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Saisir les transformations des sports de nature par la théorie de l’acteur-réseau

To grasp the transformations of outdoor sports by the actor-network theory
La captura de las transformaciones de los deportes de naturaleza por la teoría del actor-red
Yohann Rech et Élodie Paget
p. 48-63

Résumés

Cet article appréhende les sports de nature sous l’angle de la théorie de l’acteur-réseau (ant). Il vise à montrer en quoi cette théorie offre une perspective heuristique permettant de saisir les transformations récentes des sports de nature et de déplacer notre regard sur ces activités. Il se focalise sur trois dimensions du développement des sports de nature : une dimension organisationnelle, une dimension politique et une dimension marchande. Nous montrerons comment chacune de ces dimensions peut être appréhendée grâce à différents concepts de l’ant, notamment ceux de la sociologie de la traduction pour penser les innovations sportives, ceux liés à l’émergence des forums hybrides pour saisir les controverses, et enfin ceux portant plus spécifiquement sur les agencements marchands pour comprendre le développement d’un marché des sports de nature.

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Texte intégral

1S’il est un truisme d’affirmer que le sport a connu de profonds changements en un demi-siècle, il est peut-être important de rappeler en préambule le rôle structurant qu’ont joué les sports de nature dans ces évolutions. En effet, l’engouement autour de ces activités révèle des transformations sociales importantes et interroge les évolutions du rapport au corps, à la nature, à la technologie, aux modes de consommation et à autrui par les formes de sociabilité qui se développent autour de ces activités (Augustin, 1987 ; Mounet, 2000 ; Bessy, 2008). Les sports de nature sont devenus assez rapidement un objet sociologique à part entière, éclairé par des approches théoriques variées et appréhendé par des méthodologies elles-mêmes diversifiées. L’objectif de cet article n’est pas de faire un bilan d’étape de la sociologie des sports de nature tant les manières d’appréhender l’objet sont disparates et ne se limitent pas à une approche purement sociologique. Les investigations dans ce domaine débordent fréquemment vers d’autres disciplines voisines comme la géographie, l’histoire, l’économie, etc. Au contraire, le présent article appréhende les sports de nature à partir d’une entrée sociologique précise: celle de la théorie de l’acteur-réseau (ant) (Latour, 2006). Nous souhaitons montrer en quoi la théorie de l’acteur-réseau offre une perspective heuristique permettant de saisir les transformations récentes des sports de nature, afin de déplacer notre regard sur ces activités et ainsi d’appréhender l’objet différemment.

  • 1 L’ouvrage de Tollis et al. (2014), qui porte spécifiquement sur le travail de Bruno Latour et sur l (...)

2Nous voulons nous focaliser sur trois dimensions du développement des sports de nature : une dimension organisationnelle, une dimension politique et une dimension marchande. A partir de ces dimensions, l’intérêt de l’article est aussi de déconstruire la représentation monolithique de la théorie de l’acteur-réseau afin de souligner les évolutions conceptuelles de ce paradigme1. Ainsi, dans un premier temps, nous mobiliserons les concepts classiques de la sociologie de l’innovation pour montrer comment les sports de nature se sont structurés autour de différentes formes d’innovation. Ensuite, notre attention se portera plus précisément sur la redéfinition des grands partages et notamment sur la séparation artificielle entre la nature et le social, tout comme entre la science et la société. Les sports de nature portent dans leur définition même cette contradiction moderniste et l’approche théorique de l’acteur-réseau permet d’analyser symétriquement le sport et la nature, sans les cloisonner dans deux espaces autonomes. Enfin, dans un dernier temps, nous nous intéresserons à la mise en marché des sports de nature et à l’évolution récente de l’ant prenant davantage en compte les enjeux socio-économiques sous-jacents à ces activités.

Les sports de nature à l’aune de la sociologie de la traduction

Origine et principes de l’analyse des sports de nature par l’ANT

3Si l’on considère l’ant comme une théorie en évolution depuis quarante ans, on peut affirmer qu’une première étape a permis d’établir des concepts formant l’armature théorique. C’est ainsi que les notions d’innovation, de traduction et de réseaux socio-techniques ont été très en vogue dans les années 1980 et 1990. La sociologie de la traduction s’est intéressée dans un premier temps à la production des faits scientifiques et à la science non pas faite, mais en train de se faire (Latour, 1989). C’est donc une « anthropologie comparée des sciences, des techniques et des organisations » (Latour, 2006, 69) qui s’est développée sous l’impulsion de Michel Callon, Bruno Latour et John Law. La sociologie de la traduction prend également le nom à cette période de sociologie de l’innovation puis de « Actor-Network Theory » (ant). Plus récemment, Latour (2006) parle aussi de sociologie des associations (au sens d’assemblage d’entités hétérogènes qu’il faut retracer). L’une des spécificités de la théorie de l’acteur-réseau est de discuter certains dualismes des sciences sociales, tels que la nature et le social, l’individuel et le collectif, le micrologique et le macrologique. Une réflexion sur les rapports entre le monde social et le monde technique est menée, montrant comment la frontière est ténue. Pour résumer les fondements épistémologiques sur lesquels repose cette théorie, nous pouvons nous référer aux différents principes de la « sociologie modeste » de Law (1994) :

  • le principe de symétrie : Les non-humains sont au centre des interactions sociales et ils doivent être pris en compte au même titre que les acteurs dans l’analyse d’une action collective.

  • le non-réductionnisme : Il s’agit de refuser que le social ne se réduise à des catégories préexistantes. L’activité de description doit être privilégiée et les catégorisations construites a priori sont à considérer avec prudence.

  • la récursivité : Le social est caractérisé par son instabilité et le point de départ de toute recherche s’inscrit donc dans l’analyse de ce qui est en redéfinition et en transformation. L’objet d’étude privilégié n’est donc pas ce qui est stabilisé, mais au contraire ce qui est source de controverse.

  • la réflexivité : La démarche sociologique se veut modeste au sens où le chercheur n’est pas en position surplombante vis-à-vis des individus qu’il étudie. La capacité de réflexivité des acteurs et leur faculté à donner du sens à leurs actions est à prendre en considération.

  • 2 On pense notamment à des territoires importants où interagissent de nombreux acteurs, sportifs et n (...)

4L’analyse des sports de nature à partir de la sociologie de l’acteur-réseau est une perspective de recherche relativement récente nous pouvons brièvement en retracer la genèse. Les concepts de l’ant n’ont été utilisés que tardivement pour décrire l’évolution des sports de nature et ont été mobilisées au départ selon une approche que l’on peut qualifier d’organisationnelle. Dans un premier temps, l’analyse a surtout porté sur les sports de nature comme phénomène organisationnel à part entière (Mounet, 2000). L’approche organisationnelle (Friedberg, 1993) a ainsi permis de mettre en évidence le fait que, contrairement aux idées reçues en la matière, les sports de nature étaient sortis de leur phase de développement anarchique et posaient des problèmes concrets. Pour ne prendre qu’un exemple, Perrin (2003) a bien montré que le développement d’une activité comme le canyoning sur un territoire engendre des problèmes collectifs qui peuvent porter sur la commercialisation de l’activité, l’aménagement et l’équipement des sites, ou sur l’organisation des secours. Chaque site de pratique se structure comme un ordre local (Friedberg, 1993) dont le fonctionnement est contingent. Pour Mounet et al. (2012), cette approche a été pertinente pour expliquer les puissants conflits qui ont caractérisé les sports de nature dans leur phase embryonnaire mais elle touche actuellement à ses limites compte tenu du degré de maturité que ces sports ont atteint. Les principaux écueils portent sur la difficulté d’une part, à appréhender des espaces d’actions complexes2 et d’autre part, à penser la coopération entre acteurs autrement que sous une forme conflictuelle. Afin de résoudre ce problème analytique, l’ant a été mobilisée dans une perspective d’hybridation théorique, dans la continuité de l’approche organisationnelle de l’action collective, puisque comme le soulignent Amblard et al. (1996), il existe des approches complémentaires au corpus théorique classique.

Les innovations dans les sports de nature comme principe de récursivité

5L’analyse des sports de nature par l’ant a tendance à privilégier les changements et les transformations sociales comme point de départ à l’investigation sociologique. Adopter cette perspective ne signifie pas se positionner contre les approches déterministes qui privilégient dans l’analyse des sports de nature ce qui est stable, comme le recrutement social par exemple. Ce n’est pas non plus considérer que chaque petite évolution dans les pratiques peut avoir un pouvoir de transformation considérable, car il convient bien sûr de tenir compte de la célèbre mise en garde de Passeron (1987) face à la prolifération du « nouveau » comme concept sociologique. Enfin, l’objectif n’est pas non plus d’aborder ces activités sous l’angle d’une quelconque contre-culture (Loret, 1995) parce qu’en analysant la trajectoire de ces sports, on observe inéluctablement une marche vers l’institutionnalisation, la sportivisation et la marchandisation de ces activités.

6L’approche par l’ant présente le mérite de s’intéresser aux innovations, qui sont au cœur de la dynamique de développement des sports de nature (Bessy et Hillairet, 2002) et qui sont à appréhender, non pas comme un phénomène de révolution, mais davantage comme un processus de transformation (Akrich, 2006a). L’innovation n’est en effet pas linéaire, elle s’inscrit dans le temps tout en étant le fait de ruptures, c’est-à-dire de réussites mais aussi d’échecs (Akrich, Callon et Latour, 2002). Dans les sports de nature, la dynamique d’innovation peut reposer sur différents processus (qui le plus souvent s’imbriquent) :

  • une innovation sportive qui renvoie à la création d’activités sportives nouvelles par différenciation, hybridation, réapparition ou éventuellement par invention (Mounet, 2000).

  • une innovation spatiale puisque l’activité nouvelle doit, pour exister, s’imposer sur un territoire car elle ne remplace pas un autre sport mais vient s’ajouter à une offre déjà structurée, ce qui engendre le plus souvent une concurrence spatiale forte entre les activités.

  • une innovation technologique qui a des conséquences sur l’accessibilité de l’activité, la commercialisation, les techniques corporelles, les normes (Boutroy, Vignal et 2015), et qui fait également l’objet de résistances (Trabal, 2008).

  • une innovation entrepreneuriale qui permet la mise en marché des innovations précédemment évoquées, de produire une interface avec le consommateur potentiel, etc.

7L’exemple de l’escalade permet d’illustrer cette approche de l’innovation. L’avènement de l’escalade libre a été le révélateur de changements culturels qui se sont opérés dans les années 1960 et 1970, et la lutte au sein du champ de l’alpinisme pour la définition légitime de la pratique, a débouché sur une sportivisation de l’activité et sur la définition de critères symboliques précis (Aubel, 2005 ; Gloria et Raspaud, 2006). Sans renier le rapport particulier que les grimpeurs entretiennent à la fois à la pratique mais aussi aux autres sportifs (De Léseleuc, 2004 ; Corneloup, 1993) et donc le rôle important des facteurs culturels propres à l’activité, il faut toutefois aussi tenir compte des perpétuelles innovations qui ont égrainé la pratique dans le temps pour in fine la renouveler en profondeur. Ainsi, les transformations technologiques ont amélioré continuellement les techniques de grimpe les rendant plus efficaces, que l’on pense à l’invention puis à l’amélioration continue des chaussons d’escalade (gomme, forme, etc.), à l’évolution des cordes, à la transformation des systèmes d’assurage (et donc des techniques de sécurité), aux dégaines, aux baudriers, etc. C’est bien une multitude de petites transformations technologiques qui, portées par des réseaux et par des mécanismes de traduction, sont parvenues à s’imposer pour faire pleinement partie de la pratique au prix de controverses parfois importantes. Akrich (2006a) s’est intéressée à l’escalade en soulignant qu’il s’agissait d’une activité qui a évolué très rapidement sous l’effet d’une multitude d’innovations, et en se focalisant plus spécifiquement sur le développement des techniques d’entraînement et notamment sur la création de matériels améliorant les performances des grimpeurs. La sociologue décrit ainsi les petites transformations qui se sont opérées dans les technologies liées à l’entraînement (poutre en bois, pan, prises en résine, etc.), et qui ont permis une amélioration considérable des performances, en imposant un modèle d’escalade en intérieur qui deviendra le modèle compétitif. Akrich (2006a, 264) explique enfin qu’en matière d’innovation, « un outsider a bien peu de chances de s’imposer, car il lui faudrait maîtriser intellectuellement la technique de l’escalade et comprendre les articulations entre les pratiques individuelles et la définition de la discipline et de ses pratiquants. De fait, les innombrables innovations de la période sont, si ce n’est toutes, du moins en grande partie, dues à des innovateurs-utilisateurs ». Le rôle des pratiquants (et donc des usagers) est ainsi souvent déterminant dans la réussite d’une innovation, comme l’a montré Von Hippel (2006). Les innovations n’ont cependant pas seulement concerné l’escalade de haut-niveau. L’une des controverses majeures a également porté sur l’aménagement du milieu naturel, et notamment sur l’équipement des voies d’escalade en extérieur. Fallait-il aménager le milieu en permettant aux grimpeurs d’évoluer dans un milieu plus aseptisé mais plus sécurisé, ou était-il au contraire nécessaire de limiter l’intervention humaine dans l’équipement des voies au risque de renforcer l’engagement corporel dans la pratique ? Cette controverse a très régulièrement resurgi dans les débats et n’est pas encore stabilisée comme l’a montré Borgnet (2013) avec les conflits de rééquipement du massif du Caroux dans le sud de la France.

Symétriser les sports de nature : la place des non-humains dans les controverses sportives

  • 3 On pense à différentes études devenues des classiques de l’ant comme celle de Callon (1986) sur la (...)

8L’un des principaux apports de la théorie de l’acteur-réseau a été de démontrer que la réalité sociale n’est pas uniquement composée d’humains mais que les entités non-humaines participent pleinement à l’action collective. Certaines études devenues des classiques de l’ant ont ainsi montré que les non-humains pouvaient jouer un rôle inattendu en transformant les interactions sociales et en bousculant la séparation classique entre sujets et objets3. Il ne s’agit pas de dire que les non-humains agissent comme des acteurs stratégiques, mais plus simplement d’affirmer que les objets transforment le cours d’une action et participent à de nouvelles associations avec les humains : « nous devons accepter le fait que la continuité propre au déroulement d’une action sera rarement faite de connexions d’humain à humain […] ou d’objet à objet, mais se déplacera probablement en zigzaguant des humains aux non-humains » (Latour, 2006, 108). Pour Latour (1991), le « Grand partage » a cloisonné humains et non-humains dans un dualisme que la pratique vient contredire jour après jour, et l’application du principe de symétrie doit permettre une analyse plus objective de la réalité sociale.

  • 4 Pour une présentation des évolutions de la terminologie en la matière, du plein air aux Activités P (...)

9L’usage extrêmement répandu du terme de « sports de nature » n’est pas une manière neutre de catégoriser les activités sportives4 et il contient en lui-même cette distinction entre la culture et la nature. L’étude des sports de nature s’avère être en réalité une invitation à l’intégration du principe de symétrie généralisée, afin d’interroger la pertinence d’un dualisme constitutif de la pensée moderne. En effet, comment l’observateur pourrait-il considérer les sports de nature comme ne relevant que du social ? Comment continuer à séparer une culture multiple dont le sport serait l’un des reflets, d’une nature unifiée ? L’hybridité même des sports de nature oblige l’observateur à redéfinir ces contours fluctuants (Rech et Mounet, 2014). La réalité de fonctionnement de ces activités soulève des questions et des problèmes qui n’appartiennent pas de manière tranchée à la nature ou au social mais précisément aux deux, notamment lorsque l’on s’intéresse aux controverses que ces activités engendrent. Les controverses environnementales sont actuellement très nombreuses et portent par exemple sur l’impact de la pratique sur le milieu naturel ou sur les aménagements à réaliser pour développer ces pratiques. Comme le souligne Mounet (2007a, 164), « l’évaluation de l’impact environnemental des sports de nature conduit à une incertitude scientifique et renvoie donc fondamentalement aux intérêts et aux valeurs de chacun des protagonistes en présence ». Les controverses environnementales présentent ainsi certaines caractéristiques des forums hybrides (Callon et al., 2001), obligeant les acteurs à trouver des solutions pour coopérer, confrontant les savoirs profanes et les connaissances scientifiques sur un même sujet, explorant les possibilités de construction d’un monde commun dans lequel les non-humains ont une place à part entière. Ces controverses, parfois très conflictuelles, ont l’avantage de transformer les modalités de gestion des pratiques sportives comme de l’environnement pour prendre en compte les activités humaines et non-humaines, dans ce que l’on pourrait appeler une gestion hybride du sport et de la nature (Rech et Mounet, 2014).

10Lorsque l’on tente de comprendre l’organisation des sites support d’activités sportives de nature, le principe de symétrie (Callon, 1986) semble ainsi s’imposer et l’enquête doit tenir compte à la fois des faits de nature et des faits de société, puisque la réalité même est faite de ces déplacements. L’anthropologie symétrique (Latour, 1991) des sports de nature doit précisément éviter d’opposer dos à dos le sport et la nature, comme on sépare dans la tradition moderniste la société et la nature. Il s’agit au contraire dans une perspective « non-moderne » de considérer les collectifs en train de se former et composés systématiquement d’humains et de non-humains. Comme l’explique Akrich, (2006b, 178), « les objets techniques peuvent être considérés comme des instruments politiques forts : dans le même temps qu’ils produisent des modes d’organisation sociale, ils les naturalisent, les dé-politisent, leur confèrent un contenu autre ». Ainsi, les sports de nature n’ont rien de purement culturel (comme le pensent certains sociologues), ni de purement naturel (comme le croient certains pratiquants en quête d’une hypothétique nature sauvage), mais se structurent en collectifs qui renvoient à une forme d’organisation sociale tout à fait contingente dont les non-humains ont pleinement leur part. Par exemple, étudier l’organisation des stations de sports d’hiver et les politiques touristiques hivernales, c’est précisément analyser des collectifs d’humains et de non-humains qui se forment et se défont au gré des innovations, des changements et des controverses qui s’y produisent. Les controverses peuvent être multiples et porter par exemple sur l’adaptation des stations face aux transformations climatiques. Ces dernières font l’objet de certitudes scientifiques mais également d’incertitudes politiques fortes pour redéfinir l’action publique face à la raréfaction d’un non-humain : la neige. Il peut s’agir également de controverses liées plus directement à l’aménagement de la montagne, comme un projet de création d’une nouvelle remontée mécanique, qui face aux arguments économiques des aménageurs se verra opposer des arguments environnementaux par les contestataires (impact du ski sur telles espèces menacées, diminution des espaces montagnards vierges, etc.). Les exemples ne manquent pas pour illustrer le fait que dans les sports de nature, les controverses mettent en scène des acteurs qui se mobilisent pour une cause, mais qu’au cœur de ces controverses se trouve une multitude de non-humains qu’il n’est pas possible d’ignorer. En réalité, il ne s’agit pas de considérer les humains comme des médiateurs et les non-humains comme des intermédiaires, mais bien de voir les humains et les non-humains comme de potentiels médiateurs produisant des déplacements (Latour, 2006). L’analyse symétrique est ainsi une exigence méthodologique qui doit permettre de mieux saisir comment les sports de nature renouvèlent perpétuellement leurs formes d’organisation en agrégeant des entités nouvelles et hétérogènes.

L’importance des réseaux socio-techniques dans le développement des sports de nature

  • 5 L’acronyme mice correspond au secteur du tourisme d’affaires et signifie « Meetings, Incentives, Co (...)

11La prise en compte de la « socialisation des objets » (Callon, Ferrary, 2006) permet de se démarquer d’une analyse des réseaux purement sociaux, pour se focaliser sur les réseaux socio-techniques. Dans cette perspective, un réseau n’est plus seulement un agrégat d’humains mais il est fondamentalement hybride et hétérogène, c’est-à-dire composé d’entités humaines et non-humaines. Ces dernières années, plusieurs études consacrées aux sports de nature se sont inspirées de cette démarche pour montrer que les controverses ou les innovations autour de ces activités participaient à créer ou à redéfinir des réseaux socio-techniques (i.e. Rech, 2010 ; Haye, Mounet, 2014 ; Boutroy et al., 2015). Nous avons par exemple montré comment les changements conjoncturels et structurels affectant une petite station de sports d’hiver du Vercors participaient à reconfigurer les collectifs et donc les réseaux-socio-techniques par la difficile création de nouveaux espaces sportifs (Rech, Mounet et Briot, 2009). Paget, Mounet et Dimanche (2010) ont quant à eux expliqué, à partir de l’étude monographique d’une entreprise en forte croissance située dans une station de sports d’hiver, l’importance de la mise en réseau d’actants lors de la conception et de la mise en marché de nouveaux produits dans le secteur des mice5, ainsi que le rôle nécessaire de traducteur que doit jouer notamment l’entrepreneur pour parvenir à imposer les nouveaux produits. Dans le secteur de l’événementiel sportif, Corneloup et Obin (2011) ont montré la transformation du système d’acteurs autour du développement en réseau des « Natural Games » de Millau dans le sud de la France, qui en quelques années a connu une croissance importante en devenant un événement sportif pluriel (activités sportives, concerts, village et démonstrations, etc.) grâce à des mécanismes de traduction qui ont permis de formaliser des accords entre les acteurs. Un autre sillon complémentaire a été creusé au travers de l’analyse des innovations liées au matériel sportif en se centrant, dans une perspective diachronique, sur les étapes et le long cheminement qui permet de voire éclore l’innovation, au prix de multiples déplacements. Ces études se sont par exemple intéressées à la conception et à la mise en marché de matériels très légers pour l’alpinisme (Soulé, Lefèvre, 2015), ou encore à l’invention puis la commercialisation de bâtons télescopiques pour la randonnée (Hallé, Vignal, Soulé, 2016). Une étude particulièrement heuristique a porté sur les innovations liées à l’émergence d’une activité nouvelle à forte dimension technologique : le kitesurf (Boutroy, Soulé, Vignal, 2014). Les auteurs ont bien montré que le développement important de ce sport dans les années 2000 ne résidait pas (que) dans le génie des inventeurs du matériel, mais plutôt dans la mobilisation d’un réseau socio-technique très limité au départ, puis grossissant au fur et à mesure en intégrant, par des mécanismes de traduction, de nouveaux matériaux (le kevlar), de nouvelles inventions (les bouées, etc.), des utilisateurs pionniers, des structures commerciales, des collectivités locales, une fédération sportive, etc. C’est donc bien un réseau socio-technique qui se dessine et qui porte l’innovation pour la rendre possible. Qu’il s’agisse d’innovation matérielle, d’innovation territoriale, d’innovation événementielle ou d’innovation de service sportif, l’apport heuristique de l’ant réside d’une part, dans le fait de ne pas chercher à naturaliser l’innovation et d’en montrer le caractère construit et contingent, et d’autre part, dans la description fine des agencements d’acteurs et de non humains, qui vont contribuer parfois à la réussite mais aussi potentiellement à l’échec de l’innovation.

Les politiques du sport et de la nature : vers une démocratie dialogique ?

  • 6 On peut également se reporter à l’article de Latour (2008) pour une présentation approfondie de cet (...)

12Le succès des concepts de « traduction » et d’« acteur-réseau » est indéniable mais a tendance à occulter d’autres pistes théoriques qui ont été explorées dans le cadre de l’ant. L’une de ces pistes, apparue en réalité très tôt dès les premières études sur les sciences studies, consiste à explorer les liens qui existent entre le politique et le scientifique. Latour (1999) a en effet montré que la séparation en deux domaines distincts de la science et de la politique, était une construction artificielle6 et qu’il était nécessaire de réfléchir aux modalités de démocratisation de la science. Cette réflexion sur le rôle des controverses dans le renouvellement démocratique est particulièrement féconde pour saisir comment la science peut sortir de son confinement et comment la politique peut devenir une manière de composer un monde commun (Latour, 1999). Concernant les sports de nature, cette proposition théorique apparaît très heuristique puisque pendant de nombreuses années, la gestion de ces activités a été cloisonnée en deux univers distincts : les experts (scientifiques, gestionnaires, conservateurs, etc.) avaient pour mission d’observer, d’étudier, de mesurer les évolutions du milieu naturel face à des activités de loisir qui inéluctablement se massifiaient ; et les politiques (Ministère des sports, collectivités locales, fédérations sportives, etc.) qui avaient quant à eux pour mission de légiférer, de réglementer, d’organiser et de structurer des activités qui prenaient le milieu naturel comme terrain de sport. Seule la prolifération de controverses (environnementales, scientifiques, touristiques) a permis de faire comprendre que cette gestion dualiste du sport et de la nature n’était plus tenable et qu’il fallait inventer de nouvelles formes de convocation de collectifs hybrides. Différents d’exemples montrent que la multiplication des controverses oblige actuellement à repenser les modalités de prise en compte de ces activités pour sortir de la gestion dualiste et mettre en œuvre une politique globale. C’est par exemple le cas lorsque le tétras-lyre est menacé de disparition par la divagation des pratiquants de ski de randonnée, lorsque l’équipement de nouvelles voies d’escalade sur une falaise dérange le gypaète barbu, lorsque des requins s’aventurent sur de nouveaux territoires de chasse et menacent les surfeurs sur des spots très fréquentés, ou encore lorsqu’un projet d’extension d’une station de sports d’hiver menace une tourbière. Du fait des enjeux environnementaux, économiques, touristiques, sécuritaires qui entourent les sports de nature, et du fait de leur caractère intrinsèquement hybride, il s’agit donc bien d’étudier comment se dessine non pas une politique mais une cosmopolitique (Stengers, 2007 ; Latour, 2004, 2007 ; Lolive et Soubeyran, 2007) du sport et de la nature.

13Dans le prolongement des Politiques de la nature de Latour (1999), Callon et al. (2001) ont proposé une approche théorique permettant de mieux cerner la manière dont les controverses sociotechniques transforment en profondeur notre modèle démocratique. Ils ont montré que des situations de forte incertitude (où la science n’arrive pas encore à cerner et expliquer clairement le problème) font émerger des « forums hybrides », c’est-à-dire des espaces où différents acteurs, aux positions parfois antagonistes, échangent sur la pertinence des choix effectués. Ces forums sont dits hybrides car s’y trouvent associés des scientifiques, des profanes et des élus, mais aussi une multitude de non-humains souvent au cœur de ces controverses. En s’interrogeant sur le rapport complexe entre science, politique et citoyenneté, Callon et al. (2001) avancent l’idée que les forums hybrides permettent d’une part, une nouvelle répartition des rôles entre chercheurs traditionnels et profanes, et d’autre part, une redéfinition des rapports d’autorité entre représentants élus et simples citoyens. Les délégations classiques se réduisant, la démocratie dite représentative laisse place à une démocratie dialogique. Cette approche se prête particulièrement bien à l’analyse des sports de nature où la notion d’incertitude est très présente du fait qu’ils se transforment rapidement et se déploient dans des environnements eux-mêmes changeants. Leur gestion renvoie ainsi le plus souvent à une prise en compte des incertitudes, qu’il s’agisse de l’impact environnemental des activités, des aménagements à opérer, des changements climatiques, des innovations technologiques, etc. L’analyse des forums hybrides a donc l’avantage de questionner la manière dont les individus construisent des espaces de vie commun, la façon dont s’articulent la science et le politique, et surtout, la place qu’occupent les simples citoyens. L’exemple le plus explicite porte certainement sur la controverse actuelle concernant l’avenir du tourisme sportif hivernal. Les choix politiques concernant l’avenir des stations de sports d’hiver sont scrutés et systématiquement attaqués au regard des connaissances scientifiques poussées sur la réalité du changement climatique. La science n’est dans ce cas plus confinée mais mobilisée tous azimuts par les aménageurs et les décideurs, comme par les opposants à ces politiques touristiques. Par ailleurs, ces débats ne sont pas seulement l’apanage des porte-parole classiques (associations sportives, environnementales ou d’usagers), mais laissent une part croissante à ceux que Callon et al. (2001) nomment les citoyens ordinaires, qui se regroupent, se structurent et se mobilisent pour faire entendre leurs voix. Ainsi, cette perspective théorique est particulièrement intéressante pour cerner les enjeux contemporains liés à la gestion des sports de nature, en permettant de saisir les nouvelles formes d’organisation qui émergent de ces controverses, et qui impliquent tout autant des scientifiques que des profanes, des élus que des citoyens ordinaires. Cette démocratie dialogique (Callon et al., 2001), qui redéfinit l’expertise et l’autorité en inventant de nouveaux espaces de débats, est au cœur des démarches de concertation dans les sports de nature (Mounet, 2007b).

L’essor d’un marché des sports de nature et le développement des agencements marchands

14Une autre dimension de l’ant, moins connue en France, s’est intéressée à la sociologie économique et plus particulièrement à la manière dont se constituent les marchés. La démarche a consisté par exemple à étudier l’économie, en tant que discipline scientifique incluant différents domaines du management (marketing, finance, etc.), pour saisir comment celle-ci participe à « formater les marchés et les agents économiques » (Callon, 2006, 276). La démarche a surtout consisté à dénaturaliser la notion de marché, pour en montrer le caractère fondamentalement hybride et infiniment plus complexe qu’une simple interface entre l’offre et la demande. Callon (2013, 346) a ainsi introduit la notion d’agencements marchands pour saisir le caractère instable et innovant des marchés, et permettre de suivre les « étapes de l’action marchande : profiler des biens et des agents, les attacher, obtenir le consentement à payer et faire payer ». Une perspective de recherche particulièrement stimulante se dessine ainsi pour saisir comment les sports de nature font l’objet d’une mise en marché et mieux comprendre les trajectoires de commercialisation des biens mais aussi des services dans ce secteur. Corneloup (2005) a mis en évidence la spécificité du marché des loisirs sportifs de nature et a insisté lui aussi sur la nécessité de sortir d’une approche économique classique pour appréhender le marché dans toute sa complexité. Par ailleurs, l’approche de Callon (2013) est stimulante car elle permet de prendre en compte les différents versants du marché alors que trop longtemps, l’analyse des sports de nature a impliqué de faire un choix entre l’étude de l’offre ou de la demande. Mais ce cloisonnement nécessite d’être dépassé car les sphères de l’offre et de la demande s’entremêlent et s’ajustent en permanence. Si l’on considère l’émergence d’une activité comme le Stand Up Paddle (sup) sur le littoral, c’est à la fois l’émergence d’une nouvelle pratique qui génère un attrait pour un nouveau public et se diffuse socialement, mais aussi une offre qui se structure autour de nouveaux biens (équipements, planches, pagaies, etc.) mais aussi de nouveaux services (cours de SUP, événementiel, etc.). Ce marché en plein essor ne peut cependant plus être considéré comme simplement le lieu d’une confrontation d’offres et de demandes, au sein duquel des produits sont proposés. Ces nouveaux produits, en tant qu’entités non-humaines (Latour, 2006), jouent un rôle structurant et permettent de qualifier ce marché. Il s’agit ainsi, pour l’exemple du sup comme pour toute autre innovation sportive, de comprendre comment l’activité et donc les produits associés produisent des agencements socio-techniques, articulant en permanence des biens, des services, des acteurs nouveaux, des outils managériaux (marketing, etc.), des politiques publiques, etc. L’enjeu est donc de suivre le processus de mise en marché de ces activités sportives et de saisir comment des ajustements permanents s’opèrent. L’existence de règles, de conventions, de dispositifs est nécessaire car c’est ce qui permet au marché de fonctionner et de perdurer, mais c’est aussi ce qui est en permanence redéfinit par les acteurs impliqués. Si cette approche par les agencements a déjà été mobilisée pour analyser un cas d’innovation technologique dans le domaine du ski (Cochoy, 2016), il serait pertinent de l’étendre à l’étude d’autres domaines notamment celui des services sportifs et touristiques.

15Pour illustrer cet aspect, l’exemple de la randonnée pédestre peut être proposé. Cette activité est particulièrement intéressante car elle est à la fois très ancienne (De Baecque, 2014) mais connaît actuellement des évolutions et des changements importants. Il s’agit d’une activité omniprésente dans l’offre touristique des destinations. L’attractivité des territoires dépend de leur capacité à mobiliser un grand nombre d’acteurs hétérogènes (opérateurs publics, privés, associatifs, citoyens, visiteurs, randonneurs, etc.) et la randonnée pédestre est au cœur de ces processus. Elle est mobilisée pour séduire les visiteurs et les « attacher » (Callon, 2013) au territoire, et apparaît comme une des stratégies déployées par les destinations touristiques pour faire face à la concurrence et s’en démarquer. Cependant, appréhender la mise en marché de l’activité s’avère complexe car elle n’est pas spontanément perçue comme une activité marchande. Elle utilise en effet le plus souvent des biens libres (les sentiers de randonnée gratuits), mais cela ne signifie pas pour autant qu’elle ne comprenne pas une dimension marchande. Une pluralité d’agencements marchands s’observe à la fois dans le domaine des équipements (matériels, chaussures, sacs à dos, etc.), mais aussi dans le développement de services sportifs (voyages de randonnée, visite et accompagnement au sein des destinations, applications mobiles, etc.), ou encore dans les aménagements proposés et structurés par des acteurs publics (collectivités) ou privés (fédération sportive) et qui peuvent même devenir des marques, comme par exemple les gr® (sentiers de Grande Randonnée). L’activité fait donc bien l’objet d’une mise en marché et les collectivités développent autour d’elle des stratégies de « captation des publics » (Cochoy, 2004). L’émergence de la « randonnée pédestre numérique » est intéressante de ce point de vue et correspond par exemple à l’accès numérique à l’information pour randonner (applications mobiles, sites Internet, blogs, forums, etc.). De nombreux territoires cherchent à innover en développant une offre touristique dans ce domaine. Mais il est intéressant de mettre en question la notion d’innovation afin de saisir dans quelle mesure les nouveaux dispositifs développés autour de la randonnée, notamment en matière de numérique, s’inscrivent dans un réel processus d’innovation au sens de Latour (2006) permettant de mobiliser des acteurs hétérogènes autour d’un territoire. L’approche sociologique des marchés développée dans le prolongement de l’ant présente ainsi l’intérêt de prendre en compte le marché dans toutes ses dimensions, en appréhendant la multiplicité et la diversité des acteurs engagés dans la formation du marché, le rôle des dispositifs techniques et la dynamique des agencements marchands.

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Notes

1 L’ouvrage de Tollis et al. (2014), qui porte spécifiquement sur le travail de Bruno Latour et sur la manière dont des doctorants d’horizons disciplinaires différents se sont emparés de ses travaux, met bien en évidence ces évolutions conceptuelles et les hybridations théoriques (et disciplinaires) possibles autour de l’ant.

2 On pense notamment à des territoires importants où interagissent de nombreux acteurs, sportifs et non sportifs.

3 On pense à différentes études devenues des classiques de l’ant comme celle de Callon (1986) sur la domestication des coquilles Saint-Jacques à Saint-Brieuc, celle sur l’invention du vaccin par Pasteur (Latour, 1984) ou encore l’étude de l’échec d’une innovation technologique à travers l’exemple du métro Aramis (Latour, 1992).

4 Pour une présentation des évolutions de la terminologie en la matière, du plein air aux Activités Physiques de Pleine Nature (appn) puis à l’avènement des sports de nature, on peut se référer à l’article de Bessy et Mouton (2004).

5 L’acronyme mice correspond au secteur du tourisme d’affaires et signifie « Meetings, Incentives, Conventions, Events ».

6 On peut également se reporter à l’article de Latour (2008) pour une présentation approfondie de cette épistémologie politique.

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Pour citer cet article

Référence papier

Yohann Rech et Élodie Paget, « Saisir les transformations des sports de nature par la théorie de l’acteur-réseau »Sciences de la société, 101 | 2017, 48-63.

Référence électronique

Yohann Rech et Élodie Paget, « Saisir les transformations des sports de nature par la théorie de l’acteur-réseau »Sciences de la société [En ligne], 101 | 2017, mis en ligne le 24 mai 2019, consulté le 11 septembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/sds/6137 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/sds.6137

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Auteurs

Yohann Rech

Maître de conférences à l’ufr staps de l’université Rennes 2 et membre du laboratoire vips2 (campus La Harpe, av. Charles-et-Raymonde-Tillon, cs 24414, 35043 Rennes cedex), menant ses recherches sur l’organisation et la gestion des espaces de loisir sportif et des sites touristiques.
yohann.rech[at]univ-rennes2.fr

Élodie Paget

Maître de conférences à l’ufr staps de l’université Rennes 2 et membre du laboratoire vips2 (campus La Harpe, av. Charles-et-Raymonde-Tillon, cs 24414, 35043 Rennes cedex), menant ses recherches sur le marché du sport et du tourisme, s’intéressant plus particulièrement aux tpe prestataires de sport et de tourisme ainsi qu’aux problématiques inhérentes à l’organisation du tourisme sportif.
elodie.paget[at]univ-rennes2.fr

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