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Esta canso es faita d’aital guia... Études sur la chanson de geste occitane

Eu ne cug encar far bona canson novela. Les origines et le développement de la chanson de geste historiographique occitane

Carol Sweetenham
p. 14-42

Texte intégral

1Il ne nous reste que peu d’épopées occitanes. Parmi elles, on identifie un sous-genre, récit des événements contemporains ou récents ayant la forme d’une chanson de geste : la Canso d’Antioca, la Canso de la Crozada et la Guerra de Navarra de Guilhem Anelier de Toulouse. On pourrait y ajouter la lettre épique de Raimbaut de Vaqueiras. Les origines de ce sous-genre peuvent être recherchées dans une œuvre perdue de Grégoire Bechada et datant du début du XIIe siècle.

2L’historiographie vernaculaire prit des formes différentes aux quatre coins du monde médiéval. La France du Nord vit surgir l’historiographie en prose dans les premières décennies du XIIIe siècle grâce à un pionnier quelque peu inattendu : Robert de Clari. Sous l’influence de la tradition historiographique anglo-saxonne, l’Angleterre anglo-normande vit une diversité de formes poéti-ques telles les octosyllabes de Wace, et la quasi chanson de geste de Jordan Fantôme. L’Occitanie produisit également une version propre à elle-même qui racontait les événements contemporains ou récents sous la forme d’une chanson de geste et dont l’existence se poursuivit jusqu’à la fin du XIIIe siècle.

  • 1 La Chanson de la croisade albigeoise, éd. Eugène Martin-Chabot, 3 vol (Paris: Champion, 1931-60) ; (...)
  • 2 Prologue, vv. 22-23 : Pos que fo comensatz, entro que fo fenit / No mes en als sa entensa neish a p (...)
  • 3 Crozada, laisse 5, vv. 23-24 : Qu’eu ne cug encar far bona canson novella / Tot en bel pargamin.

3Dans les mots de Guilhem de Tudèle, auteur de la première partie de la Canso de la Crozada, on notera d’abord le débordement d’enthousiasme de l’écrivain néophyte.1 Selon le prologue, son zèle d’écrire était tel que « dès qu’il l’entama jusqu’à ce qu’il le finit, il ne pensa à rien d’autre et dormit à peine ».2 Quand il découvre la victoire de Las Navas de Tolosa il est incapable de se restreindre, ébloui qu’il est par la pensée de tout ce beau parchemin vierge auquel il consacrera ses futurs efforts : « je pense en commencer une belle chanson nouvelle toute en beau parchemin ».3 Ce qui frappe dans ces vers, c’est la première réaction de Guilhem : écrire un ou des poèmes narratifs, soit des chansons de geste historiographiques. Cela suggère que c’était un genre bien connu en Occitanie au moins dès le début du XIIIe siècle.

4Le présent article étudie ces textes occitans. Il examine jusqu’à quel point il est possible de les considérer comme un sous-genre distinct, pose la question de son public, en retrace le dévelop-pement au cours des XIIe et XIIIe siècles, considère le choix de la chanson de geste comme forme et, enfin, offre quelques commentaires sur le contexte politique de l’époque.

La chanson de geste historiographique occitane : textes et traditions

5Il existe trois textes qu’on pourrait décrire comme chansons de geste historiographiques. Ils datent tous les trois du XIIIe siècle :

  • 4 The Canso d’Antioca : an Occitan epic chronicle of the First Crusade, éd. et trad. Linda M. Paterso (...)
  • 5 Voir l’introduction à l’édition de Paterson et Sweetenham.

6– La Canso d’Antioca : un fragment de 713 vers qui décrit la bataille d’Antioche de la Première Croisade ; conservée sur quelques feuilles qui paraissent s’être détachées d’un manuscrit plus grand ; petite et mal écrite.4 Le fragment possède une histoire textuelle complexe. Il reflète probablement en partie un texte produit bien auparavant, dans les premières décennies du XIIe siècle. Dans son état présent, il a subi l’influence de la Chanson d’Antioche du nord de la France, et paraît même avoir été traduit en partie de l’ancien français.5

  • 6 Voir l’étude exhaustive et pertinente de Marjolaine Raguin, Lorsque la poésie fait le souverain : é (...)
  • 7 Martin-Chabot, introduction ch. iv.

7 La Canso de la crozada. Ce texte de près de 10 000 vers décrit les événements de la croisade contre les Albigeois, de son début jusqu’au siège de Toulouse en 1219. Il comprend deux sections. Le premier tiers du texte fut écrit en 1212-13 par un clerc navarrais habitant du Quercy, Guilhem de Tudèle, qui se trouvait plus ou moins en accord avec les objectifs de la croisade. Les deux autres tiers du texte furent l’œuvre, datant probablement de 1228-29, d’un auteur anonyme toulousain (« l’Anonyme ») qui s’oppose violemment à la croisade.6 Le texte complet nous est parvenu dans un manuscrit recopié dans les environs de Toulouse vers 1275 et possède des dessins inachevés.7 Il en existe également des fragments et deux versions en prose plus tardives ;

  • 8 La Guerra de Navarra : Nafarroako Gudua, éd. et trad. Maurice Berthe, Ricardo Cierbide, Xabier Kint (...)
  • 9 Navarra, Introduction, 29-31.
  • 10 Navarra, Introduction, 38-40.

8– La Guerra de Navarra fut écrite à Pampelune pendant les guerres de succession qui s’y déroulèrent en 1276-77.8 Elle dépeint les événements de façon détaillée et vive. Son auteur fut Guilhem Anelier de Toulouse, qui se trouvait probablement à Pampelune dans l’entourage d’Eustache de Beaumarchais.9 Le poème nous est parvenu dans un seul manuscrit qui est de grande qualité et aurait été produit peut-être pour Eustache lui-même.10 Les derniers folios manquent : il subsiste 5119 vers en 104 laisses.

  • 11 Voir Canso d’Antioca, Introduction, 141-43 pour discussion et bibliographie sur l’histoire et utili (...)
  • 12 Voir, par exemple, Navarra laisse 3, où la bataille contre les Maures est racontée de façon presque (...)

9Ces textes offrent des similarités. Tous les trois sont écrits en alexandrins avec un hémistiche en fin de laisse qui se trouve être un vers orphelin.11 Cependant, ce vers est utilisé différemment d’un texte à l’autre. Dans l’Antioca, il n’y a pas de lien visible avec les vers qui le précèdent ou le suivent. La première partie de la Crozada utilise des coblas capcaudadas tandis que la deuxième partie ainsi que la Guerra de Navarra utilisent des coblas capfinidas ; la Guerra cependant n’en présente pas à la fin de toutes ses laisses. Les poèmes ont le style de la chanson de geste et en utilisent des topoi et, plus ou moins, de leurs conventions.12 Ils racontent des événements contemporains, ou au moins des événements compris dans les limites de la mémoire vivante, les préférant aux évé-nements historico-légendaires, et souvent fantastiques, de la chanson de geste. Ils ont été tous trois conservés dans des manuscrits uniques, ce qui suggère une réception et une transmission limitées. De même, ils ont tous les trois été composés au cours du XIIIe siècle.

  • 13 Navarra, v. 347.

10Ces trois textes montrent également de grandes disparités. Ils sont de taille différente. La Canso d’Antioca, tout fragment qu’elle est pour nous, a dû compter quelques milliers de vers à en juger par l’amplitude de la description de la bataille d’Antioche et les textes similaires en ancien français. La Crozada compte une dizaine de milliers de vers. La Navarra est bien plus courte avec quelque cinq mille vers, et cela bien que les derniers folios soient manquants. La Crozada et la Navarra sont toutes les deux textes témoins des événements qu’elles racontent : Anelier constate co qu’eu vi puiss contar (« je peux raconter ce que j’ai vu ») et le prologue de Tudèle explique pleinement ses qualifications pour écrire.13 En revanche, l’Antioca n’est pas l’œuvre d’un témoin, puisqu’elle raconte des événements vieux de plus d’un siècle.

  • 14 Pour en savoir plus sur les manuscrits, voir Canso d’Antioca, Introduction, 17-27 ; Martin-Chabot, (...)

11Les manuscrits sont bien différents aussi. Celui de l’Antioca est petit et de mauvaise qualité, un prétendu manuscrit de jongleur. Il semble, à en juger par les fautes et les contresens, que son scribe ait eu des difficultés à comprendre le texte. Il fait partie d’un manuscrit plus grand, de provenance inconnue et désormais perdu. Les manuscrits de la Crozada et de la Navarra sont, eux, d’une qualité qui suggère qu’ils ont été produits pour de riches patrons. Cependant le manuscrit de la Crozada fait le récit d’évé-nements antérieurs de quelques décennies, tandis que celui de la Navarra est probablement à peu près contemporain avec les événements qu’il rapporte et il est tout à fait possible qu’il ait été destiné à un participant-clé.14

  • 15 The poems of the troubadour Raimbaut de Vaqueiras, éd. Joseph Linskill (The Hague: Mouton, 1964), 2 (...)
  • 16 Voir par exemple vv. 18-21 ; 101-02 pour Roland et Berart. La Chevalerie d’Ogier de Danemarche, éd. (...)
  • 17 Linskill, 301-02.
  • 18 Linskill, 317.

12On pourrait encore ajouter un texte aux trois précédents. Ce n’est pas une chanson de geste, mais il montre l’influence de ce sous-genre : la lettre épique de Raimbaut de Vaqueiras.15 Il comprend 224 vers en trois laisses décasyllabiques avec un vers orphelin capfinit de quatre syllabes. Il fut composé en 1205. Le poète y étale les souvenirs du temps qu’il a passé avec Boniface de Montferrat. Le langage contient des formules et utilise de la terminologie épiques. L’auteur y mentionne par ailleurs Roland et Berart, personnage que l’on retrouve dans la Chevalerie Ogier et Fierabras.16 La transmission manuscrite montre un haut degré de variation, ce qui suggère que les scribes n’étaient pas trop accoutumés à un tel texte.17 Son éditeur a suggéré que ce fût un texte innovateur.18

  • 19 Pour discussion et références, voir Canso d’Antioca, Introduction, 5-9, 132-40 ; Linda Paterson, «  (...)
  • 20 Geoffrey of Vigeois, Chronica Gaufredi coenobitae, éd. P. Labbé, Novae Bibliothecae Manuscript libr (...)
  • 21 Son héroïsme à Ma’arrat-an-Nu’man fut largement remarqué : voir par exemple Robert le Moine, Histor (...)
  • 22 Eustorge d’Escorailles, lui aussi Limousin. Voir R. Limousin-Lamothe, Le diocèse de Limoges des ori (...)
  • 23 La Chanson de Sainte Foy d’Agen, éd. Antoine Thomas (Paris: Champion, 1974) ; Geoffroi Gaimar, L’Es (...)
  • 24 Boecis : poème sur Boèce (fragment), éd. René Lavaud et Georges Machicot (Toulouse, 1950).

13On pourrait ajouter également un texte dont on sait beaucoup mais qui ne nous est pas conservé : l’œuvre historiographique maintenant perdue de Grégoire Bechada qui aurait décrit la Première Croisade datant du premier tiers du XIIe siècle.19 Nous ne connaissons cette œuvre que par une longue description dans la chronique de la fin du XIIe siècle de Geoffroi de Breuil, prieur du Vigeois, qui fait songer à un prologue.20 Geoffroi nous dépeint une œuvre relative à la Première Croisade, dont la gestation aurait duré douze ans et qui aurait été écrite en vers vernaculaires. L’auteur serait un miles litteratus appartenant à la maisnie de la famille de Las Tours, dont le seigneur Golfier fut un héros bien connu de la croisade.21 Bechada écrivit son œuvre sous le mécénat de l’évêque Eustorge de Limoges et, selon un manuscrit au moins, avec le conseil de Gaubert le Norman, inconnu par ailleurs. Eustorge fut évêque de Limoges de 1106 à 1137, ce qui suggère une datation d’environ le premier tiers du XIIe siècle.22 C’était évidemment un texte local : Lastours, Limoges et Breuil se trouvent tous à moins de 25 kilomètres l’un de l’autre. Nous ignorons la forme qu’aurait prise ce texte. Il aurait pu être écrit en octosyllabes : la Chanson de Sainte Foy du XIe siècle est octosyllabique comme le sont également des chroniques anglo-normandes en vers comme celle de Gaimar qui datent de la même période.23 Il aurait pu être également décasyllabique comme le Boécis Occitan.24 Cela aurait aussi pu être une chanson de geste, bien qu’il ne nous reste pas de témoignages de chansons de geste occitanes de cette période. Nous savons qu’une Canso d’Antioca fut suffisamment bien connue pas plus tard que le début du treizième siècle pour servir de modèle pour Guilhem de Tudèle : mais cela ne nous fournit une preuve suffisante pour dire que le texte de Bechada aurait pris cette même forme. Quoi qu’il en soit, ce fut évidemment un texte suffisamment insolite pour mériter une longue description de Geoffroi de Vigeois : c’était un texte innovateur et une longue histoire en vers d’un événement récent.

La chanson de geste historiographique fut-elle vraiment un sous-genre ?

  • 25 Cet article n’a aucunement l’intention de discuter cette idée. Comme point de repère, voir « Littér (...)
  • 26 Eos : an enquiry into the theme of lovers’ meetings and partings at dawn in poetry, éd. A. T. Hatto (...)
  • 27 Las Leys d’Amors, éd. Joseph Anglade, 4 vols (Toulouse: Privat, 1919) vol.2, 183.
  • 28 Aucassin et Nicolette, éd. Jean Dufournet (Paris: Garnier-Flammarion, 1973 laisse 41, v. 24.
  • 29 « La pastourelle dans la poésie des troubadours », Erich Köhler, Études de langue et de littérature (...)
  • 30 John Stevens, Words and Music in the Middle Ages : song, narrative, dance and drama (Cambridge: Cam (...)
  • 31 Flamenca, romanzo occitano del XIII secolo, R. Manetti (Modena, 2008). Voir Rita Lejeune, ‘Le calen (...)
  • 32 Le Jeu de Robin et de Marion, éd. Jean Dufournet (Paris: Garnier Flammarion, 1989), vv. 728-30 : «  (...)

14Le genre est un concept fluide.25 D’une part, nous retrouvons des textes de genre bien défini dont le vocabulaire et les conventions littéraires sont clairement reconnaissables. L’alba, par exemple, se définit comme chanson d’aube qui remonte jusqu’aux poèmes lyriques d’Ovide.26 La pastorela, selon les Leys d’Amors, peut distinguer entre bergères, vachères et autres types de paysannes qui pourraient se trouver poursuivies par un quel-conque chevalier amoureux.27 D’autre part, il existe des textes qui débordent tout à fait des bornes d’un genre défini, telle la « chantefable » Aucassin et Nicolette.28 Mais, à vrai dire, les limites de genre sont floues. La pastorela évolue au cours du XIIe et du XIIIe siècles au fur et à mesure des changements sociaux.29 Une terminologie générale peut s’appliquer à plusieurs types de texte : canso, par exemple, est un terme qui décrit de nombreux types de poème, et les vers octosyllabiques s’utilisent dans des genres variés tels que l’historiographie, le roman et le lai.30 Certains textes procèdent à des emprunts génériques : on se rappellera que Flamenca utilise une chanson de Peire Rogier pour former le dialogue des amants Guilhem et Flamenca.31 Et le genre peut être sujet à parodie : le Jeu de Robin et Marion cite un poème sur Audigier qui détourne Girart de Roussillon.32 On en conclura que les genres ont des noyaux de conventions et de terminologie dont les limites sont bien perméables.

  • 33 Sarah Kay, The Chansons de geste in the age of romance (Oxford: Clarendon Press, 1995) ; Joseph Dug (...)
  • 34 Le Pèlerinage de Charlemagne, éd. Glyn S. Burgess (Edinburgh: British Rencesvals Publications, 1998 (...)
  • 35 Le Moniage Guillaume : chanson de geste du XIIe siècle, éd. Nelly Andrieux-Reix (Paris: Champion, 2 (...)
  • 36 Voir par exemple Raoul de Cambrai, éd. Sarah Kay (Oxford: Clarendon Press, 1992) Introduction l-lxv (...)
  • 37 Duggan, « Social Functions », 740.

15C’est dans ce contexte qu’il faudrait, à notre sens, penser l’entrecroisement de l’épopée et de l’histoire. Il n’est que trop facile de voir la Chanson de Roland comme le texte-type de la chanson de geste. Pourtant, en effet, la grande majorité des chansons de geste furent composées aux XIIIe et XIVe siècles, en réutilisant des matières antérieures pour refléter et explorer les dilemmes contemporains.33 Elles sont très variées : on y découvre la parodie du Pèlerinage de Charlemagne, le réalisme cauche-mardesque du Guillaume, le romantisme de Huon de Bordeaux….34 La chanson de geste est un genre très stylisé. C’est aussi un genre fondé sur des conventions reconnaissables sur les Sarrasins, l’héroïsme, ou la guerre, mais celles-ci peuvent se renverser. C’est le cas, par exemple, dans le Moniage Guillaume où l’appétit gargantuesque de Guillaume et son insistance à porter le pantalon surprennent pour le moins les moines d’Aniane.35 Les sujets de la chanson de geste sont variés, comprenant l’héroïsme carolingien et les aventures romanesques et fantaisistes. Il n’y a qu’une règle : les événements doivent être éloignés du quotidien, soit dans un passé lointain, soit dans un pays exotique, soit les deux. Le lien entre la chanson de geste et les événements historiques peut être bien fragile : néanmoins la chanson de geste a été acceptée comme un genre populaire historique, une histoire d’images d’Épinal peuplée de héros et de scélérats, de sarrasins exotiques et de femmes séduisantes.36 Pour citer Duggan, elle fut « an important repository of collective memory ».37

  • 38 Nancy Partner, Serious Entertainments : the writing of history in twelfth-century England (Chicago: (...)
  • 39 Gaimar, Estoire des Engleis, vv. 6477-520 ; Blacker, Faces of Time, 28-30, 137, 21 note 10.
  • 40 Wace, Roman de Rou, éd. Anthony J. Holden, 3 vols (Paris: A. & J. Picard, 1970-73).
  • 41 Jordan Fantosme, Chronicle, éd. R. C. Johnston (Oxford: Clarendon Press, 1981) ; La vie de saint Th (...)
  • 42 « Le rôle littéraire d’Aliénor d’Aquitaine et de sa famille », Rita Lejeune, Cultura Neolatina 14 ( (...)
  • 43 History of William Marshal, éd. et trad. David Crouch, Sidney Gregory and Anthony Holden, (Oxford: (...)
  • 44 Gabrielle Spiegel, Romancing the Past : the rise of vernacular prose historiography in thirteenth-c (...)
  • 45 Robert de Clari, La Conquête de Constantinople, éd. et trad. Peter Noble (Edinburgh: Société Rences (...)

16Si l’épopée vernaculaire est un genre bien défini, l’historio-graphie vernaculaire par contre ne l’est pas. Au cours du XIIe siècle, ce fut surtout un phénomène anglo-normand.38 On retrouve des allusions à une biographie d’Henri Ier et à une vie de la reine Marguerite d’Écosse dans le premier tiers du siècle.39 Les premières œuvres d’historiographie vernaculaire qui nous restent encore sont celles de Gaimar dans les années 1140 et de Wace dans les années 1160. Elles emploient l’octosyllabe plutôt que le décasyllabe ou l’alexandrin.40 Jordan Fantosme écrivit une histoire en vers des guerres de 1174-75, et l’on vit paraître au moins deux vies hagiographiques de Thomas Becket en poésie vernaculaire peu de temps après sa mort.41 Tous ces textes sont en vers et ont été composés au sein de l’espace anglo-normand ou en lien avec ce royaume. Le mécénat royal aurait eu pour conséquence au moins quelque perméabilité avec l’Aquitaine.42 Le genre continua au XIIIe siècle avec la Vie de Guillaume le Maréchal.43 En ce temps-là commença à se former un nouveau genre au nord de la France : l’histoire vernaculaire en prose.44 Tandis que beaucoup de textes de ce genre montrent un enthousiasme nouveau et croissant pour l’histoire généalogique, il semble extraordinaire que l’exemple le plus ancien qui nous reste soit quelque chose de complètement différent : le journal de croisade, pour ainsi dire, d’un petit chevalier picard, Robert de Clari, dont ne demeure qu’un seul manuscrit.45 Cela semble en dire long sur l’enthousiasme qu’il y eut, à cette époque, à comprendre et mettre par écrit une expérience personnelle.

17Ces textes nous donnent des renseignements intéressants sur les attitudes contemporaines relatives à la description des événe-ments de l’époque. Ils suggèrent que l’histoire était considérée comme un genre distinct de la chanson de geste, et que les auteurs soulignaient cette différence en utilisant soit des formes poétiques non caractéristiques de la chanson de geste, soit la prose. Ils suggèrent aussi que l’historiographie vernaculaire était considérée comme une forme expérimentale par rapport aux conventions bien établies de la chanson de geste. Cette dernière trouva facilement un auditoire populaire. L’historiographie vernaculaire, d’abord en vers, puis en prose, fut produite pour des patrons et des auditoires spécifiques, royaux, nobles ou de la maisnie seigneuriale. On assiste ainsi à un enthousiasme pour une perspective séculaire et vernaculaire des événements qui, comme la chanson de geste à sa façon, analysa les préoccupations des contemporains et leur répondit.

  • 46 The Old French Crusade Cycle, éd. Jan A. Nelson et Emanuel J. Mickel, 10 vols (Tuscaloosa: Universi (...)
  • 47 La Chanson d’Antioche : chanson de geste du dernier quart du XIIe siècle, éd. et trad. Bernard Guid (...)
  • 48 Les Chétifs, éd. Geoffrey M. Myers, OFCC vol 5, 1980 ; La Chanson de Jérusalem éd. Nigel Thorp, OFC (...)
  • 49 Sweetenham and Edgington, Introduction, ch. 3. Voir Antioche, vv. 128-143.

18On voit le croisement entre ces genres surtout dans la trilogie centrale du Cycle de la Croisade français, qui dépeint de manière largement fictive la Première Croisade.46 Il est bien établi que le premier texte de la trilogie, la Chanson d’Antioche, utilisa deux chroniques en Latin, empruntant à l’Historia Jerosolimitana d’Albert d’Aix pour certaines formes, et procédant à des emprunts directs à l’Historia Iherosolimitana de Robert le Moine.47 Des deux autres textes de la trilogie, la Chanson des Chétifs est entièrement fantaisiste tandis que la Chanson de Jérusalem ne montre qu’une connaissance générale, à la portée de tous, des événements de la croisade.48 On se trouve cependant fermement dans le territoire de la chanson de geste. Les conventions du combat à la lance, les belles demoiselles et l’exotisme et la fantaisie du monde sarrasin s’y retrouvent toutes. Les événements peuvent bien n’avoir eu lieu qu’un siècle auparavant ; on nous les présente de façon exemplaire et légendaire. Cela encourage les croisés potentiels de l’auditoire à s’identifier non seulement à leurs précurseurs qui partirent pour l’Outremer, mais aussi aux héros légendaires de l’épopée.49

  • 50 Pour un tour d’horizon, voir Lucia Lazzerini, Letteratura medievala in lingua d’oc (Modena: Mucchi, (...)
  • 51 Rita Lejeune, « Le problème de l’épopée occitane », Cahiers de Saint-Michel de Cuxa 3 (1972) 147-79 (...)
  • 52 Simon Gaunt, « Desnaturat son li Frances : language and identity in the twelfth-century Occitan epi (...)

19La littérature occitane trace différemment les limites du genre. Il nous reste quelques rares chansons de geste occitanes. Le fragment d’Aigar e Maurin pourrait dater du XIIe siècle tandis que Ronsasvals et le Roman d’Arles furent recopiées au XIVe siècle, montrant ainsi un intérêt continu pour le genre pendant le Moyen Âge en Occitanie.50 Les sujets sont variés : on retrouve la matière carolingienne de Girart de Roussillon à côté du drame quasi-domestique de Daurel et Beton. On ne compte que neuf textes, qui nous restent généralement dans un seul manuscrit. Cela suggère que le genre fut moins populaire en Occitanie que dans le nord de la France.51 La majorité de ces chansons décrivent des événements et/ou des personnages qui nous sont familiers des textes épiques français : Daurel, par exemple, montre des parallèles étroits avec Beuve d’Hantone. Simon Gaunt a montré que le langage en est teinté de francismes comme signifiant de genre.52 L’historio-graphie occitane est rare, et en latin et en langue vernaculaire. La littérature occitane a alors une approche tout à fait opposée à cet égard à celle des littératures anglo-normandes et françaises : dans celles-ci, la chanson de geste est probablement le seul genre à ne pas se retrouver utilisé comme véhicule de l’histoire contem-poraine ; alors que dans la littérature occitane elle et le sirventès sont à peu près les seuls genres à se trouver ainsi utilisés.

20Nous trouvons alors tout un éventail d’approches de l’histoire vernaculaire dépeignant les événements contemporains. Elle se produit pendant le XIIe siècle sous des formes poétiques variées, surtout octosyllabiques, dans le royaume anglo-normand. Dès le début du XIIIe siècle, elle est produite en prose en ancien français et sous la forme de la chanson de geste en occitan. Le trait commun est la tendance à l’expérimentation littéraire et à l’innovation : les limites du genre se trouvent déplacés et perméables.

Commencement et développement d’un sous-genre

  • 53 La Gran Conquista de Ultramar, éd. Louis Cooper, 4 vols (Bogotà : Instituto Caro y Cuervo, 1979). P (...)
  • 54 GCU II., 334-35.
  • 55 GCU I. 186-88 ; II. 46-50.

21Il semble qu’on doive rechercher l’origine de ce sous genre du côté de la Première Croisade, au tout début du XIIe siècle. Nous savons qu’il a existé au premier tiers du XIIe siècle un poème occitan relatif à la croisade dont l’auteur fut Grégoire Bechada. Mais rappelons que la Canso d’Antioca telle que nous la possédons (y compris les restes conservés dans la compilation espagnole de la Gran Conquista de Ultramar, soit des emprunts textuels actuels, soit des emprunts qui pourrait provenir des sections du texte maintenant perdues), contient peu de matériel original qu’on puisse rapporter au texte de Bechada.53 Elle se fonde clairement sur la Chanson d’Antioche française. Comme dans l’Antioche, elle présente un épisode dans lequel les escadrons sortent d’Antioche et où ils sont décrits à Corbaran par un lieutenant Amidelis (dans l’Antioche) et l’ambassadeur Arlois (dans la Canso). Elles suivent à peu près la même séquence bien que la Canso nous montre sept escadrons et l’Antioche douze, incluant des femmes. Les deux textes partagent troupes d’anges blancs et croisés morts. Les deux font allusion au jeu d’échecs de Corbaran ; et une tente fabuleuse se retrouve également dans la Canso, l’Antioche et la Jérusalem. Au plus pourrait-on dire qu’il y a quelques références aux croisés occitans qu’on ne retrouve pas ailleurs et qui pourraient remonter à l’œuvre perdue de Bechada ; en particulier, il y est fait allusion à l’héroïsme de Golfier de Lastours à Antioche, héroïsme qu’on retrouve seulement à Marrât-an-Nu’man dans d’autres textes.54 Cela dit, beaucoup de ce matériel supplémentaire est fantaisiste : par exemple, selon la Gran Conquista, la Canso, donne une autre version de la genèse de la croisade due à un pèlerinage de trois chevaliers occitans au Saint-Sépulcre plutôt qu’à l’initiative du Pape Urbain II. De même elle donne des détails supplémentaires à propos des batailles.55 Il est difficile de voir ici l’œuvre historique que Bechada paraît avoir eu l’intention d’écrire. Nous pouvons ainsi être sûrs qu’il y a bien eu une œuvre occitane d’historiographie vernaculaire en vers qui décrivait une Première Croisade distincte de tout ce que nous connaissons aujourd’hui. Si l’on en a quelques traces dans des textes plus tardifs, on ne pourrait cependant ni la reconstruire, ni savoir ce qu’elle aurait pu contenir exactement ou quelle forme elle avait.

  • 56 Crozada laisse 2, vv. 1-3 : Senhors, esta canso es faita d’aital guia / Com sela d’Antiocha et ayss (...)
  • 57 Comparer par exemple Antioca, vv. 575-76 et Crozada, laisse 93, vv. 31-36. Autres exemples et discu (...)

22Nous savons que la Canso d’Antioca occitane du fragment de Madrid a existé avant 1213 parce qu’elle sert de modèle à la partie de la Canso de la Crozada composée par Guilhem de Tudèle. Son prologue ne laisse pas de doutes : « Messieurs, cette chanson prend pour modèle la Canso d’Antioca ; ses vers sont identiques et pour ceux qui savent le chanter elle a la même mélodie ».56 Bien sûr, cela pourrait évoquer une autre Canso d’Antioca. Mais les deux textes utilisent à peu près la même versification, soit le vers orphelin, bien que Tudèle utilise des coblas capcaudadas. Et ils montrent d’étroits parallèles d’expression.57 On peut conclure alors ou que Tudèle utilise en l’adaptant la forme métrique de la Canso d’Antioca que nous savons ou quelque autre version qui en est très proche.

23Il faut alors distinguer deux éléments différents du sous-genre historiographique occitan au tournant des XIIe et XIIIe siècles. Le premier est une acceptation du fait que les événements histo-riques peuvent être présentés en vers. La mémoire de l’œuvre de Bechada sur la croisade resta vivante à la fin du XIIe siècle au moins à en juger par la longue description qu’en nous donne Geoffroi de Vigeois Des échanges entre auteurs anglo-normands et auteurs occitans dans la seconde moitié du XIIe siècle sont probables, même s’ils ne sont pas prouvés, et cela aurait renforcé le concept d’une historiographie en vers. Le second élément est une acceptation que cette historiographie pourrait entre autres utiliser la forme de la chanson de geste. La lettre épique de Raimbaut de Vaqueiras, au début du XIIIe siècle, se sert en effet de cette forme ; on pourrait même penser que l’utilisation du décasyllabe à un moment où l’alexandrin est bien établi est perçu comme un geste archaïsant pour marquer le lien avec la chanson de geste. Cela suggère que les événements contemporains pourraient avoir été pensés comme à dépeindre en vers, y compris par la chanson de geste.

  • 58 Paterson, « Occitan literature and the Holy Land », 99.

24Cependant, l’auteur de la Canso d’Antioca qui écrivit à peu près à cette époque choisit de prendre comme modèle un texte en ancien français plutôt que de suivre le texte de Bechada. Il fit des émules parmi les auteurs de chansons de geste occitanes tel ceux de Daurel et du Ronsasvals. Comme ces auteurs, il prit pour langue un occitan quelque peu teinté de francismes. De plus, il utilisa les conventions familières à la chanson de geste : combats à la lance, évocation d’armes et de matériel luxueux ; emploi des formules caractéristiques du genre… Nous ne pouvons que spéculer sur la date ou il écrivait et sur les raisons pour lesquelles l’auteur a choisi un modèle en ancien français plutôt qu’un modèle Occitan (le texte de Bechada aurait-il été perdu ou trop local pour qu’il le connaisse ?). On trouve un grand nombre d’allusions à la croisade en général dans l’œuvre des troubadours dans les années qui suivirent la défaite de Hattin et le lancement de la Troisième Croisade, moment idéal s’il en fut jamais pour évoquer les succès de la Première Croisade.58 On ne voit pas très bien comment une tradition textuelle originaire du nord-est de la France et recopiée dans cette région aurait fait son chemin jusqu’en Occitanie. Au contraire, on peut penser qu’un poème de croisade avait une pertinence évidente pour le départ pour la Terre Sainte de Richard Cœur de Lion ; l’auteur aurait pris pour modèle une chanson de geste française, parce que la Croisade était une entreprise majoritairement française, parce que la chanson de geste était déjà considérée comme un genre français et parce que la chanson de geste, en tant que genre, était pétrie du prestige de l’héroïsme légendaire auquel les croisés pourraient s’identifier, tendance que l’on constate dans le Cycle de la Croisade.

  • 59 Antioca, vv. 294-325, 442-45 ; comparer Crozada, laisse 30, vv. 13-25.
  • 60 Martin-Chabot de façon trenchante : « style froid… médiocre versificateur » ; Introduction, vol 3, (...)

25En utilisant la Canso d’Antioca comme base, Guilhem de Tudèle unit alors ces deux éléments : l’idée que les événements contem-porains peuvent être relatés en vers et celle qu’on peut utiliser la chanson de geste comme genre de prédilection pour cette tâche. En adoptant la forme et la mélodie de l’Antioca, Tudèle marque très clairement sa description de la croisade contre les Albigeois comme celle d’une croisade. Et pas n’importe laquelle : la Première Croisade qui culmina avec la prise de Jérusalem et fut considérée comme la réalisation du Plan Divin. Comme son modèle, Tudèle utilise un occitan francisé et déploie les conven-tions du genre. Prendre la Canso d’Antioca comme modèle est une question d’idéologie autant qu’une question de genre. Mais ce que fait aussi Tudèle, c’est revenir en quelque sorte au précédent que donna Bechada un siècle auparavant. Il décrit les événements contemporains : en effet, il dépasse son modèle parce qu’il écrit à peu près en même temps que se déroulent les événements plutôt que quelques années après. Comparé à son modèle, il nous donne une perspective bien plus réaliste. La Canso d’Antioca rengorge de fantaisies sarrasines, avec sa tente miraculeuse et ses sarrasins grandiloquents tour à tour menaçants et ridicules. Tudèle montre en comparaison la garnison de Carcassonne gravement malade, tombant de soif sous la chaleur implacable et harcelée par des essaims de mouches.59 On a critiqué Tudèle en disant qu’il n’était qu’un versificateur médiocre et prosaïque.60 Mais en réalité son innovation au début du XIIIe siècle est aussi importante et frappante que celle de son prédécesseur Bechada cent ans plus tôt.

  • 61 « Papal discussions in a chanson de geste ».

26Le continuateur de Tudèle, l’auteur anonyme des autres deux tiers de la Crozada, conserve la forme de la chanson de geste historiographique de Tudèle, mais y introduit des changements importants.61 La langue francisante de Tudèle est remplacée par un occitan bien plus pur qui reflète le langage du Languedoc. Le vers orphelin subsiste mais prend, dès les premières laisses, la forme de coblas capfinidas. La structure narrative de Tudèle, faite de blocs successifs en de courtes laisses, est remplacée par une narration bien plus fluide où les laisses sont en moyenne quatre fois plus longues que les laisses de Tudèle. On y rencontre bien plus de motifs lyriques et de personnifications. C’est encore une chanson de geste, mais elle est refaite à l’occitane et il ne s’agit pas simplement de style. L’auteur anonyme est nettement partisan de la cause occitane tandis que Tudèle était du côté de Baudouin, le frère de Raimond VI, qui fit cause commune avec les croisés du nord de la France. Le style, c’est la politique : un texte occitan pour des auditeurs occitans. L’auteur capture et renverse ainsi non seulement le texte de Tudèle, mais son modèle avoué, la Canso d’Antioca. Le concept de croisade à travers la croisade la plus réussie de toutes est bouleversé. L’appui tacite de Tudèle en faveur des Français du nord est transformé en célébration de la cause occitane. De même, un genre lié au nord de la France est transformé en genre occitan.

  • 62 Raguin, Lorsque la poésie, 25, 76-77.
  • 63 Histoire du Languedoc, éd. Philippe Wolff (Privat: Toulouse, 1967), 203-04.

27On ne sait pas exactement quand l’Anonyme a écrit sa conti-nuation, mais la date la plus probable semble 1228-29.62 Le texte s’arrête brusquement avec les événements de 1219, alors que les croisés du nord s’amassent pour lancer une attaque contre Toulouse, après avoir déclenché à Marmande un massacre sanglant qui rappelle celui de Béziers en 1209. L’auteur ne décrit pas, comme Tudèle, les événements qu’il vit au jour le jour : il relate des événements récents qui appartiennent à la mémoire vivante. Ces faits d’il y a dix ans sont évoqués comme source d’inspiration lorsque Raimond VII se trouve fortement pressé par Louis VIII et forcé d’accepter les conditions du Traité de Meaux en 1229.63

  • 64 Histoire du Languedoc, 218-19.

28La Navarra a été écrite par Guilhem Anelier de Toulouse un demi-siècle plus tard environ que la Crozada. On remarque que le poème semble avoir été produit presque en même temps que le manuscrit qui nous reste de la Crozada, et les deux œuvres montrent des liens avec Toulouse. La mort d’Alphonse de Poitiers en 1271 et le passage de Toulouse à la couronne française qui s’ensuivit donnèrent un contexte où un poème qui décrivait la lutte contre la domination française trouvait un sens nouveau.64 Anelier ne cite pas la Crozada comme prédécesseur, mais le fait qu’il emprunte sa forme suggère qu’il a dû la connaître et qu’il l’a choisie comme modèle évident. Son œuvre relate également une intervention des Français du nord, bien qu’une comparaison directe eût montré un manque de tact frappant, étant donné qu’il paraît avoir offert son poème à un chef français, Eustache de Beaumarchais.

29On peut tirer plusieurs conclusions à propos de l’histoire du sous-genre de la chanson de geste historique en occitan. Ce sous-genre connut une longue existence : il fut utilisé tout au long du XIIIe siècle alors que ses racines remontaient au début du XIIe. Si sa forme ne resta pas tout à fait constante, ses traits généraux sont bien définis : narration des événements contemporains ou au moins des événements historiques plutôt que légendaires, alexan-drins avec vers orphelin, usage de laisses et des conventions et formules de la chanson de geste. Autrement dit, ce fut une forme textuelle distincte de la chanson de geste proprement dite. Mais ce fut aussi une forme qui évolua avec le temps. Ces textes furent composés en des circonstances bien spécifiques avec un haut degré d’intertextualité ; chaque auteur écrivit dans un but clair, adoptant et adaptant le sous-genre comme bon lui sembla. En se concentrant sur les événements récents, il se définit comme sous-genre intensément politique. Les textes subsistent en général dans un seul manuscrit, ce qui suggérant que ce ne fut pas un sous-genre à grand public : il se concentra sur des circonstances et des événements spécifiques. Rien ne témoigne que les contemporains ne l’aient considéré ou l'identifié comme un sous-genre distinct.

Pourquoi choisir la chanson de geste comme genre ?

  • 65 Robert Lafont, « Les origines occitanes de la chanson de geste », Cahiers de Civilisation Médiévale(...)
  • 66 Duggan, « Social Functions », 730 donne les nombres. Beuve d’Hantone par exemple existe en anglo-no (...)
  • 67 Flamenca, vv. 593-710 : la plupart des textes sont du monde Classique, de l’Ancien Testament et de (...)

30Il est frappant que la littérature occitane, dont le corpus de chansons de geste est relativement peu étendu, ait choisi ce genre particulier comme forme consacrée à l’historiographie vernacu-laire. Le monde académique a connu un vif débat sur les origines, la nature et l’influence de l’épopée occitane.65 Le fait est qu’il nous reste bien moins de chansons de geste occitanes que de françaises, et que celles que nous avons conservées montrent une grande influence française. Le corpus de textes français en comprend environ 120 qui datent du XIIe au XVe siècle, et ont été refaits et recopiés pour retenir l’intérêt des auditeurs, avec des personnages familiers que l’on retrouve en cycles parfois complexes, et qui ont souvent été préservés dans plusieurs manuscrits.66 En revanche, le corpus occitan ne comprend que neuf textes qui sont conservés dans des manuscrits uniques et qui empruntent des motifs et des caractères français. On ne peut pas soutenir que ce fut un genre largement connu et imité : la liste des épopées et poèmes que cite Flamenca contient peu de chansons de geste par rapport à d’autres genres, et les œuvres que contient la liste de Cabrera sont pour la plupart françaises.67 Dans ces conditions, pourquoi avoir choisi la chanson de geste comme base pour l’historiographie vernaculaire ?

  • 68 Duggan, « Social functions », 755.
  • 69 Gerald A. Bond, « Origins », A Handbook of the Troubadours, ed. Frederick R. P. Akehurst et Judith (...)

31Paradoxalement, la réponse se trouve peut-être précisément dans l’exiguïté du genre. La chanson de geste était populaire en France. Ses auditeurs avaient des attentes claires : une histoire racontée de façon fantastique et stylisée. On imagine qu’ils auraient montré peu de patience envers les textes et les jongleurs qui déjouaient ces attentes. Par conséquent, cela aurait rendu difficile une expérimentation qui aurait trop passé les bornes du genre.68 Au contraire, l’équivalent occitan était moins connu et moins populaire. Cela aurait, en retour, pu donner à l’auteur une plus grande liberté d’expérimentation à une époque où l’innova-tion littéraire était florissante.69 Le sous-genre développa ses propres règles au fil du temps : il décrivit des événements et des personnages vrais, et le format du vers orphelin l’aurait signalé comme sous-genre reconnaissable. Cela étant, il ne faudrait pas accorder trop de poids au choix de composition d’un nombre très limité d’auteurs, ni définir de façon trop catégorique un sous-genre qui n’a pas été identifié de façon explicite par ses contemporains.

Quel était l’auditoire présumé ?

  • 70 Alfred Poncelet, « Boémond et S. Léonard », Analecta Bollandiana 31 (1912) 24-22.
  • 71 Nicholas Paul, To Follow in their Footsteps : the Crusades and family memory in the High Middle Age (...)

32On a des indices relativement clairs sur l’auditoire de l’œuvre de Bechada. C’était une œuvre très locale du Limousin; son existence fut notée quelques décennies plus tard dans une chronique également du Limousin. Elle fut écrite en langue vernaculaire ut populus pleniter intelligeret. Nous savons peu sur les circonstances de sa composition : le poème aurait pu être commandé pour commémorer la visite que fit Bohémond à l’église locale lors du pèlerinage de Saint-Léonard-de-Noblat en 1106 pour remercier le saint de l’avoir libéré, mais la chronique de Vigeois ne nous en dit rien.70 Il aurait aussi pu être écrit ou commandé sous l’épiscopat d’Eustorge pour célébrer l’héroïsme local et attirer l’attention sur le rôle des croisés limousins.71

  • 72 Antioche, laisses 1-7.
  • 73 Crozada, laisse 1, vv. 15-20 ; laisse 38, vv. 11-12.
  • 74 Navarra, vv. 1-2.

33À la fin du XIIe siècle, la situation avait changé. Nous ne savons rien de l’auditoire de la Canso d’Antioca en dehors du fait que le texte eut probablement un rôle d’exemplaire comme son modèle français.72 Le prologue de la Crozada suggère que Tudèle écrivit peut-être pour un petit cercle aristocratique et militaire autour de Baudouin, le frère de Raimond VI ; il aurait compris le tuteur du futur comte de Toulouse, Raimond VII, Geoffroi de Poitiers et maître Tédise.73 Nous savons peu de choses sur l’objectif et l’auditoire de l’Anonyme sinon une partialité marquée pour Toulouse à une époque où l’indépendance de la ville était menacée. Guilhem Anelier nous dit d’une façon qui n’est pas très claire qu’il veut écrire pour répondre à la trahison et au manque de loyauté, suggérant par là que son récit à lui sera vrai et exemplaire.74

  • 75 Eliza Miruna Ghil, L’Age de Parage : essai sur le poétique et le politique en Occitanie au XIIIe si (...)
  • 76 Martin Aurell, La Vielle et l’épée : troubadours et politique en Provence au treizième siècle (Pari (...)
  • 77 Voir un exemple frappant, l’épitaphe-diatribe de Simon de Montfort : Crozada laisse 208, vv. 3-16.

34Tous ces textes du XIIIe siècle sont unis par un lien étroit avec les circonstances politiques contemporaines. Pour citer Eliza Miruna Ghil, « la poésie s’ébat dans ces conditions de crise, en accentuant d’abord parmi les moyens traditionnels ce qui paraissait le plus approprié pour le combat comme le sirventès politique, en ravivant ensuite des modèles poétiques anciens comme la chanson d’histoire ».75 Aurell dit que le XIIIe siècle vit la primauté du sirventès comme forme poétique ; et il y a des coïncidences de thème et de langage entre la Crozada et les sirventès que l’on composait en même temps.76 Ces poèmes narratifs donnent aux auditeurs une façon différente de comprendre les événements de l’époque à travers une narration continue, où la forme et les résonances de la chanson de geste apportent éclat et prestige aux affaires du monde contemporain.77

35On pourrait dire que c’est précisément parce que ces poèmes sont si étroitement liés avec les événements et les personnages du temps qu’ils ont une diffusion limitée. On l’a déjà signalé, il ne nous reste qu’un seul manuscrit à peu près complet (et même pas un pour la Canso d’Antioca). Leur actualité même a pu limiter leur intérêt à un présent immédiat et à d’éventuelles circonstances à venir au cours desquelles leur message pourrait trouver une résonance nouvelle. La chanson de geste existe en un univers hors du temps et de l’espace qui lui donne un sens d’universalité. C’est un sens qui manqua complètement à la chanson de geste historiographique, ce qui eut pour conséquence qu’elle resta un sous-genre avec un attrait et une durée de vie limités.

Conclusion

36Nous avons exposé un certain nombre de questions à propos de la chanson de geste historiographique occitane. Était-ce réellement un genre ? Si oui, où commença ce genre et comment se développa-t-il ? Pourquoi a-t-il choisi la forme de la chanson de geste ? Et quel fut son auditoire ?

37La première conclusion à en tirer est qu’il y a en effet un sous-genre reconnaissable dans la littérature occitane : la chanson de geste historiographique. La littérature occitane ne fut pas la seule littérature à se trouver obligée d’innover pour trouver une forme propre afin de raconter en langue vernaculaire les événements contemporains et récents. Mais la solution qu’elle inventa lui fut propre.

38La deuxième conclusion est que ce sous-genre se développa au fil des XIIe et XIIIe siècles sous l’impulsion d’événements spécifi-ques et de choix faits par leurs auteurs. Il commença avec deux textes très différents qui partageaient pourtant un sujet : la Première Croisade. Bechada en écrivit une histoire en vers peu après la croisade : un siècle plus tard apparut un poème anonyme sur la croisade adaptée d’un poème français mais qui reflète, dans une certaine mesure au moins, le travail précédent de Bechada. Ce fut Guilhem de Tudèle qui réunit ces deux traits, la peinture d’événements contemporains en vers et l’utilisation de la forme de la chanson de geste, sous l’impulsion des événements de la croisade contre les Albigeois et le besoin de la légitimer en la liant à la réussite voulue par Dieu de la Première Croisade. Son continuateur en garda la forme mais en bouleversa l’idéologie. Ce sous-genre était encore suffisamment courant à la fin du XIIIe siècle à Toulouse, où la Crozada, vieille d’il y a déjà un demi-siècle, fut recopiée avec des dessins et servit de modèle pour un autre poème, la Guerra de Navarra.

39La troisième conclusion est que c’était précisément parce que la chanson de geste était un genre assez rare dans la littérature occitane qu’elle pouvait servir de véhicule à l’historiographie vernaculaire. Les attentes qui appartenaient au genre pouvaient être plus facilement renversées et recréées ; cela favorisa l’innovation et l’expérimentation littéraires. Il faut cependant se rappeler que cela reflète également les circonstances particulières dans lesquelles ces œuvres furent produites.

40La quatrième et dernière conclusion est que la chanson de geste historiographique était un sous-genre peu reconnu, avec un auditoire limité. La lettre épique de Raimbaut de Vaqueiras à part, les textes survivent au mieux dans un manuscrit complet ; et il ne reste aucune indication que les contemporains y aient vu un genre ou un sous-genre spécifique. Nous expliquons cela par le fait que c’était un genre intensément politique qui faisait partie d’une tendance plus générale que l’on retrouve dans le grand nombre de sirventés de la fin du XIIe et du XIIIe siècles. Ils reflétaient par définition des événements spécifiques et se trouvaient ainsi d’intérêt limité.

41Concluons avec ce que nous en dit la Canso d’Antioca. Présentant le déferlement de la bataille d’Antioche, l’auteur déclare :

  • 78 Antioca, vv 497-500 : Qi canso vol apenre, azatz cuh qe folei / Se aquesta no canta, mas genses la (...)

« Si quelqu’un veut apprendre une chanson, je crois qu’il est un imbécile s’il ne chante pas celle-là ; mais il doit la déployer avec un soin particulier à propos du comte de Saint-Gilles et du duc Godefroi, qui auraient dû en droit et en justice vivre à tout jamais. »78

  • 79 Jacqueline Harpman, Moi qui n’ai pas connu les hommes (Paris: Livre de Poche, 1995), 2.

42La chanson de geste historiographique présenta l’histoire de façon à rappeler aux auditeurs les exploits de leurs ancêtres et à les encourager dans leurs prouesses. Les chansons, la politique, l’héroïsme et le sens de l’identité furent tous liés. La littérature occitane trouva une solution propre à elle-même à un problème constant : comment ramener à l’ordre le chaos du vécu pour en tirer une narrative convaincante, saisissante et plaisante. « Ce dont on se souvient compte-t-il moins que l’activité de se souvenir ? »79

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Raguin-Barthelmebs, Marjolaine, « Problèmes de transmission textuelle et d’interprétation dans l’épique : le cas du prologue de la Chanson de la croisade albigeoise. Édition critique synoptique », Medioevo Romanzo 40/2, 2016, 371-96.

Rieger, Dietmar, « Zur Stellung desTagelieds in der Trobadorlyrik », Zeitschrift für Romanische Philologie 87, 1971, 223-32.

Spiegel, Gabrielle, Romancing the Past : the rise of vernacular prose historiography in thirteenth-century France, Berkeley/Los Angeles, University of California Press, 1993.

Stevens, John, Words and Music in the Middle Ages : song, narrative, dance and drama, Cambridge, Cambridge University Press, 1986.

Sweetenham, Carol, « Papal discussions in a chanson de geste : the depiction of Crusade, the Lateran Council and the split personality of the Canso de la Crozada », à paraître dans les Actes du congrès Concilium Lateranense de Rome, 2015.

Wolff, Philippe, Histoire du Languedoc, Toulouse, Privat, 1967.

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Notes

1 La Chanson de la croisade albigeoise, éd. Eugène Martin-Chabot, 3 vol (Paris: Champion, 1931-60) ; paru avec traduction d’Henri Gougaud (Paris: Lettres Gothiques, 1989). Toutes citations sont du texte de Martin-Chabot ; les traductions sont miennes.

2 Prologue, vv. 22-23 : Pos que fo comensatz, entro que fo fenit / No mes en als sa entensa neish a penas dormit. Voir la nouvelle édition du prologue de Marjolaine Raguin, « Problèmes de Transmission Textuelle et d’interprétation dans l’épique : le cas du prologue de la Chanson de la Croisade Albigeoise. Édition critique synoptique », Medioevo Romanzo 40/2 (2016) 371-96.

3 Crozada, laisse 5, vv. 23-24 : Qu’eu ne cug encar far bona canson novella / Tot en bel pargamin.

4 The Canso d’Antioca : an Occitan epic chronicle of the First Crusade, éd. et trad. Linda M. Paterson and Carol E. Sweetenham (Guildford: Ashgate, 2003).

5 Voir l’introduction à l’édition de Paterson et Sweetenham.

6 Voir l’étude exhaustive et pertinente de Marjolaine Raguin, Lorsque la poésie fait le souverain : étude sur la Chanson de la Croisade albigeoise (Paris: Champion, 2015). Pour sommaire de bibliographie et commentaire récent sur la question de la relation entre les deux textes, voir mon article à paraître dans les actes du Congrès Consilium Lateranense à Rome, 2015, « Papal discussions in a chanson de geste : the depiction of Crusade, the Lateran Council and the split personality of the Canso de la Crozada ».

7 Martin-Chabot, introduction ch. iv.

8 La Guerra de Navarra : Nafarroako Gudua, éd. et trad. Maurice Berthe, Ricardo Cierbide, Xabier Kintana et Julián Santano, 2 vols (Pamplona : Gobierno de Navarra, 1995).

9 Navarra, Introduction, 29-31.

10 Navarra, Introduction, 38-40.

11 Voir Canso d’Antioca, Introduction, 141-43 pour discussion et bibliographie sur l’histoire et utilisation du vers orphelin. C’est une forme que l’on retrouve dans d’autres chansons de geste, comme le cycle de Guillaume : quelques-uns le considèrent comme une forme particulièrement occitane.

12 Voir, par exemple, Navarra laisse 3, où la bataille contre les Maures est racontée de façon presque entièrement formulaire ; Antioca, laisses 15-17 pour les combats avec lance de style rolandien.

13 Navarra, v. 347.

14 Pour en savoir plus sur les manuscrits, voir Canso d’Antioca, Introduction, 17-27 ; Martin-Chabot, Introduction, ch. iv ; Navarra, Introduction, 38-40.

15 The poems of the troubadour Raimbaut de Vaqueiras, éd. Joseph Linskill (The Hague: Mouton, 1964), 299-344. Voir Paolo di Luca, « Épopée et poésie lyrique : de quelques contrafacta occitanes sur le son des chansons de geste », Revue des langues romanes, 112.1 (2008) 33-60, 48.

16 Voir par exemple vv. 18-21 ; 101-02 pour Roland et Berart. La Chevalerie d’Ogier de Danemarche, éd. Mario Eusebi (Milan : Istituto editoriale Cisalpino, 1963) ; Fierabras, éd. Marc Le Person (Paris: Champion, 2003)

17 Linskill, 301-02.

18 Linskill, 317.

19 Pour discussion et références, voir Canso d’Antioca, Introduction, 5-9, 132-40 ; Linda Paterson, « Occitan literature and the Holy Land » in The World of Eleanor of Aquitaine : literature and society in southern France between the eleventh and thirteenth centuries, éd. Marcus Bull and Catherine Léglu (Woodbridge : Boydell and Brewer, 2005) 83-99.

20 Geoffrey of Vigeois, Chronica Gaufredi coenobitae, éd. P. Labbé, Novae Bibliothecae Manuscript librorum : Rerum Aquitanicarum praesertim Bituricensium uberrima collectio II, 1657, 279-342, ch. I.30.

21 Son héroïsme à Ma’arrat-an-Nu’man fut largement remarqué : voir par exemple Robert le Moine, Historia Iherosolimitana VIII. 6-7 : The Historia Iherosolimitana of Robert the Monk, éd. Damien Kempf and Marcus Bull (Woodbridge: Boydell and Brewer, 2013).

22 Eustorge d’Escorailles, lui aussi Limousin. Voir R. Limousin-Lamothe, Le diocèse de Limoges des origines à la fin du Moyen Âge (Strasbourg et Paris: Le Rous, 1951) 89-90.

23 La Chanson de Sainte Foy d’Agen, éd. Antoine Thomas (Paris: Champion, 1974) ; Geoffroi Gaimar, L’Estoire des Engleis, éd. Alexander Bell (Oxford: Blackwell, 1960).

24 Boecis : poème sur Boèce (fragment), éd. René Lavaud et Georges Machicot (Toulouse, 1950).

25 Cet article n’a aucunement l’intention de discuter cette idée. Comme point de repère, voir « Littérature médiévale et théorie des genres », Hans-Robert Jauss, Poétique 1 (1970).

26 Eos : an enquiry into the theme of lovers’ meetings and partings at dawn in poetry, éd. A. T. Hatto (The Hague, 1965) ; Dietmar Rieger, « Zur Stellung des Tagelieds in der Trobadorlyrik », Zeitschrift für Römanische Philologie 87 (1971) 223-32.

27 Las Leys d’Amors, éd. Joseph Anglade, 4 vols (Toulouse: Privat, 1919) vol.2, 183.

28 Aucassin et Nicolette, éd. Jean Dufournet (Paris: Garnier-Flammarion, 1973 laisse 41, v. 24.

29 « La pastourelle dans la poésie des troubadours », Erich Köhler, Études de langue et de littérature du Moyen Âge offertes à Félix Lecoy par ses collègues, ses élèves et ses amis (Paris: Champion, 1973), 279-92.

30 John Stevens, Words and Music in the Middle Ages : song, narrative, dance and drama (Cambridge: Cambridge University Press, 1986), 26-47 pour la canso ; Evelyn Birge Vitz, Orality and Performance in Early French Romance (Cambridge: Brewer, 1999) 4-25 au sujet des octosyllabes.

31 Flamenca, romanzo occitano del XIII secolo, R. Manetti (Modena, 2008). Voir Rita Lejeune, ‘Le calendrier du Roman de Flamenca’, Mélanges d’histoire littéraire, de linguistique et de philologie romane offerts à Charles Rostaing (Liège: Université de Liège, 1974), 585-618 ; Jean-Pierre Chambon, ‘Un auteur pour Flamenca ?’, Cultura Neolatina 75 3/4 (2015) 229-71.

32 Le Jeu de Robin et de Marion, éd. Jean Dufournet (Paris: Garnier Flammarion, 1989), vv. 728-30 : « GAUTIER : Fai moi dont escouter. ‘Audigier’ dist Raimberge, ‘bouse vous di. ROBINS : Ho ! Gaultier ! Je n’en voil plus. Fi ! ». (« GAUTIER : Ecoutez-moi donc. ‘Audigier’, dit Raimberge, ‘je vous dis – bouse !’ ROBINS : Euh ! Gaultier ! Ca suffit quand même ! »).

33 Sarah Kay, The Chansons de geste in the age of romance (Oxford: Clarendon Press, 1995) ; Joseph Duggan, « Social Functions of the medieval epic in the Romance literatures », Oral Tradition 1.3 (1986), 728-66.

34 Le Pèlerinage de Charlemagne, éd. Glyn S. Burgess (Edinburgh: British Rencesvals Publications, 1998) ; La Chanson de Guillaume, éd. et trad. Philip Bennett (London: Grant and Cutler, 2000) ; Huon de Bordeaux, éd. Pierre Ruelle (Brussels et Paris: Université Libre de Bruxelles, 1960).

35 Le Moniage Guillaume : chanson de geste du XIIe siècle, éd. Nelly Andrieux-Reix (Paris: Champion, 2003).

36 Voir par exemple Raoul de Cambrai, éd. Sarah Kay (Oxford: Clarendon Press, 1992) Introduction l-lxvii pour l’analyse de la combinaison d’histoire et de légende dans le texte ; Joseph Duggan, « Medieval epic as popular historiography : appropriation of historical knowledge in the vernacular epic », Grundriss der romanischen Literatur des Mittelalters XI/I (1986), 285-311.

37 Duggan, « Social Functions », 740.

38 Nancy Partner, Serious Entertainments : the writing of history in twelfth-century England (Chicago: University of Chicago, 1977) ; Jean Blacker, The Faces of Time : portrayal of the past in Old French and Latin historical narratives of the Anglo-Norman regnum, (Texas: University of Texas, 1994) ; Peter Damian-Grint, The New Historians of the Twelfth-century Renaissance : inventing vernacular authority (Woodbridge: Boydell, 1999).

39 Gaimar, Estoire des Engleis, vv. 6477-520 ; Blacker, Faces of Time, 28-30, 137, 21 note 10.

40 Wace, Roman de Rou, éd. Anthony J. Holden, 3 vols (Paris: A. & J. Picard, 1970-73).

41 Jordan Fantosme, Chronicle, éd. R. C. Johnston (Oxford: Clarendon Press, 1981) ; La vie de saint Thomas Becket, Guernes de Pont-Sainte-Maxence, éd. E. Walberg (Paris: Champion, 1936) ; La Vie de Thomas Becket par Beneit : poème anglo-normand du XIIe siècle éd. B. Schluyter (Copenhagen, 1941).

42 « Le rôle littéraire d’Aliénor d’Aquitaine et de sa famille », Rita Lejeune, Cultura Neolatina 14 (1954), 5-53, section 6. Henri II fut couronné duc d’Aquitaine dans la cathédrale de Limoges en 1152. Voir Erich Keller, ‘Aigar e Maurin’, Atti dell’Association Internationale d’Études Occitanes IV, vol 1 159-63 suggère qu’Aigar e Maurin se fonde sur les disputes entre le Vieil et le Jeune Roi.

43 History of William Marshal, éd. et trad. David Crouch, Sidney Gregory and Anthony Holden, (Oxford: Anglo-Norman Text Society, 2002-06).

44 Gabrielle Spiegel, Romancing the Past : the rise of vernacular prose historiography in thirteenth-century France (Berkeley and Los Angeles: University of California Press, 1993).

45 Robert de Clari, La Conquête de Constantinople, éd. et trad. Peter Noble (Edinburgh: Société Rencesvals, British Branch, 2005). Le manuscrit se trouve à Copenhague (Introduction, xxviii-ix).

46 The Old French Crusade Cycle, éd. Jan A. Nelson et Emanuel J. Mickel, 10 vols (Tuscaloosa: University of Alabama Press, 1977-2003) : abréviation OFCC.

47 La Chanson d’Antioche : chanson de geste du dernier quart du XIIe siècle, éd. et trad. Bernard Guidot (Paris: Champion, 2011 ; traduite en anglais par Susan B. Edgington and Carol Sweetenham, The Chanson d’Antioche : an Old French account of the First Crusade (Guildford: Ashgate, 2011) ; Albert of Aachen, Historia Jerosolimitana : History of the Journey to Jerusalem, ed. et trad. Susan B. Edgington (Oxford: Oxford University Press, 2007) ; Robert le Moine, éd. Bull et Kempf, supra. Pour une analyse minutieuse des relations entre l’Antioche et les chroniques latines, voir l’étude de Suzanne Duparc-Quioc : La Chanson d’Antioche, 2 vols, I. Édition, II Étude (Paris: Paul Geuthner, 1976-78).

48 Les Chétifs, éd. Geoffrey M. Myers, OFCC vol 5, 1980 ; La Chanson de Jérusalem éd. Nigel Thorp, OFCC vol 6, 1992. Traduites en anglais par Carol Sweetenham, The Chanson des Chétifs and the Chanson de Jérusalem : completing the central trilogy of the Old French Crusade Cycle (Guildford: Ashgate, 2016).

49 Sweetenham and Edgington, Introduction, ch. 3. Voir Antioche, vv. 128-143.

50 Pour un tour d’horizon, voir Lucia Lazzerini, Letteratura medievala in lingua d’oc (Modena: Mucchi, 2001), 185-208. Aigar e Maurin, éd. Alfred Brossmer (Erlangen, 1901) ; Le Roland Occitan : Roland à Saragosse, Ronsasvals, éd. et trad. Gérard Gouiran et Robert Lafont (Paris: Bourgois, 1991) ; Le Roman d’Arles dans la copie de Bertran Boysset éd. Hans-Christian Haupt (Tübingen et Basel: A. Francke, 2003) ; Girart de Roussillon éd. Winifred Mary Hackett, 3 vols (Paris: A.& J. Picard, 1953-55) ; Daurel e Beton, éd. Arthur S. Kimmel (Chapel Hill, 1971).

51 Rita Lejeune, « Le problème de l’épopée occitane », Cahiers de Saint-Michel de Cuxa 3 (1972) 147-79. Robert Lafont propose une origine occitane et normande de la chanson de geste : pour une exposition détaillée, voir « Pour rendre à l’oc et aux Normands leur dû : Genèse et premier développement de l’art épique gallo-roman », La source sur le chemin : aux origines occitanes de l’Europe littéraire (Paris, Budapest, Turin: L’Harmattan, 2002), 449-523.

52 Simon Gaunt, « Desnaturat son li Frances : language and identity in the twelfth-century Occitan epic », Tenso 17.1 (2002), 10-31.

53 La Gran Conquista de Ultramar, éd. Louis Cooper, 4 vols (Bogotà : Instituto Caro y Cuervo, 1979). Pour sommaire de la discussion du matériel originaire de la Canso dans la Gran Conquista et références bibliographiques voir Sweetenham and Paterson, Introduction, 28-45.

54 GCU II., 334-35.

55 GCU I. 186-88 ; II. 46-50.

56 Crozada laisse 2, vv. 1-3 : Senhors, esta canso es faita d’aital guia / Com sela d’Antiocha et ayssi·s versifia / E s’a tot aital so, qui diire lo sabia.

57 Comparer par exemple Antioca, vv. 575-76 et Crozada, laisse 93, vv. 31-36. Autres exemples et discussions dans mon article à paraître, « Papal discussions in a chanson de geste », supra.

58 Paterson, « Occitan literature and the Holy Land », 99.

59 Antioca, vv. 294-325, 442-45 ; comparer Crozada, laisse 30, vv. 13-25.

60 Martin-Chabot de façon trenchante : « style froid… médiocre versificateur » ; Introduction, vol 3, ch 3.

61 « Papal discussions in a chanson de geste ».

62 Raguin, Lorsque la poésie, 25, 76-77.

63 Histoire du Languedoc, éd. Philippe Wolff (Privat: Toulouse, 1967), 203-04.

64 Histoire du Languedoc, 218-19.

65 Robert Lafont, « Les origines occitanes de la chanson de geste », Cahiers de Civilisation Médiévale 41 (1998) 365-73.

66 Duggan, « Social Functions », 730 donne les nombres. Beuve d’Hantone par exemple existe en anglo-normand, français et franco-italien ; il y a des redactions en prose ; et la chanson a été adaptée en anglais, gallois, et islandais.

67 Flamenca, vv. 593-710 : la plupart des textes sont du monde Classique, de l’Ancien Testament et de la matière arthurienne : les seules mentions épiques sont de Charlemagne, Clovis, Pépin et Olivier de Verdun. L’ensenhamen de Cabrera se trouve dans François Pirot, Recherches sur les connaissances littéraires des troubadours occitans et catalans des XIIe et XIIIe siècles (Barcelona, 1972) 546-62 : les seuls textes occitans sont des chants lyriques, Girart de Roussillon, Aigar e Maurin, Daurel et Beton et la Canso d’Antioca.

68 Duggan, « Social functions », 755.

69 Gerald A. Bond, « Origins », A Handbook of the Troubadours, ed. Frederick R. P. Akehurst et Judith M. Davis (Berkeley, Los Angeles et Londres: University of California Press, 1995) 237-54.

70 Alfred Poncelet, « Boémond et S. Léonard », Analecta Bollandiana 31 (1912) 24-22.

71 Nicholas Paul, To Follow in their Footsteps : the Crusades and family memory in the High Middle Ages, (Ithaca, New York : Cornell University Press, 2012).

72 Antioche, laisses 1-7.

73 Crozada, laisse 1, vv. 15-20 ; laisse 38, vv. 11-12.

74 Navarra, vv. 1-2.

75 Eliza Miruna Ghil, L’Age de Parage : essai sur le poétique et le politique en Occitanie au XIIIe siècle (New York, Bern, Frankfurt-am-Main, Paris: Peter Lang, 1989), 2.

76 Martin Aurell, La Vielle et l’épée : troubadours et politique en Provence au treizième siècle (Paris: Aubier, 1989) ; Raguin, Lorsque la poésie, 101-20.

77 Voir un exemple frappant, l’épitaphe-diatribe de Simon de Montfort : Crozada laisse 208, vv. 3-16.

78 Antioca, vv 497-500 : Qi canso vol apenre, azatz cuh qe folei / Se aquesta no canta, mas genses la desplei / Del comte de S Gili e del dux Godafre / Qe degro tost temps viure per razo e per drei.

79 Jacqueline Harpman, Moi qui n’ai pas connu les hommes (Paris: Livre de Poche, 1995), 2.

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Pour citer cet article

Référence papier

Carol Sweetenham, « Eu ne cug encar far bona canson novela. Les origines et le développement de la chanson de geste historiographique occitane »Revue des langues romanes, Tome CXXI N°1 | 2017, 14-42.

Référence électronique

Carol Sweetenham, « Eu ne cug encar far bona canson novela. Les origines et le développement de la chanson de geste historiographique occitane »Revue des langues romanes [En ligne], Tome CXXI N°1 | 2017, mis en ligne le 01 avril 2018, consulté le 08 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rlr/281 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/rlr.281

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Auteur

Carol Sweetenham

University of Warwick. Royal Holloway College

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