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Dossier
6. Pragmatique de l’écriture

Écriture, performance et pouvoir

L’« invention » des hiéroglyphes anatoliens au IIe millénaire av. J.-C.
Maria Elena Balza
p. 505-524

Résumés

Au milieu du IIe millénaire av. J.-C., en Anatolie, un second système d’écriture commence à être employé à côté des cunéiformes d’origine mésopotamienne : l’écriture hiéroglyphique anatolienne. Documenté initialement dans le champ des sceaux-cachets d’Anatolie, où il transcrit des anthroponymes et des titres de fonction, ce système d’écriture se répand progressivement et devient le médium utilisé pour la rédaction d’inscriptions monumentales. La diffusion de ces inscriptions, au cours du xiiie siècle av. J.-C., constitue le sujet de cette contribution. Le travail repose sur un certain nombre d’études novatrices qui, tout en se plaçant en dehors du domaine des écritures proprement dit, abordent des questions concernant la sémiotique des écritures. Plus précisément, l’article examine la relation qui semble s’établir entre la réalisation d’œuvres monumentales, l’écriture hiéroglyphique, la matérialisation de l’idéologie des élites au pouvoir et la performance publique dans le contexte de l’État hittite.

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Texte intégral

1. Introduction

  • 1 Les études qui constituent notre base théorique appartiennent au domaine de l’hittitologie, de l’ar (...)

1Dans cet article, nous abordons la question de la diffusion d’inscriptions en écriture hiéroglyphique anatolienne sur des supports monumentaux au cours du xiiie siècle av. J.-C. Plus précisément, en nous appuyant sur un certain nombre d’études novatrices, nous voudrions examiner la relation qui semble s’établir entre la réalisation d’œuvres monumentales, l’écriture hiéroglyphique, la matérialisation de l’idéologie et la performance dans le contexte de l’État hittite1.

2Au moment de son apogée (milieu du xive – fin du xiiie siècle av. J.-C.), l’État hittite est l’une des plus grandes formations étatiques de la scène proche-orientale. Les rois hittites entretiennent des relations diplomatiques avec leurs homologues babyloniens, égyptiens et assyriens, et, tout comme leurs voisins, mettent en marche leur machine de propagande, nécessaire pour la création du consensus, grâce à la rédaction d’inscriptions royales et d’autres documents politiques et célébratifs. Ces textes écrits en cunéiforme sur des tablettes d’argile constituent cependant un canal de communication inaccessible à la majorité de la population, à l’exception d’un petit groupe de spécialistes. D’autres canaux de transmission de la propagande et de la vision dominante devaient alors exister. Ceux-ci sont en effet documentés par quelques indices archéologiques et textuels provenant du monde hittite : des reliefs et des œuvres figuratives monumentales, des références textuelles à l’organisation de célébrations et d’autres événements publics, et des inscriptions en hiéroglyphes anatoliens, un système d’écriture autochtone qui, à partir d’un emploi original dans le cadre de la glyptique, devient, au xiiie siècle av. J.-C., un élément constitutif de l’art monumental hittite.

  • 2 Pour une définition de l’écriture hiéroglyphique et spécialement pour un examen des aspects visuels (...)
  • 3 Pour cette définition et pour une présentation du caractère public des hiéroglyphes anatoliens à tr (...)
  • 4 Voir, en détail, DeMarrais, Castillo & Earle (1996) ; sur les mêmes sujets, voir aussi, DeMarrais, (...)
  • 5 Un certain nombre d’études ont examiné la notion de performance et son applicabilité aux cérémonies (...)
  • 6 Certains aspects de la documentation épigraphique et archéologique du Proche-Orient ancien liés au (...)

3Sur les surfaces monumentales les hiéroglyphes présentent les caractéristiques d’un système visuel et supra-linguistique qui semble reposer sur l’arrière-plan culturel des utilisateurs et des lecteurs concernés et qui paraît en même temps répondre aux nécessités d’une circulation à grande échelle2. Dans le cas des inscriptions monumentales, le système hiéroglyphique se présente donc comme une écriture au service du pouvoir3, un système capable de véhiculer les messages les plus importants : le nom du roi hittite, ses divinités tutélaires, ses exploits militaires. D’un certain point de vue, les complexes monumentaux inscrits de l’époque hittite pourraient donc être considérés comme le résultat d’un véritable processus de matérialisation des motivations, des besoins, des buts politiques des auteurs des inscriptions. Ces derniers représentent par conséquent la vision du monde ou, plus précisément, l’idéologie des spécialistes de la culture et des détenteurs du pouvoir. D’ailleurs, selon une étude pionnière d’Elizabeth DeMarrais, Luis Castillo et Timothy Earle, l’idéologie ne peut être diffusée de manière efficace, éprouvée par la communauté et entrer ensuite dans la sphère des mémoires collectives qu’en se soumettant à un processus de matérialisation4. La matérialisation de l’idéologie se concrétiserait alors, selon ceux-ci, par la transformation d’idées, de valeurs, d’histoires, de mythes, etc. en une réalité physique qui peut prendre la forme d’événements cérémoniels — et donc de véritables performances publiques — d’objets symboliques, de monuments, et de formes d’écriture. Parmi les différentes formes de la matérialisation de l’idéologie mises en lumière par DeMarrais, Castillo et Earle, dans cet article nous nous occuperons spécialement de la relation qui semble s’établir entre les monuments et les inscriptions hiéroglyphiques qui les accompagnent dans le cadre de l’État hittite. Nous essayerons en particulier de comprendre si les monuments réalisés à différents endroits du plateau anatolien auraient pu être la scène de célébrations ou d’événements publics capables de façonner la vision du monde des spectateurs, et quel était le rôle de l’écriture hiéroglyphique par rapport aux monuments5. En d’autres mots, nous tenterons d’examiner les inscriptions monumentales du point de vue de la performance publique et de la matérialisation de l’idéologie, les deux liées à la construction propagandiste et identitaire6.

2. Hiéroglyphes anatoliens et pouvoir : la diffusion d’une nouvelle écriture dans le monde cunéiforme

4Pendant le Bronze Récent, l’État hittite est l’un des acteurs les plus importants de toute la scène proche-orientale. À partir de leur capitale Hattusha, dans la boucle du Kızıl Irmak, les Hittites étendent progressivement leur contrôle à tout le plateau anatolien et à la Syrie du nord, jusqu’aux confins des royaumes assyrien et égyptien, et érigent un vaste État centralisé. La gestion d’un tel État demande bientôt l’emploi de l’écriture, et les Hittites empruntent à leurs voisins syriens et mésopotamiens l’écriture cunéiforme, utilisée dans ces régions pour transcrire la langue akkadienne. À Hattusha, l’écriture cunéiforme est au fur et à mesure adaptée à la langue hittite et devient par la suite l’écriture de l’administration, de la religion et de la politique. Au moment de l’apogée du Royaume hittite, le cunéiforme et la langue hittite sont utilisés pour rédiger les édits, les annales, les lois, les traités et une partie des lettres, mais aussi les textes religieux et mythologiques et les documents administratifs. Mais l’emploi écrit du hittite n’est pas exclusif. D’un côté, l’akkadien tient toujours lieu de langue internationale pour les relations avec les alliés ou les vassaux, et de l’autre, des textes ou des passages en louvite, hatti, palaïte et hourrite sont également documentés dans les archives de la capitale.

  • 7 Sur la naissance de l’écriture hiéroglyphique anatolienne, voir, entre autres études, Mora (1991), (...)
  • 8 Pour un premier examen de cet aspect particulier de l’écriture hiéroglyphique anatolienne, nous ren (...)
  • 9 Les premières inscriptions hiéroglyphiques monumentales datent de l’époque du roi Muwatalli II (moi (...)
  • 10 À propos de la langue louvite pendant différentes phases historiques, et pour un examen de sa relat (...)

5Dans ce contexte multilingue qui se fonde sur l’emploi de l’écriture cunéiforme pour les exigences de la communication écrite émerge pourtant une autre écriture : l’écriture hiéroglyphique. En l’état actuel des recherches, il nous semble possible d’affirmer que le système hiéroglyphique se développe dans la capitale hittite, dans un contexte linguistique mixte hittite et louvite, autour de la fin du xve siècle av. J.‑C.7. Plus précisément, entre la fin du xve et le début du xive siècle av. J.-C., pour des raisons que nous tenterons de préciser, une partie des symboles inscrits dans les champs des sceaux-cachets d’Anatolie commence à être associée à des valeurs idéographiques ou phonétiques (syllabiques) et à être utilisée pour transcrire les noms des propriétaires des sceaux et leurs titres de fonction (roi, prince, prêtre, scribe, etc.). Durant cette phase, une partie importante des brèves inscriptions gravées dans le champ de sceaux est constituée par des signes idéographiques et/ou syllabiques transcrivant des anthroponymes et des titres. Ces signes peuvent être lus de manière directe, à la manière des pictogrammes8. Par la suite, au cours du xiiie siècle av. J.-C. on assiste à un élargissement des supports scripturaux : à côté des sceaux, les hiéroglyphes apparaissent en effet sur des surfaces monumentales : éléments architecturaux, parois naturelles en pierre, stèles, bases de statue9. Ce processus s’accompagne aussi de l’établissement d’un lien exclusif entre l’écriture hiéroglyphique et la langue louvite, une langue indoeuropéenne apparentée au hittite et diffusée dans le plateau anatolien même avant l’origine de l’état hittite10.

  • 11 Sur ce sujet, voir les observations de Neumann (1992, p. 26).

6L’emploi simultané que les Hittites faisaient des hiéroglyphes et du cunéiforme — deux systèmes d’écriture bien différents — a soulevé beaucoup de questions, d’autant plus que la raison pour laquelle le besoin d’une nouvelle écriture se serait manifesté dans la société hittite n’a pas encore été éclaircie dans tous ses aspects. D’ailleurs, à la fin du xve siècle av. J.-C., les cunéiformes étaient complètement développés et pouvaient répondre à toutes les nécessités d’un emploi de type économique, administratif ou littéraire, non seulement en langue akkadienne mais aussi en hittite. Quelle autre raison pouvait-il y avoir de créer une nouvelle écriture11 ? Dans une contribution pionnière, Emmanuel Laroche répondit ainsi à cette question :

  • 12 Voir Laroche (2005, p. 566).

La pratique simultanée de deux écritures fortement différenciées n’est pas un phénomène fréquent. On imagine mieux, désormais, les raisons qui ont provoqué chez les Hittites cette situation paradoxale. Les scribes de Hattusha, dépositaires de la tradition babylonienne, formaient un petit groupe privilégié qui, seul, avait accès à la littérature et aux documents publics. La constitution d’une bibliothèque, d’autre part, répondait à un besoin nouveau, et l’emploi des cunéiformes assurait la liaison du royaume avec les chancelleries étrangères. Mais la tablette d’argile était, en somme, un document interdit, qui ne proclamait point publiquement ni la sublimité du dieu ni la grandeur royale. Il y avait chez les Hittites le sentiment que ces cunéiformes d’emprunt, au tracé mécanique et inexpressif, laissaient place à une autre écriture, plus visuelle, plus monumentale, plus apte à faire parler les effigies divines et les profils humains. Les hiéroglyphes sont faits pour être contemplés sur des parois rocheuses : ils animent le nom propre comme le relief fait revivre la personne toute entière12.

  • 13 Voir l’étude de Neumann (1992, p. 127), spécialement lorsque l’auteur affirme : « Die in Kleinasien (...)

7Les mêmes motivations ont été également évoquées par Günter Neumann pour expliquer la diffusion des hiéroglyphes durant la phase finale de l’empire hittite (xiiie siècle – début du xiie siècle av. J.-C.)13. Selon lui, l’avantage principal de la nouvelle écriture crée en Asie Mineure, avec ses glyphes picturaux, presque naturalistes, est représenté par le fait que, par leur nature même, au moins une partie des signes de cette écriture peut être décodée par les lecteurs concernés, quelle que soit la langue qu’ils parlent ou comprennent. Dans un pays caractérisé par une importante composante multilingue — le pays hittite contrôlait des régions où vivaient des locuteurs hittites, louvites, hourrites, sémitiques —, le besoin qu’au moins une partie des messages écrits soit compréhensible à l’ensemble des couches linguistiques pourrait avoir joué un rôle important dans le choix de l’écriture à employer dans la glyptique ou pour la rédaction des textes monumentaux. Cet objectif aurait été atteint grâce à l’emploi d’un système d’écriture où tout lecteur potentiel — donc pas seulement les spécialistes de l’écriture — peut comprendre au moins une partie des signes employés par le rédacteur des textes, et donc des messages véhiculés par le pouvoir en place.

  • 14 Klock-Fontanille (2001, p. 296).
  • 15 Sur ce sujet, renvoyons aux études mentionnées ci-dessus, note 8.

8Une autre propriété importante du système hiéroglyphique est représentée par la mobilité et la variabilité des signes et de leurs fonctions. Comme l’a remarqué Isabelle Klock-Fontanille, « les signes graphiques ne sont pas figés, il n’y a pas de norme : ils peuvent changer de nature ou/et de fonction selon que les circonstances le demandent »14. Cette qualité des glyphes anatoliens semble confirmer une fois de plus la double nature du système hiéroglyphique, sa capacité à se placer à un degré intermédiaire entre la communication scripturaire et la communication graphique, deux modes de communication différents mais complémentaires. Le premier mode de communication appartient au domaine de la parole transcrite sur un support. Le second, au contraire, appartient au domaine d’un type de communication reposant sur la vue : il s’agit dans ce cas d’ensembles visuels capables de transmettre un message à travers l’emploi d’images, à travers des signes graphiques renvoyant à l’univers culturel des lecteurs potentiels, et donc à un cadre de référence socio-culturel bien précis15.

  • 16 Cette hypothèse pourrait être confirmée par le fait que l’apparition des premières inscriptions hié (...)

9Au moins deux éléments semblent par conséquent avoir stimulé l’emploi des hiéroglyphes : d’un côté le fait que les hiéroglyphes appartiennent exclusivement au milieu anatolien, et qu’ils sont dès lors perçus comme le seul système d’écriture autochtone d’Anatolie ; de l’autre côté leur importante composante visuelle, qui permet — dans certains contextes et pour certains messages — une communication directe et immédiate. Comme l’a en partie suggéré Emmanuel Laroche, les rois hittites ont peut-être vu les hiéroglyphes comme un moyen d’affirmer leur propre indépendance vis-à-vis de la culture mésopotamienne16. Et ils ont atteint leur objectif par l’emploi de glyphes tirant leur origine des realia du milieu anatolien et véhiculant des messages simultanément sur les plans linguistique et visuel.

  • 17 Sur ce sujet, voir les études mentionnées ci-dessus, note 10.

10Nous voudrions à présent attirer l’attention sur un dernier aspect lié à l’emploi des hiéroglyphes : la relation privilégiée qui semble exister entre la langue louvite — parlée par la majorité de la population du plateau anatolien17 — et l’écriture hiéroglyphique.

  • 18 Sur la question des tablettes de bois, voir, p. ex., Symington (1991), Marazzi (1994), Herbordt (20 (...)

11Pour ce qui est de cette association, qui s’établit au cours du xiiie siècle dans le cadre des inscriptions monumentales, au moins deux scénarios sont possibles. Selon certains, l’écriture hiéroglyphe aurait été également utilisée pour la rédaction de documents de droit privé en louvite en parallèle avec son utilisation dans le cadre de la glyptique ; ces documents auraient été inscrits sur des supports périssables, notamment des tablettes de bois. De telles tablettes n’ont pas laissé de traces archéologiques, mais leur existence semble confirmée par des témoignages indirects18. Il en découle que, alors que l’écriture cunéiforme semble indissolublement liée à la rédaction de documents conservés dans les archives officielles, les hiéroglyphes semblent employés de façon privilégiée dans le domaine des relations commerciales et juridiques entre particuliers (notes commerciales, documents d’achat et vente, testaments, etc.). Ainsi, à partir de ce type d’emploi, le système hiéroglyphique devient, au cours du xiiie siècle av. J.-C., l’instrument utilisé pour toute communication écrite se plaçant en dehors du milieu contrôlé par le pouvoir central, ce dernier restant dominé par l’écriture cunéiforme.

  • 19 Sur ce sujet, voir Balza, Giorgieri & Mora (2012, avec les références bibliographiques).

12Cette hypothèse présente deux avantages. D’un côté, elle permet d’expliquer le manque complet de documents de droit privé provenant des fouilles effectuées dans la capitale hittite et dans d’autres sites anatoliens19, de l’autre elle permet d’expliquer les raisons du choix de la langue louvite pour la rédaction des inscriptions monumentales hiéroglyphiques de la fin du xiiie siècle. En effet, si l’on s’en tient aux résultats d’une étude d’Ilya Yakubovich, quand les souverains hittites, poussés peut-être par les raisons évoquées ci-dessus, commencent à utiliser les hiéroglyphes dans le cadre de l’art monumental, ils adoptent également, pour ce genre de textes, la langue louvite désormais étroitement liée à ce système d’écriture.

13Le manque de données claires, les lacunes de la documentation, l’impossibilité de vérifier l’existence et le contenu de textes inscrits sur des supports périssables nous empêchent cependant d’évaluer la situation dans son ensemble et d’accepter sans réserve cette reconstruction.

14De plus, il nous semble que cette hypothèse n’arrive pas à justifier à elle seule les efforts cognitifs et techniques demandés par l’implémentation du système hiéroglyphique et son association définitive au louvite ; et cela d’autant plus si on imagine que ces efforts auraient été faits pour un emploi marginal — au moins du point de vue du pouvoir — tel que la rédaction de textes de droit privé : l’écriture cunéiforme des archives officielles aurait en effet pu remplir la même fonction.

  • 20 Il faut cependant observer que l’écriture cunéiforme aussi permet une utilisation à différents nive (...)
  • 21 Voir, sur ce sujet, Marazzi (1994) et van den Hout (2007 ; 2010). Nous renvoyons également à la bib (...)

15D’ailleurs, s’il est vrai que l’écriture hiéroglyphique permet une utilisation à différents niveaux de compréhension et spécialisation, il est également vrai que dans le cas de la rédaction de textes de la pratique commerciale et juridique, c’est-à-dire de textes techniques contenant des formules et une structure spécifique, ce caractère de l’écriture hiéroglyphique ne semble pas pouvoir jouer un rôle fondamental20. En outre, à partir du xive siècle, une forme d’écriture composée d’une trentaine de signes à peine est employée à Ougarit pour transcrire la langue ougaritique. Si le but des utilisateurs et des scribes des documents de droit privé était la simplification, ils auraient peut-être pu s’inspirer de ce système, d’autant plus qu’à partir de la deuxième moitié du xive siècle, Ougarit devient un état vassal des Hittites, de sorte que les scribes hittites auraient pu connaître cet emploi particulier que leurs collègues ougaritiques faisaient de l’écriture. D’ailleurs, selon certains, les « scribes sur bois » mentionnés dans les textes auraient pu être de « sténographes » cunéiformes, chargés de rédiger rapidement, hors de leurs bureaux, des textes administratifs, des lettres, des rapports au cours des campagnes militaires. Un certain nombre d’indices textuels (cunéiformes) semblent suggérer que ces textes inscrits sur des supports de bois auraient été par la suite recopiés sur des tablettes d’argile destinées à la préservation dans les archives officielles, et donc probablement écrites en cunéiforme21.

16L’autre possible scénario qui pourrait expliquer l’association entre l’écriture hiéroglyphique et la langue louvite peut être illustré par un passage tiré d’un travail de Theo van den Hout. Dans ce travail, à propos des inscriptions monumentales, l’auteur affirme :

  • 22 Voir van de Hout (2006, pp. 234-235).

These monuments mainly addressed the majority of Luwian speakers in the Hittite heartland. The fact that no cuneiform Hittite version was put up suggests that there may not have been a significant, larger Hittite-speaking population besides that of the ruling élite ; they were making the propaganda but did not need persuading themselves. It does not have to mean (and most likely does not) that the population at large could read them, but Luwians would have recognized the medium and as consequence (or at least the ruling class hoped so) their rulers as theirs. The message of a public inscription is often not so much its contents but simply its being public in a specific form ; the form itself is an important part of the message22.

  • 23 Sur ce sujet, voir, parmi d’autres études, Marazzi (1990, p. 21), van den Hout (2006), avec des réf (...)

17Cette seconde explication tient spécialement compte de la présence de différentes composantes linguistiques et culturelles dans le cadre de l’État hittite, et se fonde également sur les qualités et la nature des hiéroglyphes23.

18Si nous nous en tenons à cette interprétation, le fait d’impulser la diffusion d’un système de signes d’écriture dont la forme pictographique aurait été facilement reconnaissable même par des illettrés, Louvites ou non, représenterait une stratégie pour favoriser le sentiment d’identité partagée de la population du plateau anatolien dans son ensemble. L’association entre les hiéroglyphes et le louvite semblerait donc découler d’une stratégie pragmatique bien précise. De plus, le choix d’adopter, selon les supports ou les circonstances, la notation syllabique (et la codification linguistique louvite) ou la notation idéographique serait le résultat de décisions volontaires des scribes, de décisions qui font suite à des réflexions politiques, ou à des faits contingents que les scribes évaluent au cas par cas.

19Compte tenu de ces considérations, à l’époque hittite impériale, et surtout au cours du xiiie siècle, l’emploi de signes caractérisés par une connotation fortement iconique et organisés selon de véritables compositions iconographiques — et donc au moins partiellement déchiffrables indépendamment de la compétence linguistique et scripturaire des lecteurs potentiels — doit être considéré comme une stratégie pensée, liée aux contextes et aux buts de la communication écrite utilisant les hiéroglyphes. Ceux-ci, grâce à leurs multiples possibilités d’emploi et à leur origine anatolienne pouvaient bien être utilisés pour la diffusion de messages inter-anatoliens, en particulier à l’adresse des Louvites, majoritaire sur le plateau anatolien. Les inscriptions hiéroglyphiques accompagnant les reliefs monumentaux de la période impériale hittite démontreraient clairement le rôle et la valeur de ce caractère essentiel du système hiéroglyphique. On peut en effet supposer qu’une partie des signes composant ces inscriptions pouvait être reconnue même de la part de personnes qui ne connaissaient pas l’écriture ou n’en avaient qu’une connaissance imparfaite.

20Le système d’écriture hiéroglyphique semble par conséquent occuper une place spécifique dans le cadre de la communication écrite de l’État hittite, place liée au besoin éprouvé par le pouvoir d’établir une forme de communication directe avec ses sujets.

  • 24 Klock-Fontanille (1998, p. 58).

21Mais ce n’est pas la seule raison pour laquelle l’écriture hiéroglyphique se présente comme un instrument au service du pouvoir. Comme l’a remarqué Klock-Fontanille « l’écriture hiéroglyphique n’a pas été simplement un moyen de communication public. C’était un acte politique, au même titre que les textes cunéiformes des archives, mais avec des procédés totalement différents »24.

22Dans la dernière partie de notre contribution nous aborderons ces procédés. Partant de l’hypothèse que l’idéologie hittite doit être mise en relation avec la culture au moyen d’un véritable processus de matérialisation lequel, à son tour, peut donner lieu à des cérémonies, des objets symboliques, des monuments et des inscriptions, nous examinerons la relation entre les hiéroglyphiques et les œuvres monumentales.

3. Les inscriptions monumentales et la performance politique : un cas de matérialisation de l’idéologie

  • 25 Le terme hekur peut également être associé au terme SAG.UŠ (éternel, solide, perpétuel). Dans ces c (...)
  • 26 Voir Ullmann (2010, p. 160, n. 352) et Harmanşah (2014 et 2015). L’étymologie de hekur semblerait d (...)

23Dans une étude réalisée en collaboration avec Clelia Mora, nous nous sommes occupée de la nature et des caractéristiques des certaines institutions religieuses et politiques hittites de l’âge impérial final (xiiie siècle av. J.-C.). Parmi ces institutions, nous avons examiné une structure mentionnée dans les sources cunéiformes comme NA4hekur. Ce terme, parfois flanqué d’un toponyme ou d’autres indications géographiques, semble faire référence à « a rocky outcrop, a mountain peak, profane in origin that often, however, acquired divine proportions and could become a sanctuary » (van den Hout 2002, pp. 74-75). Et, en effet, les sources écrites disponibles semblent suggérer que cette structure pouvait avoir plusieurs fonctions : sanctuaire rupestre, lieu de refuge, bâtiment palatial, mais aussi tombe25. Selon une autre hypothèse, les indices textuels laisseraient penser que le hekur n’était pas simplement une construction, mais qu’il pouvait parfois être une structure présente dans la nature, comme une grotte dans laquelle l’on pouvait pénétrer26. Les mêmes indices laissent aussi penser que ce type de structure pouvait être associée à des inscriptions hiéroglyphiques.

24En nous appuyant sur ces données et sur d’autres considérations de nature textuelle et archéologique, nous avons aussi proposé l’identification d’au moins une partie des reliefs hittites à inscription hiéroglyphique — en particulier les deux reliefs de SİRKELİ et FRAKTIN — avec les structures hekur mentionnées dans les textes cunéiformes.

  • 27 Pour ce qui est de cet aspect, nous renvoyons à la bibliographie mentionnée dans Balza & Mora (2011 (...)

25Dans la même étude, à partir d’une série d’analogies fonctionnelles entre les hekur et d’autres dispositifs commémoratifs hittites, nous avons aussi suggéré que ces structures pouvaient être le théâtre d’événements récurrents organisés célébrant une divinité, un roi défunt (et donc divinisé) et, peut-être, les exploits du roi au pouvoir. Dans la foulée, nous avons aussi avancé l’hypothèse qu’un certain nombre de personnes pouvait prendre part à ces événements27. Ces derniers pouvaient donc représenter une opportunité pour diffuser la vision du monde du pouvoir et pour communier dans des valeurs et des souvenirs.

  • 28 Cette hypothèse a été avancée dans le cas des monuments de GAVURKALESI, de NİŞANTAŞ, et de YAZILIKA (...)

26Dans l’état actuel des recherches, nous ne sommes pas en mesure de vérifier si tous les reliefs et constructions découverts dans les hautes terres d’Anatolie peuvent être identifiés avec les monuments mentionnés comme hekur dans les textes cunéiformes : les données archéologiques et textuelles sont trop fragmentaires28. Il nous paraît quand même possible d’avancer l’hypothèse que tous les œuvres monumentales à inscriptions hiéroglyphiques jouaient un rôle de premier plan dans le discours politique des rois hittites. Les élites n’auraient pas investi autant de ressources matérielles et humaines dans la réalisation de ces œuvres sans pouvoir les utiliser dans leur rhétorique politique. Et le bon fonctionnement de cette rhétorique requérait un public — des sujets ou des fidèles rassemblés dans un même lieu significatif —, un scénario — un lieu topographique distinctif ou symbolique — et des instruments de pouvoir, c’est-à-dire un rite de fondation identitaire, une image divine ou royale, ou les signes mystérieux d’une écriture monumentale.

27Dans le cadre de cette rhétorique, nous pourrions considérer les œuvres monumentales inscrites (reliefs et d’autres complexes architecturaux urbains et extra-urbains) comme des scènes de représentation publique où chaque élément de scénario joue un rôle précis dans la transmission des messages relatifs à la création de l’identité et à la diffusion du consensus : les glyphes, les images, l’emplacement et la forme du monument. Dans ce contexte, non seulement les images gravées sur la pierre, mais aussi les hiéroglyphes — un médium d’une grande immédiateté et d’un considérable impact visuel — devaient représenter un des éléments constitutifs de la construction de la performance.

28Il nous semble cependant possible de distinguer deux fonctions différentes de l’écriture selon le type d’inscription monumentale : les reliefs rupestres inscrits et les longues inscriptions sur des supports différents.

29À partir du xiiie siècle av. J.-C., les hiéroglyphes commencent à être gravés sur des supports différents des supports originaux et à accompagner les reliefs sur pierre. Ces œuvres représentent un ou plusieurs personnages (dieux, rois, princes, hauts fonctionnaires) et les associent à leurs signes distinctifs : leur nom, parfois leur généalogie et leurs titres, transcrits en hiéroglyphes.

  • 29 À ce propos, il serait peut-être possible d’établir un parallèle entre la fonction des reliefs et d (...)
  • 30 Voir, récemment, Beckman (2013, avec la bibliographie) et van Loon (1985, pp. 14-sq.). Comme l’a re (...)
  • 31 Sur ce sujet, voir, parmi d’autres études, Harmanşah (2014 ; 2015).

30Dans le cas de ces monuments, il nous semble possible d’affirmer que, à l’instar des images des personnalités divines ou humaines gravées sur les surfaces de pierre, les signes hiéroglyphiques pourraient être interprétés comme des matérialisations permanentes non seulement du nom de leur référent, mais de sa vraie essence, humaine ou divine29. En d’autres mots, les glyphes font davantage que transcrire le nom du titulaire du monument : ils en éclairent l’identité, matérialisent la présence de leur référent, contribuent à magnifier la personnalité représentée et lui permettent d’exercer son influence sur les lieux où le monument a été réalisé. À ce propos, il nous semble pertinent de rappeler que les reliefs hittites ont été souvent réalisés à proximité de points d’eau, dans des lieux montagneux isolés et d’accès difficile. Or sources et montagnes sont souvent mentionnées, dans les textes, comme des lieux sacrés, objets de vénération30 ; comme les entrées des cavernes, les cols inaccessibles, les gorges, elles étaient en effet considérés comme des accès au monde souterrain, univers des ancêtres et des êtres surnaturels, et donc comme des lieux où des rituels (peut-être funéraires) pouvaient être exécutés31. Ces lieux pouvaient par conséquent servir de passages entre deux mondes : celui des humains et l’au-delà. Et c’est dans cette optique qu’il faudrait peut-être lire l’intérêt du pouvoir politique hittite à l’égard de ces lieux. En se les appropriant, les élites pouvaient les utiliser dans leur rhétorique politique.

  • 32 Sur l’interprétation de l’image comme portail dans le monde hittite, voir Goedegebuure (2012).
  • 33 Il n’est pas facile d’établir le nombre de personnes susceptibles de se rendre sur les lieux à l’oc (...)

31Il nous semble par conséquent que ces monuments inscrits fonctionnaient comme des portails établissant un rapport direct avec le surnaturel, les reliefs devenant le lieu de la rencontre entre les dieux et les hommes32. Comme les statues des dieux dans les temples, les reliefs (représentations et inscriptions) fonctionnent à double sens : ils permettent d’aller de l’homme au dieu (ou au roi) à travers les prières, les supplications et les offrandes, et du dieu (ou du roi) à l’homme à travers l’action divine (ou royale) dans le monde matériel. L’organisation de cérémonies récurrentes qui, selon notre hypothèse, pouvaient avoir lieu près des monuments devait également s’inscrire dans l’ensemble des fonctions de ces monuments. De telles cérémonies auraient pu attirer un public de fidèles ou de visiteurs, spectateurs de performances politico-religieuses dont le double objectif était de diffuser la vision dominante et de créer une identité hittite partagée33.

32Dans le cas de ces reliefs, constitués de figures et de légendes hiéroglyphiques, l’écriture ne semble cependant pas importante pour ce qu’elle dit, elle semble importante pour le fait d’y être, pour le tracé de ses signes : elle ne parle pas aux hommes, elle semble plutôt la matérialisation du savoir occulte qui permet de manier l’art secret des signes, un savoir qui était détenu par les élites et leurs scribes. Image permanente du nom, et donc de la vraie essence de son référent, dans ces reliefs l’écriture matérialise la personnalité de l’individu en la projetant dans l’espace. Compte tenu de la nature de ces légendes, il est pourtant difficile d’établir si les signes d’écriture pouvaient jouer un rôle actif, comme soutien pour une évocation ou une récitation, dans le cadre des cérémonies qui avaient lieu près des monuments.

33Il en va probablement différemment dans le cas des inscriptions sur plusieurs lignes datant de l’âge impérial final (fin du xiiie siècle av. J.-C.).

  • 34 Pour l’époque de Tutḫaliya IV, nous avons les inscriptions de EMİRGAZİ, YALBURT, KARAKUYU et probab (...)
  • 35 Pour une description des monuments, voir Ehringhaus (2005, pp. 32-35, 37-46) ; en ce qui concerne l (...)

34Les premières inscriptions hiéroglyphiques s’étendant sur plusieurs lignes sont documentées à partir du xiiie siècle, mais la plupart des témoignages datent de l’époque des derniers rois hittites, Tuḫaliya IV et Suppiluliuma II34. Parmi les témoignages les plus significatifs, on compte l’inscription de YALBURT, au nord-ouest de Konya, qui relate les opérations militaires de Tuthaliya IV contre le peuple des Lukka, et l’inscription de SÜDBURG qui enregistre les exploits militaires de Suppiluliuma II35. Dans le cas de ces textes et d’autres comparables (EMİRGAZİ, KÖYLÜTOLU YAYLA ou NIŞANTAŞ), le récit des hauts faits du roi semble lié à la construction ou à la consécration du monument sur lequel ils ont été consignés.

  • 36 Des réflexions sur l’historiographie hittite se trouvent, parmi d’autres études, en Archi (1979), H (...)

35La diffusion de ce nouveau type célébratif d’inscription semble témoigner d’un changement profond dans la relation du pouvoir politique avec les glyphes : à la fin de l’ère hittite, le genre historique semble déserter l’écriture cunéiforme et la tablette d’argile au profit de l’écriture hiéroglyphique et des supports monumentaux36. Les rois de Hattusha semblent ainsi se tourner vers l’écriture hiéroglyphique monumentale pour la diffusion de l’idéologie royale et des messages les plus importants : le nom du seul vrai souverain, la célébration de ses divinités tutélaires, le récit de ses exploits militaires.

36Ce changement fonctionnel semble suggérer que ces inscriptions hiéroglyphiques plus complexes jouaient un rôle précis dans un ensemble bien structuré d’éléments liés à la diffusion de l’idéologie royale. Ces éléments comprennent la réalisation d’œuvres monumentales, le rapport qui semble s’établir entre ces œuvres et certains éléments naturels spécifiques (l’eau, les rochers ou la pierre des montagnes) et les glyphes gravés sur les parois des monuments.

37Pour ne citer que deux exemples, nous pourrions revenir aux deux inscriptions de SÜDBURG et YALBURT. La première a été réalisée à Hattusha, à l’intérieur d’une petite chapelle creusée dans la pierre et rattachée à un bassin pour la collecte de l’eau, la seconde occupant les parois d’une piscine sacrée, réalisée dans un contexte extra-urbain.

  • 37 Comme dans le cas des reliefs, il n’est pas facile d’établir le nombre de personnes susceptibles de (...)

38Les deux complexes monumentaux partagent quelques éléments qui nous paraissent fondamentaux. Ils ont chacun été érigés à proximité d’une source, et tous deux sont faits de la même pierre du plateau anatolien, si importantes pour la religion hittite. Ils semblent donc posséder les caractéristiques des lieux capables de mettre en communication avec l’au-delà : le bassin de YALBURT a été réalisé juste là où une source jaillit du cœur du plateau, et la chambre de SÜDBURG reproduit les caractéristiques d’une grotte de montagne. Les deux semblent reproduire les mêmes endroits naturels à proximités desquels les reliefs rocheux ont été réalisés. Comme les reliefs rocheux, ces monuments auraient par conséquent pu servir comme des lieux de performance publique37.

39En nous fondant sur ces données, nous voudrions avancer l’hypothèse que les signes de l’écriture hiéroglyphique jouaient un rôle actif dans les rituels de fondation politico-identitaire qui devaient se dérouler à côté des monuments. Avec leur double nature d’image et de signe d’écriture, ces hiéroglyphes pouvaient en effet s’articuler à la récitation d’un possible célébrant, non seulement comme soutien visible (lisible ?) du récit, mais aussi comme parcours cadré d’images/signes décodables (bien qu’à des niveaux différents) par le public concerné. Les textes constituaient un support visible de la narration d’événements historiques ayant pour but la célébration des souverains, juste à l’endroit où s’ouvrait un passage vers l’au-delà. Le fait d’évoquer les faits dans ces lieux spécifiques, chargés de pouvoir religieux, aurait signifié l’acceptation du roi et de ses actions de la part des habitants de l’au-delà (spécialement des ancêtres) et aurait joué un rôle important pour la création du consensus et la légitimation de la dynastie.

40Pour conclure, nous pouvons affirmer que les œuvres monumentales hiéroglyphiques prennent place au cœur de véritables réseaux de relations complexes. Il appartenait aux usagers de ces dispositifs — le pouvoir, d’un côté, et le public, de l’autre — de choisir de mettre l’accent sur l’un ou l’autre des codes et des plans mobilisés, selon les besoins du moment, les circonstances, le type de performance publique ou les compétences linguistiques et culturelles. Dans le cadre de ces monuments, les hiéroglyphes se présentent en effet comme un instrument extrêmement flexible, capable de répondre à différentes exigences à la fois, exigences liées en particulier à la sphère politique et au contrôle de l’État.

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Notes

1 Les études qui constituent notre base théorique appartiennent au domaine de l’hittitologie, de l’archéologie, de l’anthropologie et de la sémiotique des écritures. Un groupe d’études dans le domaine de l’hittitologie s’est en effet concentré sur les propriétés des hiéroglyphes en tant qu’écriture visuelle « au service du pouvoir », sur la question des supports de l’écriture (glyptique, parois rocheuses, œuvres monumentales), et sur la relation qui s’instaure entre les glyphes et les cunéiformes dans le contexte de l’état hittite (voir, en particulier, les recherches d’Isabelle Klock-Fontanille et Massimiliano Marazzi, mentionnées ci-dessous, n. 2, § 2 et 3). Ces études réalisées dans le champ de l’hittitologie peuvent être mises en rapport avec des questions plus générales dont s’occupent les recherches en anthropologie et en sémiotique des écritures. Ce domaine d’études a donné lieu à une vaste bibliographie, qui ne peut pas être reproduite ici. Nous nous limitons à mentionner quelques travaux parmi les plus significatifs et les plus récents, comme ceux de Cardona (1981), Harris (1994 et 2000), Zaganelli (2004), Severi (2004), Grube, Kogge & Krämer (éds, 2005), Klinkenberg (2006), Mancini & Turchetta (éds, 2014), Klock-Fontanille (éd., 2016). Pour ce qui est enfin du domaine de l’archéologie, les réflexions que nous présentons dans cette contribution se fondent sur les recherches qui, à partir des années 1990, se sont occupées de la question de la matérialisation de l’idéologie et du rôle politique des performances publiques dans les sociétés anciennes : sur ce sujet, voir spécialement DeMarrais, Castillo & Earle (1996), Bergmann & Kondoleon (éds, 1999), et Inomata & Coben (éds, 2004). En nous fondant sur les études mentionnées, nous avons tenté d’en appliquer les apports pionniers au contexte d’usage des hiéroglyphes anatoliens (§ 2 et 3 de cette contribution). En particulier, nous avons considéré l’écriture hiéroglyphique anatolienne comme un moyen de communication à l’écrit qui ne peut pas être examiné sans prendre en compte les contextes des inscriptions, l’emplacement des textes dans l’espace, la proximité d’autres éléments capables de véhiculer la vision du monde des élites au pouvoir, et leur possible relation avec des événements publics.

2 Pour une définition de l’écriture hiéroglyphique et spécialement pour un examen des aspects visuels, supra-linguistiques, des inscriptions, voir Marazzi (1990, pp. 11-36, 1991 et 2010), Klock-Fontanille (2001, 2005 et 2006). Pour une analyse de différents aspects concernant la pratique de l’écriture hiéroglyphique, voir, récemment, Payne (2015).

3 Pour cette définition et pour une présentation du caractère public des hiéroglyphes anatoliens à travers l’examen de quelques exemples tirés du corpus des inscriptions hiéroglyphiques, voir Klock-Fontanille (2006) (sur le même sujet, voir également Klock-Fontanille, 2001 et 2005, Marazzi, 2010).

4 Voir, en détail, DeMarrais, Castillo & Earle (1996) ; sur les mêmes sujets, voir aussi, DeMarrais, Gosden & Renfrew (éds, 2004).

5 Un certain nombre d’études ont examiné la notion de performance et son applicabilité aux cérémonies et aux événements publics de l’antiquité. Nous voudrions mentionner en particulier les contributions présentées dans Bergmann & Kondoleon (éds, 1999) et Inomata & Coben (éds, 2004), qui se concentrent sur l’analyse de l’art monumental à l’aide des études sur les fêtes et les événements publics, et examinent la relation entre la performance publique et les relations de pouvoir. L’hypothèse de départ de ces études est que pour comprendre le contexte et la fonction de l’art monumental ancien il faut débord comprendre la culture du spectacle et de la représentation dont cet art est l’expression.

6 Certains aspects de la documentation épigraphique et archéologique du Proche-Orient ancien liés au sujet de la matérialisation de la culture et à la relation qui semble exister entre la performance et l’idéologie ont fait l’objet de quelques études, voir, p. ex., les études récentes de Gilibert (2011) et Ristvet (2015).

7 Sur la naissance de l’écriture hiéroglyphique anatolienne, voir, entre autres études, Mora (1991), Yakubovich (2008) ; pour une hypothèse différente, voir Waal (2012).

8 Pour un premier examen de cet aspect particulier de l’écriture hiéroglyphique anatolienne, nous renvoyons aux études mentionnées en note 2. Pour des réflexions plus générales liées aux possibilités de lecture et compréhension des signes d’écriture, et notamment des ensembles visuels capables de transmettre un message à travers l’emploi d’images, voir, p. ex., Boone & Mignolo (éds, 1994), Severi (2004), Perri (2007), Klock-Fontanille (éd., 2016).

9 Les premières inscriptions hiéroglyphiques monumentales datent de l’époque du roi Muwatalli II (moitié du xiiie siècle av. J.-C.). Pour ses nombreuses implications politiques, on pourrait considérer cette innovation comme une véritable « révolution culturelle » au sein de l’empire hittite (Mora, 1999, p. 30) ; cette « révolution » s’accompagne aussi à la diffusion, dans l’art monumental, d’une nouvelle façon de représenter l’image du souverain. Sur ce sujet, voir p. ex. Lumsden (1990), van den Hout (1995), Giorgieri & Mora (1996, pp. 72-sq.), De Martino (2010), Simon (2012).

10 À propos de la langue louvite pendant différentes phases historiques, et pour un examen de sa relation avec les hiéroglyphes, voir Yakubovich (2008 ; 2010). Pour ce qui est des compétences linguistiques des locuteurs du plateau anatolien, voir p. ex. les considérations de van den Hout (2006).

11 Sur ce sujet, voir les observations de Neumann (1992, p. 26).

12 Voir Laroche (2005, p. 566).

13 Voir l’étude de Neumann (1992, p. 127), spécialement lorsque l’auteur affirme : « Die in Kleinasien neugeschaffene Schrift hat den Vorteil, daß viele ihrer Glyphen bildhaft, naturalistisch sind, so daß sie dem zeitgenössischen Leser unmittelbar zeigen, was sie meinen, — unabhängig davon, welche Sprache dieser Leser spricht oder versteht. Das unterscheidet sie von der in höchstem Grad abstrakten Keilschrift […]. Demnach könnte bei der Schöpfung der Hieroglyphen das Streben eine Rolle gespielt haben, in einem mehrsprachigen Land breitere Schichten unmittelbar anzusprechen — mit Hilfe eines neuen Mediums, bei dem jedermann wenigstens einen Teil der Zeichen sofort verstand, nicht nur Schriftgelehrte. »

14 Klock-Fontanille (2001, p. 296).

15 Sur ce sujet, renvoyons aux études mentionnées ci-dessus, note 8.

16 Cette hypothèse pourrait être confirmée par le fait que l’apparition des premières inscriptions hiéroglyphiques phonétiques dans les champs des sceaux se serait produite en même temps que le passage de l’akkadien au hittite comme langue principale pour la rédaction des textes cunéiformes (entre la fin du xve et le xive siècle av. J.-C.). Voir van den Hout (2009) ; Yakubovich (2008 ; 2010, pp. 204-205).

17 Sur ce sujet, voir les études mentionnées ci-dessus, note 10.

18 Sur la question des tablettes de bois, voir, p. ex., Symington (1991), Marazzi (1994), Herbordt (2005, pp. 25-41), Mora (2007), Waal (2011).

19 Sur ce sujet, voir Balza, Giorgieri & Mora (2012, avec les références bibliographiques).

20 Il faut cependant observer que l’écriture cunéiforme aussi permet une utilisation à différents niveaux de compréhension et spécialisation. À propos de la diffusion de l’écriture cunéiforme et des compétences des lecteurs concernés, voir p. ex. les considérations de Charpin (2008).

21 Voir, sur ce sujet, Marazzi (1994) et van den Hout (2007 ; 2010). Nous renvoyons également à la bibliographie mentionnée ci-dessus, note 18.

22 Voir van de Hout (2006, pp. 234-235).

23 Sur ce sujet, voir, parmi d’autres études, Marazzi (1990, p. 21), van den Hout (2006), avec des références à la littérature antérieure.

24 Klock-Fontanille (1998, p. 58).

25 Le terme hekur peut également être associé au terme SAG.UŠ (éternel, solide, perpétuel). Dans ces cas, il ferait référence à un monument commémoratif que l’on appelait le « pic éternel ».

26 Voir Ullmann (2010, p. 160, n. 352) et Harmanşah (2014 et 2015). L’étymologie de hekur semblerait d’ailleurs confirmer cette dernière hypothèse. Le mot serait en effet un emprunt au sumérien, et notamment du mot É.KUR (« maison de montagne »), assimilé comme hé-kur en hittite (voir HED 3, pp. 287-289 ; EDHIL, p. 339 ; voir également HEG, pp. 235-237 ; HW2, pp. 556-557).

27 Pour ce qui est de cet aspect, nous renvoyons à la bibliographie mentionnée dans Balza & Mora (2011). Pour ce qui est des fêtes hittites, voir aussi, p. ex., les études de Lebrun (1977 et 1987).

28 Cette hypothèse a été avancée dans le cas des monuments de GAVURKALESI, de NİŞANTAŞ, et de YAZILIKAYA. D’autres monuments, par exemple ceux d’AKPİNAR, BEYKÖY, HANYERİ, HEMİTE, KARABEL, MALKAYA, SURATKAYA ou TAŞCİ ne semblent pas partager les mêmes caractéristiques des lieux de commémoration d’un souverain défunt qui semble typique des monuments hekur.

29 À ce propos, il serait peut-être possible d’établir un parallèle entre la fonction des reliefs et des sceaux imprimés sur les tablettes cunéiformes ou les biens pour les valider ou authentifier. Plus précisément, reliefs et sceaux pourraient être interprétés comme une émanation de l’individu, comme un moyen pour étendre sa personnalité dans l’espace. En d’autres mots, de la même manière que le sceau projette sur la tablette ou sur les biens scellés tout ce que son propriétaire représente, la figure et le nom inscrit sur la pierre des reliefs projette sur les lieux du monument la personnalité de la personne représentée. Sur ce sujet, voir, p. ex., Cassin (1960) et Seeher (2009).

30 Voir, récemment, Beckman (2013, avec la bibliographie) et van Loon (1985, pp. 14-sq.). Comme l’a remarqué van Loon, il faut pourtant garder à l’esprit que, bien que les rochers inaccessibles aient été vénérés en Anatolie à partir d’une époque très ancienne et bien que des reliefs aient été gravés en Mésopotamie et en Iran au iiie millénaire av. J.-C. déjà, les reliefs hittites qui ont laissé une empreinte durable dans le paysage anatolien remontent tous au xiiie siècle.

31 Sur ce sujet, voir, parmi d’autres études, Harmanşah (2014 ; 2015).

32 Sur l’interprétation de l’image comme portail dans le monde hittite, voir Goedegebuure (2012).

33 Il n’est pas facile d’établir le nombre de personnes susceptibles de se rendre sur les lieux à l’occasion de ces événements. Ces reliefs se trouvent en effet dans des endroits reculés et d’accès difficile. Pourtant, on a mis identifié des traces d’installations humaines à proximité de quelques-uns de ces reliefs (voir Balza & Mora, 2011, avec références bibliographiques).

34 Pour l’époque de Tutḫaliya IV, nous avons les inscriptions de EMİRGAZİ, YALBURT, KARAKUYU et probablement KÖYLÜTOLU YAYLA, comme aussi les stèles et les fragments BOĞAZKÖY 3, BOĞAZKÖY 18, DELİHASANLİ, et BOĞAZKÖY 24. Pour Šuppiluliuma II, nous disposons des inscriptions de NIŞANTAŞ (BOĞAZKÖY 5) et SÜDBURG (BOĞAZKÖY 21). Pour une liste complète des inscriptions faisant partie du corpus de l’âge impériale, voir (2003, pp. 139-140, avec le tableau 4, pp. 142-143) ; pour une présentation des inscriptions anatoliennes de cette époque, voir Ehringhaus (2005).

35 Pour une description des monuments, voir Ehringhaus (2005, pp. 32-35, 37-46) ; en ce qui concerne les deux textes hiéroglyphiques, Hawkins (1995, avec Appendix 1).

36 Des réflexions sur l’historiographie hittite se trouvent, parmi d’autres études, en Archi (1979), Hoffner (1980), Mora (1999), Klinger (2001), Gilan (2005).

37 Comme dans le cas des reliefs, il n’est pas facile d’établir le nombre de personnes susceptibles de se grouper près des monuments à l’occasion de ces événements. Pour ne donner qu’un exemple, la chambre de SÜDBURG, avec sa taille réduite (4 m de profondeur seulement, pour une largeur maximale de 2 m), n’offrait pas assez d’espace pour accueillir des grandes célébrations. Mais une partie du public aurait peut-être pu se rassembler hors de l’enceinte, devant la petite ouverture qu’y donnait accès : de ce lieu, les habitants de Hattusha auraient pu suivre ce qui se passait dans la chambrette et y participer à leur manière.

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Pour citer cet article

Référence papier

Maria Elena Balza, « Écriture, performance et pouvoir »Signata, 9 | 2018, 505-524.

Référence électronique

Maria Elena Balza, « Écriture, performance et pouvoir »Signata [En ligne], 9 | 2018, mis en ligne le 17 décembre 2018, consulté le 15 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/signata/1628 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/signata.1628

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Auteur

Maria Elena Balza

Maria Elena Balza est chercheuse postdoctorale à l’Université de Pavie et enseigne les Civilisations du Proche-Orient ancien à l’Université de Gênes. Son principal domaine d’étude est l’histoire du Proche-Orient ancien à l’époque préclassique. Elle est l’auteure d’un ouvrage sur les pratiques sigillaires à Emar (Syrie, xive-xiiie siècle av. J.-C.) et de plusieurs articles concernant différents aspects de la société et de la culture de la région syro-anatolienne au Bronze Récent et au Fer Ancien.
Courriel : mariaelena.balza[at]unipv.it

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