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Mélanges

La Tour de Doan Bui. Une architex-Tour perecquienne ?

Doan Bui’s La Tour. A Perechian architexture ?
Francesca Pozzetti

Résumés

Après la parution du Silence de mon père en 2016, Doan Bui publie son premier roman La Tour ou un chien à Chinatown en 2022 qui raconte les vies des habitants de la Tour Melbourne au sein de la dalle des Olympiades dans le 13e arrondissement de Paris. Le roman fait écho à la Vie mode d’emploi de Georges Perec : le mouvement narratif, qui saute d’un chapitre-logement à l’autre, rappelle le procédé zigzaguant à l’intérieur de l’immeuble 11, rue Simon-Crubellier. Mais c’est surtout la manière de raconter la spatialité qui renvoie aux espaces perecquiens. Plus spécifiquement, l’importance donnée à la spatialité dans le roman de Doan Bui est le résultat de la cohabitation de trois piliers architextuels que l’auteure emprunte à Georges Perec : l’espace vide, l’espace clos et l’espace a-relationnel.

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Texte intégral

Le problème n’est pas d’inventer l’espace, encore moins de le ré-inventer […], mais de l’interroger, ou, plus simplement encore de le lire.
G. Perec, Prière d’insérer, dans Espèces d’espaces

  • 1 D. Bui, Le silence de mon père, Paris, L’Iconoclaste, 2016.
  • 2 Ead., La Tour, Paris, Grasset, 2022 (dorénavant LT, suivi du numéro de page dans le corps du texte)
  • 3 G. Perec, La Vie mode d’emploi [1978], Paris, Librairie Générale Française, « Le Livre de Poche », (...)

1Grand reporter à l’Obs, Doan Bui s’affirme en tant qu’écrivaine en 2016 à la parution du Silence de mon père1, récit de filiation autobiographique. La Tour ou un chien à Chinatown2 est son premier roman. Dans ce récit, la façade nord de la Tour Melbourne, située dans le 13e arrondissement parisien, fait écho à l’immeuble du 11, rue Simon-Crubellier décrit par Georges Perec dans La Vie mode d’emploi3.

2C’est l’auteure elle-même qui déclare sa « filiation littéraire »4 vis-à-vis de l’écrivain oulipien, aussi bien par une citation en exergue du livre que lors d’un entretien diffusé par TV5 Monde5. Comme elle l’explique, son roman naît comme réponse à la question « Aujourd’hui, Perec, s’il choisissait un immeuble, qu’est-ce qu’il raconterait ? ». Cette sorte de « Vie mode d’emploi 2.0 »6 révèle le croisement de destins de divers personnages qui habitent et parcourent la notoire dalle des Olympiades, dont les tours portent les noms des villes ayant accueilli les Jeux Olympiques.

  • 7 Sur la permanence d’un cadre stable et sa représentation, voir V. Jouve, « Espace et lecture : la f (...)

3Les deux livres se développent suivant un axe temporel synchronique similaire, puisque La Vie Mode d’emploi photographie la situation d’un immeuble le 23 juin 1975 et La Tour fait la même chose le 15 septembre 2020. Mais surtout, ils présentent de nombreux points communs en ce qui concerne l’espace, comme le mouvement narratif zigzaguant qui saute d’un chapitre-logement à l’autre et l’emploi d’un cadre spatial de référence – le bâtiment, ou plutôt une copropriété – qui permet de rassembler les événements et de leur donner cohérence et lisibilité7.

  • 8 G. Bonaguidi, Le case dei destini incrociati. Per una grammatica della narrativa condominiale, Roma (...)
  • 9 Voir M. Bachtin, Esthétique et théorie du roman, tr. fr. D. Olivier, Paris, Gallimard, 1978.
  • 10 Sur le système de matrices spatiales dans Espèces d’espaces et dans La Vie mode d’emploi, voir G. I (...)

4Cela dit, je voudrais préciser que l’objectif de cet article n’est pas d’offrir une comparaison entre les deux romans, et encore moins de proposer une analyse de la complexité des interactions humaines et urbaines au sein d’une copropriété comme l’a récemment étudié Gloria Bonaguidi dans Le case dei destini incrociati8. Il n’est pas non plus question de considérer le concept bakhtinien de chronotope9, puisque les coordonnées temporelles mériteraient un examen plus approfondi, lequel n’est pas envisageable ici. On se limitera donc, dans le contexte de cette étude, à lire le roman de Doan Bui sous le prisme de la matrice Espace conçue par Perec. Compte tenu des renvois de l’auteure aux œuvres perecquiennes, je formule l’hypothèse que la référence à l’écrivain oulipien n’est pas une simple allusion, mais devient, au contraire, opérationnelle dans la mesure où ses matrices spatiales peuvent être utilisées comme dispositif d’analyse pour interpréter un roman contemporain comme La Tour10.

  • 11 C. Burgelin, Georges Perec, Paris, Seuil, 1988, p. 173.
  • 12 G. Perec, Prières d’insérer, dans Id., Espèces d’espaces [1974], Paris, Seuil, 2022 (dorénavant EE (...)

5Je vais donc recourir aux paradigmes d’espace que Georges Perec emploie dans son « roman total »11 La Vie Mode d’emploi – où un arrêt sur image capture les cases du plan en coupe de l’immeuble – et dans son « journal d’un usager de l’espace »12 Espèce d’espaces où l’écrivain se lance dans l’élaboration d’un inventaire de différentes typologies de lieux qui affectent toute existence quotidienne.

6En particulier, je voudrais montrer que la proximité entre les deux auteurs se manifeste dans leur approche commune de la spatialité et que l’importance donnée à ce sujet dans La Tour est le résultat de la cohabitation de trois piliers architextuels que Doan Bui emprunte à Perec : l’espace vide, l’espace clos et l’espace a-relationnel. Dans les pages qui suivent, j’essayerais d’abord de définir la grille spatiale perecquienne puis d’expliquer son importance dans la construction de La Tour.

La grille perecquienne

L’espace vide

  • 13 Ibid., p. 121.

7Espèces d’espaces suit un « rigoureux principe d’emboîtement »13 à l’origine duquel est le vide. À la première page on trouve la Carte de l’Océan du livre La Chasse au Snark de Lewis Carroll. Il s’agit d’un espace blanc que l’auteur explique dans l’avant-propos : « [l]’objet de ce livre n’est pas exactement le vide, ce serait plutôt ce qu’il y a autour, ou dedans. Mais enfin, au départ, il n’y a pas grand-chose : du rien, de l’impalpable, du pratiquement immatériel […] » (EE, p. 15). Au lieu d’établir avec précision ce qu’est l’espace pour en construire une notion, Perec déconstruit des repères : ce n’est pas l’espace infini ou interplanétaire qui l’intéresse, mais plutôt les morceaux d’espace et les limites à l’intérieur ou à l’extérieur desquelles l’existence humaine se place et se déplace.

8L’absence de définition claire conduit Perec à élaborer un classement structuré des espaces, en enchâssant les chapitres-endroits à la manière de poupées russes, suivant une logique inversée qui va de l’espace le plus petit et vide, comme la page, jusqu’au plus grand et comblé, c’est-à-dire le monde, en passant par des objets-lieux comme le lit, la chambre et l’appartement. Enfin, il traite de l’inhabitable, ce qui nous ramène au vide initial.

9Si Espèces d’espaces s’ouvre sur un blanc, dans La Vie mode d’emploi l’histoire démarre à partir des escaliers de l’immeuble, « cet endroit neutre qui est à tous et à personne, où les gens se croisent presque sans se voir » (VME, p. 23). Ici, entre le troisième et le quatrième étage, à l’exception de la directrice adjointe d’une agence immobilière qui va vérifier les conditions d’un appartement à vendre, lui aussi vidé, le silence et le néant règnent. C’est donc à partir d’un endroit « anonyme, froid, presque hostile » (VME, p. 24) que tout se produit. Les trous, les vides restent une constante jusqu’à l’épilogue, où on découvre que « l’immeuble était presque vide » et que le peintre Serge Valène venait de mourir à côté d’« une grande toile carrée, pratiquement vierge » (VME, p. 664).

10À côté de la matrice du blanc qui précède et engendre l’espace, le goût pour l’inventaire caractérise tout l’univers de Perec au point que les endroits les moins importants de l’immeuble comme les caves, parfois bien rangées comme celle des Altamont, ou jamais triées comme celle des Gratiolet, s’emplissent de tout et n’importe quoi.

  • 14 I. Dangy, « Haut bas fragile : l’espace de l’immeuble dans La Vie mode d’emploi », dans Cahiers Geo (...)
  • 15 B. Magné, Georges Perec, Paris, Nathan, 1999, p. 48.

11Isabelle Dangy met l’accent sur l’alternance « entre des pièces encombrées jusqu’à l’étouffement, comme le logement et le magasin de Madame Marcia, et des lieux vides et désertés, appartements en rénovation comme celui de Winckler ou de Geneviève Foulerot »14. Tout cela révèle que « l’œuvre perecquienne est tendue entre deux pôles : le défectif et l’exhaustif »15. Les lacunes spatiales ne font que refléter le vide psychologique et les trous physiques qui tourmentent les personnages de l’histoire. Le chimiste Morellet perd trois doigts à cause d’une sorte d’accident de travail ; Olivier Gratiolet perd une jambe à cause d’une mine pendant la Guerre d’Algérie ; l’archéologue Fernand de Beaumont se suicide quelques années après le début des fouilles ; les protagonistes Bartlebooth et Valène ne parviendront jamais à achever leurs projets.

L’espace clos

12À partir du vide, l’espace unique de l’immeuble se démultiplie en petits morceaux supplémentaires. Si Espèces d’espaces avance par emboîtements, passant d’un endroit plus restreint comme le lit, « l’espace individuel par excellence, l’espace élémentaire du corps (le lit-monade) » (EE, p. 33-34) à un espace plus grand comme la chambre, La Vie mode d’emploi embrasse au contraire l’ensemble du bâtiment avant de progressivement restreindre sa focale sur le plus petit des objets.

13Cependant, ce qui prédomine dans les deux cas est l’expérience spatiale de l’individu, dont la solitude est un élément récurrent. La narration se focalise sur l’intérieur des pièces, comme l’espace limité des chambres de bonnes au dernier étage. Le lit de Jane Sutton, fille au pair chez les Rorschash, « est très étroit », dans « une toute petite chambre », « sous les toits » (VME, p. 66) et les objets que Smautf a rapportés de ses voyages occupent presque toute la pièce.

  • 16 I. Dangy, « Haut bas fragile », art. cit., p. 240.
  • 17 Ibid., p. 241.

14Isabelle Dangy remarque que « les ouvertures traditionnelles que représentent les fenêtres sont quasiment absentes du discours descriptif »16. L’espace de l’immeuble est une image composée aussi bien que compartimentée en zones fermées, clôturées, isolées. Si les fenêtres empêchent toute vue sur le dehors, les portes marquent la séparation étanche des appartements et des vies correspondantes. Nombreux sont les personnages qui passent la plupart de leur temps à l’intérieur de leurs pièces, comme les acteurs principaux : Bartlebooth, presque aveugle, quitte rarement son bureau, Valène vit dans un temps suspendu dans son atelier et Smautf consacre sa journée à faire des calculs dans sa chambre. Manies, obsessions, tentatives répétées et objectifs presque jamais atteints sont des éléments qui subjuguent les habitants en les obligeant à s’attacher « à l’immeuble comme à une prison consentie »17.

L’espace a-relationnel

15L’axe vertical, qui comprend le hall d’entrée, la machinerie de l’ascenseur et la cage de l’escalier correspond à la partie commune de l’immeuble. Toutefois, l’escalier sale et laid aussi bien que l’ascenseur toujours en panne ne représentent que des voies de communication perturbées, un obstacle à toute socialisation.

  • 18 Voir M. Augé, Non-lieux. Introduction à une anthropologie de la surmodernité, Paris, Seuil, 1992.

16« [T]out ce qui se passe, passe par l’escalier » (VME, p. 23), mais il s’agit d’objets de transit, de transition, transportés vers le haut ou vers le bas du bâtiment. Ceux qui empruntent les escaliers ne se reconnaissent pas, dépouillés de leur identité, ce ne sont plus des personnes mais des passants. Les escaliers deviennent donc un non-lieu18, un espace a-relationnel et anti-identitaire. Seule l’histoire reste et se dévoile à travers le regard et les souvenirs de Valène : « Dans les escaliers, passent les ombres furtives de tous ceux qui furent là un jour » (VME, p. 97). Le non-lieu dépersonnalisé devient un espace multiple de mémoire dans lequel plusieurs histoires s’entremêlent et les fils du temps se rattachent aux moindres recoins de l’immeuble.

17À côté de l’escalier, on trouve l’escalier de service qui, autrefois réservé aux domestiques, ne sert plus que de passage pour les fournisseurs. Il s’agit d’un autre non-lieu vide, qui, au-delà d’une porte vitrée, reste la preuve matérielle des inégalités sociales, représentant un no man’s land qui sépare les bons des méchants. Maintenant, « même s’il y a en haut des gens beaucoup plus riches qu’en bas, il n’empêche que du point de vue de ceux d’en bas, ceux d’en haut sont plutôt du côté des inférieurs » (VME, p. 304).

Une architex-Tour perecquienne

Des trous aux tours

18Comme les considérations de Perec à propos de l’espace, les réflexions de Doan Bui surgissent d’un arrêt sur le vide. La narration commence par la rue Tolbiac qui mène à la dalle à travers deux escalators qui, comme l’ascenseur de La Vie mode d’emploi, sont hors service. En plus, à leur droite « il y avait un trou » (LT, p. 13) où les voitures disparaissaient. C’est donc à partir d’un vide et d’un blocage que l’histoire se déverrouille. Du plus proche au plus lointain et vice versa, la narration zoome sur les tours labyrinthiques qui ne semblent avoir ni entrée ni sortie et sur le creux mystérieux du sous-sol. Il est intéressant de noter que la langue française permet de jouer avec les mots tour et trou, l’un étant l’anagramme de l’autre.

19De plus, l’histoire du projet Italie 13 est ponctuée de trous. À la fin des années 1950, l’idée était de construire un quartier nouveau sur un espace vide : les ruines de l’ancienne gare aux marchandises des Gobelins. Mais c’est seulement entre 1969 et 1977 que de véritables projets de renouvellement de Paris seront mis en place et la capitale, « prise d’une frénésie de verticalité », devient un « grand chantier », « [a]vec des trous partout » (LT, p. 17). Cependant, les cadres supérieurs auxquels les tours étaient destinées ne s’installèrent pas et « les immeubles restèrent à moitié vides » (LT, p. 18). Le projet se révéla un échec. Le silence l’emporta sur les bruits : « [p]arfois, on entendait un garçonnet cavaler derrière un ballon, ça résonnait dans le silence, le ballon rebondissait sur les portes fermées comme des yeux aveugles, des portes qui jamais ne s’ouvraient sur un voisin râleur » (LT, p. 19). Les vides se superposent dans une stratification qui semble n’avoir jamais de fin. « À côté de la dalle, une crevasse dans le sol demeura » (ibid.). La patinoire n’a pas de glace et la piscine n’est qu’une petite pataugeoire, parce que les coûts d’entretien sont trop élevés. La végétation ne comprend que des jardinières qui meurent à cause des déchets jetés par les habitants. « Et il ne resta plus rien » (LT, p. 21).

  • 19 L’histoire coloniale de la France n’est pas un sujet secondaire dans La Tour. Comme il concerne dav (...)

20La dalle des Olympiades est drainée, détruite, annihilée, mais c’est à partir de cet anéantissement que l’histoire commence et, à la fin des années 1970, les réfugiés de l’Indochine française repeuplent le quartier19. Le néant perecquien de la Chasse au Snark et des lieux anonymes voire froids comme l’escalier se répète tout au long de La Tour, à la fois autant comme espace vide que comme métaphore d’une absence qui hante tous les personnages.

21Par exemple, l’existence du Sarthois Clément Pasquier, qui habite l’appartement 510, plonge ses racines dans le vide. Bien qu’il soit né dans « une vieille famille de cru », il « ne figurait pas sur l’arbre généalogique des Pasquier » (LT, p. 60) puisqu’il est fils illégitime, donc indigne. Sa position dans la lignée familiale déterminera son caractère évasif et méfiant. Après son baccalauréat, Clément monte à Paris en espérant prendre un nouveau départ. Toutefois, il échoue au concours des écoles de commerce et se réfugie sur la Toile où, à travers ses avatars, il tente de combler le néant qui gouverne sa vie relationnelle. À ses échecs dans sa vie d’étudiant s’ajoute la frustration due à son déménagement à Chinatown dans le 13e. Le trop-plein du quartier qu’il déteste (« Le dernier cercle de l’enfer. Le chaos. Le bruit. Les klaxons », LT, p. 69) s’oppose à sa solitude silencieuse, à son vide intérieur et à son manque d’identité.

22On retrouve les lieux suffocants dans les pages dédiées à l’installation de la famille vietnamienne des Truong dans le 13e, après leur fuite de Saïgon en 1975. À l’intérieur de son petit studio, « Alice Truong cuisinait pendant des heures, accroupie » (LT, p. 35). Le manque de confort est dû à l’étroitesse d’un espace conçu pour « optimiser le remplissage » (LT, p. 102). Les listes de l’ameublement suggèrent le trop-plein dans les logements proposés aux immigrés et la surabondance de détails se heurte au vide identitaire. La narration revient plusieurs fois sur le mot « rien » : « ils étaient partis sans rien » (LT, p. 38) ; « [c]hez les Truong, les albums photo commençaient à leur arrivée aux Olympiades. Avant ? Il n’y avait rien » (LT, p. 109). Alice et Victor n’ont aucune représentation tangible de leur origine, ils ont perdu les images de leur vie précédente. Leur trou correspond aux souvenirs irrécupérables, à l’oubli d’un passé dans leur terre natale où ils ne reviendront jamais.

23Parallèlement, les journaux intimes de leur fille Anne-Maï, qui se réfugie dans l’espace exigu de sa chambre, laquelle regorge d’éléments de son enfance, donnent à voir les trous de sa vie sentimentale, de son coup de cœur pour un garçon qui ne l’aime pas, à l’échec de son histoire avec le jeune Virgile. En réalité, les cahiers ne gardent aucun mot, aucune trace de lui, seulement un vide d’où surgit « la douleur de la trahison » (LT, p. 200). La narration insiste sur l’absence de points de repère : « [i]l n’y avait plus rien pour guider sa mémoire », « [e]lle se retrouvait face au néant » et encore « [e]lle avait alors l’angoissante impression de n’avoir pas vécu » (LT, p. 200-201).

Le cloisonnement

24Pendant la période de l’épidémie de Covid-19, la chambre devient l’espace privé et exclusif par excellence où les personnages se renferment.

25De retour chez ses parents après avoir tenté de prendre son envol, Anne-Maï se retire dans un lieu étouffant. « L’appartement était encombré de meubles ébréchés, bibelots inutiles, grille-pain cassés, transistors grésillants, corbeilles remplies de piles usées et d’ampoules grillées » (LT, p. 184). Se réfugiant dans sa chambre d’enfant saturée de « photos de classe, jouets, rédactions de collège » (LT, p. 199), Anne-Maï revient sur l’instabilité de son parcours professionnel et sur ses conflits intérieurs, notamment sa sexualité réprimée. Son petit lit de gamine, devenu trop étroit pour elle, la ramène à son adolescence et au sentiment d’inadéquation qu’elle a ressenti dès sa naissance. « Sa vie entière avait été consacrée à ce combat procustéen » (LT, p. 184), l’obligeant à s’adapter à la volonté des autres et se niant elle-même. Le lit étroit est la métaphore de la nature refoulée de la jeune fille qui n’est jamais parvenue à exprimer sa bisexualité. C’est dans sa chambre d’enfant et dans sa solitude que, en regardant une affiche de « Buffy, la tueuse de vampires blonde » (LT, p. 192), elle prend conscience de son attirance vis-à-vis des filles.

26La chambre devient aussi le lieu de développement de manies et d’obsessions, comme dans le cas de la métamorphose animale de Clément : « Il ne dormait plus sur son lit, mais dans une petite niche qu’il s’était aménagée dans l’appartement » (LT, p. 79). Sa solitude misanthrope l’amène à se calfeutrer chez lui pour construire sa nouvelle identité de chien.

27Le studio de vingt mètres carrés d’Ileana Antonescu, pianiste roumaine devenue babysitter, l’isole si bien que seuls persistent du monde extérieur les chants de sa voisine, Alice Truong, lesquels traversent les cloisons. Chaque matin, sous les draps, Ileana rêve de son pays natal et du lit étroit où elle aimait dormir avec son bébé. En fait, la chambre du logement 512, qu’elle partage avec l’image immobile de son enfant Teodora, la protège de la prise de conscience de la mort de sa fille et de ce lien symbiotique qui n’existe plus.

  • 20 À l’intérieur du premier chapitre, « Italie 13 », on dénombre 17 notes en bas de page.
  • 21 Cela fait penser bien évidemment à l’abondance de notes dans W ou le souvenir d’enfance.

28La compartimentation des lieux se traduit également dans la fragmentation du texte, où de nombreuses notes en bas de page morcellent le discours. Très fréquentes20, les annotations obligent le lecteur à interrompre constamment sa lecture et à revenir sur des passages précédents pour retrouver le fil de la trame21. Les marges des pages forment aussi une sorte de sous-sol textuel qui offre des traces supplémentaires au déroulement de l’histoire.

29Certains personnages n’existent même que dans les notes, comme Monsieur Wu, dont on suit malgré tout la trace jusqu’à la fin du roman. Un de ses descendants sortira du fond de la page pour atteindre le texte proprement dit et deviendra l’un des promoteurs du nouvel aménagement futuriste des Olympiades. L’histoire de la dynastie asiatique qui débarque à Paris et révolutionne la logique et l’esthétique de la capitale de France, est une histoire de gloire verticale, d’ascension sociale : sortant de la marginalité d’une note de bas de page, un fait infra-ordinaire se transforme en une histoire extraordinaire digne de l’intrigue principale. La verticalité de l’espace des bâtiments est soulignée et, avec elle, l’importance donnée aux espaces périphériques. La position des annotations en bas de page évoque métaphoriquement l’invisibilité des personnages qui occupent les zones souterraines de la dalle. Non-lieu de l’espace littéraire, dont l’accessibilité n’est réservée qu’aux lecteurs attentifs, la note en bas de page abandonne son statut officieux et informel et atteint le niveau supérieur du discours officiel. Comme on le verra dans le paragraphe suivant, l’inhabitable devient le lieu le plus agréable à vivre.

Les non-lieux : ascenseur et sous-sol

  • 22 Ce n’est pas la première fois qu’un ascenseur catalyse les dynamiques d’un immeuble tout en dénonça (...)

30Homologue des escaliers d’antan, la cabine de l’ascenseur est le leitmotiv spatial de La Tour. Sept sections intitulées « Ascenseur » et numérotées progressivement alternent avec des chapitres-logements, ce qui souligne l’importance de cet espace de transit. Les personnages-passagers l’empruntent avec méfiance ; ils cherchent à l’utiliser aussi rapidement que possible pour esquiver tout contact humain. Cette sorte de plaque tournante de cultures différentes représente un lieu de collision plutôt que de rencontre22.

31Clément Pasquier, par exemple, « appuie frénétiquement sur le bouton “Fermetures des portes” » (LT, p. 52) pour éviter de partager l’ascenseur avec ses voisins. Et bien qu’il s’agisse d’une « cabine confinée, réceptacle de tous les germes » (LT, p. 76), l’ascenseur reste préférable aux escaliers « au sol en béton peint et à l’odeur parfois suspecte » (LT, p. 87). Même pour l’obstiné Victor Truong, qui a emprunté les escaliers pendant longtemps avant de se résigner à l’utilisation de l’ascenseur à cause de son âge avancé. Cependant il reste terrifié à l’idée de rester coincé « entre deux étages », « puis mourir là » dans « ce cercueil vertical » (LT, p. 90) en rêvant de l’horizontalité des maisons vietnamiennes.

32En effet, la plupart des habitants sont d’origine asiatique et n’ont pas l’habitude des ascenseurs. La cabine agit comme un rite d’initiation, un lieu de supplice et de passage obligé pour se familiariser avec la nouvelle routine occidentale. Une note de bas de page souligne l’importance de l’ascenseur comme moyen pour favoriser la « mixité sociale totale, une égalité de traitement pour tous » (LT, p. 39). Toutefois, seuls « les plus aisés étaient censés habiter en hauteur pour bénéficier d’une vue sur Paris, voire sur la tour Eiffel » (ibid.). L’ascenseur renvoie à l’immeuble haussmannien, mais à l’envers : les moins riches habitent les étages inférieurs et la cabine remplace définitivement les escaliers qui, oubliés et toujours vacants, sont définis comme des « non-lieux » (LT, p. 88).

33Au fil des pages, le caractère dangereux de l’endroit laisse place à la possibilité d’un rapprochement. Anne-Maï et Ileana se rencontrent dans le hall du bâtiment alors que la première vient d’acheter une poupée. La voyant, Ileana revient soudainement sur son passé et sur la perte de sa fille Teodora, qui possédait le même jouet. Ileana saisit le bébé et s’écroule : « Elle pleure. Les portes de l’ascenseur, bloquées par le corps prostré, s’ouvrent, puis se referment, rythmées par les sanglots et les hoquets de la femme » (LT, p. 247). L’objet enfantin déclenche la prise de conscience de la mort de son enfant : l’ascenseur devient le lieu de transition entre la suppression émotionnelle et la clairvoyance cathartique de la douleur du deuil. Cette fois, les portes qui « arrêtent et séparent » (EE, p. 66) en interdisant et en imposant le cloisonnement, n’arrivent pas à se fermer, si bien que la liaison est établie.

34Si la cage de l’ascenseur met en valeur la stratification verticale du bâtiment, « les entrailles souterraines des parkings des Tours » (LT, p. 14) soulignent la profondeur fragile et effrayante de sa base horizontale. Nombreuses sont les références au « trou » dans lequel les voitures disparaissent, au « passage secret entre le monde des vivants et l’Hadès » et aux « méandres cachés des Olympiades » (ibid.).

  • 23 I. Dangy, « Haut bas fragile », art. cit., p. 243.

35Après une période d’utilisation comme dépôt et « plateforme de livraison » (LT, p. 45), le sous-sol se vide de ses activités et se remplit « de connotations lugubres »23 (les références aux fantômes sont répétées à plusieurs occasions), comme les caves de La Vie mode d’emploi. Les parkings paraissent peuplés seulement de voix.

Certains box de parking étaient entièrement meublés, des matelas au sol, une petite table ici et là, les familles vivaient dans les vapeurs de diesel, sans air frais ni lumière […]. Le peuple du sous-sol restait silencieux de peur d’être dénoncé et chassé. Il fallait tendre l’oreille pour en saisir les murmures polyglottes. (LT, p. 50)

36En particulier la nuit, les sans-papiers comme Virgile, qui vivent cachés, squattent les garages et les caves abandonnés. Les abîmes des Olympiades sont un monde inconnu d’existences en creux, de vies qui habitent les interstices oubliés de ceux qui occupent la surface. Il s’agit de « l’inhabitable » (EE, p. 164) perecquien, sans aération et lumière du soleil, un non-lieu qui efface toute identité légitime d’un peuple « qui n’avait plus rien, ni argent, ni identité, ni papiers » (LT, p. 50).

37Les derniers chapitres nous font avancer jusqu’en 2045. Projetée dans un futur à la fois utopique et dystopique, la dalle des Olympiades n’est plus la même. Les vieux créateurs du projet Italie 13 en constatent enfin la réussite : le nouveau quartier est « devenu l’un des seuls vivables » grâce à la conversion du 13e arrondissement en « forêt urbaine » (LT, p. 309) qui permet de maintenir un climat agréable même pendant l’été et ses cinquante degrés. Toutes les Tours ont subi un changement évolutif. Surélevées, elles atteignent deux-cents mètres de hauteur, décorées de « constructions végétalisées », elles disposent d’un « labyrinthe aérien » qui propage la lumière en la diffractant en « mille petites taches » (LT, p. 310) qui s’entremêlent aux plantes et aux arbres. Le vaste espace souterrain abritant des parkings et des entrepôts de stockage, autrefois squatté par des migrants clandestins, est devenu un espace habitable qui reçoit la lumière naturelle grâce à l’installation de puits de lumière jusqu’au 7e sous-sol et un « haut lieu de la consommation et des plaisirs » où se concentrent des logements de luxe et même une « boîte de nuit la plus branchée de Paris » (LT, p. 312). Enfin, « [c]haque tour possède désormais un aquarium-ascenseur, consacré à une espèce différente » (LT, p. 307). L’ascenseur, consacré aux résolutions des querelles entre les résidents, est devenu un véritable lieu de décompression des rythmes effrénés de la vie dans la ville : « Ce sont désormais dans les ascenseurs, jadis lieux de conflits et de voisinage divers et variés, voire de déclarations de guerre par affiche interposées, qu’on organise les médiations pour régler les menus litiges » (LT, p. 308).

Conclusions

38Le roman de Doan Bui semble avoir été bâti sur de véritables macrofigures perecquiennes : l’espace vide, l’espace clos et le non-lieu se répètent tout au long de l’histoire. Bien que, faute d’espace, ils n’épuisent pas complètement le sujet, les exemples présentés, montrent que les références à Perec ne sont pas de simples allusions, mais qu’elles indiquent un parcours de lecture spatiale de La Tour. Lire un roman contemporain sous le prisme de catégories spatiales perecquiennes est donc possible.

39On a vu que la construction de la dalle des Olympiades est parsemée de trous, de blocages et d’échecs qui freinent sa réalisation. En parallèle, les histoires des protagonistes sont ponctuées de failles. Notamment, l’image du vide va au-delà de la spatialité. Il s’agit du thème de l’absence de points de repères, du manque de sa propre identité, du silence face à un passé qui ne peut pas être révélé. Le vide perecquien est l’espèce d’espace le plus évident dans La Tour, l’élément qui est à la base de l’édifice narratif : c’est le tacite, l’inexprimé, l’inavouable des personnages qui ont du mal à se prononcer, à se manifester, à communiquer avec les autres. Toutefois, tandis que Perec cherche à tout quadriller et à tout maîtriser afin de tout neutraliser – avec l’objectif de revenir au point de départ qui est la disparition des personnages et la dissolution des lieux – Doan Bui ne s’arrête pas là. Si le néant de départ unit les deux auteurs, le point d’arrivée les sépare.

  • 24 D. Constantin, J.-L. Joly, C. Reggiani, « Introduction », dans Cahiers Georges Perec, 12, cit., p.  (...)
  • 25 G. Iacoli, La percezione narrativa dello spazio, Roma, Carocci, 2008, p. 88.

40La fin du roman rassemble plutôt à un nouveau commencement. Les espaces se sont transformés et, avec eux, les personnages : démultipliés les uns et sortis de leurs solitudes les autres, ils ne sont pas disparus, ils n’ont pas été effacés. Tandis que, pour le dire avec Danielle Constantin, Jean-Luc Joly et Christelle Reggiani, « Perec apparaît comme un écrivain topographe, un architexteur, arpenteur inlassable des lieux, interrogeant la dimension spatiale des pratiques et des expériences de toutes les manières possibles »24, Doan Bui non seulement interroge les espaces de la société postmoderne, mais explore des réponses, des modes d’emploi possibles, des parcours viables et évolutifs dans le temps. Les « espèces d’espaces » se multiplient à partir d’eux-mêmes et agissent en tant que matrices25 qui génèrent des structures et des romans nouveaux en suivant le modèle de l’hyper-roman La Vie mode d’emploi. De la même façon, les architextes perecquiens offrent, à leur tour, des idées, des suggestions, des manières de raconter et de parcourir les histoires, qui fonctionnent comme paradigme créateur d’architectures nouvelles. Les espaces de La Tour se décomposent, se recomposent et prolifèrent jusqu’à parvenir à une composition neuve, autre.

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Notes

1 D. Bui, Le silence de mon père, Paris, L’Iconoclaste, 2016.

2 Ead., La Tour, Paris, Grasset, 2022 (dorénavant LT, suivi du numéro de page dans le corps du texte).

3 G. Perec, La Vie mode d’emploi [1978], Paris, Librairie Générale Française, « Le Livre de Poche », 2013 (dorénavant VME suivi du numéro de page dans le corps du texte).

4 Voir D. Viart, « Filiations littéraires », dans La Revue des lettres modernes. Écritures contemporaines, 2, 1999, « États du roman contemporain », dir. J. Baetens et D. Viart, p. 115-139.

5 Voir au lien suivant : consulté le 03/10/2024, URL : https://www.youtube.com/watch ?v =fc51D44DJBA.

6 Ibidem.

7 Sur la permanence d’un cadre stable et sa représentation, voir V. Jouve, « Espace et lecture : la fonction des lieux dans la construction du sens », Cahiers de Narratologie, 8, 1997, consulté le 03/10/2024, URL : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/narratologie.10757. L’article a été publié en italien avec le titre « Spazio e lettura : la funzione dei luoghi nella costruzione del senso », dans F. Sorrentino, Il senso dello spazio. Lo “spatial turn” nei metodi e nelle teorie letterarie, Roma, Armando Editore, 2010, p. 53-68.

8 G. Bonaguidi, Le case dei destini incrociati. Per una grammatica della narrativa condominiale, Roma, Artedmide, 2022, p. 211-222. En étudiant le roman perecquien du point de vue de la copropriété, l’auteure insiste sur la suspension du temps jusqu’à sa dissolution, le manque de relation avec le monde extérieur et l’immobilité des espaces clos et confinés.

9 Voir M. Bachtin, Esthétique et théorie du roman, tr. fr. D. Olivier, Paris, Gallimard, 1978.

10 Sur le système de matrices spatiales dans Espèces d’espaces et dans La Vie mode d’emploi, voir G. Iacoli, La percezione narrativa dello spazio, Roma, Carocci, 2008, p. 88-92. L’auteur explique que Perec considère les espaces non pas comme des toiles de fond inactives, mais plutôt comme des éléments narratifs en progression qui dynamisent la relation entre le personnage et le contexte lui-même.

11 C. Burgelin, Georges Perec, Paris, Seuil, 1988, p. 173.

12 G. Perec, Prières d’insérer, dans Id., Espèces d’espaces [1974], Paris, Seuil, 2022 (dorénavant EE suivi du numéro de page dans le corps du texte).

13 Ibid., p. 121.

14 I. Dangy, « Haut bas fragile : l’espace de l’immeuble dans La Vie mode d’emploi », dans Cahiers Georges Perec, 12, 2015, « Espèces d’espaces perecquiens », dir. D Constantin, J.-L. Joly et C. Reggiani, p. 237-252, p. 241.

15 B. Magné, Georges Perec, Paris, Nathan, 1999, p. 48.

16 I. Dangy, « Haut bas fragile », art. cit., p. 240.

17 Ibid., p. 241.

18 Voir M. Augé, Non-lieux. Introduction à une anthropologie de la surmodernité, Paris, Seuil, 1992.

19 L’histoire coloniale de la France n’est pas un sujet secondaire dans La Tour. Comme il concerne davantage la dimension temporelle du roman, il ne sera pas abordé dans cet article. Cependant, il faut remarquer qu’une référence à l’histoire officielle, « l’Histoire avec son grand H [qui] écrase toujours les histoires individuelles » (LT, p. 112) renvoie explicitement à une autre œuvre perecquienne, W ou le souvenir d’enfance (1975) et confirme encore une fois le lien profond entre les deux auteurs.

20 À l’intérieur du premier chapitre, « Italie 13 », on dénombre 17 notes en bas de page.

21 Cela fait penser bien évidemment à l’abondance de notes dans W ou le souvenir d’enfance.

22 Ce n’est pas la première fois qu’un ascenseur catalyse les dynamiques d’un immeuble tout en dénonçant l’incommunicabilité des sociétés multiculturelles dans un roman contemporain : je pense notamment à A. Lakhous, Choc des civilisations pour un ascenseur Piazza Vittorio [Roma, 2006], tr. fr. É. Gruau, Arles, Actes Sud, 2007. Ici, l’énigme policière se déroule autour de l’ascenseur qui est à la fois la scène du crime et le lieu des conflits entre les habitants, chacun défendant sa propre appartenance culturelle. Dans La Tour, l’un des chapitres consacrés à l’ascenseur raconte l’échange de points de vue entre locataires à propos de l’attentat contre Michel Houellebecq, dont chacun est persuadé de reconnaître l’agresseur.

23 I. Dangy, « Haut bas fragile », art. cit., p. 243.

24 D. Constantin, J.-L. Joly, C. Reggiani, « Introduction », dans Cahiers Georges Perec, 12, cit., p. 9-12, p. 9.

25 G. Iacoli, La percezione narrativa dello spazio, Roma, Carocci, 2008, p. 88.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Francesca Pozzetti, « La Tour de Doan Bui. Une architex-Tour perecquienne ? »Revue italienne d’études françaises [En ligne], 14 | 2024, mis en ligne le 15 novembre 2024, consulté le 16 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rief/13067 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12oyv

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