Former au numérique éducatif : les conceptualisations des formateurs
Résumés
Si les pratiques d’enseignement intégrant le numérique sont relativement bien documentées dans la littérature scientifique, la question spécifique de la formation initiale des enseignants au numérique éducatif l’est moins. Nous explorons, dans cette étude de cas intégrant observations, entretiens d’autoconfrontation et analyse interprétative, l’activité de deux formateurs en formation initiale des enseignants. Nous recourons pour cela au cadre de la conceptualisation dans l’action (Pastré, 2011; Vergnaud, 1996). Les résultats mettent en lumière des points communs et des divergences non seulement dans les actions de formation, mais également dans les conceptualisations qui semblent organiser ces dernières chez les sujets. Ces divergences, révélées par l’analyse de l’activité, tendent à montrer qu’une même approche didactique sera menée différemment selon la manière dont le formateur a conceptualisé le métier d’enseignant, l’usage des outils numériques et la formation initiale à ces éléments.
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Mots-clés :
numérique éducatif, Formation des enseignants, Analyse de l’activité, Outils numériques, technopédagogiePlan
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1. Les pratiques des formateurs d’enseignant en matière de numérique
1L’analyse des pratiques de formateurs en formation initiale des enseignants en matière de numérique est un champ de recherche encore peu développé. Si des publications scientifiques paraissent en la matière, elles s’attachent principalement à envisager les contenus et modèles de formation pouvant/devant être dispensés durant cette formation (par exemple, Béziat, 2012; Caneva, 2019) ou à analyser les politiques éducatives en la matière (par exemple, Henry et Joris, 2013; Laduron et al., 2019). Plus rares sont les études s’intéressant aux pratiques spécifiques des formateurs dans ce domaine. Pourtant, l’intégration du numérique dans les pratiques des enseignants semble relever d’une priorité européenne, voire mondiale (Commission européenne, 2021; Henry et Joris, 2013; OCDE, 2015). S’intéresser aux pratiques des formateurs, à leur didactique, à leurs conceptions de l’intégration du numérique dans les pratiques des enseignants, aux représentations qui guident leur action de formation apparaît ainsi nécessaire.
2En réalité, « l’intégration du numérique dans les pratiques des enseignants » est une expression qui recouvre plusieurs réalités. Parle-t-on de l’enseignement de compétences numériques et ainsi de « l’éducation au numérique »? De l’éducation « par le numérique » (De Lièvre, 2018)? Ou encore d’un usage professionnel non-didactique des outils numériques?
3Une étude que nous avons précédemment menée a montré que, parmi un échantillon de neuf formateurs d’enseignants ayant pour seule prescription d’organiser un cours intitulé « Apports des médias et des technologies de l’information et de la communication en enseignement » (cours faisant partie de la formation initiale des enseignants en Belgique francophone), les formateurs se répartissaient en trois profils, marqués par des priorités différentes quant aux objectifs qu’ils donnent à leurs cours et aux représentations qu’ils en ont (Rappe et Laduron, 2022). L’étude consistait en effet à identifier, dans des entretiens semi-directifs menés avec les formateurs, des éléments relevant de leur tâche redéfinie au sens de Leplat (2011).
4D’abord, certains formateurs orientaient leur cours vers une formation à l’éducation par le numérique et principalement vers le développement des compétences liées aux usages pédagogiques et/ou didactiques des outils numériques. L’exploitation du potentiel pédagogique des outils et de leurs usages, la plus-value pédagogique du numérique était alors considérée comme centrale par plusieurs. Ensuite, certains formateurs axaient leur cours sur la production d’artefacts médiatiques (vidéos avec scènes filmées, webdocumentaires, herbiers numériques, etc.). Ces productions étaient jugées utiles aux futurs enseignants (sans pour autant prendre spécifiquement en charge la formation à leur usage pédagogique) ou étaient envisagées comme visant à augmenter le bagage culturel numérique des étudiants. Enfin, d’autres formateurs visaient à développer chez leurs étudiants une maitrise de différents logiciels relevant de la bureautique. La maitrise de ces logiciels n’est pas associée à des pratiques effectives d’enseignant et, dans certains cas, ces logiciels étaient plutôt dirigés vers les besoins de l’étudiant, par exemple, pour rédiger ou présenter un travail dans le cadre d’un cours.
5Dans tous les cas, il s’agissait bien de « priorités », dans le sens où chacune constituait l’objectif principal du formateur, mais chacun d’eux accordait également une place à d’autres éléments numériques, relatifs aux priorités des autres profils ou relevant d’une formation technique aux outils numériques.
6L’objet de la présente étude consiste à analyser l’activité réelle de formateurs visant à former leurs étudiants à une éducation par le numérique, appartenant donc au premier type de priorité décrit ci-devant. Il s’agit ainsi de comprendre leurs pratiques effectives relativement à la formation au métier d’enseignant. Si, certes, ils se donnent comme tâche de développer chez leurs étudiants des compétences d’éducation par le numérique, comment cela se concrétise-t-il? En réalité, cette question de recherche est double. D’abord, à quels aspects numériques du métier d’enseignant sont-ils formés et de quelle manière? Ensuite, qu’est-ce qui guide les formateurs dans leur action de formation à l’enseignement par le numérique? Pour répondre à cette seconde question, nous mobiliserons le cadre de la conceptualisation dans l’action (Pastré, 2011; Vergnaud, 1996), envisagée dans une logique exploratoire.
7Les deux sections suivantes présentent les aspects du métier auxquels il est possible de former les enseignants ainsi que le cadre conceptuel auquel nous nous référons pour l’étude. La suite respecte une structure classique : description de la méthodologie, résultats, interprétation des résultats, limites méthodologiques et conclusions.
2. À quels aspects du métier d’enseignant peut-on former les étudiants?
8Sur cette question, si l’on synthétise quelques apports de la littérature en la matière, on retrouve globalement des catégories communes dans la constitution de la pratique des enseignants, en termes de tâches constitutives du métier :
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La planification de l’enseignement et de son évaluation (Beckers, 2007), appelée aussi phase préactive (Deaudelin et al., 2005) ;
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L’enseignement à proprement parler, dans lequel l’enseignant gère les interactions avec les élèves durant les sessions (Beckers, 2007), appelé aussi phase interactive (Deaudelin et al., 2005) ;
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L’évaluation des enseignements fournis, appelée également phase postactive (Deaudelin et al., 2005) ;
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Au-delà de ces trois phases, qui constituent la gestion des apprentissages cognitifs et socioaffectifs (Van Nieuwenhoven et al., 2014), le fait d’établir et de gérer des relations de partenariats éducatifs avec l’équipe éducative, les parents d’élèves et d’autres partenaires de la société (Beckers, 2007), afin d’agir dans la communauté éducative et de se développer personnellement et professionnellement (Van Nieuwenhoven et al., 2014), constitue une dernière catégorie.
9Dans le cadre de la formation des enseignants spécifiquement axée sur l’éducation par le numérique, Karsenti et al. (2002) proposaient, il y a quelques années, un bilan des recherches en la matière. Ils montrent en premier lieu la nécessité de passer d’une formation technocentrée à une formation technopédagogique. Prolongeant cette proposition, ils invitent à envisager la formation numérique dans une démarche plus holistique, tenant compte à la fois des usages et des compétences, mais également d’autres facteurs : conditions d’efficacité, caractéristiques des acteurs et des institutions, etc. En matière de stratégies de formation, plusieurs éléments sont évoqués tels que la confrontation des étudiants à des modelages de pratiques numériques par l’enseignant superviseur de stage et/ou par les formateurs, des recours fréquents aux pratiques numériques, ou la collaboration et la mise en réseau des (futurs) enseignants.
10Corroborant certaines de ces recommandations, tout en reconnaissant que la formation est un levier parmi d’autres, Béziat propose différentes conditions pour que la formation initiale donne effectivement lieu à des pratiques numériques en classe (Béziat, 2012) :
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Une formation (technique) à l’usage des ressources numériques ;
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Le recours à des modèles pédagogiques et savoirs fondamentaux, indépendamment des outils spécifiques ;
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Une formation à la scénarisation pédagogique ;
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Des moments dédiés à l’analyse de pratiques réelles intégrant le numérique, permettant notamment de problématiser les usages.
11Enfin, plus récemment, des auteurs insistent sur la nécessité d’une approche réflexive et critique du numérique, notamment dans la déconstruction de mythes et de doxa contemporains, et en lien avec les réalités professionnelles, institutionnelles et systémiques en jeu (Collin et al., 2017 ; Ferone, 2019 ; Fluckiger, 2019)
12Ces différents éléments permettront de caractériser les pratiques des formateurs qui ont participé à cette étude et de les catégoriser.
3. Analyser ce qui guide les formateurs : le cadre de la conceptualisation dans l’action
13Notre objectif est de dépasser une analyse des pratiques pour identifier ce qui guide les formateurs dans leur action. Nous nous situons ainsi dans une démarche d’analyse de l’activité. La notion d’activité peut être comprise selon deux axes complémentaires. Premièrement, dans sa distinction avec la notion de tâche. La tâche est ce qui relève du but donné à l’action du professionnel et les conditions, externes et internes au sujet, dans lesquelles ce but doit être atteint. L’activité, elle, est constituée de tout ce que le professionnel met en œuvre pour atteindre ce but (Leplat, 2011). L’activité est toujours plus complexe que la tâche donnée, ce qui nous amène au second axe de définition de la notion d’activité. Cette dernière englobe en effet à la fois la facette visible de l’action (comportements mis en œuvre, gestes, paroles, etc.) et les éléments invisibles qui la génèrent et l’influencent : prescriptions, représentations, conceptualisations, affects, inhibitions, savoirs et savoir-faire convoqués, etc. Ainsi, l’activité ne se limite pas à l’exécution de la tâche, mais mobilise toute une série de ressources de nature différente (Rogalski, 2012). La présente étude relève d’une analyse de l’activité des formateurs, puisque nous sommes allés observer leurs pratiques de classe et mener des entretiens avec eux sur ces dernières afin de comprendre les éléments qui ne sont pas directement observables, mais qui guident leur action. L’analyse de l’activité est ainsi envisagée comme complémentaire à l’analyse didactique des pratiques, car elle englobe la part cognitive des gestes de formation.
14Plusieurs cadres conceptuels permettent d’étudier l’activité professionnelle. Pour cette étude, nous proposons de recourir au cadre de la conceptualisation dans l’action et plus spécifiquement aux notions de schème et de modèle opératif (Delacour et Vinatier, 2022 ; Pastré, 2011; Pastré et al., 2006, Vergnaud, 1996). Le modèle opératif constitue une précision du schème adaptée au domaine professionnel. Ces deux notions, que nous envisageons comme complémentaires, s’attachent à décrire la manière dont l’action d’un sujet est organisée de manière invariante pour une (ou plusieurs) classe(s) de situations. Par commodité, nous utiliserons le terme « schème » dans la suite du texte. Un schème se compose de plusieurs éléments :
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Des buts et sous-buts ;
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Des règles d’action permettant d’atteindre ces buts ;
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Des inférences en situations, processus permettant d’adapter les buts et la conduite aux spécificités de la situation ;
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Enfin, au fondement de ces différents composants, des invariants opératoires, qui constituent la partie la plus cognitive du schème.
15Les invariants opératoires peuvent être considérés comme des connaissances-en-acte (Vergnaud, 2011) qui guident l’action du sujet. Pastré les nomme d’ailleurs « organisateurs de l’action » (Delacour et Vinatier, 2022 ; Pastré, 2011; Pastré et al., 2006; Vinatier et Pastré, 2007). Prenons un exemple. Lors de l’analyse de l’activité d’une enseignante animant un atelier de lecture avec un sous-groupe d’élèves, Dejaegher et Schillings ont mis en lumière que, parmi les différents organisateurs de son action, l’enseignante était guidée par le concept de « rythme ». Ce concept la poussait à adapter la cadence de sa leçon et les interventions qu’elle propose aux élèves (Dejaegher et Schillings, 2020). Ces invariants sont dits « en actes », car ils s’actualisent dans l’action sans forcément être explicites, voire étant non-conscients pour le sujet (Pastré et al., 2006; Vergnaud, 1996, 2011). Dans le domaine professionnel, Pastré précise qu’un organisateur de l’action (à moins qu’il ne soit issu de la formation) peut être nommé et partagé par une communauté de professionnels sans pour autant avoir de définition précise chez ces derniers (Pastré, 2011; Pastré et al., 2006). Ajoutons que l’on peut distinguer deux types d’invariants opératoires : des concepts, par exemple celui de « rythme » dans la recherche de Dejaegher et Schillings, et des jugements, des « propositions tenues pour vraies » (Pastré, 2011). Par exemple, dans la même recherche, l’enseignante considérait qu’établir des liens entre la leçon et le vécu des élèves renforce leur implication dans la tâche.
16Un schème est construit par le sujet pour et par la rencontre avec des situations d’une même classe (Delacour et Vinatier, 2022 ; Pastré et al., 2006; Vergnaud, 1996, 2011). Il n’est pas un stéréotype, mais une organisation de l’action, générant cette dernière selon les caractéristiques de la situation. Concrètement, face à une situation, un professionnel va diagnostiquer cette dernière, grâce des indicateurs pris en son sein (Pastré, 2011). Ce diagnostic et cette prise d’indicateurs se réalisent relativement aux invariants opératoires du sujet. Ils peuvent, nous le rappelons, être implicites pour ce dernier. Sur la base de ce diagnostic et des invariants, les buts, la conduite et les processus d’inférence sont générés. L’action a ainsi lieu.
17Selon ces perspectives et les éléments théoriques évoqués, comment s’organise l’activité d’un formateur de futurs enseignants en matière de technopédagogie? Quelles conceptualisations, quels invariants opératoires guident la conception et l’exécution de son dispositif de formation intégrant le numérique?
4. Méthodologie
18L’étude consiste en l’analyse de l’activité de deux formateurs de futurs enseignants au numérique. Pourquoi deux participants? L’ensemble de l’étude est pensé selon une logique d’étude de cas compréhensive. En ce sens, l’objectif n’est pas d’inférer les résultats à d’autres situations, mais de comprendre dans sa complexité et sa profondeur la singularité de l’action des deux formateurs en contexte écologique. Qui plus est, l’analyse de l’activité demande de collecter et de traiter un volume empirique relativement important en matière d’observations et d’entretiens, comme nous le présenterons dans cette section. Nous voulions néanmoins proposer une étude comparative, partant du principe que la comparaison aide à la caractérisation.
19Les deux formateurs forment des futurs enseignants à destination soit du niveau primaire, soit des trois premières années du niveau secondaire en Belgique francophone. Dans ce contexte, la formation des futurs enseignants aux usages des outils numériques est dispensée dans un enseignement supérieur dit « de type court » d’une durée de trois ans. Cette formation se réalise au travers d’un cours appelé Apport des Médias et des Technologies de l’Information et de la Communication en Enseignement (AMTICE). Ce cours se donne en deux parties, à raison de 30 heures au cours d’une année de formation et 30 heures au cours de la suivante. Ces portions de 30 heures incluent tant les séances de cours que le travail demandé aux étudiants en dehors de ces séances. Ces éléments (intitulé et volume-horaire) constituent la seule prescription explicitement formulée aux formateurs en charge de ce cours (Décret définissant la formation initiale des enseignants et des régents, 2000). Le dispositif observé pour cette étude, chez chacun des deux formateurs, concernait les 30h de la seconde année. Nos deux participants officient chacun au sein de ce cours depuis plus de dix ans. Dans la suite du texte, nous utiliserons, pour nommer les deux participants, les pseudonymes Valérie et Mathieu.
20La récolte du matériau empirique s’est réalisée selon deux modalités : des observations filmées en salle de cours et des entretiens d’autoconfrontation réalisés à la suite de chaque observation, dans une logique de restitution (Rix-Lièvre, 2010). L’approche méthodologique était strictement qualitative.
21L’enregistrement vidéo des séances visait garder une trace la plus complète possible de l’activité des formateurs, afin de l’utiliser durant les entretiens d’autoconfrontation. Nous récoltions également toute autre trace (supports de formation, etc.) pouvant s’avérer utile pour comprendre le schème du participant.
22Les entretiens menés étaient donc des entretiens d’autoconfrontation (Theureau, 2010), menés dans une logique de restitution de l’action (Rix-Lièvre, 2010). Ils consistaient à placer le participant face à l’enregistrement de son activité, et aux éventuelles autres traces, afin de le lui faire commenter pour ainsi documenter son activité. Nos interventions consistaient à faire approfondir et enrichir le discours du participant afin de faire émerger, avec un niveau de détail suffisant, les informations nécessaires à la compréhension des éléments saillants de son schème. L’objectif n’était pas de questionner le participant de manière générale sur ses représentations de sa propre activité, mais bien de lui faire commenter « l’ici et maintenant » (Theureau, 2010) : en l’occurrence l’activité qui venait d’être observée. En effet, comme mentionné ci-devant, l’activité du sujet peut lui être implicite, voire non consciente (Pastré, 2011; Vergnaud, 2011). Il peut également en avoir une représentation erronée (Rix-Lièvre, 2010; Vermersch, 2019). Questionner « l’ici et maintenant », au travers de traces objectivables de son action, permet de réduire ce biais.
23Les deux formateurs ont été suivis durant l’ensemble de leur dispositif de cours de Bachelier. Nous avons observé et filmé la quasi-totalité des séances de cours données en présentiel, soit cinq séances chez chaque formateur. Aucune séance n’était donnée en distanciel. Les entretiens avaient directement lieu après la séance observée. Le volume de données correspond sensiblement à 20 heures d’observation et 10 heures d’entretiens.
24Les entretiens ont ensuite été retranscrits intégralement. L’analyse a consisté à coder des portions de textes à l’aide de catégories conceptualisantes (Paillé et Mucchielli, 2016). Concrètement, lorsqu’un extrait du discours du participant semblait désigner une ou plusieurs unités de son activité (but, action, représentations sur soi, sur la situation, etc.), l’extrait était étiqueté avec une phrase conceptualisant l’essence de ce qui était dit. Voici un exemple relatif à un entretien mené avec Valérie.
Tableau 1. Exemple de codage sur un extrait d’entretien
Verbatim du deuxième entretien |
Codage |
Valérie : Donc dans le but de convaincre l’auditoire qu’ils vont faire vraiment des choses extraordinaires, qu’ils vont apporter des plus-values importantes. Et je leur demande de sélectionner 3 tâches à faire réaliser par les élèves avec la technologie, dans le cadre des disciplines qu’ils doivent enseigner […] De pouvoir montrer à quoi la production va ressembler et de pouvoir justifier en quoi cette activité est intéressante au niveau, soit du développement de compétences, soit de transformation de la tâche par rapport à une… à la non-utilisation de la technologie. |
Former les étudiants à exploiter les plus-values pédagogiques des outils numériques Pourvoir argumenter le bien-fondé de leur séquence d’enseignement |
25Lorsqu’un code semblait désigner un aspect spécifique du schème, une couleur lui était associée. Par exemple, « Former les étudiants à exploiter les plus-values pédagogiques des outils numériques », dans l’exemple ci-devant, semble traduire un but que Valérie donne à son action. Le code fût donc coloré en vert. À chaque autre composante du schème (geste/règle d’action, indicateur, proposition tenue pour vraie, indicateur, etc.) était associée une couleur différente. Notons que certains codes permettaient difficilement de les associer à une catégorie spécifique. Ces derniers étaient alors laissés en blanc.
26Cette méthode a été appliquée à l’ensemble des verbatims d’entretien. Des retours aux vidéos, ainsi qu’aux éventuelles autres traces (généralement des supports de formateurs) étaient fréquemment réalisés afin de pleinement comprendre les propos des participants puisque, nous le rappelons, les entretiens consistaient en des retours sur l’action, et les vidéos ainsi que les supports de formation constituent des traces de cette action. Pour chaque entretien, chacun des deux chercheurs a réalisé un codage individuel. Nous les confrontions ensuite, en repensant notre interprétation lorsque deux propositions de codage apparaissaient incompatibles.
27Une fois le codage réalisé, est venu le temps d’articuler et intégrer les codes pour mettre en lumière l’unité et le fonctionnement du phénomène étudié, à savoir le schème du participant. Cette articulation s’est réalisée dans une logique de triangulation des données (Leplat, 2002). Pour ce faire, pour chacun des deux formateurs, nous avons disposé l’ensemble des codes dans un espace vide et avons relié ceux qui semblaient s’articuler d’après les données et leur interprétation. Par exemple, toujours dans les données de Valérie, les codes « changer la vision du numérique des étudiants » et « entrainer les étudiants à identifier les bénéfices de leur méthode » ont été associées à « identifier les plus-values du numérique » comme étant deux sous-buts du but général que constitue ce troisième code.
28Cette articulation permettait 1) de faire émerger la modélisation du schème du participant et 2) de permettre d’inférer les conceptualisations qui sous-tendent l’action du sujet, autrement dit ses invariants opératoires. Pour ce faire, nous prenions tous les codes reliés entre eux et procédions à une inférence par comparaison-généralisation (Mucchielli, 2006) afin d’identifier un invariant opératoire. La comparaison-généralisation consiste à identifier un élément commun fondamental et à le nommer. Cette dénomination recourait soit aux mots utilisés par le participant dans les entretiens, soit à un terme choisi par le chercheur, lorsqu’il semblait mieux désigner l’élément inféré. Par exemple, la comparaison-généralisation des trois codes ci-dessus, ainsi que de nombreux autres auxquelles ils étaient reliés, a conduit à inférer la notion de « plus-value pédagogique » comme invariant opératoire de Valérie.
- 1 Les deux réseaux ainsi construits sont disponibles en annexe. Au vu de leur taille, une capture d’é (...)
29Précisons que ces mises en lien et ces comparaisons-généralisations, donnant finalement lieu à un véritable réseau conceptuel, ont été réalisées pour chacun des deux sujets séparément. Le but n’était pas d’identifier un schème commun aux deux participants, mais justement leur schème individuel afin de les comparer1.
30Pour résumer, on peut considérer que l’approche méthodologique consistait à « remonter le fil » de l’action spécifique vers le schème. Pour ce faire, la méthode d’analyse consistait à coder de manière interprétative les entretiens menés avec chaque sujet, puis à schématiser les relations qu’entretiennent les codes créés (en tant que propriétés du schème du sujet), et enfin à les comparer pour inférer les invariants opératoires. L’approche peut ainsi se rapprocher d’une analyse inductive modérée (Savoie-Zajc, 2018), dans le sens où le cadre théorique de référence définit des concepts opérationnels généraux qui visent à organiser l’analyse sans pour autant « faire violence aux données » (Olivier de Sardan, 2008) en en occultant ou déformant potentiellement des aspects par le recours à une grille de lecture prédéfinie.
5. Résultats
5.1. Des dispositifs didactiques globalement similaires
31Si l’on adopte un regard global sur les dispositifs didactiques de Valérie et Mathieu, autrement dit sur les tâches qui sont proposées aux étudiants, leur agencement, et sur le rôle pris par le formateur, on constate un certain nombre de similitudes. Dans les deux cas, le contenu du cours consiste, pour les étudiants, à scénariser une séquence d’enseignement intégrant un outil numérique dont le choix était laissé à la discrétion de l’étudiant, telle qu’elle serait donnée dans leur futur contexte de travail, et de l’animer durant les dernières séances du cours. Cette scénarisation, étalée donc sur plusieurs séances de cours, se réalise en sous-groupes de trois à cinq étudiants. Préalablement, une banque d’outils numériques était constituée et mise à disposition des étudiants. Enfin, lors de la présentation de sa séquence par un sous-groupe, le reste des étudiants est invité à participer à l’évaluation qualitative de leurs pairs. Le formateur apporte son soutien de différentes manières lors des phases de scénarisation en sous-groupes : rappel des consignes, soutien dans la réflexion, etc.
32On peut ainsi résumer les dispositifs des deux formateurs, dans ce qu’ils ont de commun, de la manière suivante :
33Ce noyau commun rappelle sous certains aspects la méthode du microenseignement (Linard et Prax, 1978) : préparation et animation d’une microleçon, animée dans une situation simulée avant de s’autoévaluer et de recevoir une évaluation par une personne externe. Toutefois, l’approche des deux formateurs 1) ne recourt pas à l’enregistrement vidéo pour revisionner sa pratique et 2) n’est pas conçue dans une perspective behavioriste, dans le sens où les étudiants ne doivent pas appliquer un comportement appris, mais plutôt faire appel à leur créativité et aux acquis issus d’autres cours dans leur formation initiale, notamment les cours de pédagogie et de didactique.
34Les deux formateurs ont néanmoins leurs spécificités. Valérie propose une séance préalable aux étapes ci-devant durant laquelle elle fait découvrir aux étudiants divers modèles théoriques liés à l’intégration du numérique dans les pratiques d’enseignement : le modèle SAMR (Levy, 2017), le modèle ASPID (Karsenti et Bugmann, 2018), le référentiel de compétences DigComp (Carretero et al., 2017) ainsi qu’un modèle élaboré personnellement construit comme une typologie des plus-values pédagogiques du numérique. Une fois les scénarios des séquences des différents sous-groupes quasiment constitués, Valérie invite ses étudiants à analyser un scénario d’un autre groupe que le leur à la lumière d’au moins un modèle théorique et de fournir le produit de cette analyse au groupe concepteur. Notons que le modèle SAMR est particulièrement mis en avant par la formatrice. Elle invite ensuite chaque sous-groupe à reprendre la scénarisation de sa séquence en tenant compte des analyses reçues.
35Un autre élément distingue les dispositifs des deux formateurs : l’étape durant laquelle chaque sous-groupe d’étudiants soumet sa séquence au reste du groupe. Chez Mathieu, il s’agit pour les étudiants d’animer la séquence, en simulant une situation professionnelle dans laquelle les étudiants-spectateurs jouent le rôle des élèves, alors que, chez Valérie, les étudiants sont amenés à exposer leur scénarisation en en argumentant le bien-fondé, notamment à la lumière des modèles théoriques découverts. La méthodologie de formation proposée par Mathieu semble ainsi plus fortement s’apparenter au microenseignement.
36Cette comparaison générale entre les deux dispositifs étant posée, nous proposons, dans la section suivante, une analyse des schèmes des deux formateurs. Cette analyse permettra de mettre en lumière les conceptualisations fondant la pratique de chaque formateur (leurs invariants opératoires) ainsi que les gestes et choix didactiques qui en découlent.
5.2. Des organisations de l’activité différentes - Valérie
37Cette section des résultats ainsi que les deux suivantes concernent l’analyse des schèmes de Valérie et Mathieu. Précisons, avant de les développer, qu’il ne s’agit pas d’une analyse exhaustive et détaillée des différents composants du schème, un tel objectif étant peu pertinent dans le cadre de l’étude des métiers de l’interaction humaine (Vinatier, 2009, 2013). Nous avons centré notre étude sur les conceptualisations qui semblaient guider, de la manière la plus saillante, l’activité des deux formateurs. Ainsi, nous présentons ici les invariants opératoires que nous avons identifiés, ainsi que plusieurs exemples de buts donnés à l’activité, de gestes et de règles d’action découlant de ces conceptualisations.
38Commençons par Valérie. Un premier invariant opératoire, sans doute celui qui nous a semblé le plus évident dans l’activité de cette formatrice, relève de la notion de plus-value pédagogique du numérique. Elle traduit la manière par laquelle l’intégration d’un outil numérique dans une séquence d’enseignement peut permettre de proposer aux élèves une tâche à la fois nouvelle et plus efficiente en comparaison à ce qui était proposé précédemment ou ailleurs pour un même contenu d’enseignement. Notons que Valérie considère que cette efficience peut s’opérer sur plusieurs niveaux (amélioration des apprentissages, meilleure organisation des tâches, etc.). Ces termes, qui existent par ailleurs dans la littérature scientifique (Noben et Denis, 2022), sont ceux utilisés explicitement par la formatrice. Cet invariant opératoire apparaît pleinement explicite pour cette dernière. Son caractère opératoire s’exprime d’un côté dans les objectifs qu’elle donne à son cours : elle veut par exemple rendre les étudiants capables d’identifier une ou plusieurs plus-values pédagogiques dans une séquence d’enseignement intégrant le numérique, mais également de pouvoir concevoir une séquence traduisant effectivement une plus-value. De l’autre, dans les gestes qu’elle met en œuvre durant les séances : elle demande par exemple fréquemment aux étudiants de justifier le bien-fondé d’un de leurs choix pédagogiques, en référence à la notion de plus-value ou à un modèle théorique y correspondant. Le choix de présenter en premier lieu cet invariant n’est pas anodin. En effet, Valérie semble accorder une importance particulière à cette notion. De ses propres mots, elle considère que si l’usage d’un outil numérique ne conduit pas une plus-value, si par exemple il se substitue à un autre outil sans amener une tâche innovante pour les élèves, l’usage des outils numériques n’a que peu d’intérêt. De même, elle considère que l’aspect visuel de l’interface d’un outil numérique est secondaire en comparaison à la plus-value pédagogique qu’il peut générer. On voit ainsi que le caractère innovant et améliorant que l’on retrouve dans la notion de plus-value pédagogique du numérique est central dans ses représentations et dans son activité.
39Nous avons identifié un autre invariant opératoire, qui ne fut pas explicitement nommé par Valérie, qui semble lié aux représentations de la formatrice sur les compétences d’un (futur) enseignant. Nous avons nommé cet invariant ingénieur éclairé. En effet, Valérie semble considérer qu’un (futur) enseignant est celui qui à la fois conçoit des séquences d’enseignement pertinentes (il est ainsi un ingénieur pédagogique) et peut identifier explicitement ce qui fait la qualité pédagogique d’une séquence, qu’elle soit la sienne ou celle d’un autre, notamment en référence à la littérature scientifique (il a ainsi un regard éclairé). C’est la combinaison de ces deux volets qui semblent participer à l’organisation de son activité de formatrice. Ainsi, comme nous l’avons vu, elle cherche à les rendre capables de construire une séquence pertinente, en choisissant eux-mêmes l’outil utilisé, et à en justifier « constamment » (sic) le bien-fondé non seulement à elle, mais également entre eux lors des phases de conception. Elle désire également les rendre capables d’utiliser des modèles théoriques (SAMR, ASPID, etc.) dans l’analyse et la conception des séquences. Par ailleurs, et c’est là une différence marquée avec l’autre formateur, lors de la présentation par les sous-groupes d’étudiants de la séquence construite, Valérie exige de ces derniers, non pas qu’ils animent leur séquence en simulation de classe, mais qu’ils la présentent en en argumentant les choix pédagogiques. Pour reprendre ses propos, elle considère que les étudiants doivent « défendre leur projet » et non l’exposer.
40Un troisième organisateur identifié semble être une proposition tenue pour vraie par Valérie : pour elle, lors d’une séquence d’enseignement intégrant un outil numérique, l’élève doit être non seulement actif, mais c’est lui qui doit manipuler l’outil numérique (plutôt que l’enseignant). Cette proposition fût donnée explicitement par la formatrice pour justifier certaines interventions de sa part durant les séances. Elle incitait en effet les étudiants à construire des séquences d’enseignement où ce sont les élèves qui manipulent les outils numériques.
41Enfin, un quatrième organisateur identifié est celui que nous avons décidé de nommer « co-enrichissement ». La formatrice recourt à la collaboration entre étudiants. Toutefois, si l’on regarde plus spécifiquement 1) la manière dont cette collaboration est gérée, 2) le rôle qu’elle se donne dans ce processus, on constate qu’elle envisage spécifiquement une dynamique d’enrichissement mutuel, à la fois entre les étudiants, et à la fois entre elle et le reste du groupe. Ainsi, elle invite les étudiants, s’ils le peuvent et le désirent, à compléter la banque d’outils qu’elle met à leur disposition avant la conception des séquences ; elle organise des moments de regards croisés, entre les sous-groupes, des séquences construites ; elle tente de les convaincre, et cela constituait une difficulté pour elle, qu’ils peuvent ne pas être en accord avec ses propres propositions, qu’ils peuvent avoir de meilleurs arguments qu’elle, etc. Cette conceptualisation de l’enrichissement mutuel était visible dans les entretiens. Pour les moments de regards croisés par exemple, elle considère qu’au-delà de l’exercice de la critique et de l’intérêt des rétroactions, ces moments permettaient aussi aux étudiants de découvrir « d’autres manières de faire » (sic), d’être confrontés à des modes opératoires différents du sien. En outre, elle exprimait durant les entretiens le fait qu’elle désirait, lors de ces passages dans les sous-groupes, prendre la posture de celle qui réfléchit avec les étudiants et non de celle qui les conseille en tant qu’experte. Elle désirait par-là que les étudiants puissent exprimer librement et de manière assertive l’argumentation de leurs choix pédagogiques sans être influencés, dans un rapport d’autorité, par l’opinion de la formatrice. Ceci constituait, pour elle, une difficulté particulière. Pour répondre à cette dernière, elle mettait en place diverses stratégies : donner d’abord la parole aux étudiants avant de donner son avis, pousser les étudiants aux débats lors d’incertitudes plutôt que d’intervenir, prendre parfois explicitement le rôle d’un étudiant durant une phase d’échange, éviter d’interrompre les étudiants durant une explication même si elle n’est pas d’accord avec leur choix, etc.
5.3. Des organisations de l’activité différentes - Mathieu
42Du côté de Mathieu, nous avons identifié trois invariants opératoires dans l’analyse des observations et des entretiens. Le premier d’entre eux semblait relever, au même titre que l’ingénieur éclairé de Valérie, d’une conceptualisation du métier d’enseignant. Il diffère toutefois de ce dernier. Mathieu semble en effet plutôt guider par le concept de praticien, dans le sens où, au contraire de Valérie, la pratique, l’action d’enseignement est importante et non l’argumentation et le recours à la littérature scientifique. Ainsi, ce qui semble essentiel dans l’activité formative de Mathieu, c’est le côté « directement utile », « directement transférable dans la pratique », « directement utilisable », « qui peut servir au quotidien de l’enseignant », etc. Nous reprenons ici les termes utilisés par Mathieu. Globalement, il veillait à ce que les différents éléments construits par les étudiants ou fournis à ceux-ci soient aisément transposables dans leur pratique future. Pourquoi alors avoir parlé de praticien plutôt que de transfert, cette dernière notion semblant bien désigner, à première vue, ce qui organise l’activité de Mathieu? Car cette dernière notion ne montre pas que l’accent est mis sur le côté pratique, voire pragmatique, de ces différents éléments. Certes plusieurs choix posés par Mathieu sont pensés dans une logique de transfert direct, comme le fait de sélectionner les outils numériques présentés aux étudiants en fonction de la facilité de leur prise en main et de l’utilité pédagogique qu’il y perçoit. Ou encore le fait d’exiger des étudiants que la séquence construite en sous-groupe soit formalisée au sein d’une fiche « directement utilisable » par les autres étudiants. Mais d’autres choix d’action montrent l’aspect réalité de la pratique de l’invariant opératoire de ce formateur : faire anticiper aux étudiants les caractéristiques contextuelles qui peuvent exercer une influence sur le déroulement de leur séquence (disponibilité du matériel, câblage, etc.) ; proposer des outils qui peuvent être utiles sur le plan didactique, mais également sur d’autres aspects du métier (gestion de classe, communication avec les parents, etc.) ; ou encore inciter les étudiants à jouer leur séquence en fin de processus (et non à l’exposer), en simulant une situation de classe, quitte à interrompre ces derniers s’ils fournissent des explications au lieu de « faire vivre » les tâches à leur pairs.
43Nous avons identifié un second invariant opératoire en la notion de collaboration. Là où Valérie semblait organiser ses tâches autour des enrichissements des différents acteurs, Mathieu semble plutôt guidé par un processus collaboratif, par la dynamique de travail caractéristique de la collaboration. Cette collaboration se retrouve dans plusieurs aspects de son dispositif : il vise à ce que les étudiants conçoivent et animent leur séquence dans une logique de collaboration (où chacun aurait des rôles simultanés et complémentaires) plutôt que dans une logique de division (où chacun prendrait en charge chronologiquement une partie de l’animation) ; il donne accès aux étudiants à des espaces de travail collaboratif (de type creative school lab) ; il met explicitement l’accent sur la différence entre collaboration et coopération, etc.
44Enfin, nous avons identifié un troisième invariant opératoire : celui de motivation. Cette motivation est celle de l’étudiant. En effet, Mathieu met en œuvre diverses stratégies pour favoriser la motivation des étudiants : il insiste auprès des étudiants sur le caractère utile pour les stages et pour la pratique future des fiches de séquence qui seront élaborés au sein du cours ; il consacre du temps après le cours (jusqu’à plusieurs heures) à un étudiant qui en fait la demande ; il consulte les étudiants individuellement durant le processus de conception, etc. Et, dans le même temps, il attend des étudiants un certain investissement dans son cours. Si, par exemple, il considère qu’un étudiant ne s’est pas suffisamment « investi » en matière de présence au cours, de participation, et/ou d’exploration de l’outil choisi pour être intégré dans la séquence construite, il explique qu’il sera plus pointilleux durant l’évaluation ou qu’il leur proposera une tâche supplémentaire. Sur ce point, il considère qu’il cherche à les pousser à « faire l’effort de s’intéresser ».
5.4. Comparaison des deux schèmes
45Nous avons exposé les conceptualisations (invariants opératoires) qui semblent guider l’action des deux formateurs durant leurs cours et dans la conception de ce dernier. Bien que les différents invariants soient exposés de manière juxtaposée, ils fonctionnent de manière intégrée. On peut ainsi identifier des synergies entre les différents invariants opératoires, les buts et les actions qu’ils génèrent. La figure suivante présente une schématisation de ces synergies pour les deux formateurs. Cette figure reprend le premier schéma, qui montrait ce qu’il y avait de commun, d’un point de vue didactique général, entre les dispositifs des deux formateurs. Elle comprend également une portion du schème de Mathieu (dans la partie supérieure) et du schème de Valérie (dans la partie inférieure). Pour chaque schème, trois invariants opératoires sont repris ainsi que les buts et actions spécifiques qu’ils définissent. L’ensemble vise à mettre en lumière les différences entre les deux formateurs.
46On constate à la lumière de cette figure que, pour des choix généraux similaires, des choix pédagogiques plus spécifiques diffèrent en fonction de conceptualisations différentes. Mais plus encore, on constate que ces choix sont associés à des objectifs tantôt communs (former à la conception de séquences d’enseignement intégrant le numérique de manière sensiblement réaliste), tantôt très différents (identifier et argumenter une plus-value ou au contraire mettre l’accent sur une action proche de l’action professionnelle future).
47Nous rappelons qu’il s’agit bien ici d’extraits des schèmes, utilisés en illustration du propos. Pour l’un comme pour l’autre, les buts et les stratégies de formation sont plus diverses que ce qui est montré dans le schéma. Rappelons en outre qu’il s’agit ici des invariants qui semblent les plus prégnants dans l’organisation de l’activité des sujets. Ces analyses n’ont pas la prétention de fournir une modélisation exhaustive des schèmes des deux participants.
6. Discussion des résultats
48Reprenons les questions qui ont guidé l’étude. À quels aspects numériques du métier d’enseignant les formateurs forment-ils leurs étudiants et de quelle manière? Si l’on reprend la synthèse proposée en début d’article, on voit que la majorité du temps, des tâches et de l’accompagnement fourni par le formateur est dévolue à la formation à la conception de séquences d’enseignement, à la planification de l’enseignement (Beckers, 2007), et donc à sa phase préactive (Deaudelin et al., 2005). Bien que Mathieu incite les étudiants à jouer leur séquence, c’est dans la conception et la présentation au groupe que réside l’essentiel de la formation, et ce pour les deux formateurs. Ils rejoignent ainsi une des recommandations de Béziat, puisqu’ils fournissent une formation à la scénarisation pédagogique (Béziat, 2012). Il s’agit bien là d’une formation à la scénarisation, qui relève d’un type spécifique d’ingénierie (Peraya et Peltier, 2020) ou de planification de l’enseignement (Wanlin, 2009) : il consiste à scénariser des séquences d’enseignant réparties sur une à trois séances en classe afin de répondre à un ou plusieurs objectifs d’apprentissage spécifiques et non à planifier un dispositif sur du moyen ou du long terme. En revanche, la confrontation régulière à des pratiques techno-pédagogiques (Béziat, 2012; Karsenti et al., 2002) ne semblent faire partie de l’approche actuelle de ces formateurs.
49Ceci met en avant que, dans les deux cas, la formation proposée n’est pas technocentrée mais technopédagogique (Karsenti et al., 2002) : les fonctions des outils et services numériques ne constituent ni l’objectif d’apprentissage ni même la « porte d’entrée » de la formation dispensée. Au contraire, ils sont mis au service, en tant qu’instruments, de la pédagogie de l’enseignant. S’ils sont, dans les deux cas, proposés en début de processus (cf. première case de figure 1), ils le sont en tant que banque de ressources pour la conception d’une séquence d’enseignement et les interventions des formateurs sont très largement concentrées sur leur usage. Ce sont d’ailleurs des outils proposés et non imposés, que ce soit par Valérie ou par Mathieu.
50Pour approfondir la caractérisation de cette formation à la conception, nous pouvons mobiliser le modèle explicité dans l’ouvrage de Fiévez (2017). Ce dernier, repris en figure 3, synthétise les tenants et aboutissants de la conception d’une séquence d’enseignement, qu’elle recourt aux outils numériques ou non. La colonne centrale reprend les grandes étapes par lesquelles un enseignant passe lorsqu’il conçoit une activité. Les première et troisième colonnes reprennent chacune des éléments à prendre en compte au sein de ces étapes.
Figure 3. Modèle de conception d'une séquence de cours (Fiévez et Castel, 2012, cité par Fiévez, 2017)
51Valérie et Mathieu n’initient pas les étudiants à ces éléments, mais à la manière dont les outils numériques peuvent y être intégrés. En particulier, si l’on regarde la colonne centrale de cette figure 3, c’est l’agrémentation par les outils numériques des étapes comprises entre « plan de la séquence » et « évaluation formative ou sommative » (incluses) qui est investie. On retrouve par exemple des étudiants recourant au logiciel LearningApps pour concevoir une phase d’évaluation formative et d’autres qui utilisent un logiciel d’image interactive comme documents pour les élèves. De manière synthétique, on peut ainsi constater que la formation dispensée par les deux formateurs s’inscrit dans une logique de formation à la didactique générale (les sujets des séquences sont libres, de même que le choix des compétences à exercer), en complément à certains pré-acquis développés dans d’autres cours, notamment en conception de séquences d’enseignement.
52En matière de comparaison, on constate que Mathieu donne une importance particulière aux éléments de la troisième colonne : il met l’accent sur la capacité des étudiants à concevoir une séquence tenant compte de manière réaliste des caractéristiques contextuelles, notamment matérielles (câblage, etc.). En ce sens, il ne se limite pas à des questions pédagogiques, mais se rapprochent d’une logique plus holistique (Karsenti et al., 2002), en incitant à anticiper les caractéristiques matérielles des situations. La précédente étude (Rappe et Laduron, 2022) montrait d’ailleurs que Mathieu consacrait, dans la première partie du cours donnée l’année précédente aux mêmes étudiants, une part importante de son temps à une formation à la maitrise technique, tant hardware que software. Bien qu’en n’en investissant qu’un aspect spécifique, cette logique holistique semble caractériser l’approche de ce formateur. De son côté, Valérie concentre son enseignement sur la partie centrale du schéma et en particulier sur le bien-fondé explicite, pour les étudiants, des choix posés. Ce bien-fondé est argumenté en référence à des modèles ou des concepts théoriques. Elle rejoint en ce sens une des recommandations de Béziat (2012).
53Notons qu’il s’agit bien ici de différences de priorités : notre étude précédente montrait que tant Mathieu que Valérie jugeaient important d’utiliser le numérique pour ce qu’il apporte de plus à la méthodologie de l’enseignant. Tous deux considéraient par ailleurs comme nécessaire le fait d’être capable de concevoir des activités réalistes et raisonnablement anticipée. Cependant, des choix de priorité étaient posés par les formateurs, notamment en raison du temps de formation qui était accordé à leurs cours (Rappe et Laduron, 2022). De même pour la présente étude, si Mathieu met par exemple l’accent sur la production de fiches transférables dans la pratique, Valérie vise également à ce que les productions des étudiants soient réutilisables par la suite.
54La seconde question à laquelle cette étude devait répondre consistait à identifier ce qui guide ces actions de formation. D’abord, on peut constater que les invariants opératoires des deux formateurs relèvent de conceptualisations soit relatives au métier d’enseignant (ingénieur, praticien, etc.), dont certains sont spécifiquement liés à l’intégration du numérique (plus-value, élève utilisateur), soit relatives à l’étudiant en tant que formé (motivation, co-enrichissement, collaboration). Cette présence différente du numérique dans leurs conceptualisations opératives semble traduire des visions du numérique également différentes : pour l’un (Mathieu), le numérique est un moyen d’enseigner, la question centrale étant qu’il amène à atteindre les objectifs d’apprentissage visés, tandis que pour l’autre (Valérie), le recourt aux outils numériques doit s’accompagner d’un impératif d’innovation et d’amélioration de l’enseignement. En d’autres termes, de plus-value pédagogique. Pourquoi cet impératif? Les propos de Valérie sont éclairants : « Moi, je pense que [la substitution] est une porte d’entrée […] sans doute qu’on a tous commencé comme ça. Mais ce qu’il serait bien quand même, pour développer les compétences numériques des jeunes et les compétences numériques du prof, c’est qu’on essaie d’aller au-delà. Mais pour ça il faut faire de la veille, il faut avoir le temps, il faut tester des choses. Il faut être audacieux parce qu’il faut pouvoir avoir une posture aussi, on est face à des élèves, ça fonctionne pas, qu’on se plante. Enfin, il y a des tas de conditions à réunir. »
55Le recours au numérique, chez Valérie, est ainsi associé à une logique de développement professionnel, là où chez Mathieu, c’est l’usage réaliste des outils qui est la priorité : exploitation pertinente de l’outil, anticipation des difficultés techniques, etc. Cette logique de développement présente chez Valérie fait écho à certains apports de la littérature scientifique, notamment Duret et Romero (2022), pour qui organiser des moments de scénarisation pédagogique intégrant le numérique dans la formation des enseignants peut être propice au développement professionnel de ces derniers, à la transformation de l’activité d’enseignement-apprentissage elle-même et au développement du regard porté sur l’usage éducatif du numérique. D’une certaine manière, on peut considérer que, chez Mathieu, l’accent est mis sur la dimension productive du métier d’enseignant (faire efficacement apprendre), là où chez Valérie, un accent spécifique est mis sur sa dimension constructive (Samurçay et Rabardel, 2004), à savoir le développement que l’activité produit en retour sur les compétences du sujet.
56Cette logique productive/constructive semble également se retrouver dans un autre aspect de l’activité : la distinction entre le praticien et l’ingénieur éclairé. Cette opposition se fait notamment jour dans la manière dont la fin du dispositif est organisée. Chez Mathieu, il s’agit pour les étudiants de jouer leur séquence, de simuler une activité réelle, de montrer qu’ils ont anticipé les difficultés en prenant la posture d’un enseignant, quitte à les interrompre si la posture d’étudiant expliquant sa production refait surface. On retrouve cet accent mis sur la dimension productive du métier. À l’inverse, chez Valérie, l’important n’est pas de jouer les usages prévus, bien qu’ils doivent être réalistes et raisonnables, mais de les justifier, d’argumenter sur le fait qu’ils ont un intérêt. Les étudiants doivent être éclairés sur cette question et nous pouvons faire l’hypothèse que cela rejoint l’idée de développement et la dimension constructive de l’activité d’enseignement. Mais, à nouveau, des aspects productifs du métier sont également envisagés chez Valérie. Elle montre notamment aux étudiants que pouvoir défendre une séquence d’enseignement est également directement associé aux besoins du métier : en réunion de parents, face à la direction de l’établissement, en entretien d’embauche, etc.
57C’est ici qu’apparaît le lien entre nos deux questions de recherche : les différences de conceptualisations sont associées à des différences de formations, qui sont potentiellement plus significatives qu’elles en ont l’air. Ainsi mettre en perspective les conceptualisations et les actions menées aide à caractériser la formation fournie par l’un et l’autre. Dans le cas de Mathieu, l’accent est mis sur l’action efficace et réaliste, en s’approchant au plus près de la réalité du métier. La logique est celle de la compétence des enseignants, en tant que savoir-agir, articulant diverses ressources, en situation complexe (Beckers, 2005; Biémar et al., 2011; Crahay, 2006; Lévy, 2000; Tardif, 2017). Dans le cas de Valérie, l’accent est principalement mis ce que les outils numériques peuvent apporter en matière d’efficience et d’innovation à la méthode d’enseignement, ainsi que sur une réflexion explicite quant aux savoirs qui y président. La perspective est celle de la « professionnalité » des enseignants, pour reprendre les mots de Uwamariya et Mukamurera. Les autrices définissent en effet la professionnalité des enseignants comme la construction des compétences nécessaires à l’exercice du métier et la rationalisation des savoirs essentiels à la pratique et à son développement (Uwamariya et Mukamurera, 2005). Cette seconde idée de rationalisation nous semble apparente dans le schème de Valérie, notamment dans ce concept d’ingénieur éclairé.
7. Limites méthodologiques
58Nous relevons deux limites méthodologiques à notre étude. La première est que nous n’avons malheureusement pu confronter l’analyse de l’activité de chaque formateur à leurs propres représentations. Or, cette démarche permet de donner du poids aux analyses et de les approfondir (Lejeune, 2019).
59Ensuite, en référence au cadre d’analyse de la conceptualisation dans l’action, un aspect sans doute trop peu investigué est celui de la définition des classes de situation chez le sujet. Un schème existe nécessairement en référence à la (aux) classe(s) de situations dans lesquelles il permet d’agir (Pastré, 2011; Pastré et al., 2006; Vergnaud, 1996). Pour cette étude, nous avons fait le postulat que le dispositif de chaque formateur, étant court et mobilisant principalement une méthodologie de formation (l’accompagnement et la collaboration dans la construction d’usages pédagogiques des outils numériques dans des séquences d’enseignement), les différentes situations observées présentaient des similitudes suffisantes dans leurs caractéristiques. Toutefois, cette similitude n’a pas été remise en question et il n'est pas exclu qu’introduire activement la notion de classe de situations dans les analyses aurait donner des résultats complémentaires.
7. Conclusions : quel apport de cette étude pour penser la formation initiale?
60Bien que traduisant plutôt des priorités que des exclusivités, les conceptualisations qui guident deux formateurs de futurs enseignants en technopédagogie traduisent des différences dans les actions de formation qu’ils proposent. Si certes on constate des similitudes fortes sur le plan des contenus et de la méthodologie, un regard porté à un niveau de granularité différent, grâce à l’analyse de l’activité, montre des orientations différentes dans la formation dispensée. Or, à la suite de Bru, Altet et Blanchard-Laville, on peut postuler que des différences de pratiques en apparence minimes peuvent engendrer des différences d’apprentissage conséquentes (Bru et al., 2004). Ceci soulève un certain nombre de questions pour les politiques de formation initiale des enseignants en matière de numérique : sur quelles thématiques veut-on former les futurs enseignants? Ou plutôt, à quels aspects veut-on donner une priorité dans un système de formation où les ressources, temporelles notamment, sont limitées? Veut-on développer la professionnalité des futurs enseignants, en donnant la part belle tant aux compétences éducatives numériques qu’à la rationalisation des savoirs y afférant? Ou veut-on tourner la majorité des ressources vers la compétence et l’action efficiente? De même, le formateur, l’équipe éducative et/ou l’institution ont à se positionner quant à la formation pédagogique numérique, notamment quant à savoir s’il faut l’orienter, comme nos deux participants, vers la formation à la conception pédagogique.
61Quoi qu’il en soit, il ressort, d’abord, que la mise en œuvre de ces choix, à la fois dans le dispositif global que dans sa gestion fine par le formateur, implique que les formateurs développent des conceptualisations-en-acte en ce sens. Le schème est une totalité dynamique fonctionnelle (Vergnaud, 1996). Si l’on adhère à ce point de vue, cela signifie que l’action d’un formateur ne se limite pas aux gestes posés, mais implique ce qu’il pense et ce qui le guide sans parfois qu’il ne s’en rende compte ; la manière dont il agit dans la situation, mais aussi les informations qu’il y prélève et les représentations qu’il s’en fait ; le dispositif général qu’il met en place, mais aussi les caractéristiques spécifiques des tâches qu’il propose aux étudiants. Tout ceci fonctionne de manière articulée avec, en son centre, les quelques invariants conceptuels que le formateur aura élaborés. Si l’on veut développer la formation initiale des enseignants en matière de numérique, n’avons-nous pas là une piste intéressante?
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Documents annexes
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Annexe 1 (application/pdf – 503k)
-
Annexe 2 (application/pdf – 361k)
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Annexe 3 (application/pdf – 404k)
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Annexe 4 (application/pdf – 301k)
Notes
1 Les deux réseaux ainsi construits sont disponibles en annexe. Au vu de leur taille, une capture d’écran de leur intégralité est peu lisible. Nous avons donc placé en annexe également, pour chaque réseau complet, un zoom sur une de ses portions afin d’en donner un exemple lisible.
Haut de pageTable des illustrations
Titre | Figure 1. Noyau commun aux dispositifs didactiques des deux formateurs |
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URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ripes/docannexe/image/5382/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 56k |
Titre | Figure 2. Extraits des schèmes de Mathieu et Valérie |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ripes/docannexe/image/5382/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 403k |
Titre | Figure 3. Modèle de conception d'une séquence de cours (Fiévez et Castel, 2012, cité par Fiévez, 2017) |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ripes/docannexe/image/5382/img-3.png |
Fichier | image/png, 157k |
Pour citer cet article
Référence électronique
Jonathan Rappe et Aurélien Fiévez, « Former au numérique éducatif : les conceptualisations des formateurs », Revue internationale de pédagogie de l’enseignement supérieur [En ligne], 40(1) | 2024, mis en ligne le 13 mars 2024, consulté le 09 octobre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ripes/5382 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/ripes.5382
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