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Un texte épigraphique à attribuer à Jean Boudou : la plaque de Canet-d’Olt (Aveyron) à la mémoire du lexicographe rouergat Aimé Vayssier (1965)

Jean-Pierre Chambon et Jean Thomas
p. 449-458

Texte intégral

  • 1  Roques Ferraris (2020, 578), dans son livre très bien documenté, évoque cette plaque sans en faire (...)

1Les lignes suivantes se proposent d’accroître l’inventaire des proses boudouniennes d’une pièce de circonstance (non signée) que nous n’avons vue répertoriée nulle part au compte de Jean Boudou. Il s’agit du texte d’une inscription à la mémoire du lexicographe rouergat Aimé Vayssier, texte rédigé en 1965, puis gravé (par Lucien Girma) sur une plaque dévoilée la même année à Canet-d’Olt (Aveyron1).

  • 2  Depuis 1962, le Grelh Rouergat célébrait une fête annuelle le 8 août, à la Saint-Justin (en hommag (...)
  • 3  Section de la commune de Saint-Laurent-d’Olt, canton de Campagnac, arrondissement de Millau (Aveyr (...)
  • 4  Chef-lieu de canton, arrondissement de Rodez (Aveyron).
  • 5  Selon Truel (1875, viii) et Barthès (1985, 110), Vayssier serait mort le 27 août 1875, à Recoules- (...)
  • 6  Sur Vayssier, voir Truel (1875) et Barthès (1985, 110-113). Wartburg (1934, 105) indique que le Di (...)
  • 7  Ces préparatifs sont évoqués dans douze lettres, du 22 mai au 2 août 1965. Après la fête, Boudou r (...)

21. L’organisation de la fête annuelle de la société félibréenne Lou Grelh Rouergat célébrée le 8 août 19652 à Canet-d’Olt3 et à Saint-Geniez-d’Olt4 fut pour Jean Boudou l’occasion de déployer une grande activité. Étant sur place — il résidait depuis 1955 à Saint-Laurent-d’Olt —, Boudou joua un rôle prépondérant dans la préparation de la fête. La journée félibréenne ne fut pas consacrée, cette année-là, à un écrivain de langue d’oc, mais à l’abbé Aimé Vayssier (1821-1874)5, le distingué lexicographe des parlers aveyronnais6. L’essentiel de la manifestation se déroula dans le village natal de Vayssier : Canet-d’Olt. Les préparatifs tinrent une grande place dans la correspondance adressée par Boudou en 1965 à Henri Mouly, fondateur et animateur du Grelh Rouergat (Bodon 1986, 211-233)7.

  • 8  Nous reproduisons fidèlement le texte de l’Armanac Roergat.
  • 9  Bodon 1986, 212.
  • 10  « La lausa : es plan polit, mas es que i a d’argent per la pagar ? E quina soma — se i a d’argent  (...)
  • 11  Joseph Vaylet (1894-1982), d’Espalion, majoral du Félibrige, l’un des fondateurs du Grelh Rouergat
  • 12  Bodon 1986, 217. Voir encore la lettre du 21 juin 1965 (Bodon 1986, 220) qui prévoit que la cérémo (...)
  • 13  Registre des actes d’état civil de Saint-Laurent-d’Olt (consulté sur le site des Archives départem (...)
  • 14  Lettre à Mouly du 23 juillet 1965 : « Girma Lucien, sculpteur, Salo, St Laurent d’Olt (que fa la l (...)

3L’Armanac Roergat de 1965 (p. 21) annonça que, cette année-là, « à la demanda de Joan Boudou, la fèsta del Grelh se fara, lo dimenche, 8 d’agost, à Canet-d’Olt, è St Genièis. Li se rapelarà la memôria de l’abat Vayssier, autor del “Dictiounari Patoès-Français du département de l’Aveyron” paregut chaz Carrèra, à Rodez, en 1879 »8. Le 22 mai 1965, Boudou commence à mettre sur pied l’organisation, d’entente avec Mouly9. Le 12 juin, il est question du financement d’une plaque commémorative ; l’idée de cette plaque ne semble pas venir de Boudou, mais plutôt de Mouly (ou, du moins, être relayée par lui)10. Le 15 juin, Boudou a arrêté le programme de la fête, qui commencera à Canet-d’Olt : messe, « ceremoniá a la memòria de Vaissier davant la lausa », avec discours, « poèmas o dichas pels felibres (Vailet11, etc.) », cabrette (« s’es pas tròp car »), vin d’honneur et fougasse12. Le 23 juillet, la plaque est en cours de gravure. Pour cette tâche, Boudou s’est adressé au sculpteur Lucien Girma, né à Lalo (commune de Saint-Laurent-d’Olt) en 190813, qui résidait alors dans son village natal14.

  • 15  « — La lausa : se poiriá metre sus l’ostal nadiu de Vaissièr. Mas aquel ostal tendrà pas autres ce (...)
  • 16  Bodon 1986, 218 (nous citons le texte des éditeurs anonymes ; nous n’avons pas vu le manuscrit). V (...)

42. Dans sa lettre à Mouly du 15 juin 1965, Boudou, qui n’a pas encore déterminé le lieu précis où sera apposée la lausa15, rédige, en réponse à une question de son maître et ami, le premier jet de l’inscription devant figurer sur la plaque : « Consí metre sus la placa ? Quicòm coma : À la memòria del Canonge VAYSSIER, director de seminari, autor del primièr diccionari roergat-francés16” ».

  • 17  Nous reproduisons fidèlement le texte d’après deux photographies : celle qui figure dans Bedel (19 (...)

5Or, sur la plaque apposée sur un mur de l’église Saint-Pierre de Canet-d’Olt, on pouvait lire les dix lignes suivantes17 :

a la memorio del
Canounge AIMAT VAYSSIER
nascut a canet lou 14.4.1821
4. Baptejat dins aquesto gleiso
Directour de Semenari
Autour del primier dicciounari
Rouergat Francés
8. Aquelo lauso es estado plaçado
lou 8.8.65 pel
(
grillon gravé) Grelh Rouergat

  • 18  Le Dictionnaire patois-français du département de l’Aveyron (Vayssier 1879) est devenu un « diccio (...)
  • 19  Voir ci-dessus n. 15, in fine.
  • 20  Bodon 1986, 225. L’église de Canet-d’Olt dépendait de la paroisse de Saint-Laurent-d’Olt (Bodon 19 (...)

6Il est manifeste que l’essentiel de l’inscription reprend mot pour mot le premier jet épistolaire de Boudou, y compris la félibrisation du titre de l’ouvrage de Vayssier18. C’est aussi Boudou qui est responsable de la ligne 4 (ajoutée) : « Baptejat dins aquesto gleiso ». Il mentionne en effet le lieu de baptême de Vayssier dans une lettre à Mouly du 21 juin 196519, et sa lettre du 28 juin nous apprend qu’il avait l’intention de faire figurer la date de baptême dans l’inscription, mais qu’il ne la connaissait pas encore : « La lausa me’n cargui e i serà. Solament per la comandar me manca la data de baptisme de Vaissier. Lo curat de St Laurenç la cèrca20 » (les recherches du curé n’aboutirent pas, ou trop tard). Le passage que nous venons de citer montre en outre que Boudou a assumé l’entière responsabilité de la plaque commémorative, depuis la première rédaction jusqu’à la commande au sculpteur, sans intervention extérieure.

  • 21  Vayssier 1879, 45 : botejá, batejá ; ALMC 1463, 1464.
  • 22  Voir ci-dessus n. 15, in fine. Boudou écrit de même baptisme dans sa lettre du 28 juin (Bodon 1986 (...)
  • 23  Données de BaTelÒc.
  • 24  Selon Grevisse/Goosse (2008, 770), la suppression des centaines relève de « l’usage familier ».
  • 25  Boudou emploie parfois ce style de datation dans sa correspondance avec Mouly (par exemple : « lo (...)

7À titre d’indice supplémentaire, on peut faire état d’un particularisme graphique : le digramme <-pt-> dans Baptejat (ligne 4), relativement inattendu. Celui-ci ne correspond ni à la forme phonique rouergate (avec [-t-])21 ni à l’orthographe d’Alibert (batejar) ni à celle de Mistral (bateja). Or, dans sa lettre à Mouly du 21 juin 1965, Boudou fait usage du même groupe <-pt-> dans le même mot22. Boudou ne fait usage de ce digramme que par deux fois dans Lo Libre de Catòia (1966) et La Quimèra (1974). Il écrit auparavant « batejar » et « batejalhas » notamment dans les Contes del meu Ostal (1951), les Contes dels Balssàs (1953) et La Grava sul camin (1956)23. On ajoutera que la manière de dater, en chiffres arabes avec abrègement du millésime (ligne 9 : « lou 8.8.65 »), qu’on peut juger peu solennelle dans une inscription24, n’est pas étrangère à Boudou25.

83. Nous pensons, par conséquent, qu’on peut attribuer avec certitude à Boudou la paternité de l’inscription dans sa totalité.

  • 26  Consulté sur le site des Archives départementales de l’Aveyron, le 14 mai 2022.
  • 27  Information correcte dans la notice d’auteur du catalogue de la BnF.
  • 28  Consulté sur le site https://www.filae.com, le 12 mai 2022.
  • 29  L’écart d’un mois entre la date de naissance de Vayssier et celle de son baptême semble peu couran (...)
  • 30  Pèire Vaissièr, né à Canet-d’Olt le 14 avril (1661), puis maître d’école à Durenque (Aveyron), aya (...)

94. Signalons ici que la date de naissance que porte l’inscription (« lou 14.4.1821 », ligne 3), date très probablement reprise par Boudou à la notice de Truel (1875, v), est erronée. D’après le registre des actes d’état civil de Canet-d’Olt26, Jean Jacques Aimé Gilles Vayssier naquit non le 14 avril 1821, mais le 15 mars 182127 à huit heures du matin. Selon l’arbre généalogique dressé par « Ladetaline28 », le 14 avril 1821 (un mercredi saint) est, en revanche, la date du baptême d’Aimé Vayssier, à Saint-Laurent-d’Olt29. Bref, la date que Boudou s’efforçait de connaître était en sa possession sans qu’il le sache. Cet imbroglio explique peut-être que les recherches du curé de Saint-Laurent-d’Olt aient pu rester infructueuses ; il n’est pas certain, en outre, qu’Aimé Vayssier ait été baptisé à Canet-d’Olt. L’affaire pourrait trouver un écho romanesque dans La Quimèra30.

  • 31  Bodon 1986, 221. (Il n’est pas entièrement exclu qu’il puisse s’agir d’une correction normative de (...)
  • 32  Source : BaTelÒc. Selon la même base, Boudou emploie seminari (treize occurrences) dans les Contes (...)

105. Entre le premier jet de la lettre à Mouly et l’inscription telle que Boudou la fit graver, un détail de langue a été modifié : la forme seminari (probablement refaite sous l’influence du français séminaire), que Boudou emploie aussi à deux reprises dans sa lettre à Mouly du 21 juin 196531, a été remplacée par Semenari, conformément à l’usage rouergat tel qu’il avait été enregistré par Vayssier (1879, 581, s. v. semenári) ; c’était bien la moindre des choses. La forme semenari est aussi celle employée par Bessou (1902, 128) et par Boudou lui-même dans Lo Libre de Catòia, peut-être sous l’influence ponctuelle de la découverte du mot dans le Vayssier (publié en 1966, Catòia fut rédigé en 1963-1965)32.

  • 33  Nous admettons (sans preuve, à vrai dire) que la graphie du projet d’inscription n’a pas été indis (...)
  • 34  En 1965, il en allait de même de Mouly (cf. Mouly 1965). Pour Boudou, voir sa lettre du 7 janvier (...)
  • 35  Le caractère épigraphique du texte n’empêche pas l’emploi d’un accent dans Francés (ligne 7). Ce m (...)
  • 36  On remarque aussi que, si le prénom de Vayssier a été occitanisé (Aimat), son nom de famille est l (...)
  • 37  Bessou ne graphie pas le -r des infinitifs ni des substantifs. Toutefois deux éléments déterminent (...)

11Mais surtout, c’est l’ensemble du vêtement graphique qui a été transformé33. En 1965, il y avait plus de dix ans que Boudou s’était converti à la graphie dite classique mise au point par Louis Alibert et promue par l’Institut d’études occitanes34, dont il était un membre actif. Pourtant, le système graphique de l’inscription se distingue très nettement du système alibertin comme de celui de l’École Occitane (Perbosc/Estieu) : [u] est noté <ou> (et non <o>) ; [Ɔ] accentué est noté <o> (et non <ò>) dans memorio (ligne 1)35 ; [-o] inaccentué final des féminins est noté <-o> (et non <-a>)36. On a, en revanche, comme dans la graphie alibertine, <-r> final dans primier (avec une valeur phonétique nulle) ainsi que dans Autour et Directour (lignes 5 et 6)37.

  • 38  Dans son premier livre, Al Cant de l’Alauzeto ou Trento Ans d’Agriculturo en Rouergue, Mouly décla (...)
  • 39  Il est à noter que la plaque à la mémoire du félibre Édouard Galy, dévoilée à l’occasion de la Sai (...)
  • 40  Les deux premières lettres à Mouly dans lesquelles il est question des préparatifs de la journée d (...)

12Boudou opère ainsi un choix apparemment régressif en faveur d’un système de type mistralien qui se rattache presque certainement à Bessou via le premier Mouly38 ; dans un texte visant un public plus large que celui d’une œuvre littéraire, un tel système lui paraissait sans doute plus accessible que la graphie classique39. En pratique et en fonction d’impératifs pragmatiques, Boudou se montre donc favorable à une coexistence entre orthographe savante panoccitane et orthographe populaire rouergate, alors que son adhésion à la graphie d’Alibert est, en théorie, pleine et entière. Cette position est à mettre en rapport avec la double appartenance de l’écrivain à l’Institut d’études occitanes et au Félibrige40.

  • 41  Cf. Bòsc 1987, 41-42.

136. Bilan : L’inscription dédiée à la mémoire d’Aimé Vayssier relève d’un genre textuel dont on ignorait que Boudou l’ait pratiqué à l’occasion. L’inscription elle-même, y compris sa graphie, et les circonstances dans lesquelles elle fut rédigée témoignent de la fidélité indéfectible qui unissait l’auteur de La Santa Estèla del centenari (Boudou 1960) au Félibrige rouergat41.

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Bibliographie

Alibert, Louis, 1965. Dictionnaire occitan-français d’après les parlers languedociens, Toulouse, Institut d’études occitanes.

ALMC = Nauton, Pierre, 1957-1963. Atlas linguistique et ethnographique du Massif Central, 4 vol. , Paris, CNRS.

Barthès, Henri, 1985. « La contribution des prêtres érudits à la linguistique languedocienne », Revue d’histoire de l’Église de France 71 (n° 186 : Des bénédictins érudits aux prêtres régionalistes), 97-114.

BaTelÒc = Basa textuala per la lenga d’Òc, <redac.univ.tlse2.fr/bateloc>.

Bedel, Christian-Pierre, 1993. Campagnac, La Capelle-Bonance, Saint-Laurent-d’Olt, Saint-Martin-de-Lenne, Saint-Saturnin-de-Lenne, Rodez, Mission départementale de la culture.

Bessou, Justin, 1892 [19749]. D’al Brès à la Toumbo, Rodez, Carrère.

Bessou, Justin, 1902 [19697]. Countes de la Tata Mannou, Rodez, Carrère.

Bodon, Joan, 1960. La Santa Estèla del centenari. Conte, Rodez, Subervie.

Bodon, Joan, 1974. La Quimèra, Toulouse, Institut d’estudis occitans.

Bodon, Joan, 1978 [19511]. Contes del Meu Ostal, Toulouse, Institut d’estudis occitans.

Bodon, Joan, 1986. Letras de Joan Bodon a Enric Mouly, Naucelle, Societat dels Amics de Joan Bodon.

Bòsc, Zefir, 1987. « Bodon e lo Felibrige », in : Anatole, Christian (éd.), Jean Boudou (1920-1975). Actes du Colloque de Naucelle (27, 28 et 29 septembre 1985), Béziers, Centre international de documentation occitane, 37-45.

Chambon, Jean-Pierre, 1993. « Le premier document lexicographique sur le français parlé dans l’Aveyron (Vayssier 1879) », Travaux de linguistique et de philologie 31, 91-109.

Grevisse, Maurice et Goosse, André, 2008. Le Bon Usage. Grammaire française, 14e éd., Bruxelles, De Boeck.

Mouly, Henri, 1928. Al Cant de l’Alauzeto ou Trento Ans d’Agriculturo en Rouergue, Rodez, Carrère.

Mouly, Henri, 1965. En tutant lo Grelh, Rodez, Éditions Subervie.

Nauton, Pierre, 1956. « Atlas linguistique et ethnographique du Massif Central (domaine, réseau, questionnaire, but) », Revue de linguistique romane 20, 41-65.

Pedussaud, Miquèl, 2014. Edicion critica de la correspondéncia de Joan Bodon a Robèrt Lafont (1951-1974), mémoire de master II, Université Paul-Valéry – Montpellier III (https://occitanica.eu).

Roques Ferraris, Dominique, 2020. Joan Bodon. Contes populaires et autofictions, Paris, Classiques Garnier.

Truel, Hilarion, 1875. « Notice sur M. l’abbé Aimé Vayssier auteur du dictionnaire patois », in : Vayssier 1879, v-viii.

Vayssier, Aimé, 1879. Dictionnaire français-patois du département de l’Aveyron, Rodez, Carrère (réimpression, Genève, Slatkine Reprints, 1971).

Vialaret, Jérôme, 2012. « Jean Boudou, l’homme qui marche », Littérature en Lagast, cahier 4 (Jean Boudou), 65-76.

Wartburg, Walther von, 1934. Bibliographie des dictionnaires patois, Paris, Droz.

Wartburg, Walther von, Keller, Hans-Erich et Geuljans, Robert, 1969. Bibliographie des dictionnaires patois galloromans (1550–1967), 2e éd., Genève, Droz.

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Notes

1  Roques Ferraris (2020, 578), dans son livre très bien documenté, évoque cette plaque sans en faire connaître le texte, et ne l’attribue pas à Boudou.

2  Depuis 1962, le Grelh Rouergat célébrait une fête annuelle le 8 août, à la Saint-Justin (en hommage au fondateur du Félibrige rouergat, Justin Bessou). Les trois premières Saint-Justin se tinrent à Saint-Rome-de-Tarn (1962), Saint-Sernin-sur-Rance (1963) et La Vinzelle, commune de Grand-Vabre (1964). Voir Mouly 1965, 281-289.

3  Section de la commune de Saint-Laurent-d’Olt, canton de Campagnac, arrondissement de Millau (Aveyron).

4  Chef-lieu de canton, arrondissement de Rodez (Aveyron).

5  Selon Truel (1875, viii) et Barthès (1985, 110), Vayssier serait mort le 27 août 1875, à Recoules-Prévinquières (Aveyron). Mais c’est bien le 27 août 1874 qu’il décéda, comme le prouve l’acte n° 45 du 29 août 1874 dressé à la mairie de Recoules-Prévinquières. C’est aussi cette date qui figure sur la plaque de la sépulture de Vayssier, à Belmont-sur-Rance (Aveyron).

6  Sur Vayssier, voir Truel (1875) et Barthès (1985, 110-113). Wartburg (1934, 105) indique que le Dictionnaire de Vayssier (1879) est un « excellent recueil lexicographique, qui cherche à distinguer les différents sous-dialectes de la région ». Nauton (1956, 46 n. 2 = ALMC 4, 72 n. 1) considère l’ouvrage comme « d’une grande valeur ». Wartburg/Keller/Geuljans (1969, 288) reprennent les considérations de Nauton. Sur le traitement du français régional par Vayssier, voir Chambon 1993.

7  Ces préparatifs sont évoqués dans douze lettres, du 22 mai au 2 août 1965. Après la fête, Boudou reprend contact avec Mouly en ces termes, le 21 août 1965 : « Donc passèrem un brieu que nos escriviàm cada jorn. E ara fasèm pausa. / Espèri pr’aquò que çò que faguèrem a St Genièis e Canet vos agradèt e mai tot foguèsse pas perfièch » (Bodon 1986, 233).

8  Nous reproduisons fidèlement le texte de l’Armanac Roergat.

9  Bodon 1986, 212.

10  « La lausa : es plan polit, mas es que i a d’argent per la pagar ? E quina soma — se i a d’argent — i se pòt metre ? » (Bodon 1986, 215). Les frais seront couverts grâce à une souscription (Bodon 1986, 219, 221, 224).

11  Joseph Vaylet (1894-1982), d’Espalion, majoral du Félibrige, l’un des fondateurs du Grelh Rouergat.

12  Bodon 1986, 217. Voir encore la lettre du 21 juin 1965 (Bodon 1986, 220) qui prévoit que la cérémonie devant la plaque de Vayssier se déroulera de 10 à 11 heures.

13  Registre des actes d’état civil de Saint-Laurent-d’Olt (consulté sur le site des Archives départementales de l’Aveyron). Le registre indique que Girma décéda à Créteil en 1976.

14  Lettre à Mouly du 23 juillet 1965 : « Girma Lucien, sculpteur, Salo, St Laurent d’Olt (que fa la lausa) » (Bodon 1986, 228). « Salo » est évidemment une erreur de lecture des éditeurs anonymes des lettres pour Lalo. La mémoire de l’écrivain et celle du sculpteur ont été associées à Saint-Laurent-d’Olt dans le Musée Jean Boudou et Lucien Girma, mais aujourd’hui, rien ne rappelle plus Lucien Girma dans ce musée.

15  « — La lausa : se poiriá metre sus l’ostal nadiu de Vaissièr. Mas aquel ostal tendrà pas autres cent ans. Donc benlèu seriá melhor de la metre per la paret de la glèisa » (Bodon 1986, 218). L’ostal est loin de posséder, chez Boudou, toute la solidité qui serait désirable en bonne doctrine félibréenne. On ne peut s’empêcher de penser que l’écrivain projette au xxie siècle le constat du narrateur des Contes del meu ostal : « Lo meu ostal se destrantalha coma se destrantalha la mia lenga e coma s’arroïna lo Roèrgue vielh » (Bodon 1978 [19511], 17). Le 21 juin 1965, l’emplacement de la lausa est fixé : « sus la glèisa de Canet ont Vayssier foguèt baptejat » (Bodon 1986, 221).

16  Bodon 1986, 218 (nous citons le texte des éditeurs anonymes ; nous n’avons pas vu le manuscrit). Vayssier fut nommé supérieur du petit séminaire de Belmont-sur-Rance (Aveyron) en 1864 (Truel 1875, vi). Il était chanoine honoraire (Annuaire diocésain 1865, p. 77 ; aimable communication de René Andrieu, archiviste de l’évêché de Rodez et Vabres).

17  Nous reproduisons fidèlement le texte d’après deux photographies : celle qui figure dans Bedel (1993, 96) et celle qui se trouve sur le site http://www.aurelle-verlac.com/canet/canet-htm (mise en ligne le 20 octobre 2003 ; vraisemblablement de peu antérieure) ; nous introduisons la numérotation des lignes. C’est une nouvelle plaque, en granit (60 × 50 cm, à 3 m 50 du sol), qui s’offre aujourd’hui (juin 2022) aux yeux du pèlerin, sur le mur nord de l’église. La nouvelle inscription respecte la disposition de l’ancienne. Elle est toutefois gravée en lettres majuscules toutes d’un même module. Autres variantes par rapport à l’inscription originelle : (ligne 3) 14.4.1821 ] 14-4-1821 (avec « 8 » repris sur « 9 ») ; (ligne 7) Francés ] frances ; (ligne 8) plaçado ] placado ; (ligne 9) 8.8.65 ] 8-8-65.

18  Le Dictionnaire patois-français du département de l’Aveyron (Vayssier 1879) est devenu un « dicciounari / Rouergat Francés ». Dans sa préface et son introduction, Vayssier emploie constamment le mot patois. Il n’a entretenu, semble-t-il, aucun rapport avec le Félibrige. Boudou n’en envisage pas moins, le 21 juin, que l’hymne du Félibrige, la Copa santa de Mistral, soit chanté par une chorale de Millau « davant la lausa de Vaissièr quand se desplegarà » (Bodon 1986, 220).

19  Voir ci-dessus n. 15, in fine.

20  Bodon 1986, 225. L’église de Canet-d’Olt dépendait de la paroisse de Saint-Laurent-d’Olt (Bodon 1986, 215).

21  Vayssier 1879, 45 : botejá, batejá ; ALMC 1463, 1464.

22  Voir ci-dessus n. 15, in fine. Boudou écrit de même baptisme dans sa lettre du 28 juin (Bodon 1986, 225).

23  Données de BaTelÒc.

24  Selon Grevisse/Goosse (2008, 770), la suppression des centaines relève de « l’usage familier ».

25  Boudou emploie parfois ce style de datation dans sa correspondance avec Mouly (par exemple : « lo 15 – 6 – 65 », « lo 28 – 7 – 1965 », « lo 20 – 3 – 66 » ; Bodon 1986, 217, 230, 237) ou avec Lafont (par exemple : « lo 3-3-67 », « le 18-1-69 » ; Pedussaud 2014, 90, 91).

26  Consulté sur le site des Archives départementales de l’Aveyron, le 14 mai 2022.

27  Information correcte dans la notice d’auteur du catalogue de la BnF.

28  Consulté sur le site https://www.filae.com, le 12 mai 2022.

29  L’écart d’un mois entre la date de naissance de Vayssier et celle de son baptême semble peu courant. L’erreur commise ou reproduite par Truel pourrait s’expliquer par le fait qu’on baptisait généralement les nouveaux-nés au plus tôt.

30  Pèire Vaissièr, né à Canet-d’Olt le 14 avril (1661), puis maître d’école à Durenque (Aveyron), ayant pour père Aimat Vaissièr, laboureur, est le narrateur homodiégétique du roman La Quimèra (Bodon 1974 ; Vialaret 2012, 71 ; Roques Ferraris 2020, 578-579). Sa présentation autobiographique contient le détail suivant : « Lo rector de la parròquia me bategèt pas, mas mon oncle mairugal, l’abat Josèp Baldit, curat de Pomairòls [ = Pomayrols, canton de Saint-Geniez-d’Olt, Aveyron] » (Bodon 1974, 25). L’un des oncles maternels d’Aimé Vayssier, Jean-Baptiste Martial Vacquier-Labaume (1796-1835), était effectivement prêtre (Truel 1875, v ; https://www.filae.com).

31  Bodon 1986, 221. (Il n’est pas entièrement exclu qu’il puisse s’agir d’une correction normative des éditeurs anonymes des lettres à partir du dictionnaire d’Alibert [1965, 631], lequel promeut seminari.)

32  Source : BaTelÒc. Selon la même base, Boudou emploie seminari (treize occurrences) dans les Contes dels Balssàs (1953), dans La Grava sul camin (1956) et dans La Quimèra (1974).

33  Nous admettons (sans preuve, à vrai dire) que la graphie du projet d’inscription n’a pas été indiscrètement alibertinisée par les éditeurs anonymes des lettres à Mouly.

34  En 1965, il en allait de même de Mouly (cf. Mouly 1965). Pour Boudou, voir sa lettre du 7 janvier 1952 à Robert Lafont : « Per la grafià ara soi convertit segrai la vòstra » (Pedussaud 2014, 67). On manque d’une étude documentée sur l’évolution graphique de Boudou (et sur celle de Mouly).

35  Le caractère épigraphique du texte n’empêche pas l’emploi d’un accent dans Francés (ligne 7). Ce mot est écrit avec <-é> aussi bien par Mistral que par Alibert, et il ne peut donc servir d’indice.

36  On remarque aussi que, si le prénom de Vayssier a été occitanisé (Aimat), son nom de famille est laissé intact : c’est la pratique de Mouly et, jusqu’en 1964, de Boudou pour leurs propres patronymes, contrairement à l’usage de l’Institut d’estudis occitans. Dans ses lettres à Mouly, Boudou écrit généralement Vaissièr (Bodon 1986, 217, 218 [4], 219 [3], 220 [4], 224, 225, 227, 228, 230), plus rarement Vayssier (Bodon 1986, 212, 218, 221 [2]).

37  Bessou ne graphie pas le <-r> des infinitifs ni des substantifs. Toutefois deux éléments déterminent une orientation graphique particulière de Boudou : l’accent aigu sur « Francés » et la cédille à « PLAÇADO ». Bessou et Mouly n’utilisent l’accent aigu sur <e> que dans les diphtongues ou les triphtongues (pas de façon systématique). Quant à la cédille, Bessou (1892, XXI) écrit : « Le c a la même valeur qu’en français, mais nous ne l’employons jamais avec la cédille ».

38  Dans son premier livre, Al Cant de l’Alauzeto ou Trento Ans d’Agriculturo en Rouergue, Mouly déclarait préliminairement que, bien qu’il soit partisan de la graphie Perbosc/Estieu/École Occitane, il emploierait, afin d’être plus facilement lu par son public paysan, une orthographe « à la me-damne » inspirée, autant que possible, de Bessou (Mouly 1928, vii-viii). La graphie dont Mouly fait usage dans ce livre concorde effectivement avec celle de Bessou et présente les mêmes caractéristiques que celle de l’inscription de Canet-d’Olt.

39  Il est à noter que la plaque à la mémoire du félibre Édouard Galy, dévoilée à l’occasion de la Saint-Justin de Saint-Rome-de-Tarn, le 8 août 1962, emploie, en revanche, la graphie d’Alibert en version épigraphique (toutes les lettres en majuscules sans accents). Nous remercions Clément Jaurou (juin 2022) de la photographie de l’inscription de Saint-Rome-de-Tarn qu’il nous a fait parvenir (en raison de la construction d’une nouvelle salle des fêtes, la plaque était déposée, en juin 2022, à la mairie de Saint-Rome-de-Tarn). Le texte imprimé par Mouly (1965, 282) fait usage de la même graphie, tout en comportant plusieurs variantes substantielles par rapport à celui de la photographie.

40  Les deux premières lettres à Mouly dans lesquelles il est question des préparatifs de la journée du 8 août (22 mai et 11 juin 1965 ; Bodon 1986, 211-212, 214), sont justement l’occasion, pour Boudou, de tenter d’éclaircir auprès de son maître les rapports entre les deux associations renaissantistes auxquelles ils adhèrent l’un et l’autre (au niveau départemental : le Grelh Rouergat félibréen et la section aveyronnaise de l’Institut d’études occitanes).

41  Cf. Bòsc 1987, 41-42.

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Pour citer cet article

Référence papier

Jean-Pierre Chambon et Jean Thomas, « Un texte épigraphique à attribuer à Jean Boudou : la plaque de Canet-d’Olt (Aveyron) à la mémoire du lexicographe rouergat Aimé Vayssier (1965) »Revue des langues romanes, Tome CXXVI n°2 | 2022, 449-458.

Référence électronique

Jean-Pierre Chambon et Jean Thomas, « Un texte épigraphique à attribuer à Jean Boudou : la plaque de Canet-d’Olt (Aveyron) à la mémoire du lexicographe rouergat Aimé Vayssier (1965) »Revue des langues romanes [En ligne], Tome CXXVI n°2 | 2022, mis en ligne le 01 décembre 2022, consulté le 09 septembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rlr/5397 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/rlr.5397

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Jean-Pierre Chambon

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