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AccueilNumérosN°4, vol. 5EnquêtesFemmes responsables syndicales en An(…)

Femmes responsables syndicales en Angleterre et identification féministe

Neutraliser leur genre pour mieux représenter leur classe ?
Women trade union leaders in England and feminist identification: neutralizing their gender for better representation of their class?
Sophie Pochic

Résumés

Depuis la fin des années 1970, la majorité des syndicats anglais, sous la pression de mouvements féministes, ont mis en œuvre des politiques d’égalité interne afin de combler le « déficit démocratique » que constitue la faible représentation des femmes, puis des minorités ethniques et sexuelles, dans les appareils syndicaux. Dans des syndicats anglais moins distants des associations féministes qu’en France, les syndicalistes actuelles se désignent‑elles plus facilement comme des « féministes » ou appartenant au sujet politique « femmes » ? Dans des syndicats anglais entrés dans « l’ère de la diversité » dans les années 1990, mais toujours en liens étroits avec le Labour Party, ces syndicalistes vivent‑elles parfois des « conflits de cause », entre égalité femmes‑hommes, anti‑racisme, lutte contre l’homophobie et orientation ouvriériste ? Des récits de carrière de responsables combinées à des observations en 2008 permettent de montrer les variations du rapport à l’identification comme « féministe » des femmes syndicalistes anglaises, notamment suivant leurs générations d’engagement, leur parcours social et professionnel, et leur passage par un mandat spécialisé sur les femmes ou l’égalité. Le soutien affiché aux politiques de discrimination positive, dont elles ont parfois bénéficié, se combine avec une réticence à se présenter comme la représentante d’une seule catégorie, femmes ou d’autres minorités, notamment pour éviter d’être perçue comme priorisant la « cause des femmes » sur d’autres formes de luttes et d’injustices.

Women trade union leaders in England and feminist identification: neutralizing their gender for better representation of their class?

Since the late 1970s, the majority of British trade unions have, under pressure from feminist groups, implemented internal equality policies to address the “democratic deficit,” that is, the under‑representation of women as well as ethnic and sexual minorities in the union hierarchy. If British trade unions entered an “era of diversity” in the 1990s, they still have strong relations with the Labour Party: what are their relations to gender, race, sexuality and class issues now? Do women union leaders still easily identify themselves as “feminists”? Career narratives with union officers combined with fieldwork in women‑only trainings and conferences in 2008 reveal variations in their identification as “feminists” depending on generation, social and professional background as well as union activity, whether specialized or not in gender equality. We will argue that the strong support these women display for affirmative action policies is combined with a reluctance to stand as the spokesperson of one single category – women or another minority – to avoid being perceived as prioritizing the “cause of women” over other forms of struggles and injustices.

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Texte intégral

  • 1 . L’auteure tient à remercier chaleureusement Cécile Guillaume, ainsi que les trois relecteurs et l (...)

1Les syndicats ont longtemps été décrits par les chercheuses féministes comme étant des organisations reproductrices des rapports sociaux de sexe et marqués par la domination masculine1. Les intérêts des travailleuses y étaient mal représentés et défendus, les femmes y accédaient peu aux espaces de pouvoir, d’expression et de négociation, et ces organisations entretenaient des relations complexes avec le mouvement féministe (voir deux revues de littérature sur ce sujet : Dunezat, 2006 ; Pochic & Guillaume, 2013). Pourtant, depuis les années 1970, souvent sous impulsion européenne, ces organisations démocratiques ont essayé de pallier leur manque de représentativité de l’ensemble du salariat, mais aussi de lutter contre la désyndicalisation, par des politiques d’égalité interne et parfois des stratégies ciblées de syndicalisation en direction des femmes, particulièrement dans les pays anglo‑saxons (Ledwith & Hansen, 2012 ; Healy & Kirton, 2013).

2En France, si la rencontre entre syndicalisme et féminisme a bien eu lieu dans les années 1960‑1970 et a contribué à modifier l’agenda revendicatif (Maruani, 1979 ; Le Brouster, 2012), cette rencontre a été inachevée et les liens se sont ensuite distendus. Les syndicalistes françaises se retrouvent souvent dans une position hybride, négociant sur l’égalité professionnelle en entreprise tout en se défendant d’être des « féministes », notamment à la CFDT (Loiseau, 2012 ; Guillaume & Pochic, 2012) ou acceptant pour les rares féministes à la CGT ou SUD que les questions d’égalité et de mixité soient marginalisées (Trat, 2006). La question de l’articulation entre représentation politique (défendre les intérêts des femmes, ou des minorités) et représentativité statistique ou descriptive (avoir des femmes, ou des minorités, en responsabilités) est encore sous‑investiguée dans les études sur les syndicats en France. Elle a davantage été posée à propos des organisations partisanes dans le sillage de la loi sur la parité en politique, d’abord sur les femmes (Bereni & Lépinard, 2004 ; Bereni & Revillard, 2007) puis sur les élus de la « diversité » (Fassin, 2010). Dans les années 2000, les candidates ou leurs porte‑parole jouent ainsi souvent sur le registre d’une féminité exacerbée, mais ne défendent pas toujours la cause des femmes et paraissent exercer leur rôle de femme politique de manière relativement classique (Achin & Paoletti, 2003 ; Paoletti, 2013). De même, les candidats et élus issus de la « diversité », diplômés éloignés socialement des habitants des quartiers pauvres, soutiennent l’idée de discrimination positive au sein de leurs propres organisations, tout en se défendant d’être le candidat d’une « communauté » (Avanza, 2010).

  • 2 . Organisation qui regroupe 54 syndicats affiliés, représentant 6,2 millions de membres, soit envir (...)

3En Angleterre, de manière pionnière en Europe, certains syndicats ont mis en œuvre des politiques internes d’inspiration féministe plus ou moins sophistiquées visant à combler le « déficit démocratique » que constitue la faible participation des femmes aux appareils syndicaux (Cockburn, 1989). Cette pression des féministes des années 1970 au sein des syndicats, partis et appareils législatifs pour l’égalité et contre les discriminations sexistes a été notamment portée par les enseignantes et travailleuses sociales, très proches du Women Lib (Barret‑Ducrocq, 2000). Ces dispositifs ont favorisé une féminisation sélective des structures syndicales, profitant surtout aux femmes blanches et qualifiées et ont plus récemment contribué à la promotion de militantes issues de minorités ethniques et sexuelles (Guillaume, Pochic, 2009 ; 2011). Différentes générations de femmes cohabitent aujourd’hui dans les appareils syndicaux, accédant parfois aux plus hauts postes, comme en témoigne l’élection de Frances O’Grady à la tête du Trade Union Congress2 en septembre 2012 et la présence de 15 femmes secrétaires générales parmi les 54 syndicats du TUC (Kirton, 2014). Dans des syndicats anglais moins distants des associations féministes qu’en France, les syndicalistes anglaises actuelles se désignent‑elles plus facilement comme des « féministes » ou appartenant au sujet politique « femmes » ? Dans des syndicats anglais entrés dans « l’ère de la diversité » dans les années 1990, mais toujours en liens étroits avec le Labour Party, ces syndicalistes vivent‑elles parfois des « conflits de cause », entre égalité femmes‑hommes, anti‑racisme, lutte contre l’homophobie et orientation ouvriériste ? Même quand leurs expériences professionnelles et militantes sont marquées par d’autres formes d’oppression (sexisme, racisme, homophobie), retrouve‑t‑on la même volonté que celle des rares syndicalistes françaises issues de minorités ethniques (Mélis, 2010), d’être considérées comme des « syndicalistes comme les autres » ?

  • 3 . Les continuités et ruptures entre ces deux « générations » de militantes féministes sont discutée (...)

4Nous insisterons dans cet article sur les variations du rapport à la cause des femmes et au féminisme des syndicalistes anglaises, et notamment les variations suivant les « générations » de militantes. Cette notion de « génération » met l’accent sur la communauté d’expériences rassemblant celles et ceux ayant adhéré à une certaine période, expériences inscrites dans un contexte historique et social ambiant (seconde ou troisième vague du féminisme3 notamment), et les temporalités propres de l’organisation syndicale (Labbé & Croisat, 1992). Le rapport à la « cause des femmes » est ainsi marqué par les contextes syndicaux, avec des organisations plus ou moins réceptives à une « grammaire paritaire » et à la logique des quotas (Bereni & Revillard, 2007). Il varie aussi suivant les types de mandats exercés, où la lutte contre les discriminations peut être centrale ou au contraire périphérique dans l’activité de représentation des intérêts des salarié.e.s. À la différence des organisations partisanes et associatives, qui recrutent majoritairement des cadres et des diplômé.e.s, les syndicats anglais syndiquent des salarié.e.s de classes populaires et/ou de minorités ethniques, ce qui permet d’observer empiriquement les intersections entre genre, race, sexualités et classe (Palomares & Testenoire, 2011 ; Le Renard, 2013).

  • 4 . Dans les syndicats anglais, on distingue les élus bénévoles avec des mandats nationaux ou régiona (...)
  • 5 . Réalisée avec Cécile Guillaume que je tiens à remercier ici pour sa précieuse collaboration.
  • 6 . Dans cet article centré sur les subjectivités féminines, seuls les extraits d’entretiens de femme (...)
  • 7 . Qui peuvent être fournis par des salariés de structures publiques, privées ou associatives.
  • 8 . Deux formations pour femmes en 2007 (TUC Women’s officers summer school et Ruskin college’s leade (...)

5Cette enquête s’appuie sur 40 entretiens biographiques, articulant carrière professionnelle, militante et vie privée, avec des permanent.e.s4 de deux grands syndicats anglais, interviewés en 2007‑2008 dans le cadre d’une comparaison entre la France et l’Angleterre sur la fabrication genrée des carrières syndicales5 (Guillaume & Pochic, 2009 ; 2011). Cette approche biographique permet de contextualiser les carrières individuelles dans des organisations véhiculant une rhétorique plus ou moins féministe et intersectionnelle de l’égalité. Ces responsables syndicaux, au niveau régional ou national, 28 femmes et 12 hommes (voir le profil des interviewé.e.s en annexe6), appartiennent à deux des plus grands syndicats anglais, issus de la fusion de syndicats de métier. UNISON, premier syndicat des services publics (1 390 000 membres en 20087), est implanté dans de nombreux secteurs : éducation, santé, collectivités territoriales, énergie, police et justice, secteur associatif. Très féminisé, avec 76 % d’adhérentes, ce syndicat est pionnier par ses mesures de discrimination positive. GMB, puissant syndicat généraliste (600 100 membres en 2008), représente plutôt des métiers manuels dans l’industrie, le transport, le commerce et les services publics. Mixte, mais moins féminisé (45 % de femmes), il est moins outillé sur le thème de la mixité interne de ses structures et de la lutte contre les discriminations. Quelques responsables du Trade Union Congress, organisation fédératrice nationale qui impulse des politiques de lutte contre les discriminations dans ses syndicats affiliés ont également été interviewé.e.s. Ces entretiens ont été complétés par une analyse documentaire des dispositifs d’égalité mis en œuvre, ainsi que des observations de formations ou de congrès syndicaux non‑mixtes en 2007-20088. Les extraits d’entretiens et de documents ont été traduits en français par l’auteure de cet article.

Les pionnières de l’égalité : entre conscience féministe et conscience de classe

  • 9 . Loi sur l’égalité salariale (Equal Pay Act, 1970), loi sur la discrimination sexuée (Sex Discrimi (...)
  • 10 .Traduction de Charter for Equality for Women within Trade Unions. Voir l’annexe électronique n° 1 (...)

6Dans les années 1970, après des décennies d’hostilité aux femmes et l’existence de syndicats féminins créés en réaction (Rose, 1988), les syndicats anglais sont poussés par leur base à se pencher sur la question de la place des femmes à la fois en raison de nouvelles lois anti‑discriminatoires votées par le gouvernement travailliste9, mais aussi de la participation des femmes aux mouvements sociaux et de l’activisme de féministes au sein des syndicats et du Labour Party (Pugh, 2000 ; Barret‑Ducrocq, 2000). Le Trade Union Congress, organisation fédérant la majorité des syndicats anglais, impulse une politique d’inclusion des femmes en modifiant ses statuts et adopte une « Charte pour l’égalité dans les syndicats10 » dès 1979. Pionnière en Europe (Silvera, 2006), cette Charte préconise de réformer les structures syndicales afin d’encourager l’engagement des femmes dans les activités syndicales et de s’assurer que les points de vue des femmes soient bien représentés dans les instances exécutives. Les syndicats affiliés sont incités à créer des commissions femmes, à faire attention aux heures de réunion ou de formation, à offrir des modes de garde pendant les congrès et formations, et à introduire des sièges additionnels dans leurs instances.

  • 11 . Notion théorisée par les féministes comme le renforcement de la « capacité d’agir » des femmes qu (...)

7Certains syndicats affiliés au TUC déclinent dans les années 1980 cette Charte de manière plus ou moins volontariste, en fonction à la fois de leur féminisation, de leur idéologie dominante et de la conviction des dirigeants sur ce sujet (Cunisson & Stageman, 1995). En termes de dispositifs internes, ils se dotent souvent d’une responsable égalité au niveau national et développent des formations pour femmes, investies par des formatrices féministes (Kirton, 2006). Ils soutiennent plus rarement des mesures dites « radicales » comme des groupes non‑mixtes, outils de conscientisation et d’empowerment 11 préconisés et conceptualisés par les féministes (Cockburn, 1989 ; Briskin & Mac Dermott, 1993 ; Healy & Kirton, 2013). Seul NALGO, syndicat du secteur public composé de « cols blancs » des collectivités locales (cadres administratifs, architectes, comptables, géomètres), non affilié au Labour Party et marqué par une orientation très basiste influencée par l’idéologie de la New Urban Left, organise dès 1975 une Conférence pour femmes. Lors de sa fusion avec d’autres syndicats des services publics en 1993 (NUPE et COHSE), les militant.e.s de NALGO feront inscrire les groupes non‑mixtes et plus largement l’égalité interne au cœur de la constitution de ce nouveau syndicat, UNISON.

Le travail endogène des féministes de la seconde vague pour transformer les syndicats

  • 12 . Traduction de « Equality officer ».

8La rencontre entre syndicalisme et féminisme a particulièrement concerné une génération de femmes, jeunes militantes dans les années 1970, qui ont su reconvertir leurs ressources acquises dans le militantisme (féministe et politique) pour accéder à des responsabilités syndicales et accompagner la sensibilisation à l’égalité interne de leur organisation dans les années 1980, particulièrement dans des syndicats de cols blancs du secteur public. En raison de l’ancrage du mouvement féministe anglais dans les milieux de femmes diplômées, et notamment au sein du service public et dans la région de Londres, le fait d’avoir eu un engagement précoce dans le mouvement féministe dans les années 1970 puis d’intégrer ensuite le milieu syndical est cependant un parcours relativement rare. Il est caractéristique de jeunes femmes diplômées, parfois également militantes de partis d’extrême gauche ou communiste, qui ont intégré l’univers syndical sur des postes d’études et de recherches, voire directement comme chargées de l’égalité12, dans les années 1980.

  • 13 . Afin de faire adopter l’amendement « Equal Value » (travail de valeur égale) complétant la loi de (...)

9Certaines des responsables entrées dans les syndicats dans les années 1970 estiment avoir bénéficié de l’expansion des dossiers « Égalité et Femmes » à partir des années 1980, que ce soit en termes de campagnes de mobilisation, de conflits ou de négociation collective. Elles ont pu bénéficier de la création de postes spécialisés, au niveau régional ou national, particulièrement dans des syndicats du secteur public. Ces postes leur ont permis de concilier convictions féministes et activité professionnelle, en organisant des formations et des actions sur l’égalité et les droits des femmes. Vicky considère être représentative de ces soixante‑huitardes qui sont entrées dans les syndicats sur cette seconde vague féministe. Après son diplôme d’histoire à l’université, elle milite dans une association de lobbying sur les droits civiques autour de la loi Égalité salariale de 197013, puis passe du côté des Ressources Humaines au sein d’une mairie travailliste.

  • 14 . The Great Council of London était dirigé de 1981 à 1986 par un travailliste, Ken Livingston, anci (...)
  • 15 . Traduction de « Women’s Employment Adviser ».

Je suis cette combinaison mal taillée d’une féministe et d’une syndicaliste… ce qui ne se marie pas toujours très bien ensemble. J’ai d’abord travaillé pour la mairie de Lewisham, dans la banlieue de Londres en 1984. À l’époque, c’était encore la mairie du Grand Londres14 et au fond, c’était plein de gauchistes comme moi. C’était notre génération, la génération 68, et en gros, la moitié de mes amis avait trouvé un emploi là‑bas. Et s’y développait des politiques très progressistes… c’était une période très excitante. Mon poste était Conseillère sur l’emploi des femmes15, quelque chose comme ça… Et ils mettaient en place tout un département Égalité, le Département Égalité raciale et Femmes, mais moi je n’en faisais pas partie. J’étais dans le Service du personnel, ce qui était assez intéressant, car j’étais à l’intérieur. Tout mon boulot portait sur l’égalité hommes‑femmes dans l’emploi, ce qui signifiait développer des politiques d’égalité salariale, mais aussi développer des formations en apprentissage pour femmes dans des métiers traditionnellement masculins… Au fond, c’était un programme d’action positive (Vicky, femme blanche, 65 ans, ancienne Responsable Femmes, TUC).

  • 16 . Traduction de « Work‑life balance ».

10Quand elle est recrutée en 1988 au Trade Union Congress comme Responsable nationale Femmes, elle apporte au syndicalisme son expertise, mais aussi son réseau d’avocat.e.s et d’universitaires engagé.e.s sur des causes féministes, en particulier l’égalité salariale (Guillaume, 2013). Elle reste trente ans au TUC, responsable de différents dossiers (égalité salariale, temps partiel, articulation vie professionnelle/vie privée16), notamment au niveau européen, et est très proche du « féminisme académique » – universitaires ou expertes, formées aux études de genre (Bessin & Dorlin, 2005). Elle poursuit d’ailleurs depuis son départ en 2008 ses activités comme chercheuse associée à plusieurs grandes universités.

  • 17 . Conflits que l’on retrouve dans des syndicats français, par exemple à la CGT (Trat, 2006) ou à l' (...)

11Être identifiée comme, voire revendiquer d’être « une féministe », s’avère toutefois être un facteur restreignant leur accession à des responsabilités syndicales dans les années 1980 (et 1990 dans une moindre mesure). D’une part, spécialistes d’un champ d’expertise considéré comme secondaire sur l’agenda revendicatif et considérées comme « trop féministes », elles entrent en conflit avec les permanents locaux ou nationaux et risquent d’être disqualifiées pour accéder à des postes généraux17. Pourtant, les syndicats anglais standardisent progressivement leurs modes de recrutement et de promotion, à la fois pour professionnaliser leurs permanents, mais aussi pour être des employeurs « égalitaires et non discriminants » (equal opportunity employer) recrutant seulement sur les capacités des candidats et publiant souvent leurs annonces dans la presse. Mais leur expérience de militantes féministes à l’extérieur des syndicats n’est pas reconnue lors des procédures de recrutement ou sélections internes, alors qu’elles peuvent avoir mené des campagnes de grande ampleur. N’ayant pas suivi le « cursus honorum » des militants issus de la base, elles n’ont pas la légitimité militante que confère une expérience de négociation collective avec des employeurs ou de lutte médiatique pour se faire élire ou recruter au niveau national, et se heurtent à un plafond de verre (Guillaume & Pochic, 2009).

  • 18 . NUPE syndique les emplois peu qualifiés du secteur public : cantinières, aides‑soignantes, auxili (...)

12À l’image des féministes de la deuxième vague quittant le Parti socialiste français dans les années 1980 (Bereni, 2006), devant les réactions d’hostilité des syndicalistes de base, beaucoup ont quitté ces postes, parfois pour rejoindre d’autres syndicats affichant leur ouverture aux femmes (comme UNISON après sa création en 1993) ou pour retourner dans des associations féministes. Celles qui sont toujours en poste en 2008 ont réussi à contourner ces obstacles en prenant des responsabilités syndicales plus généralistes et de négociation collective, parfois avec le conseil de « mentors », ce qui signifie de fait s’éloigner dans leurs pratiques quotidiennes du dossier femmes et égalité/discriminations. Lydia, diplômée d’université en sciences sociales, technicienne de laboratoire dans un collège et fille d’un syndicaliste du Nord de l’Angleterre, a commencé à militer au début des années 1980 dans une association développant des foyers pour femmes battues. Elle a été repérée au niveau local par son syndicat NUPE (National Union of Public Employees), syndicat dont la base s’est fortement féminisée dans les années 1970 et qui fusionnera dans UNISON en 199318. En 1983, elle est directement recrutée comme responsable régionale dans le Sud de l’Angleterre, dans le cadre d’une politique de féminisation des responsables. Elle y fait la douloureuse expérience des réactions de défiance des permanents en place contre les féministes – et sans doute aussi les diplômées –, qu’elle interprète comme des réactions sexistes. En tant que dirigeante régionale à UNISON, elle se dit marquée par cette période de bagarres contre l’oligarchie syndicale masculine et est aujourd’hui très sensible au fait de faire monter des femmes en responsabilités.

Mon responsable a carrément essayé de me virer. Mais il faut se remettre dans l’ambiance de 1983 où pas mal de responsables masculins de NUPE ne voulait pas de gens comme moi chez eux. Ils me voyaient comme un fardeau et comme un problème. Et j’étais vue comme un problème, uniquement parce que je ne ressemblais pas à un permanent syndical. Les permanents étaient des hommes blancs d’âge moyen. Et en plus, j’étais féministe, je ne m’en étais pas cachée, et ils ne pouvaient pas supporter ça non plus. Et mon responsable à l’époque n’avait jamais demandé une femme responsable. Quand il a entendu que j’allais être nommée, il a appelé le Secrétaire Général du syndicat, et lui a dit qu’il n’aurait pas de femme dans son équipe parce qu’une femme ne pouvait pas faire le job ! Et les six premiers mois ont été très durs car je n’ai presque pas eu d’aide. Il y a seulement une ou deux collègues qui m’ont aidée. Mais j’avais des amies dans le pays que j’appelais et qui vivaient la même situation. On s’entraidait à distance. Je voulais juste survivre. Mais environ huit mois après, mon responsable m’a écrit une lettre en me disant que je n’étais pas à la hauteur de mon mandat et qu’il fallait que je démissionne. J’avais tellement peu de respect pour lui que je savais qu’il avait tort et que j’avais raison ! ça, ça m’a déterminée à m’accrocher (Lydia, femme blanche, 52 ans, Secrétaire régionale, UNISON).

  • 19 . Le rôle des anciens communistes dans les dirigeants syndicaux des années 2000 est un trait spécif (...)

13Ces femmes diplômées qui se définissent ouvertement comme des féministes sont souvent restées dans le champ syndical au titre de leurs convictions politiques de gauche, voire d’extrême gauche19. Mais en phase avec le cadrage dominant de la cause syndicale dans des organisations qui se définissent comme basistes, notamment UNISON, ou encore traversées par une tradition ouvriériste, comme GMB, elles précisent toujours en entretien que la défense des intérêts des femmes doit être concentrée sur le bas de la hiérarchie, et que les salaires et conditions d’emploi des hommes de milieu populaire font partie aussi de leurs préoccupations.

La carrière syndicale des femmes « porte‑parole » des travailleurs

  • 20 . Les syndicats anglais finançaient en grande partie le Labour Party, et les dirigeants syndicaux a (...)

14Cela dit, la majorité des responsables de plus de 50 ans interviewées en 2007‑2008 n’ont pas rencontré le mouvement féministe ni endossé la « cause des femmes » avant leur adhésion syndicale. Issues de milieux populaires, elles ont arrêté leurs études tôt et adhéré à un syndicat lors de leur entrée sur le marché du travail, à l’usine ou dans des bureaux. Elles présentent leur adhésion comme automatique en raison de la pratique de l’encartage systématique des travailleurs maintenue dans certains univers professionnels jusqu’au début des années 1980 (système du « closed shop »). En outre, la plupart considèrent que se syndiquer était « naturel », ce qu’elles relient à leur socialisation dans les familles populaires anglaises des années 1960‑70, quelles que soient les convictions idéologiques de leurs parents. Leur engagement au sein d’un syndicat est présenté comme allant de pair avec une certaine « conscience de classe » liée à la défense des droits des travailleurs. Leur sens de l’injustice sociale croît au fur et à mesure des formations et actions menées dans des syndicats anglais très liés au Labour Party20. En raison de la segmentation sexuée du marché du travail, elles se retrouvent lors de leurs premiers mandats souvent de facto à défendre uniquement des travailleuses (ouvrières ou employées non qualifiées), parfois contre les délégués en place, notamment à GMB ou NUPE, mais elles ne relient pas pour autant cette action à une « conscience féministe ».

15Ce clivage entre participation à des luttes de femmes, défiance envers les hommes syndicalistes en place et refus d’endosser l’étiquette féministe, décrit dans des monographies d’usines réalisées à cette période (Pochic, 2013), est incarnée par Helen, dirigeante nationale élue de GMB, blanche et âgée de 65 ans. À l’origine cantinière dans une municipalité, elle s’engage en 1978 dans sa première bataille syndicale autour des conditions de travail, avec comme revendication d’obtenir des gants pour faire la vaisselle et le ménage. Femme de mineur, elle s’investit ensuite dans le soutien actif aux grèves de mineurs en 1984, en offrant des repas gratuits aux grévistes. À la suite d’un voyage au Canada au début des années 1990, elle revient convaincue de la nécessité de « sièges réservés » pour les femmes et les minorités ethniques. Elle se bat plus de dix ans pour les faire accepter par le GMB. Aujourd’hui retraitée, présidente du Conseil Exécutif National de GMB, elle se défend spontanément durant l’entretien d’être une « féministe », adjectif qu’elle associe à un mouvement de femmes de classe moyenne blanche. Elle se reprend ensuite pour dire qu’elle est peut‑être féministe, à sa manière, en étant une syndicaliste qui défend les droits des travailleuses peu qualifiées.

‑ Vous définiriez‑vous comme féministe ?

  • 21 . En Angleterre, l’expression pour désigner celles qui sont en bas de la hiérarchie salariale est « (...)

Moi, non. J’aurais plutôt dit que… non. Enfin, qu’est‑ce qu’une féministe ? Est‑ce que c’est quelqu’un qui s’occupe des autres femmes ? Alors oui. Est‑ce quelqu’un qui brûle ses soutien‑gorge ? Alors non. Est‑ce que j’aime les jolies chaussures ? Oui. Est‑ce que je m’assure que les intérêts des femmes soient bien représentés ? ça oui. Je l’ai toujours fait. Mais je pense qu’au fond, ce que je cherche à représenter avant tout, ce sont les intérêts des travailleurs… J’ai essayé d’être une voix pour les femmes. Pour les travailleuses peu qualifiées surtout21. […]

‑ Dans quelles circonstances vous êtes‑vous engagée ?

  • 22 . Syndicat fusionné ensuite dans GMB.

[En 1978] j’étais tellement en colère. J’étais embauchée seulement depuis quelques semaines et je n’aimais pas la manière dont les femmes étaient traitées par le management et par la mairie. Vous savez, comme vous êtes des femmes, vous êtes supposée savoir cuisiner sans aucune formation. On n’avait aucun encadrement d’hygiène et sécurité. On n’avait même pas de gants. On mettait pourtant nos mains dans l’eau de seltz. Et à l’époque, on se mettait à quatre pattes pour récurer les sols. Et j’ai décidé que j’allais faire quelque chose… La patronne est venue un matin, et elle nous a dit : « Le maire a décidé, d’ici lundi prochain, vous allez faire ceci… » Et j’ai dit : « Non ! » Et elle m’a dit : « Qui êtes‑vous ? » Et sans réfléchir, j’ai dit : « Je suis leur représentante. » Je ne savais pas quel autre mot employer. On était toutes syndiquées à GMWU22. Mais syndiquées seulement sur le papier. Car personne ne cherchait à nous organiser pour qu’on participe (Helen, femme blanche, 65 ans, Présidente du National Executive Committee, GMB).

  • 23 . Des auteurs proposent d’appeler les syndicalistes devenues féministes par leur activité syndicale (...)
  • 24 . Même si localement, certaines équipes ont pu soutenir dans les années 1980 des mobilisations sur (...)

16Pour les femmes peu qualifiées n’ayant pas fréquenté le mouvement féministe organisé dans leur jeunesse ou leur milieu de travail, c’est donc par le syndicalisme qu’elles ont été sensibilisées et qu’elles se sont formées aux droits des femmes, avec des rapports au féminisme différents suivant les organisations syndicales23. Dans le cas de GMB, l’absence de liens organiques ou organisationnels avec les associations féministes est manifeste. Issus de la fusion de syndicats de métiers, notamment dans l’industrie, les délégués hommes ont plutôt tendance à minorer ou négliger les intérêts de leurs adhérentes, souvent dans des métiers peu qualifiés et très féminisés24. Les femmes passées par GMB disent souvent être sensibles avant tout aux différences de classe, et rejettent en majorité l’étiquette de « féministe » qui les disqualifierait pour représenter l’ensemble de leurs adhérents, plutôt des ouvriers. Plus ou moins instrumentale, cette distance à l’identification comme féministe est aussi liée à des précédents, où des femmes considérées comme « trop féministes » ont été écartées des postes à responsabilités. Elles sont pourtant sensibles aux inégalités femmes‑hommes et nous ont livré de multiples anecdotes pour illustrer le climat relativement machiste de leur syndicat. L’implication sur le dossier « femmes » est présentée par certaines comme une opportunité de s’investir sur un dossier négligé par les autres responsables masculins, qui leur a été attribué car elles étaient femmes, comme dans le cas de Marta, responsable nationale de 55 ans. Elle distingue d’ailleurs les qualités utiles pour être acceptée sur le terrain par les militants de base de GMB, qui peuvent valoriser une certaine virilité des femmes de milieu populaire (les filles « speed et grande gueule », cf. Avril, 2014), de celles préférées par les permanents qui recrutent les assistantes pour travailler à leur service dans les structures (les filles « douces et serviables », comme elle).

  • 25 . Elle s’est présentée en binôme avec lui, sur un ticket paritaire, un homme et une femme, ce qui a (...)

J’ai l’impression qu’ici, les femmes sont toujours traitées différemment des hommes. Je le vois à des petites choses, comme pas plus tard qu’hier, j’étais à une conférence avec l’équipe de direction et j’étais là en tant que responsable politique. Depuis que le nouveau secrétaire général a été élu25, il m’a demandé de prendre en charge beaucoup d’aspects concernant la gestion interne de GMB, donc je m’occupe par exemple de l’administration du Congrès. Dans un gros syndicat comme celui‑ci, derrière la tribune, il faut que quelqu’un vérifie que tous les discours se finissent à 17h pile et que vous ayez un débat équilibré, et que les personnes qui défendent des motions soient bien appelées dans le bon ordre. Et c’est une grande partie de mon boulot actuellement. Donc, j’étais à une réunion hier, et j’étais la seule femme présente, et quand il n’y a pas assez de chaises dans la pièce, ou que le thé n’est pas servi, ils se tournent tous vers moi (Marta, femme blanche, 55 ans, Responsable nationale, GMB).

17Les responsables de UNISON assument davantage de s’auto‑identifier comme « féministes » et relient cette progressive prise de conscience féministe à la présence de femmes pionnières engagées sur ce dossier, mais aussi à leur participation à des dispositifs non‑mixtes, comme des groupes‑femmes, des formations ou conférences pour femmes, à l’image de la conférence annuelle de UNISON (voir l’encadré 1). Ces moments d’« entre‑soi » sont en effet des lieux d’interaction avec des militantes féministes aguerries et d’échanges d’expériences partagées qui participent à construire une « conscience féministe », c’est‑à‑dire considérer les femmes comme une catégorie opprimée à défendre.

  • 26 . « Programme de la “Conférence pour les femmes de UNISSON” de 2008 », avec la liste des motions pr (...)

Encadré 1 : La conférence pour femmes de Unison. Observations d’un entre-soi féministe26

  • 27 . Adjectif qui vient de « butcher » (boucher) et désigne le style vestimentaire assez masculin de l (...)
  • 28 . Une des plus anciennes associations féministes anglaises, créée en 1866 sur le droit de vote, qui (...)

Le deuxième jour de cette conférence, 15 février 2008, à Harrogate (North Yorkshire), la journée commence par la motion 1 « Fière d’être féministe », présentée par une représentante de la Eastern Region, syndicaliste blanche d’une quarantaine d’années qui travaille dans un centre pour femmes violées (rape crisis centre), dont c’est la sixième conférence. Cette militante vient défendre plusieurs motions, elle a un style butch27 et porte un tee‑shirt où il est écrit : « Voilà à quoi ressemble une féministe. » Très à l’aise, elle fait rire l’auditoire en leur disant que la Fawcett society28 devrait faire un autre modèle pour elle : « Voilà à quoi vous n’êtes pas obligée de ressembler pour être féministe. » Elle se moque gentiment des syndicalistes présentes qui se sentent féministes tout en ayant fait à manger pour trois jours pour leur mari ou sont obligées de l’amener avec elles (au petit déjeuner, j’ai noté une dizaine d’hommes âgés, sans doute retraités, qui accompagnent leur femme). Elle cite une longue phrase d’une féministe australienne qui précise le féminisme n’a jamais tué, ni fait de camps de concentration, n’a fait que des actions positives sur l’accès au vote, à l’éducation, donc pourquoi y être opposé ? Une déléguée de la Northern Region, intervient pour soutenir cette motion sans amendement, en précisant selon elle que UNISON doit rentrer dans la « troisième vague du féminisme », avec une réorganisation interne pour mieux intégrer les femmes peu qualifiées et les questions d’inégalité de classe. Elles sont très applaudies.

Dans l’après‑midi, la motion 8 est défendue par une indienne d’une trentaine d’année (East Midlands Region) qui demande une stratégie intégrée contre les « violences faites aux femmes » et l’affiliation de UNISON à la campagne « End violence against women » créée depuis 2005. Quatre déléguées montent à la tribune pour soutenir cet amendement, dont une jeune noire qui rappelle que la National Black Members Committee a travaillé l’année dernière avec le National Women Committee sur le thème de la circoncision. Un témoignage d’une femme battue (déléguée de Eastern Region) est particulièrement émouvant. Cette femme blanche d’une soixantaine d’années, de milieu populaire, raconte qu’elle a réussi à quitter à 42 ans un homme avec lequel elle avait été forcée de se marier à 18 ans, qui la battait et lui disait qu’elle était grosse, laide et stupide, et qu’elle avait de la chance de l’avoir car c’était le seul à pouvoir l’aimer. Elle s’est réfugiée dans le travail et les études, et ce n’est qu’après son diplôme universitaire qu’elle a réussi à le quitter il y a douze ans, et remariée avec un homme adorable depuis cinq ans, mais cela la hante encore… Très applaudie, elle sort en pleurant soutenue par ses camarades. Une déléguée du secteur hospitalier (National Health Service) la remercie pour son témoignage, mais rappelle que peu de femmes ont sa force de caractère, alors que 25 % des femmes anglaises auraient été victimes de violences conjugales dans leur vie.

Les carrières syndicales des « promues » par le syndicat : les techniciennes

18Parmi ces pionnières, certaines sont entrées comme « petites mains » de l’organisation syndicale et ont progressé en interne, notamment sur des postes de chargées égalité. Dans ce troisième profil, beaucoup considèrent qu’elles ont comme atout de n’être ni trop « politisées » ni trop « féministes », alors que les élues identifiées comme féministes ont été écartées de ces postes dans les luttes de pouvoir internes, particulièrement dans le contexte de désyndicalisation des années 1980, qui a restreint les postes en structure. Ces femmes qui n’étaient ni féministes ni même parfois militantes, ont découvert l’univers syndical et ses valeurs « par hasard » en y travaillant. Certaines sont passées de ces postes techniques peu qualifiés (secrétaires de permanents, en contact avec des militants et au cœur des débats dont elles font les comptes rendus) à des postes de chargées d’étude, de responsables de la syndicalisation ou de responsables femmes. Ces femmes « promues » par le syndicalisme relient explicitement leur conscientisation sur les droits des femmes et des travailleurs à leur immersion dans l’univers syndical, tout en défendant une certaine « féminité » vestimentaire des milieux populaires :

  • 29 . Les organisations syndicales en Angleterre étant de gros employeurs de personnel salarié, il exis (...)

À 53 ans, blanche, Susan est une responsable régionale de GMB. Ayant arrêté l’école à 16 ans, elle a multiplié les petits boulots (secrétaire, barmaid) avant d’intégrer GMB à 34 ans par hasard comme secrétaire intérimaire en 1988. Même si elle n’avait jamais adhéré, comme ses parents commerçants, elle avait une certaine « conscience sociale », un sentiment de l’opposition salariés / direction, entre « eux et nous ». Elle découvre cet univers syndical très ségrégué (les permanents étaient des hommes, les secrétaires des femmes) et se présente comme déléguée des secrétaires, « ce qui m’a donné le goût de représenter les gens et de faire la différence »29. À la surprise générale, elle ose ensuite postuler à une annonce pour devenir adjointe d’un permanent sur les questions de santé, sécurité au travail et droit. Ce poste est réservé pour un homme, qui se désiste au dernier moment, et elle devient la première femme des fonctions support à passer du côté « officers ». On lui donne des « trucs de bonnes femmes », comme l’égalité et un projet sur les violences domestiques, mais comme elle s’en sort bien, son responsable l’incite à postuler deux ans plus tard sur un poste de « regional organiser ». En 2006, son ancien responsable, devenu secrétaire régional, l’appelle pour la convaincre de postuler, un peu contre son gré, sur un poste de « senior regional organiser » dans une équipe régionale encore très masculine, avec 22 hommes pour 4 femmes. « Mes collègues hommes étaient un peu amers. Je pense qu’ils ont pensé : Tu es allée trop loin ! On a montré qu’on était bienveillant avec les femmes, mais de là à lui donner un poste de senior... » Elle considère que sa fille, travailleuse sociale, est une féministe plus radicale qu’elle : « Je me décrirais comme une féministe, mais pas une féministe agitant des pancartes, portant des badges, comme ma fille. Car j’aime être une femme, être traitée différemment, notamment dans la vie privée, j’adore qu’on m’ouvre les portes par exemple. Même si je veux être traitée à l’égale de mes collègues dans mon travail. »

  • 30 . Outil de management formalisant le soutien individualisé d’une personne expérimentée à une autre (...)
  • 31 . Selon la Labour Force Survey, en 2008, les femmes dans les professions qualifiées (Professional o (...)

19Ces parcours promotionnels en interne ont été favorisés par l’expansion des services support au sein de l’organisation mais aussi par des politiques d’égalité et de syndicalisation dans les années 1990 (voir la deuxième partie). Ces parcours ont été favorisés par le soutien des hiérarchiques, qui incitent ces femmes à la mobilité verticale, avec parfois un côté paternaliste à GMB, des hommes âgés qui soutiennent des jeunes femmes dans l’idée de diversifier le profil des responsables et/ou de contrer des féministes. Elles peuvent aussi avoir bénéficié de vacances de postes, à l’image de Susan. À UNISON, certaines responsables (femmes notamment) ont à l’inverse fait explicitement du « mentoring30 » féministe avec leurs assistantes, en leur conseillant de suivre des formations, de postuler à certaines fonctions et en les incitant à acquérir une expérience militante en adhérant elles‑mêmes à un syndicat, autre que UNISON. Cette incitation est souvent reliée à l’idée que des femmes peu diplômées, issues de métiers peu qualifiés, doivent continuer à avoir leur place dans les structures syndicales. En effet, comme le montrent les statistiques disponibles, en Angleterre, le taux de syndicalisation est beaucoup plus élevé parmi les femmes cadres et professions intellectuelles que parmi les employées et ouvrières31.

20La promotion de ces techniciennes du syndicat a parfois participé à « dépolitiser » et à « techniciser » la politique d’égalité interne, proche d’une politique managériale visant à transformer le syndicat en un employeur aux procédures non‑discriminantes, politique qui s’est progressivement institutionnalisée et en partie routinisée. En tant que permanentes syndicales embauchées directement en structure, elles n’ont pas toujours participé aux dispositifs d’égalité les plus « radicaux » à destination des militantes et élues de terrain (formations pour femmes, conférences annuelles, groupes auto‑gérés), animés par les militantes les plus féministes, qui ont été développés surtout à partir des années 2000.

La génération de la diversité : s’imposer comme une syndicaliste « avant tout »

  • 32 . Cette orientation est aussi liée à une stratégie de renforcement du dialogue social sur un modèle (...)
  • 33 . Comme le terme de « noirs » ou de « minorités ethniques » n’a pas la même connotation en français (...)
  • 34 . Alors que le TUC comprenait 29 % de femmes en 1979, elles composent désormais 41 % de ses adhéren (...)

21Les syndicats anglais sont attirés depuis les années 1990 par la stratégie de l’« organizing » développée par les syndicats américains, qui vise à « organiser les inorganisés » – femmes, immigrés et minorités ethniques, temps partiels et précaires –, situés dans des entreprises sans présence syndicale et qui auraient tout intérêt à se défendre collectivement. Mais l’« organising » à l’anglaise a une visée moins expansive, puisque qu’il consiste à diversifier la base des adhérents en renforçant la syndicalisation dans les lieux déjà syndiqués, notamment dans les services publics (Fairbrother & Yates, 2003 ; Frege & Kelly, 2004) 32. Le taux de syndicalisation en Angleterre de 25 % en moyenne en 2009, cache en effet de fortes disparités entre le secteur public (57 % de syndiqués) et le secteur privé (15 %). En raison de ce tropisme du secteur public, les femmes anglaises sont davantage syndiquées que les hommes (29 % contre 25 %) et les « Black et minorités ethniques33 » y sont bien présentes, avec un taux de syndicalisation de 30 % (Healy & Kirton, 2013). La progressive féminisation des adhérents du TUC, en lien avec la désyndicalisation des bastions ouvriers du secteur privé et le maintien de la syndicalisation dans les services publics féminisés, a indéniablement joué sur l’avancée du dossier égalité interne et lutte contre les discriminations34. Les politiques d’égalité interne des syndicats anglais se sont progressivement étoffées, avec des mesures renforcées pour les femmes, et des dispositifs en faveur d’autres groupes minoritaires.

  • 35 . Exactement par le Comité des droits des femmes (Women’s Rights Committee) de la région Sud et Est (...)
  • 36 . À NALGO, les militants Black boycottent en 1983 et 1984 la conférence Égalité raciale organisée à (...)
  • 37 . « Guide pour l’égalité » de UNISON, 2012.
  • 38 . Si la proportionalité est presque atteinte pour les instances élues (64 % de femmes dans le Natio (...)
  • 39 . Exemplaire du journal « Out in UNISON », été 2013, pour les membres LGBT de UNISON. Exemplaire du (...)

22Si tous les syndicats perçoivent l’intérêt de syndiquer davantage de salarié.e.s issu.e.s des minorités ethniques ou sexuelles, et plus récemment d’handicapés, seuls quelques‑uns dotés d’une forte proportion d’adhérents issus de ces catégories et/ou de militants actifs sur ces thèmes, ont opté pour des mesures visant à corriger le profil de leurs représentants (Jewson & Mason, 1986). Depuis 1987, un rapport de monitoring réalisé tous les quatre ans par le TUC35 compare les dispositifs existants et les statistiques disponibles pour évaluer l’égalité et la diversité interne des principaux syndicats (SERTUC, 2008 ; Kirton, 2014). Depuis la création de UNISON en 1993, héritier du syndicat NALGO36, ses statuts reconnaissent la nécessité de représenter en interne, de manière séparée, les intérêts de trois groupes discriminés (femmes, Black et minorités ethniques, gays et lesbiennes), auxquels ont été adjoints récemment les handicapés37. Toujours cité en exemple pour sa politique avant‑gardiste, ce syndicat a mis au cœur de sa politique les notions d’égalité de « représentation proportionnelle » pour les femmes (gender proportionality38) et de « représentation équitable » pour les autres groupes (fair representation). Les groupes discriminés sont incités à s’organiser en communautés d’intérêts, via des « groupes auto‑gérés » (self‑organised groups), nationaux ou régionaux, pour faire entendre leur voix au sein des structures. Ces trois groupes ont leurs tracts, conférences et presses spécialisées (comme Out in UNISON ou Black Action) 39. Des sièges réservés pour les femmes peu qualifiées à temps partiel (« low‑paid women ») ont même été rajoutés en 2000 afin de contrer les inégalités de classe et la prédominance des femmes qualifiées dans les instances exécutives. Cette mesure visant l’intégration de femmes de milieux populaires est très originale et unique parmi les syndicats anglais, car elle acte du caractère intersectionnel des discriminations – genre, classe et race pour cette mesure (McBride, 2001).

  • 40 . En 2008, les femmes sont là aussi présentes de manière quasi proportionnelle dans les instances é (...)

23À GMB, en revanche, si une conférence pour femmes existe depuis 1997, elle n’est pas irriguée par des groupes‑femmes ou des groupes de Blacks members locaux, porteur d’une philosophie d’une « démocratie de genre participative » (Healy & Kirton, 2013) et GMB n’a pas construit les mêmes coalitions avec des associations féministes et anti‑racistes. Ce syndicat a opté pour une politique intégrée, avec un seul département Égalité en charge de l’ensemble des groupes, dont les jeunes et les travailleurs migrants. Dans ses instances, seuls quelques sièges réservés pour les femmes40 et les Blacks members sont prévus (Guillaume & Pochic, 2011). En 2001, c’était le seul syndicat parmi les dix plus grands syndicats anglais à ne pas organiser de formation « pour femmes » (Kirton & Greene, 2002). Depuis 2007, à l’initiative de la nouvelle secrétaire adjointe, certaines régions au sein de GMB ont lancé des formations pour femmes ou sur l’égalité des chances, afin de sensibiliser les militants sur ces questions. En termes de politique d’égalité interne à destination des femmes, et de présence des femmes dans les postes à responsabilités, GMB est plutôt dans la moyenne basse des grands syndicats anglais, derrière UNISON, mais en progrès et devant les syndicats d’enseignants, encore moins outillés sur cette question (Kirton, 2014).

Promotion syndicale et appartenances minoritaires : quelle dialectique ?

24C’est dans ce contexte de l’ouverture à la « diversité » des militants qu’une nouvelle génération de militantes a progressivement été détectée puis encouragée à prendre des responsabilités, d’abord au niveau régional, et parfois de manière assez rapide au niveau national. Ces femmes, souvent sans socialisation syndicale héritée et issues des classes populaires, parfois de minorités ethniques, sont entrées dans le syndicalisme pour défendre les conditions de travail et d’emploi de leur équipe ou de leur métier. Peu entendues par la hiérarchie et les représentants syndicaux en place, elles ont été poussées par leurs collègues, souvent des femmes, à devenir déléguée syndicale pour avoir accès à des informations leur permettant de faire reconnaître et résoudre des problèmes récurrents. Karen, auxiliaire de vie noire, travaillant pour un service municipal, est ainsi désignée comme déléguée syndicale à 18 ans en 1984 par ses consœurs, suite à un problème symptomatique des conditions de travail et d’emploi dégradées des aides à domicile (Avril, 2014). Elle bénéficie ensuite du soutien actif du secrétaire régional, qui veut apporter du « sang neuf » au syndicat et devient responsable nationale à 35 ans :

[En 1984] J’étais tellement malade, vous savez ce que c’est que d’avoir la grippe. Vous ne pouvez pas bouger, la seule chose que vous voulez, c’est de rester coucher. J’ai quand même dû aller travailler pour donner son petit‑déjeuner à l’une des personnes âgées, car il n’y avait personne pour me remplacer. J’ai dû me faire aider par ma jeune sœur de 12 ans. Quand je suis retournée au travail, je n’étais pas contente du tout et je m’en suis ouverte à mon manager et au syndicat – GMB – : Comment avaient‑ils pu laisser une situation comme ça arriver ? Le secrétaire du syndicat que je descendais en flammes a décidé d’organiser une réunion et j’ai posé le problème sur la table. Toutes les aides à domicile ont dit qu’elles faisaient face aux mêmes difficultés depuis des années, on n’était jamais remplacée quand on était malade. Pourquoi ne deviens‑tu pas notre déléguée syndicale ? C’est comme ça que j’ai commencé. J’ai juste osé parler d’un problème que personne n’osait évoquer en public, car elles avaient peur. Elles n’avaient pas envie de perdre leur emploi, mais quand on a 18 ans, on fait des choses que l’on ne fait plus à 38 ans. […]

‑ Et pourquoi pensez‑vous que vous aviez été repérée [par le secrétaire régional] ?

Je pense en grande partie en raison de ma grande gueule et du fait que je n’avais pas peur de dire ce que je ressentais. Aucun doute… Mon côté direct. Pour être honnête, c’est une qualité que parfois certaines personnes n’aiment pas, à l’intérieur et à l’extérieur du syndicat, comme mon employeur à l’époque. Mais c’est ce que je suis (Karen, femme noire, 38 ans, National officer, GMB).

  • 41 . La troisième vague du féminisme s’étant développée souvent dans les milieux de diplômé.e.s ayant (...)

25Du fait de la ségrégation professionnelle et du maintien des écarts de salaires entre les emplois féminins et masculins, nombre de ces syndicalistes ont au départ davantage représenté les intérêts minorés des femmes dans leur milieu de travail. Karen a ainsi découvert que dans sa municipalité, les emplois masculins de gardiens étaient bien mieux rémunérés que ceux des auxiliaires de vie, et a incité des femmes à s’y présenter, bravant l’opposition des autres délégués GMB et l’inertie des employeurs (au motif que les uniformes n’étaient pas faits pour des femmes par exemple). Cette dimension genrée de l’action syndicale de terrain est plus ou moins « théorisée » dans les discours, rarement rapportée à une idéologie féministe, à l’exception des rares responsables femme ou égalité, qui ont parfois suivi ou repris un cursus universitaire en études genre41.

26Parmi ces jeunes générations, plusieurs responsables affirment la nécessité pour les femmes d’occuper des « sièges neutres » (sans quotas) et de neutraliser leur genre (leur race ou leur sexualité) afin d’acquérir une légitimité auprès des adhérents et des dirigeants et briser le plafond de verre. Ce refus de l’assignation à une « catégorie » peut être lu comme une stratégie défensive pour continuer à progresser dans les structures syndicales : les étiquettes « féministe » ou « lesbienne » sont encore mal vues, particulièrement au niveau des structures de base de GMB, comme l’a expérimenté Liz. De niveau bac, blanche, secrétaire dans une université, puis employée d’un service social d’une mairie, elle s’est au départ engagée en 2002 sur un motif précis (elle s’opposait aux bureaux ouverts face à des usagers agressifs) puis a gravi les échelons au niveau régional de GMB. Hétérosexuelle, elle est devenue responsable de l’animation d’un groupe LGBT local, mais a découvert l’inertie des responsables locaux sur ces questions.

  • 42 . Structure de base du syndicat, représentant souvent au niveau local (ville ou département) un sec (...)

J’ai eu beaucoup de problème, pour être honnête, j’ai essayé de monter une conférence LGBT, j’ai écrit à toutes les branches42. Evidemment ces branches sont gérées par des secrétaires qui sont en place depuis longtemps et font tous partie du même groupe, des hommes blancs, âgés et issus de la classe ouvrière qui ne sont pas intéressés par les questions LGBT. On les informe, mais ils ne font pas passer l’information à leurs membres, ce qu’ils devraient faire dans leur réunion en demandant qui a envie de s’impliquer. Mais, dans ce genre de réunion et selon la personne qui donne l’information, je sais que les personnes qui pourraient être intéressées ne lèvent pas la main pour dire qu’ils sont gays ou lesbiennes et qu’ils ou elles voudraient s’impliquer… Un « outing », ce n’est pas quelque chose que l’on fait facilement sur son lieu de travail et même dans son syndicat (Liz, femme blanche, 31 ans, Regional organiser, GMB).

Le diplôme comme levier : les expertes de la cause syndicale

  • 43 . Ce groupe professionnel est connu en Angleterre pour avoir mené et gagné une longue bataille sur (...)

27À côté des militantes issues de la base, des jeunes femmes diplômées arrivent directement au niveau régional ou national des appareils syndicaux, parfois d’ailleurs pour rajeunir et féminiser rapidement les structures. Julia est assez emblématique de cette génération de femmes, souvent issues des classes moyennes, embauchées dans les années 2000 sur des postes expertes salariées, avec un diplôme universitaire, mais généralement sans expérience syndicale de terrain. Fille d’enseignants, néo‑zélandaise, après son Master en études du développement, elle a travaillé pendant quatre ans dans un théâtre, dans la programmation, mais a démissionné pour voyager à l’étranger. C’est par l’intérim qu’elle est arrivée comme assistante au siège de UNISON à Londres, « le genre de jobs qui colle bien à mon éthique » et elle a été très soutenue par la secrétaire nationale du secteur santé dont elle est l’assistante, qui lui a rapidement offert des responsabilités. Elle adore organiser les meetings, les formations, les réseaux au bénéfice et au contact des adhérent.e.s, même si la principale difficulté de son poste est « l’excessive charge de travail ». Responsable en 2008 d’un groupe professionnel très féminisé (les orthophonistes43), elle se dit intéressée par l’égalité, mais surtout préo­ccupée par les inégalités raciales.

Mais mon expérience est peut‑être biaisée par les métiers dont je m’occupe. Les orthophonistes sont, vous savez, presque entièrement d’âge moyen, des femmes blanches de classe moyenne. C’est très très rare de voir un homme, et encore plus rare de voir un noir ou une femme de minorités ethniques... Mais mon expérience est aussi marquée par la Nouvelle‑Zélande, où j’ai grandi dans des communautés majoritairement Maori, et où j’étais plus préoccupée par l’égalité sociale et l’égalité raciale que l’égalité de genre. Donc je dirais que j’ai toujours eu un intérêt pour l’égalité en général, mais pas spécifiquement par un point de vue féministe (Julia, femme blanche, 28 ans, Assistante national officer, UNISON).

28Ces responsables recrutées directement dans les structures n’ont pas toujours été membres de groupes séparés, destinés avant tout aux adhérents et militants de base. La managérialisation des structures syndicales contribue aussi à sélectionner davantage sur des critères d’efficacité et de compétences que sur des critères de politisation et d’expérience militante. Lors de la formation pour aider les femmes à accéder aux responsabilités organisée par le TUC en 2007 (voir l’encadré 2), qui mélange des expertes des structures et des permanentes régionales issues de la base, le contenu technique et pragmatique est quasiment aussi important que les savoirs et réflexions sur l’égalité et les discriminations, et semble développer un « entre‑soi » d’échanges d’expériences entre permanentes plus féminin que féministe.

  • 44 . « Programme de la « Formation pour femmes leaders du TUC » de 2007 (traduction française de l’aut (...)

Encadré 2 : La formation pour femmes leaders du TUC. Observation d’un « entre-soi féminin » 44

  • 45 . Elle est militante dans une association des droits de l’homme, mais elle prend dès 2008 des respo (...)

La troisième formation de ce type organisée en juillet 2007 à Londres par le TUC est coordonnée par deux formatrices qui la présentent ainsi le premier jour : « Un cours d’immersion intensif pour booster votre confiance en vous et vos capacités. » Il regroupe treize femmes permanentes de cinq syndicats (dont trois de UNISON et une de GMB), en majorité blanches, entre 25 et 45 ans, souvent au niveau régional, aux niveaux de qualification variées : cinq enseignantes, une télé‑opératrice, une cariste, deux secrétaires… La seule femme issue de minorités ethniques est la fille d’une militante féministe dissidente Tamoul ; très diplômée, politisée45 et ambitieuse, alors chargée de l’égalité dans un syndicat d’enseignants (NASUWT), elle détonne par ses interventions enflammées sur les discriminations.

  • 46 . Avec une analyse de type SWOT – Strenghts / Weakness / Opportunities / Threats (traduction : Forc (...)

Les cinq jours comportent deux cours magistraux animés par des spécialistes (Femmes et retraites ; Lois sur l’égalité et les discriminations) et des ateliers de travail sur des techniques « syndicalo‑managériales », comme Établir une stratégie de syndicalisation46 ; Mener une action sur l’égalité et les discriminations ; Gérer son temps ; Connaître son style de leadership. L’atelier plébiscité par les participantes est « Parler en public avec confiance », animée par une journaliste de télévision, mais la session « Relooking » (conseils en maquillage, coiffure et habillement) est également très appréciée. Pour toutes ces permanentes, cette formation constitue un moment de pause conviviale « entre filles » dans une vie syndicale très prenante, et un moment de réflexion sur leur parcours professionnel.

Cette formation est aussi un moment privilégié entre consoeurs qui vivent la même expérience dans des syndicats différents, d’échanges sur des stratégies innovantes de syndicalisation ou de formation syndicale que certaines ont initiées, mais aussi l’occasion de rencontres avec des « grandes dames ». Alors secrétaire générale adjointe du TUC, Frances O’Grady, passe un après‑midi avec elles et leur rappelle les grands enjeux du TUC : climat, pauvreté, modes de garde, secteur public, emplois décents. Pour elle, cette formation « n’est ni un “ego trip” pour femmes, ni une faveur pour des ambitieuses, mais le moyen de promouvoir une organisation plus représentative et d’utiliser tous nos talents ». Signe de distinction, elle accompagne avec une autre députée travailliste le groupe autorisé à rencontrer la femme du premier Ministre, Sarah Brown, au 10 Downing Street, pour une visite de courtoisie.

  • 47 . Cet institut de formation créé par le TUC en 1998, inspiré par des exemples américains et austral (...)

29Recrutées par petites annonces, ces jeunes diplômées sont affectées à des postes qui correspondent à leurs compétences, comme gestionnaires de ressources humaines, responsables juridique ou chargées d’études. Certaines d’entre elles sont ensuite sélectionnées pour entrer à l’Organising Academy47 et être formées pour mener des campagnes de syndicalisation et gérer les équipes militantes, afin de progresser dans leur « carrière syndicale » en région et d’irriguer les structures intermédiaires. Mais ces cas sont rares. Rentrées par le haut des organisations syndicales, ces expertes diplômées sont souvent plafonnées et cantonnées dans des postes techniques (Monney, Fillieule & Avanza, 2013 ; Guillaume & Pochic, 2012). Si certaines d’entre elles, spécialisées dans la mise en œuvre de la politique égalité femmes‑hommes ou raciale, en tant que « techniciennes » supervisées par un responsable politique, ont un discours clairement féministe ou antiraciste, la plupart de ces jeunes spécialistes n’endossent pas cette étiquette et les plus politisées ne font souvent qu’un passage dans le syndicalisme, rejoignant après d’autres ONG. En revanche toutes affichent clairement un souhait de combattre les injustices et de se mettre au service des plus démunis, comme les syndicalistes élus avec lesquelles elles travaillent au quotidien.

La défense ambivalente d’espaces séparés…pour les (autres) membres

  • 48 . Le Comité National Lesbien et Gay est ainsi composé de 24 représentants des groupes régionaux LGB (...)

30Pour autant, la plupart des femmes responsables interviewées, issues du terrain ou expertes embauchées en structure, défendent le maintien des politiques d’égalité interne au nom du sexisme ambiant qui perdure dans certains syndicats et de la sous‑représentation des femmes dans la hiérarchie syndicale, notamment à GMB. Comme l’a montré une autre recherche (Kirton & Healy, 2013), ces structures séparées donneraient de la confiance aux femmes (et aux autres minorités) pour rejoindre un syndicat et participer activement, notamment les peu diplômées, aux parcours professionnels heurtés et faiblement politisées. À UNISON notamment, l’existence des structures séparées vues comme des « espaces sûrs » d’expression et d’organisation des minorités discriminées, permettant de lutter contre la bureaucratisation des appareils et d’intégrer l’intersectionnalité48 (Bairstow, 2007) est à la fois extrêmement valorisée en externe et continuellement discutée en interne (Colgan & Ledwith, 2002 ; McBride, 2001).

31Si on n’a jamais rencontré d’opposition franche aux structures séparées parmi les femmes responsables interviewées, certaines ne leur accordent qu’un soutien limité, considérant que ces outils sont utiles à court terme, mais devraient devenir obsolètes à long terme. Certaines estiment que les groupes de femmes se focalisent parfois trop sur des questions sociales qui devraient être davantage portées par des associations (violences faites aux femmes, santé, avortement) ou que les groupes Black ou LGBT se préoccupent surtout de questions de « politique identitaire » éloignées des préoccupations classiques des syndicats sur les salaires, l’emploi et les conditions de travail (Colgan, 1999). Cela pourrait fragiliser la solidarité interne au syndicat en raison des conflits d’intérêts entre catégories ou diluer les ressources. D’autres à l’inverse considèrent que ces structures non‑mixtes risquent de marginaliser ces revendications catégorielles dans ces structures « ghettos » et de ne pas irriguer la stratégie globale du syndicat (Briskin & Mac Dermott, 1993). Même si la présence de groupes‑femmes permet que des revendications comme l’articulation travail‑famille ou le harcèlement soient intégrées dans l’agenda syndical (Parker, 2003), ces revendications portées par un groupe restreint de militant.e.s organisé.e.s à part resteraient illégitimes ou secondaires aux yeux de la hiérarchie syndicale locale (Humphrey, 2000 ; Colgan, 1999).

C’est l’avis de Ruth, militante noire de 41 ans, qui trouve que les « gens qui participent à ces groupes sont contents de rester entre eux et n’essayent pas de faire valoir leurs revendications plus largement. Cela leur donne une bonne raison de râler. Je ne suis pas comme ça, je pense qu’il faut faire changer les choses de l’intérieur ». Devenue déléguée syndicale de UNISON dans sa mairie, en 1994, pour avoir davantage d’informations, car elle se définit elle‑même comme une « grande gueule », elle a pourtant été encouragée à s’investir dans le syndicalisme après une conférence nationale pour Black members, où elle avait été invitée par un collègue, expérience qu’elle avait trouvé « fascinante ». Avant cela, ayant arrêté ses études avant le bac, elle a cumulé les petits boulots (secrétaire, factrice, vendeuse dans le magasin de son père) où elle n’a pas toujours pu se syndiquer du fait de l’absence de représentation syndicale, alors qu’elle vient d’un milieu syndiqué. Depuis son adhésion en 1994, elle a rapidement pris différentes responsabilités (branch officer, regional organiser, regional officer) et apprécie de ne pas avoir été obligée de s’occuper des minorités ethniques alors qu’elle est la seule noire dans sa région. Dans sa région de Northampton et dans sa mairie, contrairement à des camarades de Londres, elle dit ne pas avoir ressenti de discrimination raciale. Plus encore : « Je ne me suis jamais accroché à l’idée que si quelque chose de mal m’arrivait, c’était parce que j’étais noire, ce qui me différencie de certains de mes collègues. » Pour autant, elle se sent soutenue par son syndicat en tant que femme noire et pense avoir des possibilités de formation et d’évolution si des places se libèrent dans sa région. Pour elle, les contraintes de carrière se situent plutôt du côté de la « conciliation » vie privée‑vie professionnelle. Mère seule, avec une jeune fille de 17 ans à charge, elle ne peut envisager de déménager et de s’éloigner de son père qui s’occupe de sa fille en son absence.

  • 49 . Traduction de « equality reps ».

32Ces responsables syndicales semblent donc souvent distinguer ce qui relèverait d’une question identitaire liée à la race ou à la sexualité, à renvoyer du côté de l’action militante et/ou bénévole ou à gérer sur un plan individuel, des conditions requises pour progresser dans les structures syndicales. Cette ambivalence est également observable chez les délégués égalité49 nouvellement mis en place dans les entreprises pour favoriser la négociation sur l’égalité des chances et qui tiennent un discours de justice sociale et de traitement égal « pour tous » (Moore & Wright, 2012). Alors qu’elles se sont parfois investies dans les structures séparées pour conscientiser et organiser les (autres) membres, les militantes rencontrées dissocient cet investissement du déroulement de leur propre carrière syndicale, en cherchant à construire leur légitimité sur des fonctions syndicales plus classiques. Juliette sépare ainsi son engagement bénévole comme lesbienne de sa « carrière » comme responsable syndicale au sein du secteur collectivités territoriales de UNISON.

Issue d’un milieu de classe moyenne non syndiqué (père directeur d’usine) et diplômée de l’université, Juliette est embauchée en 1986 dans le service logement d’une mairie dans la banlieue de Londres. Elle se syndique à NALGO dans un contexte de grèves répétées contre les projets de privatisation menés par le gouvernement Thatcher et devient déléguée syndicale très rapidement. Parallèlement, elle s’investit dans le mouvement gay et lesbien au début des années 1990, et s’occupe d’une association qui milite en faveur d’une meilleure prise en charge des questions de santé et VIH. Elle présente cet activisme comme « l’expression de son identité ». Embauchée comme responsable de la syndicalisation par UNISON, elle promeut la mise en place de groupes LGBT auto‑organisés. Devenue ensuite regional organiser pour la région de Londres, sous la pression du secrétaire régional qui la pousse à candidater, elle travaille également quelques mois avec la responsable LGBT au niveau national, ce qu’elle oublie de mentionner au départ dans l’entretien. De même, Juliette distingue clairement son implication pendant de nombreuses années dans la conférence LGBT, présentée comme une activité bénévole, et son travail en tant que responsable syndicale au niveau régional, où elle prend une fonction de senior regional officer en charge des collectivités locales en 2005, puis au niveau national sur le même dossier. Aujourd’hui, « je ne fais partie d’aucun groupe, je suis un peu en éloignée de ça dans ma position actuelle. Je serai contente de mentorer quelqu’un, c’est ce qui me manque maintenant que j’ai ces responsabilités nationales. En région, on a plus de contacts avec le terrain ». Elle envisage de reprendre un poste en région car le contact avec les adhérents lui manque et sa compagne tailleur de pierre peut la suivre dans sa mobilité.

  • 50 . Les seules critiques ouvertes sur la politique de « proportionalité » de UNISON ont été exprimées (...)

33Leur jugement est encore plus ambivalent quant à l’utilité des sièges réservés et quotas pour accéder aux responsabilités nationales. Si elles les soutiennent toutes en principe50, plusieurs responsables n’ont personnellement pas voulu se présenter sur un « siège pour femme » pour acquérir davantage de légitimité. Si certaines femmes reconnaissent que leurs caractéristiques identitaires ont peut‑être joué pour accélérer leur prise de responsabilités (jeune, femme et noire par exemple), elles veulent être nommées ou élues pour leurs compétences de syndicaliste, spécialiste d’un secteur d’activité ou d’une problématique (formation syndicale, syndicalisation, services aux adhérents, mobilisations). Cette volonté d’être considérée comme une « syndicaliste comme les autres », n’est pas sans lien avec le machisme ordinaire de leurs camarades, à l’image de Liz (l’ancienne employée administrative présentée p. 379), que son responsable régional à GMB appelle la « reine des drames » parce qu’elle soulève toujours des problèmes, et que ses collègues plus âgés appellent « chérie » ou « mon chou ». Elles ne sont encore que quatre femmes sur trente permanents dans sa région…

34Paradoxalement, c’est au moment où les syndicats anglais sont le plus ouverts à l’expression (et la politisation) des rapports sociaux de genre et de race que ces femmes responsables semblent se dissocier, à titre personnel, de la mise en œuvre de ces politiques, à l’exception de quelques rares femmes diplômées et féministes entrées dans les années 1970, qui se sont spécialisées sur le thème de l’égalité. Cette volonté de représenter les intérêts de tous les salariés, et particulièrement des peu qualifiés, peut s’interpréter comme la marque d’une « conscience de classe » diffuse, recadrée dans les termes de la justice sociale, marquant une sensibilité au croisement entre genre et classe chez les syndicalistes, comme le font certains auteurs récents (Moore & Wright, 2012). Elle reflète aussi un rapport relativement pragmatique des salariées de syndicats mixtes à leur rôle de « porte‑parole » et une stratégie discursive adaptée pour arriver à négocier et à progresser dans leurs actions et leur carrière. Face aux employeurs, elles doivent représenter leurs membres dans leur diversité (professionnelle, sociale, ethnique, sexuelle…), alors que leurs intérêts sont potentiellement contradictoires. Et lors des élections ou nominations, elles doivent être soutenues par une large base d’adhérents et ne peuvent dépendre que de leur catégorie identitaire. Contrairement au mouvement associatif spécialisé, la radicalisation ou spécialisation de militantes sur « une » seule cause (femmes, LGBT, Black members, handicapés) est sans doute trop risquée pour progresser dans une organisation syndicale généraliste, qui bien que parfois très féminisée conserve un cadrage très classiste de son action.

Conclusion

35Dans la littérature anglo‑saxonne, engagement syndical et engagement féministe sont décrits comme se renforçant mutuellement, notamment dans les syndicats ayant mis en œuvre des politiques égalité d’inspiration féministe, visant la représentation des femmes en tant que groupe opprimé, comme UNISON. Ces politiques ont été développées en lien avec des recherches‑actions d’intellectuelles féministes, compagnes de route des syndicats ou elles‑mêmes syndicalistes universitaires, qui ont légitimé ces structures séparées. Ces travaux portant sur ces mesures « radicales » (formations pour femmes ou groupes‑femmes) soulignent l’effet de conscientisation féministe et d’empowerment des militantes, même si les femmes interviewées ne s’identifient pas toujours comme « féministes » et revendiquent avant tout une identité syndicale (Parker, 2003 ; Kirton, 2006 ; Kirton & Healy, 2013).

36Cette enquête auprès de femmes syndicalistes anglaises durablement impliquées dans l’activité syndicale et rencontrées en 2008 questionne de manière assez nuancée les liens entre engagement syndical et identification comme « féministe ». Si les convictions féministes des militantes sont plus marquées dans la génération 68 et souvent antérieures à l’engagement syndical, la revendication d’être « féministe » a manifestement été plus facile à endosser dans certains syndicats fortement féminisés comme UNISON ou au niveau du Trade Union Congress (moins en lien avec l’activité des militants de terrain) et dans certaines régions davantage irriguées par le « féminisme municipal » des années 1970. Si ces femmes croient à l’action collective et ont pu vivre des discriminations sexuées, cela confirme le rôle crucial de l’exposition aux idées féministes portées par des écrits, des personnes, des formations ou des rassemblements sur cette identification subjective (Williams & Wittig, 1997 ; Achin & Naudier, 2010). Cela dit, même à cette période, l’identification comme « féministe », souvent associée à une politisation d’extrême‑gauche, a généré une forte méfiance de la part des appareils syndicaux plus réformistes, et rencontré des résistances locales parfois en décalage avec des politiques nationales progressistes. Ces réactions ont conduit les femmes soit à se cantonner au dossier femmes et égalité, soit à tenter de construire leur légitimité de responsable sur d’autres dimensions de l’activité syndicale et ainsi concurrencer les hommes sur des postes généralistes, soit enfin à quitter les appareils syndicaux pour redevenir simples militantes « de base » et/ou s’investir davantage dans des associations féministes.

37Avec la mise en œuvre de mesures d’égalité et de diversité interne dans les années 1990 et dans la décennie suivante, une nouvelle génération de femmes responsables a effectivement émergé, davantage issues des minorités (ethniques, sexuelles ou handicapées), sans que l’on observe cependant une « conscientisation féministe » manifeste partagée, qui permettrait de les associer à la troisième vague du féminisme. Si elles adhèrent à la rhétorique de la justice et de l’égalité des chances pour tous, prônée par le gouvernement travailliste et encadrée par des mesures de type managérial en faveur de la promotion de femmes responsables, et ont souvent représenté les intérêts des femmes dans leur milieu de travail, elles se définissent rarement comme « féministes », notamment chez les moins diplômées et à GMB. Parce qu’elles n’ont pas toutes participé comme adhérentes à ces espaces de politisation et sont encore socialisées au paradigme de classe, encore dominant dans la plupart des syndicats, ces syndicalistes ne partagent pas toutes la même identification au féminisme. Comme le soulignent d’autres enquêtes, la reconnaissance d’intérêts spécifiques à certains groupes définis sur des bases identitaires plus que professionnelles, rencontre encore souvent la désapprobation des syndicalistes de base, hommes et femmes (McBride, 2001 ; Munro, 2001). Cette défiance risque d’ailleurs de s’amplifier dans le contexte actuel de crise économique et de coupes drastiques dans les services publics en Angleterre, la question de l’égalité ou des discriminations apparaissant souvent comme secondaire par rapport à la défense de l’emploi et des salaires pour tous. Au nom de l’austérité, des économies de temps et de moyens et de l’urgence des questions d’emploi, certains syndicats des services publics au Canada en pointe sur la lutte contre les discriminations ont ainsi commencé à remettre en question leurs structures séparées pour femmes (Briskin, 2014).

Annexe : Description des syndicalistes interviewés

 

Hommes

Femmes

Total

12

28

Syndicat d’appartenance

UNISON (services publics)

6

14

GMB (services privés et publics)

5

11

TUC (niveau confédéral)

1

3

Niveau de responsabilités

Niveau national (politique)

6

14

Niveau national (technique)

1

4

Niveau intermédiaire (branch, UD, syndicat, région)

5

9

Niveau local (entreprise ou administration)

0

1

Catégorie d’âge

Jeunes (moins de 35 ans)

0

7

Âge intermédiaire (35‑49 ans)

6

8

Seniors (plus de 50 ans)

6

13

Ancienneté d’adhésion

Nouveaux adhérents (moins 10 ans)

0

9

Adhérents durée moyenne (10 à 19 ans)

2

4

Anciens adhérents (plus de 20 ans)

10

15

Niveau de diplôme

Diplômés (degree, équivalent bac+2)

3

11

Peu diplômés (A‑level maxi, équivalent bac maxi)

9

17

Appartenance à une minorité

Handicapés

0

2

Minorités sexuelles (LGBT)

0

2

Minorités ethniques (immigrés ou fils d’immigrés)

2

4

Population ethnique/sexuelle majoritaire

10

20

Responsabilités familiales

A des enfants

8

16

Sans enfant

4

12

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Notes

1 . L’auteure tient à remercier chaleureusement Cécile Guillaume, ainsi que les trois relecteurs et le comité de rédaction pour la pertinence et la qualité de leurs propositions de modification de ce texte.

2 . Organisation qui regroupe 54 syndicats affiliés, représentant 6,2 millions de membres, soit environ un quart des salariés anglais (26 %).

3 . Les continuités et ruptures entre ces deux « générations » de militantes féministes sont discutées dans Lamoureux (2006) et Bard (2012).

4 . Dans les syndicats anglais, on distingue les élus bénévoles avec des mandats nationaux ou régionaux, qui cumulent ces responsabilités avec leur emploi principal (« lay officers ») des permanents salariés de leurs organisations (« paid‑officers »). Ces derniers sont en majorité des anciens élus.

5 . Réalisée avec Cécile Guillaume que je tiens à remercier ici pour sa précieuse collaboration.

6 . Dans cet article centré sur les subjectivités féminines, seuls les extraits d’entretiens de femmes seront mobilisés.

7 . Qui peuvent être fournis par des salariés de structures publiques, privées ou associatives.

8 . Deux formations pour femmes en 2007 (TUC Women’s officers summer school et Ruskin college’s leadership seminar) et deux Women’s conferences en 2008 (à UNISON et au TUC), soit 12 jours d’observation au total.

9 . Loi sur l’égalité salariale (Equal Pay Act, 1970), loi sur la discrimination sexuée (Sex Discrimination Act, 1975) et loi sur les discriminations ethniques (Race Relations Act, 1968 et 1976).

10 .Traduction de Charter for Equality for Women within Trade Unions. Voir l’annexe électronique n° 1 sur le site de la revue : http://sociologie.revues.org/2380.

11 . Notion théorisée par les féministes comme le renforcement de la « capacité d’agir » des femmes qui deviendraient ainsi des actrices politiques et sociales participant elles‑mêmes à transformer les situations sociales qui leur sont faites. Elle est utilisée de manière plus restrictive par des ONG dans le cadre de l’aide internationale au développement (Lamoureux, 2006).

12 . Traduction de « Equality officer ».

13 . Afin de faire adopter l’amendement « Equal Value » (travail de valeur égale) complétant la loi de 1970, adopté en 1983 (Guillaume, 2013).

14 . The Great Council of London était dirigé de 1981 à 1986 par un travailliste, Ken Livingston, ancien trotskyste, surnommé Ken le rouge (Red Ken), qui deviendra ensuite le maire de Londres de 2000 à 2008.

15 . Traduction de « Women’s Employment Adviser ».

16 . Traduction de « Work‑life balance ».

17 . Conflits que l’on retrouve dans des syndicats français, par exemple à la CGT (Trat, 2006) ou à l'inverse dans des associations féministes avec les rares hommes présents, à propos de l’exercice personnel de la domination masculine (Jacquemart, 2013).

18 . NUPE syndique les emplois peu qualifiés du secteur public : cantinières, aides‑soignantes, auxiliaires de vie, secrétaires, éboueurs, balayeurs… Entre 1950 et 1978, le nombre de femmes passe de 40 000 à 457 000. NUPE développe une politique pro‑femmes au niveau national dès 1975, en étant le premier syndicat à adopter des sièges réservés (5 au niveau National Executive Council) et des formations pour femmes. Mais la motion votée en 1973 demandant une Responsable Femmes (Women’s officer) n’est appliquée que dix ans après, en 1982.

19 . Le rôle des anciens communistes dans les dirigeants syndicaux des années 2000 est un trait spécifique aux syndicats anglais (Healy & Kirton, 2013). On peut remarquer qu’en comparaison, les féministes en France ont souvent quitté la CFDT après son tournant réformiste au milieu des années 1990 pour rejoindre d’autres syndicats plus radicaux (Guillaume & Pochic, 2011), comme SUD ou la CGT, ce qui a participé de la diffusion d’un « féminisme de mixité » (Le Quentrec, 2009).

20 . Les syndicats anglais finançaient en grande partie le Labour Party, et les dirigeants syndicaux avaient des places attribuées dans les instances de décision du parti.

21 . En Angleterre, l’expression pour désigner celles qui sont en bas de la hiérarchie salariale est « low‑paid women », que l’on a traduit en français par « femmes peu qualifiées » (ici et dans la suite de l’article).

22 . Syndicat fusionné ensuite dans GMB.

23 . Des auteurs proposent d’appeler les syndicalistes devenues féministes par leur activité syndicale des « socialist‑feminist » pour les distinguer les militantes féministes devenues syndicalistes (« feminist‑socialist ») (Colgan & Ledwith, 1991). Mais nous ne reprendrons pas cette typologie centrée sur les moments de l’engagement, dont les auteurs déduisent implicitement une hiérarchisation des causes.

24 . Même si localement, certaines équipes ont pu soutenir dans les années 1980 des mobilisations sur l’égalité salariale, au nom de la lutte contre la pauvreté et les bas salaires (Cunnison & Stageman, 1995 ; Guillaume, 2013).

25 . Elle s’est présentée en binôme avec lui, sur un ticket paritaire, un homme et une femme, ce qui a favorisé son accès relativement accéléré à l’équipe de direction du syndicat.

26 . « Programme de la “Conférence pour les femmes de UNISSON” de 2008 », avec la liste des motions présentées (traduction française de l’auteure). Voir l’annexe électronique n° 2 sur le site de la revue : http://sociologie.revues.org/2382.

27 . Adjectif qui vient de « butcher » (boucher) et désigne le style vestimentaire assez masculin de lesbiennes.

28 . Une des plus anciennes associations féministes anglaises, créée en 1866 sur le droit de vote, qui comprend environ 3 000 membres et fait surtout du lobbying et de la communication sur les droits des femmes.

29 . Les organisations syndicales en Angleterre étant de gros employeurs de personnel salarié, il existe une représentation syndicale pour leurs salariés (souvent adhérents d’un autre syndicat, pour faciliter l’expression des salariés).

30 . Outil de management formalisant le soutien individualisé d’une personne expérimentée à une autre personne, souvent de rang hiérarchique moins élevé, afin de lui faciliter son développement professionnel.

31 . Selon la Labour Force Survey, en 2008, les femmes dans les professions qualifiées (Professional occupations) sont syndiquées à 58 %, contre seulement 21 % pour les femmes secrétaires et employées administratives (Secretariat and administrative occupations) et 25 % pour les ouvrières (Process, plant and machine operatives). Voir Trade union membership. Statistical Bulletin 2012 (2013), Department for Business, Innovation & Skills, mai.

32 . Cette orientation est aussi liée à une stratégie de renforcement du dialogue social sur un modèle européen, appelée « partnership », avec la négociation d’accords, notamment sur l’égalité salariale et professionnelle, les discriminations, l’articulation vie professionnelle / vie familiale et le harcèlement, auxquels seraient sensibles les nouveaux profils d’adhérents visés.

33 . Comme le terme de « noirs » ou de « minorités ethniques » n’a pas la même connotation en français, nous avons préféré conserver dans l’article l’appellation anglaise complète, qui renvoie à un cadrage légal, politique et social spécifique. Ce terme englobe tous ceux qui se considèrent comme « non‑blancs » ce qui représentent 7 % de la population active anglaise en 2008.

34 . Alors que le TUC comprenait 29 % de femmes en 1979, elles composent désormais 41 % de ses adhérents. Des syndicats féminisés du secteur public comme UNISON ont dès lors davantage d’influence politique en raison de leur poids numérique.

35 . Exactement par le Comité des droits des femmes (Women’s Rights Committee) de la région Sud et Est du TUC (Southern and Eastern Region Trades Union Congress, SERTUC).

36 . À NALGO, les militants Black boycottent en 1983 et 1984 la conférence Égalité raciale organisée à l’initiative de l’instance nationale (National Executive Council) au motif que cette conférence est dominée et organisée par les blancs, indice d’un racisme larvé au sein même du syndicat ; ils obtiennent l’auto‑organisation par les militants concernés en 1986. Le Trade Union Congress a pourtant adopté une Black Workers Charter en 1976, mais le principe d’une conférence non‑mixte pour minorités ethniques est débattu jusque dans les années 1990 (Virdee & Grint, 1994 ; Kirton & Greene, 2002).

37 . « Guide pour l’égalité » de UNISON, 2012.

38 . Si la proportionalité est presque atteinte pour les instances élues (64 % de femmes dans le National Executive Council en 2008), un écart demeure du côté des responsables salariés (40 % de femmes en 2008).

39 . Exemplaire du journal « Out in UNISON », été 2013, pour les membres LGBT de UNISON. Exemplaire du journal « Black Action » de UNISON, printemps 2013.

40 . En 2008, les femmes sont là aussi présentes de manière quasi proportionnelle dans les instances élues (40 % de femmes dans le NEC), mais plus rares parmi les responsables salariés (23 %), surtout au niveau régional.

41 . La troisième vague du féminisme s’étant développée souvent dans les milieux de diplômé.e.s ayant été formés au women’s studies ou gender
studies
en Angleterre comme aux États‑Unis (Lamoureux, 2006).

42 . Structure de base du syndicat, représentant souvent au niveau local (ville ou département) un secteur d’activité ou un métier.

43 . Ce groupe professionnel est connu en Angleterre pour avoir mené et gagné une longue bataille sur l’égalité salariale, « pour un travail de valeur comparable », initiée en 1986 où elles se comparaient avec les pharmaciens d’hôpitaux. Cette bataille est à l’origine d’une importante jurisprudence de la Cour Européenne de Justice, Enderby v Frenchay Health Authority and the Secretary of State for Health, EJC (1993) (Guillaume, 2013).

44 . « Programme de la « Formation pour femmes leaders du TUC » de 2007 (traduction française de l’auteure). Voir l’annexe électronique n° 3 sur le site de la revue : http://sociologie.revues.org/2383

45 . Elle est militante dans une association des droits de l’homme, mais elle prend dès 2008 des responsabilités élevées au TUC sur des questions Femmes puis à UNISON sur des questions de Race.

46 . Avec une analyse de type SWOT – Strenghts / Weakness / Opportunities / Threats (traduction : Forces / Faiblesses / Opportunités / Risques) très utilisée en management de projet.

47 . Cet institut de formation créé par le TUC en 1998, inspiré par des exemples américains et australiens, vise à former une nouvelle génération d’organisateurs et de diffuser de nouvelles méthodes de syndicalisation et une « culture de l’organising » parmi les syndicats anglais.

48 . Le Comité National Lesbien et Gay est ainsi composé de 24 représentants des groupes régionaux LGBT (une lesbienne et un gay pour chaque région), et de délégués issus du groupe Black et du groupe Femmes. Le Comité National Handicap inclut 24 représentants des groupes régionaux Handicap, ainsi que des délégués issus du groupe Black et du groupe Femmes, avec une attention aux sourds utilisant le langage des signes.

49 . Traduction de « equality reps ».

50 . Les seules critiques ouvertes sur la politique de « proportionalité » de UNISON ont été exprimées par des hommes expérimentés, obligés de s’effacer à compétences égales devant des candidatures féminines.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Sophie Pochic, « Femmes responsables syndicales en Angleterre et identification féministe », Sociologie [En ligne], N°4, vol. 5 |  2014, mis en ligne le 05 janvier 2015, consulté le 23 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/sociologie/2302

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Auteur

Sophie Pochic

sophie.pochic@ens.fr
Chargée de recherche CNRS – Centre Maurice Halbwachs (CMH) – 48 Bd Jourdan – 75014 Paris

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Droits d’auteur

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