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Les conseillers pédagogiques de l’enseignement supérieur entre unité et variété : étude clinique

Jean-Pierre Bourgade

Résumés

Dans une approche clinique, instrumentée par la théorie anthropologique du didactique, nous étudions l’appropriation différenciée d’un outil d’analyse des enseignements par les membres d’un réseau de conseillers pédagogiques (CP) de l’enseignement supérieur1. Nous construisons un modèle praxéologique de référence de cet outil, au moyen duquel nous analysons certaines de ses mises en œuvre « non conformes ». L’analyse permet de supposer que l’existence d’intérêts divergents des différents conseillers pédagogiques, liés à des positions institutionnelles différentes, est l’un des facteurs explicatifs de l’apparition de différences dans l’appropriation de l’outil d’analyse. Ceci illustre le fait que la construction de la profession de CP est certainement liée à la production d’un intérêt spécifique de CP.

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Texte intégral

1. Introduction

1La pédagogie universitaire connaît depuis une vingtaine d’années un développement rapide (voir par exemple De Ketele (2010) et le dossier qu’ouvre cet article) que l’on peut notamment relier (parmi d’autres signes) à l’émergence du métier de conseiller pédagogique (CP) (Daele et Sylvestre, 2016 ; Frenay et Paquay, 2011 ; Green et Little, 2016 ; Rege Colet, 2006). Si la position de conseiller pédagogique est déjà ancienne dans certains pays (Québec, Suisse, Belgique notamment), elle est plus récente en France et, en particulier, dans la région Midi-Pyrénées où elle a fait son apparition en 2014. Cette situation particulière autorise une observation in vivo des difficultés que l’on peut rencontrer dans une profession que l’on pourrait qualifier d’émergente par comparaison avec d’autres professions plus anciennes, comme celle d’enseignant-chercheur. Une quinzaine de CP, venus d’horizons et de positions institutionnelles divers, ont pris en charge certains types de tâches professionnelles pour lesquels ils ont été formés par des CP exerçant dans une école d’ingénieurs de Grenoble. La réalisation de ces types de tâches est souvent source de difficultés et de tensions pour ces CP : il leur est parfois difficile de bien identifier ces difficultés et plus encore leur origine. Par ailleurs, la diversité des CP du point de vue de leur formation et de leur parcours antérieur est un fait connu à l’échelle française (Chaliès, Chênerie, Martin, Talbot et Tricot, 2010 ; Cosnefroy, 2015). On se propose ici d’étudier cette variété sous plusieurs aspects : sont étudiées la variété dans les pratiques (praxis), la variété dans les discours sur la pratique (logos), et notamment la variété d’intérêts qui explique peut-être en partie les deux premières. Dans une perspective clinique, on cherche à clarifier les relations qui peuvent se faire jour entre ces trois types de variété, en s’appuyant sur l’observation du réseau toulousain de CP (réseau Grappe). Pour la réalisation d’un même type de tâches (réaliser une analyse approfondie d’un enseignement), on observe une variété dans la mise en œuvre d’une technique par différents CP pourtant formés ensemble à cette technique. Notre question est donc la suivante : comment décrire et expliquer ces différences ?

2Nous tâchons d’abord de présenter le cadre conceptuel afin de formuler le plus précisément possible notre question de recherche et les enjeux qui s’y rattachent. Par la suite, nous indiquons quelques éléments de méthode liés à notre travail de recherche. En particulier, nous présentons la population observée, les conditions de son observation, et nous produisons une analyse détaillée, au moyen d’outils issus de la didactique, d’une pratique particulière, l’analyse approfondie d’enseignements, que nous utilisons comme un révélateur de différentes variétés : la présentation de la praxis et du logos officiels (tels qu’on peut les déduire notamment de l’étude d’un article qui présente l’analyse approfondie) permet en retour d’observer des praxis et des logos qui s’éloignent de ce rapport officiel à l’analyse approfondie. Ainsi, l’étude clinique d’une mise en œuvre particulière, non conforme, de l’analyse approfondie d’enseignements nous donne l’occasion de prendre la mesure de la variété de praxis ainsi que de logos relativement à ce point précis et d’essayer de la relier à la variété des intérêts des CP observés. La construction d’un intérêt spécifique du CP apparaît peut-être alors comme une condition facilitante – et dans le même temps, un indice – de la construction de la profession de CP.

2. La variété des CP et son étude

3Les différences constatées dans la pratique des CP peuvent-elles s’expliquer par des croyances différentes, des théories différentes, ou par des pratiques antérieures différentes ? La formation initiale suffit-elle à faire évoluer les croyances et les pratiques ? A-t-on un moyen de s’assurer que les évolutions observées sont « pour le mieux » et d’évaluer ce que serait ce mieux (intérêt des enseignants, des étudiants, des entreprises, etc.) ? Autant de questions qui trouvent leur origine dans la variété des profils des CP, et qui se posent à peu près dans les mêmes termes à l’échelle nationale de la profession, en France.

4Les CP français ont en effet des statuts très différents (Chaliès et al., 2010 ; Cosnefroy, 2015). Par exemple, des différences importantes dans l’investissement dans le rôle de CP ont été observées par Cosnefroy (2015) selon que l’on est à l’origine enseignant-chercheur – cette position est associée à un investissement fort, mais au vécu d’une faible légitimité relativement aux savoirs relevant des sciences de l’éducation – ou ingénieur en techniques de formation – l’investissement est alors plus faible dans la mesure où la position de CP est vécue comme une casquette (parmi d’autres) de plus ; la légitimité technique est plus forte mais beaucoup de CP ingénieurs pédagogiques évoquent leur difficulté à travailler avec les enseignants sur des questions où ils se vivent comme moins légitimes que ne le serait un CP enseignant (en particulier autour du vécu de l’enseignement et des questions liées au contenu disciplinaire). Pour leur part, Chaliès et al. (2010) pointent des différences dans les pratiques : les CP ingénieurs en techniques de formation (CP-ITF) organisent leur action autour d’un certain nombre de types de tâches bien identifiés alors que les CP enseignants-chercheurs (CP-EC), surtout lors de leur prise de fonction, ont une pratique relativement modeste et plutôt centrée sur la mise en œuvre d’entretiens avec des enseignants.

5Cette variété appelle une remarque sur la formation même des CP : « former le plus grand nombre d’enseignants et d’enseignants-chercheurs à la pédagogie implique de disposer d’un vivier de formateurs qualifiés pour les former. Cela signifie-t-il qu’il faille développer des formations spécifiques de conseillers pédagogiques pour produire un nombre suffisant de professionnels formés de façon homogène en fonction d’un profil de sortie faisant consensus ? » (Cosnefroy, 2015, p. 56). Retenons l’idée de « formés de façon homogène ». Cosnefroy (2015) avance également que les CP ne manifestent que peu d’interrogations spontanées sur la question de leur formation, ce qui pourrait selon lui « signifier que les modes de professionnalisation vécus par ces personnes ont été jugés satisfaisants » (p. 56). La situation des CP toulousains est intéressante à cet égard en ce qu’elle comporte un élément d’homogénéisation puisqu’ils ont tous été formés à une technique particulière d’analyse des enseignements. Comme l’ont souvent mentionné certains CP toulousains lors d’entretiens formels ou informels, l’analyse approfondie des enseignements (AA) est « ce qu’on a en commun ». Du point de vue de l’étude des variétés des formes d’engagement dans le métier de CP, il est intéressant de disposer d’un point commun qui puisse servir de pierre de touche. Que les pratiques des CP pour les technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (CP TICE) et des CP généralistes (Chaliès et al., 2010) diffèrent est assez prévisible, les tâches qu’on leur confie, ou qu’ils s’autorisent à réaliser, n’étant probablement pas les mêmes – à moins que tous les CP soient conduits à mettre en œuvre un même type de tâches.

6Une telle situation permet d’étudier dans quelle mesure la variété des CP est contingente, liée à l’inexistence d’un référentiel précis du métier (Chaliès et al., 2010 ; Cosnefroy, 2015), ou si une variété plus essentielle continue de s’exprimer dans la mise en œuvre même d’un type de tâches défini de façon précise et dont la réalisation est cadrée explicitement par un discours développé en formation initiale. C’est l’objet de ce travail d’exposer un exemple de divergence dans la mise en œuvre d’un tel type de tâches commun, et d’étudier les liens qui peuvent se faire entre ces différences dans la praxis et les variétés que l’on peut observer par ailleurs dans les logos, et en particulier dans les intérêts manifestés par les CP concernés.

3. La théorie anthropologique du didactique et modèle praxéologique

7La théorie anthropologique du didactique (TAD, voir par exemple Chevallard (2007) pour une synthèse) propose une théorie praxéologique qui se veut aussi un outil d’analyse des pratiques et des savoirs sur la pratique (Chevallard, 2002). On y considère que toute action humaine engage in fine la réalisation d’un certain type de tâches au moyen d’une technique (les deux formant une praxis) ; cette technique peut être justifiée, expliquée, produite, au moyen d’un discours, la technologie de cette technique ; cette technologie peut, à son tour être justifiée, expliquée et produite par une théorie. Technologie et théorie forment le logos et une praxéologie est alors une praxis assortie de son logos. Le logos, s’il peut être parfois apparenté à un contenu théorique (au sens usuel du terme, qui diffère quelque peu du sens précis que l’on donne au mot théorie en TAD ; voir sur ce point Chevallard, Bosch et Kim, 2015), peut à l’inverse être très réduit, comme on l’observera s’agissant d’une praxis telle que « se moucher », pour laquelle la plupart des êtres humains seraient en peine de donner une justification très fournie de la technique qu’ils mettent en œuvre. En outre, même si en quelque institution existe un logos riche relativement à telle ou telle praxis, une autre institution peut ne disposer que d’un logos évanescent quant à cette praxis, avec des effets prévisibles sur la mise en œuvre de la technique notamment (que l’on compare par exemple à celui d’un élève apprenti cuisinier le logos d’un chef étoilé concernant la tâche « préparer un œuf poché »). Interroger quelqu’un sur sa pratique, le conduire à expliciter les raisons de sa praxis, c’est un moyen d’accéder au logos dont il l’assortit : mélange entre des éléments institutionnels et des éléments plus personnels ; ce logos doit permettre, en retour, de comprendre les particularités de la mise en œuvre de sa praxis. Par la suite, on gardera présent à l’esprit que des différences dans le logos peuvent induire des praxis distinctes, ce qui découle notamment du fait que le logos est aussi un instrument de production de techniques.

8Dans l’approche clinique que nous adoptons, nous construisons dans un premier temps un modèle praxéologique de référence de l’analyse approfondie, c’est-à-dire un modèle de la praxéologie requise pour réaliser une analyse approfondie (praxis et logos). Un tel modèle permet dans un deuxième temps d’analyser les pratiques effectivement observées, ainsi que les discours produits pour les justifier.

9Dans la justification d’une praxis donnée, des intérêts particuliers peuvent jouer le rôle de facteurs explicatifs : certaines raisons avancées par les sujets interrogés ne valent que dans un régime axiologique de justification. Telle prise de position favorable aux étudiants (au détriment par exemple des enseignants) ne vaut que dans un régime où l’intérêt primordial est celui qu’on porte aux étudiants, etc. La mise en œuvre d’une praxis donnée est donc soumise à l’existence et la forme d’un logos particulier dont la spécificité repose parfois sur des formes d’intérêts elles-aussi spécifiques de la position de celui qui produit ce logos. Dans une institution comme l’enseignement supérieur, où une pluralité d’intérêts peut être invoquée (intérêt pour l’institution académique elle-même, pour les enseignants, pour les entreprises qui contribuent à son financement, pour les étudiants, etc.), la production d’un logos commun (et donc d’une praxis commune) aux CP nécessite peut-être qu’un intérêt commun soit dégagé et permette de dépasser la variété des positions occupées par ailleurs par les différents CP. C’est cette hypothèse que nous explorons ici, en tentant d’éclairer par la variété de leurs intérêts, la variété des prises de position des CP sur des questions pratiques liées à l’AA.

4. Le réseau GRAPPE et son étude

10En septembre 2014, dans le cadre d’une Initiative d’excellence en formations innovantes (IDEFI DEFI Diversités) portée par l’INP de Toulouse, l’INSA de Toulouse, l’ISAE - SUPAERO et l’école des Mines d’Albi Carmaux, une quinzaine de personnels se sont vu confier une mission de CP qui consiste, selon la présentation qui en est faite sur le site Internet de l’IDEFI (Université fédérale Toulouse Midi-Pyrénées, 2016), à « accompagner les enseignants et les enseignants-chercheurs dans leurs pratiques pédagogiques ». Ces « accompagnements personnalisés s’adressent à un enseignant ou à une équipe pédagogique qui souhaite faire évoluer ses pratiques pédagogiques ou/et qui souhaite évaluer l’efficacité d’un dispositif pédagogique » et sont « réalisés sur simple demande de l’enseignant ou de l’équipe pédagogique » et restent « strictement confidentiels ».

11Les CP travaillent en réseau dans le cadre du projet IDEFI DEFI Diversités. Issus de positions institutionnelles très diverses (certains sont ingénieurs en techniques de formation, d’autres sont psychopédagogues, d’autres encore sont enseignants-chercheurs) et disposant de moyens très différents pour assumer leur mission : les enseignants-chercheurs ont une décharge de 64 heures par an, les personnels non enseignants n’ont pas de reconnaissance particulière pour cette tâche supplémentaire. Les CP bénéficient d’une formation initiale commune conçue et mise en œuvre par des CP du réseau PENSERA (Pédagogie de l’enseignement supérieur en Rhône-Alpes). Rapidement, suivant les conseils des CP de PENSERA, l’équipe toulousaine se constitue en réseau, prenant plus tard le nom de GRAPPE (groupe d’appui à la pédagogie). La vie du réseau repose principalement sur des réunions mensuelles (les journées GRAPPE, où tous les CP sont tenus d’assister) dont l’ordre du jour est variable et objet de discussions récurrentes : la construction d’un modus operandi n’est pas évidente, les besoins des uns et des autres peinant à s’articuler simplement. Bien vite, il apparaît que, parmi les types de tâches des CP, il en est un, l’AA, qui permet de créer une identité commune, par-delà les différences de statut, de formation antérieure, de parcours académique, d’institution de rattachement, d’âge, de sexe, etc.

12Le recueil d’informations s’est fait par plusieurs canaux : des entretiens semi-directifs d’une à trois heures ont été menés avec une dizaine de CP, des CP ont été observés dans le cadre de la mise en œuvre d’analyses approfondies, des journées GRAPPE ont été observées ; nous avons par ailleurs pu assister à une journée de formation initiale de CP portant sur l’AA. L’enquête s’est également enrichie par l’étude de documents produits par des CP du réseau PENSERA, en lien avec l’AA, en particulier un texte de Pigeonnat (2015).

13Pour ce qui concerne les entretiens, la question initiale était toujours la même : « Pouvez-vous m’expliquer ce qui vous a conduit à accepter la position de CP ? Vous pouvez partir de très loin ! ». Les entretiens étaient par ailleurs menés avec l’intention de conduire les CP à décrire les points saillants de leur praxis et à les expliquer, les justifier, en rendre raison, bref, à expliciter quelques éléments de leur logos relatif à cette praxis – en particulier à propos de cette praxéologie commune qu’est l’AA. Sans être directive, la technique d’entretien consistait à inviter systématiquement les CP à expliciter le logos d’une praxis qui venait d’être évoquée. Concernant le cas particulier de l’AA, nous avons systématiquement demandé aux CP de détailler la technique mise en œuvre lors de la réalisation d’une AA, pour prendre connaissance de la praxéologie effective des CP, par contraste avec la praxéologie « théorique » dont on perçoit les contours dans Pigeonnat (2015) et à travers ce qui est transmis dans la formation initiale des CP.

14Le travail présenté ici s’appuie essentiellement sur des observations de journées GRAPPE, ce qui permet de faire voir les corrections qu’apportent certains CP aux discours de justification d’autres CP concernant l’AA, et des entretiens, notamment avec une CP dont nous analysons la mise en œuvre « non conforme » de l’AA. Enfin, les observations de mises en œuvre de l’AA et d’autres entretiens sont utilisés pour la construction du modèle praxéologique de référence de l’AA.

5. Une étude de cas : les CP et l’analyse approfondie

15L’étude clinique que nous proposons consiste à identifier des mises en œuvre de l’AA qui ne seraient pas « conformes » dans le sens où elles ne correspondraient pas, et ce de façon non accessoire, à la technique d’AA que nous la produisons dans le modèle praxéologique de référence présenté ci-dessous – et, dans un second temps, à relier ces usages non conformes à des éléments de logos des CP concernés. On comprend qu’il soit nécessaire, en premier lieu, de construire un modèle aussi fidèle que possible de ce que serait une mise en œuvre « conforme » de l’AA ; on se heurte alors à une difficulté importante : l’AA est apparue de façon relativement isolée, dans le réseau PENSERA, et n’est utilisée, à notre connaissance, que dans ce réseau (voire dans un sous-réseau limité aux écoles d’ingénieurs de la région grenobloise) et dans le réseau GRAPPE à Toulouse. Par ailleurs, cet outil a fait l’objet de très peu de présentations systématiques publiées, à l’exception de l’article de Pigeonnat (2015), il est donc difficile d’avoir accès à des ressources écrites, même en les demandant aux personnes impliquées dans l’élaboration de l’AA. Enfin, dans le cas du réseau toulousain, le cadrage des fonctions de CP dans l’IDEFI DEFI Diversités ne mentionne pas explicitement l’AA et, a fortiori, n’en donne pas de description systématique. La question de la « conformité » d’une mise en œuvre donnée est rendue difficile par le fait qu’il n’y a donc pas d’étalon précis et explicite auquel mesurer la conformité de telle ou telle mise en œuvre.

16Considérant ce qui précède, nous avons construit un modèle praxéologique de l’AA à partir de sources diverses parmi lesquelles : les informations tirées de Pigeonnat (2015) qui concernent tant la mise en œuvre de l’AA que la justification de certains éléments de la technique ; les entretiens menés avec les CP (en considérant que les points où se recoupaient plusieurs descriptions de l’AA pouvaient être considérés comme relevant d’un rapport « conforme » à l’AA) ; les discussions autour de l’AA qui ont eu lieu lors des journées GRAPPE (certains désaccords ont permis de mettre en relief des attentes de « conformité ») ; l’observation d’une journée de formation à l’AA.

17Une fois que l’on dispose d’un modèle praxéologique de l’AA, on peut étudier certaines mises en œuvre de l’AA non conformes à ce modèle, ce qui permet d’éprouver le modèle. Ainsi, la « non conformité » provient-elle du modèle, ou bien les CP eux-mêmes l’identifient-ils comme une application inadéquate de l’AA ? Dans le cas où un accord assez large se fait pour condamner telle ou telle mise en œuvre de l’AA, il nous paraissait intéresser d’identifier des éléments du logos des CP qui ont pu présider à la construction de techniques non conformes. L’étude d’une telle situation nous a par la suite conduit à examiner l’influence sur leur praxis des divers intérêts identifiés par les CP (intérêts des étudiants, des enseignants, de l’institution, du monde économique).

5.1. Un modèle praxéologique de l’analyse approfondie

  • 2 L’équipement praxéologique d’un sujet d’une institution est l’ensemble des praxéologies dont il dis (...)

18Dans le cadre de la formation initiale des CP, l’AA fait l’objet d’une étude particulièrement attentive. Peut-être parce que son élaboration doit beaucoup aux CP du réseau PENSERA qui pilotent la formation initiale des CP toulousains, l’AA est apparue comme un type de tâches central autour duquel devait s’articuler la professionnalité des CP toulousains, bref, comme le cœur de leur équipement praxéologique2 en construction. Il est ainsi significatif que la seule injonction prononcée dans le cadre de la formation soit relative à la mise en œuvre d’une AA dans l’intervalle de temps qui sépare deux épisodes de formation. De fait, seuls deux CP sur l’ensemble du groupe ne réaliseront pas d’AA dans le temps de la formation ni d’ailleurs après.

19L’AA est le produit d’un contexte français où la question de l’évaluation des enseignants et des enseignants-chercheurs du supérieur s’est posée de façon toujours plus insistante, aboutissant à une forme d’évaluation qui devait porter non sur les enseignants mais sur les enseignements. Nombre d’universités se sont alors dotées d’un outil d’évaluation, le plus souvent quantitatif, fondé par la passation d’un questionnaire auprès des étudiants, suivie de son traitement statistique qui aboutit, selon les institutions, à diverses formes de représentations synthétiques des résultats (araignées, etc.). La mise en œuvre d’une telle évaluation systématique présente, aux yeux de Pigeonnat (2015), deux grands inconvénients : d’une part elle nécessite un investissement très important alors que la plupart des enseignements donnent satisfaction ; d’autre part, la mise à disposition des résultats semi-bruts (dont les commentaires parfois incisifs formulés par les étudiants) peut représenter une forme de violence exercée à l’endroit des enseignants.

20Cette double difficulté a été travaillée par les CP qui ont progressivement construit un outil d’évaluation qui a depuis fait école, repris, par exemple, à l’INSA de Toulouse et à l’École des Mines d’Albi. Il s’agit d’une première évaluation dite « détecteur de fumée » qui consiste en la passation d’un questionnaire volontairement limité à une question sur la satisfaction globale des étudiants ; si cette évaluation est positive, rien de particulier ne s’ensuit, mais si elle donne à voir un taux significativement élevé d’insatisfaction, la direction des études propose aux enseignants concernés de se rapprocher des CP pour bénéficier d’une AA de leur enseignement.

21Cette analyse « approfondie » se réalise alors suivant un certain nombre d’étapes. On notera 1, 2, etc. les différentes étapes de la technique mise en œuvre pour réaliser une AA ; la lettre grecque désigne traditionnellement en TAD la composante de la technique dans une praxéologie donnée. Pigeonnat (2015) décrit succinctement la mise en œuvre de l’AA comme suit : « [On peut] mettre en place une offre d’analyse approfondie des enseignements qui se déroule de la façon suivante :

  • un enseignant (ou une équipe enseignante) qui souhaite améliorer son enseignement rencontre un conseiller et, à cette occasion, un questionnaire adapté à la situation pédagogique est mis en place ;

  • le conseiller vient, lors d’une séance de cours, distribuer le questionnaire aux étudiants tout en leur garantissant l’anonymat de leurs réponses ;

  • une fois les réponses saisies, le conseiller revoit l’enseignant, lui fait partager son analyse de la situation et, le cas échéant, lui propose des pistes d’amélioration ;

  • l’enseignant fait un retour aux étudiants, de manière à ce que ces derniers comprennent que leurs avis ont été pris en compte. » (p. 4)

22De façon plus détaillée, on peut décrire l’AA de la façon suivante :

231 : Une équipe pédagogique (qui peut se réduire à un enseignant) fait appel au CP en vue de faire évoluer un enseignement dont elle a la charge. Un entretien préalable est réalisé avec l’équipe pédagogique, afin de mieux établir les contours de la demande. À ce stade, l’équipe est volontaire et donc présumée porteuse d’une demande, par exemple, l’amélioration de la satisfaction des étudiants ? », la mise en activité ou en action des étudiants. Une fois la demande éclaircie, le CP présente le cadre de l’analyse : bienveillance, anonymat garanti, possibilité de retrait de tout membre de l’équipe pédagogique, obligation de retour aux étudiants après l’analyse. Lors de cet entretien, il s’agit aussi pour le CP de recueillir le « ressenti » de l’équipe enseignante.

24Le CP présente ensuite un questionnaire (voir les figues 1 et 2 ci-dessous) qui sera soumis aux étudiants dans un deuxième temps : l’équipe peut émettre des souhaits de reformulation marginale (par exemple, supprimer une question sur les travaux pratique si l’enseignement n’en comporte pas). Dans le réseau GRAPPE, cet entretien, ainsi que la suite de la mise en œuvre de l’AA, sont parfois réalisés par des binômes de CP. Notons que c’est une modification apportée au format de l’AA tel qu’il est adopté dans le réseau PENSERA, où les CP interviennent seuls.

Figure 1 : extrait de la partie fermée du questionnaire d’AA

Figure 1 : extrait de la partie fermée du questionnaire d’AA

Figure 2 : questionnaire d’AA, les questions ouvertes

Figure 2 : questionnaire d’AA, les questions ouvertes

252 : Le questionnaire est ensuite soumis aux étudiants à l’issue de séances de cours, par le CP lui-même qui prend soin de préciser les raisons de cette passation. La passation dure environ dix minutes.

263 : Les questionnaires sont ensuite traités informatiquement. Ainsi, les réponses aux questions ouvertes font l’objet d’une transcription intégrale (voir un exemple en figure 3), les questions fermées sont exploitées statistiquement (voir un exemple en figure 4). Les CP analysent ces données et formulent quelques hypothèses pouvant expliquer l’insatisfaction des étudiants ou de l’équipe pédagogique. L’analyse consiste à se faire une impression globale par l’étude des graphiques produits à l’étape précédente avec des éléments techniques secondaires (un taux d’insatisfaction d’un niveau donné n’a pas la même signification selon l’item qu’il décrit ; le taux d’insatisfaction relatif aux supports de cours est toujours très élevé ; etc.), puis à étayer ce « ressenti » à partir des commentaires libres des étudiants.

Figure 3 : Commentaires libres des étudiants

Figure 3 : Commentaires libres des étudiants

Figure 4 : extrait de la synthèse des questions

Figure 4 : extrait de la synthèse des questions

274 : À la suite de ce travail, l’équipe pédagogique est invitée à un entretien de restitution où sont « restitués » les résultats de l’analyse. C’est aussi le moment d’une reprise de l’étude de la demande initiale, qui peut conduire à une reformulation de cette demande si l’analyse a fait émerger des éléments insoupçonnés de l’équipe pédagogique. L’entretien donne aussi l’occasion au CP de formuler des suggestions, des avis, des conseils à l’intention de l’équipe pédagogique et peut également proposer un suivi, un « accompagnement » à moyen terme (qui se traduit généralement, lorsqu’il a lieu, par la réalisation d’une nouvelle AA du même enseignement l’année suivante). La formulation d’avis, de conseils est le plus souvent indirecte, « coconstruite » : le CP organise la discussion de sorte que l’équipe pédagogique soit en mesure de formuler elle-même certaines pistes d’amélioration.

28Finalement, l’AA se conclut par la production d’un écrit de synthèse de quelques pages (quatre ou cinq, en dehors de la retranscription des commentaires des étudiants), fruit d’une co-construction des CP et de l’équipe pédagogique (reprise des conseils « coconstruits » et des nuances apportées par l’équipe pédagogique par exemple), fondée sur l’analyse menée par les CP.

29Au-delà de cette description de la praxis, on peut d’ores et déjà mentionner quelques éléments de logos. Insistons au préalable sur le fait qu’il s’agit du logos des CP, et non de justifications que l’on pourrait produire par ailleurs, c’est-à-dire depuis une autre position, par exemple celle de chercheur didacticien, à propos de cette praxis. En outre, l’hétérogénéité des parcours, des formations, des statuts des différents CP conduit à la production de justifications qui, nous le verrons, peuvent être divergentes. Le logos indiqué ici, bien que reconstruit en partie à travers l’étude des rapports personnels des CP à l’analyse approfondie, se veut conforme à un hypothétique rapport institutionnel à l’AA. Cela conduit bien évidemment à ne pas inclure dans cette reconstruction du logos les éléments qui font l’objet de divergences claires entre CP ou semblent particulièrement idiosyncratiques. Parallèlement, l’ensemble de la reconstruction s’appuie sur des éléments de logos (que nous noterons , suivant les notations traditionnelles en TAD où la lettre grecque désigne la technologie d’une praxis donnée) produits par les CP concepteurs de l’AA : la référence (Pigeonnat, 2015) est alors prise comme explicitant partiellement le rapport institutionnel attendu à l’AA. Enfin, nous ne proposons ici que les seuls éléments de logos nécessaires à la compréhension de l’étude que nous développerons dans les sections suivantes : la justification complète de la technique nécessiterait de plus amples développements.

30 : L’AA doit être sollicitée par l’équipe enseignante, on ne saurait la lui imposer parce que c’est une condition de possibilité de l’analyse. Cela permet aussi de dissocier la position de CP de celle de l’instance évaluatrice des enseignements. L’équipe s’engage à faire un retour auprès des étudiants parce que c’est la condition pour que les étudiants acceptent de remplir le questionnaire et le fassent de façon sérieuse. Il convient aussi de « repréciser au début de l’entretien que le CP ne doit rien au responsable de filière » (CP-EC, journée GRAPPE) – c’est une condition pour que l’équipe pédagogique puisse participer sereinement à l’AA ; certains CP vont jusqu’à signer une charte de confidentialité. Par ailleurs, si « on lui dit que c’est sa [celle de l’enseignant] propriété [le résultat de l’AA] », il ne faut pas oublier que « c’est sa responsabilité de communiquer aux étudiants le résultat » (CP-EC, journée GRAPPE). Voici comment Pigeonnat (2015) justifie cet élément technique : « L’articulation entre l’analyse approfondie à la demande et l’évaluation indicative systématique est la suivante : l’institution, qui porte la politique visant à l’amélioration des enseignements, incite mais n’oblige pas (les enseignants étant seuls responsables de leurs enseignements, ils sont libres des moyens qu’ils choisissent pour diagnostiquer les éventuels problèmes rencontrés et y remédier) les responsables d’enseignements qui ont déclenché le détecteur de fumée à demander une analyse approfondie de leur situation pédagogique. Et ces derniers le feront d’autant plus volontiers et dans un état d’esprit d’autant plus constructif que le conseiller pédagogique est tenu de respecter une clause de confidentialité lui interdisant de communiquer les résultats à l’institution. » (p. 6).

31Avant d’aller plus avant dans la description du logos, précisons que dans les AA qui ont été observées, mais aussi dans les « travaux pratiques » (jeux de rôles, etc.) réalisés par les CP de GRAPPE (dans le cadre de leur formation continue, ou bien lors de journées GRAPPE), le temps consacré à l’étude et l’analyse des informations recueillies à l’aide du questionnaire est très faible (une dizaine de minutes environ). Par contre, un temps plus important est consacré à la préparation de l’entretien de restitution ; cette préparation s’organise autour de quelques questions clef qui reviennent systématiquement : doit-on supprimer quelques commentaires désobligeants (et non pertinents) d’étudiants ? Doit-on commencer par évoquer les points positifs, ou bien les points négatifs ? Quelles pistes va-t-on proposer à l’équipe pédagogique, ou plutôt, dans quelle direction souhaite-t-on les conduire à s’engager ? L’analyse proprement dite est vécue comme non problématique alors que la préparation de l’entretien est beaucoup plus délicate, selon les CP ; on en trouvera une illustration dans le fait que lors d’une AA réalisée par deux CP, ceux-ci ne se sont pas réunis pour analyser les questionnaires (contrairement à ce nous imaginions) mais pour préparer l’entretien de restitution.

32L’entretien de restitution est préparé à deux. Le souci principal ou la raison d’être principale de cet entretien est d’amener l’équipe pédagogique à évoluer, tout en la préservant. Il s’agit de trouver un juste équilibre, toute suggestion devant être entendue sans avoir été formulée explicitement. Ainsi, la suggestion ne doit pas être une injonction : « poser à l’enseignant [la question] “quels sont tes objectifs, comment tu évalues ?”, c’est pas facile… Il faut arriver à identifier une piste où il puisse se retrouver lui-même » (CP-EC, journée GRAPPE). Et si, d’une part, « Yvan [CP PENSERA, formateur des CP GRAPPE] est très attaché au fait que si c’est pas l’enseignant qui bouge, ça sert à rien » (CP-EC, journée GRAPPE), il faut avoir en tête que dans une grande partie de l’entretien « finalement, on va passer beaucoup plus de temps à le rassurer [l’enseignant]… ». Une question débattue lors de chaque analyse porte sur le choix de présenter à l’équipe pédagogique plutôt les points négatifs en premier (pour finir sur les points positifs) ou bien d’abord les points positifs (pour rassurer l’équipe et la mettre dans de bonnes dispositions pour continuer le travail). Dans certains cas, partir des points positifs ne paraît pas pertinent : « il va pas vraiment t’entendre, les points rouges vont lui sauter aux yeux », néanmoins, il faut aussi « passer beaucoup de temps sur les points positifs » (CP-ITF, journée GRAPPE), par exemple en s’appuyant sur le fait que les étudiants reconnaissent une grande compétence (relative au savoir enseigné) à l’enseignant pour « le rassurer » et l’amener à comprendre qu’il s’agit essentiellement pour lui « d’améliorer sa communication » (CP-EC, journée GRAPPE).

33 : Cette oscillation entre désir de faire bouger l’équipe pédagogique et attention à ne pas brusquer, à ne pas faire violence, peut se fonder sur une idée des enseignants-chercheurs que caricature ainsi une CP : « les enseignants-chercheurs, c’est Dieu. C’est des parcelles de Dieu. D’abord, ils ont fait ce métier parce qu’ils détestent avoir des contraintes et là ils font ce qu’ils veulent… » (CP-ITF, entretien). Certains pensent également que chez les enseignants-chercheurs règne « une vraie confusion entre “mon expérience et / ou mon expertise disciplinaire qui vaut pour une compétence en pédagogie”. […] l’enseignant-chercheur se sent légitime comme enseignant. Y’a aucune analyse réflexive chez mes collègues » (CP-EC, entretien). On y trouve aussi des raisons plus « empathiques » : « le cas de l’enseignant qui est hyper enthousiaste, qui te dit, “je vais te donner à manger parce que j’ai confiance en un CP, mais en fait, moi j’en ai pas tellement besoin”. Puis en fait ce qui en ressort [de l’AA], c’est que c’est hyper brouillon et […] là, pour le coup, y’a des choses qui ressortent, c’est un peu une douche froide pour l’enseignant, quoi » (CP-EC, entretien). Il serait donc important de préserver la susceptibilité (la fragilité) de l’enseignant relativement à sa compétence d’enseignant – alors qu’on ne prend pas les mêmes précautions avec les compétences de chercheur, comme le dit un CP : « Les gens sons schizophrènes : dans la recherche, on passe son temps à être évalué par les experts, etc. » (CP-EC, entretien). Mais préserver l’enseignant se justifie pour d’autres raisons encore : « Il y a enfin un dernier écueil lié au facteur émotionnel : les enseignants vont avoir tendance à se focaliser sur quelques remarques qui vont les toucher (voire les blesser), ce qui peut les conduire à se concentrer sur de faux problèmes et, dans le pire des cas, à rejeter purement et simplement toute la démarche. » (Pigeonnat, 2015, p. 3). Enfin, préserver l’enseignant, c’est aussi se préserver de lui et de son ego (« parcelles de Dieu »). Tout se passe peut-être comme si la « coconstruction » était un moyen de laisser à l’enseignant le sentiment que les solutions viennent de lui et que rien ne lui a été imposé : « Et là, c’est d’eux-mêmes, en discutant les enseignants ont dit “ouais mais, est-ce que finalement” d’eux-mêmes c’est sorti, bon nous on l’avait sous le coude, d’eux-mêmes c’est sorti en disant “mais est-ce qu’on les met pas dans une difficulté de lire ce truc en anglais parce qu’ils ont pas du tout le même niveau en anglais ?…” » [EC, entretien] ; « Nous on a des pistes, après la conduite de l’entretien c’est super chaud, faut repérer les portes ouvertes, savoir où on peut aller, là où il faut battre en retraite et c’est assez difficile » [EC, entretien]. Dans tous les cas, il s’agit donc de ne pas être « prescriptif » : « L’enseignant qui vient, enfin qui va consulter entre guillemets, le mot consulter me plait pas, mais qui va consulter avec un CP, si ce CP est enseignant, enfin un homologue, voilà, y’aura peut-être cette retenue par rapport […] à un collègue, surtout s’il le connaît, s’il fait partie de l’équipe etc. Peut-être moins avec un ingénieur…

  • Pourquoi consulter le mot ne vous plaît pas ?

  • Parce que […] le mot consultation [a] une connotation médicale, et on n’est pas là pour faire de l’ordonnancement quoi. Euh, on prescrit rien nous… voilà, on essaie juste d’écouter, et d’essayer de comprendre […]. » (CP-ITF, entretien)

5.2. Pratiques non conformes, logos lacunaire et intérêts variés

  • 3 Les éléments techniques , 2, etc., et technologiques , 2, sont décrits dans la section 5.1.

34Dans certains cas, la mise en œuvre de AA n’est pas conforme au modèle que nous venons de produire. Une telle déviation s’est présentée lorsqu’une CP-ITF a mené une AA d’un enseignement à la demande de la direction des études de son établissement (en opposition à la technique3 1, justifiée par l’ingrédient technologique 1 puisque l’AA doit être sollicitée par l’équipe enseignante) : « Quand j’en ai parlé aux [autres CP], c’est “ah bon, tu les fais comme ça, mais on avait dit que... ça pose vraiment question…” » (CP-ITF, entretien).

35Lors d’une journée GRAPPE, dans le cadre d’un jeu de rôles, la même CP propose au groupe d’étudier cette AA, qui lui a posé problème. Elle fournit alors des éléments de contexte (filière d’enseignement, etc.) et les résultats obtenus à partir des questionnaires soumis aux étudiants. Les CP se réunissent par groupes de trois ou quatre et analysent ces résultats comme s’ils avaient à préparer l’entretien de restitution. Lors de la mise en commun des analyses, l’un des CP met en avant que « le premier entretien sert à analyser la demande [élément technique ] de l’enseignant, là y’a pas de demande [puisque la demande vient de l’institution]. L’objectif de ton premier entretien, ici, c’est de créer la demande » (CP-Psychopédagogue, journée GRAPPE), à la suite de quoi la CP concède que « c’est vrai qu’ils peuvent difficilement dire non… ».

36Par ailleurs, le même CP qui pointait le caractère problématique de l’origine de la demande met en avant une autre difficulté, engendrée selon lui par la première : « pour te protéger toi, il faut être clair avec l’institution demandeuse, qu’on ne vienne pas te voir ensuite en disant “mais à quoi ça sert les CP si ça change rien ?” » (CP-Psychopédagogue, journée GRAPPE). En effet, pour autant que la demande provienne de l’institution, c’est à l’institution qu’il faut répondre, en l’occurrence en faisant la preuve de l’efficacité de l’accompagnement de l’enseignant. Le cadre de l’AA, au contraire, en imposant une séparation franche entre l’institution (l’employeur) et le CP, déplace la question de la demande et de la réponse (élément technique ). Idéalement, l’institution demande au CP d’accompagner les enseignants qui en font la demande ; les enseignants, quant à eux, soumettent au CP une demande d’accompagnement. À l’institution, le CP doit donc des comptes sur la réalité de son activité d’accompagnement. Ainsi, les CP produisent chaque année un bilan de leur activité qui présente des éléments quantitatifs – nombre d’AA réalisées, etc. – et qualitatifs – types d’actions mis en œuvre, etc. Mais seule l’équipe pédagogique concernée est en droit d’attendre de lui une réponse à la demande d’accompagnement (élément technique 4). En distinguant deux types de demandes, on crée non seulement les conditions de possibilité d’un travail d’analyse et d’accompagnement, mais surtout, on se préserve de la nécessité de rendre des comptes sur l’efficacité de l’accompagnement. En effet, les CP n’ont pas à démontrer l’efficacité de leur action sur telle ou telle équipe, ce que garantit l’anonymat de la démarche d’AA. C’est ce que l’on peut déduire de que « respecter une clause de confidentialité lui interdisant de communiquer les résultats à l’institution » (Pigeonnat, 2015, p. 6) est une condition de possibilité de l’AA et que ceci n’est pas possible si l’institution demande des comptes aux CP sur leurs résultats. De façon plus intéressante, réciproquement, si l’on brise la clause de confidentialité, il devient techniquement possible (même si cela peut paraître illégitime) pour l’institution de demander des comptes aux CP : la clause de confidentialité n’est pas seulement une mesure de protection des enseignants, mais aussi des CP, et c’est ce que mentionne le CP-Psychopédagogue (« pour te protéger toi ») dans l’exemple ci-dessus.

37L’intérêt professionnel des CP est mis en avant dans les interventions du CP-Psychopédagogue lors du jeu de rôles, et on peut légitimement s’interroger sur l’origine de la déviation par rapport à cette norme. Quel logos a pu conduire la CP-ITF à produire une technique déviante ? Lors de l’entretien mené avec elle, avant la journée GRAPPE évoquée précédemment, cette CP a avancé les éléments suivants de justification de sa technique : « Ouais peut-être ça pose question [de relayer la demande de l’institution], mais nous en fait on n’a pas envie qu’y ait des cours qui foirent, et puis les entreprises elles payent, et puis les apprentis, ils peuvent pas redoubler, et donc on veut que ça avance et donc on a mis en place... ». La force de ce discours est de se fonder sur des intérêts liés à des positions clairement identifiées : celle de l’entreprise, celle de l’institution, celle des étudiants (les apprentis). On retrouve chez plusieurs CP du réseau GRAPPE cet ancrage du logos dans la prise en compte d’intérêts divers : « On a eu pas mal de discussions avec mon responsable, qui disait “mais si l’enseignant a envie ?” ; je dis “oui, mais, alors, certes, il a envie, mais…” […] Tous les gens qui travaillent au sein d’une université sont là pour les enseignants ou sont là pour les étudiants, finalement ? Et ma vision, qui ne concerne que moi, c’est de dire que je me considère là pour les étudiants, c’est-à-dire que si je prends une décision, si je fais quelque chose, que ce soit pour un personnel, que ce soit pour un enseignant, ou autre, c’est toujours dans le but que le produit final aille, finalement, aux étudiants, et bénéficie aux étudiants. » (CP-ITF, entretien).

38Sans surprise (peut-être ?), la position de CP-EC donne lieu à un tout autre discours : « L’enseignant il me dit “qu'est-ce que t’en penses ?”, je lui dis “mais à partir du moment où t’as envie de le faire !”, d’accord ? Après, tu y vois un intérêt. Est-ce qu’y a une plus-value pour l’ense... pour euh... pour les étudiants, etc. Je propose deux choses : si t’as envie de le mettre en place, je peux t’accompagner dans la mise en place. Après si tu veux avoir un retour, toi, plus finalisé sur le ressenti des étudiants, c’est une AA du dispositif, de l’enseignement. » (CP-EC, entretien).

39Si dans le premier extrait l’intérêt fondamental est celui des étudiants, dans le second se manifeste une priorité donnée à l’intérêt des enseignants, jusque dans un lapsus (« pour l’ense… pour euh… pour les étudiants ») qui montre bien la subordination à celui-ci de l’intérêt des étudiants.

40Les intérêts différents, liés à des positions différentes (celles d’enseignant, d’étudiant, d’entreprise, d’institution), nourrissent des logos différents qui, à leur tour, engendrent des techniques différentes. Ainsi, le CP-ITF cité ci-dessus cherche à déterminer l’origine de la demande pour la faire évoluer : « je vais essayer de remonter en fait à savoir pourquoi [l’enseignant] aimerait faire ça [des amphis interactifs], finalement de voir un petit peu comment sont ses étudiants, parce que si ça se trouve, en fait, [sa demande] c’est juste une envie d’un enseignant et ça n’apporterait strictement rien finalement aux étudiants, […], et j’essaie de lui apporter d’autres pistes, ou d’autres réflexions que celles qu’il a en tête » (CP-ITF, entretien). Par contre, la CP-EC donne la priorité à l’accompagnement de l’enseignant, suivant le désir de celui-ci avant de poser la question de l’intérêt des étudiants.

41Il est donc probable que, mis dans la même situation que la CP-ITF évoquée au début de cette section, ses collègues n’auraient pas pris la même décision – ce qui ne signifie pas que leur choix n’aurait pas été, lui aussi, différent ce qu’appelle une mise en œuvre « conforme » de l’AA. En effet, dans les trois cas évoqués, les intérêts sont ceux de l’entreprise, de l’institution universitaire, des enseignants ou des étudiants. A aucun moment n’est évoqué l’intérêt spécifique de CP, qui, sans oblitérer les intérêts des autres acteurs, pourrait organiser leur prise en compte de façon à éviter des difficultés engendrées par l’hétéronomie. Dans le cas de la CP-ITF, la difficulté à faire émerger la demande, ou à se préserver de l’institution mandante, se fait jour lorsqu’on privilégie l’intérêt de l’institution à celui de CP. Dans le cas précis évoqué dans cette situation, l’intérêt spécifique de CP le conduit à tenir compte de l’intérêt des enseignants (à travers l’anonymat de la démarche et son caractère volontaire), mais on peut imaginer d’autres situations où l’intérêt de CP le conduirait à privilégier l’intérêt d’autres acteurs. Soulignons que nous parlons ici de l’intérêt de CP, et non du CP : il ne s’agit pas de l’intérêt personnel de tel ou tel CP, mais bien de l’intérêt spécifique de la position de CP dans l’institution considérée. La difficulté à tenir la position de CP réside alors dans la pluralité des intérêts qui se manifestent lorsque le CP est ITF, EC, psychopédagogue, etc., puisque l’intérêt de CP peut le conduire à reléguer au second plan ce qui serait l’intérêt associé à sa position institutionnelle d’origine.

6. Discussion : intérêt spécifique et construction de la profession

42Si l’on cherche à déterminer l’origine du rapport non conforme de la CP-ITF à l’AA, il semble que tout se passe comme si elle se trouvait dans un logos construit autour d’intérêts qui ne se résument pas à l’intérêt de la profession de CP. En effet, on ne saurait se limiter à condamner la prise en compte prédominante de l’intérêt de l’institution (dont émane la demande de suivi de telle ou telle équipe pédagogique). On a vu que la prise en compte d’intérêts différents (ceux des étudiants ou ceux des enseignants) pouvait conduire à des décisions d’accompagnement différentes, notamment dans le traitement qu’elles réservent à la demande formulée par les enseignants, retravaillée dans un cas, acceptée comme un moyen d’enrôler les enseignants dans l’autre. Sans qu’il soit question de chercher, en un domaine aussi complexe, une homogénéisation parfaite des pratiques, on peut néanmoins pointer une fragilité dans la construction du logos professionnel des CP.

43On peut en effet faire l’hypothèse que la « non conformité » du rapport de la CP-ITF à l’AA s’explique en première analyse par un logos inadéquat, lacunaire, et, en seconde analyse, par une focalisation sur des intérêts non spécifiques de la position de CP, qui rendent impossible la production ou l’acquisition d’un logos spécifique de CP que, de fait, ils excluent. La prise en compte de l’intérêt de l’institution (« on n’a pas envie qu’y ait des cours qui foirent ») justifie une altération du logos 1 et, partant, de la technique 1, en introduisant la possibilité que la demande d’AA ne provienne pas des enseignants. Les effets d’un tel choix ne se limitent pas à la non prise en compte de l’intérêt des enseignants, ils sont durables sur l’écologie du métier de CP. C’est ce qu’indiquent les rectifications du CP-Psychopédagogue, qui pointe les conséquences des choix opérés par la CP-ITF sur les conditions même de son travail de CP (« pour te protéger toi, il faut être clair avec l’institution demandeuse »).

44La question des intérêts est fondamentale parce qu’elle gouverne partiellement le type de rapports que les sujets vont pouvoir nouer à telle ou telle praxéologie. Ainsi, l’intérêt de cette CP-ITF pour l’entreprise, l’institution et les étudiants rend difficile l’émergence d’un rapport spécifique de CP. De la même façon, la prise en compte de l’intérêt des étudiants ou des enseignants, qui peut être défendue avec vigueur sur des fondements éthiques risque de condamner la construction d’un intérêt de CP qui puisse, indirectement, servir mieux l’intérêt des étudiants ou des enseignants. En effet, un des paradoxes, et non le moindre, est que la condition d’un service adéquat à telle ou telle catégorie de sujets de l’institution est peut-être dans l’autonomisation de la profession qui produit ce service, c’est-à-dire dans l’apparition d’un intérêt spécifique de cette profession qui prime les intérêts des sujets qu’elle est censée servir.

45Une condition de possibilité d’une mise en œuvre de l’AA qui soit réellement utile aux divers acteurs (institution, entreprise, étudiants, enseignants…) est donc peut-être l’existence d’un intérêt de CP qui rende possible la prise en compte des intérêts divers (étudiant, entreprise, institution, enseignants) comme intérêts subordonnés à celui de CP. Il ne s’agit pas là de désigner un ordre prioritaire absolu, mais seulement de souligner la nécessité d’une autonomie praxéologique qui seule offre des garanties contre la réduction du métier de CP à une fonction ancillaire, en étroite dépendance de positions aux intérêts mieux définis. À cette condition seulement, le logos pourrait alors être un logos de CP et non seulement d’EC ou d’ITF qui, presque accessoirement, occupe une position de CP. Soulignons que cette relégation apparente des intérêts des diverses positions est en réalité la condition de leur satisfaction réelle. Dans le cas étudié dans la section 5.2, c’est en refusant de servir immédiatement les intérêts de l’institution, de l’entreprise, des étudiants, que la CP-ITF pourrait réaliser des accompagnements dans de meilleures conditions, notamment parce que la demande d’accompagnement proviendrait des enseignants eux-mêmes, conduisant à des évolutions plus patentes dans les pratiques des enseignants – ce qui est dans l’intérêt de l’institution, de l’entreprise, des étudiants.

46La théorie des champs (Bourdieu, 1992, 2001) indique une direction pour penser la production d’un intérêt spécifique de CP. Un tel intérêt ne peut exister que s’il existe un champ au sein duquel il fait office d’enjeu de lutte. Dans ce cadre, la constitution d’un réseau (local, national ou international) de CP est sans doute une étape indispensable dans la construction d’un tel champ ; nous avons donné un exemple de discussion dans le cadre des journées GRAPPE au cours de laquelle un CP a explicité des éléments de logos ignorés d’une autre CP en les reliant à un intérêt spécifique du CP. Peut-être une telle modification du logos par explicitation de l’intérêt des CP n’est-elle possible que dans un contexte collectif facilitant le déploiement de luttes internes au champ du conseil pédagogique ? De ce point de vue, l’existence de réseaux locaux, de petite échelle, au sein desquels les sujets ont en partage la réalisation de types de tâches communs, comme l’AA, présente un intérêt particulier en ce qu’elle permet de mettre en évidence des différences systématiques portant sur des situations pourtant très proches.

7. Conclusion

47L’objet de ce travail était de construire une réponse à la question suivante : pour la réalisation d’un même type de tâches (réaliser une analyse approfondie d’un enseignement), on observe des différences dans la mise en œuvre d’une technique par différents CP pourtant formés ensemble à cette technique. Comment décrire et expliquer ces différences ? Dans une perspective nourrie par la théorie anthropologique du didactique, nous avons construit un modèle praxéologique de référence de l’AA d’enseignements à l’aune duquel on a ensuite pu mesurer les écarts de praxis et de logos dans l’appropriation de cette praxéologie par certains CP. La description de ces différences, leur mise en lien avec des différences dans les intérêts manifestés par les CP concernés, conduisent à la formulation de la réponse suivante : les CP ont des assujettissements différents (EC, ITF, psychopédagogue, etc.) qui nourrissent des intérêts spécifiques différents de ce que serait un intérêt spécifique de la position de CP. Le logos des CP est alors tributaire de ces intérêts divergents et produit des techniques différentes, comme on l’observe cliniquement. Bien sûr, l’étayage d’une telle réponse requerrait de plus amples travaux, sur des populations plus importantes. Néanmoins, notre étude donne quelques pistes d’interprétation des différences observées, mais aussi des indications sur les déterminations qui produisent ces différences.

48La prédominance d’intérêts allogènes (attachés aux autres assujettissements institutionnels, d’EC, d’ITF, de psychopédagogue, etc.) empêche la construction d’un rapport homogène des CP à AA. Une condition de possibilité de l’émergence d’un tel rapport est l’existence d’une position de CP caractérisée par un intérêt spécifique de CP – qui peut par exemple se construire dans la mise en place d’un système didactique dont le rôle serait d’identifier « les principaux problèmes de la profession sur lesquels butent non seulement les professionnels en formation mais aussi, presque toujours, la profession elle-même. Car une formation de professionnels est nécessairement coextensive à une redéfinition (à prétention méliorative) de la profession » (Chevallard et Cirade, 2009, p. 56). De façon partielle, inchoative, c’est à ce type de travail que se livre le réseau GRAPPE, et l’épisode étudié ici même, dans la section 5.2, donne à voir une consolidation d’un logos commun par l’explicitation d’un intérêt commun aux CP, relativement indépendant de leurs intérêts allogènes.

49Il convient de souligner que l’équipement praxéologique d’un sujet d’une institution à l’égard d’une question donnée dit beaucoup sur l’état d’avancement de l’étude de cette question par le sujet considéré mais aussi et surtout par l’institution dont il est le sujet. En ce qui concerne les praxéologies professionnelles, on peut considérer que l’absence de formation professionnelle « non indigne » (Chevallard, 2008 ; Chevallard et Cirade, 2009) conduit les sujets de certaines institutions à développer une praxis idiosyncratique et un logos qui est plus le reflet de leurs assujettissements passés ou autres que d’une étude approfondie, menée dans le cadre de l’institution où s’ancre leur vie professionnelle, des questions qui s’y posent. Si l’on peut accorder à Crahay, Wanlin, Issaieva et Laduron (2010) que des enseignants différents recourent « à des orientations professionnelles ou à des profils de croyances ou de cognitions différents » (p. 87), on peut tâcher de sortir de l’opposition entre, d’une part, une formation « totale », qui assurerait une maîtrise complète de l’équipement praxéologique des enseignants – Crahay et al. (2010, p. 112) : « dans la plupart des études […] l’évolution des croyances est assimilée à un processus de substitution : au début de la formation, l’enseignant pensait A ; à la fin, il pense B » – et, d’autre part, une formation « indigne » qui se traduit par des pratiques qu’on ne peut souvent comprendre que comme idiosyncratiques. Le constat que font Pratt, Sadownik et Selinger (2012) est parlant de ce point de vue: « And as with any craft or profession, by separating the tools (strategies) from the craftsperson (teacher) we imply that the tools have the power to facilitate learning. Certainly, some strategies help learning more than others. However, the same teaching strategy can be used by different teachers, or by the same teacher, at different times, but with markedly differing outcomes. » (p. 273)

50Il est d’autant moins possible de négliger l’influence de la personne qui utilise l’outil (craftsperson) sur l’efficacité (outcomes) de l’outil (tools) que l’institution considérée ne travaille pas à un renforcement de la professionnalité en contribuant à faire émerger des rapports institutionnels homogènes aux « outils », rapports qui ne se réduisent pas à des rapports idiosyncratiques pouvant évoluer au cours du temps (at different times), etc. Le fait qu’un même outil ait une efficacité différente d’un utilisateur à l’autre est peut-être plus le signe de l’inexistence d’un équipement praxéologique consistant relatif à cet outil que l’expression d’une imperfection de l’outil. Il devient peut-être alors possible de séparer (separating) les outils (tools) des artisans (craftsperson) une fois que ceux-ci ont en commun un tel équipement qui, précisément, ne se réduit pas aux outils, mais inclut un discours sur l’outil, un logos professionnel, façon de stabiliser un rapport institutionnel à l’outil. De façon dialectique, la construction d’un tel logos, et les modifications afférentes de la praxis, conduit à des aménagements de la profession elle-même, à « une redéfinition (à prétention méliorative) de la profession » (Chevallard et Cirade, 2009, p. 56), et donc à la construction d’intérêts spécifiques de cette profession, lesquels vont, en retour, conditionner les études des problèmes de la profession et l’évolution future de son équipement praxéologique.

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Notes

1 Ce travail a été réalisé avec le soutien du projet IDEFI DD.

2 L’équipement praxéologique d’un sujet d’une institution est l’ensemble des praxéologies dont il dispose, dont il est « équipé », avec une maîtrise satisfaisante du point de vue de l’institution considérée.

3 Les éléments techniques , 2, etc., et technologiques , 2, sont décrits dans la section 5.1.

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Table des illustrations

Titre Figure 1 : extrait de la partie fermée du questionnaire d’AA
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ripes/docannexe/image/1227/img-1.png
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Titre Figure 2 : questionnaire d’AA, les questions ouvertes
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ripes/docannexe/image/1227/img-2.png
Fichier image/png, 43k
Titre Figure 3 : Commentaires libres des étudiants
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ripes/docannexe/image/1227/img-3.png
Fichier image/png, 120k
Titre Figure 4 : extrait de la synthèse des questions
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ripes/docannexe/image/1227/img-4.png
Fichier image/png, 128k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Jean-Pierre Bourgade, « Les conseillers pédagogiques de l’enseignement supérieur entre unité et variété : étude clinique »Revue internationale de pédagogie de l’enseignement supérieur [En ligne], 33(2) | 2017, mis en ligne le 15 novembre 2017, consulté le 13 octobre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ripes/1227 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/ripes.1227

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Auteur

Jean-Pierre Bourgade

Aix Marseille Université, ADEF, Marseille, France
jean-pierre.bourgade@univ-amu.fr

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-SA-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-SA 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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