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Dossier thématique

Plusieurs séries d’illustrations pour les albums de fiction du Père Castor : les aléas de l’image au gré de l’évolution éditoriale

Several series of illustrations for Père Castor’s fictional picturebooks: the vagaries of images as publishing evolves
Christine Plu

Résumés

L’image participe pleinement au projet du Père Castor car Paul Faucher se souciait autant de la qualité des textes que de la dimension artistique des images, persuadé que les livres illustrés amènent les enfants à lire et les influencent sur l’orientation de leur sensibilité, leur goût et leur jugement. L’éditeur fut un des pionniers de l’album pour la jeunesse car il élabora des programmes éditoriaux pour que texte et image dialoguent dans des albums en ajustant les formats, la mise en page et les illustrations pour servir au mieux les récits. Paul Faucher a rassemblé des artistes qui ont participé à la création d’un fonds iconographique novateur : images et texte ont ainsi été associés dans le succès que les albums ont connu dès leur parution. La poursuite d’une ligne éditoriale à la hauteur du fonds d’albums du Père Castor s’avère un défi pour les successeurs de Paul Faucher depuis les années soixante-dix. Aujourd’hui, parmi la petite sélection de titres réédités par Flammarion jeunesse, certains paraissent en édition restaurée mais sont aussi proposés avec plusieurs illustrations. Cela interroge la transmission iconographique du fonds Père Castor mais aussi la continuité du projet éditorial, car une nouvelle illustration peut conduire à une lecture modifiée du récit. Cependant, certaines réillustrations ont été voulues par Paul Faucher, d’autres par son fils François Faucher qui créa de nouvelles collections. L’article s’interroge sur le destin d’images qui ont été lues par des générations, qui apparaissent et disparaissent, au titre d’une modernisation de l’iconographie ou du perfectionnement des supports de lecture des enfants. Deux histoires publiées par Paul Faucher et illustrées plusieurs fois, La Vache Orange de Nathan Hale et Marlaguette de Marie Colmont, donnent l’occasion de s’arrêter sur le contexte des réillustrations et sur l’évolution des images pendant les 90 ans d’édition du Père Castor.

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Texte intégral

  • 1 Isabelle Nières-Chevrel, « Le Père Castor parmi nous », La Revue des livres pour enfants, n° 186, a (...)
  • 2 Ibid., p. 71.

1Dans le dossier « Autour du Père Castor » que La Revue des livres pour enfants consacrait en 1999 aux albums édités par Paul Faucher, Isabelle Nières-Chevrel rappelait que « ces livres ont constitué le socle de la culture enfantine française dans les années qui ont suivi la guerre. Grâce aux réseaux conjoints des bibliothèques, des écoles et des familles, tous les petits Français ont été peu ou prou “élevés” au Père Castor1. » La patrimonialisation des albums du Père Castor résulte d’une politique éditoriale spécifique, continuée par François Faucher à la suite de son père. L’article interroge l’innovation du Père Castor et les aléas de l’évolution du catalogue chez Flammarion jeunesse en constatant que certains titres sont réédités et d’autres abandonnés. De plus les rééditions font parfois l’objet d’un changement d’illustration, ce qui pose « la question épineuse […] du destin des images2. » 25 ans plus tard, face aux différentes éditions d’un même titre, la réflexion peut être reprise à partir du constat que la valeur patrimoniale des illustrations diffère de celle des textes, qui sont, eux, réédités sans modification.

  • 3 Marc Soriano, Françoise Guérard, « Le point de vue des éditeurs », Enfance, t. 9, n° 3, 1956, p. 29 (...)

2En 1956, Paul Faucher est persuadé que les livres illustrés influencent l’enfant « sur l’orientation de sa sensibilité, de son goût, de son jugement3 ». Michel Defourny rappelle que l’image participe pleinement au projet du Père Castor :

  • 4 Michel Defourny, « Père Castor », dans : Isabelle Nières-Chevrel, Jean Perrot (dir.), Dictionnaire (...)

Dans ces albums, il se montre soucieux de la qualité littéraire des textes, comme de la dimension artistique des images. Tout en étant chargées d’émotion, celles-ci sont porteuses de sens au même titre que le texte. Texte et image dialoguent désormais dans des albums, dont le format, la mise en page, la typographie, la couverture sont étudiés afin de servir au mieux le propos4.

  • 5 Annie Renonciat, Françoise Lévêque, Viviane Ezratty, Livre, mon ami : lectures enfantines, 1914-195 (...)
  • 6 Claude-Anne Parmegiani, Les petits français illustrés 1860-1940, Paris, éditions du Cercle de la li (...)
  • 7 Paul Faucher, « La mission éducative des Albums du Père Castor », communication lors de la Conféren (...)
  • 8 Marc Soriano, « Sur la piste du Père Castor », Enfance, t. 20, n° 3-4, 1967, p. 239, DOI : https:// (...)

3Dans ses conférences, l’éditeur explique que l’image est un de ses principaux objets d’étude et tient un rôle de premier plan dans son programme de publication5. Concernant l’illustration qui accompagne les fictions, elle doit apporter un message directement intelligible qui constitue une étape de prélecture6, et dans ce but il faut que l’image « soutienne, éclaire, explique, prolonge le récit, parle directement à l’intelligence et à la sensibilité7 ». En 1967, juste après le décès de Paul Faucher, Marc Soriano rappelle que « ses albums ont apporté une nouvelle conception de l’imagerie et de l’illustration pour enfants fondée sur l’adaptation psychologique aux besoins réels de l’enfant, sur le respect dû à ce jeune public et bien entendu sur la qualité artistique8. » Afin de mener son projet éditorial et de garantir les enjeux portés par l’image, l’éditeur a rassemblé des artistes talentueux de nationalités multiples dans ses équipes successives, avant et après-guerre. Guidés par Paul Faucher, ils ont participé à la création d’un fonds novateur : images et texte ont ainsi été associés dans le succès que les albums ont connu dès leur parution.

  • 9 Parus en édition restaurée en 2021 pour les 90 ans du Père Castor, Michka, La Vache Orange, Poule r (...)
  • 10 « La mission éducative des Albums du Père Castor », op. cit., p. 74.
  • 11 M. Soriano, « Sur la piste du Père Castor », op. cit., p. 236.
  • 12 I. Nières-Chevrel, « Le Père Castor parmi nous », op. cit., p. 69.
  • 13 Christine Plu, « Des œuvres illustrées et réillustrées », La littérature avec les images [en ligne] (...)
  • 14 Christine Plu, « Illustrer et réillustrer », dans : Georges Lemoine, illustrateur au xxe siècle, th (...)
  • 15 Christine Plu, « Que deviennent les illustrations des “classiques” pour la jeunesse ? Fragile desti (...)
  • 16 I. Nières-Chevrel, « Le Père Castor parmi nous », op. cit., p. 72.

4Aujourd’hui, Flammarion jeunesse ne réédite qu’une petite sélection de titres parmi les 360 que contenait le catalogue au décès de l’éditeur. En tête de liste, Michka ou Roule Galette se vendent grâce à leur succès intergénérationnel et à la prescription scolaire, moteurs de leur classicisation. Ils sont repris dans plusieurs collections du catalogue et déclinés en produits dérivés : l’illustration originale se voit surexploitée, remaniée ou célébrée par des éditions restaurées en grands albums cartonnés9, ce qui lui confère son statut de référence. Mais certains de ces titres apparaissent avec plusieurs séries d’images, c’est notamment le cas de Marlaguette. Rappelons que les albums emblématiques du Père Castor ne sont pas des iconotextes, même si les illustrations apparaissent, à la lecture, souvent indissociables du texte pour lequel elles ont été créées. L’éditeur a conçu ses albums en recherchant une grande lisibilité et une interdépendance des deux instances narratives10. Il est vrai que Paul Faucher conçoit le livre « comme un tout, où tour à tour l’image aide à comprendre le texte et le texte à approfondir l’image11 ». Pourtant l’image reste « subordonnée au récit12 », même si ses relations spatiale et sémantique avec le texte sont pensées comme essentielles. En ce qui concerne les albums de fiction, le texte est premier et les illustrations sont très souvent créées dans un second temps par un artiste, chronologie qui semble autoriser la réillustration des récits : « Les œuvres patrimoniales de la littérature font l’objet de rééditions régulières et, en ce qui concerne les éditions pour la jeunesse, elles prennent souvent de nouvelles formes, avec de nouvelles illustrations dans de nouvelles mises en pages13. ». La « création d’un second jeu d’illustrations14 » est une pratique qui permet de renouveler les visuels pour les publications et, dans le meilleur des cas, d’offrir une réinterprétation du récit15. Quoiqu’il en soit, ce phénomène interroge sur la transmission des images du fonds Père Castor et sur la continuité du projet éditorial, car une nouvelle illustration conduit à une nouvelle réception de l’histoire lue. Ceci dit, « Paul Faucher a, de son vivant, fait réillustrer une vingtaine de titres16 » et, à sa suite, François Faucher le fit également pour de nombreuses collections. Deux histoires publiées par le fondateur, et illustrées plusieurs fois, La Vache Orange de Nathan Hale et Marlaguette de Marie Colmont, donnent l’occasion d’étudier le contexte de ces réillustrations d’albums et d’interroger leurs modifications pour les récits à des périodes différentes des 90 ans d’édition du Père Castor.

Quand l’illustration qui fait référence n’est pas première

  • 17 La Vache Orange et Le Cheval Bleu (1941, 1963) sont réédités aux mêmes périodes et réillustrés par (...)
  • 18 Claire Delbard, Le Père Castor en poche (1980-1990), ou comment innover sans trahir, Paris, L’Harma (...)

5Les premières réillustrations de La Vache Orange furent voulues par Paul Faucher. L’album de 1961, largement diffusé et réédité au catalogue Flammarion jeunesse depuis plus de 60 ans, n’est pas l’édition originale du conte de Nathan Hale, qui a envoyé à l’éditeur deux histoires accompagnées de dessins17. En 1941, un premier livre paraît, avec les images de Victorine Leblond, dans la collection « Les petits Père Castor ». Ce format dit « de guerre » permet à Paul Faucher de poursuivre son programme éditorial freiné en 1939 : « La période de guerre et du repli de l’équipe dans le Limousin entraîne une rupture de rythme en nombre de titres dans la production. On trouve à cette époque en raison de la pénurie de papier des ouvrages petits formats18. » L’éditeur publie ainsi plusieurs titres importants qui seront réillustrés après-guerre. Trois illustrations différentes sont donc à prendre en considération pour l’évolution de La Vache Orange : les dessins envoyés par Nathan Hale avant-guerre, les images de Victorine Leblond publiées en 1942 et celles créées par Lucile Butel en 1961.

Du carnet de Nathan Hale aux illustrations de Victorine Leblond

  • 19 Anne-Catherine Faucher, Paul Faucher ou l’aventure du Père Castor, une révolution éditoriale, Paris (...)
  • 20 Un courrier de 1959 informe que l’histoire est créée avec Christopher au cours d’un voyage en Breta (...)

6Les archives du Père Castor conservent le cahier envoyé par Nathan Hale à Paul Faucher avec l’histoire The Orange Cow. L’auteur est un pédagogue américain proche de l’Éducation nouvelle19, qui mentionne la participation de ses fils pour cette histoire de vache malade et capricieuse recueillie et soignée par un renard20. Face aux paragraphes de texte, le cahier contient 27 dessins de style enfantin réalisés aux crayons de couleurs, avec les portraits d’une Vache Orange très expressive. Probablement inspirés par les films animés de l’époque, comme ceux de Walt Disney, les dessins doux et ronds ajoutent de l’humour : les yeux bordés de cils, la queue et les cornes animent les scènes d’image en image. L’inventivité des scènes, comme avec la position de la vache sur le dos du renard, peut expliquer que Paul Faucher ait voulu en conserver l’efficacité (ill. 1).

Illustration 1 : La Vache Orange : photographies du cahier de Nathan Hale, archives du Père Castor, Maison du Père Castor, Meuzac, dossier n°1 J 601 (à gauche : p. 4, à droite : p. 15).

  • 21 Anaïs Charles, « Écrire, illustrer et publier des livres jeunesse dans le contexte de la Seconde Gu (...)
  • 22 Vera Braun est d’origine hongroise, sa correspondance témoigne des difficultés d’une vie de réfugié (...)
  • 23 L’album appartient à la série des fac-similés réédités par l’Association des amis du Père Castor en (...)

À cette période, l’éditeur tente de « reconstituer son cercle de travail d’avant-Guerre21 » par la mise en place d’un réseau de travail et d’entraide. Comme il le fait avec d’autres collaborateurs comme Pierre Belvès ou Françoise Seignobosc, il correspond avec Vera Braun dont le pseudonyme est Victorine Leblond22. Paul Faucher l’invite à Forgeneuve pour la réalisation des images de La Vache Orange et le livre paraît en 194123. Si l’illustration reste proche des dessins du cahier, elle montre comment l’illustratrice a apporté son savoir-faire. Victorine Leblond s’éloigne du trait enfantin mais en conserve les formes, qu’elle cerne de noir avec des effets très légers pour modeler le corps des personnages. La couleur orange qu’elle densifie prend plus de place dans le livre, comme le corps de la vache au centre de cette histoire de maladie fantaisiste.

  • 24 Souligné dans le courrier. Lettre du 26 mars 1942, dossier 1 J 405 : « V. Braun / V. Leblond », Arc (...)

7Dans le livre, l’image conduit la lecture grâce à une composition régulière : les 19 illustrations occupent les deux tiers de l’espace au-dessus du texte. Les pages alternent couleur et noir et blanc, sans doute par économie, et Victorine Leblond structure le récit visuel en travaillant les images par deux pour harmoniser les neuf double-pages. Si l’illustratrice reprend souvent les dessins du cahier, elle s’écarte parfois des modèles pour créer un équilibre visuel et soutenir le sens : grâce à la couleur orange de part et d’autre de la pliure, elle relie la vache, les rayures du fauteuil et sa silhouette sur le journal à l’annonce « Belle récompense… » (ill. 2). Ses illustrations résultent sans doute d’un dialogue avec Paul Faucher mais il n’en reste pas de trace. Par contre, dans un courrier pour un autre projet avec l’artiste, l’éditeur précise : « L’idéal est que les illustrations, presque à elles seules, racontent l’histoire, tout en l’enrichissant dans les détails. Dans un projet d’illustration, il ne faudrait retenir, pour bien faire, que les images qui comptent (ou si vous préférez, qui content)24. » Au final, guidée par l’éditeur et par les dessins de l’auteur, Victorine Leblond se voit effacée des livres qui sont signés « d’après Nathan Hale ». Pourtant, la tonalité comique de l’histoire dans ce format contraint des Petits Père Castor lui doit beaucoup. Des appariements d’images installent la causalité, comme avec la langue jaune de la vache face à la bouillote de même ton dans l’armoire à pharmacie (ill. 3). Jouant des oppositions de construction des portraits en vis-à-vis, elle communique l’agitation de la vache, qui passe des larmes aux éternuements comiques face à son dîner. Si l’illustratrice reprend les positions de l’animal qui contribuent au burlesque, elle abandonne les torsions des cornes qui changent selon son humeur, sauf au moment du pic de fièvre. De plus, elle ajoute une touche publicitaire à la couverture grâce au clin d’œil fait à la Vache qui rit de Benjamin Rabier (ill. 4). Comme Paul Faucher adapte le texte de Nathan Hale en retirant le récit cadre, suivant ses préférences de linéarité pour le récit, Victorine Leblond a créé une nouvelle image d’incipit. Elle montre la rencontre du renard et de la vache en face à face, une vue assez classique qui crée un effet comique avec l’image de droite où la vache est portée pattes en l’air sur le dos du renard : les rapports de symétrie opposés accentuent la drôlerie de la scène grâce à la juxtaposition des situations (ill. 5). Cela confirme aussi l’habileté de l’artiste dans l’exercice de compromis qui lui est demandé.

Illustration 2 : La Vache Orange, illustré par Victorine Leblond, Association des amis du Père Castor, 2015 [1941], p. 18-19.

Illustration 3 : La Vache Orange, illustré par Victorine Leblond, Association des amis du Père Castor, 2015 [1941], p. 6-7.

Illustration 4 : La Vache Orange, illustré par Victorine Leblond, Association des amis du Père Castor, 2015 [1941], couverture.

Illustration 5 : La Vache Orange, illustré par Victorine Leblond, Association des amis du Père Castor, 2015 [1941], p. 2-3.

  • 25 Lettre à Victorine Leblond, ibid.

8Dans un courrier de 1942, La Vache Orange et Le Cheval Bleu sont qualifiés par Paul Faucher de « caprices sans lendemain25 », peut-être que leur fantaisie était assez éloignée du réalisme qu’il visait. Mais 20 ans plus tard, l’éditeur changera d’avis puisqu’il travaillera à une réédition.

Les illustrations de référence de Lucile Butel

  • 26 M. Defourny, « Père Castor », op. cit., p. 729-730.
  • 27 Lettre du 1er octobre 1959, dossier n° 1 J 770, Archives du Père Castor, Meuzac.
  • 28 Isabelle Nières-Chevrel, « L’image au cœur de la lecture : une nouvelle conception de l’album pour (...)

9En 1961 paraît La Vache Orange dans le format oblong caractéristique des « Albums du Père Castor ». C’est le premier livre qu’illustre Lucile Butel pour l’Atelier, qui est devenu « laboratoire de recherche pédagogique appliqué au livre26 ». À l’automne 1959, Nathan Hale autorise la republication de son texte, répondant à une demande pour un album qui « paraîtrait dans une nouvelle collection (Premières lectures, 18 x 21, 16 pages, tout couleurs) et avec des dessins bien différents bien que dans le même esprit. Mise en page, reproduction et typographie seraient très soignées27 ». Cette réédition place l’image plus que jamais « au cœur du livre28 » car la collection « Premières Lectures » laisse la part belle aux illustrations composant avec des blocs de texte découpés entre des marges larges.

  • 29 Fiche de synthèse non datée, dossier n° 1 J 770, Archives du Père Castor, Meuzac.
  • 30 I. Nières Chevrel, « L’image au cœur de la lecture », op. cit., p. 127.
  • 31 Ibid., p. 129.

10Les archives de la préparation de cette nouvelle Vache Orange montrent la part de l’éditeur et celle de l’artiste grâce aux indications données à Lucile Butel (pseudonyme de « Mme Louzé »). Paul Faucher y explique que la fabrication du livre demandera un an et demi, entre mise au point de la maquette et recherche de la couleur29. « Comme tout éditeur, Paul Faucher a une idée globale des livres qu’il souhaite publier, mais il se veut également concepteur et il intervient très avant dans la mise au point du texte et des illustrations30. » Après avoir réfléchi à un album de 16 pages, Paul Faucher s’arrête sur une maquette de 24 pages pour que la narration visuelle soit claire avec une répartition des « sujets » par page sur tout le récit. Ce soin de cohérence narrative entre le texte et l’image à l’échelle du livre confirme l’apport de Paul Faucher à l’album moderne31. Une série de calques montre que Lucile Butel construit ses images pour la double-page, cherchant l’équilibre avec des jeux de symétrie. Les images non cadrées sont placées de chaque côté de la pliure, seule la place des blocs de texte varie pour dynamiser la lecture.

  • 32 Fiche de fabrication, dossier n° 1 J 770, 21 décembre 1959, op. cit.
  • 33 Ibid.

11Quand l’éditeur présente l’histoire à Lucile Butel, il précise ses attentes : « Cette histoire fantaisiste relève d’un comique de situation, et est la transposition malicieuse des préoccupations d’un petit enfant attribuées à une vache. […] Il faut donc que l’imagerie soit traitée avec un humour léger, une drôlerie d’expression, sans déformation inutile ou excessive32. » Suivant ces indications, Lucile Butel allège sa représentation avec des portraits d’un réalisme léger et sobre, l’expression étant principalement portée par les regards. Marie-Françoise Barat-Payraud évoque les qualités de ses images : « Ses illustrations très lisibles éveillent la sympathie et dégagent un climat joyeux qui convient aux jeunes lecteurs. Ses animaux présentent des expressions humaines qui facilitent l’identification33. » Si l’illustratrice reprend des détails amusants de la première édition comme le jeu avec la queue de la vache, elle en abandonne d’autres, comme les quatre sabots au pied du lit, la torsion des cornes ou les longs cils. Pourtant, Lucile Butel respecte plusieurs des images originales : elle reprend celle du renard portant la vache, qui deviendra l’emblème de cette histoire, mais elle abandonne les plans rapprochés de 1941 pour un ensemble de scènes en plan moyen. Sur l’ensemble, Lucile Butel privilégie la vraisemblance et la douceur de la relation entre les personnages à l’humour. Ce choix d’interprétation, différent de l’édition originale, est annoncé dès la couverture par les regards entre le renard et la vache, qu’il enlace tendrement (ill. 6). Et concernant la vraisemblance, un crayonné non retenu témoigne d’une recherche qui puisse préserver l’effet comique de la position des deux animaux réfugiés sous le lit : d’abord côte à côte comme en 1941, ils sont montrés différemment à la page 16 de l’album, car le renard disparaît derrière la vache, qui prend tout l’espace. En outre, quelques compositions intéressantes sont modifiées pour suivre le texte au plus près : la vache, qui regardait le renard lire le journal, est scindée en deux images, pages 21 et 22.

Illustration 6 : La Vache Orange, 1961, illustré par Lucile Butel, couverture © Flammarion.

  • 34 Marie-France Barat-Payraud, « Des livres d’activités aux albums de lecture », dans : J. Branchu (di (...)
  • 35 Lettre à Paul Faucher, 20 juillet 1961, Correspondance avec Nathan Hale, dossier n° 1 J 770, Archiv (...)

12Les illustrations sont réalisées à l’encre avec quelques traits de crayon. L’orange dominant est équilibré avec les bruns des meubles et les teintes bleu-vert du décor. Les formes arrondies accompagnent en douceur la gestuelle en rapport avec les soins attentifs du renard, dont la silhouette fine se détache sur les pages avec son museau et ses pattes noirs. Les images sont encore adoucies par des jeux graphiques légers comme le rappel des rayures bleues du papier peint et du sommier (ill. 6 et 7). Face à cet ensemble harmonieux, « on éprouve une impression de confort, de gentillesse, l’univers est sécurisant34 ». Nathan Hale approuva cette nouvelle édition « très plaisante et très améliorée », avec des illustrations « très amusantes35 ».

Illustration 7 : La Vache Orange, 1961, illustré par Lucile Butel, p. 12-13 © Flammarion.

  • 36 Marie-France Barat-Payraud, « Butel, Lucile », Dictionnaire du livre pour la jeunesse, op. cit., p. (...)
  • 37 Guillaume Lecaplain, « Père Castor, 90 ans et toutes ses dents de devant », Libération, 9 septembre (...)

13Les albums « Premières lectures » publiés dans ces années-là par le Père Castor deviennent des classiques de l’enfance, installant comme référence leurs images au côté des textes parce que les récits sont lus avec succès dans les écoles, les bibliothèques et les familles, ce qui explique la très large diffusion de la collection. Après 509 000 exemplaires vendus en 200736, La Vache Orange et ses images de 1961 sont devenues un des emblèmes de la collection et de l’éditeur, comme le confirme un article de 2021 du journal Libération37. Mais il existe d’autres illustrations pour ce récit.

La Vache Orange en poche

  • 38 C. Delbard, Le Père Castor en poche, op. cit., p. 215.
  • 39 Ibid.
  • 40 Voir à ce sujet : Marion Durand, Gérard Bertrand, L’image dans le livre pour enfants, Paris, L’écol (...)
  • 41 Gérard Franquin, « Hommage à François », dans : Hommage à François Faucher, Les amis du Père Castor (...)

14En 1989, Lucile Butel réillustre son album pour Castor Poche, qui s’ouvre aux catégories Cadet et Benjamin. À cette date, François Faucher pérennise le fonds Père Castor depuis plus de 20 ans et diversifie la production du catalogue hérité de son père en tenant compte des évolutions éditoriales de l’époque38. Les titres réédités en poche à partir du fonds des classiques font systématiquement l’objet d’une réillustration car cette collection privilégie la lisibilité du texte à la narration en images39. Les images des albums ne conviennent donc plus, sachant que l’enjeu est peut-être aussi d’actualiser une iconographie critiquée pour sa désuétude après les années soixante-dix40. Gérard Franquin, membre de l’Atelier pour la création des maquettes, et qui participa à ces réillustrations, témoigne que François Faucher « préférait modifier les images plutôt que de découper les illustrations et les organiser dans un nouveau format ». Le principe était de « le redessiner tout en respectant l’esprit » de l’illustration d’origine41.

  • 42 Dossier de fabrication, dossier n° 1 J 770, Archives du Père Castor, Meuzac.

15Lucile Butel, qui collabore toujours avec l’Atelier, se charge donc d’adapter son illustration de 1961 pour ce format de poche. Ses couleurs et la douceur ronde de ses dessins rappellent l’album, mais avec un traitement plus fin à l’encre légère. De nombreux détails ajoutent à la tendre atmosphère, comme l’expression des personnages ou le décor chez le renard. Elle recrée toutes les images et en ajoute pour accompagner le nouveau découpage du texte et fluidifier la lecture sur 47 pages. Dans ce but, elle joue aussi avec les cadres de la collection pour une mise en page dynamique. Lucile Butel multiplie les images au plus près du récit, apportant plus de mouvement ou de « naturel », comme avec le renard quittant la chambre sur le bout des pattes, ce qui ajoute du sens. En page 27, le cauchemar se déploie dans une double spirale de rails sur deux pages, traduisant bien plus fortement le danger rêvé par la vache (ill. 9). Parmi les images modifiées, elle reconstruit la scène de lecture du journal avec la vache, comme dans son calque de 1959 (ill. 10). Une nouvelle vignette où la vache saute par-dessus la barrière au début du livre répond au souhait que Paul Faucher avait formulé42. Cet exemple en Castor Poche montre que la réillustration pour une nouvelle collection peut améliorer l’accompagnement du texte et le faire évoluer grâce à une nouvelle dynamique des pages, tout en renforçant l’interprétation choisie.

Illustration 8 : La Vache Orange, 1989, illustré par Lucile Butel, Castor Poche Benjamin : couverture © Flammarion.

Illustration 9 : La Vache Orange, 1989, illustré par Lucile Butel, Castor Poche Benjamin : p. 26-27 © Flammarion.

Illustration 10 : La Vache Orange, 1989, illustré par Lucile Butel, Castor Poche Benjamin : p. 40-41 © Flammarion.

Différentes images pour rééditer Marlaguette

16L’album Marlaguette paraît en 1952 dans la série « Premières lectures » avec les images de Gerda Muller sur 24 pages. Cette illustratrice hollandaise, qui vient à Paris pour travailler avec le Père Castor au début des années cinquante, collabore pendant 13 ans à l’Atelier et y réalise une quarantaine de titres. Le conte de Marie Colmont est rapidement devenu un classique, accompagné des scènes de la fillette et du loup sur fond de forêt créées par l’illustratrice. Comme souvent, elle privilégie la gouache et un continuo de couleurs avec des images structurées de formes simples pour plus de lisibilité.

  • 43 I. Nières-Chevrel, « Le Père Castor parmi nous », op. cit., p. 70.

17Marlaguette est une réécriture du Petit Chaperon Rouge et Gerda nous le signifie clairement par la couleur qu’elle donne à la jupe de la fillette. Elle est issue de Delphine et Marinette, mais elle inaugure beaucoup plus nettement cette lignée de petites filles pleines de sang-froid qui n’ont plus peur des loups, qui les gouverneraient même à l’occasion, et que la production contemporaine nous a rendues familières43.

Illustration 11 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Gerda Muller, 1952, p. 4-5 © Flammarion.

18L’album Marlaguette est inscrit dans la liste de l’Éducation nationale pour la maternelle comme œuvre patrimoniale à lire avec les illustrations de Gerda Muller. Pour ce conte de Marie Colmont, les enseignants ont le choix entre deux versions de l’illustratrice, qui a réillustré son titre à 42 ans d’écart.

Un grand format pour Gerda Muller

  • 44 En 1989, Marlaguette est illustré par Gérard Franquin pour Castor Poche Benjamin.
  • 45 Les albums Marlaguette de 1994 et Les bons amis de 1996 sont réimprimés à partir des planches origi (...)
  • 46 Viviane Ezratty et Françoise Lévèque, « Gerda Muller, de Marlaguette à Pivoine », La Revue des livr (...)
  • 47 Courriel de Martine Lang, 16 janvier 2024.

19Au début des années 1990, Martine Lang, collaboratrice de François Faucher, travaille à la réédition de plusieurs titres classiques dans des formats cartonnés plus grands que les albums originaux. Gerda Muller, qui ne collabore plus avec Flammarion en 1989, n’a pas souhaité reprendre ses titres en poche car le petit format ne lui convient pas44. Mais l’illustratrice accepte de réillustrer Marlaguette (1994) et Les bons amis (1996) dans un grand format, qui est encore agrandi en 202245. L’artiste confie : « Je voulais leur apporter une respiration, absente dans la première édition [...]. Le texte est resté identique, bien sûr, mais j’ai eu toute liberté pour la maquette, avec un format plus grand qui me convenait46. » Dans un entretien par courriel, l’éditrice Martine Lang rapporte que « Gerda a toujours été très critique sur ses œuvres : elle trouvait les dessins [originaux] un peu maladroits47. »

  • 48 Calques de Gerda Muller de 1952 et copies de crayonnés de 1993, dossier n° 1 J 683, Archives du Pèr (...)
  • 49 V. Ezratty et F. Lévêque, « Gerda Muller, de Marlaguette à Pivoine », op. cit., p. 102.
  • 50 D’après le titre de l’exposition Gerda Muller ou la poésie de la réalité, au MIJ (musée de l'Illust (...)
  • 51 Janine Kotwika, « Muller, Gerda », dans : I. Nières-Chevrel, J. Perrot (dir.), Dictionnaire du livr (...)

20Les images de l’album de 1994 traduisent bien le plaisir de l’artiste pour ce format, avec le déploiement d’une superbe forêt aux essences variées dont la représentation naturaliste est peuplée d’animaux, spectateurs des péripéties du loup et de la fillette (ill. 12). Les copies des crayonnés48 montrent la précision accordée au décor avec des annotations naturalistes en marge. « J’aime qu’il y ait toujours beaucoup de détails à regarder. J’apprécie le dessin en noir, mais la couleur crée une atmosphère et favorise le rêve49 », confie l’artiste qui opte pour une technique mixte de peinture et crayon de couleurs, apportant de la lumière aux éléments naturels comme aux poils du loup. Elle conserve sa palette de 1952 : les vêtements de Marlaguette contrastent toujours avec les verts denses de la forêt, qu’elle traite avec de l’ombre jusqu’au noir, mais cet album montre une évolution vers une « poésie de la réalité50 » car les images sont réinvesties pour leur qualité plastique. Mais le récit visuel est aussi retravaillé avec un nouveau rythme des images, et du texte, pour 30 pages. Les illustrations sont variées dans leur format et s’adaptent à l’intensité des scènes : de grandes planches contemplatives abolissent la pliure pour la déambulation dans les bois et des séries d’images composent d’autres double-pages pour les successions d’actions. Ces vignettes présentées de façon tabulaire ajoutent aussi de la temporalité, à l’instar des changements vestimentaires de la fillette au cours des soins sur huit jours, page 16 (ill. 13). Les scènes gagnent en clarté et ajoutent de l’implicite quand les oiseaux s’envolent alors que la fillette reste auprès du loup au lieu de s’enfuir. Janine Kotwika rappelle le perfectionnisme de l’artiste pour la qualité du récit : « Elle respecte ses jeunes lecteurs, soucieuse de la lisibilité de ses images, de la pertinence de ses maquettes, de la fluidité de ses narrations, de la sérénité de son univers naïf et optimiste51. »

Illustration 12 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Gerda Muller, 1994, p. 8-9 © Flammarion.

Illustration 13 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Gerda Muller, 1994, p. 16-17 © Flammarion.

21Enfin, la modification la plus flagrante réside dans l’apparence physique de Marlaguette, vêtue d’un pantalon. L’éditrice Martine Lang témoigne à ce sujet :

  • 52 Courriel de Martine Lang, op. cit.

Gerda a estimé devoir changer l’habillement de la petite fille. Nous partagions son avis. […] À juste titre, Gerda trouvait qu’un pantalon et des bottillons étaient plus adaptés pour se promener dans les bois, que courir avec une jupe courte jambes nues et des nu-pieds ! La Marlaguette de 1994 ne minaude plus comme parfois celle de 1952, elle a une attitude plus délurée, n’hésitant pas à monter à califourchon sur une branche d’arbre52.

  • 53 Marine Landrot, « Quand j’ai illustré Marlaguette, on ne parlait pas d’agressions sexuelles des enf (...)

22Ses grosses nattes rousses sont remplacées par diverses coiffures ébouriffées et ses vêtements sont modernisés et plissés pour plus de naturel. La gestuelle de l’enfant est aussi retravaillée avec une plus grande liberté, révélant le souhait de se placer au plus près des jeunes lectrices. Un entretien avec l’illustratrice en 2023 évoque cette lecture plus contemporaine53 car les représentations de la petite fille et de l’attaque du loup montrent aussi l’évolution de l’interprétation : chaque version illustrée propose une lecture différente de la relation entre les personnages. En 1994, le corps à corps entre le loup et l’enfant est montré en sept images pour trois initialement : ce temps fort du récit occupe une double-page, qui amplifie ainsi la violence de l’attaque initiale mais également la résistance de l’enfant. Cette seconde version de Gerda Muller établit ainsi un rapport plus équivalent entre la fillette des bois et l’animal. Sur cet aspect, l’illustration de Gérard Franquin pour le Castor poche de 1989 édulcore la violence de l’agression puis présente la relation du loup et de la fillette avec beaucoup de douceur (ill. 14 et 15).

Illustration 14 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Gérard Franquin, 1989, Castor Poche, couverture © Flammarion.

Illustration 15 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Gérard Franquin, 1989, Castor Poche, p. 10-11 © Flammarion.

Les nuances d’interprétation des récits en images diffèrent ainsi sur la représentation du loup en lutte contre sa nature et sur le pouvoir de la fillette pour le domestiquer. Les deux couvertures de Gerda Muller présentent la même scène mais, en 1994, l’expression de la fillette montre qu’il ne s’agit plus de dominer l’animal comme dans l’original. Marlaguette apparaît protectrice et le regard du loup, initialement noir et soumis, tourné vers la fillette en 1952, apporte un sens différent avec sa gueule déformée par son repas végétarien et ses yeux jaunes plissés qui rappellent sa nature sauvage mais prennent le lecteur à témoin de sa bonne volonté (ill. 16 et 17).

Illustration 16 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Gerda Muller, 1952, couverture © Flammarion.

Illustration 17 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Gerda Muller, 1994, couverture © Flammarion.

23Aujourd’hui, le catalogue Flammarion jeunesse propose, au côté des deux albums illustrés par Gerda Muller, un autre livre avec une iconographie différente.

Réillustrations : hommage ou réinterprétation ?

  • 54 Entretien avec Benedicte Roux, éditrice Flammarion jeunesse, 2 février 2024.

24En 2013, Marlaguette paraît dans un album de grand format cartonné avec des illustrations d’Olivier Tallec. En 2011, à l’occasion des 80 ans du Père Castor, l’illustrateur a déjà créé de nouvelles images pour Michka, initialement illustré par Rojankovsky, autre conte de Marie Colmont. L’éditrice Bénédicte Roux a souhaité une réinterprétation contemporaine, offrant à chaque album « une nouvelle lecture du conte54 ». Qu’apporte donc ce nouveau Marlaguette au récit ?

25L’importante bibliographie d’Olivier Tallec montre qu’il maîtrise bien les codes graphiques de l’album contemporain. Cette version déploie de larges planches peintes, réhaussées de crayon, pour des double-pages à fond perdu et une immersion dans des paysages où domine le jaune. Le choix des couleurs tranche avec les albums de Gerda Muller, éloignant le décor du conte d’un univers naturel. Les pages, qui intègrent un texte en petits caractères, ouvrent de larges espaces à des alignements de troncs avec lesquels l’illustrateur aime jouer dans ses livres : l’arrière-plan travaillé graphiquement esthétise la forêt tout en la déréalisant sous différents éclairages. Les jeux de points de vue et les variations colorées autour du jaune construisent la dynamique d’un chemin de fer dans laquelle la complémentarité du bleu vif joue le contrepoint, avec le geai, les taches de lumière et le pull de Marlaguette. L’illustrateur ne reprend donc pas la référence visuelle au Petit Chaperon Rouge.

26Concernant les personnages, le corps gigantesque du loup et la très petite silhouette de Marlaguette, aux proportions très peu réalistes, s’appuient sur une stylisation très poussée. Ce jeu avec le rapport d’échelle pourrait communiquer le danger couru par l’enfant mais cet effet se voit atténué par la tonalité humoristique de plusieurs scènes et des mimiques des protagonistes : les images de la course-poursuite ou du loup buvant la tisane deviennent burlesques. Ses choix graphiques, qui privilégient les changements de cadrage de page en page, renvoient donc plus aux mouvements multidirectionnels des dessins animés contemporains qu’à la linéarité des séries de vignettes des albums du Père Castor. Comme dans les images de 1994, les animaux observent perplexes la domestication du loup, mais Olivier Tallec le souligne en adoptant un point de vue lointain sur les scènes. De plus, le récit visuel n’accompagne pas le texte au plus près car les moments forts du conte ne sont pas tous représentés, contrairement aux précédentes versions. Sont donc laissés au texte seul la lutte de Marlaguette avec le loup, le mouchoir trempé dans la source pour le soigner et le régime alimentaire végétarien. En outre, plusieurs autres illustrations privilégient la composition à la clarté en plaçant les personnages à distance du lecteur.

Illustration 18 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Olivier Tallec, 2013, couverture © Flammarion.

Illustration 19 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Olivier Tallec, 2013, première double-page © Flammarion.

  • 55 Ibid.

27Cette réillustration de 2013 revisite le récit avec une construction graphique plus proche des albums du moment, qui donne priorité au récit visuel sur l’accompagnement du texte. Cela rompt avec les principes de complémentarité du Père Castor entre le texte et l’image : le lecteur doit traiter plus d’implicite, construire une lecture plus complexe avec des illustrations paradoxalement moins coopératives car parfois plus « ténues » pour le sens du récit. De plus, la distanciation, notamment humoristique, modifie la tonalité du conte, son enjeu relationnel et sa référence. L’éditrice confie que la réception fut contrastée pour cet album qui a partagé les lecteurs, certains appréciant cette tentative de renouvellement graphique, d’autres non, sans que les critiques soient précisées55.

  • 56 I. Nières-Chevrel, « Le Père Castor parmi nous », op. cit., p. 71.
  • 57 Testament artistique de Gerda Muller, copie conservée au musée de l’Illustration jeunesse, 2014.

28La poursuite d’une ligne éditoriale à la hauteur du fonds d’albums s’avère un défi posé aux successeurs de Paul Faucher depuis les années soixante-dix. Le catalogue Flammarion jeunesse se voit encore aujourd’hui soumis à deux logiques : « l’éditeur peut se sentir pris dans une contradiction entre la conservation du patrimoine et les attentes du marché56 ». Faire vivre le fonds ancien du catalogue place effectivement les éditeurs face à un dilemme pour satisfaire une logique commerciale de la nouveauté : démultiplier les formats et les collections pour rééditer un album à succès dans son intégralité ou faire recréer les illustrations. D’autres exemples montrent que le catalogue réunit des logiques contradictoires concernant l’image des albums patrimoniaux. Des recueils thématiques, publiés de façon régulière depuis plusieurs dizaines d’années, compilent les albums en cassant les pages et modifiant les illustrations, manifestant que les priorités de Paul Faucher sont oubliées quand la réédition est uniquement soumise aux objectifs économiques. Mais dans une autre collection, un conte de Natha Caputo, Les animaux qui cherchaient l’été, est paru en format oblong avec une réillustration de Julie Faulques en 2022. Gerda Muller n’autorisant pas la réédition de ses images pour ce titre57, l’illustratrice choisit de s’inscrire dans l’esprit esthétique du catalogue ancien et opte pour un réalisme stylisé avec une nouvelle palette de couleurs claires qui adresse plusieurs clins d’œil à l’album de 1960. De plus, le nouveau jeu d’images reste proche du texte, par le sens et la mise en pages, signalant une politique éditoriale dans la continuité des anciens albums « Premières lectures ».

  • 58 G. Franquin, « Hommage à François », op. cit., p. 65.

29Succéder aux images des classiques du Père Castor est un pari, comme le confie Gérard Franquin, second illustrateur de Michka de Marie Colmont : « c’était une gageure que d’illustrer cette histoire qui avait marqué tant de générations de lecteurs58 ». Son album de 1991 confirme la difficulté à se détacher des images créées par Rojan ou à apporter une nouvelle lecture. Car une nouvelle série d’illustrations peut être justifiée par une réinterprétation du récit, comme avec le Marlaguette de 1994, ou une amélioration de la narration pour la lecture, comme c’est le cas avec les versions de 1960 puis 1989 de La Vache Orange. Mais, dans tous les cas, le traitement de l’image au moment de la réédition des albums classiques manifeste un symptôme de sa précarité et de sa secondarité patrimoniale par rapport au texte.

  • 59 Michèle Cochet, Michel Defourny, Claude-Anne Parmegiani, Nathalie Parain, Nantes, éditions MeMo, 20 (...)
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  • 61 Biens inscrits dans « mémoire du Monde », voir : Ministère de l’Europe et des affaires étrangères, (...)

30À distance de ces tensions commerciales, le patrimoine graphique du Père Castor est aujourd’hui célébré, comme le montrent plusieurs monographies59 et expositions depuis 201160. L’Association des amis du Père Castor réédite des albums disparus, entretenant la mémoire du fonds ancien et de ses images liées au projet du fondateur. Et c’est également au nom de la mémoire iconographique que les archives du Père Castor se voient inscrites au registre de l’UNESCO depuis 201761.

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Bibliographie

Références sur le Père Castor

Dans des parutions collectives :

  • Isabelle Nières-Chevrel, Jean Perrot (dir.) Dictionnaire du livre de jeunesse, Paris, éditions du Cercle de la librairie, 2013 :

    • Marie-France, Barat-Payraud, « Lucile Butel », p. 152

    • Michel Defourny, « Père Castor », p. 729-730.

    • Janine Kotwika, « Muller, Gerda », p. 682.

  • Jacques Branchu (dir.), Le Père Castor, Paul Faucher (1898-1967) : un Nivernais inventeur de l’album moderne (actes du colloque de Pougues-les-Eaux, 20 et 21 novembre 1998), Varennes-Vauzelles, Conseil Général de la Nièvre, 1999.

    • Marie-France Barat-Payraud, « Des livres d’activités aux albums de lecture », p. 55-80.

    • Isabelle Nières-Chevrel, « L’image au cœur de la lecture : une nouvelle conception de l’album pour enfants », p. 123-137.

  • Revue des livres pour enfants, n° 186, Autour du Père Castor, 1999 :

    • Isabelle Nières-Chevrel, « Le Père Castor parmi nous », p. 63-73.

    • Viviane Ezratty, Françoise Lévêque, « Gerda Muller, de Marlaguette à Pivoine », Entretien avec Gerda Muller, p. 97-103.

Ouvrages, numéros de revues et articles

Claire Delbard, Le Père Castor en poche (1980-1990), ou comment innover sans trahir, Paris, L’Harmattan, 2007.

Anne-Catherine Faucher, Paul Faucher ou l’aventure du Père Castor, une aventure éditoriale, Paris, Flammarion, 2021.

Gérard Franquin, « Hommage à François », dans : Hommage à François Faucher, Meuzac, Les amis du Père Castor, 2019, p. 55-66.

Claude-Anne Parmegiani, Les petits français illustrés, 1860-1940, Paris, éditions du Cercle de la librairie, 1989.

Annie Renonciat, Françoise Lévêque, Viviane Ezratty, Livre, mon ami : lectures enfantines, 1914-1954 [catalogue d’exposition], Paris, Agence culturelle de Paris, 1991, p. 74.

Marc Soriano, « Sur la piste du Père Castor », Enfance, t. 20, n° 3-4, 1967, p. 233-240.

Henri Wallon, Pierre Belvès, Marc Soriano (dir.), Enfance, t. 9, n° 3, Les livres pour enfants, 1956.

Archives du Père Castor (Meuzac), dossiers numéros : 1 J 405 ; 1 J 770 ; 1 J 683.

Au sujet de la réillustration :

Christine Plu, « Petite Croix transfigurée : George Lemoine illustrateur de Peuple du ciel », Cahiers Robinson, n° 23, Actes du colloque Le Clézio, aux lisières de l’enfance, 2008.

Christine Plu, « L’anti-Noël d’Andersen illustré par Georges Lemoine, une allumette en guise d’étoile », dans : Présents de Noël en littérature de jeunesse contemporaine, Montréal, Novalis 2010.

Christine Plu, « Que deviennent les illustrations des “classiques” pour la jeunesse ? Fragile destin d’images face au tourbillon des rééditions », La littérature de jeunesse avec ses images [en ligne], 2022, URL : https://christineplu.fr/2022/11/02/que-deviennent-les-illustrations-des-classiques-pour-la-jeunesse-fragile-destin-dimages-face-au-tourbillon-des-reeditions/.

Corpus analysé

Nathan Hale, Victorine Leblond, La Vache Orange, Paris, Les petits Père Castor, 2015 [1941].

Nathan Hale, Lucile Butel , La Vache Orange, Paris, Flammarion, coll. « Albums du Père Castor », 1961.

Nathan Hale, Lucile Butel, La Vache Orange, Paris, Flammarion, coll. « Castor Poche », 1989.

Marie Colmont, Gerda Müller, Marlaguette, Paris, Flammarion, coll. « Albums du Père Castor », 1952.

Marie Colmont, Gérard Franquin, Marlaguette, Paris, Flammarion, coll. « Castor Poche Benjamin », 1989.

Marie Colmont, Gerda Muller, Marlaguette, Paris, Père Castor Flammarion, 1994.

Marie Colmont, Olivier Tallec, Marlaguette, Paris, Père Castor Flammarion, 2013.

Mention de :

Marie Colmont, Gérard Franquin, Michka, Paris, Père Castor Flammarion, 1991.

Natha Caputo, Julie Faulques, Les animaux qui cherchaient l’été, Paris, Flammarion jeunesse, coll. « Albums du Père Castor », 2022. 

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Notes

1 Isabelle Nières-Chevrel, « Le Père Castor parmi nous », La Revue des livres pour enfants, n° 186, avril 1999, p. 63.

2 Ibid., p. 71.

3 Marc Soriano, Françoise Guérard, « Le point de vue des éditeurs », Enfance, t. 9, n° 3, 1956, p. 29, URL : http://www.persee.fr/doc/enfan_0013-7545_1956_num_9_3_1523.

4 Michel Defourny, « Père Castor », dans : Isabelle Nières-Chevrel, Jean Perrot (dir.), Dictionnaire du livre de jeunesse, Paris, éditions du Cercle de la librairie, 2013, p. 729.

5 Annie Renonciat, Françoise Lévêque, Viviane Ezratty, Livre, mon ami : lectures enfantines, 1914-1954 [catalogue d’exposition], Paris, Agence culturelle de Paris, 1991, p. 74.

6 Claude-Anne Parmegiani, Les petits français illustrés 1860-1940, Paris, éditions du Cercle de la librairie, 1989, p. 253.

7 Paul Faucher, « La mission éducative des Albums du Père Castor », communication lors de la Conférence de Girenbad organisée par la Commission Cantonale pour les bibliothèques populaires de jeunesse, 18-19 mai 1957, près de Zurich, cité par C.-A. Parmegiani, ibid.

8 Marc Soriano, « Sur la piste du Père Castor », Enfance, t. 20, n° 3-4, 1967, p. 239, DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.3406/enfan.1967.2426.

9 Parus en édition restaurée en 2021 pour les 90 ans du Père Castor, Michka, La Vache Orange, Poule rousse et La plus mignonne des petites souris.

10 « La mission éducative des Albums du Père Castor », op. cit., p. 74.

11 M. Soriano, « Sur la piste du Père Castor », op. cit., p. 236.

12 I. Nières-Chevrel, « Le Père Castor parmi nous », op. cit., p. 69.

13 Christine Plu, « Des œuvres illustrées et réillustrées », La littérature avec les images [en ligne], URL : https://christineplu.fr/des-oeuvres-illustrees-et-re-illustrees/.

14 Christine Plu, « Illustrer et réillustrer », dans : Georges Lemoine, illustrateur au xxe siècle, thèse de doctorat en Littérature générale et comparée, Rennes, Université Rennes 2, 2005 (non publié), p. 320. Voir le pdf en ligne sur : https://christineplu.fr/wp-content/uploads/2021/11/chap8_-troisieme-partie_glemoine_2005.pdf.

15 Christine Plu, « Que deviennent les illustrations des “classiques” pour la jeunesse ? Fragile destin d’images face au tourbillon des rééditions », La littérature de jeunesse avec ses images [en ligne], 2022, URL : https://christineplu.fr/2022/11/02/que-deviennent-les-illustrations-des-classiques-pour-la-jeunesse-fragile-destin-dimages-face-au-tourbillon-des-reeditions/.

16 I. Nières-Chevrel, « Le Père Castor parmi nous », op. cit., p. 72.

17 La Vache Orange et Le Cheval Bleu (1941, 1963) sont réédités aux mêmes périodes et réillustrés par Lucile Butel.

18 Claire Delbard, Le Père Castor en poche (1980-1990), ou comment innover sans trahir, Paris, L’Harmattan, 2007, p. 47.

19 Anne-Catherine Faucher, Paul Faucher ou l’aventure du Père Castor, une révolution éditoriale, Paris, Flammarion, 2021.

20 Un courrier de 1959 informe que l’histoire est créée avec Christopher au cours d’un voyage en Bretagne.

21 Anaïs Charles, « Écrire, illustrer et publier des livres jeunesse dans le contexte de la Seconde Guerre mondiale : l’aventure des albums du Père Castor », Archives en Limousin, n° 55, 2023.

22 Vera Braun est d’origine hongroise, sa correspondance témoigne des difficultés d’une vie de réfugiée en France et du soutien que l’éditeur tente de lui apporter, lié probablement à la proximité de Paul Faucher avec l’Europe centrale.

23 L’album appartient à la série des fac-similés réédités par l’Association des amis du Père Castor en 2015.

24 Souligné dans le courrier. Lettre du 26 mars 1942, dossier 1 J 405 : « V. Braun / V. Leblond », Archives du Père Castor, Meuzac.

25 Lettre à Victorine Leblond, ibid.

26 M. Defourny, « Père Castor », op. cit., p. 729-730.

27 Lettre du 1er octobre 1959, dossier n° 1 J 770, Archives du Père Castor, Meuzac.

28 Isabelle Nières-Chevrel, « L’image au cœur de la lecture : une nouvelle conception de l’album pour enfants », dans : Jacques Branchu (dir.), Le Père Castor, Paul Faucher (1898-1967) : un Nivernais inventeur de l’album moderne (actes du colloque de Pougues-les-Eaux, 20 et 21 novembre 1998), Varennes-Vauzelles, Conseil Général de la Nièvre, 1999.

29 Fiche de synthèse non datée, dossier n° 1 J 770, Archives du Père Castor, Meuzac.

30 I. Nières Chevrel, « L’image au cœur de la lecture », op. cit., p. 127.

31 Ibid., p. 129.

32 Fiche de fabrication, dossier n° 1 J 770, 21 décembre 1959, op. cit.

33 Ibid.

34 Marie-France Barat-Payraud, « Des livres d’activités aux albums de lecture », dans : J. Branchu (dir.), Le Père Castor, Paul Faucher (1898-1967), op. cit., p. 79.

35 Lettre à Paul Faucher, 20 juillet 1961, Correspondance avec Nathan Hale, dossier n° 1 J 770, Archives du Père Castor, Meuzac.

36 Marie-France Barat-Payraud, « Butel, Lucile », Dictionnaire du livre pour la jeunesse, op. cit., p. 152.

37 Guillaume Lecaplain, « Père Castor, 90 ans et toutes ses dents de devant », Libération, 9 septembre 2021.

38 C. Delbard, Le Père Castor en poche, op. cit., p. 215.

39 Ibid.

40 Voir à ce sujet : Marion Durand, Gérard Bertrand, L’image dans le livre pour enfants, Paris, L’école des loisirs, 1975, p. 65.

41 Gérard Franquin, « Hommage à François », dans : Hommage à François Faucher, Les amis du Père Castor, 2019, p. 64-65.

42 Dossier de fabrication, dossier n° 1 J 770, Archives du Père Castor, Meuzac.

43 I. Nières-Chevrel, « Le Père Castor parmi nous », op. cit., p. 70.

44 En 1989, Marlaguette est illustré par Gérard Franquin pour Castor Poche Benjamin.

45 Les albums Marlaguette de 1994 et Les bons amis de 1996 sont réimprimés à partir des planches originales. Cette qualité de réimpression n'est pas toujours possible, comme avec Michka dont les originaux ne sont plus disponibles.

46 Viviane Ezratty et Françoise Lévèque, « Gerda Muller, de Marlaguette à Pivoine », La Revue des livres pour enfants, n° 186, op. cit., p. 102-103.

47 Courriel de Martine Lang, 16 janvier 2024.

48 Calques de Gerda Muller de 1952 et copies de crayonnés de 1993, dossier n° 1 J 683, Archives du Père Castor, Meuzac.

49 V. Ezratty et F. Lévêque, « Gerda Muller, de Marlaguette à Pivoine », op. cit., p. 102.

50 D’après le titre de l’exposition Gerda Muller ou la poésie de la réalité, au MIJ (musée de l'Illustration jeunesse) en 2011.

51 Janine Kotwika, « Muller, Gerda », dans : I. Nières-Chevrel, J. Perrot (dir.), Dictionnaire du livre pour la jeunesse, op. cit., p. 682.

52 Courriel de Martine Lang, op. cit.

53 Marine Landrot, « Quand j’ai illustré Marlaguette, on ne parlait pas d’agressions sexuelles des enfants », Entretien avec Gerda Müller, Télérama, 22 février 2023, URL : https://www.telerama.fr/enfants/reedition-d-un-classique-pour-enfants-avec-marlaguette-le-grand-mechant-loup-n-a-qu-a-bien-se-tenir-7014412.php.

54 Entretien avec Benedicte Roux, éditrice Flammarion jeunesse, 2 février 2024.

55 Ibid.

56 I. Nières-Chevrel, « Le Père Castor parmi nous », op. cit., p. 71.

57 Testament artistique de Gerda Muller, copie conservée au musée de l’Illustration jeunesse, 2014.

58 G. Franquin, « Hommage à François », op. cit., p. 65.

59 Michèle Cochet, Michel Defourny, Claude-Anne Parmegiani, Nathalie Parain, Nantes, éditions MeMo, 2019 ; Catherine Formet-Jourde, Rojan : l'art d'imager la poésie du réel, Meuzac, Association des amis du Père Castor, 2021.

60 Gerda Muller ou la poésie de la réalité, exposition du 9 avril 2010 au 18 septembre 2011, Centre de l’illustration, Moulins ; Père Castor, raconte-nous ton histoire, exposition du 13 juillet 2016 au 4 janvier 2017, musée de l’Illustration jeunesse (MIJ), Moulins ; La fabrique du Père Castor (1931-1967) , exposition du 2 janvier 2020 au 1er mars 2020, bibliothèque municipale Jacques Demy, Nantes ; Père Castor, histoires d’hier et d’aujourd’hui, exposition du 10 septembre au 13 novembre 2021, Galerie Gallimard, Paris.

61 Biens inscrits dans « mémoire du Monde », voir : Ministère de l’Europe et des affaires étrangères, « Les archives du Père Castor », La France à l'UNESCO, URL : https://unesco.delegfrance.org/Les-archives-du-Pere-Castor [consulté le 24 janvier 2024].

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Table des illustrations

Légende Illustration 1 : La Vache Orange : photographies du cahier de Nathan Hale, archives du Père Castor, Maison du Père Castor, Meuzac, dossier n°1 J 601 (à gauche : p. 4, à droite : p. 15).
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/strenae/docannexe/image/11141/img-1.jpg
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Légende Illustration 2 : La Vache Orange, illustré par Victorine Leblond, Association des amis du Père Castor, 2015 [1941], p. 18-19.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/strenae/docannexe/image/11141/img-2.jpg
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Légende Illustration 3 : La Vache Orange, illustré par Victorine Leblond, Association des amis du Père Castor, 2015 [1941], p. 6-7.
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Légende Illustration 4 : La Vache Orange, illustré par Victorine Leblond, Association des amis du Père Castor, 2015 [1941], couverture.
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Légende Illustration 5 : La Vache Orange, illustré par Victorine Leblond, Association des amis du Père Castor, 2015 [1941], p. 2-3.
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Légende Illustration 6 : La Vache Orange, 1961, illustré par Lucile Butel, couverture © Flammarion.
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Légende Illustration 7 : La Vache Orange, 1961, illustré par Lucile Butel, p. 12-13 © Flammarion.
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Légende Illustration 8 : La Vache Orange, 1989, illustré par Lucile Butel, Castor Poche Benjamin : couverture © Flammarion.
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Légende Illustration 9 : La Vache Orange, 1989, illustré par Lucile Butel, Castor Poche Benjamin : p. 26-27 © Flammarion.
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Légende Illustration 10 : La Vache Orange, 1989, illustré par Lucile Butel, Castor Poche Benjamin : p. 40-41 © Flammarion.
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Légende Illustration 11 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Gerda Muller, 1952, p. 4-5 © Flammarion.
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Légende Illustration 12 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Gerda Muller, 1994, p. 8-9 © Flammarion.
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Légende Illustration 13 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Gerda Muller, 1994, p. 16-17 © Flammarion.
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Légende Illustration 14 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Gérard Franquin, 1989, Castor Poche, couverture © Flammarion.
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Légende Illustration 15 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Gérard Franquin, 1989, Castor Poche, p. 10-11 © Flammarion.
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Légende Illustration 16 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Gerda Muller, 1952, couverture © Flammarion.
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Légende Illustration 17 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Gerda Muller, 1994, couverture © Flammarion.
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Légende Illustration 18 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Olivier Tallec, 2013, couverture © Flammarion.
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Légende Illustration 19 : Marlaguette, Marie Colmont, illustré par Olivier Tallec, 2013, première double-page © Flammarion.
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Pour citer cet article

Référence électronique

Christine Plu, « Plusieurs séries d’illustrations pour les albums de fiction du Père Castor : les aléas de l’image au gré de l’évolution éditoriale »Strenæ [En ligne], 24 | 2024, mis en ligne le 01 septembre 2024, consulté le 06 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/strenae/11141 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12evi

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Auteur

Christine Plu

Docteur en littérature générale et comparée, ex-enseignante à l’Inspé de l’académie de Versailles pour les masters PE et littérature de jeunesse (CY Cergy Paris Université)

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