Petite Ségolène, Les règles de l’entraide. Sociologie d’une pratique sociale
Texte intégral
1Dans le travail de thèse qu’elle publie, Ségolène Petite s’intéresse à une question dont la sociologie anglaise d’abord (dans les années cinquante), française ensuite (dans les années septante) s’est emparée avec un intérêt croissant : celle de la solidarité au sein des familles et des réseaux de relations.
2L’A. veut mettre au jour « les principes qui sous-tendent les solidarités interpersonnelles » (p.19) : quels types d’acteurs, au sein de quelles relations, accepteraient de céder une partie de leurs ressources et pour quelles « bonnes raisons » (pour reprendre Boudon, qu’elle cite) ?
3C’est dans une perspective chère à l’individualisme méthodologique que l’A. va en effet aborder le problème, en sachant, au départ de la théorie des choix rationnels, élargir de façon équilibrée le questionnement pour y inclure aussi bien les attentes de rôles, très normatives en particulier en ce qui concerne la famille, que la façon dont certaines modalités de relations – qualifiées d’ « ouvertes », où l’on retrouvera davantage les relations amicales – permettent une co-construction de règles propres à chaque relation dans son histoire singulière.
4Par un questionnaire soumis à 198 individus de la région lilloise, l’A. va ainsi tenter une évaluation de ce qu’ils identifient comme leur réseau, pour ensuite les soumettre à une série de scénarios permettant de dégager, d’une part leur définition des « devoirs idéaux d’entraide » (p.53, chap.2), d’autre part les choix d’aidants qui seraient les leurs selon les circonstances (chap.3), en se centrant enfin sur deux situations exemplaires (chap.4), celle du partage de l’aide requise par les personnes âgées dépendantes, celle du soutien émotionnel. Sans porter, comme la plupart des études du champ, sur les aides effectivement données et reçues mais bien sur les choix déclarés à propos des scénarios proposés, l’étude confirme un certain nombre de faits bien établis, comme la force de l’obligation de soutien entre parents et enfants, plus faible lorsqu’il s’agit des frères et sœurs, ou le caractère massivement féminin associé au rôle d’aidant. Elle affine ces résultats de façon intéressante en prenant en compte les proximités et les différences entre les milieux sociaux.
5On peut regretter, au terme du parcours, que la portée spécifique de cette étude sur le monde contemporain soit peu élaborée. Au-delà de la réflexion théorique qu’elle permet sur la façon dont s’articulent préférences individuelles et régulation sociale, on aurait aimé que s’y réfléchissent davantage les enjeux de la force de cette entraide, en lien, par exemple, au type de solidarité qu’institue l’État-providence, ou aux tensions propres à l’individualisme.
Pour citer cet article
Référence papier
Natalie Rigaux, « Petite Ségolène, Les règles de l’entraide. Sociologie d’une pratique sociale », Recherches sociologiques et anthropologiques, 39-1 | 2008, 196.
Référence électronique
Natalie Rigaux, « Petite Ségolène, Les règles de l’entraide. Sociologie d’une pratique sociale », Recherches sociologiques et anthropologiques [En ligne], 39-1 | 2008, mis en ligne le 03 mars 2011, consulté le 10 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rsa/437 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/rsa.437
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