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2024
Épreuves, morale, émotions : une nouvelle cartographie pour l’analyse des relations professionnelles ?

« Travail noble, travail ingrat » : les ressorts d’une relation au travail ambivalente chez les nounous africaines à Paris

“Noble Work, Thankless Work”: The roots of an ambivalent relationship to work among African nannies in Paris
“Trabajo noble, trabajo ingrato”: las raíces de una relación ambivalente con el trabajo entre las niñeras africanas de París
Adrien P. Batiga

Résumés

Cet article se propose d’analyser la double ambivalence caractéristique de la relation des nounous africaines à leur travail. D’une part, elles jugent leur travail à la fois noble et ingrat ; d’autre part, leur statut de nounou les place dans une position ambivalente du fait des conditions d’exercice de la garde d’enfants : elles sont au cœur d’un conflit de normes entre l’intime le familial et le juridique. Nous nous appuyons sur des données issues d’une enquête ethnographique (entretiens et observations) menée dans le cadre de nos recherches doctorales, directement auprès de nounous ainsi que lors des permanences du Syndicat national des auxiliaires parentales (SNAP).

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Texte intégral

Introduction

  • 1 Les femmes du square de Julien Rambaldi, sorti en salle le 16 novembre 2022, avec la comédienne Ey (...)
  • 2 Les « nounous » Africaines à Paris. Immigration féminine et travail domestique en France, thèse so (...)

1Avec son film Les femmes du square, Julien Rambaldi1 a remis sur le devant de la scène la figure de la nounou2 africaine. On y suit les péripéties d’Angèle, projetée malgré elle dans le monde de la garde d’enfants à domicile. Elle y découvre la précarité du métier ainsi que l’exploitation que subissent certaines de ses collègues, et décide de se battre pour défendre ses droits et ceux de ses consœurs. Le film donne à voir toute la charge affective et morale vécue par certaines nounous, écartelées qu’elles sont entre les liens de proximité noués avec les enfants et les relations parfois plus tendues établies avec les parents.

2Comment se manifeste l’ambivalence de la relation qu’entretiennent les nounous avec leur travail ? Comment cette ambivalence se reflète-t-elle dans la prise en charge syndicale des griefs de ces femmes quand elles sont en conflit avec leurs employeurs ? Comment remettre de la norme juridique dans des expériences de travail où plusieurs registres normatifs se confrontent les uns aux autres ? C’est à cet ensemble de questions que tente de répondre cet article. Il s’inscrit à la fois dans la continuité des travaux de sociologie des emplois de services, de l’immigration de travail domestique et des care studies.

3Après avoir posé le cadre théorique et méthodologique de cette recherche, nous analyserons les principaux fondements de l’ambivalence de la relation que les nounous entretiennent avec la garde d’enfants à domicile. Dans une seconde partie, nous verrons comment, à travers le recours au syndicat, transparaît une autre forme d’ambivalence, qui tient cette fois aux conditions mêmes dans lesquelles les nounous exercent leur travail. En se situant aux frontières de l’intime et du professionnel, la garde d’enfant à domicile pose des difficultés pour ce qui est de la définition même du contour statutaire de ces travailleuses.

L’essor des emplois dits du care et la redécouverte de la figure de la nounou

Entre politiques familiales et immigration féminine

  • 3 Cette convention est l’œuvre de la Fédération des particuliers employeurs de France (FEPEM), créée (...)
  • 4 On peut citer la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE), le complément de libre choix du mode (...)

4En France, le secteur des emplois domestiques de service et de soin à autrui a connu un essor florissant depuis les années 1990 (Puech, 2012). Le travail de soin comble en partie les difficultés liées à l’augmentation des besoins et à l’indisponibilité d’une partie des femmes qui assuraient auparavant ce travail gratuitement dans la sphère familiale (Ibos et al., 2020). En effet, en même temps qu’ils encourageaient le salariat des femmes, les gouvernements successifs ont mis en place des aides pour soulager les familles ayant recours à de tierces personnes pour accomplir des tâches domestiques. Au début des années 1980 est mise en place la Convention collective des salariés du particulier employeur3 pour réglementer le secteur. Suivront d’autres dispositifs tels que le chèque emploi service, en 1994, pour faciliter les procédures dans le cadre des associations de service à la personne et des particuliers faisant appel aux employés à domicile. Les politiques d’aide à l’accueil des jeunes enfants entrent également dans ce cadre4.

5Parallèlement, à partir des années 1990, on remarque une accélération des flux migratoires féminins à l’échelle globale (Castel & Miller, 1998). En France, les femmes africaines commencent à arriver de façon importante durant les années 1970. Parmi les immigrés originaires du sud du Sahara, la part des femmes n’a cessé de progresser pour atteindre 59 % des arrivées après 1998 (Beauchemin et al., 2015). D’abord actrices d’une immigration familiale mise en place pour rejoindre leur conjoint, les femmes vont se mettre progressivement à construire des projets migratoires autonomes. En migrant seules, elles sont nombreuses à devoir se contenter d’emplois précaires dans le service domestique et le soin à autrui, notamment. Ces secteurs sont devenus une sorte de refuge pour ces catégories d’immigrées dont l’insertion sur le marché du travail est difficile quand elles arrivent en France (faibles qualifications ou non-reconnaissance de celles-ci). Les femmes qui occupent ces emplois n’ont pas le choix et s’orientent vers les seules filières qui leur sont proposées, et même fortement suggérées (Croff, 1994 ; Talbot, 2018).

  • 5 Avril et Cartier (2019) ont montré la portée heuristique de la thèse de Hochschild, ainsi que ses (...)

6Dans la recherche académique, ces problématiques sont regroupées sous l’expression de care studies. Ce champ d’études s’appuie sur les travaux en psychologie (Gilligan, 2008) et en philosophie politique (Tronto, 2009) déployés pour saisir empiriquement ce phénomène de sollicitude vis-à-vis d’autrui et les enjeux qu’il soulève. Par exemple, Evelyn Glenn (2010) a mis en évidence la crise du care dans le cas états-unien. Il s’agit d’un déficit de travailleurs, surtout de travailleuses, dans le domaine des métiers du soin, et qui concerne, dans une large mesure, les sociétés occidentales. C’est la main-d’œuvre féminine immigrée venue des pays du Sud qui vient combler en grande partie ce déficit. Selon Arlie Hochschild (2004), ces femmes mettraient à disposition des ressources émotionnelles destinées à être consommées dans les grandes villes du Nord, par les enfants, les personnes malades ou encore les personnes âgées. Des ressources qu’elle appelle le nouvel or du monde5.

7En interrogeant à nouveaux frais les travaux anglo-saxons (Paperman & Laugier, 2011), les chercheurs et surtout les chercheuses françaises vont s’intéresser à des secteurs aussi variés que le travail d’aide à domicile des femmes issues de milieux populaires (Avril, 2006 ; Avril, 2008), la garde d’enfants à domicile par les femmes immigrées ivoiriennes (Ibos, 2012) ou encore la domesticité dans la haute bourgeoisie (Delpierre, 2022). Les care studies françaises offrent ainsi un regard qui se focalise sur la vie ordinaire de ces femmes en invitant à une réflexion sur l’expérience sensible de ces dernières ; et puis prend du recul pour réinscrire ces situations singulières dans une critique globale de la division sociale, sexuelle et raciale des charges générées par le soin d’autrui (Ibos et al., 2020).

Observer la figure de la nounou à partir du terrain parisien

  • 6 Les prénoms des enquêtées ont été modifiés.

8Nous nous appuyons sur un matériau recueilli au cours de nos recherches doctorales, menées en région parisienne entre 2016 et 2019. Nous mobilisons ici notamment des extraits d’une série de 23 entretiens répétés avec 14 nounous et des notes issues d’observations ethnographiques. Les entretiens se sont déroulés soit au domicile des nounous, soit dans un café ou encore au square, pendant les moments des gardes. Des discussions informelles, tissées au cours des observations, viennent appuyer le matériau ethnographique. Les observations se sont déroulées dans trois sites. Un square de l’Ouest parisien, où l’une de nos principales enquêtées venait quotidiennement avec ses collègues sortir, faire jouer les enfants dont elles avaient la garde, les matins entre 10 h 30 et 12 h 30 et les après-midi entre 15 h 30 et 18 h 30. Le deuxième site d’observation est un square situé dans l’Est parisien, et fréquenté par les nounous sur des plages horaires à peu près similaires. Nous avons enfin mené des observations participantes lors de permanences du Syndicat national des auxiliaires parentales (SNAP), afin de comprendre le cadre juridique de la garde d’enfants à domicile et les enjeux que celui-ci soulève. Il s’agit d’un syndicat créé en 2012 par Sabine6, une ancienne nounou d’origine ivoirienne, pour défendre les droits des femmes qui exercent la garde d’enfants à domicile (voir Encadré infra). Notre rôle consistait principalement à aider à remplir les fiches pour les nouvelles adhésions ou les renouvellements d’adhésion des membres, à prendre les rendez-vous pour les cas litigieux ou encore à rédiger les courriers à destination des employeurs sous la dictée de la responsable syndicale, tout en écoutant les nounous faire le récit des différends qui les opposaient à leurs employeurs. Cette participation aux petites tâches administratives nous a permis de mieux comprendre les sources des conflits pouvant émerger entre les nounous et leurs employeurs.

9Les femmes que nous avons interrogées sont principalement originaires de la Côte d’ivoire, mais aussi du Cameroun, du Congo, du Togo, du Sénégal et de la Guinée. La moyenne d’âge était de 46 ans : au moment des dernières entrevues, la plus âgée avait 59 ans et la plus jeune 33 ans. Elles ont vécu au moins dix ans en France pour certaines, près de deux décennies pour les plus âgées. La plupart vivent en France avec leurs enfants, célibataires ou mariées ; d’autres ont un enfant resté dans leur pays d’origine, tandis que les autres vivent en France. Si on met de côté les retours ponctuels au pays d’origine, on peut considérer que la vie de ces femmes est ancrée en France. Certaines d’entre elles ont été naturalisées.

10Elles ont presque toutes commencé à exercer la garde d’enfants en étant en situation irrégulière. Pendant nos enquêtes, elles étaient déjà régularisées grâce à leur travail. La garde d’enfants constitue leur activité principale. Elles l’exercent soit sous forme de garde simple auprès d’une seule famille, soit de garde partagée avec deux familles. En moyenne, une nounou gagne environ 800 euros nets mensuels par famille pour cinquante heures de travail par semaine. Une somme qu’il faut donc multiplier par deux dans le cas d’une garde partagée.

Noblesse et ingratitude : les ambiguïtés d’une relation au travail

« Garder les enfants, c’est un travail noble… »

11Pour parler de leur travail, certaines nounous puisent essentiellement dans un registre moral. Elles décrivent leur travail comme noble, parce qu’elles passent beaucoup de temps avec les enfants ; parce que ces derniers ont une forte valeur affective, et parce que les parents leur accordent une grande confiance.

12Le fait de passer du temps avec les enfants des employeurs (en moyenne 10 heures/jour) apparaît comme une vertu associée au travail de la nounou. Celle-ci est souvent témoin de leurs premiers pas et des premiers mots qu’ils prononcent. Ce qui fait dire à Anna qu’elle est comme une seconde mère pour eux :

En quelque sorte, on est comme une deuxième maman, chez les particuliers on passe plus de temps avec les enfants que les parents. Les parents ils arrivent le soir, l’enfant a eu le bain, et la nounou elle arrive aussi le matin, ce qui fait on est beaucoup avec les enfants. (Anna, nounou, 45 ans, mariée, 3 enfants)

13Le temps passé avec les enfants a ceci de noble que ces enfants sont, selon certaines nounous, « ce que les parents ont de plus cher ». Autrement dit, les parents leur confient des êtres à haute valeur affective. Cela n’est possible que dans la mesure où ils font nécessairement confiance à la nounou. Or, ce rapport de confiance, induit par le fait de confier ce que l’on a de plus cher, peut-être mis à mal, quand la nounou a le sentiment qu’il n’est pas accompagné du respect et du traitement que les parents lui doivent. C’est ce qu’indique le fragment ci-dessous, reconstitution d’un échange entre deux nounous dans un parc de l’Est parisien, qui marque cette ambiguïté du rapport au travail :

Normalement c’est un métier très noble, mais malheureusement les parents rendent ce métier très difficile, et là c’est un goût amer que je ressens. Parce que je ne peux pas comprendre que ceux qui ont eu la chance d’avoir des enfants, ont la chance d’avoir un trésor que Dieu leur a confié, donc quand on confie son trésor à quelqu’un, c’est qu’on a confiance en cette personne, et la moindre des choses c’est un minimum de respect, la moindre des choses, c’est de donner à cette personne ce qu’elle mérite. (Notes de terrain)

14Cette dimension de la valeur affective fait écho à un argument récurrent chez plusieurs nounous pour expliquer leur engament dans cette carrière : l’amour accordé aux enfants. On le retrouve dans d’autres secteurs du care, notamment le service aux personnes âgées, où les liens avec les grands-parents servent à légitimer cette vocation pour le travail de soin (Berthonneau, 2020). L’amour comme vocation donne à la nounou un sentiment de liberté de son engagement professionnel, fondé sur la croyance qu’elle répond à sa nature et qu’elle réalise la plénitude de son être (Suaud, 2018). En revanche, de manière plus objective, cet argument sert à mettre de la cohérence a posteriori dans le récit des trajectoires migratoires. Travailler dans des espaces soustraits à toute forme de contrôle apparaît comme une forme de refuge pour des femmes qui se trouvaient en situation irrégulière à leur arrivée en France.

« …et un travail ingrat à fois »

15D’après Caroline Ibos (2008), les relations entre les nounous et les mères relèvent en grande partie d’une grammaire du mépris social. Dans ses travaux sur les nounous ivoiriennes (Ibos, 2012), elle identifie trois formes d’actes méprisants : l’humiliation, la discrimination et la suspicion. L’humiliation consiste à traiter la nounou comme une absente malgré sa présence physique, à demander à l’enfant de confirmer les propos de l’employée ou encore, pour les mères du quartier, à saluer l’enfant tout en ignorant la nounou. La discrimination consiste à traiter la nounou avec très peu d’égard quant aux règles minimales de l’hospitalité, comme le fait de refuser qu’elle regarde la télé. La suspicion consiste en une surveillance de la nounou dont la moralité est supposée douteuse, en ayant recours parfois à des moyens techniques comme des caméras, ou plus couramment en déléguant la surveillance au voisinage, ou encore en rentrant du travail à l’improviste, plus tôt que prévu. Les nounous que nous avons interrogées font une expérience du mépris quelque peu différente. Elles parlent davantage d’ingratitude pour souligner le fait que leur travail ne soit pas toujours reconnu à sa juste valeur par les employeurs, ou qu’elles-mêmes ne soient pas toujours traitées avec dignité.

16La forme d’ingratitude la plus répandue est l’injustice salariale. Elle rejoint en grande partie le thème de l’exploitation salariale que l’on retrouve chez les femmes de chambre étudiées par Isabelle Puech (2006), une main-d’œuvre faiblement rémunérée pour des cadences de travail très élevées. L’injustice salariale peut se traduire par une forme de frustration relative résultant de l’écart entre le salaire perçu et le salaire espéré au regard des efforts et de l’investissement de la nounou dans son travail. L’employeur est souvent persuadé de trop bien la rémunérer, quand cette dernière est convaincue d’être sous-payée. Lors d’une permanence syndicale, nous sommes témoins d’une dispute qui éclate au téléphone entre une nounou et son employeuse, et qui illustre cette divergence d’appréciation. Lorsque la responsable syndicale, Sabine, reproche à l’employeuse de ne pas avoir payé les heures supplémentaires de la nounou, celle-ci réplique que sa nounou peut se vanter d’être « parmi les nounous les mieux payées dans Paris ». Ce à quoi l’employée répondit par un rire ironique et un haussement d’épaules. Une autre nounou, Justine, décrit comme suit l’écart entre la noblesse de son travail et la faiblesse de sa rémunération :

C’est un travail noble dans le sens où on s’occupe des personnes qui sont les plus chères... et puis ingrat, dans le sens où on nous licencie dès que l’enfant a grandi et va à l’école ; et dans le fait de s’occuper de quelqu’un qui est si important dans une famille mais au niveau du salaire ça ne se ressent pas. Ça ne se ressent pas au niveau des salaires ! (Justine, nounou, 39 ans, en couple, mère de 4 enfants)

  • 7 Il s’agit d’aller déposer et récupérer l’enfant scolarisé à l’école.
  • 8 Les nounous qui ont trouvé une nouvelle (deuxième) famille refusent souvent les sorties d’école qu (...)

17Les propos de Justine font entrevoir une dignité de la nounou qui peut aussi être atteinte dans le sens donné par Honneth (2013), c’est-à-dire celui d’une atteinte à l’image positive que la personne a d’elle-même. En plus d’être mal rémunérée, elle a l’impression de ne plus servir à rien, d’être « jetée après usage », une fois que l’enfant est en âge d’être scolarisé. Dans le cas où la famille tient à garder la nounou, elle lui propose un contrat pour ne faire que les « sorties d’école7 ». Passer d’une garde traditionnelle à un contrat pour « sorties d’école », quoique moins rentable, est vécu comme moins violent qu’une rupture définitive8. Ce sentiment de ne servir à rien une fois l’enfant scolarisé illustre la précarité professionnelle constitutive du secteur de la garde à domicile. Les contrats ont beau être à durée indéterminée, dans les faits, la famille peut y mettre un terme quand elle le souhaite pour diverses raisons : déménagement, place trouvée en crèche, entrée de l’enfant à l’école élémentaire, etc.

18En outre, des relations qui se dégradent brusquement pour une raison que la nounou estime peu valable peuvent être vécues par elle comme un retournement de situation qui participe aussi d’une sorte d’ingratitude, mais d’ordre relationnel cette fois. Au domicile de ses employeurs, la nounou se sent un peu « chez elle », proche de ses employeurs jusqu’au jour où un incident (chute de l’enfant, réclamation d’heures impayées, maladresse ou erreur de la nounou…) vient perturber la relation avec les parents. Elle a alors l’impression que les parents ne la « reconnaissent plus ». Quand elle a jeté les jouets de l’enfant qu’elle gardait, de peur qu’il ne se blesse avec, Laure a dû rembourser intégralement le coût des objets :

[…] Comme moi au pays (Côte d’ivoire) tout ce qui est pointu, il ne faut pas que ça blesse les enfants, donc j’ai tout ramassé, je suis allée jeter sans leur accord. Ah mais ça m’a coûté, non mais ça m’a coûté ! Ça m’a coûté de l’argent. Il a coupé mon argent pendant un an. Des petites voitures, il me disait que ça coûtait 80 euros alors qu’il ment. Il m’a coupé de l’argent pendant un an. (Laure, nounou, 54 ans, mère de 2 enfants)

19C’est dans ces situations que la nounou qui s’estime victime peut être amenée à mobiliser l’argument ethno-racial : les employeurs deviennent des « blancs » et elle-même une « noire, étrangère ». L’injustice se déplace ainsi sur le plan racial et la couleur de la peau devient une clé d’explication. Dans les discussions qui rythment les sorties au square, les employeurs peuvent apparaître dans la bouche des nounous comme des personnes capables du pire et dont elles doivent se méfier (Berthonneau, 2020).

Avec ces gens-là, vous vous entendez très bien mais le jour qu’il y a un problème, on dirait que tu n’es jamais venue chez eux, ils ne t’ont jamais vue ! Ils changent ! je ne sais pas comment expliquer ça ! Peut-être que c’est la partie la plus difficile. Vous êtes des amis, vous causez et tout, mais le jour qu’il y a un problème ils ne peuvent pas penser « ce n’est pas grave », « ça arrive, nous-même ça peut nous arriver ! » (Fina, nounou, 51 ans, mariée, mère de 3 enfants)

  • 9 Plus de quatre ans après certains entretiens, presque toutes nos enquêtées exercent encore la gard (...)

20Quand les nounous font le bilan des années de garde d’enfants, le sentiment d’ingratitude l’emporte sur celui de la noblesse du métier. Cela peut parfois donner à certaines l’envie de quitter ce secteur dès qu’elles en auront l’occasion9. Comme le résume Geneviève (52 ans, célibataire sans enfants) qui venait de finir son contrat : « C’est vraiment un goût amer. Là, actuellement, je ne pense pas pouvoir y retourner, si jamais je trouve une issue de sortie. Concernant les enfants, c’est que de bons souvenirs, mais avec les parents c’est un peu compliqué ! ».

21Par ailleurs, les tensions entre employeurs et nounous peuvent déboucher sur des conflits ouverts, poussant ces dernières à frapper aux portes du Syndicat national des auxiliaires parentales (SNAP). Là encore, on observe que l’action syndicale se heurte, elle aussi, à une forme d’ambivalence. Elle touche cette fois au statut des nounous et aux conditions d’exercice de la garde d’enfants à domicile.

Le recours au syndicat ou comment ramener le privé sur la place publique

Réparer les injustices et s’acculturer aux normes juridiques

  • 10 Le mot est revenu souvent au cours des permanences syndicales, quand l’employeur, après avoir disc (...)

22Faisons d’emblée deux observations. Premièrement, les nounous viennent adhérer quand elles sont en fin de contrat ou quand elles sont en conflit avec leur employeur. Deuxièmement, les employeurs sont rarement au courant que leur nounou est syndiquée. Ils le découvrent quand le syndicat prend contact avec eux. Le coming out syndical est souvent associé, par les employeurs, à une trahison10. « Peu enclines à se rebeller » (Puech, 2006), certaines nounous ressentent également un malaise au départ et hésitent avant d’accepter que le syndicat entre en contact avec leurs employeurs.

Portrait de Sabine : la nounou devenue défenseure des auxiliaires parentales

Sabine arrive en France en 1992, laissant ses deux enfants et son époux en Côte d’Ivoire. Elle exerce la garde d’enfants pendant dix-sept ans. En 2010, elle est licenciée par son employeuse qui lui reproche de ne pas faire le ménage, alors même que cette tâche n’était pas prévue par son contrat. Elle crée alors l’Association des nounous d’Île-de-France (ANIF). En 2012, avec l’aide de la chercheuse Caroline Ibos, elle met en place le premier syndicat consacré à la défense des droits des nounous : le Syndicat national des auxiliaires parentales, SNAP, affilié à l’UNSA. En 2016, elle est faite chevalière de l’ordre national du mérite en France.

Si parmi les entrepreneures de mobilisation des précaires, ce sont souvent celles qui bénéficient de conditions d’emploi plus favorables qui deviennent les leaders (Berthonneau, 2020), dans le cas de Sabine, la précarité a représenté à la fois un inconvénient et un avantage. Inconvénient, parce que Sabine ne disposait désormais plus de ressources et que la publicité de son engagement syndical l’avait « fichée » (sic) dans le milieu : elle ne pouvait se faire embaucher nulle part à Paris comme nounou. Avantage, parce que la menace de la perte d’emploi ne planant plus sur elle, la liberté d’action de Sabine s’en trouvait plus grande, ce qui fut bénéfique à son engagement syndical.

Toutefois, la figure de Sabine constitue une exception dans le petit monde des nounous de la capitale, du moins celles qui sont membres du SNAP. En dehors de Sabine, aucune autre figure n’a émergé pour s’investir dans ce combat. Dès le départ, tout s’est organisé autour d’elle, les autres membres du bureau ne se rendant presque jamais aux permanences. Ainsi, lorsque ses centres d’intérêt se sont davantage déplacés vers la Côte d’Ivoire, le syndicat a connu des périodes sans permanences, jusqu’à son remplacement par sa fille. Celle-ci est également seule, sans personne pour l’aider ou la remplacer en cas d’absence.

23Le recours au syndicat permet non seulement de réparer certaines injustices, mais aussi d’aider à les prévenir à travers la pédagogie et la sensibilisation aux dispositions de la convention collective du secteur. Les problèmes qui amènent les nounous à la Bourse du travail sont pour l’essentiel liés à des questions de paiement, quelle que soit par ailleurs la dimension morale que prend le mode d’expression du grief. Il peut arriver que la prise de conscience de l’injustice se fasse a posteriori, une fois que la responsable syndicale a calculé les sommes réellement dues et que l’adhérente prend conscience subitement de l’écart entre ce qu’elle a perçu et ce que l’employeur lui doit réellement. Cette mauvaise surprise alimente le sentiment de « s’être fait avoir » lié à l’ingratitude du travail dont il a été question précédemment.

24Les problèmes de salaires portent généralement sur les heures supplémentaires que les employeurs ne prennent pas toujours en compte. C’est le cas de Nadège (nounou, 45 ans, originaire du Cameroun, divorcée, 5 enfants) :

  • 11 Le carnet de liaison est un cahier dans lequel la mère des enfants rédige des consignes journalièr (...)

Son contrat, qu’elle a ramené à la permanence, stipulait que du lundi au vendredi elle commençait à 9 h pour finir à 17 h. Or en consultant les nombreux SMS échangés avec ses employeurs, ainsi que le carnet de liaison11 dont elle a fait des copies, il apparaît qu’elle finissait rarement avant 19 h. Le carnet de liaison montrait aussi que, régulièrement, elle faisait des tâches non prévues par son contrat : elle faisait du repassage, préparait le dîner quand la famille recevait des amis, etc. (Notes d’observation aux permanences syndicales, février 2016)

  • 12 La garde partagée ne peut excéder deux familles.
  • 13 Notes de terrain prises dans les locaux du SNAP, avril 2015

25Prendre en charge les difficultés des adhérentes conduit le syndicat à adopter, face à certains employeurs, « un ethos agonistique » (Berthonneau, 2020), c’est-à-dire un ethos revendicatif, qui consiste parfois à être « grande gueule ». Lors d’une séance de confrontation entre une nounou et trois familles qui l’embauchaient de manière illégale12, représentées pour l’occasion par les conjoints, Sabine n’a pas hésité à hausser le ton et à qualifier cette situation « d’esclavage moderne ». Ce à quoi l’un des employeurs a répondu que la comparaison était « exagérée13 ». On est loin des syndicalistes-scribes décrits par Nizzoli (2015), dont la seule fonction consistait à rédiger des lettres d’excuses en réponse aux reproches des employeurs, même quand ceux-ci n’étaient pas fondés.

26Au-delà du volet purement agonistique, le recours préventif à l’action syndicale existe, même s’il est plus rare. Il concerne souvent des adhérentes qui ont eu par le passé des conflits avec leur employeur, lesquels ont été résolus grâce à l’intervention du syndicat. Pour éviter de se retrouver à nouveau dans la une situation similaire, elles viennent se renseigner sur la régularité de leur contrat en amont de la signature. À travers sa pédagogie, le syndicat fournit aux adhérentes des « ressources de résistance à la domination dans le travail » (Collovald & Mathieu, 2009). En s’acculturant aux normes juridiques du travail, les nounous accèdent aux ressources pour demander justice et réparation lors de situations qu’elles perçoivent comme une insulte morale (Vidal, 2009).

27La pédagogie syndicale passe aussi par l’aide à la négociation des salaires. Donnant lieu à un perpétuel turn-over, la garde à domicile s’inscrit dans un cycle de recommencement permanent qui conduit la nounou de familles en familles. Or les nouvelles familles ne prennent pas automatiquement en compte son ancienneté. Parallèlement, Sabine conseille aux nounous de négocier un salaire horaire plutôt qu’un salaire mensuel, de sorte que toutes les heures supplémentaires soient prises en compte le cas échéant. En se familiarisant davantage avec les normes juridiques de la convention collective de leur secteur, les nounous sortent progressivement du rapport de domination vis-à-vis de leurs employeurs pour gagner en reconnaissance.

28Toutefois, adhérer au syndicat et demander un appui en cas de situation conflictuelle ne va pas toujours de soi pour de nombreuses nounous. Le recours à l’action syndicale ne va pas sans un certain coût moral pour la nounou, car cela suppose de rompre tous les arrangements et toute la familiarité qui se sont construits avec les employeurs au fil du temps.

Travailler au cœur de l’intime : l’ambivalence statutaire des nounous

29De nombreux arrangements se nouent au quotidien entre employeurs et employées, parfois aux marges des dispositions contractuelles, sans que l’une des deux parties ne les remette en cause ouvertement. L’exemple de Nadège évoqué précédemment illustre cette situation. Avant de se présenter à la permanence, elle a pris soin de faire des photocopies du carnet de liaison qu’elle entretenait avec la mère des enfants ainsi que des messages téléphoniques qu’elles se sont échangés. On y découvre que, régulièrement, Nadège faisait de nombreuses tâches non contractuelles. En contrepartie, elle pouvait demander une avance sur sa paie ou prendre par exemple une journée pour s’occuper de ses démarches administratives. En outre, la mère des enfants pouvait lui demander, à certaines occasions, de rester plus tard le soir ou d’arriver plus tôt le matin. « C’était comme chez moi », avait-elle résumé. Aussi, quand elle est venue la première fois à la permanence syndicale, elle a hésité un moment avant d’accepter que Sabine contacte ses employeurs.

30De leur côté, certains employeurs, quand ils recevaient l’appel de la responsable syndicale, manifestaient leur étonnement, voire leur indignation de savoir leur nounou syndiquée. Il est fréquent qu’ils appellent la nounou après la prise de contact du syndicat, pour manifester leur incompréhension et lui proposer une solution à l’amiable sans l’intervention d’une tierce partie. L’action syndicale apparaît dès lors comme quelque chose qui vient brouiller les frontières entre l’extérieur et la sphère privée du domicile. La nounou devient celle qui lave le linge sale en public.

31Cette externalisation a un coût moral. En ramenant le conflit sur la place publique, la nounou court le risque de voir les relations se dégrader davantage sur son lieu de travail. Ce coût moral est d’autant plus élevé que de nombreuses nounous ont tissé des relations affectives très fortes avec les enfants. La difficulté réside alors dans cette tension affective : gérer les émotions positives avec les enfants en même temps que celles négatives avec les parents.

32En outre, la nounou a beau se présenter comme une professionnelle de l’enfance, la frontière entre sa vie professionnelle et la vie intime de la famille est poreuse (Delpierre, 2019). Cette porosité favorise l’émergence d’arrangements qui brouillent les contours des dispositions contractuelles. Laurence, (54 ans, d’origine ivoirienne) était bien contente d’avoir « toujours une enveloppe » à Noël, ou « un petit cadeau, soit des gâteaux, soit des tissus » quand son employeuse rentrait de voyage, mais ses congés eux n’ont pas été payés, pourtant, ajoute-elle, non sans ironie « c’est des gens de la finance hein ! ». Le statut de la nounou oscille ainsi entre deux extrêmes : la familiarité et le besoin d’une distance professionnelle. et Justine incarne cette tension entre proximité et distance. Elle se définit comme étant « du genre à fixer les règles » dès le départ et à les « expliquer aux parents de manière claire ». Par exemple, elle s’interdit d’aborder avec les enfants des sujets comme la sexualité ou la religion, qu’elle estime être du rôle des parents. De la même manière, elle ne donne la douche aux enfants que sur demande des parents, car cela relève, d’après elle, de l’intimité. En revanche, pour soulager ces derniers, elle s’est proposé de faire l’aide aux devoirs sans que cela soit prévu dans son contrat, quitte à déborder parfois sur ses horaires.

33Ainsi, lorsqu’un différend survient et déborde la sphère domestique pour arriver au syndicat, la difficulté consiste à remettre du juridique là où plusieurs normes (familiales, affectives, amicales) ont prévalu pendant longtemps. C’est souvent durant la médiation syndicale que l’on découvre de nombreux arrangements tacites, parfois aux marges du droit du travail et de la convention collective.

Conclusion

34Les nombreuses crises qui touchent actuellement différents milieux professionnels confirment l’idée présente chez Everett Hughes (1958) suivant laquelle le travail est l’une des choses à travers lesquelles on est jugé et certainement aussi on se juge soi-même. Autrement dit, non seulement il permet de nous situer dans nos interactions les uns vis-à-vis des autres, mais il peut également renforcer ou affaiblir l’image positive que l’on peut avoir de soi. Il nous ramène au besoin de reconnaissance.

35En invitant à réfléchir sur les notions d’épreuves, de morale ou encore d’émotions, ce numéro thématique permet de réinterroger les relations professionnelles à partir de ces catégories. Dans le cas des nounous africaines à Paris, le discours et la perception qu’elles ont de leur travail font ressortir une relation ambivalente, caractéristique d’une épreuve morale. En effet, tout en valorisant le travail de garde d’enfants à domicile pour sa noblesse, elles le jugent ingrat à bien des égards. Pas une seule d’entre elles, à la fin de nos interviews, n’indiquait accepter de recommander son travail à son et ses enfant(s).

36La garde d’enfants à domicile a encore maille à partir avec le droit. Parce qu’elle ne nécessite aucune qualification pour son exercice, les cadres formels manquent sur lesquels parents et nounous peuvent raccrocher leurs interactions quotidiennes. Ainsi, les arrangements qui se construisent se basent davantage sur les normes de la familiarité. Avec le temps, ces dernières créent parfois une sorte de loyauté de la nounou vis-à-vis de la famille. Garder les enfants au quotidien fait naître des émotions au fil des années du fait de la porosité des frontières entre l’intime et le professionnel. Aussi, en cherchant de l’aide auprès d’un acteur extérieur, la nounou se retrouve en situation de devoir rompre cette loyauté. Résoudre ces conflits en recourant au syndicat s’avère par conséquent avoir un coût moral et parfois émotionnel. Bien souvent, aux conflits avec les parents, s’ajoute le fait pour la nounou de devoir gérer la relation affective avec les enfants.

37De manière plus large, les tensions morales que vivent les nounous, ainsi que l’ambivalence statutaire qui est la leur, sont en grande partie liées à une faible professionnalisation de la garde d’enfants à domicile. Nous pouvons faire l’hypothèse qu’une formation en amont avec des qualifications à la clé, permettrait en partie à la nounou d’avoir une relation moins ambivalente avec son travail. Elle ne serait plus une seconde mère pour les enfants. Elle inscrirait davantage son activité dans des normes juridiques du travail avec une meilleure connaissance de ses droits. Cela suppose une redynamisation du secteur de la garde d’enfants à domicile mobilisant d’importantes politiques de formation et de valorisation des compétences.

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Notes

1 Les femmes du square de Julien Rambaldi, sorti en salle le 16 novembre 2022, avec la comédienne Eye Haidara dans le rôle d’Angèle.

2 Les « nounous » Africaines à Paris. Immigration féminine et travail domestique en France, thèse soutenue le 27 mai 2021, à Sorbonne Université. Nous emploierons le terme plus profane de nounou comme le font les travailleuses elles-mêmes durant les interviews. Le syndicat préfère parler d’auxiliaire parentale.

3 Cette convention est l’œuvre de la Fédération des particuliers employeurs de France (FEPEM), créée en 1948.

4 On peut citer la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE), le complément de libre choix du mode de garde (CMG) ou encore la prestation partagée d’éducation de l’enfant (PreParE). Pour les enfants nés ou adoptés avant le 1er janvier 2015, les parents pouvaient toucher le complément de libre choix d’activité (CLCA).

5 Avril et Cartier (2019) ont montré la portée heuristique de la thèse de Hochschild, ainsi que ses limites.

6 Les prénoms des enquêtées ont été modifiés.

7 Il s’agit d’aller déposer et récupérer l’enfant scolarisé à l’école.

8 Les nounous qui ont trouvé une nouvelle (deuxième) famille refusent souvent les sorties d’école qui leur rapportent nettement moins d’argent que la garde à temps plein. Sauf si ce mode de garde peut être combiné avec la garde d’un enfant plus jeune sur une plage horaire plus large, et dans la même famille que l’enfant qui va à l’école.

9 Plus de quatre ans après certains entretiens, presque toutes nos enquêtées exercent encore la garde à domicile ; comme si une loyauté forcée s’était substituée à un exit possible (Collovald & Mathieu, 2009).

10 Le mot est revenu souvent au cours des permanences syndicales, quand l’employeur, après avoir discuté avec le syndicat, appelait la nounou (en ignorant qu’elle était encore à la permanence) pour demander des explications.

11 Le carnet de liaison est un cahier dans lequel la mère des enfants rédige des consignes journalières pour la nounou ; cette dernière y inscrit ce qu’elle a fait durant la journée avec les enfants, comment ils se sont comportés, etc.

12 La garde partagée ne peut excéder deux familles.

13 Notes de terrain prises dans les locaux du SNAP, avril 2015

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Pour citer cet article

Référence électronique

Adrien P. Batiga, « « Travail noble, travail ingrat » : les ressorts d’une relation au travail ambivalente chez les nounous africaines à Paris »SociologieS [En ligne], Dossiers, mis en ligne le 28 octobre 2024, consulté le 19 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/sociologies/24215 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12q6z

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Auteur

Adrien P. Batiga

Docteur en sociologie, Chargé d’enseignement, Université Paris-Est Créteil (UPEC), Val de Marne, France. Email : adrien-paul.batiga@u-pec.fr

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Droits d’auteur

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