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Mélanges

Baudelaire, Manet et les illusions de « La Corde »

Baudelaire, Manet and the illusions of “La Corde”
Andrea Schellino

Résumés

Cet article se propose de reconsidérer la manière qu’a Baudelaire d’inscrire sa relation avec Manet dans l’un de ses poèmes en prose, « La Corde ». Même si la dédicace du poème pourrait encourager l’identification du locuteur à l’auteur de La Musique aux Tuileries, celui-là reste un personnage fictif. Une étude serrée des données référentielles prouve que le poème en prose se construit à travers des jeux de miroir fictionnels, qui se greffent sur des épisodes biographiques et en érodent les contours.

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Texte intégral

  • 1 Plusieurs études ont été consacrées aux relations entre Baudelaire et Manet, dont : P. Valéry, Trio (...)
  • 2 Ch. Baudelaire, Correspondance, éd. C. Pichois et J. Ziegler, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de l (...)

1Le rapport de Baudelaire avec Manet est, depuis plus d’un siècle, un sujet de controverse. Il est devenu le banc d’essai de la modernité – ou plutôt de deux idées de la modernité1. Le 11 mai 1865, Baudelaire écrit à Manet, qui se plaint d’être mal compris, pour tenter de le consoler, et il a cette formule : « vous n’êtes que le premier dans la décrépitude de votre art »2. Aux yeux de la postérité ce jugement de « décrépitude » a scellé l’incompréhension de Baudelaire et résumé, en un seul mot, la relation entre le poète et le peintre. Mais cette rencontre a été surtout l’occasion d’un partage artistique et littéraire, dont témoigne un poème en prose de Baudelaire, « La Corde », publié pour la première fois en février 1864. En mettant en scène un moment singulier de la vie de Manet, ce poème en désagrège les traits réels pour proposer, en dernière analyse, une réflexion sur l’illusion artistique.

2Après avoir évoqué les liens d’amitié entre Baudelaire et Manet, je me propose de reconsidérer la manière qu’a le poète d’inscrire sa relation avec le peintre dans ce poème en prose intitulé « La Corde ». À l’épreuve des faits, le locuteur reste un personnage fictif malgré la dédicace et l’intrigue du poème qui pourraient encourager l’identification du locuteur à l’auteur de La Musique aux Tuileries. Comme le montre une étude serrée des données référentielles, le poème en prose multiplie les plans fictionnels et brouille les contours des épisodes biographiques.

  • 3 A. Proust, « Édouard Manet. Souvenirs », dans La Revue Blanche, XII, février-mai 1897, p. 135, rééd (...)
  • 4 Ibid., p. 23-25.

3Selon Antonin Proust, Manet et Baudelaire, que onze ans séparent, se sont connus autour de 1858 ou de 1859 dans le salon d’Hippolyte Lejosne3. Commandant de la Garde Impériale, ami de la famille Manet, Lejosne, qui était républicain, tenait un salon au 6 de l’avenue Trudaine, fréquenté par Barbey d’Aurevilly, Guys, Nadar et Bracquemond. Il est difficile de dire avec précision quand leurs relations sont devenues plus étroites, les premières allusions dans leurs lettres n’apparaissant qu’en janvier 1863. Un épisode pourrait marquer leur rapprochement. En 1859, Manet rompt avec Thomas Couture, qui l’avait accepté dans son atelier, en septembre 1850. Manet avait envoyé au Salon Le Buveur d’absinthe, exécuté durant l’hiver 1858-1859. Mais malgré l’appui, semble-t-il, de Delacroix, Le Buveur d’absinthe fut refusé par le jury du Salon, où siégeait Couture. Ce premier échec affecta beaucoup Manet. Antonin Proust nous a conservé le récit de la déception du peintre et de la réaction de Baudelaire, qui lui aurait rappelé « qu’il faut être soi-même »4.

  • 5 Ch. Baudelaire, Œuvres complètes, éd. C. Pichois, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », (...)
  • 6 Ibid., p. 693.
  • 7 A. Proust, Édouard Manet. Souvenirs, cit., p. 20.

4Les liens entre le poète et le peintre se resserrent alors. En début d’après-midi, Manet se rend régulièrement aux Tuileries pour ses études en plein air, et Baudelaire l’accompagne. La volonté de Manet de chercher son inspiration à l’extérieur, en profitant du spectacle de la foule parisienne, est conforme aux théories de l’auteur du Peintre de la vie moderne, selon lesquelles l’artiste doit admirer « l’éternelle beauté et l’étonnante harmonie de la vie dans les capitales »5 et devenir un parfait observateur, puisque « peu d’hommes sont doués de la faculté de voir »6. L’œil du peintre s’attache aux sources de la vie contemporaine pour en extraire la quintessence poétique. Antonin Proust raconte que, chez Manet, « l’œil jouait un si grand rôle que Paris n’a jamais connu de flâneur semblable à lui et de flâneur flânant plus utilement »7.

L’« illusion la plus naturelle »

5Le 7 février 1864, Baudelaire publie dans le Figaro une série de quatre poèmes en prose, sous le titre : « Le Spleen de Paris. Poèmes en prose ». Le texte qui ouvre cette série, « La Corde », dédié à Manet, s’inspire d’un tragique épisode de la vie du peintre : le suicide par pendaison de son jeune assistant, Alexandre, à l’automne 1858 ou au printemps-été 1860.

  • 8 É. Moreau-Nélaton, Manet, graveur et lithographe, Paris, Loys Delteil-Éditions du Peintre-Graveur i (...)
  • 9 Voir le catalogue Manet 1832-1883, Paris, Éditions de la Réunion des musées nationaux, 1983, p. 61- (...)

6Modèle de L’Enfant aux cerises, Alexandre figure, selon Étienne Moreau-Nélaton8, dans une eau-forte du Garçon et le chien, parue en septembre 1862 chez Alfred Cadart9. De cette eau-forte il existe une esquisse, dite également Le Gamin et le chien.

É. Manet, Le Garçon et le chien, Alfred Cadart, septembre 1862. Paris, Bibliothèque nationale de France, Département des estampes.

  • 10 A. Tabarant, Manet et ses œuvres, Paris, Gallimard, 1947, p. 25.

7Selon Moreau-Nélaton, Alexandre aurait également posé pour une peinture à huile, Le Gamin au chien, mais cela est sujet à caution. Adolphe Tabarant précise qu’Alexandre était un « rapin de quinze ans »10, et qu’il a posé pour « Le Gamin aux cerises » et pour « Le Gamin à la toque rouge », deux désignations du même tableau.

É. Manet, Le Gamin et le chien, 1860-1861 ?. Catalogue de la vente Christie’s Impressionist and Modern Art Works on Paper, New York, mai 2012, lot 101 ; D. Rouart, D. Wildenstein, Édouard Manet. Catalogue raisonné, Paris-Lausanne, Bibliothèque des arts, 1975, t. II, p. 455.

  • 11 A. Proust, Édouard Manet. Souvenirs, cit., p. 25-26.
  • 12 Ibidem. Ces allusions à l’épisode se trouvent dans la première version de l’essai de Proust, publié (...)
  • 13 Voir É. Darragon, Manet, Paris, Citadelles, « Les Phares », 1991, p. 48.

8Nous ne disposons que de quelques rares témoignages sur Alexandre. Antonin Proust, qui situe en 1858 la composition de l’Enfant aux cerises, raconte en 1897 que Manet « a terminé » le tableau dans l’atelier de la rue de la Victoire, « d’après le petit garçon qui lui lavait ses brosses et lui nettoyait sa palette »11. Le peintre aurait commencé le tableau dans son atelier de la rue Lavoisier. Selon Proust, le « pauvre garçon, d’humeur très morose, se pendit » et « Manet fut très affecté de la fin de ce petit être qu’il aimait beaucoup »12. Berthe Morisot, dans une note non datée de son carnet, ajoute que « cet enfant, qui, dans un accès de désespoir, s’est pendu dans l’atelier d’Édouard, a inspiré un des petits contes de Baudelaire »13.

  • 14 É. Moreau-Nélaton, op. cit., p. 10 ; voir aussi Id., Manet raconté par lui-même, Paris, Henri Laure (...)
  • 15 É. Moreau-Nélaton, Manet, graveur et lithographe, cit., p. 10.
  • 16 Ibidem.

9Dans un catalogue de 1906, Moreau-Nélaton, qui dit tenir l’histoire de Mme Manet en personne, décrit Alexandre comme un « petit bonhomme d’humeur lunatique et chagrine »14 et affirme qu’il se pendit dans l’atelier de Manet de la rue Guyot. Le peintre l’aurait retrouvé « un beau matin inanimé, une corde au cou et un sucre d’orge entre les dents »15. D’après Moreau-Nélaton, Baudelaire a tiré de cet épisode « un conte, qu’il lut peu de jours après au peintre et à son entourage »16. Enfin, une autre version du tragique événement est donnée par André Chatté, le 10 mars 1907 :

  • 17 A. Chatté, « Notes sur Manet », dans Le Journal des curieux, 10 mars 1907, p. 10 ; cité dans P. Cou (...)

Manet était fataliste et très superstitieux. Il avait pris comme modèle pour l’Enfant aux cerises un jeune garçon qui lui lavait ses brosses et lui nettoyait sa palette. Cet adolescent avait du noir dans l’âme. Un soir, Manet appelle son modèle ; il le cherche et l’aperçoit pendu dans un coin de l’atelier qu’il occupait rue Lavoisier. Très frappé de ce suicide, l’artiste donna immédiatement congé et se mit en quête d’un autre local. Il en trouva un sur la place Clichy, mais en l’inspectant, il aperçoit un énorme clou ; ce clou l’intrigue, il ne peut en détacher ses yeux, et par une sorte d’intuition : – Qui donc s’est pendu là ? demande-t-il brusquement à la concierge. – Qui vous l’a dit ? s’écrie celle-ci stupéfaite… Manet prit la fuite sans vouloir apprendre davantage.17

10Ces récits s’accordent sur le caractère maussade du petit Alexandre et soulignent aussi la tristesse de Manet après le suicide, son attachement pour le jeune garçon, au point qu’il voulut changer d’atelier. Il est difficile d’établir si ces récits sont effectivement redevables du poème en prose de Baudelaire, qui fut le premier texte publié à faire allusion à la mort d’Alexandre.

  • 18 Voir M. Pleynet, « Dans les ateliers de Manet », dans L’Infini, 117, hiver 2011, p. 89-106 ; et J. (...)

11Où et quand cet épisode a-t-il eu lieu ? Les biographes divergent sur ces points : Antonin Proust le place dans l’atelier de la rue de la Victoire ; Moreau-Nélaton dans l’atelier de la rue Guyot ; Chatté dans celui de la rue Lavoisier. On peut exclure qu’il s’agisse de l’atelier du 81 de la rue Guyot, comme le veut Moreau-Nélaton : Manet s’y installe en mai 1861, et ne le quitte qu’en 187018. Il est impossible que cette « grande pièce unique » dans un bâtiment bourgeois ait été le cadre de la pendaison de l’enfant, puisqu’il faudrait alors la situer en 1870, presque dix ans après la date présumée.

  • 19 Notes de Léon Leenhoff, conservées dans le fonds Moreau-Nélaton du cabinet des Estampes de la BnF ; (...)

12Considérant le récit de Chatté, qui situe l’événement dans l’atelier du 4 de la rue Lavoisier, l’épisode remonterait environ à l’automne 1858, au moment où Manet quitte la rue Lavoisier pour la rue de la Victoire. Or on dispose d’un élément important pour dater le déménagement du peintre, qui avait demandé à la Bibliothèque impériale une carte de travail, le 25 novembre 1858, depuis la rue de la Victoire. Cette localisation conviendrait à la facture précoce de L’Enfant aux cerises. Cela impliquerait aussi que Baudelaire n’ait pas composé son poème immédiatement après le tragique épisode, puisqu’à l’époque il connaissait à peine Manet. Si Alexandre s’est tué dans l’atelier de la rue de la Victoire, on peut situer son suicide en 1860, probablement au printemps ou au début de l’été, dès lors que Manet aurait provisoirement déménagé, dans l’été, dans un nouvel atelier, rue de Douai, comme le signale Léon Leenhoff19.

  • 20 Voir Ch. Baudelaire, Le Spleen de Paris. (Petits poèmes en prose), éd. J.-L. Steinmetz, Paris, Le L (...)

13Or qu’en est-il de ces circonstances dans le poème en prose de Baudelaire ? Est-ce que le poète suit fidèlement les étapes de ce triste épisode ? En voulant éclairer les circonstances de la composition de « La Corde », les critiques ont eu du mal à identifier le lieu et le moment de la mort d’Alexandre20. Les seules périodes possibles de son suicide, qui sont aussi les périodes limites à partir desquelles Baudelaire a pu composer son poème en prose, sont l’automne 1858 (rue Lavoisier), ou le printemps-été 1860 (rue de la Victoire).

  • 21 Ch. Baudelaire, Le Spleen de Paris, éd. A. Cervoni et A. Schellino, Paris, Flammarion, « GF », 2017 (...)

14Le poème en prose de Baudelaire n’est pas dépourvu de caractérisations spatiales : ces détails matériels constituent l’un des deux pôles du poème, à côté de l’atmosphère irréelle, voire fantastique. Le peintre est censé habiter un « quartier reculé », « où de vastes espaces gazonnés séparent encore les bâtiments »21. Plusieurs indices suggèrent que l’immeuble où se passent les événements, dans « La Corde », est à la fois l’atelier et la maison du peintre. Le peintre le décrit comme l’endroit où il habite, son habitation principale et son lieu de travail : c’est là que l’enfant vit, nettoie les pinceaux du peintre, et se pend. Plus exactement, en rentrant chez lui, le peintre de « La Corde » le découvre pendu au panneau d’une armoire. Plus tard, lorsque la mère arrive à l’improviste dans l’atelier, le corps est étendu sur un divan, peu éloigné du lieu où Alexandre s’est tué, puisque dans la même pièce le peintre peut aussi embrasser d’un seul regard la paroi de l’armoire.

15La caractérisation du poème montre qu’il s’agit d’une maison-atelier, où le peintre vit et travaille. Cette situation est peut-être comparable à celle de Delacroix, qui, entre 1844 et 1857, habitait dans son atelier de la rue Notre-Dame-de-Lorette, comme plus tard place Fürstenberg. Cet emplacement, que Baudelaire et Manet ont connu à des époques différentes, permettait au peintre l’isolement et la concentration qui lui étaient nécessaires, même au cœur d’un quartier artiste.

16Or le décor de « La Corde » et de telles conditions de travail ne correspondent pas à la situation de Manet, à l’époque où il connut Baudelaire. Ses petits ateliers de la rue Lavoisier et de la rue de la Victoire ne lui permettaient pas d’en faire son domicile. À la différence du peintre de « La Corde », Manet préférait séparer son logement privé et son atelier de travail.

  • 22 OC I, p. 50.
  • 23 OC II, p. 719.

17Concernant la description de l’environnement de l’atelier, la question demeure délicate. Les ateliers de la rue Lavoisier et de la rue de la Victoire (aujourd’hui dans les 8e et 9e arrondissements de Paris) avaient un aspect différent du cadre actuel : autour de 1858-1860 l’urbanisation massive de ces quartiers de Paris ne laissait guère imaginer de « vastes espaces gazonnés ». Le cas de la rue de Clichy est plus suggestif, puisque c’est autour de cette adresse familiale que tourne la vie du jeune Manet. Aux alentours de la rue de Clichy se concentraient jadis des folies célèbres et des jardins de loisir, dont la Folie-Boutin, le Grand-Tivoli ou la Folie-Bouëxière, qui feront les frais des spéculations et de l’aménagement du nouveau quartier de l’Europe. Vers 1858, ces lieux de loisirs et ces jardins répondaient plutôt à une topographie imaginaire, d’ailleurs fort évocatrice. Baudelaire connaissait bien le quartier, et on retrouve dans son œuvre des mentions à ces lieux parisiens. Dans « Les Petites Vieilles », il imagine une « célèbre évaporée / Que Tivoli jadis ombragea dans sa fleur »22, tandis que, dans Le Peintre de la vie moderne, il cite les « Tivolis » parmi les « capharnaüms » d’autrefois où « l’exubérance de la jeunesse fainéante se donne carrière »23.

18Dans le récit du peintre de « La Corde », l’endroit qu’il habitait au moment du funeste événement (répété, comme le montre l’adverbe, mais raconté au passé simple) correspond à celui qu’il habitait au moment du récit (présent d’énonciation), comme s’il n’avait jamais changé d’adresse :

  • 24 Id., Le Spleen de Paris, éd. A. Cervoni et A. Schellino, cit., p. 135.

Dans le quartier reculé que j’habite [moment du récit] et où de vastes espaces gazonnés séparent encore les bâtiments [moment du récit], j’observai souvent un enfant dont la physionomie ardente et espiègle me séduisit [analepse].24

Or Manet a changé d’atelier tout de suite après le suicide d’Alexandre.

  • 25 Ibid., p. 136.
  • 26 Ibid., p. 135.
  • 27 Ibidem.
  • 28 Pour un point de vue différent du nôtre, voir S. Murphy, Logiques du dernier Baudelaire, cit., p. 5 (...)
  • 29 Ch. Baudelaire, Petits poëmes en prose, éd. R. Kopp, cit., p. 305.
  • 30 S. Murphy, Logiques du dernier Baudelaire, cit., p. 569.
  • 31 Ibidem.
  • 32 J. A. Hiddleston, « Baudelaire, Manet, and Modernity », dans Modern Language Review, LXXXVII, 3, ju (...)
  • 33 Ibidem.

19Un autre élément qui semble confirmer notre hypothèse sur la fictionnalisation du suicide d’Alexandre concerne les poses auxquelles le peintre de « La Corde » soumet celui qui va devenir l’« espiègle compagnon de [s]a vie »25 : « Il a posé plus d’une fois pour moi, et je l’ai transformé tantôt en petit bohémien, tantôt en ange, tantôt en amour mythologique. Je lui ai fait porter le violon du vagabond, la couronne d’épines et les clous de la Passion, et la torche d’Éros »26. Le narrateur explique qu’ayant observé souvent le gamin, il fut séduit par sa « physionomie ardente et espiègle » et que c’est seulement après l’avoir fait poser à sa guise et avoir pris plaisir de toute sa « drôlerie », qu’il demanda à ses parents de le lui confier27. Ces métamorphoses se structurent selon un certain parallélisme : le « violon du vagabond » semble faire écho au « petit bohémien » et, hors du contexte narratif, à une représentation misérabiliste : celle du jeune musicien des rues. La « torche », qui préfigure le portrait de l’« Amour mythologique », est l’un des attributs traditionnels du dieu grec, avec son arc et ses flèches : ainsi dans Les tamorphoses d’Apulée, Vénus appelle Éros flammis et sagittis armatus28. Plus oblique est la référence christique à la « couronne d’épines » et aux « clous de la Passion », qui ne correspond pas, malgré le sujet religieux, à l’« ange » que l’enfant aurait incarné dans les séances de pose. Cet écart se redouble d’une autre singularité : comment un enfant qui porte une couronne d’épines et les clous de la passion aurait-il pu représenter de manière crédible un Christ souffrant ? Robert Kopp en conclut que ce sujet religieux imaginaire ne convient pas à Manet et à son Christ aux outrages (ou Jésus insulté par les soldats), tableau conçu et exécuté en 1864-186529. L’hypothèse de Steve Murphy me semble en revanche discutable : selon lui, la source du tableau décrit par Baudelaire serait Le Christ mort et les anges (ou Le Christ aux anges), conçu vers novembre 1863 et présenté au Salon de 186430. Mais Alexandre ne fut pas le modèle des anges ou du Christ. Et Baudelaire aurait dû écrire ou retoucher « La Corde » peu avant sa première publication, le 7 février 1864, dans le Figaro, pour y faire figurer une telle allusion. Au contraire, les références aux poses et les accessoires symboliques peuvent difficilement s’accorder à la peinture de Manet et à son univers figuratif, autour de 1860. Que le peintre ait substitué au « petit bohémien » un « Amour mythologique » est à exclure. Par conséquent, ce passage a pu difficilement encourager ceux qui connaissaient Manet à déduire que celui-ci « était bien le peintre-narrateur »31, comme Steve Murphy le croit. James A. Hiddleston a, à juste titre, émis des réserves à ce propos: Baudelaire, selon lui, « would not have drawn the painter to himself in this way with the sole aim of denouncing his art »32. Selon Hiddleston, « La Corde » met en discussion, par une sorte de mise en abyme, « not so much the art of the painter as that of the poet himself »33.

20L’évocation des mutations du modèle, fort hétéroclites, a une portée générale, et concerne plus largement l’illusion artistique. On peut en comprendre l’enjeu en incorporant le passage dans le poème entier, au lieu de l’isoler au profit d’une chasse référentielle. Il ne s’agit pas seulement de dénoncer un éclectisme d’inspiration, mais de présenter un artiste dans son pouvoir, et dans sa maîtrise apparente, des mécanismes d’illusion et de métamorphose de la réalité. Peu identifiable à une physionomie artistique précise, le peintre, dans ce passage du poème, semble synthétiser une fantaisie conventionnelle qui se déploie entre le goût parnassien, religieux et populaire. Quant à la « physionomie ardente et espiègle » de l’enfant s’offrant au peintre, elle devient le relais des illusions qui, dans l’art, brouillent le réel et ses incessants simulacres.

21La question des rapports du peintre de « La Corde » avec Manet est compliquée par la dédicace qui apparaît dès la première publication du poème, dans le Figaro, le 7 février 1864 :

                                            LA CORDE.
                                                                             À Édouard Manet.
« Les illusions, – me disait mon ami, – sont aussi innombrables peut-être que les rapports des hommes entre eux, ou des hommes avec les choses. Et quand l’illusion disparaît, c’est-à-dire quand nous voyons l’être ou le fait, tel qu’il existe en dehors de nous, nous éprouvons un bizarre sentiment, compliqué moitié de regret pour le fantôme disparu, moitié de surprise agréable devant la nouveauté, devant le fait réel. S’il existe un phénomène évident, trivial, toujours semblable, et d’une nature à laquelle il soit impossible de se tromper, c’est l’amour maternel ; il est aussi difficile de supposer une mère sans amour maternel qu’une lumière sans chaleur ; n’est-il donc pas parfaitement légitime d’attribuer à l’amour maternel toutes les actions et les paroles d’une mère, relatives à son enfant ? Et cependant, écoutez cette petite histoire, où j’ai été singulièrement mystifié par l’illusion la plus naturelle. […] ».

22La dédicace à Manet aurait dû produire un certain effet, en encourageant l’identification entre le narrateur et le dédicataire. Mais est-ce si évident ? Les dédicaces de Baudelaire obéissent à une logique ambiguë. Dans les poèmes en prose, par exemple, la dédicace « à Franz Liszt », dans « Le Thyrse », et la dédicace « à Alfred Stevens », dans « Les Bons Chiens », appartiennent au registre de l’hommage, de l’offrande, de l’échange de dons. Rien de semblable dans « La Corde », où, au contraire, le nom de Manet dans la dédicace reste dans un rapport équivoque avec le personnage qui prend la parole dès le début du récit.

23Les éléments que nous avons analysés témoignent de l’impossibilité d’assimiler le peintre de « La Corde » à Manet, alors même que, dans le poème, la possibilité de cette identification est laissée en suspens, voire suggérée indirectement. La dédicace et l’épisode du suicide d’Alexandre invitent à interroger différemment la relation entre Baudelaire et Manet, qui ne se réduit pas au malentendu esthétique que la critique a souvent dénoncé. Certes, l’anecdote est garante d’un certain effet de réalité, de fait vécu. Mais le récit fictionnel se greffe aussitôt sur l’anecdote, sur l’autobiographie même, en créant par là une forme de poésie qui s’inscrit dans les équivoques identitaires et relationnelles. Le poème en prose se prête ainsi à la diffusion de microfictions, à un réseau pseudo-autobiographique qui ne cesse, à son tour, de brouiller les pistes de l’illusion narrative et de la référence au réel.

Annexe génétique – D’une version à l’autre

24Les problèmes que soulève cette dédicace à Manet se compliquent, puisqu’elle n’apparaît plus dans la deuxième pré-originale (le 1er novembre 1864), L’Artiste, revue qui s’adressait aux amateurs de beaux-arts et de belles-lettres. Voici l’incipit de la version de « La Corde » parue dans L’Artiste :

                                            LA CORDE.
« Les illusions, – me disait mon ami, – sont aussi innombrables peut-être que les rapports des hommes entre eux, ou des hommes avec les choses. Et quand l’illusion disparaît, c’est-à-dire quand nous voyons l’être ou le fait, tel qu’il existe en dehors de nous, nous éprouvons un bizarre sentiment, compliqué moitié de regret pour le fantôme disparu, moitié de surprise agréable devant la nouveauté, devant le fait réel. S’il existe un phénomène évident, trivial, toujours semblable, et d’une nature à laquelle il soit impossible de se tromper, c’est l’amour maternel ; il est aussi difficile de supposer une mère sans amour maternel qu’une lumière sans chaleur ; n’est-il donc pas parfaitement légitime d’attribuer à l’amour maternel toutes les actions et les paroles d’une mère, relatives à son enfant ? Et cependant écoutez cette petite histoire, où j’ai été singulièrement mystifié par l’illusion la plus naturelle. […] ».

  • 34 R. Kopp, « Note », dans Ch. Baudelaire, Petits poëmes en prose, éd. R. Kopp, cit., p. 305.

25Cette version de « La Corde » est considérée par la critique comme la plus faible, comme si Baudelaire avait atténué la violence de son texte. Robert Kopp écrit que « la version du poème, tel qu’il parut dans le Figaro, est de beaucoup supérieure à celle qui fut donnée par L’Artiste ». À ses yeux, « en explicitant la conclusion, Baudelaire en a édulcoré l’effet »34. Ce jugement de valeur sur les différentes versions se fonde notamment sur l’ajout du dernier paragraphe, censé affaiblir la révélation de la « lueur » du peintre et l’effet choquant que cette découverte produit. Voici les variantes du texte paru dans L’Artiste, par rapport à la version du Figaro :

26Les variantes concernent, en bonne partie, la ponctuation : la version de L’Artiste fait l’économie de quelques virgules. Les seules interventions de Baudelaire dont on pourrait penser qu’elles atténuent la force du poème, sauf l’ajout final, sont le changement de « taudis paternel » en « domicile paternel », la suppression de l’allusion aux « crises singulières de tristesse précoce » du « petit bonhomme » et l’abandon de l’adjectif « béatifique », appliqué à la corde. En revanche, le passage de « suprême et sombre consolation » à « suprême et terrible consolation » semble trahir un souci opposé. Si Baudelaire avait été invité à se conformer à une volonté éditoriale extérieure, se serait-il limité à modifier trois passages, face à un texte qui met en scène la pendaison d’un enfant ?

27Quant au paragraphe final, il reste dans la logique du texte. Le calcul que fait la « pauvre mère », ainsi que l’allusion à un « soulagement » matériel, sont le pendant des descriptions qui caractérisent le poème en prose, comme celle qui concerne le « paquet de lettres » que le peintre a gardé, qui effacent l’événement dans la minutie documentaire. Ce dernier paragraphe renchérirait alors sur l’alternance déroutante, au sein de « La Corde », entre illusion et fait réel. Le commerce aussi, dans sa nature satanique, fait irruption dans l’économie du récit, se révélant au-delà de ce qu’on croirait « parfaitement légitime », à savoir « attribuer à l’amour maternel toutes les actions et les paroles d’une mère, relatives à son enfant ». Dans ce théâtre de la cruauté, où veille la perspective d’un commerce lucratif, s’affiche la réalité d’une « lumière sans chaleur ». Et l’insistance sur la réalité de la consolation (« un réel, un efficace soulagement ») poursuit efficacement cette logique.

28On ne peut affirmer que Baudelaire a affaibli son poème dans la version de L’Artiste. L’ajout final supplée à la suppression de la dédicace à Manet, prolongeant l’intervention du poète en ouverture (« me disait mon ami »). Deux autres variantes, dans L’Artiste remédient à une redondance (« il avait encore commis un nouveau larcin » > « il avait encore commis un larcin ») et à une formulation confuse (« sous un apparent badinage la sincérité de la demande ; » > « sous le badinage le sérieux de la demande, »). Quant à la troisième publication pré-originale de « La Corde », dans la livraison du 12 juin 1866 de L’Événement, elle fut faite à l’insu de Baudelaire, qui, frappé d’hémiplégie depuis le 30 mars, n’était plus en état de veiller à ses publications. Le poème est introduit par un avertissement intitulé « Charles Baudelaire », d’Alphonse Duchesne, ancien collaborateur du Figaro. La republication de « La Corde », dans L’Événement, appartient à cette prolifération éditoriale abusive de poèmes en prose de Baudelaire qui caractérise les dernières semaines de sa vie.

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Notes

1 Plusieurs études ont été consacrées aux relations entre Baudelaire et Manet, dont : P. Valéry, Triomphe de Manet [1932], dans Id., Pièces sur l’art, Paris, Gallimard, 1946, p. 161-175, rééd. dans Id., Œuvres, éd. J. Hytier, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1960, t. II, p. 1326-1333 ; Ph. Rebeyrol, « Baudelaire et Manet », dans Les Temps modernes, 48, octobre 1949, p. 707-725 ; A. Ferran, L’Esthétique de Baudelaire [1933], Paris, Nizet, 1968, p. 480-487 ; G. Bataille, Manet [1955], dans Id., Œuvres complètes, Paris, Gallimard, 1979, t. IX, p. 103-167 ; P. Georgel, « Les transformations de la peinture vers 1848, 1855, 1863 », dans La Revue de l’art, 27, 1975, p. 62-77 ; H. Lecaye, Le Secret de Baudelaire, suivi de Baudelaire et la modernité et de Baudelaire et Manet, Paris, Jean-Michel Place, 1991 ; S. Guégan, « Petites notes sur Manet (3). Manet versus Baudelaire », dans La Tribune de l’art, URL : https://www.latribunedelart.com/petites-notes-sur-manet-3-manet-versus-baudelaire, consulté le 04/10/2023 ; W. Drost, « “Vous n’êtes que le premier dans la décrépitude de votre art”. Baudelaire et Gautier, Zola et Mallarmé devant la modernité de Manet », dans Romanistische Zeitschrift für Literaturgeschichte, XXXVIII, 1-2, 2014, p. 93-114 ; Id., « L’image immaculée de Baudelaire champion de la modernité », dans Romanistische Zeitschrift für Literaturgeschichte, XXXIX, 3-4, 2015, p. 357-365 ; A. Schellino, « “Je suis un des premiers qui l’ont compris”. Sur la prétendue “rencontre manquée” de Baudelaire et Manet », dans Romanistische Zeitschrift für Literaturgeschichte, cit., p. 347-355 ; Id., La Pensée de la décadence de Baudelaire à Nietzsche, Paris, Classiques Garnier, 2020.

2 Ch. Baudelaire, Correspondance, éd. C. Pichois et J. Ziegler, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1993-1999, t. II, p. 497. Dorénavant CPl I et CPl II suivi du numéro de page.

3 A. Proust, « Édouard Manet. Souvenirs », dans La Revue Blanche, XII, février-mai 1897, p. 135, rééd. dans Id., Édouard Manet. Souvenirs, Caen, L’Échoppe, 1988, p. 13-14.

4 Ibid., p. 23-25.

5 Ch. Baudelaire, Œuvres complètes, éd. C. Pichois, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1975, t. II, p. 692. Dorénavant OC I et OC II suivi du numéro de page.

6 Ibid., p. 693.

7 A. Proust, Édouard Manet. Souvenirs, cit., p. 20.

8 É. Moreau-Nélaton, Manet, graveur et lithographe, Paris, Loys Delteil-Éditions du Peintre-Graveur illustré, 1906, n. 10.

9 Voir le catalogue Manet 1832-1883, Paris, Éditions de la Réunion des musées nationaux, 1983, p. 61-62.

10 A. Tabarant, Manet et ses œuvres, Paris, Gallimard, 1947, p. 25.

11 A. Proust, Édouard Manet. Souvenirs, cit., p. 25-26.

12 Ibidem. Ces allusions à l’épisode se trouvent dans la première version de l’essai de Proust, publiée en 1897, tandis qu’il ne sera plus question de L’Enfant aux cerises dans l’édition en volume de 1913.

13 Voir É. Darragon, Manet, Paris, Citadelles, « Les Phares », 1991, p. 48.

14 É. Moreau-Nélaton, op. cit., p. 10 ; voir aussi Id., Manet raconté par lui-même, Paris, Henri Laurens, 1926, t. I, p. 38, note 1.

15 É. Moreau-Nélaton, Manet, graveur et lithographe, cit., p. 10.

16 Ibidem.

17 A. Chatté, « Notes sur Manet », dans Le Journal des curieux, 10 mars 1907, p. 10 ; cité dans P. Courthion et P. Cailler, Manet raconté par lui-même et par ses amis, Genève, Pierre Cailler, 1953, t. II, p. 77-78 ; et dans S. Murphy, « Haunting Memories. Inquest and Exorcism in Baudelaire’s “La Corde” », dans Dalhousie French Studies, XXX, printemps 1995, p. 65-91 ; tr. fr. S. Murphy, « Autoportrait avec cadavre et mère. La Corde insensible », dans Id., Logiques du dernier Baudelaire. Lectures du Spleen de Paris, Paris, Champion, « Romantisme et modernité », 2003, p. 551-614, p. 565-566.

18 Voir M. Pleynet, « Dans les ateliers de Manet », dans L’Infini, 117, hiver 2011, p. 89-106 ; et J. Wilson-Bareau, « Édouard Manet dans ses ateliers », dans Catalogue de l’exposition Manet et le Paris moderne, Tokyo, 2010, p. 304-312 ; rééd. dans Ironie, 161, janvier-février 2012, URL : https://interrogationcritiqueludique.blogspot.com/2012/10/ironie-n161-janvierfevrier-2012.html, consulté le 04/10/2023.

19 Notes de Léon Leenhoff, conservées dans le fonds Moreau-Nélaton du cabinet des Estampes de la BnF ; citées par J. Wilson-Bareau, « Édouard Manet dans ses ateliers », art. cit.

20 Voir Ch. Baudelaire, Le Spleen de Paris. (Petits poèmes en prose), éd. J.-L. Steinmetz, Paris, Le Livre de poche, 2003, p. 154 ; Id., Petits poëmes en prose, éd. R. Kopp, Paris, José Corti, 1969, p. 305 ; Id., OC I, p. 1339. Sur « La Corde », voir aussi : J. Thélot, Baudelaire : violence et poésie, Paris, Gallimard, 1993, p. 19-38 ; D. Sanyal, « The Tie That Binds. Violent Commerce in Baudelaire’s “La Corde” », dans Yale French Studies, 101, 2001, p. 132-149 ; C. Cagnat-Debœuf, « De l’art de la mystification dans Le Spleen de Paris. Une lecture de “La Corde” », dans Romantisme, 157, juillet-septembre 2012, p. 101-115.

21 Ch. Baudelaire, Le Spleen de Paris, éd. A. Cervoni et A. Schellino, Paris, Flammarion, « GF », 2017, p. 135.

22 OC I, p. 50.

23 OC II, p. 719.

24 Id., Le Spleen de Paris, éd. A. Cervoni et A. Schellino, cit., p. 135.

25 Ibid., p. 136.

26 Ibid., p. 135.

27 Ibidem.

28 Pour un point de vue différent du nôtre, voir S. Murphy, Logiques du dernier Baudelaire, cit., p. 568-569.

29 Ch. Baudelaire, Petits poëmes en prose, éd. R. Kopp, cit., p. 305.

30 S. Murphy, Logiques du dernier Baudelaire, cit., p. 569.

31 Ibidem.

32 J. A. Hiddleston, « Baudelaire, Manet, and Modernity », dans Modern Language Review, LXXXVII, 3, juillet 1992, p. 573.

33 Ibidem.

34 R. Kopp, « Note », dans Ch. Baudelaire, Petits poëmes en prose, éd. R. Kopp, cit., p. 305.

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Table des illustrations

Légende É. Manet, Le Garçon et le chien, Alfred Cadart, septembre 1862. Paris, Bibliothèque nationale de France, Département des estampes.
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Légende É. Manet, Le Gamin et le chien, 1860-1861 ?. Catalogue de la vente Christie’s Impressionist and Modern Art Works on Paper, New York, mai 2012, lot 101 ; D. Rouart, D. Wildenstein, Édouard Manet. Catalogue raisonné, Paris-Lausanne, Bibliothèque des arts, 1975, t. II, p. 455.
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Pour citer cet article

Référence électronique

Andrea Schellino, « Baudelaire, Manet et les illusions de « La Corde » »Revue italienne d’études françaises [En ligne], 13 | 2023, mis en ligne le 15 novembre 2023, consulté le 10 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rief/11724 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/rief.11724

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Andrea Schellino

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