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Le rey Artus, texte occitan du xviiie siècle

Le rey Artus, an Occitan text from the 18th century
Xavier Bach et Pierre-Joan Bernard
p. 129-140

Résumés

Le Rey Artus est une pièce versifiée imprimée en occitan du tout début du xviiie siècle, jusque-là inédite, dont l’unique exemplaire connu est conservé dans le fonds de la sénéchaussée de Lauragais aux Archives départementales de l’Aude. Ce texte s'inscrit dans le cadre légendaire de la chasse du roi Arthur ou chasse volante, sans référence explicite à la littérature médiévale, qui se rattache aux croyances populaires fantastiques dont nous avons ici une des plus anciennes attestations en domaine occitan. S’ensuit le récit d’aventures d’apparence cynégétiques, mais qui en réalité joue sur une équivoque entre la chasse et l’acte sexuel. L’interprétation et les enjeux mêmes du texte restent cependant énigmatiques. Il semblerait qu’on ait affaire à une production originale d’une bande de hors-la-loi semant la terreur par le viol dans la région de Castelnaudary et dont la qualité ne laisse pas de surprendre.

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Notes de l’auteur

Nous remercions Gilda Caiti-Russo, Jean-François Courouau et Philippe Gardy pour leurs commentaires sur une précédente version de cet article. Toute erreur est bien sûr de notre seule responsabilité.

Texte intégral

Introduction

  • 1  Pour une synthèse sur le texte occitan du xviiie siècle, voir Courouau (2015).
  • 2  Yves Castan relève la présence de l’occitan dans les procédures principalement à travers des chans (...)

1Les sources judiciaires recèlent encore des inédits, qui ne se rattachent pas aisément à la typologie habituelle du texte occitan de l’époque moderne1. On y trouve essentiellement des pamphlets, des chansons insultantes, et de petits manifestes dont l’interprétation est délicate en l’absence de contexte2. Ainsi les Archives départementales de l’Aude conservent-elles dans un recueil de factums imprimés de la sénéchaussée de Lauragais un feuillet imprimé en occitan et en vers intitulé Le Rey Artus (cote B1975). Le recueil factice dans lequel ce texte est relié contient des textes datés principalement des années 1704-1705, et en l’absence de datation de l’imprimé, cette date peut être retenue : les caractéristiques matérielles de l’imprimé correspondent en effet à une impression du début du xviiie siècle ou de la fin du xviie siècle. Le ressort de la sénéchaussée-présidial de Lauragais, établie à Castelnaudary, est connu. Il s’étend sur environ 150 communautés à cheval sur les actuels départements de la Haute-Garonne et de l’Aude, quasiment des portes de Toulouse (par exemple Vieille-Toulouse) aux portes de Carcassonne (par exemple Bram). À l’époque du texte il y avait aussi un présidial à Limoux et à Carcassonne (Claerr 2011). Le texte est donc originaire du nord-ouest de l’Aude ou de l’est de la Haute-Garonne. La langue du texte correspond parfaitement à cette zone géographique : article masculin le, première personne du singulier du présent du verbe ‘être’ en soun, déterminants et quantifieurs avec un pluriel masculin en -is (unis, quantis).

2Le texte se présente sur une feuille de format 22 x 35 cm avec le titre en capitales et le texte en italiques, organisé sur deux colonnes de quatre strophes séparées chacune par un double fleuron, imprimées sur papier au recto seulement. Il comprend huit sizains d’octosyllabes aux rimes AABCCB ou AABCBC selon les sizains. On peut en rapprocher les caractéristiques matérielles des productions sorties des presses de l’imprimeur toulousain Jean-Paul Douladoure à la même époque, qui s’en rapproche au niveau de la typographie et de la composition, par exemple Jean Joseph Samedies, Collectanea medica…, Toulouse, Douladoure, 1702. Il reprend non pas la légende arthurienne des romans médiévaux, mais la thématique populaire de la chasse du roi Arthur ou chasse volante, puis décrit divers éléments de chasse.

Édition du texte

  • 3  Nous faisons le choix d’une édition diplomatique, qui correspond en fait largement aux critères d’ (...)

3L’édition est strictement diplomatique et respecte les caractères de l’imprimé, y compris les coupures de mot et la ponctuation3.

LE REY ARTUS
YEV soun Artus aquel gran Rey,
Qu’a tout le moundo fau la ley,
Qual dire de la populasso,
[4] D’aquelis qu’an prés l’espaben,
Soun l’omé qu’on auh ta souben,
Que per layré casso la Casso.

Que meny que nou soun pas lasses,
[8] Unis quantis truco bartasses,
Que dansaran & cassaran,
Et dins tres ou quatre cambados,
Cous beyrex que ; descargaran :
[12] Centen qualques Arquebusados.

Per tira dreit noun doutex pas,
Car qu’an serion pres qual trespas,
Coulquats pel sol ambé la febre,
[16] Be cal que courro bitomen,
Se bezen passa qualque Lebre,
Et nou la tocoun jantimen.

Apres aco, gens de lebado,
[20] Taleu l’arquabuso tirado,
Nauriots pas soulomen badat,
Que taleu que ce lour desparo,
Encaro naurex pas dit garo,
[24] Qu’an cargat, moursat, & bandat.

Iamay pus nou ce troubec gens,
dins le moundo ta diligens,
Centen per carga l’escoupeto,

[28] D’au crida tant yeu bendrio raug,
Nou fan qu’arranca la bergueto,
E sag sag sag dedins le traug.

Iamay pus nou ce bic gens d’armos,
[32] Ta diligentis à las armos,
Toutis equipats de fusils,
Dambaquo gaffon tout en laire,
E part aco quado cassayre,
[36] A soun Furet per les Counils.

Sy pey alargon les Lebriés,
E que ce salben pes clapiés,
Cou fan souben à belo couxo,
[40] Nou fan que tendre sul fourat,
E taleu le furet intrat,
Besex le counilh à la bouxo.

L’autre joun, joun de dimars gras,
[44] Ne troubeguen un dins le jas,
Dabort un de mas gens le couco,
E sabex pla ce le touqueg,
Baurio pla tort car li planteg,
Miech pe de fusil dins la bouco.

Traduction

4LE ROI ARTHUR

  • 4  Truco bartasses : nous n’avons pas trouvé ce terme dans les dictionnaires disponibles, mais Mistra (...)
  • 5  Gens de levado : Mistral s.v. levado donne ‘gens avides, rapaces, voleurs’ que nous retenons ici. (...)
  • 6  Baurio : on peut comprendre ce verbe comme soit indéfini (‘on aurait tort’), soit comme la réducti (...)

5Moi, je suis ce grand roi Arthur / Qui fait la loi à tout le monde / (Je veux dire à la populace, / À ceux qui sont pris d’épouvante), / Je suis l’homme qu’on entend si souvent / Chasser la Chasse dans les airs. // Je mène (ils ne sont pas fatigués), / Un certain nombre de maraudeurs4, / Qui danseront et chasseront, / et en trois ou quatre enjambées, / Vous les verrez qui déchargeront : / J’entends quelques coups d’arquebuse. // Ne doutez pas qu’ils visent bien, / Car même s’ils se trouvaient proches de la mort, / Couchés par terre et fiévreux, / Ils ne peuvent s’empêcher de courir en vitesse, / S’ils voient passer quelque Lièvre / Sans le toucher gentiment. // Après cela, ces voleurs5, / Sitôt avoir tiré l’arquebuse, / On a à peine le temps de bâiller, / Qu’aussitôt le coup est parti, / Vous n’aurez pas encore dit gare, / Qu’ils auront déjà chargé, amorcé et bandé. // On ne trouva jamais de gens / dans le monde plus vifs, / J’entends pour charger l’escopette, (À le crier plus j’en perdrais la voix), / Ils ne font que saisir la baguette, / et sac ! Sac ! Sac ! dans le trou. // Jamais on ne vit de gens d’armes, / Aussi vifs aux armes, / Tous équipés de fusils, / Avec lesquels ils attrapent tout ce qui passe en l’air, / Et à part cela, chaque chasseur / A son Furet pour les Lapins. // Si ensuite ils lâchent les Lévriers, / Et qu’ils [les lapins] se sauvent dans les terriers, / Comme ils le font souvent à toute vitesse / Ils ne font que tendre leurs pièges sur les trous de terriers, / Et aussitôt le furet entré, / Vous voyez le lapin sortir à la bouche. // L’autre jour, jour de mardi gras, / Ils en trouvèrent un au gîte, / Aussitôt un de mes gens le lève, / Et je vous assure qu’il l’a touché ! / Vous auriez6 bien tort, car il lui a planté / Un demi-pied de fusil dans la bouche.

Analyse

  • 7  Nous remercions Bénédicte Bonnemason pour ses éclairages sur le thème de la chasse volante. Pour l (...)

6La première strophe, qui sert de cadre, sous la forme d’une proclamation solennelle, place d’emblée le texte dans le contexte de la légende de la chasse volante du roi Arthur : Soun l’omé qu’on auh ta souben, / Que per layré casso la Casso. Ce thème est bien attesté dans les pays occitans, essentiellement à l’ouest du domaine, en Gascogne et en Languedoc (Arnaudin 1991, 250-251 ; Bladé 1886, 296-297 ; Du Mège 1829, 354 ; Joisten 1962, 50-51 ; Peyret 1851 ; Sébillot 1904, 165-169), et se rattache à la légende-type pan-européenne de la « chasse sauvage » ou « chasse aérienne » qui prend ailleurs d’autres noms (Mesnie Hellequin, chasse du roi Hérode, etc. voir la classification Thompson 1955, type E5017). Plus largement, ces récits légendaires se rattachent aux croyances liées au monde de la nuit et aux peurs engendrées par les bruits nocturnes. Dans le texte, le roi affirme d’ailleurs son autorité par la peur qu’il exerce sur la population (l’espaben). Mais là où dans la légende orale le roi Artus chasse en vain dans les airs, n’attrapant au mieux qu’une mouche tous les sept ans (Bladé 1886), le roi est ici un chasseur accompli, et sa bande de chasseurs fait mouche à chaque coup de fusil. On notera par ailleurs que ce texte constitue la plus ancienne mention de cette légende en pays occitans. Il s’agit bien d’une référence à la littérature orale, et pas à la littérature écrite et savante du temps ou du Moyen Âge : le roi Arthur est quasiment absent de la littérature en France à l’époque moderne (à part la publication de romans de chevalerie comme l’Histoire… du preux et vaillant chevalier Artus de Bretaigne publié dans la bibliothèque bleue en 1628), et aucune des références médiévales ou modernes aux personnages ne parlent de chasse infernale et aérienne. La seule exception est Gervais de Tilbury dans les Otia Imperalia, qui parle de la légende, mais sans la mettre plus en lien avec le cycle des romans arthuriens. De même Goudouli mentionne-t-il le roi Arthur dans sa Tresiémo floureto, mais sans référence à la chasse (« Prologue per les Coumpaignous de Diomedo tremudats en Cygnes »).

7Le reste du texte raconte les exploits de cette bande de chasseurs qui suivent Arthur dans sa chasse. Il décrit d’abord les chasseurs et leurs attributs (ils ne se fatiguent jamais, ont chacun leur fusil et leur furet pour la chasse, font mouche sur tout ce qui passe au-dessus d’eux), puis la chasse aux lièvres et aux lapins avec des lévriers (chasse courante) et des furets (chasse au terrier), et se clôture sur une anecdote de chasse. Leur armement ne comporte que des armes à feu : le texte parle de fusils, d’escopettes et d’arquebuses, mais ces deux dernières sont alors des armes qui à l’époque du texte n’ont plus cours, et qui sont plutôt des armes de guerre. Il s’agit plus probablement de fusils, chargés par la bouche (Nou fan qu’arranca la bergueto, / E sag sag sag dedins le traug). Les armes à feu semblent être très répandues dans les campagnes du Languedoc au xviiie siècle : « À signaler, en priorité, la fréquence du port d’armes (blanches ou à feu) en dépit des interdits. Les ordonnances royales le prohibent, en exceptant les gentilshommes et officiers. Mais l’autorité militaire distribue des dérogations en fonction de la qualité ou de la sécurité. […] De fait, beaucoup de gens et de paysans entre autres, sont armés bien avant la Révolution. » (Castan 1980, 92).

8Le texte donne une indication d’une autre lecture possible par des sous-entendus de nature sexuelle : Et dins tres ou quatre cambados, / Cous beyrex que ; descargaran : / Centen qualques Arquebusados. Le fait que l’auteur tienne à préciser, par l’expression centen “par quoi il faut comprendre”, qu’il s’agit véritablement de décharger une arquebuse montre clairement qu’il attend de l’auditeur ou du lecteur qu’il comprenne le verbe dans un autre de ses sens, celui d’éjaculer. Ce passage contient aussi la seule marque de ponctuation surprenante du texte, un point-virgule avant descargaran, qui pourrait servir à marquer une pause avant ce terme à double entente. La mention des cambados “enjambées, culbutes” qui précèdent la décharge peut s’entendre comme une allusion à l’acte sexuel. C’est d’ailleurs exactement ce même double sens qui se retrouve dans la “chanson de Peronne” dans l’Histoire de la réjouissance des chambrieres de Beziers du Théâtre de Béziers, accompagné d’une référence claire à un acte sexuel (elles ont été mises enceintes) :

Sus de gabels nous an rounsados,
Savés las fa las tres cambados,
Et à qui nous an empreignados,
Savés las fa
Savés las fa las tres cambados,
Savés las fa.
(éd. Gardy, in Louvat 2019, 364)

9L’auteur utilise l’expression centen une deuxième fois à la cinquième strophe, à propos de la rapidité des chasseurs, cette fois-ci avec l’idée de recharger (possiblement, être rapidement à nouveau prêt à accomplir un acte sexuel) : Iamay pus nou ce troubec gens, / dins le moundo ta diligens, / Centen per carga l’escoupeto.

10La métaphore de la chasse pour dépeindre soit le désir sexuel, soit la relation amoureuse, soit l’acte sexuel lui-même a de longue date été utilisée dans la tradition occidentale, mais semble aussi relativement commune dans d’autres traditions du monde (voir Emanatian 1996 à propos des Chagga, et Scott 1989, 197 à propos des Cree). On trouve ainsi la comparaison entre chasse et désir sexuel chez Socrate (Rösch 2018) ou dans la Phèdre de Sénèque (Mocanu 2012), où la chasse sert surtout de métaphore au désir féminin. Mais ici comme dans de nombreux autres textes, la chasse sert surtout à indiquer un désir tout masculin (voir López Maestre & Ramón Sales 2005 pour les traditions espagnoles et anglaises). Dans le domaine occitan, Marcabru utilise cette métaphore en comparant la fidélité de la dame à un terrain de chasse réservé au seigneur sur lequel il chasse aussi (Gaunt 1989, 56). La métaphore du chasseur de lièvres comme amant à la poursuite d’une dame est aussi présente chez Guiraud de Salaignac (BdT 249, 1, 1) :

Aisi cum selh qu’a la lebre cassada
E pueys la pert et autre la rete
Tot atressi es avengut a me
d’una falsa qu’ai lonjamen amada
(éd. Strempel 1977)

11La métaphore de la chasse pour parler de l’acte sexuel est aussi bien présente dans la tradition orale occitane, dans la chanson comme dans le conte ou l’histoire plaisante. On pense par exemple à la bourrée collectée par Louis Lambert :

Rencountrère un cassaire
Tout lou lon dai riéu ;
Au lioc de tirà à la lèbre,
Paureta ! m’o tirat a iéu.

Las balas que tirava
N’èrou pas de ploumb ;
Èrou d’una autra marchandisa
Que fòu couflà lou coutilhoun.
(Lambert 1906, 61-62)

12Quelques histoires de chasse grivoise sont aussi publiées pour le Tarn, l’Aveyron et le Lot (Loddo 2018, 431-437).

13À la lumière de ces éléments, ce texte change radicalement de sens, pour décrire une bande de violeurs qui sème la terreur : un texte donc qui joue sur l’ambiguïté et le double sens. Les multiples références aux armes à feu renvoient ainsi au sexe masculin (cf. Loddo 2018, 431), et le décalage entre le type d’arme et le gibier chassé s’explique par les besoins de cette métaphore des armes à feu. Le texte ne parle d’ailleurs que d’hommes, qui chassent exclusivement des lièvres et des lapins. Notons que lèbre est féminin en occitan, et que le lapin (sous le terme de counil, et non de lapin, à rapprocher du français con ou connin) est fréquemment associé au sexe féminin (Mistral, un peu prude, mentionne le terme comme “bas” pour désigner les femmes), comme en français ou en anglais la chatte. Le sexe masculin est quant à lui comparé au furet, qui s’introduit dans le terrier pour en débusquer les lapins : E part aco quado cassayre, / A soun Furet per les Counils.

14La dernière strophe, d’anecdote de chasse, devient le récit d’un viol probable, le jour de mardi-gras en plein carnaval, le jour par excellence de la débauche et de l’inversion. Une fille est débusquée de sa cachette ou de son lit (Ne troubeguen un dins le jas), puis pourchassée et rattrapée par l’un des membres de la troupe (Dabort un de mas gens le couco, / E sabex pla ce le touqueg). Le texte s’achève sur la mention d’une fellation forcée (car li planteg, / Miech pe de fusil dins la bouco), que l’on trouve rarement dans les textes à caractère sexuel des xviie et xviiie siècles en France (par exemple dans le chansonnier Maurepas). On peut mentionner dans la littérature un sonnet de Du Pré analysé comme une scène de fellation par Courouau, avec un système de doubles sens équivoques (Courouau 1995 : 38-39), à ceci près que chez Du Pré il semble s’agir d’une scène sexuelle tout à fait consensuelle, alors qu’on a ici affaire à une scène de viol. Une autre feuille volante du xviie siècle en occitan se fonde sur un double sens du même ordre, cette fois-ci entre le labour et l’acte sexuel, mais là encore il semble que ce soit consenti (Gardy 1996). Les métaphores pour évoquer l’acte sexuel sont courantes dans les textes de cette époque, notamment les chansons (Bach & Bernard 2015, 253).

Conclusion

15La première chose à noter, c’est que ce texte est conservé sous forme d’imprimé en feuille volante : si ce genre d’imprimé a probablement été produit en grande quantité, sa conservation est relativement rare pour la période. On peut par exemple le rapprocher des quelques imprimés toulousains similaires du xviie siècle édités sur le site Bibliotheca Tholosana, qui ont en commun une certaine obscurité du texte qui doit être interprété en fonction d’un contexte aujourd’hui perdu. Ce Rey Artus s’inscrit dans un cadre légendaire, mais le texte joue sur le double-sens et l’équivoque, avec un sous-texte clairement sexuel. Reste en suspens la question de la nature du texte, puisqu’il est conservé dans un recueil de procédures judiciaires : malheureusement, aucune de ces procédures ne contient de référence à ce texte. À première vue, il pourrait s’agir d’un manifeste de brigands, mais la production d’un tel texte exige, outre une certaine éducation et une plume, les moyens de le faire imprimer. La qualité matérielle autant que littéraire de ce texte surprend par comparaison avec les quelques textes en occitan (chansons, libelles) conservés dans d’autres procédures en Languedoc.

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Bibliographie

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Notes

1  Pour une synthèse sur le texte occitan du xviiie siècle, voir Courouau (2015).

2  Yves Castan relève la présence de l’occitan dans les procédures principalement à travers des chansons (Castan 1974, 118-119). Plus récemment, Paul Cohen (2016), dans son étude sur l’occitan dans les procédures de torture en Toulousain à l’époque moderne, a démontré que l’occitan, et plus généralement les langues romanes, n’étaient pas perçues comme étrangères au même titre que le basque ou le breton ou les langues du Nouveau Monde, et que la plupart des magistrats étaient bilingues en Languedoc. De ce fait, les cours ne faisaient pas appel à des traducteurs comme il était obligatoire légalement, mais les propos ou les textes pouvaient figurer directement en occitan. Cela explique que l’on trouve des textes occitans dans les archives judiciaires, mais pas de textes bretons ou basques.

3  Nous faisons le choix d’une édition diplomatique, qui correspond en fait largement aux critères d’édition des textes modernes occitans de Bibliotheca Tholosana, puisque le texte ne présente pas de problèmes quant à la distinction u/v et i/j, qui y suivent l’usage moderne, et que ces principes respectent aussi la ponctuation.

4  Truco bartasses : nous n’avons pas trouvé ce terme dans les dictionnaires disponibles, mais Mistral donne le sens de ‘maraudeur’ pour sauto-bartas, qui semble convenir au contexte ici.

5  Gens de levado : Mistral s.v. levado donne ‘gens avides, rapaces, voleurs’ que nous retenons ici. Le terme vient probablement de la levée des armées, réputées pour vivre sur le pays et piller ce qui leur était nécessaire pour vivre.

6  Baurio : on peut comprendre ce verbe comme soit indéfini (‘on aurait tort’), soit comme la réduction phonétique d’une deuxième personne du pluriel due au groupe consonantique qui suit (pour auriots, logique dans ce parler). Dans tous les cas, le b- initial est à comprendre comme une réduction de l’adverbe ben, puisque le pronom neutre tend à être au dans la zone probable d’origine du texte, sauf à ce qu’il vienne de la zone qui utilise ba. L’articulation logique de cette phrase avec celles qui l’entoure est en tout cas peu claire.

7  Nous remercions Bénédicte Bonnemason pour ses éclairages sur le thème de la chasse volante. Pour les mentions littéraires de la chasse volante dans les périodes précédant ce texte, voir notamment Dubost (1991, 331-351). Pour les aspects d’anthropologie historique, voir en particulier Schmitt (1994, 115-145, et 2001, 211-237).

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Pour citer cet article

Référence papier

Xavier Bach et Pierre-Joan Bernard, « Le rey Artus, texte occitan du xviiie siècle »Revue des langues romanes, Tome CXXIV n°1 | 2020, 129-140.

Référence électronique

Xavier Bach et Pierre-Joan Bernard, « Le rey Artus, texte occitan du xviiie siècle »Revue des langues romanes [En ligne], Tome CXXIV n°1 | 2020, mis en ligne le 01 novembre 2020, consulté le 06 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rlr/2953 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/rlr.2953

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Auteurs

Xavier Bach

University of Oxford

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