1L’intensification des activités humaines au cours du xxe siècle, ainsi que la transition climatique entre le petit âge glaciaire (PAG) et le changement global actuel, ont progressivement conduit à un appauvrissement des milieux fluviaux et riverains : recul de la forêt alluviale sous l’effet de la sylviculture et des aménagements hydrauliques ; perte d’habitats consécutive à la stabilisation et à l’incision des chenaux ; pollution des eaux d’origine agricole et/ou industrielle ; homogénéisation des paysages, etc. (Gregory, 2006 ; Trémolières et Schnitzler, 2007 ; Rinaldi et al., 2013). Il est aujourd’hui admis que cette évolution a impacté et impacte encore les services écosystémiques, i.e., les fonctions propres aux écosystèmes, qui s’avèrent bénéfiques pour les sociétés (Westman, 1977 ; De Groot et al., 2000 ; MEA, 2005 ; Dufour et Piégay, 2006, 2009 ; Seppelt et al., 2011) :
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fonctions de production (ressources en eau, en sédiment, en bois, en sol cultivable, en poissons comestibles, etc.) ;
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fonctions d’habitat (biodiversité et processus d’évolution) ;
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fonctions de régulation (cycles bio-géochimiques, expansion des crues, etc.)
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fonctions d’information (possibilité de promenade, de détente, d’activités sportives, d’inspiration artistique, etc.).
2Afin de préserver ces services, les acteurs impliqués dans la gestion des cours d’eau, fortement encouragés par la directive Cadre sur l’eau en Europe (DCE – Parlement européen et conseil de l’Union européenne, 2000), s’appliquent depuis plusieurs décennies à mettre en œuvre des projets de restauration.
3Le terme générique de « restauration » regroupe des actions diverses, qui visent à reconstituer les principales fonctionnalités du milieu (réhabilitation), à créer de nouvelles fonctionnalités (réaffectation), ou encore à tenter de reconstituer l’écosystème préexistant dans son ensemble (restauration stricto sensu) – (ASTEE, 2013 ; Morandi, 2014). Quelque soit l’objectif ciblé, ces interventions impliquent une modification plus ou moins profonde de systèmes environnementaux complexes, dont les conséquences à moyen et long termes sont difficiles à estimer. Il est donc essentiel que ces démarches se situent à la croisée entre ingénierie écologique et recherche scientifique. L’implication des chercheurs en science de l’environnement permet en effet que les opérations mises en œuvre reposent sur une solide connaissance du fonctionnement du milieu (Brierley, Fryirs, 2005 ; Reid, Brierley, 2015) et qu’en aval, la réponse du milieu à ces interventions soit suivie et analysée (Morandi et al., 2014 ; Erwin et al., 2016). Plus largement, l’attention portée par les chercheurs aux opérations de restauration permet également un questionnement de leur dimension éthique et anthropologique (Bernhardt et al., 2005 ; Dufour, Piégay, 2009 ; Kondolf, 2006 ; Fox et al., 2016).
4À l’image de nombreux cours d’eau européens, la Garonne toulousaine a connu une modification de sa dynamique fluviale tout au long du xxe siècle, qui s’est principalement traduite par la contraction et la stabilisation du chenal (Steiger et al., 1998 ; Valette, 2002 ; David et al., 2015 ; David, 2016 ; David et al., 2016), ainsi que par un phénomène d’incision (Beaudelin, 1989 ; SMEPAG, 1989 ; Steiger, Gazelle, 1994 ; Steiger et al., 2000 ; Jantzi et al., ce volume). Cette évolution a entraîné différents processus d’altération tels que l’abaissement de la nappe alluviale et le dépérissement de la foret alluviale (Steiger et al., 1998 ; James, 1996). Depuis les années 1980-1990, des démarches de restauration sont mises en œuvre afin de préserver les zones humides de cette portion de la Garonne. Toutefois, les travaux réalisés n’ont jamais fait l’objet de rapports de synthèse publics et ont rarement été abordés dans la cadre de communications scientifiques, les chercheurs en science de l’environnement étant peu associés aux projets de restauration.
5Plus de 30 ans après les premiers travaux, l’objectif de cette étude est donc de proposer un premier état des lieux des actions de restauration le long de la Garonne toulousaine, afin de mieux comprendre les objectifs et l’organisation de cette pratique à l’échelle du linéaire. Pour ce faire, nous proposons un inventaire des opérations mises en œuvre, à partir d’une veille internet (Morandi et Piégay, 2011).
6La Garonne toulousaine correspond à un linéaire d’environ 90 km de longueur, compris entre la confluence de l’Ariège à Portet-sur-Garonne et celle du Tarn à Moissac (fig. 1). Ce linéaire s’individualise par son homogénéité d’un point de vue hydrologique et géomorphologique. Il se caractérise par un module de 190 m3/s qui évolue très peu entre l’Ariège et le Tarn, et par un chenal sinueux qui s’écoule au sein d’une basse plaine agricole large de 2 à 4 km, limitée par un système de terrasses pléistocènes.
Fig. 1 – Localisation et délimitation de la Garonne toulousaine
Réalisation : M. David, ArcGIS. Source : BD Alti, Scan25 et BD Carthage
7En raison de la présence de nombreuses zones humides et d’une ripisylve dense (Jaoua, 2015 ; Dumont, 2016), qui contrastent avec les paysages urbains de la métropole toulousaine, la Garonne toulousaine est perçue par les populations riveraines comme un milieu « sauvage » (Valette et al., 2014). Elle est ainsi un lieu privilégié pour les promenades, la pêche, la cueillette et autres activités de loisir. Toutefois, à l’instar de la plupart des grands cours d’eau européens, elle a connu une intensification de l’exploitation de ses ressources au cours du xxe siècle. Dès la fin du xixe siècle, les premiers grands barrages ont en effet été mis en place dans la zone amont de son bassin versant et sur son cours principal. On compte ainsi aujourd’hui une dizaine de barrages sur le lit de la Garonne en amont de Toulouse. Les extractions de sédiment en lit mineur se sont également intensifiées, jusqu’à devenir industrielles entre les années 1960 et les années 1980, avant d’être progressivement interdites à partir de 1985 et déplacées vers la plaine (Beaudelin, 1989 ; Jantzi et al., ce volume). Simultanément, entre 1960 et 1984, des travaux de stabilisation des berges ont été réalisés dans le département du Tarn-et-Garonne (mise en place d’enrochements dans les concavités de méandre et d’épis de protection sur certaines berges ; rescindement de plusieurs boucles de méandres dans les secteurs particulièrement mobiles – SMEPAG, 1989 ; Steiger et al., 2000 ; Valette, 2002). Aujourd’hui, la Garonne toulousaine est encore fortement exploitée pour les ressources qu’elle offre : eau (eau potable et irrigation), bois (populiculture) et sédiments (extractions en gravière).
8L’ensemble des interventions directes et indirectes menées tout au long du xxe siècle, a conduit à une transformation des paysages et des processus hydro-sédimentaires à l’échelle du linéaire. À la fin du xixe siècle, la Garonne toulousaine était en effet marquée par un gradient amont/aval de mobilité latérale et par la présence localisée d’îles végétalisées entre Grenade et Verdun-sur-Garonne (David, 2016 ; David et al., 2016). Au cours du xxe siècle, le linéaire a connu :
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une contraction du lit (réduction des surfaces en île au profit d’un chenal unique) ;
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une stabilisation du chenal (réduction de la mobilité latérale du chenal) :
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une homogénéisation des formes fluviales (disparition des formes originales telles que les îles et les bancs – David, 2016 ; David et al., 2016).
9Simultanément, une incision du chenal en réponse à un déficit sédimentaire majeur a été observée (bras morts perchés, réduction du tapis alluvial et mise à l’affleurement de la molasse – Beaudelin, 1989). Plusieurs phénomènes d’altération sont maintenant constatés, tels que l’abaissement de la nappe alluviale et la réduction des débordements sur la plaine. Sans avoir été quantifiés, ces phénomènes se sont traduits par différentes modifications sur la plaine, notamment le dépérissement de la forêt alluviale depuis les années 1980 (Steiger et al., 1998 ; James, 1996). Par ailleurs, une perte considérable du nombre global d’espèces piscicoles à l’échelle du bassin versant de la Garonne a également été constatée, ainsi que des difficultés pour les migrateurs à remonter le cours de la Garonne en amont de la centrale électrique de Golfech (proche confluence du Tarn). Diverses espèces invasives animales (e. g., écrevisse américaine, rat musqué, ragondin, perche soleil) et végétales (e. g., Érable negundo, Robinier, Buddleia, Jussie) ont également été identifiées comme des menaces pour la biodiversité faunistique et floristique (Commission géographique « Garonne débordante », 2014).
10Aujourd’hui, la Garonne toulousaine fait l’objet de nombreuses procédures de protection : certaines sont d’ordre règlementaire (loi 1930 ; réserve naturelle régionale Confluence Garonne-Ariège ; arrêté préfectoral de Protection de biotope – APPB, etc.) ; d’autres sont de nature foncière (Conservatoires d’espaces naturels ; réseau d’espaces naturels sensibles) ; d’autres encore, reposent sur une approche contractuelle (Natura, 2000). La restauration des fonctionnalités des milieux aquatiques et humides de la Garonne représente par ailleurs un des six enjeux majeurs ciblés par le schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) « Vallée de la Garonne », qui est actuellement en cours de validation et qui devrait être mis en œuvre entre 2017 et 2025 (commission géographique « Garonne débordante », 2014).
11Excepté dans certains cas marqués par une forte activité scientifique (e. g., sur le Rhône : Henry et al., 2002 ; Lamouroux et al., 2006 ; Paillex et al., 2009 ; Riquier et al., 2015, etc.), peu de travaux de restauration donnent lieu à des publications scientifiques. Ces travaux restent ainsi souvent dans le domaine de la littérature « grise ». Bien qu’elle échappe aux circuits classiques de collecte de l’information, cette catégorie de documents est fréquemment mise en avant par les porteurs de projet dans des opérations de communication. B. Morandi et H. Piégay (2011) ont ainsi pu exploiter cette ressource à l’échelle nationale, à travers un système de requête par mots-clés via le moteur de recherche Google. Nous nous proposons ici d’explorer cette méthode à l’échelle du linéaire fluvial de la Garonne toulousaine afin d’appréhender le modèle de restauration établi localement.
12Le terme « restauration » répondant à des définitions multiples et impliquant une volonté du/des gestionnaire(s) de s’inscrire dans ce paradigme, nous avons choisi de nous intéresser aux démarches de gestion au sens large et d’en analyser/réinterpréter les objectifs par le prisme des services écosystémiques. Pour qu’une opération de restauration soit considérée comme telle, il n’a donc pas été exigé que ce terme soit spécifié mais plutôt que les porteurs de projet s’inscrivent dans une volonté, même implicite, de favoriser :
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les services d’habitat (actions visant à préserver la biodiversité végétale ou animale) ;
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les services de régulation (actions visant à rétablir ou maintenir les processus physiques ou biochimiques propres à l’hydrosystème fluvial) ;
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les services d’information (actions visant à améliorer l’aspect ludique ou pédagogique du milieu).
13Les actions orientées vers les services de production n’ont pas été prises en compte en raison de la limite ambigüe entre exploitation des ressources naturelles et amélioration à long terme de l’état du milieu. De même, seules les actions ou propositions d’action concrètes ont été comptabilisées, ce qui exclut les diagnostics environnementaux et les démarches législatives de protection.
14Les mots-clés « Gestion Rivière Garonne » ont donc été entrés dans le moteur de recherche Google afin d’identifier les principales entités impliquées dans la gestion de la Garonne (fig. 2). Le sondage de chaque site web (analyse des 10 premières pages de résultat) a alors permis le recensement des références faites à des actions de gestion menées sur le linéaire d’étude. Pour chaque action, une recherche en ligne plus approfondie a ensuite permis l’analyse des objectifs ciblés. Dans le cas des actions retenues, plusieurs informations ont été relevées (fig. 2) : l’acteur responsable de la maîtrise d’ouvrage, le projet cadre, le site concerné, la date de lancement l’objectif ciblé et la/les fonctionnalité(s) concernée(s). À partir de cette base de données, une analyse statistique descriptive a été effectuée afin de mettre en évidence les grandes tendances de la stratégie de restauration en place le long de la Garonne toulousaine.
Fig. 2 – Représentation schématique de la démarche méthodologique mise en œuvre
Source : M. David
15Au total, 24 sites concernés par des actions visant à préserver les services écosystémiques ont été comptabilisés le long de la Garonne toulousaine (fig. 3). La restauration de ces sites s’avère très souvent le fruit d’une collaboration entre plusieurs acteurs impliqués à différents titres (financement, assistance technique, mise à disposition du foncier, etc.). La seule maîtrise d’ouvrage est répartie entre neuf acteurs majeurs : la communauté urbaine Toulouse Métropole (CUTM) ; cinq communes riveraines ; l’association régionale de protection de la nature Nature Midi-Pyrénées ; le conseil départemental du Tarn-et-Garonne (CD82) et le syndicat mixte d’Étude et d’Aménagement de la Garonne (SMEAG). Chacun de ces acteurs occupe une portion spécifique du linéaire
Fig. 3 – Sites concernés par des opérations de restauration et maîtrise d’ouvrage de ces projets le long de la Garonne toulousaine
Réalisation : M. David. Sources : BD Carthage
16La communauté urbaine Toulouse Métropole (CUTM) détient le monopole du secteur amont (fig. 3), qui correspond au secteur le plus urbanisé et le plus stable historiquement (David, 2016 ; David et al., 2016). Dans ce secteur, afin de mener à bien le projet urbain Grand Parc Garonne visant à réaménager les berges de la Garonne entre Toulouse et Saint-Jory (32 km), la CUTM a amorcé en 2015 : le réaménagement de l’île du Ramier ; la restauration de plusieurs quais dans le centre de Toulouse ; l’aménagement de sentiers de promenade en aval de Toulouse (Toulouse Métropole, n.d. – fig. 3).
17La partie médiane du linéaire, au niveau de la limite administrative entre les départements de la Haute-Garonne (31) et du Tarn-et-Garonne (82 – fig. 3), est ensuite marquée par une forte concentration des sites de restauration.
18Dans ce secteur, quatre communes de Haute-Garonne et une commune du Tarn-et-Garonne assurent une partie de la maîtrise d’ouvrage (CATeZH Garonne, n.d. – fig. 3) : la commune de Saint-Jory (31) est ainsi impliquée dans la « réhabilitation » du méandre de Port-Haut depuis 2006 ; la commune de Grisolles (82) est porteuse d’un plan de « renaturation » de l’ancienne île de Mauvers-les-Bordes depuis 2007 ; la commune de Fenouillet (31) a lancé un plan de gestion de la Roselière des Gourgues en 2009 ; la commune de Grenade (31) est porteuse d’un plan de gestion sur l’île de Martignac depuis 2009 et sur le site de La Nautique depuis 2012 et enfin, la commune d’Ondes (31) est impliquée en association avec son lycée agricole dans la gestion des berges du pont d’Ondes depuis 2013. Toutefois, la CUTM a récemment pris le relais de la maîtrise d’ouvrage sur deux de ces sites : le méandre de Port-Haut en 2011 et la Roselière des Gourgues en 2012 (CATeZH Garonne, n.d. – fig. 3).
19L’association Nature Midi-Pyrénées, a quant à elle obtenu une première autorisation d’occupation temporaire (AOT) du domaine public fluvial en 1986 (association Nature Midi-Pyrénées, n.d.) sur le site du Ramier de Bigorre (fig. 3), dans la commune de Merville (31), grâce à laquelle elle a pu mettre en place des actions expérimentales de gestion et de restauration. Depuis, l’association a obtenu des AOT pour trois autres sites de Haute-Garonne (fig. 3) : les Alluvions de la Save, sur la commune de Grenade (en 2007) ; la Saulaie de Saint-Caprais, également sur la commune de Grenade (en 2007) et Miquelis, sur la commune d’Ondes (en 2008). Cette association est par ailleurs à l’origine de la cellule d’assistance technique à la gestion des zones humides de la Garonne (la CATeZH Garonne) créée en 2008, elle-même impliquée dans de nombreuses démarches de restauration en tant qu’assistance technique mais pour lesquelles elle n’assure pas la maîtrise d’ouvrage (CATeZH Garonne, n.d.).
20La moitié aval du linéaire est enfin occupée par le conseil départemental du Tarn-et-Garonne (CD82) et le syndicat mixte d’Étude et d’Aménagement de la Garonne (SMEAG).
21Le CD82 s’applique depuis 1988, à mettre en œuvre un réseau d’espaces naturels sensibles (ENS) dans son département, i.e., un réseau de sites libres d’accès ou faisant l’objet de mesures de protection, qui présentent un intérêt écologique, patrimonial ou paysager (CD82, n.d.). Six de ces sites sont localisés le long de la Garonne toulousaine, parmi lesquels trois ont fait l’objet d’une communication relative à des actions de restauration (CATeZH Garonne, n.d. – fig. 3) : l’îlot de Saint-Cassian à Mas-Grenier (depuis 2008) ; le bras mort de l’Espinassié sur les communes de Bourret et Montech (depuis 2013) et l’île de Labreille à Verdun-sur-Garonne (depuis 2014). Le CD82 est par ailleurs porteur du projet de sentier Corridor Garonne, visant à proposer un itinéraire de promenade le long de la Garonne, entre les deux extrémités du département.
22Plus récemment, le SMEAG a porté deux grands projets exploratoires sur le territoire de la Garonne toulousaine (SMEAG [a] et [b], n.d.), qui ont conduit à l’élaboration de propositions d’actions de restauration, pour lesquelles il est actuellement à la recherche d’un relais pour la maîtrise d’ouvrage : l’étude pilote territoriale sur « Les paysages de la Garonne des terrasses » (2010-2013) et le projet Territoires fluviaux européens (TFE, 2012-2014). Dans le cadre de la première étude, quatre sites ont fait l’objet de propositions d’aménagement (fig. 3) : « le balcon de Beausoleil » à Grisolles ; « la plage fluviale » à Verdun-sur-Garonne ; « la boucle d’eau et d’arbre » à Finhan et « la promenade des sens entre Roche et Garonne » à Bourret. Dans le cadre du projet TFE, une démarche concertée impliquant gestionnaires, riverains et scientifiques, a permis l’élaboration d’un plan d’action, à l’issu duquel quatre sites pilotes ont été retenus le long de la Garonne toulousaine, dont deux dans le département du Tarn-et-Garonne (fig. 3) : Verdun/Saint-Pierre et Sabatous/Picone.
23Il faut également souligner qu’aucune action n’a été recensée à l’aval de Bourret (fig. 3), ce qui ne démontre pas pour autant un abandon de ce secteur, des actions de restauration ayant pu être réalisées sans opération de communication.
24Au total, 86 actions visant à favoriser les services écosystémiques ont été recensées sur les sites abordés précédemment. Parmi ces actions, 51 ont été accomplies au cours des 30 dernières années (1986-2016), quatre sont en cours de réalisation et 31 sont au stade de projet (fig. 4-A).
Fig. 4 – Temporalité des actions de restauration recensées. A : état d’avancement des 86 actions recensées ; B : chronologie de mise en place des actions accomplies ou en cours ; C : maîtrise d’ouvrage des projets d’action
Sources : M. David
25Malgré une amorce des premières démarches de restauration en 1986 sur le site du Ramier de Bigorre (Association Nature Midi-Pyrénées, n.d.), la dynamique de restauration semble s’être mise réellement en place dans les années 2000 (fig. 4-B), probablement sous l’impulsion de la directive cadre sur l’Eau (DCE – Parlement européen et conseil de l’Union européenne, 2000). Ces actions ont d’abord été portées par l’association Nature Midi-Pyrénées, puis à partir de 2006, par les communes riveraines. Les premières actions du conseil départemental du Tarn-et-Garonne (CD82) comptabilisées datent ensuite de 2008, alors que celles de la communauté urbaine Toulouse Métropole (CUTM), encore plus tardives, n’apparaissent qu’en 2012. Après cette date, les communes riveraines semblent progressivement se désengager du processus de restauration.
26Parmi les 55 actions accomplies ou en cours, 24 actions ciblent la fonctionnalité d’habitat (fig. 5). La majorité de ces actions a été amorcée dans une optique de gestion des espèces végétales. Dans certains cas, le but est d’assurer le maintien des prairies fluviales en rouvrant des clairières et/ou en tentant de les maintenir ouvertes, par broyage, coupe, débroussaillage arrachage et/ou pâturage. Dans d’autres cas, le but est d’assurer le maintien et/ou le renouvellement de la forêt alluviale. Il s’agit alors d’arracher des jeunes pousses (espèces invasives ou peupliers) pour favoriser le développement d’espèces alluviales telles que le saule blanc et l’orme lisse, ou de procéder directement à la plantation de jeunes arbres (e. g., plantation d’ormes lisses, frênes communs et oxyphylles, chênes pubescents, pédonculés ou hybrides et érables sycomorres sur le site du Ramier de Bigorre). Deux actions ciblant la fonctionnalité d’habitat ont également été mises en œuvre dans le but de préserver un milieu plus spécifique : la roselière des Gourgues. Un batardeau a ainsi été installé pour pérenniser l’alimentation en eau de la roselière et le site a été étendu sur 1 000 m2 par étrépage du sol et plantation de phragmites. Par ailleurs, d’autres actions encore centrées sur la fonctionnalité d’habitat visent à assurer la tranquillité des sites, souvent dans l’optique de préserver l’habitat d’espèces d’ardéidés (hérons, aigrettes, etc.). Il s’agit là essentiellement de mettre en place des barrières pour limiter l’accès aux véhicules motorisés ou aux piétons, ou encore de planter des haies afin d’établir des zones tampons.
Fig. 5 – Détail des actions accomplies ou en cours ; A : fonctionnalités ciblées ; B : types d’actions mises en œuvre et maîtrise d’ouvrage
Sources : M. David
27Onze actions ciblent ensuite la fonctionnalité d’information (fig. 5). Il s’agit de la mise en place de divers aménagements d’ordre logistique ou pédagogique, destinés à l’ouverture des sites au public : sentiers de promenade, panneaux d’information, parkings, tables de pique-nique, toilettes, aire de jeu, etc.
28La fonctionnalité de régulation n’est enfin ciblée que par quatre actions (fig. 5). Il s’agit là de rétablir la connectivité hydraulique par suppression d’obstacles à l’écoulement au sein de bras morts ou d’entretenir une dynamique hydro-sédimentaire par dévégétalisation d’atterrissements et plantation de haies de protection autour d’une zone d’érosion.
29Outre ces actions très ciblées, d’autres démarches (16 actions au total), ont été pensées dans un double objectif de préservation des fonctions d’habitat et d’information ou d’habitat et de régulation (fig. 5). Dans le premier cas (11 actions), il s’agit la plupart du temps d’effectuer un nettoyage des sites (enlèvement des déchets) afin de préserver le milieu « naturel » tout en le rendant agréable au public. Des sentiers pédagogiques destinés à limiter les promenades libres ont également été tracés et une action originale de remise en eau d’un bras mort à destination des pécheurs a été réalisée (Ramier de Bigorre, 1986). Dans le second cas (cinq actions), il s’agit de préserver à la fois la biodiversité et le fonctionnement biophysique des zones humides par l’entretien d’une connexion hydraulique, la préservation d’une zone d’érosion ou le maintien d’une prairie ou d’un secteur de forêt alluviale.
30Finalement, il ressort de cet inventaire une prédominance de la fonctionnalité d’habitat dans les objectifs de restauration des actions accomplies ou en cours (fig. 5). En effet, 73 % des actions sont tournées en partie ou en totalité vers cet enjeu. La fonctionnalité d’information représente le deuxième objectif, avec au total, 40 % des actions centrées partiellement ou entièrement sur cet enjeu. La fonctionnalité de régulation semble par contre représenter un objectif secondaire puisque seulement 16 % des actions tiennent compte de cet enjeu. Il est également à noter que l’association Nature Midi-Pyrénées et les communes riveraines se sont appliquées à mettre en œuvre des démarches très variées, alors que la CUTM et le CD82 se sont concentrées principalement sur la gestion des espèces végétales et l’aménagement des sites dans l’optique d’une ouverture au public (fig. 5).
31Alors qu’aucune action accomplie ou en cours n’a été comptabilisée pour le syndicat mixte d’Étude et d’Aménagement de la Garonne (SMEAG), cet acteur est à l’origine de la majorité des projets de restauration recensés. Parmi les 31 projets comptabilisés, 26 propositions ont en effet été formulées par cet acteur (fig. 4-C). Toutefois, il est pour l’instant impossible d’affirmer que ces actions seront un jour mises en œuvre. Les cinq autres projets dépendent de la communauté urbaine Toulouse métropole (CUTM – proposition de trois actions dans le cadre du projet « Grand Parc Garonne ») et du conseil départemental du Tarn-et-Garonne (CD82 – Corridor Garonne et bras-mort de l’Espinassié).
32Contrairement aux actions déjà accomplies ou en cours de réalisation, qui ciblaient prioritairement la fonction d’habitat (fig. 5), les projets d’action accordent une plus grande attention à la fonction de régulation. Au total, 17 projets, soit 55 %, abordent en effet cette question (fig. 6). Parmi ces projets, huit actions sont centrées uniquement sur cette fonctionnalité (fig. 6). Elles ont été proposées dans le cadre du programme « Territoires fluviaux européens » (TFE – SMEAG) et visent à favoriser le rôle épurateur des zones humides de la Garonne par le biais de différentes actions plus ou moins concrètes : définition de plans de gestion de bras morts, restauration d’axes d’écoulement périodique entre le cours d’eau et les zones humides ou aquatiques environnantes, et mise en place d’une bande tampon végétale entre les zones agricoles et les bords de la Garonne. D’autres aspects de la fonction de régulation sont également abordés par deux de ces actions : la dynamique hydro-sédimentaire par le retrait d’enrochements et la protection de la plaine par gestion ou aménagement de haies autour des sites de gravière. Neuf autres projets, également issus du programme TFE (seul un de ces projets est porté par le CD82), ciblent à la fois la fonction de régulation et la fonction d’habitat (fig. 6). Il s’agit avant tout de rétablir une ripisylve de qualité, qui contribue à la fois à la préservation de la biodiversité garonnaise et au maintien du rôle épurateur de ce corridor végétal. Dans certains cas, cette restauration de la ripisylve est en plus associée à l’aménagement d’une plage de galets.
Fig. 6 – Détail des projets d’action. A : fonctionnalités ciblées ; B : types d’actions mises en œuvre et maîtrise d’ouvrage
Sources : M. David
33Par ailleurs, 12 projets (39 %) se concentrent sur la fonction d’information (fig. 6). Dans le cadre du projet TFE, il s’agit d’aménager des sentiers de promenade sur trois des sites pilotes. Dans le cadre du projet « Garonne des terrasses », il s’agit d’aller plus loin dans l’aménagement des sites en soignant l’esthétique paysagère et en introduisant quelques infrastructures, notamment des aires de jeu. Dans le cas de la CUTM, il s’agit de l’aménagement d’un chemin piétonnier au niveau de l’hôtel-Dieu et du réaménagement total de deux quais toulousains (île du Ramier et port Viguerie) : mise en place d’un ponton d’amarrage, aménagement d’un parcours santé, développement de jardins éducatifs, cheminement pour piétons et cyclistes, plantation d’arbres, dallage, aménagement d’une piscine flottante, etc. Un dernier projet, porté par le CD82, correspond au sentier Corridor Garonne.
34Enfin, seuls deux projets ciblent uniquement la fonction d’habitat (gestion de boisements alluviaux dans le cadre du projet TFE – fig. 6).
35S’il permet un accès facile et rapide à de nombreuses informations relatives aux démarches de restauration, Internet présente l’inconvénient de fournir un inventaire non exhaustif des opérations. Les résultats des recherches effectuées sont en effet dépendants des efforts de communication fournis par les différents acteurs de la restauration. Par exemple, les acteurs qui profitent du média Internet pour leur fonctionnement (e. g., justification de dépenses, promotion de compétences, etc.) sont souvent moteurs en termes de communication. C’est le cas de l’association Nature Midi-Pyrénées, qui est à l’origine de nombreuses opérations de communication relatives à des démarches dont elle est l’initiatrice ou dans lesquelles elle est impliquée en tant qu’assistance technique (CATeZH Garonne). En opposition, certaines actions anciennes ou portées par des acteurs « anonymes » n’ont fait l’objet d’aucune opération de communication. Nous avons ainsi connaissance de cas de reconnexion de bras dans les années 1990 (conclus par un échec), qui n’apparaissent pas sur les pages web consultées.
36Par ailleurs, l’hétérogénéité des informations disponibles induit une certaine ambigüité autour de la notion d’« action » de restauration. Par exemple, dans le cas du Ramier de Bigorre (association Nature Midi-Pyrénées), chaque démarche réalisée a fait l’objet d’une communication à part entière : restauration d’une vanne en amont d’un bras, fauche annuelle de la prairie, établissement de lisières complexes en bordure du bras, etc. En opposition, dans le cas du port Saint-Pierre dans le centre-ville toulousain, une action unique de « réaménagement » a été mise en avant par la communauté urbaine Toulouse métropole (CUTM). Pourtant, derrière ce terme, sont entendus à la fois l’emmarchement du quai, la mise en place d’une circulation douce, la densification de la végétation et l’installation d’une zone wifi. Il faut donc envisager la sous-estimation de certaines opérations.
37Enfin, certaines informations n’étant pas systématiquement disponibles, les critères nécessaires à la mesure de l’ampleur des opérations n’ont pas pu être pris en compte (e. g., le budget des opérations, la durée des actions ou encore les résultats obtenus). De la même manière, le degré d’intégration des riverains n’a pas pu être évalué, alors que certains projets reposent sur une approche concertée (Territoires fluviaux européens – TFE). Ces derniers éléments limitent encore notre compréhension du contexte de restauration le long de la Garonne toulousaine.
38La construction d’une enquête sociale auprès des acteurs de la restauration identifiés dans cette étude, permettra de pallier ces différentes lacunes et d’apporter une meilleure compréhension du modèle de restauration garonnais-toulousain. La construction d’un questionnaire sur la base d’une typologie des opérations existantes, permettrait par exemple de valider, compléter et homogénéiser les informations recueillies. Ce type d’étude serait également l’occasion de questionner les perceptions et représentations de l’ensemble des acteurs (comprenant les riverains), afin de mieux évaluer les enjeux-attentes qui reposent sur les projets et le degré de satisfaction-insatisfaction des acteurs concernés (Rivière-Honegger et al., 2014 ; Simonet et Salles, 2014).
39Malgré les limites énoncées précédemment, ce travail d’inventaire révèle la grande diversité des contextes de mise en œuvre de la restauration le long de la Garonne toulousaine.
40Nous observons d’abord une hétérogénéité en termes d’emprise spatiale des différentes structures porteuses de projets. Le syndicat mixte d’Étude et d’Aménagement de la Garonne (SMEAG) travaille en effet sur un territoire étendu (bassin de la Garonne), qui se prête à une approche globalisante. Bien que les huit sites pilotes définis dans le cadre des projets « Garonne des terrasses et Territoires fluviaux européens » (TFE) se concentrent préférentiellement dans le département du Tarn-et-Garonne, le SMEAG mène ainsi une réflexion de mise en cohérence des démarches de restauration à l’échelle du linéaire fluvial. En opposition, l’association Nature Midi-Pyrénées, le conseil départemental du Tarn-et-Garonne (CD82) et la communauté urbaine Toulouse métropole (CUTM), ne sont concernés que par des portions de linéaire. De la même manière, les communes riveraines, se concentrent sur des tronçons réduits, localisés dans leurs territoires respectifs.
41Les objectifs et intérêts des différents acteurs apparaissent également très variés. Les objectifs du SMEAG dans le domaine de la restauration résident en effet dans la connaissance et la compréhension du milieu, alors que les autres acteurs s’inscrivent dans une démarche plus interventionniste. L’association Nature Midi-Pyrénées et la plupart des communes riveraines cherchent ainsi à préserver l’environnement et plus spécifiquement à sauvegarder la biodiversité. Le CD82, en acceptant la responsabilité de mise en œuvre d’un réseau d’espaces naturels sensibles (ENS), cherche également à défendre ces enjeux (protection des sites présentant un intérêt écologique, patrimonial et/ou paysager) tout en affichant une volonté forte d’ouverture des sites au public. La CUTM, à travers le projet urbain « Grand Parc Garonne », cherche quant à elle avant tout à valoriser le corridor garonnais en termes d’usage, en l’intégrant dans l’espace urbain toulousain.
42Il apparaît enfin que les moyens matériels dont disposent les différents acteurs sont eux aussi très hétérogènes. Alors que la CUTM et les communes riveraines disposent du foncier pour agir directement sur le lit et les berges, le CD82 et l’association Nature Midi-Pyrénées doivent préalablement acquérir des terrains (respectivement par le biais d’amodiations via la direction départementale des territoires – DDT – et d’autorisations d’occupation temporaire – AOT – du domaine public fluvial). Par ailleurs, alors que la CUTM a inscrit ses démarches de restauration dans un projet urbain de grande ampleur (« Grand Parc Garonne ») et que le CD82 dispose de la taxe ENS pour financer les actions menées, l’association Nature Midi-Pyrénées et les communes riveraines doivent faire appel à un soutien financer extérieur (principalement l’Agence de l’eau et la direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement – DREAL).
43Bien que les contextes de mise en œuvre soient hétérogènes, les opérations de restauration recensées le long de la Garonne toulousaine apparaissent très souvent tournées vers la gestion des espèces végétales (arrachage, débroussaillage, plantations, etc.) et/ou l’aspect ludique et pédagogique des sites (création de sentiers de promenade, installation d’infrastructures, etc.). La forte implication de l’association de protection de la nature Nature Midi-Pyrénées dans les projets de restauration peut expliquer la prédominance des opérations de gestion de la flore, cette structure prônant avant tout la préservation de la biodiversité. Ces démarches sont également facilitées par leur simplicité logistique et leur faible coût financier. Les démarches d’ouverture des sites au public sont quant à elles plus facilement valorisables auprès des riverains, ce qui peut favoriser leur financement.
44En opposition, la dynamique hydromorphologique représente un enjeu encore très secondaire, abordé à travers des opérations anecdotiques de reconnexion de bras et de dévégétalisation d’atterrissements. Pourtant, les problématiques de contraction, stabilisation et incision du chenal de la Garonne sont de mieux en mieux décrites dans la littérature (Beaudelin, 1989 ; Steiger et al., 1998 ; David, 2016 ; David et al., 2016 ; Jantzi et al., dans ce volume) et la durabilité de certaines opérations de restauration de la biodiversité dépend de cette dynamique (Adam et al., 2007). Comme pour la plupart des cours d’eau, la faible présence des opérations de restauration hydromorphologique (enlèvement de structures de protection des berges, injection de charge sédimentaire, reconnexion d’annexes fluviales, etc.), peut s’expliquer par la lourdeur des interventions, qui nécessite un investissement financier notable, et par la nécessité d’un accès au foncier. Toutefois le manque de vision globale est également à mettre en cause car peu d’actions comptabilisées dans cette étude ont été pensées dans l’optique de cibler plusieurs objectifs à la fois, dans une démarche de gestion intégrée.
45Les différents enjeux abordés précédemment sont clairement identifiés dans le document de diagnostic territorial, établi dans le cadre du schéma d’aménagement et de gestion des eaux actuellement en cours d’élaboration (SAGE vallée de la Garonne – commission géographique « Garonne débordante »). Parmi les grandes thématiques, le volet « L’eau : un atout pour l’attractivité du territoire » souligne en effet le potentiel de la Garonne dite « débordante » pour le tourisme nature et patrimonial, ainsi que la tendance actuelle de retour des sociétés vers le fleuve. Par ailleurs, le volet « Des milieux aquatiques et humides à préserver et à reconquérir » aborde les problématiques liées à la biodiversité (espèces invasives, difficultés de migration, etc.) mais expose aussi clairement les enjeux liés à l’altération de la dynamique hydromorphologique (raréfaction des sites potentiels de frayère due au déficit sédimentaire, déconnexion des annexes fluviales sous l’effet de l’enfoncement du lit, etc.). On peut ainsi s’attendre à ce que ces questions fassent l’objet d’une plus grande attention dans les années à venir.
46Le programme de restauration hydraulique et écologique mis en place dans les années 1990 sur le Rhône représente aujourd’hui un modèle en matière de restauration. Ce programme cherche à répondre à deux problématiques territoriales majeures :
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le système de tenons, traverses et digues basses de la fin du xixe siècle (« système Girardon ») qui contient le fleuve dans un chenal étroit et stable ;
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la série d’ouvrages à but énergétique construits au cours de la seconde moitié du xxe siècle, qui représentent des obstacles aux dynamiques amont-aval et dont le système de dérivation réduit les débits du Rhône court-circuité.
47Un triple objectif a été défini afin d’améliorer les conditions de ce milieu fortement aménagé, tout en respectant les enjeux économiques associés : l’augmentation du débit réservé dans les sections court-circuitées du fleuve ; la restauration des anciens chenaux et annexes fluviales ; la restauration des voies migratoires pour les espèces piscicoles.
48Au total, neuf partenaires institutionnels sont associés autour de ce projet commun (agence de l’Eau, Compagnie nationale du Rhône – CNR, DREAL, EDF, syndicats, plan Rhône et conseil régional), parmi lesquels un acteur fort participe activement au financement et à la maîtrise d’œuvre des projets : la CNR. Une équipe de recherche pluridisciplinaire est également associée à ce programme. Elle réalise ainsi le suivi des opérations de restauration et évalue la réponse du système.
49Ce schéma contraste fortement avec le modèle de restauration décrit le long de la Garonne toulousaine, qui s’avère finalement marqué par une absence de gouvernance globale et des objectifs de restauration localisés et modestes au regard des enjeux soulevés dans la littérature scientifique. Toutefois, la perspective de la mise en application du SAGE « vallée de la Garonne » courant 2017, laisse espérer une redéfinition des enjeux prioritaires à préserver, sur la base d’un diagnostic territorial établi à l’échelle du linéaire. De la même manière, l’attribution de la compétence gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI) aux communes et à leurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (communautés de communes, communautés d’agglomération, communautés urbaines et métropoles) laisse espérer un nouvel engagement des collectivités locales qui semblaient depuis quelques années en recul sur la question de la restauration. La possibilité d’un transfert de cette compétence à un syndicat mixte pourrait également permettre l’essor d’un acteur fort, porteur d’une approche globale à l’échelle du linéaire, tel que le syndicat mixte d’Étude et d’Aménagement de la Garonne (SMEAG).
50À partir d’un corpus de 86 actions visant à améliorer les services écosystémiques de la Garonne, ce travail exploratoire apporte plusieurs éléments utiles à la compréhension du modèle de restauration mis en œuvre le long de la Garonne toulousaine. Ce modèle de restauration se traduit d’abord par la multiplicité des acteurs impliqués dans la maîtrise d’ouvrage des actions de restauration (neuf acteurs comptabilisés au total), à l’origine d’une forte hétérogénéité des contextes de mise en œuvre. Par ailleurs, les actions réalisées s’inscrivent principalement dans une démarche de préservation des espèces et milieux jugés d’intérêt, ainsi que dans une volonté de valorisation des sites auprès du public. Ce travail permet ainsi de questionner l’efficacité d’un modèle de restauration marqué par une absence de gouvernance globale à l’échelle du linéaire et de souligner la place réduite accordée aux problématiques hydromorphologiques pourtant mises en évidence dans divers travaux scientifiques antérieurs.