Une société plus égalitaire est-elle plus pacifique ? Un regard psychosocial sur la « women and peace hypothesis »
Plan
Haut de pageTexte intégral
- 1 Trad. par L. Gauthier, Paris, Blackjack éditions, 1938, p. 59.
En aidant la fille d’un homme éduqué à rentrer à Cambridge, ne l’inciterons-nous pas plus à penser à la guerre qu’à l’éducation ?
Virginia Woolf, Trois guinées1
1Comment empêcher la guerre ? Pour répondre à cette question, pouvons-nous partir du postulat que les femmes soutiennent moins la violence que les hommes ? Pouvons-nous, par conséquent, raisonnablement espérer qu’en facilitant l’accès des femmes aux positions de pouvoir, la société dans son ensemble devienne moins belliqueuse ? Autrement dit, œuvrer pour l’égalité hommes-femmes revient-il aussi à œuvrer pour la paix ? Ou devons-nous craindre au contraire que la solution précitée ne se révèle contre-productive ? En effet, les positions de pouvoir auxquelles l’accès des femmes serait facilité – et, par extension, l’éducation et les professions qui y mènent – n’ont-elles pas pour caractéristique de développer des prédispositions (agressivité, esprit compétitif, …) qui encouragent les individus qui les occupent à adopter une attitude favorable à la guerre ? Dans sa fiction épistolaire Trois guinées, Virginia Woolf répond positivement à ces différentes questions et aboutit à la conclusion que, pour œuvrer de façon efficace pour la paix, il fallait plutôt rémunérer, et par là-même valoriser, les professions occupées en majorité par les femmes et créer de nouvelles professions qui véhiculent des valeurs incompatibles avec le recours à la violence.
- 2 A. H. Eagly, Sex differences in social behaviour : a social-role interpretation, Hillsdale, nj, Law (...)
2Dans ce texte, nous proposons de jeter un regard psychosocial sur le lien présumé entre les femmes et la paix. En psychologie sociale, ce lien est communément désigné sous le nom de « women and peace hypothesis ». Nous commencerons par parcourir les études empiriques qui ont testé cette hypothèse et les principales explications fournies pour rendre compte de l’écart observé d’habitude entre les attitudes des femmes et des hommes vis-à-vis de la guerre. Une explication retiendra notre attention en particulier, à savoir la théorie des rôles sociaux2. En l’exposant, nous privilégierons une démarche dialectique. Nous envisagerons d’abord la possibilité que, si les hommes et les femmes disposaient d’un accès égal aux positions de pouvoir, la société dans son ensemble serait plus pacifique. En mobilisant la notion de norme de genre et ses répercussions pour les individus et la société, nous envisagerons ensuite la possibilité inverse : si les hommes et les femmes disposaient d’un accès égal aux positions de pouvoir, la société dans son ensemble ne serait pas plus pacifique, voire le serait moins. Enfin, avant de conclure, nous tenterons de concilier ces possibilités contradictoires dans une synthèse.
La « women and peace hypothesis »
- 3 Attention cependant à ne pas considérer les attitudes vis-à-vis de la paix et de la guerre comme le (...)
- 4 M. Gruber, Women in American politics : An assessment and sourcebook, Oshkosh, wi, Academia Press, (...)
- 5 Voir, e.g., T. W. Smith, « The Polls : Gender and attitudes toward violence », The Public Opinion Q (...)
- 6 I. Maoz, « Women and Peace Hypothesis », in D. J. Christie (éd.), The Encyclopedia of Peace Psychol (...)
3Une des premières différences observée entre les hommes et les femmes sur des sujets sociaux ou politiques concerne la tendance des femmes à se montrer plus et moins favorables, respectivement, à la paix et à la guerre3 que les hommes4. La récurrence de cette observation dans un grand nombre d’études5 a amené à postuler l’existence d’une relation particulière entre les femmes et la paix : la « women and peace hypothesis »6.
- 7 M. Nincic et D. J. Nincic, « Race, gender, and war », Journal of Peace Research, 39/5, 2002, p. 547 (...)
- 8 M. Caprioli, « Gendered conflict », Journal of Peace Research, 37/1, 2000, p. 51-68.
4Cette hypothèse a été validée à deux niveaux au moins. Par exemple, Nincic et Nincic ont analysé les résultats d’enquêtes d’opinion menées lors de cinq interventions militaires américaines – de la guerre de Corée de 1952 à l’opération Tempête du désert de 1991 – et montré que les Américaines avaient été systématiquement moins favorables à chacune de ces interventions que les Américains7. Caprioli, quant à elle, a mis en évidence que plus les Etats analysés étaient égalitaires – l’égalité étant mesurée par le pourcentage de femmes au parlement, le nombre d’années écoulées depuis l’obtention du droit de votes par les femmes et le pourcentage de femmes actives –, moins ils se comportaient de façon belliqueuse sur la scène internationale8.
- 9 R. C. Eichenberg, « Gender differences in public attitudes toward the use of force by the United St (...)
- 10 M. Tessler, J. Nachtwey et A. Grant, « Further Tests of the women and peace hypothesis : Evidence f (...)
- 11 I. Hakvoort et L. Oppenheimer, « Understanding peace and war : A review of developmental psychology (...)
- 12 I. Hakvoort et S. Hägglund, « Concepts of peace and war as described by Dutch and Swedish girls and (...)
- 13 P. J. Conover et V. Sapiro, « Gender, feminist consciousness, and war », American Journal of Politi (...)
- 14 C. Gilligan, Une si grande différence, Paris, Flammarion, 1982.
5Bien que le gender gap dans les attitudes envers la paix et la guerre soit faible et qu’il varie selon les conflits considérés9 ‒ il disparaît même dans certains cas spécifiques comme le conflit israélo-palestinien10 ‒, ce phénomène a été observé dès le jeune âge11 et dans différents contextes culturels12 ; il peut donc être considéré comme relativement robuste. Plusieurs explications, qui mobilisent tour à tour le sexe, le genre, la maternité ou le féminisme, ont été proposées pour rendre compte de ce gender gap. Selon la perspective différencialiste13, le gender gap trouve ses origines dans les caractéristiques biologiques innées (par exemple, le taux de testostérone qui détermine l’agressivité) et/ou dans la socialisation différenciée selon le genre. En matière de socialisation, la théorie s’inspire entre autres des travaux de Gilligan : les femmes construisent, au cours de leur développement moral, une « éthique du care » qui met l’accent sur l’importance des liens interpersonnels et de la non-violence – des valeurs qui favorisent le pacifisme – tandis que les hommes valorisent l’autonomie et l’individualisme14. Que le facteur soit d’ordre biologique ou social, le gender gap s’expliquerait selon cette perspective par des différences précoces dans la petite enfance (ou même avant) et non par les expériences de vie ultérieures.
- 15 S. Ruddick, Maternal Thinking : Toward a Politics of Peace, Boston, Beacon Press, 1989, cité par P. (...)
- 16 M. E. Bendyna, T. Finucane, L. Kirby, J. P. O’Donnell et C. Wilcox, « Gender differences in public (...)
6Selon la thèse « maternaliste », dans sa forme la plus simple, c’est l’expérience unique des femmes en tant que mères qui les rend plus empathiques et concernées par le bien-être d’autrui. Une variante de cette théorie soutient que cette manière de penser particulière, qui dérive du statut maternel, ne se limite pas aux femmes15. Mais parce que les femmes assument le rôle maternel plus souvent que les hommes, cette « pensée maternelle » s’exprimerait au niveau politique par une opposition plus marquée des femmes à l’usage de la violence. Les tentatives de validation empirique de cette hypothèse ont échoué jusqu’à présent16.
- 17 P. J. Conover, « Feminists and the gender gap », The Journal of Politics, 50, 1988, p. 4.
- 18 M. E. Bendyna et al., « Gender differences in public attitudes toward the Gulf War : A test of comp (...)
7Une troisième perspective souligne l’importance de la conscience féministe : les féministes – hommes et femmes – auraient des attitudes plus pacifistes que les non-féministes, notamment parce qu’ils ou elles perçoivent la guerre comme une manifestation du sexisme – latent ou explicite – des sociétés patriarcales17. Puisque les femmes ont davantage tendance à adhérer au féminisme que les hommes, l’existence du gender gap serait liée à cette disparité. Des études ont révélé cependant que si les féministes des deux sexes sont en effet plus pacifistes que les non-féministes, la différence de genre dans les questions relatives à la guerre et la paix subsiste lorsque l’on compare les hommes et les femmes d’un même niveau de féminisme18.
- 19 J. M. Silverman et D. S. Kumka, « Gender differences in attitudes toward nuclear war and disarmamen (...)
- 20 M. Nincic et D. J. Nincic, « Race, gender, and war », op. cit.
- 21 M. H. Bendyna et al., « Gender differences in public attitudes toward the Gulf War : A test of comp (...)
- 22 M. Nincic et D. J. Nincic, « Race, gender, and war », op. cit., p. 564, notre traduction.
- 23 Les explications qualifiées de « féministes-radicales » présentées ci-avant ne sont pas sans évoque (...)
8D’après les explications présentées ci-dessus, le gender gap serait lié à une différence fondamentale de valeurs ou de perceptions entre les hommes et les femmes – une position qualifiée de « féministe-radicale » par certains auteurs19 qui l’opposent à une position « féministe-socialiste ». Cette dernière position met l’accent sur l’importance des intérêts politiques et économiques sous-jacents. Certains pointent notamment les différences dans les coûts associés à la guerre20 : bien que l’avis des femmes ne soit pas pris en compte dans le processus décisionnel qui mène à l’entrée en (ou à la poursuite d’une) guerre, elles en sont pourtant les principales victimes, à la fois de façon directe (en raison des violences d’ordre sexuel) et indirecte (en raison de la diminution des ressources allouées aux programmes sociaux dont elles bénéficient le plus21). En ce sens, le gender gap serait motivé surtout par un calcul coûts/bénéfices qui varierait selon les groupes. Les premiers tests empiriques ont toutefois échoué à valider cette hypothèse. Et Nincic et Nincic22 de conclure que, même si elle n’est pas définitivement écartée, cette perspective « souffre d’une ambiguïté considérable quant à la manière dont les coûts de la guerre sont, dans les faits, distribués parmi les hommes et les femmes »23.
- 24 A. H. Eagly, Sex differences in social behaviour : a social-role interpretation, op. cit.
9Si les explications qui précèdent s’avèrent empiriquement peu concluantes, l’approche socio-structuraliste du genre telle que développée dans la théorie des rôles sociaux24 semble en revanche plus prometteuse. Avant de présenter des études qui valident cette approche, nous allons brièvement présenter ses principes.
La théorie des rôles sociaux
- 25 Ibid.
- 26 A un niveau comportemental, les femmes ont tendance à se montrer moins agressives et plus coopérati (...)
- 27 Notons, à titre d’exemple, que les femmes sont surreprésentées dans les métiers dits du « care », c (...)
10La théorie des rôles sociaux (trs)25 a pour ambition d’expliquer pourquoi des différences sexuées sont observées26 et quand ces différences sont susceptibles d’apparaître. Elle s’organise autour de quatre principes qui forment une chaîne causale (voir figure ci-contre). Premier principe, les femmes et les hommes sont répartis dans des rôles spécifiques inégaux. Dans les sociétés occidentales, cette répartition se traduit par une surreprésentation des femmes dans les rôles domestiques et dans certains rôles professionnels27. Qui plus est, ces rôles sont moins valorisés en termes de statut, de pouvoir et de ressources que les rôles professionnels occupés en majorité par les hommes.
- 28 Adapté de A. B. Diekman et M. C. Schneider, « A social role theory perspective on gender gaps in po (...)
Représentation schématique de la théorie des rôles sociaux28

- 29 A. H. Eagly et W. Wood, « The origins of sex differences in human behavior : Evolved dispositions v (...)
- 30 Pour une validation empirique de ce principe, voir par exemple A. H. Eagly et V. J. Steffen, « Gend (...)
11Deuxième principe, les individus s’adaptent à leurs rôles sociaux spécifiques en acquérant les compétences et en adoptant les comportements qui leur permettent d’être efficaces. Or, les rôles sociaux spécifiques occupés en majorité par les femmes développeraient plutôt des traits dits « communal » ou relationnels (la cordialité, la serviabilité, l’empathie, par exemple) parce qu’ils facilitent l’instauration et le maintien de relations interpersonnelles harmonieuses, tandis que les rôles sociaux spécifiques occupés en majorité par les hommes développeraient plutôt des traits dits « agentic » ou instrumentaux (comme l’autonomie, l’assertivité, l’agressivité) parce qu’ils facilitent l’instauration et le maintien de relations interpersonnelles profitables29. Ceci aurait entre autres conséquences que les femmes et les hommes intérioriseraient davantage des traits, respectivement, relationnels et instrumentaux30.
- 31 Dans la trs, le sexe renvoie au regroupement des individus dans des catégories biologiques, tandis (...)
- 32 F. Fincham et M. Hewstone, « Attribution theory and research : From basic to applied », in M. Hewst (...)
- 33 A. Casini, Genre et carrière professionnelle : enjeux identitaires et dilemmes normatifs dans le ph (...)
12Troisième principe, des rôles de genre31 émergent des rôles spécifiques. Pour asseoir ce principe, les adeptes de la trs se basent sur le biais de correspondance – la tendance à déduire, à partir d’un acte, une disposition ou un trait de personnalité correspondant32 : parce que les rôles spécifiques et le sexe des individus qui les occupent se chevauchent en bonne partie, les individus en viendraient à confondre les deux et à croire, par exemple, que si une personne se comporte chaleureusement, c’est parce qu’elle est une femme et non parce qu’elle est infirmière. Inversant en quelque sorte le sens de la causalité, les individus concluraient que les femmes et les hommes occupent des rôles spécifiques parce qu’elles.ils possèdent des traits, respectivement, relationnels et instrumentaux qui les y prédisposent. Tout comme les rôles spécifiques, les rôles de genre comportent une dimension descriptive (« les femmes sont souvent chaleureuses ») et une dimension normative (« les femmes doivent être chaleureuses »). Les attentes sociales que les rôles de genre contribuent ainsi à former sont indifféremment désignées sous le terme de stéréotypes de genre ou sous celui de normes de genre33. Cependant, à la différence des rôles spécifiques, qui n’ont d’effets présumés que sur les personnes qui les occupent, l’effet des rôles de genre est supposé diffus : il peut s’exercer sur toute personne indépendamment de son rôle spécifique et dans différents contextes. Pour les partisanes de la trs, les rôles de genre participent, séparément ou en interaction avec les rôles spécifiques, de la genèse des différences sexuées observées dans la littérature.
- 34 Voir aussi B. Diekman et M. C. Schneider, « A social role theory perspective on gender gaps in poli (...)
- 35 La confirmation comportementale désigne le mécanisme par lequel un individu est amené à adopter un (...)
- 36 L’orientation idéologique différente des femmes serait due à leur surreprésentation dans des rôles (...)
13Quatrième principe, les rôles de genre vont produire leurs effets sur les comportements et les attitudes des individus par l’intermédiaire de mécanismes psychologiques et sous certaines conditions (le même principe s’applique à l’effet des rôles spécifiques)34. Autrement dit, l’effet des rôles de genre est indirect et s’explique par le fait que les individus ont tendance à 1) confirmer les stéréotypes de genre35, 2) intérioriser les normes de genre et 3) adhérer à des idéologies orientées, soit vers la remise en question du statu quo (pour les femmes), soit vers son maintien (pour les hommes)36. Par ailleurs, l’effet des rôles de genre ne devrait s’observer que dans la mesure où les individus font de leur rôle de genre un élément constitutif de leur identité et à condition que les caractéristiques de la situation rendent l’identité de genre saillante.
- 37 C. C. Peterson, J. A. Lawrence et I. Dawes, « The relationship of gender, sex role and law-and-orde (...)
- 38 M. R. Hershey et J. L. Sullivan, « Sex-role attitudes, identities, and political ideology », Sex Ro (...)
- 39 Un.e relecteur.trice anonyme a judicieusement fait remarquer que ces résultats semblaient, à premiè (...)
- 40 N. Van der Linden, D. Ghilani et A. Casini, « Attitudes towards war through a gender lens », commun (...)
14Les études qui permettent de valider les principes de la trs dans le domaine des attitudes vis-à-vis de la guerre ne sont pas nombreuses mais elles fournissent des résultats encourageants. Dans l’étude de Peterson, Lawrence et Dawes, plus les participant.e.s avaient intériorisé la norme de genre masculine, plus ils.elles étaient favorables à la guerre nucléaire37. Envisageant la possibilité qu’une personne puisse intérioriser dans une égale mesure les normes de genre féminine et masculine (personne dite androgyne psychologique), Hershey et Sullivan38 ont observé que les participant.e.s androgynes étaient plus opposé.e.s à des interventions militaires que les participant.e.s qui avaient intériorisé des valeurs relativement plus féminines ou masculines39. En franchissant encore une étape, nous avons montré que l’attitude plus négative de nos participantes à l’égard de la guerre s’expliquait par leur plus forte identification à leur rôle de genre, elle-même corrélative d’une plus grande intériorisation de la norme de genre féminine40. Autrement dit, une fois prises en compte leur plus forte identification à la catégorie des femmes et leur plus grande intériorisation de la norme féminine, nos participantes affichaient des attitudes vis-à-vis de la guerre semblables à celles de nos participants.
Société plus égalitaire = société plus pacifique
- 41 A. H. Eagly et al., « Gender gaps in sociopolitical attitudes : a social psychological analysis », (...)
15Nous l’avons vu, les femmes ont tendance à être moins violentes et à moins soutenir l’usage de la violence que les hommes. De là à proposer qu’en accédant aux positions de pouvoir, les femmes contribueraient à rendre la société plus pacifique, il n’y a qu’un pas, que n’hésiteraient sans doute pas à franchir les partisanes de la trs. Celles-ci estiment en effet que l’augmentation du pouvoir politique des femmes donnerait un visage plus amical aux actions gouvernementales41. Examinons à présent les arguments en faveur de cette hypothèse.
- 42 Voir, par exemple, M. Caprioli, « Gendered conflict », op. cit.
- 43 M. T. Koch et S. A. Fulton, « In the defense of women : Gender, office holding and national securit (...)
- 44 D. Dahlerup, « From a small to a large minority : women in Scandinavian politics », Scandinavian Po (...)
16Nous l’avons dit, des études ont mis en évidence que les Etats plus égalitaires se comportaient de façon moins belliqueuse, tant en interne qu’en externe42. Cependant, le lien entre égalité hommes-femmes et paix est complexe. Koch et Fulton ont ainsi observé que si les dépenses militaires et la violence dont font usage les Etats sur la scène internationale diminuaient au fur et à mesure que la représentation parlementaire des femmes augmentait, elles augmentaient quand une femme était cheffe de l’exécutif43. Les deux variables interagissaient toutefois, de sorte que la présence d’une femme à la tête de l’Etat était associée à une diminution des dépenses militaires et de la violence interétatique quand la représentation parlementaire des femmes était importante. Ces résultats semblent suggérer que le lien entre égalité hommes-femmes et paix n’est pas linéaire et qu’un seuil critique doit être atteint avant que la présence des femmes aux postes de pouvoir n’induise un effet pacificateur, bien qu’il soit difficile, voire impossible, de déterminer avec précision le niveau de ce seuil44.
- 45 J. Haynie, « The Women and Peace Hypothesis in the Age of Nancy Pelosi. Can Female Leaders Bring Ab (...)
17Un pas supplémentaire dans la démonstration de l’effet pacificateur d’un plus grand pouvoir des femmes peut être franchi si l’on s’intéresse au type d’influence que les femmes exercent une fois qu’elles sont en position de pouvoir. Les femmes peuvent ainsi directement contribuer à rendre la société plus pacifique quand, en tant que législatrices, elles votent plus souvent que les législateurs contre l’usage de la force. Elles y contribuent aussi quand, en tant que membres de l’exécutif, elles plaident plus souvent que les hommes pour l’utilisation des canaux diplomatiques et autres solutions non militaires pour résoudre les conflits. Un examen rapide des votes de sénatrices et congressistes américaines entre 1991 et 2010 s’est révélé peu probant à cet égard45 mais de nouvelles études plus systématiques seraient souhaitables avant d’écarter cette possibilité une fois pour toutes.
- 46 A. Phillips, The Politics of Presence, Oxford, Oxford University Press, 1995.
- 47 L. Wängnerud, « Women in parliaments : Descriptive and substantive representation », Annual Review (...)
- 48 B. Burrell, « The political leadership of women and public policymaking », Policy Studies Journal, (...)
- 49 D. Levy, C. Tien et R. Aved, « Do Differences Matter ? », Women & Politics, 23/1-2, 2001, p. 105-12 (...)
18D’autres types d’influence ont été envisagées, bien que rarement sur des questions relatives à la guerre ou à la paix. En science politique, un consensus s’est par exemple dégagé autour de l’idée que la représentation des femmes s’accompagne d’effets substantiels46. Prises ensemble, les études dans cette discipline convergent pour montrer que les femmes qui occupent des charges politiques sont mieux « équipées » que leurs homologues masculins pour représenter les intérêts des femmes car elles partagent en partie les mêmes expériences, attentes sociales et attitudes47. Cela se traduit notamment par le fait que les législatrices ont tendance à accorder une priorité plus élevée aux dossiers relatifs aux droits des femmes, à la famille ou aux enfants que les législateurs48. Par ailleurs, si elles ouvrent le débat politique sur des sujets chers aux femmes, elles changent aussi parfois les termes de celui-ci en faveur d’une meilleure prise en compte des intérêts des femmes. Par exemple, sur le dossier de l’avortement, les congressistes américaines ont infléchi le débat en amenant leurs homologues masculins à aborder peu à peu le dossier sous l’angle de la santé de la femme plutôt que sous celui de la moralité49.
- 50 A. H. Eagly, M. C. Johannesen-Schmidt et M. L. van Engen, « Transformational, transactional, and la (...)
- 51 B. M. Bass, « The ethics of transformational leadership », in J. Ciulla (éd.), Ethics, the heart of (...)
19Dans les sciences de gestion, les études convergent pour montrer que les femmes qui occupent des postes de pouvoir ont tendance à agir selon des logiques proches des valeurs relationnelles/féminines. Eagly, Johannesen-Schmidt et van Engen, par exemple, ont réalisé une méta-analyse d’où il ressort que les femmes adoptent plus souvent un style de management dit transformationnel que les hommes50. Ce style de management consiste à essayer de gagner la confiance et le respect des membres de l’équipe en se positionnant en modèle et en privilégiant le dialogue et l’échange dans une logique de mentoring et d’empowerment de chacun, faisant par là l’impasse sur la logique de la mise en compétition ainsi que sur celle des punitions-récompenses pour stimuler les collaborateurs51.
- 52 B. Burrell, « The political leadership of women and public policymaking », op. cit.
20Les femmes semblent donc parvenir, dans une certaine mesure, à « importer » des valeurs féminines dans les positions de pouvoir qu’elles occupent. Il faut néanmoins noter que des différences ne sont pas toujours observées dans le comportement des femmes et des hommes quand ceux-ci occupent des positions de pouvoir52. Par ailleurs, étant donné le peu d’études empiriques consacrées de manière spécifique au rôle joué par les femmes dans les décisions prises en matière de guerre et de paix, notre compréhension de la façon dont les changements introduits par les femmes quand elles sont en position de pouvoir se traduisent au niveau des politiques relatives à la guerre et à la paix est limitée. Il est bien sûr possible qu’en plaçant le débat politique sur le terrain de programmes bienveillants et en l’orientant de façon à prendre en compte les intérêts des plus démuni.e.s, les femmes en position de pouvoir arrivent à « récupérer » des fonds publics qui, autrement, auraient été alloués à des programmes dont les intentions ou les finalités sont belliqueuses. Mais leur rôle pourrait aussi être plus direct. A l’évidence, il nous faudrait disposer de davantage d’études pour préciser la nature du lien entre pouvoir des femmes et paix.
Société plus égalitaire ≠ société plus pacifique
- 53 L. Bereni et al., Introduction aux études sur le genre, op. cit.
21Plusieurs critiques peuvent être adressées à la thèse présentée ci-dessus. Tout d’abord, d’un point de vue pragmatique, les femmes dirigeantes n’ont qualitativement pas les mêmes responsabilités que leurs homologues masculins. De plus, les responsabilités qui leur sont confiées sont souvent conformes aux normes de genre. Par exemple, et à quelques exceptions près, rares sont les femmes qui, dans les démocraties européennes, sont ou ont été à la tête des ministères des Affaires étrangères ou de la Défense, alors qu’elles sont nombreuses à se voir confier les portefeuilles de l’Education ou de la Santé53. Dans ces conditions, nous pouvons nous demander dans quelle mesure les femmes peuvent avoir un véritable impact sur les politiques relatives à la guerre et à la paix.
- 54 Ibid.
- 55 www.adeevee.com/2008/09/monstercom-job-search-website-ballet-soldier-direct-marketing/, consulté le (...)
22Ensuite, d’un point de vue plus théorique, le raisonnement présenté plus haut opère une déconnexion entre les rôles de genre et les rôles spécifiques. Or, il peut sembler à plus d’un titre déraisonnable d’envisager que l’accès progressif des femmes aux postes de pouvoir54 ne s’accompagne pas de changements chez les femmes, en particulier dans le chef de celles qui exercent des professions non conformes à leur genre. Une image tirée de la campagne publicitaire « Stuck in the wrong job ? » [« coincé.e dans le mauvais job ? »] de la plateforme Internet Monster.com, spécialiste du recrutement en ligne, nous semble appropriée pour illustrer nos propos : on y voit la figurine d’une danseuse, fusil à la main, au milieu d’un groupe de petits soldats55. En regardant cette image, nous pouvons penser que cette danseuse n’est pas à sa place. Nous pouvons aussi imaginer que si cette petite armée de jouets était composée du même nombre de danseuses et de soldats, la guerre qu’ils et elles sont en train de livrer serait peut-être moins sanglante. Mais les danseuses ont beau être plus légères et gracieuses que les soldats, il n’en reste pas moins qu’elles portent une arme et qu’elles sont donc en mesure de provoquer les mêmes dégâts !
- 56 L. Wängnerud, « Women in parliaments : Descriptive and substantive representation », op. cit., p. 6 (...)
- 57 M. Maier, « On the gendered substructure of organization : Dimensions and dilemmas of corporate mas (...)
- 58 A. E. M. van Vianen et A. H. Fischer, « Illuminating the glass ceiling : The role of organizational (...)
23Le même raisonnement peut s’appliquer aux femmes qui occupent des positions de pouvoir : ce n’est pas parce qu’elles sont femmes qu’elles ne seront pas amenées à se conformer aux pratiques et aux normes en vigueur dans les sphères de la prise de décision. Comme le souligne Wängnerud, « les institutions parlementaires influencent les politiciennes plus que les politiciennes ne sont en mesure de les influencer (ce qui revient à dire que les femmes qui accèdent aux parlements deviennent tout simplement comme les hommes qui les ont précédées) »56. Dans le même ordre d’idées, des auteurs57 affirment que, de nos jours, le monde du travail et la sphère politique fondent la définition et la valorisation des attitudes ou des styles de comportement à adopter sur la norme instrumentale/masculine. Autrement dit, ces sphères comporteraient « des postulats implicites, des normes tacites ainsi que des pratiques (…) qui encouragent des formes de communication, des conceptions de soi, des modes de gestion du conflit, des images du leadership, des valeurs (…) stéréotypiquement masculins »58. Dans ces contextes aux apparences neutres mais en réalité très marqués par la dimension instrumentale, les femmes se retrouvent dans l’obligation de s’adapter, bon gré, mal gré, aux impératifs de la compétition et de l’individualisme qui sont dictés par le système lui-même, sans vraiment avoir la possibilité « d’importer » des valeurs relationnelles.
- 59 C. Gilligan, Une si grande différence, op. cit.
- 60 C. Gilligan et J. Attanucci, « Two moral orientations : Gender differences and similarities », Merr (...)
- 61 D. Dahlerup, « From a small to a large minority : women in Scandinavian politics », op. cit.
- 62 A. Casini, « Les représentations sociales de « l’emploi idéal pour soi » : une analyse en amont de (...)
24De surcroît, la sphère de la prise de décision, dont les arrangements se basent davantage sur la mise en compétition que sur l’empathie, pourrait offrir un terrain particulièrement propice à l’exacerbation, chez les femmes engagées en politique, d’un conflit entre les deux orientations morales que sont « l’éthique du care » et « l’éthique de la justice »59. La première orientation morale (distinctive des femmes) conduirait à mettre en avant des priorités telles que la sollicitude et la résolution des conflits interpersonnels, tandis que la deuxième orientation (distinctive des hommes) encouragerait le respect des règles et l’accomplissement du droit individuel, au détriment de l’attention aux besoins d’autrui et à l’apaisement60. Ainsi, l’exigence de devoir se conformer à « l’éthique de la justice » qui contraste, voire s’oppose à « l’éthique du care » peut donner lieu à un sentiment d’ambivalence chez les femmes qui valorisent le plus cette dernière. Ce sentiment peut, dans certains cas, les amener à désinvestir leur position de pouvoir et à quitter la scène politique61. Enfin, différent.e.s auteur.e.s ont montré, qu’en amont, ce sont surtout les femmes affichant une certaine préférence pour le travail sous pression, la compétition et le pouvoir qui sont attirées par un poste décisionnel62, avec pour conséquence que seules les femmes les moins orientées vers les valeurs relationnelles/féminines rentrent dans le système et y restent.
25Les constats qui précèdent suggèrent que, si les normes en vigueur dans les sphères décisionnelles demeurent inchangées, la société ne deviendra pas plus pacifique et ceci en dépit d’une éventuelle égalité numérique entre hommes et femmes en ces lieux. Une telle prédiction est d’ailleurs conforme aux principes de la trs. Nous l’avons vu, cette théorie postule que la répartition des femmes et des hommes dans des rôles sociaux statutairement inégaux est à l’origine de différences sexuées. Il s’en suit logiquement que, dans une société où la répartition des rôles entre les femmes et les hommes tend vers l’égalité, les différences entre les femmes et les hommes devraient tendre à disparaître, ce qui revient à dire que les hommes y adhéreraient plus à la norme féminine et les femmes plus à la norme masculine que dans des sociétés plus inégalitaires. Dans une telle configuration, le résultat de l’opération pour le niveau de pacifisme de la société serait nul. En poursuivant le raisonnement, nous pourrions même envisager qu’une société plus égalitaire soit moins pacifique si une plus grande adhésion des femmes à la norme masculine n’était pas contrebalancée par une plus grande adhésion des hommes à la norme féminine.
Vers une synthèse
- 63 A. H. Eagly et al., « Gender gaps in sociopolitical attitudes : a social psychological analysis », (...)
- 64 Voir aussi L. Bereni et al., Introduction aux études sur le genre, op. cit.
- 65 J. M. Twenge, « Changes in masculine and feminine traits over time : A meta-analysis », Sex Roles, (...)
26La trs nous a permis d’envisager tour à tour la possibilité que, si les hommes et les femmes disposaient d’un accès égal aux positions de pouvoir, la société serait plus pacifique et la possibilité inverse, c’est-à-dire que, si les hommes et les femmes disposaient d’un accès égal aux positions de pouvoir, la société ne serait pas plus pacifique, voire le serait moins. Comment concilier ces possibilités apparemment contradictoires ? Une façon d’y parvenir consiste à se référer une nouvelle fois aux travaux des partisanes de la trs. Celles-ci mettent en avant deux éléments qui permettent de faire pencher la balance en faveur de l’effet pacificateur d’un plus grand pouvoir politique des femmes. Elles font d’abord remarquer que la convergence dans la répartition des rôles sociaux entre les femmes et les hommes n’est pas symétrique63, en ce sens que la sous-représentation des femmes dans les rôles professionnels de haut statut se résorbe plus vite que la sous-représentation des hommes dans les rôles domestiques64. Elles font ensuite le parallèle avec les résultats des études qui s’intéressent à l’intériorisation des normes de genre. Quand celles-ci sont analysées à travers le temps, elles montrent en effet que, si les femmes continuent à adhérer plus que les hommes à la norme féminine et si, en revanche, elles adhèrent de plus en plus à la norme masculine, l’intériorisation de la norme féminine par les hommes reste faible65.
- 66 D. Dahlerup, « From a small to a large minority : women in Scandinavian politics », op. cit., p. 29 (...)
27Bien que transformées par les positions de pouvoir qu’elles occupent, les femmes disposeraient donc d’un atout majeur qui leur permettrait d’y « importer » des valeurs relationnelles, à savoir leur androgynie psychologique. Mais, pour qu’elles soient en mesure d’effectuer des changements dans les normes en vigueur dans les sphères décisionnelles, il conviendrait, selon nous, qu’elles puissent atteindre un seuil critique, bien que l’enjeu ne se situe sans doute pas au seul niveau du nombre des hommes et des femmes dans les positions de pouvoir. Ainsi, comme le souligne Dahlerup, « la culture politique est plus qu’une convention sociale entre politicien.ne.s. (…) Bien que les changements de conventions sociales puissent advenir sans trop de problèmes, il est nécessaire de déployer un effort délibéré afin de modifier des aspects plus fondamentaux de la culture politique. Puisque la politique n’est pas la physique, il faudra viser la mise en place d’actes critiques, plus que celle d’une masse critique [de femmes] »66.
- 67 R. B. Rapoport, « Sex differences in attitude expression : A generational expression », Public Opin (...)
- 68 C. M. Lusk et C. M. Judd, « Political expertise and the structural mediators of candidate evaluatio (...)
28Le deuxième élément mis en avant par les partisanes de la trs est la sophistication politique progressive observée chez les femmes67. Faisant référence à des études qui montrent que quand les individus améliorent leurs connaissances en politique, ils développent des préférences politiques plus prononcées et plus cohérentes68, elles affirment que les attitudes politiques des femmes reflètent de plus en plus fidèlement leur position dans la société. Corollaire de cette affirmation, la convergence observée dans la répartition des rôles sociaux ou dans l’intériorisation des normes de genre est susceptible d’aller de pair avec une divergence plus prononcée dans les attitudes politiques des femmes et des hommes. Les conséquences potentielles sur le vote sont évidentes dans la mesure où, dans nos sociétés démocratiques, les politicien.ne.s doivent, bon gré mal gré, composer avec un électorat qui, sur un certain nombre de dossiers, est traversé par une division sexuée. Une telle analyse suggère que l’influence politique subversive des femmes augmentera en même temps que leur accession à des positions de pouvoir et leur connaissance en politique.
- 69 M. Caprioli, « Gendered conflict », op. cit.
- 70 Voir aussi E. Melander, « Gender equality and intrastate armed conflict ? », International Studies (...)
29Une autre façon de concilier la thèse et l’antithèse développées dans cet article oblige à sortir du cadre de la trs. En effet, en conceptualisant le genre comme le produit d’une division sexuée du travail, cette théorie ne permet pas de l’envisager comme un système de domination. Or, un lien a été postulé et démontré entre le degré de discrimination et de violence employé par une société à l’égard d’une ou de plusieurs composantes de sa population et son niveau d’hostilité sur la scène internationale69. Ce lien se justifie en théorie par le fait que les systèmes de domination se caractérisent par un certain niveau d’intolérance et une structure hiérarchique qui procèdent de normes encourageant certains groupes à se considérer comme supérieurs aux autres. Dans cette approche alternative, ce sont les normes qui précèdent et déterminent la répartition des rôles sociaux là où, dans la trs, c’est la répartition des rôles sociaux qui précède et détermine les normes70. Par conséquent, il se pourrait que l’effet pacificateur d’un plus grand pouvoir (politique) des femmes ne soit pas l’œuvre des femmes elles-mêmes mais plutôt des normes que leur émancipation représente.
Conclusion
- 71 V. Woolf, Trois guinées, op. cit.
- 72 Voir aussi P. Werbner, « Political Motherhood and the Feminisation of Citizenship : Women’s Activis (...)
- 73 Les deux conceptions sont bien entendu compatibles. Nous avons néanmoins observé qu’elles ne bénéfi (...)
30Dans le débat autour du lien présumé entre les femmes et la paix, deux conceptions de l’égalité hommes-femmes coexistent. Selon une première conception, améliorer l’accès des femmes à des positions de pouvoir encore trop souvent occupées par les hommes et qui véhiculent des valeurs instrumentales/masculines contribuerait à rendre la société plus pacifique. Dans sa fiction épistolaire71, Virginia Woolf exprime son scepticisme à l’égard de cette possibilité. Elle craint en effet que, si les femmes en venaient à intégrer en masse la « société des hommes », elles ne soient façonnées dans le même moule que les hommes dont elles deviendraient au fil du temps des copies conformes qui approuveraient les mêmes politiques belliqueuses. Sur la base des résultats des travaux empiriques qui ont été menés depuis lors sur la question, nous portons un jugement plus positif et concluons à l’effet pacificateur d’un plus grand pouvoir (politique) des femmes. Cet effet est toutefois complexe, encore mal compris et ne s’explique qu’en partie par la théorie des rôles sociaux. Etant donné le relatif désintérêt dont elle jouit dans les champs tant scientifique que politique72, nous sommes en revanche incapables de nous prononcer sur le bien-fondé de la conception de l’égalité privilégiée par Virginia Woolf. Selon cette deuxième conception, c’est en accordant plus de pouvoir aux professions occupées en majorité par les femmes et qui véhiculent des valeurs relationnelles/féminines que l’on œuvrera le plus efficacement pour la paix73. Si donc notre texte propose des éléments de réponse à la question de savoir si une société plus égalitaire est plus pacifique, nous espérons qu’il contribuera aussi et surtout à stimuler la réflexion sur les freins psychologiques et sociaux à la valorisation des valeurs relationnelles/féminines et sur les conséquences d’une telle valorisation sur le niveau de pacifisme des sociétés.
Notes
1 Trad. par L. Gauthier, Paris, Blackjack éditions, 1938, p. 59.
2 A. H. Eagly, Sex differences in social behaviour : a social-role interpretation, Hillsdale, nj, Lawrence Erlbaum Associates, 1987, p. 87.
3 Attention cependant à ne pas considérer les attitudes vis-à-vis de la paix et de la guerre comme les deux faces d’une même médaille. Autrement dit, être en faveur de la guerre ne veut pas nécessairement dire que l’on est contre la paix (voir B. Bizumic, R. Stubager, S. Mellon, N. Van der Linden, R. Iyer et B. M. Jones, « On the (in)compatibility of attitudes toward peace and war », Political Psychology, 34/5, 2013, p. 673-693).
4 M. Gruber, Women in American politics : An assessment and sourcebook, Oshkosh, wi, Academia Press, 1968, cité par A. H. Eagly, A. B. Diekman, M. C. Johannesen-Schmidt et A. M. Koenig, « Gender gaps in sociopolitical attitudes : a social psychological analysis », Journal of Personality and Social Psychology, 87/6, 2004, p. 796.
5 Voir, e.g., T. W. Smith, « The Polls : Gender and attitudes toward violence », The Public Opinion Quarterly, 48/1, 1984, p. 384-396.
6 I. Maoz, « Women and Peace Hypothesis », in D. J. Christie (éd.), The Encyclopedia of Peace Psychology, Oxford, Blackwell Publishing Ltd, 2012.
7 M. Nincic et D. J. Nincic, « Race, gender, and war », Journal of Peace Research, 39/5, 2002, p. 547-568.
8 M. Caprioli, « Gendered conflict », Journal of Peace Research, 37/1, 2000, p. 51-68.
9 R. C. Eichenberg, « Gender differences in public attitudes toward the use of force by the United States 1900-2003 », International Security, 28/1, 2003, p. 110-141.
10 M. Tessler, J. Nachtwey et A. Grant, « Further Tests of the women and peace hypothesis : Evidence from cross-national survey research in the Middle East », International Studies Quarterly, 43/3, 1999, p. 519-531 ; M. Tessler et I. Warriner, « Gender, feminism and attitudes toward international conflict : Exploring relationships with survey data from the Middle East », World Politics, 49, 1997, p. 250-281.
11 I. Hakvoort et L. Oppenheimer, « Understanding peace and war : A review of developmental psychology research », Developmental Review, 18/3, 1998, p. 353-389.
12 I. Hakvoort et S. Hägglund, « Concepts of peace and war as described by Dutch and Swedish girls and boys », Peace and Conflict : Journal of Peace Psychology, 7/1, 2001, p. 29-44.
13 P. J. Conover et V. Sapiro, « Gender, feminist consciousness, and war », American Journal of Political Science, 1993, p. 1079-1099.
14 C. Gilligan, Une si grande différence, Paris, Flammarion, 1982.
15 S. Ruddick, Maternal Thinking : Toward a Politics of Peace, Boston, Beacon Press, 1989, cité par P. J. Conover et V. Sapiro, « Gender, feminist consciousness, and war », op. cit.
16 M. E. Bendyna, T. Finucane, L. Kirby, J. P. O’Donnell et C. Wilcox, « Gender differences in public attitudes toward the Gulf War : A test of competing hypotheses », The Social Science Journal, 33/1, 1996, p. 1-22 ; P. J. Conover et V. Sapiro, « Gender, feminist consciousness, and war », op. cit.
17 P. J. Conover, « Feminists and the gender gap », The Journal of Politics, 50, 1988, p. 4.
18 M. E. Bendyna et al., « Gender differences in public attitudes toward the Gulf War : A test of competing hypotheses », op. cit. ; E. A. Cook et C. Wilcox, « Feminism and the gender gap : A second look », Journal of Politics, 53/4, 1991, p. 1111-1122.
19 J. M. Silverman et D. S. Kumka, « Gender differences in attitudes toward nuclear war and disarmament », Sex Roles, 16/3-4, 1987, p. 189-203.
20 M. Nincic et D. J. Nincic, « Race, gender, and war », op. cit.
21 M. H. Bendyna et al., « Gender differences in public attitudes toward the Gulf War : A test of competing hypotheses », op. cit.
22 M. Nincic et D. J. Nincic, « Race, gender, and war », op. cit., p. 564, notre traduction.
23 Les explications qualifiées de « féministes-radicales » présentées ci-avant ne sont pas sans évoquer le péril essentialiste. En effet, en attribuant le gender gap à des différences fondamentales entre femmes et hommes, ces explications participent d’une tendance plus générale à (se re)présenter les femmes comme appartenant à une catégorie distincte et aux frontières nettes ; l’appartenance à cette catégorie est involontaire et inéluctable (D. A. Prentice et D. T. Miller, « Psychological essentialism of human categories », Current Directions in Psychological Science, 16/4, 2007, p. 202-206). En somme, ces explications contribuent à naturaliser les différences sexuées, prétendues ou observées. Une telle tendance, qui s’observe aussi bien parmi des courants conservateurs et/ou sexistes que dans des courants progressistes et/ou féministes (W. Scott, « The uses and abuses of gender », Tijdschrift voor Genderstudies, 1, 2013, p. 63-77), tend à favoriser le déni des inégalités de genre et elle est utilisée de façon stratégique pour protéger les privilèges masculins quand le maintien du statu quo est menacé (T. A. Morton, T. Postmes, S. A. Haslam et M. J. Hornsey, « Theorizing gender in the face of social change : Is there anything essential about essentialism ? », Journal of Personality and Social Psychology, 96/3, 2009, p. 653-664). Bien que de façon moins évidente, les explications qualifiées de « féministes-socialistes » (y compris la théorie des rôles sociaux) ne sont pas à l’abri du péril essentialiste quand, pour souligner le caractère socialement construit des différences sexuées, elles s’appuient sur des statistiques relatives à des catégories formées à partir du regroupement d’individus sur une base biologique. Ce faisant, elles n’interrogent pas la signification même de ce que c’est que d’être une femme (ou un homme) et courent le risque de cautionner le système binaire qui condense les variétés de féminités et de masculinités en (seulement) deux sexes (W. Scott, « The uses and abuses of gender », op. cit.). Nous sommes redevables à un.e re-lecteur.trice anonyme d’avoir soulevé ce point.
24 A. H. Eagly, Sex differences in social behaviour : a social-role interpretation, op. cit.
25 Ibid.
26 A un niveau comportemental, les femmes ont tendance à se montrer moins agressives et plus coopératives que les hommes (A. H. Eagly et V. J. Steffen, « Gender and Aggressive Behavior : A Meta-Analytic Review of the Social Psychological Literature », Psychological Bulletin, 100/3, 1986, p. 30-330). A un niveau attitudinal, les femmes ont tendance à soutenir plus que les hommes les politiques dites bienveillantes parce que destinées à aider les groupes désavantagés ou à protéger les individus de la violence. Elles ont aussi tendance à soutenir plus que les hommes les politiques qui sanctionnent les comportements traditionnellement considérés comme immoraux (e.g., relations extraconjugales, divorce, consommation de stupéfiants ; A. H. Eagly et al., « Gender gaps in sociopolitical attitudes : a social psychological analysis », op. cit.).
27 Notons, à titre d’exemple, que les femmes sont surreprésentées dans les métiers dits du « care », c’est-à-dire dans les métiers liés au soin et à la prise en charge des enfants et des adultes dépendants (voir L. Bereni, S. Chauvin, A. Jaunait et A. Revillard. Introduction aux études sur le genre, 2e éd., Bruxelles, De Boeck, 2012).
28 Adapté de A. B. Diekman et M. C. Schneider, « A social role theory perspective on gender gaps in political attitudes », Psychology of Women Quarterly, 34/4, 2010, p. 486-497.
29 A. H. Eagly et W. Wood, « The origins of sex differences in human behavior : Evolved dispositions versus social role », American Psychologist, 54/6, 1999, p. 408.
30 Pour une validation empirique de ce principe, voir par exemple A. H. Eagly et V. J. Steffen, « Gender stereotypes stem from the distribution of women and men into social roles », Journal of Personality and Social Psychology, 46/4, 1984, p. 735.
31 Dans la trs, le sexe renvoie au regroupement des individus dans des catégories biologiques, tandis que le genre renvoie au sens, socialement construit, que les individus attribuent à ces catégories (A. H. Eagly et al., « Gender gaps in sociopolitical attitudes : a social psychological analysis », op. cit.). Ces définitions doivent bien entendu être revues à la lumière de conceptualisations plus récentes qui voient dans le genre moins le produit d’une construction sociale que le principe même de division du genre humain en deux catégories, principe de division qui précède et détermine les sexes (voir L. Bereni et al., Introduction aux études sur le genre, op. cit.).
32 F. Fincham et M. Hewstone, « Attribution theory and research : From basic to applied », in M. Hewstone et W. Stroebe (éd.), Introduction to Social Psychology, Oxford, Blackwell Publishing, 2001, p. 198-238.
33 A. Casini, Genre et carrière professionnelle : enjeux identitaires et dilemmes normatifs dans le phénomène du « plafond de verre », thèse de doctorat non publiée, Université libre de Bruxelles, 2008.
34 Voir aussi B. Diekman et M. C. Schneider, « A social role theory perspective on gender gaps in political attitudes », op. cit.
35 La confirmation comportementale désigne le mécanisme par lequel un individu est amené à adopter un comportement qui est attendu de lui – par son interlocuteur.trice ou la société en général – en vertu de son appartenance à une catégorie sociale donnée (O. Klein et M. Snyder, « Stereotypes and behavioral confirmation : From interpersonal to intergroup perspectives », Advances in Experimental Social Psychology, 35, 2003, p. 153-234). Une illustration de ce mécanisme et fournie par Kray et al. (L. J. Kray, L. Thompson et A. Galinsky, « Battle of the sexes : gender stereotype confirmation and reactance in negotiations », Journal of Personality and Social Psychology, 80/6, 2001, p. 942). Quand ces auteurs ont présenté une tâche de négociation comme requérant la mise en œuvre de traits masculins tels que la rationalité, l’assertivité et l’égocentrisme, leurs participantes ont confirmé le stéréotype qui veut que la négociation soit une affaire d’hommes. En revanche, quand ils présentaient la tâche de négociation de façon neutre, les participantes se montraient aussi fines négociatrices que leurs homologues masculins. A noter qu’il n’est pas nécessaire que les individus aient intériorisé les attentes stéréotypées dont ils font l’objet pour que la confirmation comportementale opère. Il faut cependant qu’eux.elles et/ou les individus avec lesquels ils.elles interagissent aient connaissance de ces attentes pour que la confirmation comportementale puisse opérer. Cette condition permet d’éviter l’écueil, redouté par un.e re-lecteur.trice anonyme, de la tautologie.
36 L’orientation idéologique différente des femmes serait due à leur surreprésentation dans des rôles professionnels de statut moindre car ces rôles auraient pour effet de sensibiliser leurs occupant.e.s à des discours visant à garantir un accès plus équitable aux ressources (A. H. Eagly et A. B. Diekman, « Examining gender gaps in sociopolitical attitudes : It’s not Mars and Venus », Feminism & Psychology, 16, 2006, p. 26-34).
37 C. C. Peterson, J. A. Lawrence et I. Dawes, « The relationship of gender, sex role and law-and-order attitudes to nuclear opinions », Sex Roles, 22/5-6, 1990, p. 283-292.
38 M. R. Hershey et J. L. Sullivan, « Sex-role attitudes, identities, and political ideology », Sex Roles, 3/1, 1977, p. 37-57.
39 Un.e relecteur.trice anonyme a judicieusement fait remarquer que ces résultats semblaient, à première vue, incompatibles avec la trs. Le mode de calcul du score composite utilisé par Hershey et Sullivan (ibid.) est cependant de nature à nuancer cette conclusion. Ainsi, pour chaque participant.e, la différence entre les moyennes obtenues pour les deux normes de genre a été calculée. Sur la base de ce score composite, les participant.e.s ont ensuite été réparti.e.s en trois catégories : les androgynes, les féminin.e.s et les masculin.e.s. Ce mode de calcul a notamment eu pour conséquence de regrouper dans la même catégorie (i.e., les angrogynes) des personnes qui s’attribuent des caractéristiques ni féminines ni masculines et des personnes qui s’attribuent dans une large mesure ces deux types de caractéristiques. Or, les premières sont qualifiées d’habitude d’indifférenciées et elles se distinguent parfois des dernières sur des variables psycho-sociologiques. Le pattern de réponses des participant.e.s indifférencié.e.s et celui des participant.e.s androgynes se rapprochent même, dans certains cas, de celui observé pour, respectivement, les participant.e.s féminin.e.s et les participant.e.s masculin.e.s (voir T. M. Kimlicka, H. Cross, et J. Tarnai, « A Comparison of androgynous, feminine, masculine, and undifferentiated women on self-esteem, body satisfaction, and sexual satisfaction », Psychology of Women Quarterly, 7, 1983, p. 291-294). La transformation de deux scores absolus en un score relatif rend donc malaisée toute tentative de falsification de la trs sur la base des résultats de Hershey et Sullivan. Néanmoins, ceux-ci témoignent, selon nous, de l’intérêt d’étudier les attitudes vis-à-vis de la guerre en lien avec les normes de genre.
40 N. Van der Linden, D. Ghilani et A. Casini, « Attitudes towards war through a gender lens », communication présentée au 2013 Annual Scientific Meeting of the International Society of Political Psychology, Herzliya (Israël), 8-11 juillet 2013.
41 A. H. Eagly et al., « Gender gaps in sociopolitical attitudes : a social psychological analysis », op. cit.
42 Voir, par exemple, M. Caprioli, « Gendered conflict », op. cit.
43 M. T. Koch et S. A. Fulton, « In the defense of women : Gender, office holding and national security policy in established democracies », The Journal of Politics, 73/1, 2011, p. 1-16. Voir aussi M. Caprioli et M. A. Boyer, « Gender, violence, and international crisis », Journal of Conflict Resolution, 45/4, 2001, p. 503-518.
44 D. Dahlerup, « From a small to a large minority : women in Scandinavian politics », Scandinavian Political Studies, 11/4, 1988, p. 275-298.
45 J. Haynie, « The Women and Peace Hypothesis in the Age of Nancy Pelosi. Can Female Leaders Bring About World Peace ? », Theses and Dissertations, Paper 1399, University of New Orleans, 2011.
46 A. Phillips, The Politics of Presence, Oxford, Oxford University Press, 1995.
47 L. Wängnerud, « Women in parliaments : Descriptive and substantive representation », Annual Review of Political Science, 12, 2009, p. 51-69.
48 B. Burrell, « The political leadership of women and public policymaking », Policy Studies Journal, 25/4, 1997, p. 565-568.
49 D. Levy, C. Tien et R. Aved, « Do Differences Matter ? », Women & Politics, 23/1-2, 2001, p. 105-127.
50 A. H. Eagly, M. C. Johannesen-Schmidt et M. L. van Engen, « Transformational, transactional, and laissez-faire leadership styles : A meta-analysis comparing women and men », Psychological Bulletin, 129/4, 2003, p. 569-591.
51 B. M. Bass, « The ethics of transformational leadership », in J. Ciulla (éd.), Ethics, the heart of leadership, Westport, Praeger, 1998, p. 169-192.
52 B. Burrell, « The political leadership of women and public policymaking », op. cit.
53 L. Bereni et al., Introduction aux études sur le genre, op. cit.
54 Ibid.
55 www.adeevee.com/2008/09/monstercom-job-search-website-ballet-soldier-direct-marketing/, consulté le 16 septembre 2015.
56 L. Wängnerud, « Women in parliaments : Descriptive and substantive representation », op. cit., p. 61, notre traduction.
57 M. Maier, « On the gendered substructure of organization : Dimensions and dilemmas of corporate masculinity », in G. N. Powell (éd.), Handbook of gender and work, Thousand Oaks, Sage Publications Inc, 1999, p. 69-94.
58 A. E. M. van Vianen et A. H. Fischer, « Illuminating the glass ceiling : The role of organizational culture preferences », Journal of Occupational and Organizational Psychology, 75/3, 2002, p. 316, notre traduction.
59 C. Gilligan, Une si grande différence, op. cit.
60 C. Gilligan et J. Attanucci, « Two moral orientations : Gender differences and similarities », Merrill Palmer Quarterly, 34/3, 1988, p. 223-237 ; P. Paperman et S. Laugier, « L’éthique de la sollicitude », Sciences humaines, 177/12, 2006, p. 6 ; E. E. A. Skoe, « The ethic of care : Issues in moral development », in E. E. A. Skoe et A. vor der Lippe (éd.), Personality development in adolescence : A cross national and life span perspective. Adolescence and society, Florence, us, Taylor & Francis/Routledge, 1998, p. 144-171 ; E. E. A. Skoe et R. Diessner, « Ethic of care, justice, identity, and gender : An extension and replication », Merrill Palmer Quarterly, 40/2, 1994, p. 272-289.
61 D. Dahlerup, « From a small to a large minority : women in Scandinavian politics », op. cit.
62 A. Casini, « Les représentations sociales de « l’emploi idéal pour soi » : une analyse en amont de la ségrégation professionnelle selon le genre », Anais : Série psicologia, 11, 2015, p. 35-64 ; A. E. M. van Vianen et A. H. Fischer, « Illuminating the glass ceiling : The role of organizational culture preferences ».
63 A. H. Eagly et al., « Gender gaps in sociopolitical attitudes : a social psychological analysis », op. cit.
64 Voir aussi L. Bereni et al., Introduction aux études sur le genre, op. cit.
65 J. M. Twenge, « Changes in masculine and feminine traits over time : A meta-analysis », Sex Roles, 36/5-6, 1997, p. 305-325.
66 D. Dahlerup, « From a small to a large minority : women in Scandinavian politics », op. cit., p. 290, notre traduction, nous soulignons.
67 R. B. Rapoport, « Sex differences in attitude expression : A generational expression », Public Opinion Quarterly, 46, 1982, p. 86-96, cité par A. H. Eagly et al., « Gender gaps in sociopolitical attitudes : a social psychological analysis », op. cit.
68 C. M. Lusk et C. M. Judd, « Political expertise and the structural mediators of candidate evaluations », Journal of Experimental Social Psychology, 24, 1988, p. 105-126, cité par ibid.
69 M. Caprioli, « Gendered conflict », op. cit.
70 Voir aussi E. Melander, « Gender equality and intrastate armed conflict ? », International Studies Quarterly, 49, 2005, p. 695-714.
71 V. Woolf, Trois guinées, op. cit.
72 Voir aussi P. Werbner, « Political Motherhood and the Feminisation of Citizenship : Women’s Activisms and the Transformation of the Public Sphere », in N. Yuval-Davis et P. Werbner (éd.) Women, citizenship and difference, Londres, Zed Books, 1999, p. 221-245.
73 Les deux conceptions sont bien entendu compatibles. Nous avons néanmoins observé qu’elles ne bénéficiaient pas de la même popularité. Dans un échantillon composé principalement d’adultes actifs recrutés en Belgique et en Italie, alors que moins de 1% des participant.e.s marquait son désaccord avec l’item « Les femmes et les hommes devraient recevoir un salaire égal pour un travail égal », plus de 20% marquaient leur désaccord avec l’item « Le travail non rémunéré des femmes devrait être socialement plus valorisé » (N. Van der Linden, D. Ghilani, et A. Casini, « The gender gap in attitudes toward war from a gender perspective : A cross-cultural investigation in Belgium and Italy » communication présentée au 2014 Annual Scientific Meeting of the International Society of Political Psychology, Rome, 4-7 juillet, 2014). Dans un échantillon composé principalement d’étudiant.e.s belges, le taux de désaccord avec chacun de ces items était, respectivement, de 4 et 27% (N. Van der Linden et al., « Attitudes towards war through a gender lens », op. cit.).
Haut de pageTable des illustrations
![]() |
|
---|---|
Titre | Représentation schématique de la théorie des rôles sociaux28 |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/sextant/docannexe/image/473/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 59k |
Pour citer cet article
Référence papier
Nicolas Van der Linden, Djouaria Ghilani et Annalisa Casini, « Une société plus égalitaire est-elle plus pacifique ? Un regard psychosocial sur la « women and peace hypothesis » », Sextant, 34 | 2017, 19-34.
Référence électronique
Nicolas Van der Linden, Djouaria Ghilani et Annalisa Casini, « Une société plus égalitaire est-elle plus pacifique ? Un regard psychosocial sur la « women and peace hypothesis » », Sextant [En ligne], 34 | 2017, mis en ligne le 02 mai 2017, consulté le 06 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/sextant/473 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/sextant.473
Haut de pageDroits d’auteur
Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-SA 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Haut de page