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Dossier thématique

« Plädoyer für das Chaos » ? Les mutations de la littérature allemande pour la jeunesse autour de 1968

“Plädoyer für das Chaos ?” Changes in German Children's Literature Around 1968
Mathilde Lévêque

Résumés

Les mouvements de protestation étudiants de 1968 et le tournant culturel qu’ils ont mis en mouvement dans toute la société de l’Allemagne de l’Ouest ont profondément modifié la littérature pour la jeunesse dans ses thèmes, dans ses formes et dans les fonctions qui lui sont assignées. Si la césure est nette, encore faut-il tenter de comprendre ce qui prépare, explique et conditionne cette rupture. La notion de césure, de fracture ou de rupture correspond à une réalité aux multiples dimensions : que brise-t-on et pourquoi ? Quelles normes passées entend-elle mettre à bas ? Si chaos il y a, quel est-il et que signifie-t-il ?

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Texte intégral

Introduction

  • 1 Je renvoie à l’introduction de l’article d’Andrea Weinmann, « Literaturgeschichte als Generationges (...)
  • 2 James Krüss, Naivität und Kunstverstand. Gedanken zur Kinderliteratur, Weinheim, Berlin, Basel, Ver (...)

1Les mouvements de protestation étudiants de 1968 et le tournant culturel qu’ils ont mis en mouvement dans toute la société de l’Allemagne de l’Ouest ont profondément modifié la littérature pour la jeunesse, dans ses thèmes, dans ses formes et dans les fonctions qui lui sont assignées. Si les chercheurs et les critiques s’accordent pour voir autour de 1968 une césure nette dans l’histoire de la littérature de jeunesse allemande1, encore faut-il tenter de comprendre ce qui prépare, explique et conditionne cette rupture : à des facteurs externes à la littérature pour la jeunesse, facteurs sociaux, politiques, idéologiques et économiques, se conjuguent des facteurs plus directement liés à la création pour la jeunesse depuis l’après-guerre et à sa réception. La notion de césure, de fracture ou de rupture, si elle correspond à une réalité aux multiples dimensions, reste également une question de point de vue : que brise-t-on et pourquoi ? La rupture doit-elle se comprendre comme l’opposition à un ordre existant et à ses normes ? Quelles normes, passées ou présentes, entend-elle mettre à bas ? Pour comprendre les mécanismes de cette rupture, encore est-il nécessaire d’en connaître les origines et de replacer la littérature pour la jeunesse allemande du tournant de 1968 dans son contexte, celui d’une littérature qui s’émancipe, progressivement, de l’après-guerre. De quoi ce « chaos » de 1968, évoqué dans le chapitre introductif d’un essai de James Krüss2, est-il le signe ? À partir d’une présentation de la littérature pour la jeunesse de l’après-guerre, un éclairage sera porté sur trois écrivains représentatifs de la reconstruction littéraire pour enfants à l’aube de 1968 : Otfried Preussler, James Krüss et Michael Ende. Néanmoins, ces trois écrivains majeurs ne doivent pas éclipser une production littéraire et graphique qui cherche un nouvel élan. De fait, ces trois écrivains deviennent aussi la cible des tenants d’une révolution plus radicale dans la création pour la jeunesse, dans ses formes comme dans son contenu, et qui ouvre la voie à une nouvelle génération d’auteurs : le « chaos » ne serait donc pas seulement synonyme de déconstruction mais aussi de création.

Déblayer les ruines de la guerre pour préparer des barricades ?

  • 3 Cité par Reiner Wild (Hrsg.), Geschichte der deutschen Kinder- und Jugendliteratur, Stuttgart, Metz (...)
  • 4 Lisa Tetzner (1894-1963) est notamment l’auteur d’une vaste fresque romanesque, Die Kinder aus Numm (...)
  • 5 Kurt Held (1897-1959) publie en 1941 Die rote Zora und ihre Bande, qui devient ensuite un classique (...)

2Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la littérature allemande pour la jeunesse, largement instrumentalisée par le nazisme, peine à se renouveler. En 1948, le Committee of Book Publishers, instance américaine visitant l’Allemagne de l’Ouest, avance ce constat : « Grimm and Struwwelpeter are not enough in modern times for growing minds. These minds are particularly important to us because the future has to be built on today’s children3. » L’impulsion la plus importante est due à l’action de Jella Lepman, journaliste qui, après avoir émigré en Grande-Bretagne, revient en Allemagne comme officier de l’armée américaine. Elle organise en 1946/47 une exposition internationale de livres pour enfants à Munich, où elle fonde en 1949 l’Internationale Jugendbibliothek. La réception critique de l’exposition est très partagée. L’une des critiques les plus négatives est formulée par Anna Siemsen, pédagogue et auteur pour la jeunesse appartenant au courant socialiste du mouvement ouvrier ; elle trouve l’exposition beaucoup trop partielle et partiale et estime qu’elle aurait tout aussi bien pu se dérouler en 1912 qu’en 1947. L’exposition est jugée belle, émouvante même, mais totalement insuffisante : rien n’apparaît de l’expérience de la guerre, des souffrances, du quotidien des enfants. Les livres de Lisa Tetzner4 ou de Kurt Held5, par exemple, n’y figurent pas. De fait, l’immédiat après-guerre est aussi d’emblée prise dans l’émergence de la Guerre froide ; la littérature pour la jeunesse n’échappe pas à ces enjeux politiques et idéologiques d’autant plus cruciaux qu’ils conduisent à la partition de l’Allemagne en 1949.

  • 6 Nom donné à un courant littéraire apparu après la Seconde Guerre mondiale et rassemblant des récits (...)
  • 7 Voir Reiner Wild (Hrsg.), Geschichte der deutschen Kinder- und Jugendliteratur, Stuttgart, Metzler, (...)

3Si Erich Kästner continue de prôner une littérature qui porte des valeurs telles que l’amitié, la liberté, le souvenir, l’imagination, l’humour et entend déblayer les « gravats » de la conscience (en référence aux décombres et aux ruines réelles des villes allemandes), la plupart des auteurs de l’après-guerre s’attachent à promouvoir la nature, la famille, des valeurs morales positives adaptées à l’âge des lecteurs, une lecture sans aucune fonction critique et plutôt conçue comme hygiénique et saine, destinée à protéger la jeunesse. La République fédérale ne connaît pas de « Trümmerliteratur6 » (« littérature de ruines ») pour la jeunesse et le silence est fait sur le passé national-socialiste, les persécutions, l’exil. Le présent à construire est considéré comme primordial par rapport au passé, comme si les événements qui se sont déroulés entre 1933 et 1945 étaient une histoire sans peuple, sans parents, sans enseignants, sans voisins. Les jeunes lecteurs deviennent membres d’un peuple sans histoire7. La littérature pour la jeunesse de la République de Weimar et ses innovations esthétiques, littéraires et idéologiques semblent oubliées au cours des années 1950, en particulier dans les livres destinées aux filles, où la continuité avec la période nazie et le traditionalisme restent prégnants.

  • 8 Voir Rudolf Wolff, Astrid Lindgren. Rezeption in der Bundesrepublik, Bonn, 1986, p.11. Voir égaleme (...)
  • 9 Lisa Tetzner, « Liebeserklärung an Pippi », in Jugendschriften-Warte 11, 1953, p.74.
  • 10 Voir Cécile Boulaire, « Robert Delpire, éditeur d’albums », Strenæ [En ligne], 1 | 2010, mis en lig (...)
  • 11 Cécile Boulaire, https://album50.hypotheses.org/58

4C’est dans ce contexte qu’apparaît en Allemagne une héroïne venue de Suède et qui pourrait être qualifiée de (pré)révolutionnaire. Pippi Langstrumpf paraît en allemand en 1949 chez l’éditeur hambourgeois Friedrich Oetinger. Les deux autres tomes suivent rapidement, en 1950 et 1951. Les parents et les pédagogues, en particulier, font montre d’une grande méfiance à l’égard d’une héroïne que les enfants, eux, adoptent immédiatement, comme le montre le succès que connaît le livre en librairie. On redoute une influence néfaste de cette fillette si peu conventionnelle, qui met en péril une vision très conservatrice de la femme, présente dans les discours scolaires jusque dans les années 1960. Dans l’Allemagne de la fin des années 1940, Pippi est perçue une provocation. Ce sont les critiques littéraires qui vont rapidement balayer ces préjugés, en prouver les limites et l’absence de fondement. Ils montrent que, loin de perturber les enfants, l’imaginaire créé par Astrid Lindgren est apte à prendre en compte leur capacité et leur besoin de se construire, par la fiction, des espaces de liberté8. Le critique Richard Bamberg va même jusqu’à parler d’une vertu thérapeutique de Pippi, puisque l’imaginaire et le rêve permettent à l’enfant de modifier tout ce qu’il souhaite dans le réel et de le rendre conforme à ses souhaits : par la lecture d’un récit tel que celui d’Astrid Lindgren, l’enfant ne fuit pas le réel mais il devient capable de le transformer par la force de l’imagination. En 1953, l’écrivain pour la jeunesse Lisa Tetzner défend également Pippi en qualifiant le récit d’Astrid Lindgren de « Märchen des heutigen Alltags9 », de « conte de la vie quotidienne d’aujourd’hui » : sa conviction contribue à transformer la réception du récit. Les critiques savent reconnaître les qualités littéraires du texte, sa prose rythmée, son vocabulaire à hauteur d’enfant, ses dialogues aux réparties promptes et énergiques, sa langue créative. Pippi Langstrumpf met aussi en scène les plaisirs de la culture enfantine : le cirque, la fête foraine, la robinsonnade, la chasse au trésor, le gâteau des jours de fête. Dans son roman, Astrid Lindgren dessine un autre ordre que celui tracé par l’autorité des adultes, moins un chaos dépourvu de sens qu’une nouvelle façon de penser l’enfance, hors des cadres autoritaires, comme une sorte de manifeste des droits de l’enfant. Cette force de l’imagination, du jeu et de la liberté prépare en quelque sorte le terrain pour une littérature laissant plus libre cours à la fantaisie et à l’imagination et à la critique du moralisme et qui s’affirme à la fin des années 1950 et au début des années 1960. En 1958, Reiner Zimnik publie Die Trommler für eine bessere Zeit (traduit en français sous le titre Les Tambours et paru chez l’éditeur Robert Delpire dès 195910), fable qui « dénonce la sourde transformation de ces individus non-conformistes, désireux de rompre la monotonie du quotidien pour inventer une « vie meilleure », en horde déshumanisée qui dévaste tout sur son passage11. » Trois écrivains sont considérés comme les principaux auteurs de cette transformation progressive de la littérature pour la jeunesse en Allemagne : Otfried Preußler, James Krüss et Michael Ende sont les figures émergentes de nouveaux courants qui traversent la création romanesque et graphique à l’aube de la révolution de 1968.

Des innovations avant la révolution

  • 12 Walter Benjamin, « Le Conteur. Réflexions sur l’oeuvre de Nicolas Leskov » traduit par Pierre Rusch (...)

5Otfried Preußler (1923-2013) appartient à une nouvelle génération d'auteurs qui étaient enfants, adolescents voire jeunes soldats sous le nazisme. Il apporte un ton nouveau dans la littérature pour la jeunesse, empreint de merveilleux fantastique et de comique. Après avoir commencé sa carrière littéraire en écrivant des pièces radiophoniques pour enfants, il publie en 1956 Der kleine Wassermann, aussitôt récompensé, puis Die kleine Hexe (1957), Der Räuber Hotzenplotz (1963), Das kleine Gespenst (1967). Le réalisme et l’engagement politique n’ont pas à proprement parler leur place dans les livres de Preußler, qui s’intéresse bien davantage à conjuguer humanisme et merveilleux dans des histoires au cadre et aux personnages relativement traditionnels : l’univers des contes fantastiques côtoie celui du théâtre de marionnettes (Der Räuber Hotzenplotz) sans aucunement prétendre refléter les conflits sociaux ou les problèmes politiques. Néanmoins, l’écriture de Preußler, enseignant et conteur, est moins traditionnelle que ses récits : elle est ponctuée de marques d’oralité, d’effets sonores et de rimes, de répétitions et d’énumérations. A défaut de s’intéresser aux enjeux du monde contemporain, les récits de Preussler présentent une voix originale qui s’attache sans didactisme mais avec une grande sensibilité à séduire les oreilles des jeunes lecteurs, nouvel avatar de la figure du « conteur » ou du « raconteur » (« Erzähler ») théorisée par Walter Benjamin12 en 1936.

6James Krüss (1926-1997) est un autre représentant de ce nouvel art de conter et d’écrire pour les enfants, avec une tendance à la poésie plus marquée que chez Preußler. Les textes de Krüss partent du principe d’une autonomisation de l’enfant, d’une distance par rapport au monde des adultes, qui va conduire au développement de traits anti-autoritaires, contre la littérature moralisatrice et éducative des époques précédentes. Krüss pose le postulat d'un droit à l’imagination (« Recht auf Phantasie »), quel que soit le type de récit, merveilleux ou réaliste. Il situe le cadre de son recueil Der Leuchtturm auf den Hummerklippen (1956) à la fin de la Seconde Guerre mondiale, au lendemain du bombardement d'Helgoland, ce qui est alors très inhabituel pour un livre pour enfants : face à la fureur du monde, le phare est un refuge où naissent des histoires merveilleuses. Mein Urgrossvater und ich (1959) décrit la relation entre un arrière-petit-fils et son aïeul. L'écart extrême des générations permet d'écarter les parents, rattachés au nazisme, mais aussi les grands-parents, appartenant à la génération qui, dans les années 1920, a participé peu ou prou à la montée en puissance du nazisme : l'arrière-grand-père renvoie à un passé encore antérieur, jugé moins compromettant et moins coupable. L’œuvre de Krüss est récompensée par la médaille Hans Christian Andersen en 1968.

  • 13 Selon la traduction de Jean-Claude Mourlevat, Bayard, 2004.
  • 14 Le royaume est ensuite renommé « Mandala » en raison des possibles clichés, même si cette Chine ima (...)
  • 15 Michael Ende se situerait ici dans la mouvance des pédagogies alternatives telles celle des écoles (...)

7Michael Ende (1929-1995) enfin, avec Jim Knopf und Lukas der Lokomotivführer et Jim Knopf und die Wilde 13 (1960 et 1962), atteint un sommet dans la littérature ouest-allemande de l’époque et dans le courant d'une autonomie de l'enfance, dans un style proche du « nonsense » anglais. L’autorité politique y est particulièrement remise en question : sur la minuscule île de Lummerland, où vivent Lukas, le conducteur de locomotive, Jim, un jeune garçon noir livré par erreur alors qu’il n’était qu’un nourrisson, et deux autres habitants, règne le roi Alfons « der Viertel-vor-Zwölfte » (Alphonse Midi-Moins-le-Quart13), dont la principale occupation est de téléphoner, simplement vêtu d’une robe de chambre. Au royaume de « Chine14 », Lukas et Jim déjouent le complot des perfides « bonzes en chef » puis parviennent à délivrer la princesse Li Si des griffes de Madame Mahlzahn, qui dirige au pays des dragons une école pour enfants humains et use de méthodes pédagogiques d’une effrayante sévérité. Les autorités politiques et scolaires, absurdes ou cruelles, sont vaincues par Jim qui, au terme du second tome, est désigné capitaine d’une bande de pirates. Jim ne fréquente aucune école mais il apprend par l’expérience, la découverte, la curiosité et la confiance en lui15. Il faut ajouter à cette critique de l’autorité un engagement anti-raciste : le héros, Jim, est un enfant noir qui sauve une princesse asiatique. Il croise sur sa route le malheureux Nepomuk, demi-dragon rejeté par les dragons purs-sang (sa mère était une hippopotame), craintif mais généreux et attachant. Si Ende ne prétend pas proposer de récits réalistes, des prises de position idéologiques y apparaissent plus nettement que dans les récits de Preußler ou dans ceux de Krüss, ce dernier étant davantage tourné vers la question de la mémoire.

8Ainsi, avec la fin de l'ère Adenauer (le vieux chancelier quitte le pouvoir en 1963 et meurt en 1967), la littérature pour la jeunesse se libère peu à peu d'une vision du monde et de la société très conservatrice : se fait jour une certaine libéralisation, voire une remise en cause du système des valeurs, en particulier dans les ouvrages de Michael Ende. La révolution de la littérature de jeunesse allemande est donc précédée d’une période de transformation progressive et qui construit un paysage éditorial nouveau, à l’aube de la révolution de 1968.

  • 16 L’Institut für Jugendbuchforschung, fondé à l’Université de Francfort en 1963, participe d’un renou (...)
  • 17 Ce roman est traduit par Edith Vincent et publié en 1966 chez Rageot sous le titre Tim Souliers-de- (...)
  • 18 Citons notamment : Fliegende Feuer im Jahr „Zwei Rohr“ (1963), Ein heißer Wind ging über Babylon (1 (...)
  • 19 Citons Streiter, Erben, Hüter. Vom Kampf um die Menschenrechte (1964), Der gewaltlose Aufstand. Mar (...)
  • 20 Damals war es Friedrich (1961) : la traduction en sera évoquée ultérieurement ; Wir waren dabei (19 (...)

9La production romanesque de la fin des années 1960 ne saurait en effet se résumer aux seules œuvres de Preußler, Krüss et Ende. Ursula Wölfel (1922-2014), qui a travaillé aux côtés de Klaus Doderer au début des années 1960 pour créer l’Institut für Jugendbuchforschung à l’Université de Francfort16, propose une approche plus didactique : elle compose des récits destinés à des manuels scolaires, des histoires courtes et amusantes et son écriture s’inspire de son expérience d’enseignante. Son roman Feuerschuh und Windsandale (1961) reçoit en 1962 le Deutscher Jugendliteraturpreis17. En 1968, elle a déjà publié une dizaine de romans et près d’une cinquantaine de récits plus courts, dont Siebenundzwanzig Suppengeschichten et Achtundzwanzig Lachgeschichten. Grâce à Ingeborg Bayer18 (1927-2017) ou à Hans Georg Noack (1926-2005), le roman pour la jeunesse développe des thématiques plus sociales et psychologiques. Les romans d’Hans Georg Noack parlent du racisme, du chômage, de la situation des travailleurs immigrés en Allemagne et l’écrivain entend inciter ses lecteurs à prendre une part active à la vie sociale et politique19. Avec des auteurs comme Hans Peter Richter20 (1925-1993) (Damals war es Friedrich, 1961) ou Willi Fährmann (1929-2017), l’histoire de la Seconde Guerre mondiale et la persécution dont ont été victimes les Juifs entrent progressivement en littérature. Das Jahr der Wölfe (1962) de Willi Fährmann raconte l’histoire d’une famille de Prusse orientale qui fuit l’avancée de l’Armée rouge à la fin de la Seconde Guerre mondiale. En 1968, avec Es geschah im Nachbarhaus, Fährmann s’inspire de faits réels pour écrire l’histoire d’un commerçant juif accusé, au XIXe siècle, du meurtre d’un enfant et qui doit affronter préjugés et attaques insurmontables de la population chrétienne.

  • 21 Non traduit en français.
  • 22 Cet album est publié en France en 1969 par le Club français du livre, avec la traduction de Marthe (...)
  • 23 Lieselotte Schwarz illustre notamment le conte des frères Grimm Dornröschen (1967) et publie en 196 (...)

10Les innovations sont plus sensibles encore du côté de l’album ou du livre d’images (« Bilderbuch »). À la fin des années 1960 apparaît une nouvelle génération d’artistes illustrateurs dont l’un des plus marquants est sans doute Janosch (né en 1931) dont le premier livre pour enfants, Die Geschichte von Valek dem Pferd21, paraît en 1960. Ali Mitgutsch (né en 1935) reçoit en 1969 le Deutscher Jugendbuchpreis pour Rundherum in meiner Stadt (1968), considéré comme le tout premier « Wimmelbuch » allemand, genre particulier d’album sans texte où les images fourmillent (« wimmeln ») de détails à observer. Pour ne mentionner que les artistes primés, il convient aussi de citer Der goldene Vogel (1966) de Lilo Fromm (née en 1928), qui reçoit le Deutscher Jugendbuchpreis en 1967 pour cet album, récompensé également à la Biennale de Bratislava, illustrant un conte des frères Grimm22. Pour citer une autre artiste sans doute peu connue en France, on peut évoquer les compositions de Lieselotte Schwarz (1930-2003) aux couleurs franches et aux formes géométriques généreuses, qui rappellent l’œuvre de Marc Chagall23.

Vers une révolution plus radicale et « anti-autoritaire »

11En 1968, la place semble donc prête pour accueillir une nouvelle génération d’auteurs qui veulent participer à la réforme de la société, en remettant en question les valeurs traditionnelles et en attirant l’attention des jeunes lecteurs sur des problèmes sociaux contemporains. Ils entendent également aborder la question encore douloureuse du passé récent de l’Allemagne. Or ce courant, plus réformiste que révolutionnaire, voit rapidement apparaître une critique et une remise en question bien plus profondes de la littérature de jeunesse.

  • 24 Hans-Heino Ewers, « Themen-, Formen- und Funktionswandel der westdeutschen Kinderliteratur seit End (...)
  • 25 Heinrich Hoffmann, Der Struwwelpeter oder lustige Geschichten und drollige Bilder, 1845.
  • 26 Marie-Hélène Quéval, « Struwwelpeter et Anti-Struwwelpeter. La bande dessinée au service des idéolo (...)

12En effet, avec 1968, les volontés révolutionnaires se cristallisent autour d’un courant qualifié d’anti-autoritaire, prônant l’émancipation des enfants. Il s’agit de les considérer non pas comme des enfants mais comme des êtres autonomes, des sujets à considérer au même titre que les adultes. À cette conception de l’enfant doivent répondre des formes littéraires rompant avec le passé. Ces conceptions nouvelles de l’écriture pour la jeunesse reposent ainsi une critique radicale de la production littéraire des années 1950 et 1960. En effet, dans un système jugé répressif pour la liberté de l’enfant, la littérature pour la jeunesse n’aurait pas joué un rôle d’émancipation mais plutôt de compensation, d’indemnité ou de palliatif ; en ce sens, comme le souligne Hans-Heino Ewers, la littérature pour la jeunesse est accusée d’être partie prenante de ce système répressif24. Une certaine partie de la critique de gauche se fait ainsi résolument radicale et entend rompre avec le passé. L’une des œuvres les plus représentatives et les plus célèbres du courant anti-autoritaire est Der Antistruwwelpeter (1969) de Friedrich K. Waechter. Prenant le contre-pied du classique de Heinrich Hoffmann25, Friedrich K. Waechter, dessinateur et caricaturiste d’extrême-gauche, en livre une version qui dénonce la famille, l’école et toutes les institutions qui encadrent l’enfant, accusées de brider « l’imagination et la créativité naturelles à l’homme. Une comparaison des deux œuvres fait apparaître le renversement des valeurs qui a eu lieu dans la deuxième moitié du XXe siècle en Allemagne, le principe d’autorité étant remplacé par les droits de l’imagination créatrice26. » Le choix de la caricature permet à Waechter de présenter des adultes ridicules et grotesques et de renverser la perspective : le point de vue surplombant et dominateur de l’adulte éducateur est renversé au profit de celui de l’enfant :

  • 27 Marie-Hélène Quéval, art. cit.

son regard, dirigé du bas vers le haut, provoque la déformation [du] corps [des adultes]. C’est la perspective du gnome, ou plutôt du lutin dont la plaisante candeur fera surgir le bien dissimulé derrière la carapace des mauvaises habitudes. […] Waechter choisit lui aussi le style de la caricature pour transmettre un idéal qu’il situe hors de la réalité quotidienne. À la rigidité, il oppose la mobilité, à l’uniforme la nudité, à la soumission l’autonomie de la pensée, à la discipline scolaire le jeu sans contrainte27.

  • 28 Hans-Heino Ewers, art. cit., p.23.

Cette nouvelle approche de la littérature de jeunesse entend donc sortir l’enfant des mondes exotiques de l’aventure et du jeu pour le ramener dans la vie quotidienne, marquée par des interactions et des oppositions entre enfants et adultes. La nouvelle littérature pour enfants ne repose pas sur des rapports de domination où l’enfant, conduit dans un monde merveilleux, serait incapable d’agir, mais sur un principe fondamental d’égalité entre enfants et adultes28.

  • 29 Andrea Weinmann, art. cit., p.160.
  • 30 Voir Birgit Dankert, Michael Ende. Gefangen in Phantásien, Lambert Schneider Verlag/WBG, 2016.

13Entre cette nouvelle vision de la littérature de jeunesse, pensée comme révolutionnaire, et la création littéraire qui précède immédiatement 1968 se crée un inévitable conflit de générations. Otfried Preußler et Michael Ende, qui ont pourtant contribué à modifier les contours de la littérature pour la jeunesse des années 1950 et 1960, sont l’objet de critiques virulentes de la part de la « Nouvelle Gauche » au lendemain de 1968 et au tout début des années 1970. « La pression de la critique de gauche sur les auteurs établis était considérable29 », note Andrea Weinmann. Le « Eskapismus-Debatte » entraîne de virulentes critiques contre des auteurs accusés d’inciter les enfants à « s’échapper » de la réalité. Michael Ende en particulier est accusé de fournir aux jeunes lecteurs une littérature qui, tel l’opium, endort leur sens critique et leur rapport au réel. La controverse est si violente que Michael Ende choisit en 1971 de quitter l’Allemagne pour s’installer en Italie, pays qu’il juge bien plus libéral et tolérant, et où il écrit Momo (1973) puis Die unendliche Geschichte (1979), ses romans les plus célèbres30.

  • 31 In Reiner Wild (dir.), op. cit., p.327.
  • 32 Andrea Weinmann, art. cit., p.161.
  • 33 Langue slave, reconnue comme une langue régionale d’Allemagne, parlée en Lusace, région située au n (...)

14Selon Winfred Kaminski, l’émergence de la littérature anti-autoritaire a des conséquences pour les auteurs considérés comme établis et elle les contraint à repenser et modifier leurs façons d’écrire31. Andrea Weinmann32 cite l’exemple de l’album Die dumme Augustine de Otfried Preußler (illustré par Herbert Lentz), qui paraît en 1972 : Preußler y traite de l’émancipation féminine, thème exceptionnel et marginal dans l’ensemble de son œuvre. On pourrait considérer que Krabat, roman initiatique pour adolescents paru en 1973, fort différent des textes précédemment écrit par Preußler, se situe dans une démarche de renouvellement de l’écriture et de l’imaginaire. Le statut particulier de Krabat dans l’ensemble de l’œuvre de Preußler pourrait être compris comme le résultat d’une réponse littéraire et non pamphlétaire de Preußler à ses détracteurs. Sans céder à des injonctions qui ne correspondent pas à ses prises de position politiques, Preußler propose néanmoins avec Krabat un récit qui rompt avec tous ses romans précédents en s’orientant vers l’écriture pour adolescents. Krabat est un récit merveilleux qui emprunte à l’univers des contes et au fantastique mais aussi, fait plus nouveau, à la tradition romantique du roman d’apprentissage et au roman historique. Inspiré du folklore sorabe33, le roman trace le parcours initiatique d’un orphelin de 14 ans devenu apprenti chez un maître meunier également expert en magie noire. La toile de fond du roman évoque également les guerres qui ravagent l’Europe au début du XVIIIe siècle, la misère paysanne et l’errance des enfants : autant d’éléments qui permettent de tracer un parallèle entre la fiction fantastico-historique et le passé récent de l’Allemagne, dont Preußler, né en 1923 a été l’un des acteurs : « Krabat, écrit Preußler, est […] mon histoire, l’histoire de ma génération et celle de tous ces jeunes gens qui entrent en contact avec le pouvoir et ses tentations et finissent par s’y empêtrer. » Réponses aux critiques tout autant que réponses à une histoire individuelle et collective, l’écriture et la genèse de Krabat sont sans doute indissociables des remises en cause qui, dans le sillage de la révolution de 1968, bouleversent la littérature allemande pour la jeunesse.

15Ursula Wölfel a également été conduite à trouver de nouvelles formes d’écriture : la rédaction de son roman Die grauen und die grünen Felder (qui paraît en 1970) témoigne d’un tournant majeur dans son approche de la littérature pour la jeunesse, selon l’analyse qu’elle en fournit elle-même : avec ce roman, conçu en 1968, elle veut désormais écrire de « vraies » histoires et collecte pour ce faire des témoignages d’hommes et de femmes de son entourage. Elle reçoit ainsi le témoignage d’une amie qui a soigné des enfants gravement blessés pendant la guerre du Vietnam et s’interroge : peut-elle tout raconter aux enfants ? Certainement, répond-elle, puisque ce sont des enfants qui ont vécu ces épreuves les plus dramatiques. Elle choisit la forme brève du récit court, un ton laconique et une certaine distance, laissant parfois des fins ouvertes. Malte Dahrendorf voit dans ce recueil

  • 34 Malte Dahrendorf, « Laudatio zum Sonderpreis des Deutschen Jugendliteraturpreises », 1991 : « eine (...)

une pétillante ouverture dans la littérature d’enfance et de jeunesse vers la critique sociale, l’approche des problèmes, la représentation des conflits. Presque tous les tabous que connaissait jusqu’alors la littérature pour les enfants se brisèrent d’un seul coup. Ce livre donna à la fois les thématiques et les mots clés de la littérature pour la jeunesse des années 1970, orientée vers la représentation des problèmes et l’émancipation : préjugés et minorités, racisme, nouvelles formes du vivre ensemble et de la famille, discrimination sociale34.

  • 35 Citons Die feuerrote Friederike (1970, Friederike aux cheveux flamboyants) dont la chevelure n’est (...)
  • 36 Son tout premier livre pour la jeunesse, Der tätowierte Hund, paraît en 1968.
  • 37 Voir Reiner Wild (dir.), op. cit., p.327.

16Le courant anti-autoritaire conduit enfin à l’émergence de nouvelles formes d’imaginaire comme chez Christine Nöstlinger35 ou Paul Maar36, une sorte d’imaginaire davantage lié aux questions sociales37. Elle fait naître aussi une nouvelle littérature réaliste, comme dans les textes de Peter Härtling, Gudrun Pausewang, Mirjam Pressler, auteurs qui deviendront des références à partir de la fin des années 1970 et des années 1980.

Conclusion

  • 38 Pour de plus amples précisions sur les livres d’images, je renvoie à l’étude de Bettina Kümmerling- (...)
  • 39 Les Douze corbeaux, conte fantastique, traduction et adaptation d’Évelyne Jeitl, illustrations de M (...)

17La littérature allemande pour la jeunesse connaît en 1968 un indéniable tournant. À cette date se cristallisent des transformations qui ne surgissent néanmoins pas ex nihilo : les mutations de la création littéraire pour enfants et adolescents sont aussi le fruit d’une évolution plus lente et plus progressive, plus réformiste sans doute que révolutionnaire. La césure est en revanche plus radicale du côté de la critique de l’extrême gauche, qui entend jeter à bas les anciens modèles pour proposer à la jeunesse des thématiques et des formes neuves38. La critique, pour radicale qu’elle soit, n’en est pas moins constructive et elle incite aussi les écrivains à réfléchir sur leur création et elle fait émerger une nouvelle génération d’auteurs qui deviendront des références au cours des années 1980. Le chaos dont James Krüss se fait le défenseur n’est donc pas un désordre total : le nombre relativement réduit de traductions françaises conduit néanmoins à une perception très restreinte de cette dynamique pourtant bien réelle. Si Krabat a été adapté et traduit à trois reprises39, nombre de romans et d’albums ont été et demeurent ignorés du public français, des éditeurs et de la critique. Un demi-siècle après 1968 et 55 ans après le traité de l’Elysée, les échanges littéraires et les traductions entre la France et l’Allemagne ont encore de vastes perspectives à explorer.

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Notes

1 Je renvoie à l’introduction de l’article d’Andrea Weinmann, « Literaturgeschichte als Generationgeschichte. Ein Rückblick auf die kinderliterarische Wende um 1970 », in Kinder-und Jugendliteraturforschung international. Ansichten und Aussichten. Festschrift für Hans-Heino Ewers, Gabrielle von Glasenapp, Ute Dettmar und Bernd Dolle-Weinkauf (Hrsg.), Frankfurt-am-Main, Peter Lang, 2014, p.149-166.

2 James Krüss, Naivität und Kunstverstand. Gedanken zur Kinderliteratur, Weinheim, Berlin, Basel, Verlag Julius Beltz, 1969.

3 Cité par Reiner Wild (Hrsg.), Geschichte der deutschen Kinder- und Jugendliteratur, Stuttgart, Metzler, 2002 : « Neubeginn, Restauration und Antiautoritärer Aufbruch », p.300.

4 Lisa Tetzner (1894-1963) est notamment l’auteur d’une vaste fresque romanesque, Die Kinder aus Nummer 67, seule œuvre à avoir été écrite avant, pendant et après le nazisme.

5 Kurt Held (1897-1959) publie en 1941 Die rote Zora und ihre Bande, qui devient ensuite un classique de la littérature de jeunesse allemande.

6 Nom donné à un courant littéraire apparu après la Seconde Guerre mondiale et rassemblant des récits de guerre et des récits de captivité, cherchant à s’opposer à la littérature nazie comme à la littérature d’exil. Résolument moderne dans ses thématiques comme dans ses formes, le mouvement disparaît avec la reconstruction des villes et l’oubli des horreurs de la guerre.

7 Voir Reiner Wild (Hrsg.), Geschichte der deutschen Kinder- und Jugendliteratur, Stuttgart, Metzler, 2002 : « Neubeginn, Restauration und Antiautoritärer Aufbruch », p.302.

8 Voir Rudolf Wolff, Astrid Lindgren. Rezeption in der Bundesrepublik, Bonn, 1986, p.11. Voir également Astrid Surmatz, Pippi Långstrump als Paradigma. Die deutsche Rezeption Astrid Lindgrens und ihr internationaler Kontext, Francke, Tübingen, Basel, 2005 ainsi que Beyond Pippi Longstocking: Intermedial and International Approaches to Astrid Lindgren's Work, sous la direction de Bettina Kümmerling-Meibauer et Astrid Surmatz, New York, Routledge, 2011.

9 Lisa Tetzner, « Liebeserklärung an Pippi », in Jugendschriften-Warte 11, 1953, p.74.

10 Voir Cécile Boulaire, « Robert Delpire, éditeur d’albums », Strenæ [En ligne], 1 | 2010, mis en ligne le 14 juin 2010. URL : http://strenae.revues.org/68 ; DOI : 10.4000/strenae.68

11 Cécile Boulaire, https://album50.hypotheses.org/58

12 Walter Benjamin, « Le Conteur. Réflexions sur l’oeuvre de Nicolas Leskov » traduit par Pierre Rusch, Oeuvres III, Paris, Gallimard, 2000, p. 114-151.

13 Selon la traduction de Jean-Claude Mourlevat, Bayard, 2004.

14 Le royaume est ensuite renommé « Mandala » en raison des possibles clichés, même si cette Chine imaginaire est un lieu mythique et merveilleux et ne fait aucunement référence à une Chine réelle ni même fantasmée.

15 Michael Ende se situerait ici dans la mouvance des pédagogies alternatives telles celle des écoles Steiner-Waldorf, qui connaissent un nouvel élan dans les années 1960.

16 L’Institut für Jugendbuchforschung, fondé à l’Université de Francfort en 1963, participe d’un renouveau des recherches sur la littérature de jeunesse, notamment dans une perspective didactique.

17 Ce roman est traduit par Edith Vincent et publié en 1966 chez Rageot sous le titre Tim Souliers-de-feu. Ce sont sans doute les distinctions reçues par ce roman qui en expliquent la traduction : Tatiana Rageot est en effet informée par l’éditeur allemand (Hoch-Verlag Gmbh., Düsseldorf) que le roman d’Ursula Wölfel a reçu le Deutscher Jugendbuchpreis en 1962 et qu’il figure sur la liste des ouvrages retenus pour le prix Hans-Christian Andersen (courrier adressé par l’éditeur allemand (Hoch-Verlag Gmbh., Düsseldorf) à Tatiana Rageot, 31 juillet 1964, Archives Rageot, Fonds historique de la bibliothèque de l’Heure Joyeuse).

18 Citons notamment : Fliegende Feuer im Jahr „Zwei Rohr“ (1963), Ein heißer Wind ging über Babylon (1965), Der Teufelskreis (1968), Julia und die wilde Stute (1969); aucun de ces romans n’est traduit en français.

19 Citons Streiter, Erben, Hüter. Vom Kampf um die Menschenrechte (1964), Der gewaltlose Aufstand. Martin Luther King und der Kampf der amerikanischen Neger (1965), traduit en français par Fernand Lambert : L'Insurrection pacifique de Martin Luther King, le combat de Martin Luther King pour la liberté et les droits des Noirs américains (Éditions Alsatia, 1967) ou encore Die Milchbar zur bunten Kuh (1966).

20 Damals war es Friedrich (1961) : la traduction en sera évoquée ultérieurement ; Wir waren dabei (1962), traduit par Alain Royer en 1980 sous le titre J’avais deux camarades : dix années dans les Jeunesses hitlériennes ; Die Zeit der jungen Soldaten (1967), non traduit en français.

21 Non traduit en français.

22 Cet album est publié en France en 1969 par le Club français du livre, avec la traduction de Marthe Robert

23 Lieselotte Schwarz illustre notamment le conte des frères Grimm Dornröschen (1967) et publie en 1968 Ich hab ein wunderliebes Kind, dans un format leporello très original.

24 Hans-Heino Ewers, « Themen-, Formen- und Funktionswandel der westdeutschen Kinderliteratur seit Ende der 1960er, Anfang der 1970er Jahre », in Literaturanpsruch und Unterhaltungsabischt. Studien zur Entwicklung der Kinder- und Jugendliteratur im späten 20. und frühen 21. Jahrhundert, Frankfurt-am-Main, Peter Lang, 2013, p.22-23.

25 Heinrich Hoffmann, Der Struwwelpeter oder lustige Geschichten und drollige Bilder, 1845.

26 Marie-Hélène Quéval, « Struwwelpeter et Anti-Struwwelpeter. La bande dessinée au service des idéologies », Germanica [En ligne], 47 | 2010, mis en ligne le 01 décembre 2012. URL : http://germanica.revues.org/1124 ; DOI : 10.4000/germanica.1124

27 Marie-Hélène Quéval, art. cit.

28 Hans-Heino Ewers, art. cit., p.23.

29 Andrea Weinmann, art. cit., p.160.

30 Voir Birgit Dankert, Michael Ende. Gefangen in Phantásien, Lambert Schneider Verlag/WBG, 2016.

31 In Reiner Wild (dir.), op. cit., p.327.

32 Andrea Weinmann, art. cit., p.161.

33 Langue slave, reconnue comme une langue régionale d’Allemagne, parlée en Lusace, région située au nord-est de l’Allemagne, aux confins de la Saxe, de la Silésie (Pologne) et de la Bohème (République tchèque).

34 Malte Dahrendorf, « Laudatio zum Sonderpreis des Deutschen Jugendliteraturpreises », 1991 : « eine brausende Öffnung der Kinder- und Jugendliteratur zu Sozialkritik, Problembezug, Konfliktdarstellung; fast alle Tabus der bisherigen Kinderliteratur gingen hier in einem einzigen Anlauf zu Bruch. Zugleich gab das Buch thematisch die Stichworte für die emanzipatorisch-problemorientierte Kinder- und Jugendliteratur der 70erJahre: Vorurteile und Minderheiten, Rassismus, neue Formen des Zusammenlebens und der Familie, soziale Benachteiligung. » (je traduis).

35 Citons Die feuerrote Friederike (1970, Friederike aux cheveux flamboyants) dont la chevelure n’est pas sans évoquer celle de Zora la rousse (roman de Kurt Held, 1942) ou celle de Pippi Langstrumpf, ou Wir pfeifen auf den Gurkenkönig (1972, tr. Le Roi des concombres, 1982), qui deviendra un classique.

36 Son tout premier livre pour la jeunesse, Der tätowierte Hund, paraît en 1968.

37 Voir Reiner Wild (dir.), op. cit., p.327.

38 Pour de plus amples précisions sur les livres d’images, je renvoie à l’étude de Bettina Kümmerling-Meibauer, « A New Wind Blowing from the Left: The Surge of Anti-Authoritarian Picturebooks in Germany after 1968 », publié sur le carnet de recherche de Sophie Heywood, The children's '68. An international research network on the impact of the '68 years on cultures of childhood: https://children68.hypotheses.org/334

39 Les Douze corbeaux, conte fantastique, traduction et adaptation d’Évelyne Jeitl, illustrations de Michel Gourlier, Paris, Alsatia, 1973 ; Le Maître des corbeaux, trad. de l’allemand par Marie-José Lamorlette, ill., Christophe Rouil, Paris, Hachette jeunesse, 1994 ; Krabat, traduit de l’allemand par Jean-Claude Mourlevat, Montrouge, Bayard jeunesse, 2009.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Mathilde Lévêque, « « Plädoyer für das Chaos » ? Les mutations de la littérature allemande pour la jeunesse autour de 1968 »Strenæ [En ligne], 13 | 2018, mis en ligne le 15 mai 2018, consulté le 11 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/strenae/1827 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/strenae.1827

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Auteur

Mathilde Lévêque

Université Paris13 - Sorbonne Paris Cité

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