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Écritures de femmes occitanes et frioulanes (XIXe-XXIe siècle)

Les trois premières femmes de la Revue des langues romanes

Rose Blin-Mioch
p. 235-258

Résumés

Dans les années des débuts de la RLaR (1870-1880), la Société des Langues Romanes a permis grâce à sa rubrique dialecte moderne, sorte de cahier de création, la présence de trois poétesses : Rose Anaïs Gras épouse Roumanille, Félibresse Rose Anaïs, Lydie Wilson de Ricard, Na Dulciorela et Léontine Mathieu Goirand, Félibresse d’Arènes.La première est présente par des traduction de sonnet de Pétrarque en provençal, les deux autres par des sonnets en occitan. Une exception.

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Texte intégral

1En 2010, je terminais la présentation de ma thèse sur Lydie Wilson de Ricard en formulant le vœu que les thèmes sur lesquels j’avais travaillé soient repris par d’autres et fassent partie de la transversalité des recherches pour que les femmes occitanes trouvent ou retrouvent leur juste place dans l’œuvre commune… Avant de présenter les premières femmes de la Revue des langues romanes, Rose Anaïs Gras épouse Roumanille, Lydie Wilson de Ricard et Léontine Mathieu-Goirand, qu’il me soit permis de faire un détour par les théories qui inspirent ces recherches.

2Elles s’appuient d’abord sur les écrits des historiennes françaises Arlette Farge et Françoise Thébaut. La première explicite dans Le Goût de l’archive ce qui peut sembler une lapalissade mais n’en est pas une : pour trouver des femmes il faut les chercher et « rendre visible la femme, là où l’histoire omettait de la voir, oblige à un corollaire : travailler sur la relation entre les sexes, faire de cette relation un objet d’histoire » (Farge 1997, 44). À Françoise Thébaut, j’ai emprunté la définition du genre : « Le genre est en quelque sorte le sexe social ou la différence des sexes construite socialement, ensemble dynamique de pratiques et de représentations, avec des activités et des rôles assignés, des attributs psychologiques, un système de croyances. Le sexe est ainsi perçu comme un invariant, tandis que le genre est variable dans le temps et l’espace » (Thébaud 1998, 114).

3S’il est nécessaire de chercher les femmes, c’est qu’elles sont cachées par le discours dominant celui de la vision androcentrique : « La force de l’ordre masculin se voit au fait qu’il se passe de justification : la vision androcentrique s’impose comme neutre et n’a pas besoin de s’énoncer dans des discours visant à le légitimer » (Bourdieu 1998, 15).

4J’en viens maintenant à une définition qui est plus spécifique aux langues dominées, celles de la diglossie, formulée ici par Georg Kremnitz : « Les sociolinguistes occitans désignent sous le nom de diglossie la cœxistence sociale de deux langues aux fonctions communicatives et sociales différentes, aux statuts différents et forcément au prestige différent » (Kremnitz 2002, 112) et « il y a conflit linguistique quand deux langues clairement différenciées s’affrontent, l’une comme langue politiquement dominante (usage officiel et public) et l’autre comme politiquement dominée » (Kremnitz 2002, 113, n. 3).

5J’ajouterai à ces réflexions celles de Virginia Woolf dans Une chambre à soi (1929) sur la nécessité de l’indépendance pécuniaire et d’un lieu à soi pour écrire, réflexions importantes puisqu’il s’agit d’étudier ici la liberté d’action de ces femmes ainsi que les causes de leur effacement, pour celles, en tout cas, qui avaient été un tant soit peu mises en lumière de leur vivant. Avant les trois premières femmes présentes dans la Revue des langues romanes, quelques indications sur ses débuts.

6La Revue des langues romanes a été éditée à ses débuts par la Société pour l’étude des langues romanes, société savante fondée le 12 avril 1869 et autorisée le 24 mai 1870. S’inscrivant dans le mouvement romantique de redécouverte du patrimoine, son intention était de publier la revue dès 1870, mais les événements politiques ayant bloqué la parution du premier numéro daté d’octobre 1870, celui-ci ne sera diffusé qu’en avril 1871. La Société veut relayer à Montpellier l’élan donné par Mistral et le Félibrige. Les femmes sont présentes dans ses assemblées sans qu’elles soient obligatoirement invitées par des hommes, comme cela se pratiquait à Montpellier à l’époque. Les liens avec le Félibrige sont soulignés dès les premiers numéros par la présence de Mistral et d’Aubanel. Les érudits se côtoient dans ses pages, tels A. Boucherie, A. Montel, premier secrétaire, Gabriel Azaïs de Béziers, Albert Arnavielle d’Alès, Octavien Bringuier, l’abbé Vinas… Le premier président Charles de Tourtoulon y publie ses notes sur le dialecte de Montpellier. La revue comporte de grandes rubriques : dialectes modernes, sorte de cahier de création, dialectes anciens, études de textes, philologie et bibliographie qui complètent le volume avec des chroniques traitant des événements de la Société, du Félibrige et de tout ce qui touche aux langues romanes. C’est dans la partie « Création » (« Dialectes modernes ») que nous allons trouver les trois femmes de notre étude. Notons que l’Armana Prouvençau de Mistral s’était ouvert dès 1862 à une première félibresse, la felibresso dóu Couloun, Azalaïs d’Arbaud avec « La Dourgueto », l’année suivante la Felibresso Roso Anaïs, de Malemort, y signera « Lou Descoucounatge ». C’est elle, Rose-Anaïs Gras qui prend place la première dans la Revue des langues romanes en 1875 avec la traduction d’un sonnet de Pétrarque. En 1877, Lydie de Ricard y signera « La Figueira », dédiée à Léontine Goirand qui elle-même y figure avec « Nemausa ».

Rose-Anaïs Gras, Mme Roumanille (1841-1920)

7Rose-Anaïs Gras est provençale, née à Malemort-du-Comtat (Vaucluse) en 1841. Ses parents sont d’origine paysanne, ils font partie des riches du village. Leurs idées sont progressistes et ils donnent de l’instruction à leur fille, ce qui n’était pas ordinaire alors. Elle a un jeune frère, Félix, de trois ans son cadet, qui deviendra célèbre en 1895 avec Li Rouge dóu Miejour, premier roman historique en provençal, traduit tout d’abord en anglais. Il traite du rôle prépondérant des clubs marseillais en 1793. Leur grand-père Pierre avait été sous la Convention un des deux commissaires, avec le curé Mistralet, nommés pour administrer la commune, il faisait partie des milieux révolutionnaires du Comtat. Le sonnet CXLII de Pétrarque, traduit en « provençal, sous-dialecte d’Avignon et des bords du Rhône » a obtenu le premier prix de sa catégorie, « couronne d’olivier en argent offerte par la Société archéologique de Béziers » lors du cinquième centenaire du poète. Il est signé Rose Anaïs Roumanille. Ce sera le seul texte paraissant d’elle dans la revue.

  • 1  Car un cantique étant le remerciement de la reconnaissance populaire, doit être compris du peuple (...)

8Rose-Anaïs avait obtenu à Apt en 1862 le premier prix lors du concours organisé pour l’ouverture aux fidèles de la crypte « où sont restées déposées, durant tant de siècles, les précieuses reliques de sainte Anne », par les autorités ecclésiastiques d’Apt. Parmi les 46 pièces reçues par le jury dont faisaient partie Mistral, Gaut, Roumanille et d’autres félibres, 19 sont des cantiques à sainte Anne. Rose-Anaïs Gras obtient la Violette d’argent. Les autres lauréats sont Émile Ranquet, de Villeneuve-lès-Avignon (Gard), la première mention allant à Azalaïs, Felibresso dóu Caulon, la seconde à Jules Caulet, cafetier à Saut. Dans l’Armana Prouvençau de 1863 où se trouve ce palmarès, l’anonymat de la Felibresso dóu Caulon n’est pas levé. Relevons les caractéristiques du cantique données par Roumanille : la foi, l’élévation et la simplicité « car un cantico, estent Iou gramaci de la recouneissènço poupulàri, dóu pople tout entie deu èstre ausible1 ». Devant les qualités de la pièce, son auteure est consacrée félibresse et comparée à la comtesse de Die, Marie de Ventadour, Claire d’Anduze… Ce même Armana publie la musique composée par Jules Gaudemar, d’Avignon, sur les paroles de Rose-Anaïs (p. 123-126). Il contient également « Lou Descoucounatge », scène paysanne, familiale et dévote dédiée à son frère et signé Felibresso Roso-Anaïs.

9Cependant il semble qu’à Apt il y ait eu des tiraillements à l’intérieur du jury entre les Aptésiens et les félibres, comme en témoigne Roumanille :

On n’a rien changé à notre décision. Seulement, j’ai obtenu de M. le maire un 4e prix pour Thouron, et des diplômes lithographiés pour les accessits. Ton ami Vidal d’Aix est toujours lauréat. […] Dis donc à Vidal de se rendre à Apt pour y recevoir sa fleur. Il est bien entendu qu’il est véritablement l’auteur de la tambourinado (Roumanille à Gaut, 10 septembre 1862, Corr. éd. Jouveau 1997, 97)

10Il poursuit :

Nous avons fini par mettre la main sur l’auteur du cantique : c’est une vraie jeune-fille, qui n’en est pas à son coup d’essai, et qui a écrit des pièces plus jolies que son cantique… ah ! voilà une trouvaille ! une perle précieuse ! Quel bonheur insolent ! Je lui ai soutiré quelques pièces qui m’ont ravies. Elle est brune, elle a 23 ans — elle est perdue dans un petit village de Vaucluse. C’est une violette d’or… la violette d’argent devait lui échoir : viola violam invocat.

11Le dernier couplet du cantique (Roumanille 1862), avant une tournado plus personnelle, démontre qu’elle était venue à Apt peut-être autant pour le Félibrige que pour sa dévotion à sainte Anne :

Tu qu’as permes a la Durenco
De veire e de beisa tis os
Escouto-nous quand sus toun cros
Cantan en lengo de Prouvenco !
E se vos que renouvelen
Aquesto festo, a toun Felen
Demando en recoumpenso
Qu’au Felibrige doune alen.
O bello Santo amistadouso

  • 2  Toi qui as permis à la Durance / de voir et de baiser tes os / Écoute-nous quand sur ta tombe / no (...)

La pichoto Anais a Santo Ano :
Santo Ano d’At, sies ma patrouno :
Iéu siéu la pichóto Anais !
Gardo pèr ièu en paradis,
Gardo-me’n rai de ta courouno…
Bretoune, e vole te canta !…
Posque moun piéu-piéu t’agrada !
Iéu siéu qu’uno chatouno,
Assousto-me, Santo Ano d’At2 ! (Roumanille 1862)

12Notons que J.-B. Gaut a obtenu le premier prix dans la catégorie « Éloge à la Provence », avec « Lou prouvencau pou pas mouri », ce qui montre la valeur du concours.

13Un an après, Rose-Anaïs devenait Mme Roumanille. La correspondance entre Mistral, Jean-Baptiste Gaut et Roumanille montre que celui-ci, à 44 ans, est tombé éperdument amoureux de la jeune fille.

14Cependant ce même cantique qui les a réunis va jeter une ombre sur leur récent paradis. Rose-Anaïs l’a écrit dans la langue des félibres, mais celle-ci n’est pas du goût de tout le monde. Ainsi, les frères Artaud ne s’attaquent pas directement aux écrits de Mistral mais prennent prétexte du cantique d’Apt pour engager une bataille que l’on retrouve dans la presse et surtout au travers d’un opuscule anonyme. Les Artaud et leurs amis accusent le jury d’Apt de tricherie (Anonyme 1862).

15Roumanille recherche les auteurs de la brochure pour porter l’affaire devant la justice. Il retrouve l’imprimeur et l’auteur :

la brochure en question a été imprimée par J. Barile à Marseille, nous avons dû sommer celui-ci […] de nous dire quel était l’auteur de ce libelle diffamatoire, imprimé par lui. […] M. Artaud, ancien chef de bureau de la Préfecture, rue de Buis… (Roumanille à Gaut, 6 décembre 1864, Corr. éd. Jouveau 1997, 104)

16Mistral, après avoir échangé de nombreuses lettres, notamment avec Gaut, sur ce sujet conclut :

Je me décide pour ma part à ne pas répondre. Je fais peu de cas de l’estime de gens qui, sur dire d’Artaud, me considèreraient comme malhonnête homme. Tout cela pue. Je ne veux plus, et d’aucune manière, m’occuper de ces gens-là. […]
Laissons-les dans l’ornière des s et des r et des t. […] Quand on a conquis Paris et la France et un peu l’Europe, on ne va pas briguer l’assentiment des têtes chauves de Phocée. (Mistral à Gaut, 7 juillet 1864, Corr. éd. Jouveau 1997, 83)

17Alfred Artaud cependant continue à discréditer l’œuvre de Rose-Anaïs :

Nous ne saurions contester au Jury, l’épithète de savant que lui donne le Mercure… On peut-être très docte… en jugeant digne du premier prix une pièce que La France Littéraire du 31 janvier 1863 a appelée un si mauvais travail.
Quant aux décisions du jury, nous savions, Mercure, sans qu’il fût point besoin de le rappeler, que tu les avais maintes fois ratifiées, et l’on ne connaît aucune œuvre savante de l’époque qui ait reçu dans tes colonnes les honneurs d’un aussi grand nombre d’articles élogieux, articles de complaisance, nous le savons, et nous le disons à ta décharge, que l’œuvre de Mme Roumanille. (Anonyme 1862, 171)

18Mais un tel déchainement à propos de son cantique même si, lui dit-on, ce n’est pas elle qui est visée, ne peut que blesser Rose-Anaïs au point qu’elle hésite à publier ce qu’elle écrit, comme le dit Roumanille à Gaut en août 1864 :

Ma femme a peur — ah quelle peur ! Sa pièce renferme des peintures amoureuses — elle craint qu’on appelle cela du dévergondage. Elle se souvient trop bien qu’on a trouvé d’impures indécences dans son cantique à sainte Anne. Et elle a peur. Elle se souvient aussi que son l’âme, l’âme, ô maire de Diéu ! (Armanac de 1863) fut taxé d’hystérisme- et elle a peur. Pourtant ses moissons sont d’une chasteté irréprochable. […] Madame Roumanille est évidemment ennuyée de servir de point de mire en public, aux Artaud et Cie : ça lui agace les nerfs. Elle en est venue au point d’être fâchée d’avoir concouru à Apt, et jetterait volontiers son bouquet de violettes à la face des insulteurs. (Roumanille à Gaut, 31 août 1864, Corr. éd. Jouveau 1997, 101)

19C’est dans l’Armana Prouvençau que l’on trouve le plus grand nombre de textes de Rose-Anaïs Gras, signés Roumanille.

20Dans l’Armana de 1863 paraissent deux autres textes : « L’Aurige », scène de la vie quotidienne et familiale et « L’Âme », dédié à son frère, daté du 8 juin 1862 (p. 97-99). Elle y traite du désespoir qu’elle éprouve de la séparation avec celui-ci, il n’est pas signé et c’est ce poème qui a conduit à parler d’hystérisme (voir ci-dessus la lettre de Roumanille à Gaut). Voici un extrait qui explicite le sujet :

  • 3  Je l’aime, je l’aime, ô Mère de Dieu / Et il me semble que sœur et frère / Ensemble, main dans la (...)

L’ame ! l’ame ! o Maire de Diéu !
E me semblo que, sorre e fraire
Ensèn, e la man dins la man
Te disèn, Vierge, que t’aman
E te prenèn pèr nostra Maire !
Mai ploure souleto, e liuen d’éu3

21« Li Meissoun », écrit à Malemort en 1862, dont parle son mari est la pièce pour laquelle elle a reçu la Médaille d’argent dans la catégorie « Éloge de l’agriculture » au concours de poésie provençale, organisé dans le cadre du Concours agricole de la ville d’Aix. Il réunissait 86 participants le 17 septembre 1864. Ce texte figure dans l’Armana de 1865 (p. 52-54). C’est une scène de moissons comme son titre l’indique, où se retrouvent les relations sociales de la campagne avec l’équipe qui officie, les hommes coupent et les femmes et filles lient les gerbes, le patron soucieux de laisser du blé pour les glaneurs présents sous les traits des enfants, la jeunesse avec ses amours et amoureux, la pause repas et le retour fourbus au logis. Pour ce qui est du dévergondage que cette pièce pourrait contenir d’après la lettre ci-dessus, il pourrait être rapproché d’œuvres d’hommes sur le même thème pour comparer ce qui alors est admis d’un poète homme et d’une femme.

  • 4  Voir ci-dessous la lettre de Roumanille à Mistral en 1865 : nous avons envoyé un ange au ciel.

22Dans le même almanach, le poème « Lou Bres » (p. 67-68), daté de 1863, exprime son bonheur de femme qui attend un enfant et qui rêve à sa venue. En 1864, elle publie « La Priéro de l’enfant » (p. 75-76), prière à un enfant mort, frère « ange parti au Paradis4 ». Au xixe siècle, rappelons-le, la mortalité infantile est telle qu’un enfant n’est considéré comme viable qu’après l’âge de 5 ans.

23Entre-temps, elle est devenue mère en 1864 d’une fille Marie, en 1865 d’un garçon, Pierre Jean Louis. Viendront Thèrèse Marie Félicie avant la date, le 11 juillet 1866 et enfin Jeanne, en 1873. Mais comme beaucoup de femmes de ce siècle, elle a perdu sa première fille en bas âge. Témoin son sonnet à la félibresse Antounieto de Bèu-Caire, écrit le 25 janvier 1865, qui se termine ainsi :

O, Mort, es pas la chato Urouso
que falié sega despietouso
Dins la glòri de si vint ans

  • 5  Ô mort ce n’est pas le fille heureuse / qu’il fallait faucher impitoyable / dans la gloire de ses (...)

Mas ièu, maire, pauro femo,
Que bagne en van de mi lagremo
Lou brès vuege de mon enfant5 ! (Armana prouvençau 1866, 35)

24Tout comme en témoigne, dans un autre genre et faisant référence à l’affaire Artaud, cet extrait de lettre de Roumanille à Gaut, toujours en 1865, après la naissance de leur deuxième enfant :

Ah, mais j’oubliais ! la mère et l’enfant se portent bien… se portent à merveille. […] ça ressemble à un Noël de Saboly ou de Roumanille : la mère est jeune, le père est chauve, l’enfant est beau. Le chœur des anges n’a pu faire défaut : n’avons- nous pas envoyé un ange au ciel, pour le conduire ? Il n’y manque rien que l’âne et le bœuf. Quel dommage que je n’ai pris pour lumière ( ? ? ? ?) un des deux Artaud…
Et M. le marquis de Laincel ! (celui-ci serait le bœuf !) Et voilà. (Roumanille à Gaut, 11 septembre ( ?) 1865, Corr. éd. Jouveau 1997, 106)

25Elle continue cependant à écrire et à publier dans l’Armana prouvençau. En 1866, deux félibres ont écrit des textes de consolation pour Rose-Anaïs : F. Aubert, après la naissance de son second (à Malemort ?), le mandadís du poème est transparent, il est dédié à Pierre-Jean Roumanille ; à son tour la Felibresso dóu Caulon écrit notamment :

  • 6  Mère ce n’est pas la mort : ce sont des anges / qui t’ont pris ton petit enfant. (trad. RBM).

Maire, es pas la mort : es d’anjoun
Que t’an ravi toun enfantoun6.
(Armanac Prouvençau 1866, 83-84)

26Suit un poème de Madieu Pichot dédié au félibre J. R. [Joseph Roumanille] pour la naissance de son second enfant, il le rassure avec humour :

  • 7  Le second / que tu crois son frère, / Est bien tien, mon félibre, et ne peut plus s’en aller / Le (...)

Lou segound, que creses soun fraire,
Es bèn tiéu, moun Felibre ; e pou plus s’enana,
Lou nouvèu-na :
Car, ve, regardo, n’a ges d’alo7 !
(Armana Prouvençau 1866, 84)

27F. Vidal cadet, d’Aix, y ajoute ses vers à la gloire du nouveau-né de l’été. Quant à la mère, c’est avec un chant de pèlerinage à Saint-Gent (p. 97-99), en l’honneur de ce saint très vénéré en Provence et invoqué dans ces temps de sécheresse pour faire venir la pluie, qu’elle remercie Marie Azalaïs Martin d’Arbaud (Cavaillon, 20 juin 1834 – 12 septembre 1917), la félibresse du Coulon.

28Revenons à ses publications : « La Masco dou Capelan », dans l’almanach de 1869 (p. 10-21), mêle amour, superstition et religion. « Lou Chambrou » (p. 27) évoque le désordre résultant des jeux d’un enfant. En 1871, avec « Li Voulountari », Rose-Anaïs écrit un sonnet patriotique français pour la délivrance, une autre félibresse faisant d’ailleurs de même. « Lou Praire », en 1885 (p. 23), a pour thème la mort et l’extrême-onction. Avec « Lou Chin », en 1886 (p. 36-37), on assiste à un retour à la campagne avec la fidélité d’un chien pour son maître. L’œuvre de Rose Anaïs, en particulier dans l’Armana Prouvençau, n’est donc, pas, surtout pour une femme, marginale.

  • 8  Son mari est mort à Hanoï en 1899 avant la naissance de leur enfant avec lequel elle rentrera en F (...)

29En 1885, une de ses filles, Thérèse, est devenue reine du Félibrige à 18 ans, la seconde reine après Mme Mistral qui est de la même génération qu’elle. Il semble que des quatre enfants Roumanille, seules les deux filles les plus jeunes soit arrivées à l’âge adulte. Jeanne partira en Amérique avec son mari. Thérèse s’est mariée avec Jules Boissière, journaliste parisien et écrivain de langue d’oc, originaire de Clermont-l’Hérault, et elle le suivra au Tonkin où il officiera dans l’administration coloniale, en 18928.

30L’année précédente, Joseph Roumanille est mort à 73 ans. Il emporte dans la tombe la Violette d’Apt, prix de sa femme lorsqu’ils ont fait connaissance. C’est lui qui s’occupait de la librairie Roumanille qui éditait entre autres l’Armana prouvençau. Rose-Anaïs prend alors le relais, elle a 50 ans et tient le magasin de la rue Saint-Agricol, à Avignon. De retour du Tonkin, sa fille va partager cette charge. Elles publieront par exemple en 1914 Blad de Luno de Folco de Baroncelli-Javon, mais aussi le livre-témoignage d’Émile Ripert sur leur librairie (Ripert 1934).

31Rose-Anaïs Gras épouse Roumanille est morte en 1920, à 80 ans. L’historien du Félibrige, René Jouveau, écrira d’elle :

Elle avait une œuvre, mais surtout elle avait assuré la parution de L’Armana provençau contre vents et marées, depuis la mort de son mari. (Jouveau 1977, 45-46)

32L’Armana prouvençau de 1921 lui rend hommage :

Par piété envers celui qui n’était plus, elle riait comme il avait ri, d’un rire saint et bon, celui du meilleur peuple de Provence ; elle avait ce courage encore après tant de deuils, parce que c’était un devoir.
Quand le chanoine Estellon est venu lui porter les derniers sacrements de l’église Rose Anaïs Gras lui a répondu : « Mon père vous m’excuserez si je ne réponds pas à vos prières, elles sont de celles que l’on ne récite pas souvent ». (Armana Prouvençau 1921, p. 6-8)

33En 1926, Lou Flourege d’Avignon, l’association locale du Félibrige, organisa à Malemort-du-Comtat une fête pour l’inauguration d’une plaque sur la maison natale du « Capoulier Félix Gras et de sa sœur Rose-Anaïs Roumanille ».

34Avant de passer aux deux autres félibresses présentes quelques années plus tard dans la Revue des langues romanes, on peut faire quelques remarques. Pour son activité poétique, Rose-Anaïs Gras procède à un changement de nom, mais elle conserve son prénom. Elle hésite à publier certains de ses textes qui peuvent sembler hors de la morale pour une femme. On est à Avignon et Aubanel lui-même a eu des problèmes pour publier et faire jouer par exemple Lou Pan dóu pecat. Par ailleurs, le fait d’avoir eu des enfants ne l’empêche pas d’écrire, il semble même que l’écriture soit une consolation quand elle a perdu sa ou ses premiers enfants en bas âge.

  • 9  La felibresso de la Travèsso était une religieuse de la Visitation (Jourdanne 1897, 112).
  • 10  On peut se le demander en la retrouvant référencée dans le chapitre consacré à son mari dans le Di (...)

35Nous la retrouvons dans l’anthologie de François Delille (1881) avec « La Masco dou Castelan » [La Sorcière du Castelan] et « Lou Chambroun » [La Chambrette], aux côtés de Lazarine Daniel, Reine Garde, Léontine Goirand, Mme d’Arbaud, Mme Xavier de Ricard, Delphine Roumieux, la felibresso de la Travèsso9. Dans celle de Constant Hernnion en 1883, elle est présente par « Lou Chambroun » et « Li Voulountari » aux côtés de Lazarine Daniel, Léontine Goirand, Mme D’Arbaud et la felibresso dóu Couloun. Elle n’a, à notre connaissance, pas publié de recueil regroupant ses écrits, et, lorsque son nom est mentionné à côté d’autres félibresses, c’est pour sa cantate d’Apt. Coincée entre la notoriété de son mari et celle de son frère, lui restait-il un espace pour la postérité10 ?

Lydie de Wilson et Léontine Goirand

36Lydie Wilson de Ricard et Léontine Mathieu Goirand peuvent toutes deux être considérées comme Languedociennes, la première vivant à Montpellier, la seconde à Alès ou Nîmes. Elles font paraître des poèmes dans la Revue des langues romanes en 1877 et 1878. Ces deux félibresses ont eu des vies qui sont de véritables romans.

37Nous avons i consacré notre thèse à Lydie Wilson de Ricard (Blin-Mioch 2010). Léontine Lauriol-Goirand Mathieu que l’on disait née à Alès m’a intriguée et je suis, avec une autre chercheuse, Marinette Mazoyer, partie à sa recherche. J’ajoute qu’elles se sont connues, qu’elles ont assisté à la Sainte-Estelle d’Avignon en 1876 et 1877 et aux différentes initiatives du Félibrige et de la Société des langues romanes. Elles ont échangé des poèmes entre 1876, fondation du Félibrige languedocien républicain par le couple Ricard-Wilson et Auguste Fourès à Montpellier, et la mort de Lydie en 1880. Léontine a écrit lors de sa mort un long poème dédié à Louis-Xavier de Ricard : « La Fado dou Lez » (Goirand 1882, 229-232). Elle avait écrit « Abriu » (La Lauseta 1877, 131) et « A Douno Dulciorella dou mas de la Lauseto » (La Lauseta 1878, 167) pour celle-ci et « A n-uno Sauro Gento damisello Jano Wilson » (La Lauseta 1878, 168) pour sa sœur qui a été l’Albeto, l’amour du poète Auguste Fourès. Ainsi, le 24 mars 1877, elles participaient toutes trois à Montpellier à une assemblée de la Société des langues romanes où Mlle Goirand — son « beau sonnet « A Nemausa » a été publié en janvier 1877 dans la RLaR —, voulut bien dire quelques vers d’une touchante et délicate poésie » (Roque-Ferrier 1877, 157). Toutes deux sont les seules femmes présentes avec des poèmes en occitan dans le volume de La Cigale de Paris de 1880.

  • 11  Auteur de Documents sur le coup d’État de 1851 dans le Gard (1881) et Documents historiques sur Al (...)

38Léontine Goirand est née à Nîmes le 19 octobre 1853 de Rosine Lauriol, modiste, âgée de vingt-cinq ans, non mariée, native d’Anduze (Gard), domiciliée à Nîmes. Elle sera légitimée par le mariage en 1863 de Jean-Pierre Goirand avec Jeanne Rosalie Lauriol, célébré à la mairie de Nîmes. Son frère, son aîné de dix ans, fils de ses deux parents qui vivaient en union libre, vient alors de mourir et ce mariage a pour but de légitimer les deux enfants. Jean-Pierre Goirand est un avocat, historien11 et homme politique républicain d’Alès. Il avait été conquis par le mouvement félibréen auquel il participa avec sa fille. Léontine était son unique enfant vivante. Grand lecteur de Victor Hugo et admirateur de Mistral, il s’est occupé de l’éducation de celle-ci alliant un enseignement livresque et des excursions dans la campagne d’Alès. Léontine était également la cousine de Maurice Faure (1850-1919), républicain modéré qui fut député et sénateur de la Drôme, puis ministre de l’Instruction publique et des Beaux-Arts, quelques mois entre 1910 et 1911. Il fut un des fondateurs de la Cigale et de la Société des Félibres de Paris, il fut avec Paul Arène et Théodore Aubanel à l’origine de la félibrée de Sceaux.

  • 12  Sur l’initiative de son cousin ?

39L’année de parution du volume de poèmes de Léontine, Li risènt de l’Alzoun (1882), correspond à celle de son mariage avec Émile Mathieu. Ce mariage est salué dans Lou capelet nouviau de la Felibresso d’Arèno (1882), par « Gaussen, Mistral, Fourès, Aubanel, Leyris, Maurice Faure, Louis-Xavier de Ricard, Arnavielle, Roumieux, Astruc, Tavan, Lisbonne… ». Son mari a été le premier receveur municipal de Sète où naîtront leurs deux enfants André en 1884 et Éva en 1885. Elle participe dans le port héraultais aux préparatifs de la fondation du Félibrige avec Joseph-Henri Castelnau, avant un retour précipité à Alès. Son mari est accusé d’avoir puisé dans la caisse des écoles, ce dont il sera blanchi un an avant son décès prématuré en 1891. À partir de là, elle participe aux initiatives du Félibrige, notamment les fêtes d’inauguration du buste de La Fare-Alais en octobre 1889, mais ses écrits sont moins nombreux, voire ils cessent après le décès de son mari. En 1911, elle reçoit les insignes d’officier d’Académie12 en tant que « femme de lettres ». Lors de sa mort, en 1923, à Alès, le Félibrige, en la personne d’Alcide Blavet, lui rend hommage (Blavet 1923).

40C’est donc tant qu’elle était fille qu’elle a enchanté ses auditeurs et lecteurs. Elle avait indiqué son choix de dialecte « Provençal, Avignon et les bords du Rhône » en 1877 au bas de « Bello primièro », poème dédié à Ernest Roussel publié dans la Revue des langues romanes (III-XI, 241-242).

41Elle participe en août 1876 à la felibrejado du château d’Arène, sur les bords de l’Alzon. Au milieu de nombreux félibres, elle récite « L’Aucelounet » et portera désormais le nom de Félibresse d’Arène. A. Espagne commente dans la Revue des langues romanes en 1877 la « Lettro à Madamisello Leountino Goirand » de Louis Roumieux, le félibre de la Tour Magne :

Par une chaude journée d’août 1876, une troupe de félibres et d’amis alla faire une partie de plaisir au château d’Arène, sur les bords de l’Alzon, dans la banlieue d’Alais. […]
Les félibres ne se mettent jamais à table sans faire asseoir la poésie avec eux. Il en fut ainsi à Arène. Chacun paya de sa personne au dessert. Aubanel lut Li Fabre. Arnaviello et Gaussen chantèrent : l’un, lou Muscat de Quaranto ; l’autre, Estivenco, Charvet débita Sursum corda ; Mayer, Deman ; Paul Félix, fauteur des Fados en Cevenos, une fable pleine d’entrain et de jeunesse ; Roumieux chanta lou Maset et raconta Bassaquin ; Mlle Goirand, enfin, récita Aucelounet. À trois heures, on alla se reposer à l’ombre d’un bosquet voisin ; c’est là que Roumieux lut l’œuvre dramatique d’Aubanel, Lou Pan dóu Pecat. Le résumé du drame forma deux cent quarante vers de la Felibrejado d’Areno. Cette analyse paraît assez fidèle pour nous apprendre que Lou Pan dóu Pecat est une pièce passionnée et ardente, tout à fait dans le ton des productions les plus hardies du théâtre contemporain, et différant, par conséquent, du genre habituel du félibre de la Miougrano. (Revue des langues romanes IV-XII, 1877, 300)

  • 13Bulletin de la Société archéologique, scientifique et littéraire de Béziers, 1879, p. 84-85.

42C’est au bord de l’Alzon que naîtra l’amitié de Léontine avec le félibre blanc Louis Roumieux qui la compare à Antoinette de Beaucaire. Elle participe au journal qu’il crée à Montpellier, Le Dominique qui prendra ensuite le nom de La Cigale d’Or en devenant le journal de l’Escolo Felibrenco d’Alès. Léontine y écrit des portissons en provençal, articles de Une en forme de lettres à Mireio, où elle décrit des scènes de la vie populaire, par exemple « La Foire aux cocons d’Alès » (La Cigale d’Or, 24 juin 1877). Elle avait obtenu en septembre 1877 le prix de Provence pour Lis Areno à Arles, au concours organisé par la Cigale de Paris. Elle assiste avec son père au banquet de la Cigale à Paris en 1878. En 1879, elle obtient une médaille d’argent de la Société archéologique, scientifique et littéraire de Béziers pour ‘La Draio Flourido. Promenade un jour d’Automne vers St Germain, près d’Alais13.

  • 14  Également dans la Revue des langues romanes V-XIII, 1878, p. 270-272.
  • 15  Il s’agit de la Baronne de Pagès, la Félibresso de la Dindouletto, née Clémence Vernède de Corneil (...)

43Ses poèmes paraissent aussi dans LArmanac de Lengadoc d’Arnavielle de 1877 et 1878, La Lauseta. Almanach des félibres républicains fédéralistes 1877 et 1878, l’Armana prouvençau de 1877 avec « Vounge ans après », dédié à Mireille Roumieux et dont le sujet est Antoinette de Baucaire ; en 1878, avec le sonnet « Sus uno estello », signé Felibresso dAreno, et « Plang », d’après une estampe, en 1879 avec « Trioulet a un enfant ». Les Mémoires littéraires et scientifiques d’Alès publient en 1877 « Calabrun14 », dédié à Joseph Lisbonne. Après avoir publié en 1879 la plaquette Trioulet a la pichota Eloisa, elle est présente dans le volume collectif de La Cigale (1880) avec « Nemausa ». Li Risènts de l’Alzoun obtiennent le premier prix du concours poétique des Fêtes latines de Montpellier, instituées en 1878 par la Société des Langues romanes et présidées par Mistral et elle reçoit en récompense une statuette représentant Polymnie. La Provence artistique consacre une page complète à cette œuvre, Élie Roussot y commente l’art de Léontine ainsi : « La poésie de la félibresse d’Arène est triste quelquefois mais forte toujours […] La fêlibresse d’Arène est donc un tempérament robuste en poésie » (Roussot 1882, 407). « La mort d’una irondela », dédiée à Mme Pagès15 paraît dans La Calanco, publication des felibre de la mar (Escolo de Marsiho), à Marseille en 1879. Cette même année, elle obtient une médaille pour une Ode à Florian à Sceaux.

44Son mariage représentait-il pour elle une étape de sa vie où le temps pour écrire ne serait plus le même ? La date de la publication des Rizents de l’Alzon incite à poser la question. Cependant, elle est la seule femme qui participe en 1883 — elle est alors à Sète — au volume Per l’Alsacio-Lourreno, dont l’initiative revient à Auguste Fourès.

45Son recueil Li Rizents a été édité par Aubanel Frères, l’imprimerie du poète imprimeur du pape, à Avignon, et Maisonneuve, à Paris. Il rassemble — et c’est indiqué sur la dernière page — ses poèmes dont beaucoup ont déjà été publiés d’août 1876 à février 1882. Chaque poème est dédicacé, à son père, sa mère, ses amies et aux félibres languedociens et provençaux comme Aubanel et Mistral, Roumieux, mais aussi à Roque-Ferrier de la Revue des langues romanes. Ses poèmes et ses textes ne sont pas engagés comme nous le verrons pour Lydie de Ricard et il semble qu’elle n’ait pas écrit en français.

46Toutes deux, en tout cas, s’intéressent à la traduction en occitan ou à partir de l’occitan. Léontine Goirand pour des textes de Ferdinand Cartairade et d’Ernest Roussel tandis que Lydie de Ricard fait des adaptations des auteurs qu’elle a appris à aimer en Angleterre, l’Écossais Robert Burns et Percy Shelley, ou encore les troubadours Marcabru et Guilhem Figueira. Comme d’autres, influencées par le Parnasse contemporain, elles composent des sonnets.

47Lydie Wilson est née à Paris dans une famille d’origine écossaise par son père et flamande par sa mère. Elle était l’aînée de trois enfants. Sa sœur Jeanne avait deux ans de moins qu’elle et son frère George cinq. Bien que Louis-Xavier de Ricard les dise de famille protestante dans la préface au recueil posthume des œuvres de sa femme, ils ont tous reçu le baptême catholique en l’église de Saint-Germain-l’Auxerrois, à Paris. Le père était « commissionnaire en marchandises » et la mère ne travaillait pas. Ses parents sont tous deux des amateurs d’art. Lydie est une amie d’enfance de Louis-Xavier de Ricard, les deux familles étaient voisines à la campagne en bord de Seine et avaient des relations à Paris. Louis-Xavier de Ricard était marquis, son père né à Sète, général de Napoléon et son grand-père, royaliste, commandant du port de Sète avait fui la Révolution en 1793. De plus, ils étaient apparentés à la famille Bonaparte.

  • 16  L.-X. de Ricard, préface d’Aux bords du Lez (Ricard 1891, iii).

48Lydie paraît avoir reçu l’éducation donnée aux filles de son milieu social : auprès de sa mère et avec des précepteurs, cette éducation lui a permis d’acquérir une culture très poussée. Elle a fréquenté le salon littéraire de la générale de Ricard sous l’Empire finissant, au temps de la fondation du mouvement poétique du Parnasse contemporain. Lydie a effectué un séjour dans le centre de l’Angleterre en pension, à Kenilworth (comté de Warwick). À son retour, elle maîtrisait parfaitement l’anglais et en rapportait deux admirations pour les poètes Percy Shelley et Robert Burns. À Paris, elle suit alors avec sa sœur Jeanne des cours dans l’atelier d’un peintre Dupuy, qui « s’étant compromis dans la Commune, rentrait d’un exil en Angleterre16 ». Le mariage du jeune couple a eu lieu le 16 août 1873, près de Montfort-l’Amaury sur les terres de Simon de Montfort, à Autouillet, où les parents Wilson possédaient une résidence. La cérémonie, uniquement civile, s’est déroulée dix-huit mois après le retour d’exil de Louis-Xavier de Ricard, consécutif à sa participation à la Commune de Paris. Un contrat de mariage a auparavant été signé à Paris, favorisant l’épouse, les deux futurs mariés étant majeurs, en présence de Mme Wilson qui l’a paraphé. Peu de temps après le couple est parti pour Montpellier où ils vivront tout d’abord près de Figuerolles, puis au Mas du Diable, à Castelnau-le Lez, puis dans une villa rebaptisée Mas de la Lauseta et, après la mort de tuberculose de sa sœur Jeanne, en 1877, toujours dans le quartier du Plan des quatre seigneurs à Montpellier, au Mas d’Encombe.

49Dans les deux textes biographiques sur sa femme, dans Aux Bords du Lez (1891) et Le Montpellier Républicain (1896) Louis-Xavier de Ricard, soulignons-le, parle de « communes idées », et non d’identité d’idées de Lydie avec lui. Si l’on peut trouver l’exposé de ces idées dans les nombreux textes théoriques de Louis-Xavier de Ricard dès cette période, il n’en va pas de même pour Lydie Wilson qui, comme « la grande majorité des femmes s’abstenait de toute déclaration de nature théorique » (Planté 1989, 329).

50Cependant, c’est à la fois dans ses actes, dans certaines de ses œuvres parues dans Aux bords du Lez et dans ses lettres à Auguste Fourès que l’on va trouver chez elle l’affirmation de ces « communes idées », républicaines, fédéralistes, féministes et anticléricales.

51Atteinte, elle aussi, de tuberculose, maladie qui ne porte pas encore de nom, elle vit ses derniers mois à Paris, près de sa mère mais, selon sa volonté, elle est enterrée civilement à Montpellier, à une époque (1880) où ces obsèques étaient un engagement républicain et faisaient toujours scandale. Un hommage lui a été rendu au cimetière Saint-Lazare par les socialistes Ernest Jourdan et Antide (Antoine) Boyer.

Engagements dans la renaissance d’oc

  • 17  D’après Jourdanne 1897, 120.

52C’est à Montpellier qu’elle découvre tout à la fois la langue du Midi et ses paysages, dont le Lez. Elle bénéficie pour son apprentissage des conseils d’Auguste Fourès et de Charles de Tourtoulon, premier président de la Société des langues romanes. Elle participe avec son mari et Auguste Fourès à la création du Félibrige languedocien républicain appelé par la suite « Félibrige rouge17 », à l’édition de leur almanach, La Lauseta pour 1877, 1878 et 1879. Elle est présente également dans l’Armanac de Lengadò de 1877. Elle obtient le premier prix du sonnet avec son poème A la mar Latina aux Fêtes latines de Montpellier en mai 1878, tout en participant aux préparatifs du banquet de l’association fédéraliste L’Alouette, dont le président d’honneur est Victor Hugo, au faubourg Figuerolles. La première Cour d’Amour de l’école du Paratge de Montpellier, à Font-Froide est sa dernière apparition publique. Elle était également, avec son mari, à l’origine de l’association La Cigale de Paris. Trois de ses œuvres ont paru dans le volume de l’association en 1880 : « A la mar Latina », « Lous bords dau Lez » et « Le Lez » en français.

53Elle laisse une œuvre en français et en occitan publiée en 1891 à Paris chez Lemerre sous le titre Aux bords du Lez. Elle entretient une correspondance importante notamment avec Auguste Fourès, son parrain en Félibrige, amoureux de sa sœur Jeanne, qui dédie aux deux sœurs de nombreux poèmes. La correspondance qui faisait l’objet de notre thèse, publiée sous le titre Lettres de la Félibresse rouge en 2013, confirme que Lydie a bien appris le languedocien, dialecte de Montpellier, même si ses premiers textes semblent avoir été traduits soit par Fourès soit par Arnavielle pour l’Armana de Lengadò. Sa « Migrana », parue dans La Lauseta de 1877 et dont au moins trois versions existent en français, dont une parue à Paris dans Le Musée universel en 1875, parsemée de mots occitans, a inspiré le seul poème en occitan de Napoléon Peyrat, l’historien du catharisme, « A Dona Graciorella Milgrana Felibressa », paru dans La Lauseta de 1878.

54Dans la Revue des langues romanes de janvier 1877, Alphonse Roque-Ferrier salue à sa façon l’avènement de La Lauseta, remarquant toutefois « une pièce écrite avec un charme et une harmonie bien rares » (Roque-Ferrier 1877, 268) dont il rattache l’écriture « à un des dialectes parlés dans le département de l’Aude » (la traduction de Fourès) et qui est signé Na Dulciorella. La note semble indiquer qu’il pense à un pseudonyme de Xavier de Ricard. « Migrana » est donc la première pièce de Lydie publiée par extraits dans la Revue des langues romanes, la seconde étant « La Figueira », reprise en plaquette chez Coulet à Montpellier. « Lous bords dau Lez » et « A la mar Latina » seront publiés dans la Revue de 1878.

55La période politique qui correspond à l’installation du couple à Montpellier est celle de l’ordre moral : les communards peuvent toujours être poursuivis, l’amnistie n’interviendra qu’après la mort de Lydie. Les félibres républicains qui ne peuvent parler ouvertement de politique vont faire le choix de l’histoire du catharisme et des textes engagés des troubadours pour exprimer leurs idées. Les traductions de Marcabru et de la Chanson de la Croisade par Na Dulciorella (elle a été baptisée ainsi par Fourès) sont de cette veine. Elle a tiré inspiration du sirventès de Guilhem Figueira « Roma Trichairitz » (PC 217.2), qu’elle a traduit à partir des Troubadours de Raynouard dans La Lauseta de 1877, pour un poème en français, Aux Cloches qui est une charge contre l’Église catholique.

Conclusion

56Ces trois femmes ont reçu une éducation et une instruction qui ne concerne pas alors toutes les femmes. Parmi elles, celle de Lydie Wilson a été particulièrement poussée vers les arts. Elles ont eu l’audace, selon l’expression de Lucie Delarue Mardrus, (Cosnier 2001, 16) d’écrire, d’écrire en français et en languedocien de Montpellier pour la Parisienne Lydie Wilson de Ricard, en provençal pour les deux autres. Elles ont pu être éditées dans les revues et almanachs des associations très dynamiques qui défendaient les langues romanes, associations qui ont reconnu leur originalité et les ont accueillies. Leurs milieux leur ont permis de consacrer une partie de leur temps à leur œuvre, même si, ayant intégré la place de seconde dévolue aux femmes par le patriarcat, elles ont aidé leurs conjoints dans leurs tâches et leurs œuvres. Si la charge de famille de Rose-Anaïs et Léontine empiétait sur le temps qu’elles ont pu consacrer à leur œuvre, ce n’était pas le cas pour Lydie Wilson de Ricard. Malgré une reconnaissance qui s’est concrétisée par différents prix, elles ont été peu à peu effacées de la création occitane. Léontine avait osé, ce qui n’était pas courant alors pour une femme, rassembler ses poèmes en recueil avant de se marier. En effet les recueils de félibresses ont été constitués habituellement par des proches de façon posthume. Celui de Léontine Goirand a été alors reconnu par la critique comme doté d’une poésie « forte ». Toutes trois composaient des sonnets.

  • 18   « A la mar latina » parait dans La Lauseta de 1879, sous le pseudonyme de Lidia Colonia, dans la (...)
  • 19Na Dulciorela pour Lydie Wilson de Ricard, Léontine Goirand est aussi la Félibrese de Nîmes tandis (...)

57Si Rose Anaïs s’est limitée à la poésie tout en écrivant des sonnets, genre d’un registre élevé, Lydie et Léontine se sont essayées à la prose, poétique pour Lydie dans Aux bords du Lez, journalistique pour Léontine. A la mar latina18 de Lydie Wilson de Ricard, primé aux fêtes de Montpellier en 1878, est un sonnet qui, écrit le rapporteur, risque de « faire éclater le moule », moule alors qui sert tant à Sainte-Beuve et à Gautier qu’aux poètes du Parnasse contemporain, la forme du sonnet étant réputée « peu accessible aux femmes » (Planté 1998, 15). Elles se sont toutes trois essayées à la traduction et se sont lancées dans l’écriture avec fougue. Toutes trois ont affirmé leurs prénoms ; tout en conservant la tradition d’utiliser celui de leurs maris. Leurs noms de félibresses19 sont le signe d’appartenance au Félibrige, tout comme les hommes.

58Qu’est-ce qui les a arrêtées mis à part la maladie et la mort ? Qu’est-ce qui fait que nous ne les retrouvions pas jusqu’ici aux côtés des grands poètes provençaux ou languedociens ?

  • 20  Voir L.-X. de Ricard, préface d’Aux bords du Lez (Ricard 1891, viii).
  • 21  Paru dans l’anthologie LAlliance Latine (Ricard 1878, 52).

59Dans ce qui a été présenté ici, nous retrouvons à l’œuvre le discours androcentrique qui va les effacer. Rose-Anaïs Gras a produit une œuvre mais pour l’historien du Félibrige, c’est surtout une mainteneuse qui a permis l’édition de l’Armana Prouvençau. Quand on inaugure une plaque sur sa maison natale, c’est pour honorer le capoulier et sa sœur, elle n’est même plus félibresse… Si la poésie de Léontine est « forte » pour Roussot, le critique de La Provence artistique, c’est en opposition à la poésie des autres femmes qui est habituellement, selon lui, « pleurnicharde ». Pour Lydie Wilson de Ricard, son œuvre dont elle n’avait gardé que les textes choisis20 avec rigueur, a été limitée par sa courte vie, ses idées « rouges » l’ayant certainement desservie. Autre signe du discours androcentrique au xixe siècle : un poème intitulé « La Lauseta », qui lui avait été dédié par Charles de Tourtoulon21, s’est retrouvé dédié par un auteur à Louis-Xavier de Ricard, son mari…

60Il nous reste beaucoup d’écritures de femmes à découvrir, soit parce que ces écrits n’ont pas été recherchés et dorment dans les archives, soit parce qu’ils ont été perdus, considérés comme peu importants. L’étude des vies et des œuvres de ces femmes, de leurs relations et de leurs correspondances nous permettent une approche plus vivante, plus intime, du Félibrige, qu’une histoire où ne figureraient que les seuls textes des grands hommes, qu’ils s’appellent Mistral, Aubanel, Roumanille ou Ricard. De même, les œuvres de ces hommes, regardées en remettant en cause le discours androcentrique, pourraient sans doute nous réserver des surprises.

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Mazoyer, Marineta, 2013. Léontine Goirand… étoile filante d’Arène/Leontina Goirand… estela limpaira dArena, Nîmes, Comedia.

Planté, Christine, 1989. La petite sœur de Balzac, Paris, Seuil.

Ribière, René, 1961. Pétrarque et les sept de Font-Ségugne, Cavaillon, L’Auteur.

Ripert, Émile, 1934. Avignon au xixe siècle. La librairie Roumanille, Lyon, Rey.

Roque-Ferrier, Alphonse, 1877. « Quatre Almanachs en Langue d’Oc », Revue des langues romanes, série 2, vol. 3, p. 263-268.

Thébaud, Françoise 1998. Écrire l’Histoire des femmes, Fontenay-aux-Roses, ENS Fontenay-Saint-Cloud.

Webographie

Blin-Mioch, Rose et Mazoyer, Marinette, « Goiran, Leontina (1853-1933) », Vidas. URL : https://vidas.occitanica.eu/items/show/2066.

Blin-Mioch, Rose, « Leontina », sur http://rose.mioch.free.fr/leontina.htm.

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Notes

1  Car un cantique étant le remerciement de la reconnaissance populaire, doit être compris du peuple tout entier (trad. RBM).

2  Toi qui as permis à la Durance / de voir et de baiser tes os / Écoute-nous quand sur ta tombe / nous chantons dans la langue de Provence ! / Et si tu veux que nous renouvelions / cette fête à ton petit-fils / demande en récompense / qu’au Félibrige il donne souffle / Oh belle sainte amicale.

La petite Anaïs à Sainte Anne : / Sainte Anne d’Apt, tu es ma patronne / C’est moi la petite Anaïs / Garde pour moi au paradis / Garde moi un rayon de ta couronne… / Bretonne, et je veux te chanter ! / Puisse mon gazouillis te plaire / Je ne suis qu’une petite fille, / Protège-moi, sainte Anne d’Apt ! (trad. RBM).

3  Je l’aime, je l’aime, ô Mère de Dieu / Et il me semble que sœur et frère / Ensemble, main dans la main, / Nous te disons, Vierge, que nous t’aimons / et nous te prenons pour notre mère / Mais je pleure toute seule et loin de lui… (trad. RBM).

4  Voir ci-dessous la lettre de Roumanille à Mistral en 1865 : nous avons envoyé un ange au ciel.

5  Ô mort ce n’est pas le fille heureuse / qu’il fallait faucher impitoyable / dans la gloire de ses vingt ans // Mais moi, mère, pauvre femme / qui baigne en vain de mes larmes / le berceau vide de mon enfant (trad. RBM).

6  Mère ce n’est pas la mort : ce sont des anges / qui t’ont pris ton petit enfant. (trad. RBM).

7  Le second / que tu crois son frère, / Est bien tien, mon félibre, et ne peut plus s’en aller / Le nouveau né / Car, regarde, il n’a pas d’aile ! (trad. RBM).

8  Son mari est mort à Hanoï en 1899 avant la naissance de leur enfant avec lequel elle rentrera en France où il est mort en 1909.

9  La felibresso de la Travèsso était une religieuse de la Visitation (Jourdanne 1897, 112).

10  On peut se le demander en la retrouvant référencée dans le chapitre consacré à son mari dans le Dictionnaire des auteurs de langue d’oc. De 1800 à nos jours, paru en 1994. L’auteur, Jean Fourié, a corrigé dans la seconde édition (Fourié 2009).

11  Auteur de Documents sur le coup d’État de 1851 dans le Gard (1881) et Documents historiques sur Alais pendant la Révolution (1889).

12  Sur l’initiative de son cousin ?

13Bulletin de la Société archéologique, scientifique et littéraire de Béziers, 1879, p. 84-85.

14  Également dans la Revue des langues romanes V-XIII, 1878, p. 270-272.

15  Il s’agit de la Baronne de Pagès, la Félibresso de la Dindouletto, née Clémence Vernède de Corneilhan.

16  L.-X. de Ricard, préface d’Aux bords du Lez (Ricard 1891, iii).

17  D’après Jourdanne 1897, 120.

18   « A la mar latina » parait dans La Lauseta de 1879, sous le pseudonyme de Lidia Colonia, dans la Cigale de Paris (1880) et dans la Revue des langues romanes, V-XIII, 1878, p. 279. Ce volume comprend aussi « Lous bords dau Lez » (p. 84).

19Na Dulciorela pour Lydie Wilson de Ricard, Léontine Goirand est aussi la Félibrese de Nîmes tandis que Rose-Anaïs signe de son nom de naissance, puis du nom de son mari ou Félibresse Rose Anaïs.

20  Voir L.-X. de Ricard, préface d’Aux bords du Lez (Ricard 1891, viii).

21  Paru dans l’anthologie LAlliance Latine (Ricard 1878, 52).

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Pour citer cet article

Référence papier

Rose Blin-Mioch, « Les trois premières femmes de la Revue des langues romanes »Revue des langues romanes, Tome CXXV n°2 | 2021, 235-258.

Référence électronique

Rose Blin-Mioch, « Les trois premières femmes de la Revue des langues romanes »Revue des langues romanes [En ligne], Tome CXXV n°2 | 2021, mis en ligne le 01 janvier 2022, consulté le 09 octobre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rlr/4376 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/rlr.4376

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Auteur

Rose Blin-Mioch

Université Paul-Valéry Montpelllier 3, ReSo EA 4582

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