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Dossier thématique

Fabriquer un escalier : « La Scala d’Oro », une collection pour l’enfance en Italie dans les années 30

Making a staircase: "La Scala d'Oro," a Children’s Collection in Italy in the 1930s
Elisa Rebellato

Résumés

« La Scala d’Oro » est l’une des plus célèbres collections italiennes de livres pour l’enfance. Créée à l’initiative de deux intellectuels, Fernando Palazzi et Vincenzo Errante qui se chargèrent du choix des textes et des auteurs, elle fut publiée à Turin par la maison UTET entre 1932 et 1936 ; elle totalisa 93 volumes divisés en huit séries, chacune destinée à une tranche de lecteur d’âge croissant. Les archives de Fernando Palazzi et celles de quelques auteurs de la collection – tels Eugenio Treves et Marino Moretti - nous permettent de suivre en détail l’évolution de cet ambitieux projet éditorial. Elles révèlent en outre le contrôle exercé sur les auteurs par les directeurs de collection et la part active qu’ils ont jouée dans la conception même des ouvrages.

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Texte intégral

1« La Scala d’Oro » est l’une des plus célèbres collections italiennes de livres pour l’enfance du vingtième siècle. Elle fut publiée à Turin par la maison Utet entre 1932 et 1936, en 93 volumes. Elle était divisée en huit séries, chacune destinée à une tranche d’âge entre 6 et 13 ans, de façon à offrir un parcours de lecture gradué à ses jeunes lecteurs. Trois types d’ouvrages étaient représentés : des classiques de tous les pays et de tous les temps, abrégés pour les plus jeunes ; venaient ensuite des romans pour l’enfance issus de la littérature étrangère ; enfin, les « opere originali istruttive », ouvrages didactiques qui devaient expliquer de manière simple différentes notions, de l’histoire à l’histoire de l’art, de la science à la géographie.

2La renommée de la collection tient à plusieurs facteurs. D’une part, sa longévité : la collection n’a cessé de s’étoffer et a connu de nombreuses réimpressions. À partir de 1959, elle a su se renouveler avec « La nuova Scala d’Oro », tandis que des réimpressions « nostalgiques » ont paru jusqu’aux années quatre-vingts. D’autre part, la collection s’est imposée dans l’imaginaire collectif par l’originalité de son projet. Celui-ci, conçu et mené par deux intellectuels, Fernando Palazzi et Vincenzo Errante, associait à la perfection textes et illustrations.

  • 1 Paola Pallottino, «Luci e ombre della Scala d'Oro. Meraviglie, curiosità e avventure della più famo (...)
  • 2 Antonio Faeti «L’oasi nel salotto, iconografia e industria culturale negli anni Trenta», dans Gli A (...)
  • 3 Giovanni Titta Rosa, «La Utet. Alla vigilia della consegna del “Libro d'Oro”», Giornale della Libre (...)

3Jusqu’à ce jour, les recherches menées sur cette collection ont pris pour axe d’étude des sujets exploitables grâce à la seule consultation des volumes : qu’il s’agisse d’identifier des illustrateurs et de procéder à une analyse d’images1 ou d’évaluer la dimension idéologique du projet, en particulier dans son rapport au fascisme2. À l’époque, les archives de la maison Utet n’avaient pu être d’aucun secours pour les chercheurs : l’entreprise ayant été bombardée durant la Seconde Guerre mondiale, de nombreux documents avaient disparu3. Aujourd’hui néanmoins, l’attention des institutions publiques et privées à l’égard des archives liées à la production éditoriale a augmenté ; en conséquence, il est possible de consulter de nouvelles sources.

  • 4 www.fondazionemondadori.it
  • 5 www.casamoretti.it
  • 6 http://www.asvercelli.beniculturali.it/
  • 7 http://biblioteca.lett.unipmn.it/biblioteca/default.htm
  • 8 http://centromanoscritti.unipv.it/
  • 9 http://www.fondazioneisec.it/

4Les archives de Fernando Palazzi, l’un des deux directeurs de la collection, sont conservées par la Fondazione Arnoldo e Alberto Mondadori (dorénavant FAAM) à Milan4. Par ailleurs, les archives de plusieurs collaborateurs sont dispersées dans plusieurs institutions : le poète Marino Moretti les a laissées, en même temps que sa maison, à sa ville, Cesenatico5 ; les archives du professeur Eugenio Treves se trouvent à l’Archivio di Stato de Vercelli6 et à la bibliothèque du Dipartimento di Studi Umanistici de l’Università del Piemonte Orientale7 ; les documents du prêtre Cesare Angelini sont conservés par le Centro di ricerca sulla tradizione manoscritta di autori moderni e contemporanei dell’Università degli Studi di Pavia8 ; l’Istituto per Storia dell’Età Contemporanea, à Sesto San Giovanni (Milan), a reçu les documents de Leo Pollini9. Enfin, l’Archivio Arnoldo Mondadori, auprès de la FAAM, dispose de deux fascicules aux noms d’Errante et de Palazzi, ceux-ci ayant également travaillé pour cet éditeur.

5La mise à disposition de ce matériel a permis d’entrer vraiment dans l’« atelier » de la collection, et de découvrir la méthode de travail suivie par les directeurs, à travers l’analyse de la correspondance avec les auteurs des textes et des illustrations. Le but était de vérifier la crédibilité de la prise de position catégorique de Palazzi :

  • 10 FAMM, Fondo Fernando Palazzi, dossier 7, fasc. 39, Fernando Palazzi à Domenico Capocaccia, 6 jullie (...)

Un véritable éditeur ne doit pas accepter les livres que les auteurs lui présentent, mais commander lui-même aux auteurs ce qui correspond a son projet éditorial. La Scala d'Oro a toujours suivi ce principe : parmi les centaines de manuscrits que nous ont soumis les auteurs, dont certains célèbres, nous n’en avons jamais accepté un seul; tous les volumes ont été écrits exprès pour nous, sur notre demande10.

  • 11 Enrico Decleva, Arnoldo Mondadori, Torino, Utet, 1993, p. 133-137 ; Elisa Rebellato, « Vincenzo Err (...)
  • 12 Monica Galfré, Il regime degli editori. Libri, scuola e fascismo, Roma-Bari, Laterza, 2005.

Au moment de la conception de la collection, Errante et Palazzi travaillaient pour Arnoldo Mondadori, dans le secteur du livre scolaire, mais ils n’étaient pas satisfaits du rôle qu’ils avaient dans l’organisation11. De plus, en 1930, l’introduction du livre d’État dans les écoles élémentaires risquait de fragiliser la production de Mondadori12. C’est pour ces raisons que les deux intellectuels imaginèrent une nouvelle collection de littérature pour l'enfance et l’offrirent à Mondadori qui ne la prit pas en considération. C’est Errante lui-même qui rappelle les faits à l’éditeur, deux ans après :

  • 13 FAAM, Fondo Arnoldo Mondadori editore, section Arnoldo Mondadori, fasc. Vincenzo Errante, Vincenzo (...)

Années 1929-1930. [...] Pendant ces deux ans, afin de faciliter notre promotion, je vous ai proposé à plusieurs reprises de commencer une Collection pour l’enfance, déjà conçue par Palazzi et moi dans le moindre détail. Vous m’avez assuré plusieurs fois que l’affaire démarrerait quand il y aurait des disponibilités financières. Mais on n’est jamais parvenu même à un commencement de discussion concrète13.

Selon ce témoignage, la collection était déjà conçue « dans le moindre détail » en 1930. L’année suivante, les deux hommes prennent contact avec la maison Utet, et le 21 novembre 1931 le contrat est signé entre Errante et Palazzi d’une part, et Carlo Verde et Giorgio Cavallotti pour l’éditeur d'autre part. Le sixième point du contrat explique très bien le rôle des directeurs :

  • 14 Une copie du contrat est conservée dans FAMM, Fondo Fernando Palazzi, dossier 11, fasc. 67 : « Comp (...)

Les deux directeurs sont chargés de préciser à chaque auteur ce qu’est sa tâche et comment l’accomplir, avec tant de détails que les auteurs seront comme guidés jusqu’à l'objectif fixé par un chemin sûr et bien tracé. Dans ce but, les deux directeurs rédigeront et transmettront pour chaque livre à la maison Utet un feuillet d’instructions prévu à cet effet. Ce feuillet sera joint par la Utet à la lettre d’engagement14.

Errante et Palazzi doivent donc « guider les auteurs jusqu’à l'objectif fixé par un chemin sûr et bien tracé ». Il ne faut pas leur laisser trop de liberté si l’on veut réaliser une collection cohérente.

Fig. 1 Déclaration d’intentions (Collection privée)

  • 15 Un exemple d’analyse de la déclaration d’intentions est celui de Frédéric Palierne, « La déclaratio (...)

6La structure générale de la collection est déjà bien définie quand les premiers ouvrages paraissent. Celle-ci est exposée dans les quatre dernières pages, imprimées sur papier bleu, qui figurent dans presque tous les volumes (Fig. 1). Les directeurs présentent ainsi aux acquéreurs potentiels, à savoir les parents des enfants lecteurs, la déclaration d’intentions15 de la collection, fixée en sept points. Les deux premiers expliquent le concept de « gradué », qui concerne non seulement les textes, mais aussi l’aspect matériel des livres. Les huit séries sont en effet divisées en deux parties : les séries i-v mesurent 25 cm et recourent à des textes courts imprimés en gros caractères, tandis que les séries vi-viii, d’un format plus petit (19 cm), offrent des textes plus longs et en petits caractères. Les pages de garde diffèrent aussi : Filiberto Mateldi dessine celles des premières séries, Gustavino celles des secondes (Fig. 2-3). Pour les petits lecteurs, les illustrations sont insérées dans le texte et imprimées en couleur; pour les enfants plus âgés, les ouvrages recourent à des planches et des photos en noir et blanc qui demandent des capacités de compréhension plus approfondies.

Fig. 2 Pages de garde de Filiberto Mateldi (Collection privée)

Fig. 3 Pages de garde de Gustavino (Collection privée)

  • 16 « Solo quanto è stato appreso divertendosi non si dimentica più. »

7D’après la déclaration d’intentions, le but de la collection est d’offrir aux enfants une sorte d’encyclopédie illustrée, proposant à la fois des textes littéraires et des textes de vulgarisation scientifique ou historique. Les directeurs affirment dans le quatrième point n’avoir retenu que les meilleurs écrivains italiens pour enfants, entendons ceux capables de rédiger des textes amusants, car, avancent-ils, « La seule chose qu’on n’oublie pas, c’est ce qu’on a appris en s’amusant16. » Enfin, ils soulignent la qualité de la langue italienne employée, la beauté des illustrations, et la moralité des contenus. Les volumes d’histoire religieuse ont, de fait, reçu l’imprimatur de l’évêque ; il ne faut pas oublier que le Concordat entre la papauté et Mussolini a été signé en 1929. En somme, la déclaration d’intentions essaie de rassurer les parents en présentant la collection comme la meilleure, tant du point de vue du contenu que de la morale.

  • 17 De nombreux exemples dans Elisa Rebellato, «Fernando Palazzi direttore de “La Scala d’Oro”», dans F (...)

8Tous les volumes sont expressément conçus pour la collection. À l’égard des textes de vulgarisation, rien d’étonnant puisqu’il s’agit de livres nouveaux ; la question est plus délicate pour les textes littéraires. Les écrivains qui collaborent à la collection doivent réécrire des grands classiques en les adaptant à un public de garçons et de filles. Les contraintes établies par les directeurs sont très strictes. Avant tout, il faut souligner que tous les textes sont choisis par Errante et Palazzi. Les propositions que leur adressent leurs collaborateurs sont le plus souvent refusées, à l’instar de celle de Luigi Risso Tammeo, pour une adaptation des Promessi Sposi de Manzoni, qui ne fut jamais publiée17.

9Pour mieux saisir l’application des contraintes imposées aux auteurs, on consultera avec profit les documents conservés par Eugenio Treves, l’un des plus proches collaborateurs de Fernando Palazzi. Il écrivit sept volumes pour « La Scala d’Oro », et participa à la rédaction du Novissimo dizionario della lingua italiana, publié par Ceschina en 1939, avec le seul nom de Palazzi, puisque Treves était juif.

  • 18 Università di Vercelli, Carte Treves, dossier 10, fasc. 49, Vincenzo Errante à Eugenio Treves, 30 n (...)

10Sa première publication dans « La Scala d’Oro » a pour titre La leggenda di Orlando (Fig. 4). Elle est imprimée en novembre 1932 et publiée le Noël suivant18. La tâche lui a été confiée en février, suite au refus d’Augusto Garsia, chargé initialement de l’adaptation. Quelles en ont été les étapes ?

Fig. 4 La leggenda di Orlando narrata da Eugenio Treves illustrata da Gustavino, Torino, Unione Tipografico-Editrice Torinese, 1933-XI (Collection privée)

  • 19 Archivio di Stato di Vercelli, Carte Treves, dossier 2, Vincenzo Errante à Eugenio Treves, 8 févrie (...)

11Tout d’abord, Errante envoie à Treves les Istruzioni pel volume « La leggenda d’Orlando », autrement dit les instructions prévues dans le contrat entre la maison Utet et les directeurs19. Les indications sont vraiment détaillées et conduisent l’auteur pas à pas.

12Les premières fournissent des informations techniques : l’âge des lecteurs (série vi, pour des enfants de onze ans), la longueur du volume (192 pages, 150-160 de texte et les autres pour les illustrations), la division en vingt chapitres de huit pages maximum, chacun avec son titre propre, le format (19 cm) et le nombre de caractères par page (1600). On entre ensuite dans le détail des contenus. Le titre confié à Treves ne correspond à aucune œuvre existante de la littérature italienne. Pour écrire ce texte, Treves doit se référer à plusieurs oeuvres antérieures : la Chanson de Roland, le Roland amoureux de Matteo Maria Boiardo et le Roland furieux de l’Arioste, avec une attention particulière pour cette dernière. À la différence de La freccia nera, romanzo di R.L. Stevenson, narrato da Cesare Giardini, publiée dans cette même série vi et adaptée du seul texte de Stevenson, il faut ici élaborer un nouveau roman qui s'inspire de différents auteurs. Le talent de Treves consiste alors dans sa capacité à fondre dans une même narration des épisodes issus de plusieurs récits distincts. Les thèmes et les épisodes étant multiples, il faut une grande habileté pour réussir à équilibrer les différents événements. Treves doit avant tout choisir des péripéties déterminantes pour l’intrigue, qu’il peut enrichir de détails à sa fantaisie. En revanche, il doit éliminer tous les faits qui alourdissent le déroulement de la trame. L’idéal, selon Errante et Palazzi, est :

  • 20 « che l’autore dopo aver letto i due poemi, immagini di doverli raccontare a un suo nipotino, il pi (...)

que l’auteur, après avoir lu les deux poèmes, imagine devoir les raconter à son petit neveu, brièvement mais sans enlever le goût du livre, ni la richesse nécessaire pour intéresser un enfant. Le ton devra être naturellement féerique, et développer le côté merveilleux de charmeurs, de magiciennes, etc. L’habileté de l’auteur consistera justement à s’imprégner de la matière pour la faire revivre, de façon à ne pas donner l’impression d’un résumé, mais d’un récit étendu, et presque indépendant (jusqu’à un certain point) des poèmes desquels il est tiré. Il ne faut jamais citer les sources, et les auteurs non plus. Ce n’est plus Boiardo, ce n’est plus l’Arioste qui racontent, mais c’est Eugenio Treves20.

  • 21 « Si deve divertire un ragazzo, molti ragazzi : ecco lo scopo principalissimo da raggiungere. »

Les directeurs expliquent également que ces réécritures donnent aux enfants un aperçu des personnages et des trames narratives des grands classiques lus plus tard à l’école ; en tant que telles, elles facilitent la rencontre avec les textes originaux ; les œuvres ainsi abrégées sont plus adaptées aux jeunes des années trente qui n’aiment pas les longs romans. Enfin, ses réécritures présentent les textes avec « une sensibilité moderne » qui les rend plus accessibles et compréhensibles. De ce point de vue, le style de l’écriture doit être simple, mais soigné. Les directeurs soulignent l’importance de l’aspect comique qui doit soutenir toute la narration : « Il faut amuser un enfant, beaucoup d’enfants : c’est l’objectif principal vers lequel on doit tendre21. »

  • 22 Sur ces deux importants illustrateurs italiens, voir Paola Pallottino, Storia dell’illustrazione it (...)
  • 23 Archivio di Stato di Vercelli, Carte Treves, dossier 2, Vincenzo Errante à Eugenio Treves, 16 avril (...)

13Les directeurs choisissent tant l’auteur du texte que son illustrateur. Dans le cas de La leggenda d’Orlando, dans les Istruzioni du février 1932, Errante et Palazzi demandent à Treves de choisir parmi les gravures de Gustave Doré pour l’Arioste de 1877. Seules quatre planches en couleur seront peintes par Gustavino ou Pinochi22. Ce n’est pas une tâche facile à accomplir, puisque l’œuvre artistique de Doré ne porte que sur le Furieux de l’Arioste, alors que le nouveau texte de Treves intègre la Chanson de Roland et L’Amoureux. La première partie du volume est donc pauvre en illustrations. Pour cette raison, en avril, Errante prévient Treves que tout le livre va faire l’objet d’un nouveau jeu d’illustrations, réalisé par Gustavino23. Le ton employé par le directeur laisse entendre que Treves n’est pas autorisé à discuter ce choix.

  • 24 Une autre collection italienne, née en 1931 et inspirée du marché français, est la « Biblioteca dei (...)
  • 25 Università degli Studi di Pavia, Centro di ricerca sulla tradizione manoscritta di autori moderni e (...)

14Pour mieux faire comprendre à Treves le résultat attendu, Errante et Palazzi lui suggèrent de consulter un volume spécifique : Récits tirés de l’Iliade racontés aux enfants, de Jeanne-Charles Normand, publié à Paris par l’éditeur Nelson dans la collection « Je raconte ». L’édition n’est pas datée, mais la collection paraît à la fin des années vingt ; il s’agit donc d’une publication toute récente. La collection de Nelson rassemble des textes de la littérature classique réécrits pour les jeunes, mais également des textes éducatifs, tout comme « La Scala d’Oro ». C’est un témoignage de l’attention dédiée par les directeurs, en particulier par Palazzi, à la production française de livres pour l’enfance24. Don Cesare Angelini, auteur de textes d’histoire religieuse pour « La Scala d’Oro », en fournit un autre exemple. Palazzi lui conseille, pour l’écriture du Leggendario dei santi, la lecture de Contes de la Légende dorée, illustrés par Maurice Lalau, parus à Paris chez Garnier frères en 192925.

15Avec des Istruzioni si détaillées, on serait tenté de penser que Treves va travailler seul à l’écriture de La leggenda d’Orlando et ne remettre son texte qu’une fois terminé aux directeurs. Mais la réalité est tout autre. Deux semaines après avoir reçu les directives, celui-ci envoie à Palazzi les quatre premiers chapitres, que le directeur se charge de lire attentivement. Les reproches qu’il émet sont de deux ordres : il y a trop d’épisodes peu significatifs, qu'il faut donc éliminer pour développer des récits plus intéressants, et le style reste monotone. Il faut jouer sur différents registres et mettre en œuvre le comique, le dramatique, le féerique et le lyrique.

  • 26 Archivio di Stato di Vercelli, Carte Treves, dossier 2, Fernando Palazzi à Eugenio Treves, 2 mars 1 (...)

16Le zèle de Palazzi ne s’arrête pas à ces longues annotations : le directeur finit par écrire lui-même l’incipit du roman de Treves. Certainement, il s’agit là d’un « essai sans valeur [...] ce n’est pas de l’argent comptant. Il faut au contraire le travailler et corriger. Mais il a un ton féerique et de conte ; et il a aussi la riche fluidité qu’il faut26 ».

17Dans le volume arrivé enfin entre les mains des lecteurs, l’incipit tient compte de l’exemple fourni par Palazzi et en reprend le style, mais l’écriture s’avère bien plus vivante et animée. Les nombreuses suggestions et corrections du directeur ont atteint leur but.

18Cet exemple illustre bien l’omniprésence de Palazzi à toutes les étapes de la conception littéraire et artistique des ouvrages. Mais la participation des directeurs s’exerce aussi à un autre niveau : celui de la censure, inévitable lorsqu’on s’adresse à de jeunes lecteurs. C’est justement la lecture des documents d’archives qui nous permet de démontrer ce contrôle préventif exercé sur les textes, qu’il relève d’une initiative personnelle des auteurs, durant le travail d’écriture, ou d’une censure effectuée par les directeurs à la lecture des manuscrits reçus.

  • 27 Francesco Perri, républicain et antifasciste, publia en 1924 un roman sous le pseudonyme de Paolo A (...)
  • 28 FAMM, Fondo Fernando Palazzi, dossier 5, fasc. 27, Francesco Perri à Fernando Palazzi, 22 juillet 1 (...)

19Dans le premier cas, on trouve l’exemple de Francesco Perri27, qui écrivit pour la collection quatre volumes, deux adaptations (La vita avventurosa di Robinson Crosuè de Defoe et Il mulino sulla Floss de George Eliot) et deux textes de vulgarisation (Come si lavora nel mondo et I cavalieri dell’ideale). La réécriture de The Mill on the Floss, qui lui fut confiée au début de l’été 1933, fut la plus complexe28 (Fig. 5).

Fig. 5 Il mulino sulla Floss romanzo di George Eliot narrato da Francesco Perri illustrato da Carlo Parmeggiani, Torino, Unione Tipografico-Editrice Torinese, 1935-XIII (Collection privée)

  • 29 FAMM, Fondo Fernando Palazzi, dossier 5, fasc. 27, Francesco Perri à Fernando Palazzi, 4 septembre (...)
  • 30 « Tom e Maggie erano salvi ! »

20La trame de l’œuvre d’Eliot contient en effet des événements qui correspondent mal à l’idée que se font Perri, mais aussi Errante et Palazzi, d’un livre pour l’enfance. Les deux protagonistes, la jeune Maggie et son frère Tom Tulliver, vivent dans un moulin, près du fleuve Floss. Très différents, le frère, Tom, se montre discipliné, pragmatique et fidèle à son devoir tandis que Maggie, au contraire, est vive et impétueuse. La jeune fille tombe amoureuse de Stephen, le fiancé de sa propre cousine Lucy, et ce sentiment bouleverse la vie tranquille du moulin. Tom n’accepte pas le comportement de Maggie et la chasse de la maison. Plongés dans l’adversité, le frère et la soeur connaîtront une fin tragique : Maggie, avec un petit bateau, tente de sauver Tom emporté par le fleuve en crue, mais tous deux périssent. Perri se trouve ainsi face à une difficulté : la mort des jeunes protagonistes ne lui semble pas adaptée aux lecteurs de « La Scala d’Oro ». Il apprécie la première partie du roman, qui raconte les aventures des deux enfants le long des rives du fleuve, mais il n’accepte pas la seconde partie : l'histoire sentimentale contrariée de Maggie et son atmosphère sombre. Il écrit donc à Palazzi pour lui demander s’il est possible de modifier complètement la conclusion du roman. Il veut introduire un happy end : les personnages principaux se marieraient et connaîtraient une longue vie. Perri n’ose pas effectuer cette réécriture sans l’approbation préalable des directeurs, bien conscient de la trahison infligée au texte original : avec son adaptation, l’héroïne du roman de formation d’Eliot, en lutte contre une société et un système de valeurs masculin, deviendrait une princesse quelconque dont la destinée était de se marier29. On ne sait quelle fut la réponse de Palazzi ; mais finalement, Perri modifie en profondeur la trame, afin de ne pas frapper la sensibilité des lecteurs de treize ans, destinataires de la série viii. Le sentiment amoureux de Maggie envers le fiancé de sa cousine est supprimé, et, même si Perri n’introduit pas de mariages, il élimine la disparition tragique des protagonistes. Dans la dernière page du volume, en effet, le bateau de Maggie et Tom ne sombre pas dans le fleuve, et le roman se termine avec la phrase : « Tom et Maggie étaient sains et saufs30 ! »

  • 31 Alda Bersanetti, « La Scala d'oro. Serie 8a per ragazzi di anni 13 », Leonardo. Rassegna mensile de (...)
  • 32 « agile e avvincente »
  • 33 « non tutte le opere per grandi si prestano in ugual modo a essere narrate ai ragazzi, per abile ch (...)

21Soulignons que les adaptations de « La Scala d’Oro » ont soulevé des critiques, surtout de la part d’Alda Bersanetti31. Si celle-ci apprécie la réduction de Mary Tibaldi Chiesa de L’isola misteriosa de Jules Verne, qu’elle qualifie de récit « agile et captivant32 », elle critique l’œuvre de Cesare Giardini, chargé d’écrire deux recueils d’adaptations de pièces de théâtre, I più celebri drammi moderni et Il carro di Tespi. Bersanetti conclut son article sur cette affirmation : « Toutes les oeuvres pour adultes ne se prêtent pas de la même façon à une adaptation pour enfants, quelle que soit l’habileté du narrateur33 .» Ses observations ne portent néanmoins que sur le style de Cesare Giardini qui n’a pas la capacité de rendre la vivacité des dialogues théâtraux. Bersanetti ne remet pas en cause le contenu. Mais une question reste en suspens pour nous : pourquoi Palazzi et Errante ont-ils voulu maintenir dans la collection un texte comme The Mill on the Floss, au prix d’un changement si significatif de la trame narrative ? Il aurait été plus facile de choisir un autre texte, conçu dès l’origine avec un dénouement heureux. La lettre de réponse de Palazzi à Perri s’étant égarée, nous n’aurons jamais la possibilité de comprendre la raison de ce choix.

22Le cas de Perri est un témoignage exceptionnel du phénomène d’autocensure, décision qui appartient à la conscience de l’auteur et qui, de ce fait, laisse rarement des traces documentaires. La censure exercée par les directeurs est au contraire bien documentée, notamment grâce à la correspondance entre Errante, Palazzi et Treves.

  • 34 Archivio di Stato di Vercelli, Carte Treves, dossier 2, Vincenzo Errante à Eugenio Treves, 3 juin 1 (...)

23En juin 1932, Errante contacte Treves pour lui proposer la réécriture des Christmas Books de Dickens, pour des enfants de huit ans34. Il s’agit d’une série de cinq contes publiés entre 1843 et 1848, à l’occasion des fêtes de Noël, et rassemblés en un volume en 1852. Puisque ces cinq textes, même courts, étaient trop longs pour les standards de la série iii, il fut décidé de n’en retenir que trois. Si cette sélection fut fortement influencée par les directeurs, il importe davantage de souligner la censure exercée sur Treves dans la phase d’écriture de l’adaptation. Les trois contes choisis sont Trottino e le campane (The Chimes), Storia di un vecchio avaro, di tre fantasmi e di un lieto Natale (A Christmas Carol), et Il grillo del focolare (The Cricket on the Hearth) (Fig. 6).

Fig. 6 I racconti di Natale tre romanzetti di Carlo Dickens narrati da Eugenio Treves illustrati da Carlo Nicco, Torino, Unione Tipografico-Editrice Torinese, 1934-XII (Collection privée)

  • 35 Università di Vercelli, Carte Treves, dossier 10, fasc. 49, Fernando Palazzi à Eugenio Treves, sine (...)

24Treves envoie les adaptations à Palazzi en juin 1933, et Palazzi lui répond favorablement début juillet. Cependant dans le dernier récit, Il grillo del focolare, le protagoniste - Giovanni dans la version italienne - est un garçon naïf, convaincu par le méchant Rusticucci que sa jeune femme Dorotea veut lui voler son argent, avec la complicité d’un mystérieux vieillard qui s’est introduit dans la maison. Il s’agit ici de l’intrigue que l’on peut lire dans le volume définitif. Dans sa première version cependant, Treves est plus proche du texte original. Il a dû modifier son récit suite aux indications pressantes de Palazzi. Dans l’œuvre de Dickens, comme dans le texte présenté en juin 1933 par Treves, Rusticucci cherchait à convaincre Giovanni non pas que sa femme voulait voler son argent, mais qu’elle avait une relation extra-conjugale avec le vieillard que personne ne connaissait. Dans la suite du récit, la trahison n’avait pas lieu, on découvrait que la suspicion était totalement infondée et qu’il s’agissait d’une manigance de Rusticucci qui enviait le bonheur de Giovanni et Dorotea, qui s’aimaient tendrement. Mais Palazzi n’accepte pas que dans un livre pour enfants de huit ans l’on puisse parler d’une relation extra-conjugale. En conséquence, il souhaite sa suppression d’une façon quelconque, même s’il faut modifier pour cela le récit de Dickens. Palazzi émet alors cette idée : pourquoi le personnage de Giovanni ne soupçonnerait-il pas plutôt sa femme de vouloir le tuer ? Mais la proposition n’est guère réalisable : il est bien évident que le remplacement d’un adultère par un homicide ne rend pas le texte plus adapté aux enfants. Palazzi conseille alors d’introduire l’hypothèse du vol, choix retenu pour le volume définitif. Encore une fois, les directeurs interviennent dans l’activité d’écriture de l’auteur, d’une façon plutôt contraignante et, dans le but de protéger la naïveté des jeunes lecteurs, ils entravent la liberté d’expression des auteurs35.

  • 36 Archivio di Stato di Vercelli, Carte Treves, dossier 2, Vincenzo Errante à Eugenio Treves, 16 juin (...)
  • 37 « Chiama gli abitator de l'ombre eterne/il rauco suon de la tartarea tromba ».
  • 38 « Ed elli avea del cul fatto trombetta ».

25La censure exercée par les directeurs est si poussée qu’elle va jusqu’à contrôler les noms des personnages. C’est le cas de La Gerusalemme liberata, adaptation par Treves du poème de Torquato Tasso, publiée dans la série vii, pour les enfants de douze ans. Le travail d’adaptation lui a été proposé en juin 193236. Il est facile d’imaginer le nombre d’interventions effectuées par les directeurs pour un texte si important de l’histoire de la littérature italienne. Les échanges épistolaires sont nombreux et ils portent sur plusieurs questions, du style du récit à sa tonalité, en passant par les épisodes à éliminer pour obtenir un roman plus fluide. Chaque détail du texte est soumis à l’œil attentif des directeurs, qui en arrivèrent à modifier les noms des personnages. Dans le prologue figure une scène, le « Concile des diables », qui se déroule sous terre en la présence de Pluton. Treves a ajouté un personnage trompettiste, qui, avec son instrument, convoque tous les démons au Concile. Dans le poème original du Tasse, l’épisode est évoqué en deux vers, qui ne présentent pas de trompettiste, mais qui amplifient le son de la trompette : « D’un son lugubre et rauque, l’infernale trompette appelle les habitans des ombres éternelles37. » Treves, lui, introduit un nouveau personnage et l’appelle Barbariccia ; mais Palazzi lui impose de changer son nom sur le champ, puisque dans l’Enfer de Dante (chants xxi-xxiii), Barbariccia est un diable bien précis, chef d’une troupe de démons qui utilise une méthode pittoresque pour signaler son départ : « il s’était fait de son cul un clairon38 ». Palazzi est embarrassé par l’association possible avec ce vers vulgaire de Dante. Dans la version définitive, le diable s’appelle Rascian.

  • 39 Università di Vercelli, Carte Treves, dossier 10, fasc. 49, Fernando Palazzi à Eugenio Treves, 29 n (...)

26Cet épisode de censure est important pour deux raisons : d’une part, il démontre combien l’écriture de livres pour « La Scala d’Oro » est contrôlée du point de vue du langage et des contenus, afin de ne pas heurter la sensibilité des enfants. D’autre part, il révèle la présence d’un second public de référence. En effet, le lien entre Barbariccia et la Divine Comédie est plus susceptible d’être perçu par les parents que par les enfants eux-mêmes, qui, à douze ans ne connaissent pas suffisamment l’œuvre de Dante. Les directeurs sont donc très attentifs au contrôle exercé par les parents et les enseignants sur la lecture des jeunes, et cette attention se reflète directement sur l’écriture des collaborateurs39.

27Ce tour d’horizon des archives disponibles démontre à quel point « La Scala d’Oro » obéit à une ligne éditoriale forte, tracée dès l’origine par ses directeurs. Ceux-ci l’imposèrent de façon totalitaire à leurs auteurs et illustrateurs. Le contrôle d’Errante et Palazzi s’exerça à tous les niveaux et à toutes les étapes de la création, des choix généraux jusqu’au traitement de détails.

  • 40 Sur cette collection, voir Antonio Faeti, « Una settimana con molte domeniche », dans Conformismo e (...)

28Loin de nuire aux succès des publications, cette mainmise éditoriale donna un tour exceptionnel à la collection. « La Scala d’Oro » a marqué l’histoire de la littérature de jeunesse italienne de l’entre-deux-guerres. Lorsqu’on la compare à « La Biblioteca dei miei Ragazzi40 » de la maison Salani, sa contemporaine et rivale, on saisit ses spécificités et ses atouts.

29Tout d’abord, « La Scala d’Oro » mêlait aux adaptations des textes littéraires des livres de vulgarisation, scientifique ou historique, là où la collection de Salani ne proposait que des romans. La collection de Palazzi et d’Errante faisait preuve de plus de variété et, briguant le titre d’encyclopédie de l’enfance, se distinguait par sa haute valeur pédagogique.

30De plus, toutes les œuvres parues dans « La Scala d’Oro » étaient d’une certaine manière « nouvelles », puisque même les œuvres étrangères faisaient l’objet d’une adaptation, au point d’être totalement réécrites. Les volumes de « La Biblioteca dei miei Ragazzi », en revanche, se cantonnaient à de fidèles traductions des romans parus dans l’hebdomadaire français La Semaine de Suzette.

31Dans l’esprit du public, le prestige de « La Scala d’Oro » était si intrinsèquement lié au tandem de ses créateurs, que lorsque « La Nuova Scala d’Oro » lui succéda en 1959, Vincenzo Errante et Fernando Palazzi continuèrent d’être présentés comme ses directeurs, alors même qu’Errante était mort en 1951. Mais seules des recherches complémentaires dans les archives de Palazzi permettraient de déterminer comment ce directeur, privé de son acolyte, s’y prit pour poursuivre la ligne éditoriale de la collection.

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Notes

1 Paola Pallottino, «Luci e ombre della Scala d'Oro. Meraviglie, curiosità e avventure della più famosa collana di libri italiani per i ragazzi del Novecento», dans Conformismo e contestazione nel libro per ragazzi. Storia e sperimentazione, Bologna, Cappelli, 1979, p. 63-90.

2 Antonio Faeti «L’oasi nel salotto, iconografia e industria culturale negli anni Trenta», dans Gli Annitrenta. Arte e cultura in Italia, Milano, Mazzotta, 1982, p. 435-440; Angelo d’Orsi, La cultura a Torino tra le due guerre, Torino, Einaudi, 2000, p. 327; Giulia Aiolfi, «“La Scala d’oro” della UTET: una collana per ragazzi durante il fascismo (1932-36)», L’officina dei libri, 1/2010, p. 141-158; Mariella Colin, « Les enfants de Mussolini ». Littérature, livres, lectures d’enfance et de jeunesse. De la Grande Guerre à la chute du régime, avec une contribution de Pompeo Vagliani, « Les illustrateurs du Ventennio », Caen, Presses universitaires de Caen, coll. « Quaestiones », 2010, p. 222-224, 378-379.

3 Giovanni Titta Rosa, «La Utet. Alla vigilia della consegna del “Libro d'Oro”», Giornale della Libreria, 75/1962 (n. 20), p. 151-154 ; Laura Novati, «La Storia della Utet», Giornale della Libreria, 103/1990 (n. 7/8), p. 27.

4 www.fondazionemondadori.it

5 www.casamoretti.it

6 http://www.asvercelli.beniculturali.it/

7 http://biblioteca.lett.unipmn.it/biblioteca/default.htm

8 http://centromanoscritti.unipv.it/

9 http://www.fondazioneisec.it/

10 FAMM, Fondo Fernando Palazzi, dossier 7, fasc. 39, Fernando Palazzi à Domenico Capocaccia, 6 julliet 1945 : « un vero editore non deve accettare ciò che gli offrono i vari autori, ma ordinare lui agli autori ciò che serve al suo programma. La Scala d'Oro è fatta appunto con questo criterio: noi non abbiamo accettato mai un solo manoscritto dei tanti che centinaia di autori, anche famosi, ci hanno offerto: tutti i volumi sono stati scritti appositamente per noi dietro nostra ordinazione ».

11 Enrico Decleva, Arnoldo Mondadori, Torino, Utet, 1993, p. 133-137 ; Elisa Rebellato, « Vincenzo Errante, Fernando Palazzi e “La Scala d’Oro” : due letterati-editori all’origine di una collana per ragazzi negli anni Trenta », Società e Storia, 2012 (n. 135), p. 85-114.

12 Monica Galfré, Il regime degli editori. Libri, scuola e fascismo, Roma-Bari, Laterza, 2005.

13 FAAM, Fondo Arnoldo Mondadori editore, section Arnoldo Mondadori, fasc. Vincenzo Errante, Vincenzo Errante à Arnoldo Mondadori, 17 juin 1932 : « Anni 1929-1930. [...] Durante questo biennio, allo scopo di favorir la possibilità di una rivalutazione, più volte propongo a Lei di iniziare una Raccolta per l’infanzia, già concepita da Palazzi e da me in ogni minuto particolare. Più volte ho affidamenti che la cosa si sarebbe fatta non appena vi fossero disponibilità finanziarie. Ma senza mai giungere neppure a un inizio di concrete discussioni ».

14 Une copie du contrat est conservée dans FAMM, Fondo Fernando Palazzi, dossier 11, fasc. 67 : « Competerà ai due Direttori di determinare dettagliatamente a ciascun Autore il compito che a ciascuno spetta di svolgere e il modo come debba svolgerlo, scendendo in tali e tanti particolari che gli Autori siano come condotti alla meta su dei binari ben tracciati e sicuri. A questo fine, i due Direttori trasmetteranno per ciascun libro alla Utet un apposito foglietto di istruzioni da Loro redatto che sarà dalla Utet allegato alla relativa lettera impegnativa. »

15 Un exemple d’analyse de la déclaration d’intentions est celui de Frédéric Palierne, « La déclaration d’intentions, une identité entre manifeste et péritexte commercial. Une approche du discours d’intention dans les collections littéraires de la seconde moitié du xxe siècle », dans Christine Rivalan Guégo, Miriam Nicoli (dir.), La Collection. Essor et affirmation d’un objet éditorial (Europe/Amérique xviiie-xxie), préface de Jean-Yves Mollier, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2014, p. 19-35.

16 « Solo quanto è stato appreso divertendosi non si dimentica più. »

17 De nombreux exemples dans Elisa Rebellato, «Fernando Palazzi direttore de “La Scala d’Oro”», dans Fernando Palazzi un silenzioso e operoso costruttore, numéro monographique des Quaderni del Consiglio regionale delle Marche, 16/2012 (n°113), p. 25-46.

18 Università di Vercelli, Carte Treves, dossier 10, fasc. 49, Vincenzo Errante à Eugenio Treves, 30 novembre 1932.

19 Archivio di Stato di Vercelli, Carte Treves, dossier 2, Vincenzo Errante à Eugenio Treves, 8 février 1932.

20 « che l’autore dopo aver letto i due poemi, immagini di doverli raccontare a un suo nipotino, il più brevemente che può, ma senza togliere affatto il sapore del libro, e la floridezza necessaria a interessare il ragazzo. Il tono dovrà essere naturalmente fiabesco, e dar molto sviluppo alla parte maravigliosa d’incantatori, di maghe, ecc. L’abilità dell’autore starà appunto nel rivivere per conto suo l’ampia materia, in modo da non dar mai l’impressione di un riassunto, ma di un disteso racconto, e sto per dire indipendente (sino a un certo punto) dai poemi da cui è preso. Le fonti ad ogni modo non debbono mai esser nominate, né tampoco i loro autori. Non è più il Boiardo, non è più l’Ariosto che raccontano, ma Eugenio Treves ».

21 « Si deve divertire un ragazzo, molti ragazzi : ecco lo scopo principalissimo da raggiungere. »

22 Sur ces deux importants illustrateurs italiens, voir Paola Pallottino, Storia dell’illustrazione italiana. Cinque secoli di immagini riprodotte, Firenze, Usher arte, 2010, ad indicem.

23 Archivio di Stato di Vercelli, Carte Treves, dossier 2, Vincenzo Errante à Eugenio Treves, 16 avril 1932.

24 Une autre collection italienne, née en 1931 et inspirée du marché français, est la « Biblioteca dei miei ragazzi » de l’éditeur Salani ; voir Antonio Faeti, « Una settimana con molte domeniche », dans Conformismo e contestazione nel libro per ragazzi. Storia e sperimentazione, Bologna, Cappelli, 1979, p. 17-61.

25 Università degli Studi di Pavia, Centro di ricerca sulla tradizione manoscritta di autori moderni e contemporanei, Fondo Angelini, Epistolario, Fernando Palazzi à Cesare Angelini, 15 juillet 1933.

26 Archivio di Stato di Vercelli, Carte Treves, dossier 2, Fernando Palazzi à Eugenio Treves, 2 mars 1932 : « campione, proprio senza valore [...] è tutt’altro che oro colato. Va anzi molto elaborato e corretto. Ma il tono fiabesco e di racconto spiegato c’è; e c’è anche la rapidità florida che si richiede ».

27 Francesco Perri, républicain et antifasciste, publia en 1924 un roman sous le pseudonyme de Paolo Albatrelli, I conquistatori, qui finit au bûcher pour ses contenus contraires à l’idéologie fasciste, et qui lui valut d’être licencié de son emploi au sein de l’appareil de l’État. Il chercha donc un nouvel emploi comme collaborateur éditorial, travaillant pour de nombreux journaux. Il remporta en 1927 le prix de l’Accademia Mondadori avec un nouveau roman, Emigranti. Sa biographie la plus récente est celle de Giulia Francesca Perri, Francesco Perri. Un repubblicano per la libertà, Soveria Mannelli, Rubbettino, 2008.

28 FAMM, Fondo Fernando Palazzi, dossier 5, fasc. 27, Francesco Perri à Fernando Palazzi, 22 juillet 1933 : « ho ricevuto dall'amico Errante le istruzioni per la riduzione del Robinson e del Molino sulla Floss e ringrazio tanto te e lui per avere pensato a me ».

29 FAMM, Fondo Fernando Palazzi, dossier 5, fasc. 27, Francesco Perri à Fernando Palazzi, 4 septembre 1933 : « accingendomi al lavoro per la riduzione del Mulino su la Floss, ritengo opportuno consultarmi con te, per sapere il tuo parere intorno alla materia da conservare nel mio lavoro. Il romanzo, che penso tu avrai presente, è ricco di materia squisita nella sua prima parta, ma nella seconda scivola in pieno nel romanzo passionale. Io ho presenti le tue intenzioni e penso che tu sia d'accordo con me nel ritenere necessaria una sostanziale trasformazione della seconda parte. I quattro o cinque ragazzi che sono i protagonisti debbono, io penso, conservare la freschezza fanciullesca fino all'ultimo e i loro eroismi debbono essere tenuti in quella atmosfera cordiale e ahimè un po' falsa in cui vivono gli eroi del Cuore di De Amicis. La tragedia finale deve essere abolita e il racconto deve terminare con un paio di matrimonii tutti in trina e fiori d'arancio. Possiamo perpetrare un tale tradimento dell'opera? Guarda che è indispensabile; senza di esso non possiamo fare leggere ai ragazzi quello che ne verrebbe fuori. Perché in fondo il dramma d'amore è intenso ».

30 « Tom e Maggie erano salvi ! »

31 Alda Bersanetti, « La Scala d'oro. Serie 8a per ragazzi di anni 13 », Leonardo. Rassegna mensile della coltura italiana, 6/1935 (n. 12), p. 506-507.

32 « agile e avvincente »

33 « non tutte le opere per grandi si prestano in ugual modo a essere narrate ai ragazzi, per abile che sia il narratore ».

34 Archivio di Stato di Vercelli, Carte Treves, dossier 2, Vincenzo Errante à Eugenio Treves, 3 juin 1932 : « Palazzi ti parlò di un rifacimento di Fabiola per bimbi di 12 anni. Poi, ripensandoci su, avremmo ideato di offrirti, invece un tema di maggiore impegno artistico: il rifacimento dei Racconti di Natale di Dickens per bimbi di 8 anni. Comunque, lasciamo a te la scelta. Un rifacimento di Fabiola può farcelo un altro narratore esperto. Ma per Dickens ci occorre il tuo stile. »

35 Università di Vercelli, Carte Treves, dossier 10, fasc. 49, Fernando Palazzi à Eugenio Treves, sine data : « Ti rimando il Grillo del focolare per correggere un particolare. Il fatto dei due che si allontanano, della gelosia, del sospetto sulla fedeltà coniugale non può andare per ragazzini di questa età. È un fatto realistico troppo impressionante e malizioso. Capisco che la difficoltà è grave; ma bisogna assolutamente trovar qualcosa per sostituire l’episodio. Io, come vedrai dai miei appunti locali, avevo pensato al sospetto che Dorotea volesse far ammazzare il marito da un sicario. Forse però è troppo grave anche questo. [...] Forse, in tutti i casi, bisognerebbe aggravare l’aria di mistero del vecchio e i suoi movimenti. Giovanni può accorgersi che Dorotea ha sussurrato qualcosa piano al vecchio... e domandarsi: “Come mai? Ma il vecchio non è sordo?”. Sospettare che sia un ladro e che Dorotea sia d’accordo con lui per derubarlo? Ma allora bisognerebbe aggiungere prima qualche particolare: che so? di piccoli risparmi messi da parte da Giovanni a furia di lavoro, e il cui nascondiglio solo Dorotea conosce. Insomma mi rimetto a te, ma il sospetto (sia pure il sospetto) dell’adulterio è una cosa troppo grave e non può andare ».

36 Archivio di Stato di Vercelli, Carte Treves, dossier 2, Vincenzo Errante à Eugenio Treves, 16 juin 1932 : « E così possiamo attendere una tua decisione per la Gerusalemme. Saremmo raggianti di gioja, se tu ci dicessi che accetti, perché potremmo, allora, dormir fra due guanciali. »

37 « Chiama gli abitator de l'ombre eterne/il rauco suon de la tartarea tromba ».

38 « Ed elli avea del cul fatto trombetta ».

39 Università di Vercelli, Carte Treves, dossier 10, fasc. 49, Fernando Palazzi à Eugenio Treves, 29 novembre 1932 : « L’unico punto in cui discordo da te, è sul Concilio dei Diavoli, che tu hai fatto tutto umoristico, mentre nel Tasso è spaventoso e tragico. [...] ma dal momento che Belzebù prende la sua dignità diabolica e fa intonare le trombe infernali (proprio Barbariccia, mi fai trombettiere? Ma quelli che conoscono Dante non penseranno a quell’altra tromba? Io eviterei il nome del trombettiere, per prudenza) il Concilio lo ricalcherei su quello del Tasso, pieno di diabolica, sia pure, maestà. »

40 Sur cette collection, voir Antonio Faeti, « Una settimana con molte domeniche », dans Conformismo e contestazione nel libro per ragazzi, op. cit., p. 17-61 et Walter Fochesato, « Dalla più bella alla più amata. La “Biblioteca dei miei ragazzi” della Salani », Charta, 9/2000 (n. 46), p. 71-73.

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Table des illustrations

Légende Fig. 1 Déclaration d’intentions (Collection privée)
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Fichier image/jpeg, 1,5M
Légende Fig. 2 Pages de garde de Filiberto Mateldi (Collection privée)
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Fichier image/jpeg, 648k
Légende Fig. 3 Pages de garde de Gustavino (Collection privée)
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/strenae/docannexe/image/1616/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 1,8M
Légende Fig. 4 La leggenda di Orlando narrata da Eugenio Treves illustrata da Gustavino, Torino, Unione Tipografico-Editrice Torinese, 1933-XI (Collection privée)
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/strenae/docannexe/image/1616/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 400k
Légende Fig. 5 Il mulino sulla Floss romanzo di George Eliot narrato da Francesco Perri illustrato da Carlo Parmeggiani, Torino, Unione Tipografico-Editrice Torinese, 1935-XIII (Collection privée)
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/strenae/docannexe/image/1616/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 544k
Légende Fig. 6 I racconti di Natale tre romanzetti di Carlo Dickens narrati da Eugenio Treves illustrati da Carlo Nicco, Torino, Unione Tipografico-Editrice Torinese, 1934-XII (Collection privée)
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/strenae/docannexe/image/1616/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 1,3M
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Pour citer cet article

Référence électronique

Elisa Rebellato, « Fabriquer un escalier : « La Scala d’Oro », une collection pour l’enfance en Italie dans les années 30 »Strenæ [En ligne], 11 | 2016, mis en ligne le 20 octobre 2016, consulté le 05 octobre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/strenae/1616 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/strenae.1616

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Auteur

Elisa Rebellato

Cultore della materia in Storia della stampa e dell'editoria - Università degli Studi di Milano

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