Navigation – Plan du site

AccueilActes des colloques38Métaphores bestiales : symbolique...Des animaux et des hommes dans l’...

Métaphores bestiales : symbolique de l'animalité

Des animaux et des hommes dans l’emblématique de l’époque moderne

Of Animals and Men in Early Modern Emblems
Jean-Jacques Chardin

Résumés

Les animaux apparaissent dans beaucoup de livres d’emblèmes produits à l’époque moderne en Angleterre et sur le continent. Ils sont habituellement assez faciles à identifier car les images et les gloses poétiques sont informés par les fables antiques, les bestiaires médiévaux ainsi que par les grands dictionnaires de symboles parus au cours du XVIe siècle. Les animaux témoignent d’une capacité à philosopher et engagent une réflexion sur la raison et la nature dont on trouve de nombreux échos chez les humanistes tels Thomas Elyot, Montaigne, Sir Thomas Browne ou encore Giovan Battista Gelli. De par leur dispositif visuel, les emblèmes forcent le lecteur à un exercice introspectif proche de la méditation où la catégorie de l’humain se trouve mise en question.

Haut de page

Texte intégral

1Le discours emblématique est au cœur de l’épistémè de l’époque moderne, en Angleterre comme sur le continent, et l’on sait combien Shakespeare et ses contemporains y ont puisé. On pense à la scène de présentation des écus à la cour de Simonides dans Pericles (II, 2) où au topos du cerf blessé dans As You Like It (II, 1), ou encore à l’image des « buckets » dans la scène de déposition de Richard II (IV,1) que Shakespeare a peut-être empruntée à The Worthy Tract of Paolo Iovius, traduction anglaise donnée par Samuel Daniel en 1585 du Dialogo de’lle imprese militari e amorose (1555). On peut comprendre l’intérêt porté par Shakespeare à l’emblématique dans la mesure où le code visuel puissant qu’est l’emblème est assez facilement transposable au théâtre sous forme d’éléments scéniques ou de discours poétique recourant à l’hypotypose.

2Après la parution de l’Emblematum Liber d’Alciat à Augsbourg en 1531, l’emblème se présente le plus fréquemment comme un ensemble tripartite qui associe un motto, presque toujours en latin, une image et une glose poétique plus ou moins longue, en latin ou en langue vulgaire. L’emblème est ce que l’on appelle aujourd’hui une configuration intermédiale où les deux codes sémiotiques de l’image et du texte interagissent pour faire émerger un ou plusieurs sens.

3Les animaux sont légion dans l’emblématique anglaise et continentale, et ils apparaissent sur les images comme dans les gloses poétiques. Cela n’est pas pour surprendre car les emblèmes prennent souvent la forme de courts apologues dont les sources sont à chercher dans le texte biblique et les commentaires patristiques, mais aussi chez les fabulistes de l’Antiquité, Esope ou Phèdre, ou encore dans les bestiaires classiques et médiévaux.

4Comme dans ces textes anciens, les animaux présentés dans les emblèmes n’appartiennent pas tous à la même classe. Dans les emblèmes politiques, le lion est fréquemment convoqué pour la symbolique à laquelle il est traditionnellement associé (majesté, force, puissance…). Si l’on trouve également de nombreux oiseaux (aigle, héron, cigogne, coq…), les animaux terrestres sont en revanche assez peu représentés, les reptiles (hormis le serpent) n’apparaissant même que de façon ponctuelle. Sans doute faut-il voir dans ces choix iconographiques la trace laissée par la tradition biblique qui hériarchisait les créatures vivantes en fonction de leur appartenance à certains éléments. Créés juste après les arbres, l’herbe et la lumière, les oiseaux ont plus de noblesse car ils peuvent s’élancer vers l’étendue du ciel, alors que les animaux rampants, créés plus tardivement, sont cantonnés à la terre.

5L’objet de la présente étude est de montrer comment la présence des animaux dans les emblèmes est un moyen de faire retour sur l’homme en questionnant le rapport que celui-ci entretient avec la nature. Il convient pour ce faire de se pencher en premier lieu sur la dialectique du mimétique et du figuratif qui structure la représentation iconographique des animaux, avant de tenter de circonscrire le concept de raison animale, pour réfléchir dans un troisième moment au regard intérieur auquel invite la présentation des animaux dans les emblèmes.

Représenter et figurer

  • 1 Notons que toutes les illustrations ne sont pas de la même qualité et qu’elles ne sont pas toutes d (...)

6Sur presque toutes les gravures des emblèmes, les animaux sont facilement identifiables, qu’ils soient mythiques, comme le phénix sur son nid de feu, bibliques, comme le serpent ou la colombe, ou plus communément domestiques, à l’instar du chien, du coq ou du cheval. Réalisées sur bois ou sur cuivre, les gravures témoignent de l’art consommé d’artistes comme Gerard Jansen Van Kampen ou Arnold Nicolai, qui travaillaient dans l’atelier de Plantin à Anvers, ou encore Pierre Woeriot qui illustra magnifiquement les emblèmes de Georgette de Montenay1. L’exigence mimétique est forte également parce que les animaux doivent être immédiatement reconnaissables par le lecteur qui peut ainsi vérifier leur conformité avec les descriptions qu’en donnent les passages bibliques, les auteurs anciens ou contemporains ou encore les grands compendia symboliques produits par les mythographes, comme les Hieroglyphica de Valeriano (1556) ou les Mythologiae de Natale Conti (1583). Ainsi la biche blessée de « Nusquam tuta » (Minerva Britanna, Peacham, 1612, illustration 1) doit-elle évoquer la douleur d’amour dont souffre Didon délaissée par Enée au chant IV de l’Enéide (68-73) ainsi que l’exégèse néo-stoïcienne qu’en fournit Juste Lipse dans son traité sur la constance de 1584 traduit en anglais par John Stradling en 1595 :

  • 2 Lipse Juste, Of Constancy, trad. John Stradling, printed by Richard Johnes, Londres, 1595, p. 4. Pe (...)

Therefore you flie from troubles alwayes, but never escape them, not unlike the Hinde that Virgil speaketh of,
Who ranging through the chace, some hunter shooting far by chance
All unaware hath smit, and in her side hath left his lance,
She fast to wildernes and woods doth draw, and there complaines,
But all in vain : because as then Poet addeth,
--That underneath her ribs the deadly dart remaines2.

7Plus que l’amour blessé, la biche percée d’une flèche symbolise les tourments que la conscience malheureuse inflige à l’âme pécheresse. L’évêque Joseph Hall, qui contribua à diffuser la pensée de Juste Lipse en Angleterre, reprend une glose similaire dans Heaven upon Earth, ouvrage paru en 1606 que Peacham avait peut-être lu :

  • 3 Hall Joseph, Heaven Upon Earth [1606], in The Works of Joseph D.D. A New Edition Revised and Correc (...)

Ah fool, thy soul festereth within […] Go then […] So the stricken deer, having received an arrow, whose shaft shaken out hath left the head behind it, runs from one thicket to another, not able to change his pains with his places, but finding his wounds still the worse with continuance3.

8L’image de « Nusquam tuta » condense ainsi une histoire et éveille chez le lecteur le souvenir de textes connus.

  • 4 Plutarque, Moralia « Les animaux de terre ont-ils plus d’adresse que ceux de mer ? » 971f, tome 4, (...)

9Il en est de même du porc-épic sur l’emblème de Claude Paradin « Ultus avos Troiae » (Devises Heroïques, 1557, illustration 2) qui transpose par le dessin un passage de l’Histoire naturelle (livre 8, chap. 53) où Pline rapporte comment le porc-épic lance ses épines pour attaquer ses ennemis. L’image convoque également une analyse de Plutarque selon laquelle le porc épic est un exemple d’ingéniosité et de sagesse car « d’une pomme de pin son corps prend la figure/Et présentant ses dards, fait craindre sa piqûre4. » Quant au crocodile couché sur les rives du fleuve au premier plan de « Providentia » (A Choice of Emblemes, Whitney, 1586, illustration 3), il ne peut s’interpréter hors la lecture qu’en propose Pline dans l’Histoire naturelle (livre VIII, ch. 37) et que reprend Valeriano au livre XXIX, chap. 1 des Hieroglyphica:

  • 5 Valeriano, Pierius, Hieroglyphica, trad. Jean de Montlyart, Paul Frelon, Lyon, 1615, p. 362

Les crocodiles […] ayants pose leur portee sur le sec, commettent leurs oeufs au sein de la terre, et s’y tiennent tousiours aupres, tant que leurs petits soyent animez et esclos, choisissants l’endroit où le Nil se doibt desborder avec effort, y transportants leur couvée comme par un certain praesage qui leur est connaturel5.

  • 6 Boucheron Patrick, Conjurer la peur. Sienne 1338, Seuil, Paris, 2013, p. 21.
  • 7 Spica Anne-Elisabeth, Symbolique humaniste et Emblématique, Honoré Champion, Paris, 2000, p. 273.

10L’image emblématique transpose dans le champ du visuel la source écrite en laquelle elle s’origine. Comme l’écrit Patrick Boucheron à propos des icônes politiques au moyen âge, elle ravive « une empreinte laissée dans une mémoire que l’on peut supposer collective6. » L’image s’apparente à un art de la remémoration, et sa construction incorpore fréquemment les canons de la rhétorique classique (dispositio, inventio, actio, memoria…) pour devenir, selon l’heureuse expression d’Anne-Elisabeth Spica, « un système de narration visuelle7. » À cet égard, si l’œil du crocodile de « Providentia » est placé exactement au centre de la composition, c’est bien pour assurer le lien entre le dessin et le motto latin (Providentia = vision en avance, prévoyance ou encore Providence) et faire ainsi basculer l’image de la représentation à la figuration et de la figuration à la signification. Dans l’art du XVIe siècle, la peinture, la gravure ou le dessin sont toujours assujettis à une exigence didactique et, dans les cas qui nous occupent, l’illusionnisme des images est mis au service d’une réflexion sur la capacité des animaux à penser, voire à raisonner.

Les animaux et la raison

11« Quicquid delirant Reges » (Peacham, Minerva Britanna, illustration 4) montre un renard et deux personnages en costume oriental. Le motto est une citation tronquée d’une épître d’Horace (« Quicquid delirant Reges, plectuntur Achivi », « lorsque les rois deviennent fous, les Grecs en paient le tribu »). Les derniers vers de la glose présentent une diatribe contre ceux qui sont prompts à utiliser les faibles, les humbles et les pauvres à leur profit, thème sur lequel Peacham revient de façon discrète et néanmoins assez récurrente dans son livre d’emblèmes. Mais avant la critique politique sourd une réflexion plus fine sur l’intelligence des animaux. L’image seule serait difficilement compréhensible sans le recours au chapitre des Moralia de Plutarque précédemment mentionné. La première strophe de la glose suit assez fidèlement le texte de Plutarque, que Peacham a lu dans la version grecque d’origine ou dans la traduction anglaise qu’en donna Philemon Holland en 1603 :

  • 8 Plutarque, Moralia, trans. by Philemon Holland [1603], Printed by S.G. for J. Kirton, Londres, 1657 (...)

But true it is that the Thracians even at this day when they purpose to pass over a river frozen all over with ice, take a fox with them for their guide, to sound the way before them, whether the ice be strong enough, and able to beare; the fox goes gently before, and laieth his eare close to the ice []8.

  • 9 « Par nature, les animaux sont doués de sensations, mais, chez les uns, la sensation n'engendre pas (...)

12Pour Peacham, après Plutarque, le renard est doué d’une sorte de sens caché d’un savoir empirique ou d’une faculté délibérative, variante de la phronesis qu’Aristote avait presque déjà concédée aux animaux9, grâce à laquelle il peut sonder l’épaisseur de la glace et décider s’il est prudent ou non de s’aventurer sur la rivière gelée. Il sait car il écoute. Plutarque pousse l’argument plus avant pour déclarer que le renard est capable de conduire un raisonnement, au même titre qu’un logicien:

  • 10 Plutarque, Ibid. 962.

Surely we cannot say that this is onely an exquisite quicknesse of the sense of hearing, without any discourse of reason […] but a kinde of syllogisme or reasoning, by consequence drawen from that naturall sence in this sort10.

13On sait l’influence de Plutarque sur Montaigne qui, dans le célèbre bestiaire de l’Apologie de Raimond Sebond, reprend l’apologue du texte classique, suivant peut-être la traduction latine d’Érasme parue en 1530, pour souligner lui aussi la capacité rationnelle dont fait preuve le renard:

  • 11 Montaigne Michel de, « Apologie de Raimond Sebond », Les Essais [1580], Flammarion, Paris, 1979, li (...)

N’aurions-nous pas raison de juger qu’il luy passe par la teste ce mesme discours qu’il feroit en la nostre, et que c’est une ratiocination et consequence tirée du sens naturel [...] ? Car d’attribuer cela seulement au sens de l’ouye, sans discours et sans consequence, c’est une chimere, et ne peut entrer en nostre imagination11.

14Pour Montaigne, l’exercice de la raison est articulé au discours, opinion évidemment radicale qui conduit à prêter aux animaux la faculté de parler et à les rapprocher ainsi des humains :

  • 12 Idem, p. 133-4.

Selon mon opinion, qui contrerollera de près ce que nous voyons ordinairement des animaux qui vivent parmy nous, il y a dequoy y trouver des effects autant admirables que ceux qu’on va recueillant ès pays et siecles estrangiers12.

15Montaigne ne saurait gommer toutes les différences entre l’homme et l’animal, il souligne plutôt leur appartenance commune à l’ordre du vivant. De nombreux emblémistes déclinent la topique de la rationalité des animaux, souvent pour fustiger en creux les déficiences de la raison humaine. Gilles Corrozet dans “Deffiance non moins utile que prudence” (Hecatomgraphie, 1540) rapporte la fable du renard prudent qui, après avoir observé comment certains animaux s’étaient fait berner par des propos flatteurs, déjoue les plans du lion qui cherche à en faire sa proie :

compere dieu me gard 
D’aller vers vous, je suys assez scavant 
Pour esplucher ce qu’on dict bien souvent, 
Que qui void mal à son proche advenir 
Comme pour soy luy en doibt souvenir. 
J’ay veu entrer une trompe de bestes 
N’a pas long temps au lieu la ou vous estes 
Je voy les pas comme elles sont entrées, 
Mais non les pas comment sont retournées, 
Dont je conclus que je n’y doibs aller. 

16Comme Peacham ou Montaigne, Corrozet suggère que la raison animale est d’ordre empirique puisqu’elle procède d’un contact sensoriel avec la nature, plus intime que celui que les humains peuvent tisser avec elle. C’est pourquoi elle est source d’une prudence dont les humains, et les gouvernants en premier lieu, doivent apprendre à tirer profit.

  • 13 Voir Zucker Arnaud, Physiologos : le bestiaire des bestiaires, éd. Jérôme Million, Grenoble, 2004, (...)
  • 14 Machiavel Nicolas, Le Prince [1513], Flammarion, Paris, 1980, p. 141.

17Les emblèmes politiques, au même titre que les traités sur l’art du gouvernement, se font l’écho de tels arguments en puisant abondamment aux écrits d’Aristote, de Pline ou de Plutarque pour instruire sur la manière de conduire un état. Illustrant les préceptes exposés par Jacques 1er dans le Basilikon Doron (1599), le livre d’emblèmes de Peacham recommande que le monarque soit aussi avisé que le serpent lorsqu’il choisira ses conseillers (« Initium sapientiae ») et que sa vision et sa force thaumaturgique soient à l’image de celles du dragon d’Asclépios (« Rex medicus patriae »). Serpent et dragon sont deux traductions d’un même mot hébreu utilisées dans la Septante13, et la prudence du serpent, tout autant que la perspicacité de son regard, sont attestées depuis l’Antiquité jusqu’au Nouveau Testament où le Christ invite ses disciples à être « réfléchis comme les serpents et candides comme les colombes » (Matthieu, 10,16). Le concept du prince thaumaturge tire sa raison d’être chez Peacham de la conviction que les hommes sont mauvais et que le corps social dans lequel ils vivent peut être contaminé par le vice et la corruption. Une communauté de pensée paraît relier Peacham à Machiavel pour qui le prince « est obligé de savoir bien user de la bête, il en doit choisir le renard et le lion ; car le lion ne se défend pas des rêts, le renard ne se défend pas des loups14. » Cet aphorisme célèbre a donné lieu à de multiples commentaires contribuant à présenter Machiavel comme un penseur cynique faisant fi de toute considération morale dans l’art politique. Or l’argument procède simplement du constat que l’homme est un loup pour l’homme, selon l’adage de Plaute, en conséquence de quoi le prince n’a d’autre choix que d’appliquer la force de la loi symbolisée par le lion, et au besoin mettre en œuvre la ruse du renard pour assurer la concorde civile. Il peut paraître quelque peu surprenant de rapprocher Peacham, emblémiste royaliste et propagateur du mythe Tudor, pour qui le régime politique le mieux à même d’assurer la stabilité de l’état repose sur l’association entre la monarchie et l’Église établie, de Machiavel qui défend une vision nettement plus sécularisée du politique. L’un et l’autre conçoivent pourtant le comportement des animaux comme étalon des pratiques du souverain.

  • 15 Elyot Sir Thomas, The Boke named the Governour, The Seconde Boke, Chap. XIII, fol. 165, éd. Berthel (...)

18Bien qu’il ne partage pas la philosophie politique de Machiavel, Elyot recourt aussi à l’exemple des animaux pour définir la conduite des humains. La plus grande vertu du prince est selon lui la miséricorde dont il trouve un exemple particulièrement frappant dans l’histoire d’Androclès rapportée par Aulus Gellus dans ses Nuits Attiques et selon laquelle l’esclave fut épargné par un lion qu’il avait jadis soigné. Et Elyot, bien avant Montaigne, en tire la conclusion que les animaux enseignent aux humains des vertus qui devraient pourtant leur être naturelles : « O the moste miserable astate at this present tyme of mankynde : that, for the thinge whiche is moste propre unto them, the example therof muste be founden amonge the sauage and fierce bestes15. » La galerie des animaux qui permet d’évoquer l’art du gouvernement est riche chez les théoriciens comme chez les emblémistes, mais c’est principalement l’abeille qui allégorise de façon récurrente l’organisation naturelle du commonwealth sous la houlette du son prince.

  • 16 Le topos de la ruche comme symbole de l’ordre naturel du royaume est courant dans la littérature du (...)

19Johannes Sambucus, humaniste hongrois qui vécut longtemps à la cour des Habsbourg où il servit Maximilien II et Rodolphe II, développe dans « Mixtus status » (Emblemata, 1564) l’allégorie de la ruche comme image de l’état structuré de façon organique où la place de chaque individu est assignée par l’ordre de la nature16:

  • 17 Suivons les habitudes des abeilles qui s’ébattent en été et butinent les fleurs: pouvoirs partagés (...)

FLORILEGAE quod apes faciunt aestate vagantes, 
Illarum mixtas more sequamur opes. 
Hae Regesque Ducesque colunt, his semina mentis 
Aeternae, & parent legibus, arma cient. 
Observant proceres, & queis meliora videntur, 
Unanimes cunctis ritè praeesse volunt17.
(1-6)

20La glose de Sambucus est ambiguë car l’incise « his semina mentis/Aeternae » aux vers 3 et 4 joue sur le genre grammatical de « his » (démonstratif datif masculin ou féminin pluriel). Si « his » est pris comme un masculin, la raison éternelle (semina mentis aeternae) est celle des princes et des chefs auxquels l’emblémiste rend grâces, mais si « his » est féminin, c’est alors aux abeilles mentionnées au vers 1 que la raison s’applique. L’épigramme de cet emblème paraît tout droit tiré du célèbre passage de la quatrième géorgique de Virgile relative aux mœurs et aux travaux des abeilles :

  • 18 Suivant ces signes et ces exemples, on a dit que les abeilles possèdent cette part de divine intell (...)

His quidam signis atque haec exempla sequuti,
Esse apibus partem divinae mentis et haustus
Aethereos dixere18.
(220)

  • 19 Voir Jean-Louis Labarrière, « Raison humaine et intelligence animale dans la philosophie grecque, L (...)
  • 20 Voir Aristote, De l’âme, livre II, ch. 2, 414a.

21L’écho virgilien n’aide guère à définir cette intelligence divine ou raison éternelle, sur laquelle ni le poète latin ni Sambucus ne proposent d’éclaircissement.  Il ne s’agit sans doute pas de la raison raisonnante, faculté de proposer et de développer une argumentation par le biais du discours. Serait-ce la conjonction de l’âme, de l’esprit et de l’intelligence, ou cette part de divinité que, selon l’apologétique chrétienne, Dieu a plantée en chaque être vivant ? À moins qu’elle ne relève de la capacité au jugement, à la délibération et à la prévision à laquelle conduit l’observation empirique de la nature, désencombrée des déficiences du logos. Quoi qu’il en soit, affirmer que les abeilles possèdent l’intelligence ou la raison, c’est leur prêter une âme et s’inscrire dans une certaine tradition philosophique grecque pour laquelle l’âme des animaux ne pose pas question19. Aristote affirme par exemple que les animaux possèdent au moins l’un des trois principes qui constituent l’âme, la nutrition, la sensibilité et la pensée, et que certains animaux les ont tous20. Cela étant, conférer l’intelligence rationnelle à une abeille signifie aussi contester le dogme de la supériorité de l’homme sur l’animal, telle qu’il est pensé et enseigné par le christianisme. Le récit biblique rapporte en effet que Dieu créa d’abord les animaux marins, puis les oiseaux, puis les animaux de la terre, et enfin seulement l’homme, créature unique à qui Dieu a donné le pouvoir de dominer tous les autres êtres vivants (Genèse, 1, 21-26). Montaigne ou les emblémistes repensent le dogme chrétien à l’aune de l’aristotélisme et de la pensée païenne antique.

  • 21 Montaigne, « De l’inequalité qui est entre nous », op. cit, livre I, chap. XLII, p. 311.

22L’idée que les animaux ont une âme est courante à l’époque moderne et les prétentions humaines à dominer les autres êtres de la création s’en trouvent donc mises en cause. Montaigne écrit ainsi qu’il « y a plus de distance de tel à tel homme qu’il n’y a de tel homme à telle beste21 ». Héritier de Plutarque, Montaigne n’est pas le seul au XVIe siècle à dénoncer le caractère illégitime de la singularité de l’homme. Giovanni Battista Gelli, dans une fiction intitulée La Circe (1549) où Ulysse converse avec onze citoyens grecs que la magicienne a métamorphosés en bêtes, prête aux animaux des vertus naturelles que l’homme ne peut qu’apprendre à cultiver en s’inspirant d’eux. Ainsi le veau lui apprendra la justice, le chien la prudence et le cheval la tempérance. Plusieurs des dialogues entre Ulysse et les animaux font retour à la question de la raison, qui suscite l’intérêt de Gelli autant que celui de Montaigne ou des emblémistes de la fin du XVIe siècle. À l’idée avancée par Ulysse selon laquelle le discours de la raison rend les hommes sages, le serpent répond que ceux-ci sont fréquemment gouvernés par l’insatiabilité de leurs désirs, la perfection que leur accorde Ulysse n’est donc qu’une illusion. Dans le premier dialogue, l’huitre postule avec plus d’habileté encore que la raison, qu’elle appelle intelligence, loin d’être une faculté humaine, est disséminée dans l’ordre de la nature et que les animaux entretiennent avec celui-ci un compagnonnage intime qui les rend supérieurs aux humains :

  • 22 Gelli, Giovanni Battista, Circes [1549], trans. by Henry Iden, Cum privilegio ad imprimendum solum, (...)

Thinkest not thou that nature also doeth the self same [s’occuper de ceux qu’elle aime], or that intelligence that guideth her? and with much more reason then you because she can not erre, as oftenne tunes I have hard saye of those Philosophers of Athenes, whiles I, to sell the fishe that I toke, stode by the galleries, where they a great parte of the daye, disputed and reasoned together22.

  • 23 Idem, Bii.

23En déplaçant le concept de raison de l’humain à la nature, l’huitre dénie aux homme la suprématie qu’ils pensent détenir sur les animaux. Elle se fait de surcroît excellente dialecticienne et Ulysse ne peut que concéder le brio de sa démonstration : « What, me thinketh thou arte the best Logitian of Athenes23 ». Le texte de Gelli, fortement inspiré des Moralia de Plutarque dont il épouse jusqu’à la forme dialoguée, connut une fortune immédiate en Europe, par le biais de plusieurs traductions. Denis Sauvage en fit paraître une en français dès 1550, suivie d’une deuxième édition l’année suivante et la traduction anglaise d’Henry parut en 1558. Une étude de la réception du texte de Gelli serait à mener car il est probable que les emblémistes, tout comme les fabulistes, aient puisé chez lui bon nombre de leurs apologues. Quoi qu’il en soit, lorsque Peacham, Corrozet ou d’autres font philosopher les animaux ils font écho au modèle de Gelli dans des textes miroirs des nombreux débats qui agitent la pensée des humanistes.

  • 24 Browne, Sir Thomas, Religio Medici [1643], dans Sir Thomas Browne, The Major Works, Harmondsworth, (...)
  • 25 II, 5, 741b.
  • 26 Browne, op.cit., p. 77.

24Près d’un siècle plus tard, Sir Thomas Browne soutient lui aussi que la raison humaine doit prendre modèle sur la sagesse des animaux : « What reason may not goe to Schoole to the wisedome of Bees, Aunts and Spiders ? what wise hand teacheth them to do what reason cannot teach us ?24 ». L’hypotexte aristotélicien est clair dans ce chapitre où Browne cite en exergue un axiome de la Génération des animaux, « Natura nihil agit frustra25 », dont il propose une lecture christianisée en assurant que la nature est l’obligée du créateur. Le principe selon lequel rien dans la nature ne se fait en vain est au cœur de la pensée naturelle d’Aristote tout comme il fonde l’essence même de la philosophie pour Browne : « [it] is the onely indisputable axiome in Philosophy26 ». Browne s’est peut-être souvenu de la célèbre allégorie de l’abeille utilisée par Bacon pour définir la philosophie comme entreprise mêlant l’expérience et le rationnel (Novum Organum, I, 95). L’image de l’abeille philosophe s’ajoute à celle de l’abeille industrieuse, raisonnable et parfaite citoyenne, alors que de Virgile à Browne, passant par Elyot, Shakespeare et les emblémistes, s’élabore toute une construction symbolique autour de la ruche comme image du fonctionnement naturel du corps social.

  • 27 Voir l’excellent article de Sylvia Giocanti auquel je suis redevable : « Montaigne et l’animalité » (...)

25L’emblème étant par essence un genre didactique, les animaux y sont vus moins pour eux-mêmes que pour les enseignements et les constructions morales dont ils sont les vecteurs et leurs comportements sont souvent rapportés aux fables, aux récits mythologiques ou bibliques, ou aux gloses qu’en ont données les mythographes. Les emblémistes et les auteurs dont je viens de faire état cèdent sans doute à une forme d’anthropomorphisme dans la manière qu’ils ont de rendre compte du comportement des animaux27, ils récusent cependant l’arrogance de l’homme à se penser la mesure de toute chose. Gelli, Montaigne, Peacham ou encore Sambucus questionnent la place de l’homme dans l’ordre de la nature et, parce qu’ils contestent le paradigme de sa supériorité sur l’animal, leurs propos s’inscrivent dans ce courant de scepticisme qui irrigue le tournant du XVIIe siècle. Par le détour de l’animal l’homme peut faire retour sur lui-même dans un exercice introspectif proche d’une pratique méditative auquel les emblèmes invitent tout lecteur.

Regarder, méditer

  • 28 Heidegger, Martin, Les concepts fondamentaux de la métaphysique : monde-finitude-solitude, trad. pa (...)
  • 29 Claudel Paul, L’Œil écoute, dans Œuvres en prose, Pléiade, Paris, 1963, cité par Fumaroli Marc, « M (...)

26Dans L’Animal que donc je suis (Galilée, Paris, 2006), Derrida insiste beaucoup sur les jeux de regards entre l’homme et l’animal et soutient l’hypothèse selon laquelle le regard que l’animal porte sur l’homme contraint ce dernier à se penser comme être nu et à réévaluer les catégories qui fondent sa nature et son identité. Derrida prend en défaut la tradition philosophique qui, de Descartes à Heiddeger, considère l’animal comme « pauvre en monde28 » et l’exclut de sa réflexion sur l’humain en établissant une différence radicale entre eux. La construction des images emblématiques présente souvent les animaux de manière à ce que leur regard confronte directement celui du lecteur et, sans chercher à appliquer de façon mécanique et anachronique les analyses de Derrida à des textes produits quatre siècles plus tôt, on peut cependant s’interroger sur la nature et l’effet du dispositif mis en place. « In Salo Sine Sale » (Minerva Britanna, Peacham, illustration 5) montre un dauphin dont les yeux écarquillés ne peuvent que rencontrer le regard de l’observateur. Le dessin contribue à la construction d’un jeu de perspective entre l’animal représenté et le lecteur du livre, le regardé (le dauphin) regardant celui qui le regarde, permettant ainsi une inversion des rôles et surtout des catégories. L’œil de l’observateur voit mais, pour paraphraser Claudel, il écoute aussi, car s’établit comme un dialogue intime entre le dessin et celui qui l’observe. Claudel écrit, dans L’Œil écoute, que « les tableaux de maître sont comme emplis par la sonorité d’une phrase non prononcée29. » Certes la gravure de Peacham n’a rien d’un tableau de maître, elle est même plutôt naïve, voire gauche, mais comme toute image emblématique, elle relève d’une forme d’éloquence muette que la glose aide à rendre intelligible. Ce que dit cet emblème, c’est que l’homme demeure foncièrement étranger à la sympathie qui unit les animaux à la nature. Peut-être l’homme est-il simplement capable de singer la nature, comme dans cet emblème de Paradin « Aemula naturae » (illustration 6), dont l’image effrayante affecte l’observateur par son réalisme cruel. Singer la nature c’est en fait l’agresser et la détruire.

27Si les images de Peacham et de Paradin sont si frappantes et si parlantes, et le cas vaut pour de nombreuses images emblématiques, c’est qu’elles se structurent autour du principe de la dispositio qui, dans l’art oratoire antique, était recommandé pour assurer l’efficacité du discours. Avec l’emblème, on est encore dans une conception d’une peinture/gravure investie par la parole. Inscrites dans la théorie de l’ut pictura poesis, les images des emblèmes ont pour fonction d’émouvoir et de convaincre, et donc de produire les mêmes effets qu’un morceau de rhétorique. De la complexité des gravures de Woeriot à la nudité de celles de Peacham, on retrouve, transposée dans le domaine du visuel, l’opposition entre une éloquence, ample, riche, abondante, à la manière de Cicéron, et un style plus nettement atticiste, lisse, bref et allant sans détour à l’essentiel, tel qu’Érasme, après Sénèque, le recommandait dans ses adages.

  • 30 Fumaroli Marc, « Une peinture de méditation : l’Atalante et Hippomène du Guide », L’École du Silenc (...)

28De surcroît par leur potentiel de réflexivité, elles obligent l’observateur à se questionner et à sortir des cadres de pensée conventionnels. Images agissantes, elles aident à construisent une méditation, certes profane, mais qui au même titre que la méditation religieuse, se définit comme une forme « d’intériorisation de l’éloquence30 », selon la belle formule de Marc Fumaroli, dont la finalité est de faire voir pour faire penser autrement. Et c’est à une méditation sur le décentrement de l’homme que nous convie la présence des animaux dans tous ces emblèmes.

  • 31 Raber Karen, Animal Bodies, Renaissance Culture, University of Pennsylvania Press, Philadelphia, 20 (...)
  • 32 Montaigne Michel de, « Apologie de Raimond Sebond », op. cit., p. 25.

29Les emblèmes peuvent nous apparaître aujourd’hui comme un genre mineur dont la production s’est plus ou moins tarie à mesure que se défaisait le dogme des analogies. Cela étant, mieux que les grandes œuvres qui transcendent toujours les codes et les lois collectives qui en ont permis l’émergence, ils reflètent avec acuité la conscience particulière de la période qui les a produits. Avec Whitney, Peacham ou Sambucus, nous n’en sommes pas encore à Descartes et sa conception de l’animal machine, théorisée dans le Discours de la méthode. Pour Descartes, l’homme est doué du Logos, c’est-à-dire de la raison et du langage, ce qui le différencie radicalement de l’animal et la catégorie de l’humain ne peut se définir selon lui que contre celle de l’animal. À l’époque moderne il en va différemment. Même si la Bible a légitimé la supériorité de l’humain, il est impossible de penser l’homme hors de son rapport avec l’animal. Il n’est que de songer par exemple, aux planches d’anatomie du De Corporis Fabrica, de Vésale, qui présente les parties du corps humain en regard de celles des animaux pour souligner la parenté entre elles. Comme l’écrit Karen Raber à qui j’ai emprunté cet exemple, « there is no such thing as human identity, history, culture, without the prior cooperation, collaboration, habitation, ideological appropriation, of animals, without animals as the ‘always already’ of both materiality and culture itself31 ». Malgré leurs différences, les hommes et les animaux sont bien à l’époque moderne « soubs le visage d’une mesme nature 32».

Haut de page

Notes

1 Notons que toutes les illustrations ne sont pas de la même qualité et qu’elles ne sont pas toutes de première main. Celles que Peacham réalisa lui-même pour son Minerva Britanna (1612) sont parfois quelque peu malhabiles. À l’inverse, lorsqu’elles sont produites par des graveurs professionnels, les illustrations sont toujours d’une extrême précision, surtout lorsqu’elles proviennent de bois qui avaient déjà servi pour des livres d’emblèmes parus antérieurement. A Collection of Emblemes Ancient and Moderne de George Wither (1635) reprend par exemple les très belles images du Nucleus Emblematum de Gabriel Rollenhagen pour en proposer des gloses nouvelles.

2 Lipse Juste, Of Constancy, trad. John Stradling, printed by Richard Johnes, Londres, 1595, p. 4. Peacham connaissait le texte de Juste Lipse qu’il cite à plusieurs reprises dans ses emblèmes comme dans ses écrits théoriques, et son christianisme est empreint de philosophie néo-stoïcienne.

3 Hall Joseph, Heaven Upon Earth [1606], in The Works of Joseph D.D. A New Edition Revised and Corrected, Oxford, D.A. Talboys, 1837-39, p. 13.

4 Plutarque, Moralia « Les animaux de terre ont-ils plus d’adresse que ceux de mer ? » 971f, tome 4, Lefèvre, Paris, 1844, p. 512.

5 Valeriano, Pierius, Hieroglyphica, trad. Jean de Montlyart, Paul Frelon, Lyon, 1615, p. 362

6 Boucheron Patrick, Conjurer la peur. Sienne 1338, Seuil, Paris, 2013, p. 21.

7 Spica Anne-Elisabeth, Symbolique humaniste et Emblématique, Honoré Champion, Paris, 2000, p. 273.

8 Plutarque, Moralia, trans. by Philemon Holland [1603], Printed by S.G. for J. Kirton, Londres, 1657, p. 962.

9 « Par nature, les animaux sont doués de sensations, mais, chez les uns, la sensation n'engendre pas la mémoire, tandis qu'elle l'engendre chez les autres. Et c'est pourquoi ces derniers sont à la fois plus intelligents et plus aptes à apprendre que ceux qui sont incapables de se souvenir ; sont seulement intelligents, sans posséder la faculté d'apprendre, les êtres incapables d'entendre les sons, tels que l'abeille et tout autre genre d'animaux pouvant se trouver dans le même cas ; au contraire, la faculté d'apprendre appartient à l'être qui, en plus de la mémoire, est pourvu du sens de l'ouïe.

Quoi qu'il en soit, les animaux autres que l'homme vivent réduits aux images et aux souvenirs ; ils ne participent que faiblement à la connaissance empirique, tandis que le genre humain s'élève jusqu'à l'art et aux raisonnements ». Aristote, Métaphysique, livre I, A, 980, b21, p. 43, éd. Les Echos du Maquis (ePub, PDF, 2014), (accessible en ligne sur : https://philosophie.cegeptr.qc.ca/wpcontent/documents/Métaphysique.pdf, consulté le 28 novembre 2018)

10 Plutarque, Ibid. 962.

11 Montaigne Michel de, « Apologie de Raimond Sebond », Les Essais [1580], Flammarion, Paris, 1979, livre II, chap. XII, p. 126-7.

12 Idem, p. 133-4.

13 Voir Zucker Arnaud, Physiologos : le bestiaire des bestiaires, éd. Jérôme Million, Grenoble, 2004, p. 105.

14 Machiavel Nicolas, Le Prince [1513], Flammarion, Paris, 1980, p. 141.

15 Elyot Sir Thomas, The Boke named the Governour, The Seconde Boke, Chap. XIII, fol. 165, éd. Bertheleti, Londres, 1531, STC-7635-1751_20.

16 Le topos de la ruche comme symbole de l’ordre naturel du royaume est courant dans la littérature du XVIe siècle. On le retrouve par exemple dès le second chapitre du premier livre du Governour de Thomas Elyot ainsi que dans la tirade que l’archevêque de Canterbury adresse à Henry V pour le convaincre d’envahir la France (Shakespeare, Henry V, 1,2, 183-220).

17 Suivons les habitudes des abeilles qui s’ébattent en été et butinent les fleurs: pouvoirs partagés selon leurs coutumes. Elles vénèrent les rois et les chefs, les graines de l’esprit éternel leur appartient, elles obéissent aux lois et à l’appel aux armes. Elles suivent leurs dirigeants et souhaitent que ceux qui ont les opinions les meilleures règnent en droit sur tous.

18 Suivant ces signes et ces exemples, on a dit que les abeilles possèdent cette part de divine intelligence et des étincelles du feu divin.

19 Voir Jean-Louis Labarrière, « Raison humaine et intelligence animale dans la philosophie grecque, Les animaux pensent-ils ? TERRAIN, N°34, mars 2000, 107-122.

20 Voir Aristote, De l’âme, livre II, ch. 2, 414a.

21 Montaigne, « De l’inequalité qui est entre nous », op. cit, livre I, chap. XLII, p. 311.

22 Gelli, Giovanni Battista, Circes [1549], trans. by Henry Iden, Cum privilegio ad imprimendum solum, 1558, Bi, Bii, STC 17709-1796_06.

23 Idem, Bii.

24 Browne, Sir Thomas, Religio Medici [1643], dans Sir Thomas Browne, The Major Works, Harmondsworth, Penguin Books, 1977, p. 77-8.

25 II, 5, 741b.

26 Browne, op.cit., p. 77.

27 Voir l’excellent article de Sylvia Giocanti auquel je suis redevable : « Montaigne et l’animalité » (accessible en ligne sur ecole-thema.ens-lyon.fr/IMG/pdf/Article_Giocanti-2.pdf, consulté le 18 novembre 2018).

28 Heidegger, Martin, Les concepts fondamentaux de la métaphysique : monde-finitude-solitude, trad. par D. Panis, Gallimard, Paris, 1992, p. 267.

29 Claudel Paul, L’Œil écoute, dans Œuvres en prose, Pléiade, Paris, 1963, cité par Fumaroli Marc, « Muta Eloquentia, la vision de la parole dans la peinture de Nicolas Poussin », L’École du Silence : le sentiment des images au XVIIe siècle, Flammarion, Paris, 1998, p. 189.

30 Fumaroli Marc, « Une peinture de méditation : l’Atalante et Hippomène du Guide », L’École du Silence : le sentiment des images au XVIIe siècle, Flammarion, Paris, 1998, p. 235.

31 Raber Karen, Animal Bodies, Renaissance Culture, University of Pennsylvania Press, Philadelphia, 2013, p. 28.

32 Montaigne Michel de, « Apologie de Raimond Sebond », op. cit., p. 25.

Haut de page

Pour citer cet article

Référence électronique

Jean-Jacques Chardin, « Des animaux et des hommes dans l’emblématique de l’époque moderne »Actes des congrès de la Société française Shakespeare [En ligne], 38 | 2020, mis en ligne le 26 juin 2020, consulté le 07 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/shakespeare/5538 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/shakespeare.5538

Haut de page

Auteur

Jean-Jacques Chardin

Articles du même auteur

Haut de page

Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Search OpenEdition Search

You will be redirected to OpenEdition Search