classes d’élémentaire relèvent de deux établissements du département de la Manche, situés dans le même bassin de recrutement et dans une zone périurbaine. Elles présentent un équilibre garçon-filles, à l’exception de la classe triple niveau qui comptait plus du double de filles (14 filles pour 6 garçons). Les élèves ont travaillé à partir d’extraits de films et de leur ouvrage novélisé et d’un court métrage d’animation adapté d’une BD. Les supports sont constitués de quatre extraits de La nouvelle guerre des boutons, film de Christophe Barratier de 2011, novélisation de Nicolas Jaillet (2011) ; d’un bref extrait du dessin animé Le ranch, début de l’épisode 1 de la série télévisuelle de 2012, novélisation de Christelle Chatel (2012) ; d’une séquence du film Les vacances de Monsieur Hulot de Jacques Tati de 1953, novélisation de Jean-Claude Carrière de 1958 ; de l’intégralité du court métrage d’animation Le génie de la boite de raviolis de Claude Barras de 2005, d’après la BD éponyme d’Albertine et Germano Zullo (2002).

18Les élèves ont eu à réaliser des tâches d’écriture d’invention à visée littéraire à partir des supports filmiques cités ci-dessus, sur des séquences d’une durée variant d’une minute vingt à sept minutes trente. Les extraits ont été sélectionnés en fonction de leur complétude narrative, de leur charge émotionnelle et, concernant les extraits du film La nouvelle guerre des boutons, de leur unité thématique (scènes d’affrontement). Les élèves devaient ainsi traiter des opérations de transmédiatisation, qui sont courantes dans les littératures et les vidéos qu’ils fréquentent, tout en développant leur posture d’auteur dans la création de leur texte dérivé des récits filmiques. Les séquences didactiques d’enseignement–apprentissage mettaient en œuvre à la fois des analyses filmiques et des études de textes experts, extraits des ouvrages novélisés correspondant aux passages visionnés en classe. De façon plus incidente, des textes de livres personnels ont également été partagés puisque les élèves ont spontanément rapporté en classe des ouvrages qu’ils ont d’abord identifiés comme des récits multimédiatiques puis, plus précisément, comme des novélisations (séries Scooby-Doo, Star Wars Rebels, autres livres de la série Le ranch, livre du film Belle et Sébastien).

  • 13 Sur le modèle de la lecture littéraire développé par Gérard Langlade et Annie Rouxel, comme process (...)
  • 14 Des analyses plus détaillées de l’expérimentation didactique ont déjà été publiées qui illustrent l (...)

19Pour revenir brièvement sur les résultats obtenus lors de cette recherche, on peut avancer que la progression globale en interprétation des images filmiques s’est améliorée au cours des séquences. Les élèves ont adopté une posture de spectature13 face aux extraits filmiques afin d’interpréter les paramètres du récit filmique qui font sens et narration (analyse conjointe des éléments de la bande-image et de la bande-son). Ils sont passés d’une première attitude de réception littérale des extraits filmiques à une posture de construction du sens avec une réflexion plus approfondie sur les émotions et les sentiments des personnages ainsi que sur leurs intentions. Cet investissement dans l’interprétation des films se traduit par la progression dans les textes produits par les élèves tout au long des séquences. Les textes s’étoffent et s’épaississent narratologiquement, notamment du côté des pensées intérieures des personnages, montrant que les élèves sont entrés plus avant dans l’interprétation des implicites des extraits filmiques. Les élèves ont aussi inséré de plus en plus d’effets énonciatifs dans leurs textes afin de traduire des paramètres du discours filmique tels, par exemple, que la musique suggérant le suspens14.

20Nous pouvons ainsi observer l’évolution des écrits d’une même élève qui modifie ses stratégies rédactionnelles au cours de la séquence didactique, à partir du visionnage de deux extraits différents du film La nouvelle guerre des boutons.

21Deuxième texte de la séquence de Camille, CM2, 2015 :

le petit Gibus, les grand Gibus et Camus cherche les verlans le drapeau blanc en main. D’un coup le chef des vel verlans apparait comme sortie de nulle part le petit Gibus recule appeuré et il s’exclame :
- « Justetement on vous…on vous chercher.
- On dirait que tu nous as trouvais couille molle.
- On a un mot de le brac. »
- mmm. »
Com Camus passe le mot au petit Gibus toujour très perplexe à l’idée d’être que trois. puis après cettre emparé du mots, le petit Gibus commença :
- « Contenu qu’on est que trois y aura pas baguare aujourd’hui mais Jeudi prochain. Vous êtes d’accord. »
-
N L’aztec se bessa alors vers le petit Gibus d’un air effrayant puis dit :
- « Non on est pas d’accord. »
la peur commence à monter du côté des trois Longeverne.

22Troisième texte de la séquence de Camille, CM2, 2015 :

Bacaillé marche triste dans la forêt sur un petit santier. L’Aztec est caché derière un flu de verdures et d’arbres. Il saute avec trois de ses hommes et marche bruillament derière bacaillé, qui se retourne après quelques instant, sont visage se remplit de peur à la vue des quatre velrans. Le brac est dans la cabane pendant ce temps, ils discutent. A cet instant Bacaillé se fit attraper et coller contre un mur. L’Aztec heureux d’avoir un ot otage force Bacaillé à les conduir à la cabane ou alors il sera…déboutonner !

23Dans les deux productions, l’élève prend soin d’exprimer les sentiments des personnages mais elle reste moins attachée à la seule peur dans le deuxième texte et souligne aussi le contentement de l’adversaire. Elle s’approprie davantage l’extrait filmique, notamment en retranscrivant les pensées intérieures au lieu de s’en tenir à la description stricte des images du texte précédent. Si, dans les deux productions, nous notons l’emprunt de formules convenues – mais toutefois bienvenues – dans la construction du texte et de sa tension : la peur commence à monter du côté des trois longeverne (texte 1) / sont visage se remplit de peur à la vue des quatre Velrans (texte 2), nous constatons cependant que l’élève procède à une introspection plus fine des différents protagonistes dans le deuxième texte. Ce faisant, elle crée une tension plus palpable au moyen de la variation des deux points de vue (celui de l’agresseur et celui de la victime) alors que le premier texte ne s’attardait que sur le point de vue de la victime.

24Autre contraste entre les deux textes, l’élève choisit délibérément de ne pas reproduire le dialogue dans la deuxième production : cette suppression implique une réduction du temps de l’histoire et une accélération de la narration qui permet à l’élève de réunir des plans filmiques alternés sur les deux camps, qu’elle essayait de retranscrire (pendant ce temps, à cet instant). Elle évite ainsi des alternances répétées et ambigües qui imiteraient scrupuleusement le temps filmique. Elle sacrifie surtout le langage fleuri qu’elle – et bien d’autres – avait eu plaisir à paraphraser, langage qui n’est d’ailleurs pas sans marquer les personnages de façon stéréotypée (l’injure vulgaire et gratuite dans la bouche du méchant garçon « couille molle » (texte 1) et, en florilège dans le deuxième extrait filmique non cité par l’élève, « on va te soigner mon cochon ; quelle mauviette ; je vais te saigner mon goret » etc.). Dans le premier texte, l’élève substitue la retranscription du dialogue de l’extrait filmique à son écriture personnelle, là où le deuxième texte reformule plus singulièrement la scène. La reformulation et la réduction temporelle se retrouvent dans l’expression finale qui utilise un raccourci, non sans effet stylistique, il sera…déboutoner, trouvaille totalement absente des paroles du film, qui relève d’une certaine invention.

  • 15 Raphaël Baroni, La tension narrative, Paris, Seuil, 2007.

25Il est nécessaire de préciser ici que l’objectif n’est surtout pas de travailler avec les élèves des compétences techniques de l’adaptation mais l’exercice de transsémiotisation (passage du film au texte écrit) induit forcément une confrontation de systèmes sémiotiques hétérogènes et des tentatives de traduction d’un langage à l’autre, comme le laissent supposer les traces repérées dans les textes des élèves à l’instar de l’exemple de Camille, mentionnée ci-devant. Sans céder à une dérive techniciste de l’enseignement, les corpus transmédiatiques offrent ainsi l’occasion d’initier les élèves à une étude et une comparaison des moyens narratifs entre les supports audiovisuels et les supports littéraires qui créent la tension narrative15. Cette forme minimale de littérature comparée, adressée à de très jeunes élèves, amène néanmoins un travail interprétatif des textes (du film, des livres et du propre texte produit par l’élève) car elle pose la question des choix des auteurs et de leurs intentions. Les élèves peuvent alors transférer dans leurs écrits les procédés et les effets stylistiques repérés chez les auteurs. Mais ils progressent également en expertise sur l’analyse de l’image mobile, un enseignable aujourd’hui incontournable pour des élèves entourés d’images, fixes ou mobiles, qui méritent d’être décryptées pour éviter de les subir passivement ou naïvement.

26Outre la motivation nécessairement attachée à l’usage en classe d’objets qui se rapprochent de ceux de la culture privée des élèves, l’intérêt des fictions transmédiatiques pour les apprentissages a été double :

  • susciter un goût pour la lecture en créant une communauté de lectures au sein de l’espace–classe et une culture partagée qui dépasse les frontières entre culture scolaire et culture extrascolaire, et qui autorise et légitime la pratique d’une forme de littérature que les élèves s’imaginent interdite à l’école.

    • 16 Jean-Louis Dufays, Bernadette Kervyn, « Le stéréotype, un objet modélisé pour quels usages didactiq (...)

    favoriser une posture critique sur les textes à lire et à écrire en s’appuyant sur les stéréotypes des ouvrages en série et des fictions multimédiatiques comme leviers vers la réflexion des élèves, en partant du postulat développé par Jean-Louis Dufays et Bernadette Kervyn16 sur les motifs stéréotypés comme vecteurs d’apprentissage.

  • 17 Selon la dénomination proposée par C. Tauveron, « Comprendre et interpréter le littéraire à l’école (...)

27Ainsi, la logique d’un rapprochement entre les pratiques de lectures privées collaborationnistes17 et les lectures effectuées au sein de la classe est d’ores et déjà acceptée et répandue à l’école maternelle : les ouvrages en série représentent en effet une partie de l’ordinaire de la classe. Pour favoriser l’entrée des jeunes élèves dans le livre, les séries sont convoquées avec des objectifs divers : construire une reconnaissance et une familiarité avec l’univers de la série, développer le langage, permettre l’élaboration de représentations du monde et des identifications en provoquant un attachement affectif au héros récurrent (les héros de série comme L’âne Trotro, Mimi la souris ou Le loup qui voulait changer de couleur deviennent les mascottes de la classe, jusqu’à « séjourner » alternativement dans les familles le weekend). Or les bénéfices que la maternelle assigne aux séries pourraient être transférés aux cycles suivants, plus frileux à utiliser ce genre de supports, en modifiant quelque peu les orientations et les objectifs pédagogiques.

Enjeux de la fréquentation de la transfictionnalité à l’école

  • 18 Bertrand Ferrier, « Les novélisations pour la jeunesse : reformulations littéraires du cinéma ou re (...)
  • 19 Matthieu Letourneux, Fictions à la chaîne, Littérature sérielle et culture médiatique, Paris, Seuil (...)

28À l’occasion d’un dossier qu’il consacre aux novélisations pour la jeunesse et aux influences réciproques entre le discours cinématographique et la littérature, Bertrand Ferrier remet en perspective la notion de littérarité appliquée aux ouvrages dérivés et il pose, non sans une part de défi, la question suivante : « Y-a-t-il quelque provocation à prétendre que la novélisation d’une série télévisée peut aussi être analysée avec les mêmes outils et les mêmes exigences qu’un roman communément admis comme littéraire18 ? » Ce postulat nous semble fécond autant à l’école qu’à l’université où les cultural studies ont permis à la littérature populaire d’émerger. Dans la continuité des travaux de Mathieu Letourneux19, il est désormais admis que l’opposition entre création culturelle et objets et produits de consommation semble dépassée et que la littérature sérielle et la culture populaire peuvent légitimement revendiquer une esthétique digne d’études historiques, poétiques et médialogiques.

  • 20 Ministère de l'Éducation nationale, « Organisation de l’enseignement de l’histoire des arts, école, (...)

29À ce titre, il n’y a aucune raison qui justifierait que l’école se dispense de l’étude de fictions transfuges et multimédiatiques tant le phénomène est ancré dans nos sociétés et tant il a d’incidences sur nos représentations, notre imaginaire, nos modes de réception et nos jugements esthétiques. L’école se doit de préparer les élèves à devenir des « amateurs éclairés » selon les termes des Instructions Officielles20. Ignorer les pratiques qui ont gagné la société entière constituerait un manquement au parcours culturel que l’école entend proposer aux élèves. La dichotomie entretenue entre culture scolaire et extrascolaire, culture légitime et populaire ne peut servir de barrage à l’introduction d’une littérature qui, si elle a perdu en densité symbolique, a gagné en socialisation selon Mathieu Letourneux.

  • 21 Matthieu Letourneux, « Pour une esthétique de la pop culture », aoc, 01/11/2018, URL : https://aoc. (...)

Dès lors, on ne peut plus faire comme si les cultures médiatiques et de consommation nous étaient extérieures, alors qu’elles nourrissent nos expériences et notre manière de juger le monde depuis plus d’un siècle. C’est pour cela que, plutôt que de déplorer inlassablement le déclin d’une culture liée à la marchandise ou de jouer sans fin le jeu de l’artification de la pop culture, il convient d’interroger ces transformations, de traquer leurs logiques propres, et d’essayer de saisir ce qu’elles nous disent, plus largement, des bouleversements qui touchent nos sociétés tandis qu’elles achèvent de tourner la page du modernisme21.

  • 22 Jean-Marie Schaeffer, Pourquoi la fiction ?, Paris, Seuil, 1999.
  • 23 Umberto Eco, De superman au surhomme, Paris, Grasset, 1993.

30Les fictions transfuges et multimédiatiques sont ainsi propres à construire une réflexion critique chez les élèves et à développer une posture de sujet-lecteur qui, certes, s’adonne au plaisir de la fiction, défini par Schaeffer22, et cède au goût de l'itération et du ressassement qu’Eco23 avaient analysés à propos de la sérialité et des reprises hypertextuelles quelques années plus tôt, en bousculant déjà les hiérarchies entre culture de masse et culture légitime. Cependant, la lecture subjective et le plaisir premier de l’immersion dans les fictions multimédiatiques n’entravent aucunement la distance à l’œuvre que le dispositif didactique de lecture littéraire peut justement favoriser auprès des élèves. Comme le suggérait Bertrand Ferrier, les outils de la didactique de la littérature peuvent s’appliquer aux fictions transfuges. Même en écartant l’entrée par la résistance des textes, il est tout à fait envisageable d’approcher avec les élèves les processus de génération hypertextuelle des œuvres, en s’appuyant sur leur familiarité de réception de ce type de fictions et leur connaissance des mondes imaginaires multimédiatiques. En effet, en vertu de l’itération qui renouvelle et prolonge l’univers fictionnel dans un processus créatif qui n'épuise jamais le sujet, les élèves sont sensibilisés aux adaptations qui réinventent les fictions originelles. Leur pratique des fictions transfuges constitue ainsi un outil propédeutique à l’analyse des réécritures de tout ordre qu’ils ne manqueront pas de rencontrer dans leur parcours scolaire. Recourir aux corpus mulimédiatiques à l’école primaire, c’est ainsi rendre les élèves attentifs à l’intertextualité, instaurer des réflexes de confrontation et de comparaison entre les œuvres, compétence souvent évoquée dans les instructions officielles et inhérente aux lectures en réseaux, préconisées par les didacticiens de la littérature et par les programmes scolaires. Or, travailler à partir d’un corpus multimédiatique consiste bien à proposer un réseau d’œuvres autour d’un univers fictionnel, en s’intéressant aux variations entre les objets, à leurs corrélations et aux effets de sens que les œuvres réunies ensemble provoquent.

Pour conclure et prolonger

  • 24 Le livre est sorti le 03 février 2021 chez l’École des loisirs, dans la collection Neuf. Le film av (...)

31L’introduction de corpus transfictionnels à l’école sert évidemment la construction d’une posture réflexive de lecteur grâce à la sensibilisation et la formation des élèves à une forme de création littéraire contemporaine et à une réalité éditoriale et médiatique. Pourtant, pour lutter contre l’opprobre et les réticences encore attachés aux objets de la culture juvénile ou de la pop culture, des corpus moins controversés que les séries jeunesse peuvent être envisagés. Nous citerons quelques idées de titres qui peuvent tenir lieu de pistes pour explorer les ressources didactiques des corpus transfictionnels à l’école. On pourrait ainsi prolonger le travail sur le film patrimonial de Jacques Tati, Les vacances de Monsieur Hulot, présent sur la liste de références « École et cinéma », par la série d’albums sans texte de David Merveille, Monsieur Hulot à la plage, Le Jacquot de Monsieur Hulot ou Hello Monsieur Hulot. Ces ouvrages semblent plus adaptés à des élèves de cycle 2 et 3 que la novélisation romancée de Jean-Claude Carrière, qui n’était d’ailleurs originellement pas destinée aux enfants. Autour de films primés, on peut penser à Ma vie de courgette, film d'animation de Claude Barras, adapté du roman de Gilles Paris Autobiographie d'une courgette, que l’on peut aussi confronter à l’album novélisé du film, paru chez Glénat en octobre 2016. Plus récemment encore, La vie de château, le film d’animation de Clémence Madeleine-Perdrillat et Nathaniel H’Limi, a été adapté par ses réalisateurs en un roman éponyme, sous-titré Violette et Régis, tome qui inaugure une série à venir24. C’est dire que des perspectives s’ouvrent pour le récit multimédiatique en classe, que l’on se tourne vers les séries ou les réécritures-appropriations.

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Notes

1 Richard Saint-Gelais, Fictions transfuges. La transfictionnalité et ses enjeux, Paris, Seuil, 2011.

2 L’univers de Star Wars est emblématique pour illustrer le phénomène de circulation et de porosité entre films/séries et novélisations : tout élément qui participe de l’univers fait l’objet d’investigations de la part des fans. Ainsi, des sites listent les ouvrages de la saga entre littérature adulte et littérature pour la jeunesse, critiques à l’appui. Nous en donnons quelques-uns à titre d’exemples qui démontrent l’intérêt d’une communauté de lecteurs adultes et enfants-adolescents pour ce type d’échanges entre médias : https://www.starwars-universe.com/(section littérature) ; https://starwars.direct/2018/03/30/swd-litterature-23-novelisation-the-last-jedi/ ; https://www.planete-starwars.com/actualites/livres-la-novelisation-des-derniers-jedi-la-premiere-phrase-du-livre-a-fuite-n19008.html ; https://www.planete-starwars.com/actualites/livres-la-novelisation-de-solo-pour-septembre-aux-tats-unis-n19275.html.

3 Cinq millions de novélisations auraient été vendues pour la seule année 2006, grâce à la politique commerciale et la logique pluri-média d’Hachette, selon Prisca Grignon, auteure d’une thèse portant sur la novélisation francophone récente. Prisca Grignon, Le champ d’existence de la novélisation actuelle (10 dernières années). La novélisation, un nouveau genre ?, Thèse de doctorat d’études cinématographiques, Montpellier, Université Paul Valéry, 2012.

4 Enquête IPSOS/Centre National du Livre de 2016, Les jeunes et la lecture, sur un panel représentatif de 1 500 jeunes de 7 à 19 ans, disponible à l’adresse suivante : https://centrenationaldulivre.fr/donnees-cles/les-jeunes-et-la-lecture.

5 Est-il nécessaire de rappeler ici les cinq catégories transtextuelles conceptualisées par Gérard Genette qui recouvrent l’intertextualité, la paratextualité, la métatextualité, l’architextualité et l’hypertextualité, cette dernière étant plus précisément l’enjeu de Palimpsestes : la littérature au second degré, Paris, Seuil, 1982.

6 Laurence Rosier, Marie-Christine Pollet (dir.), Les mauvais genres en classe de français ? Retour sur la question, Namur, Presses universitaires de Namur, 2007.

7 Nathalie Denizot, « Culture scolaire et culture des élèves en classe de français », Le français aujourd’hui, n° 207, 2019, p. 33.

8 Anne Besson, spécialiste de la SFFF dans la littérature du xxe et xxie siècle, préfère le choix de ces termes à celui de paralittérature. Elle décrit et analyse le phénomène contemporain des mondes imaginaires expansifs qui fait écho aux pratiques littéraires populaires du feuilleton du xixe siècle. Elle rend compte de la tendance actuelle à l’amplification du mouvement avec des mondes imaginaires qui s’épaississent considérablement dans des livraisons d’ouvrages de plus en plus volumineux. Anne Besson, « Du Club des Cinq à Harry Potter, cycles et séries en littérature de jeunesse contemporaine », dans : Nathalie Prince, La littérature de jeunesse en question(s), Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2009, p. 117-154.

9 L’ouvrage sous la direction de Catherine Tauveron, Lire la littérature à l'école : pourquoi et comment conduire cet apprentissage spécifique ? De la GS au CM2, Paris, Hatier, 2002, constitue toujours une base solide pour les enseignants du primaire qui s’appuient sur cette référence pour mener les séquences de lecture littéraire, dans la continuité des Instructions Officielles de 2002 et des formations dispensées dans le courant des années 2000-2010.

10 Catherine Tauveron, « Comprendre et interpréter le littéraire à l’école : du texte réticent au texte proliférant », Repères, n° 19, 1999, p. 17.

11 Catalogue de l’École des loisirs, 2016, « les héros de l’École des loisirs s’échappent des livres », nouvelle collection de jeux, de cahiers à dessiner, de stickers en partenariat avec PlayBac. On reconnait les personnages des ouvrages éponymes Elmer, Loulou ou Chien pourri, héros récurrents dont l’apparition initiale ne préfigurait pas forcément le retour en série, au moins pour Loulou et Elmer.

12 Müller définit le terme d’intermédialité par la co-présence d’œuvres sur des supports différents, impliquant un transfert d’un média à l’autre, instaurant des interférences, des relations entre les deux œuvres. Ce concept interdisciplinaire permet d’analyser les processus de transformation et de mutation que les caractéristiques médiologiques d’un support d’accueil font subir à une œuvre adaptée. Jürgen Ernst Müller, « L’intermédialité, une nouvelle approche interdisciplinaire : perspectives théoriques et pratiques à l’exemple de la vision de la télévision », Cinémas [en ligne], vol. 10, n° 2-3, 2000, p. 105-134, URL : https://0-www-erudit-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/fr/revues/cine/2000-v10-n2-3-cine1881/024818ar/ ; Jürgen Ernst Müller, « Vers l'intermédialité. Histoires, positions et options d'un axe de pertinence », MédiaMorphoses [en ligne], n° 16, 2006, p. 99-110, URL : http://documents.irevues.inist.fr/handle/2042/23499.

13 Sur le modèle de la lecture littéraire développé par Gérard Langlade et Annie Rouxel, comme processus de compréhension-interprétation du sujet-lecteur, Nathalie Lacelle propose le concept de spectature autour de l’activité d’interprétation du sujet-spectateur. Nathalie Lacelle, Modèle de lecture-spectature, à intention didactique, de l'oeuvre littéraire et de son adaptation filmique, thèse de doctorat en éducation, Montréal, Université du Québec, 2009.

14 Des analyses plus détaillées de l’expérimentation didactique ont déjà été publiées qui illustrent les progrès dans l’écriture des élèves, progrès soutenus par l’usage de fictions multimédiatiques : « Quand la culture juvénile donne le gout d’écrire aux élèves », Le français aujourd'hui, nº 207, 4/2019, p. 53-66. Nous ne développerons donc qu’un seul exemple dans le cadre de la présente contribution.

15 Raphaël Baroni, La tension narrative, Paris, Seuil, 2007.

16 Jean-Louis Dufays, Bernadette Kervyn, « Le stéréotype, un objet modélisé pour quels usages didactiques ? », Éducation et didactique, vol. 4, n° 1, 2010, p. 53-80.

17 Selon la dénomination proposée par C. Tauveron, « Comprendre et interpréter le littéraire à l’école », op. cit., p. 18.

18 Bertrand Ferrier, « Les novélisations pour la jeunesse : reformulations littéraires du cinéma ou reformulations cinématographiques de la littérature ? », Fabula LHT (Littérature, histoire, théorie) [en ligne], n° 2, Ce que le cinéma fait à la littérature (et réciproquement), 2006, URL : http://www.fabula.org/lht/2/Ferrier.html.

19 Matthieu Letourneux, Fictions à la chaîne, Littérature sérielle et culture médiatique, Paris, Seuil, 2017.

20 Ministère de l'Éducation nationale, « Organisation de l’enseignement de l’histoire des arts, école, collège, lycée », Bulletin officiel, n° 32, 28 août 2008, p. 3.

21 Matthieu Letourneux, « Pour une esthétique de la pop culture », aoc, 01/11/2018, URL : https://aoc.media/analyse/2018/11/01/esthetique-de-pop-culture/.

22 Jean-Marie Schaeffer, Pourquoi la fiction ?, Paris, Seuil, 1999.

23 Umberto Eco, De superman au surhomme, Paris, Grasset, 1993.

24 Le livre est sorti le 03 février 2021 chez l’École des loisirs, dans la collection Neuf. Le film avait reçu le Prix du Jury Spécial TV au Festival International du Film d’Annecy, en 2019.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Sonia Castagnet-Caignec, « Pour des corpus transfictionnels à l'école : en quoi un récit multimédiatique peut-il servir l’enseignement ? »Strenæ [En ligne], 19 | 2021, mis en ligne le 03 décembre 2021, consulté le 17 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/strenae/8842 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/strenae.8842

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Auteur

Sonia Castagnet-Caignec

INSPE de l’Université de Caen

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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