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Le Roman de formation au féminin

Du roman sentimental au « roman identitaire » au féminin. Réflexions sur la redéfinition d’un genre au Tournant des Lumières

From the sentimental novel to the female “identity novel”. Reflections on the redefinition of a genre in the late Enlightenment
David Matteini

Résumés

Cet article porte sur l’analyse de trois romans du Tournant des Lumières ayant pour objet la vie d’une femme : Adèle de Sénange d’Adélaïde de Souza (1794), La femme auteur de Félicité de Genlis (1802), et Ourika de Claire de Duras (1824). Quoique différents à plusieurs égards, il s’agit de trois textes qui nous permettent de réexaminer la centralité de l’écriture féminine dans le creuset littéraire de l’époque et de questionner en même temps les ressorts psychologiques liés à la floraison du genre romanesque à la période postrévolutionnaire en France, notamment en ce qui concerne la fonction formative et identitaire de l’écriture littéraire. Chacune à sa façon, ces écrivaines témoignent d’une nouvelle relation entre l’histoire, la littérature et le rôle social de la femme qui émerge à l’aube de la saison du réalisme.

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Texte intégral

  • 1 Pour un aperçu récent sur ce sujet, voir M. Reid (dir.), Femmes et littérature. Une histoire cultur (...)

1L’intention de cet article sera de mettre en évidence les enjeux littéraires, culturels et politiques propres à la redéfinition moderne du genre romanesque « au féminin » entre les XVIIIe et XIXe siècles en France1. Pour ce faire, après avoir tenté de comprendre dans quelle mesure certains modèles étrangers ont pesé sur cette évolution, nous nous pencherons sur trois textes qui, bien qu’assez connus des spécialistes, sont généralement peu considérés, voire ignorés, dans les histoires de la littérature : Adèle de Sénange d’Adélaïde de Souza de 1794, La femme auteur de Félicité de Genlis de 1802, et Ourika de Claire de Duras de 1824. Quoique différents sous plusieurs aspects, ces trois textes nous permettent de questionner les ressorts psycho-cognitifs liés à la floraison du genre romanesque à la période postrévolutionnaire en France, et notamment la fonction formatrice et identitaire de l’écriture littéraire. En effet, chacune à sa façon, ces écrivaines témoignent d’une nouvelle relation entre l’histoire, la littérature et le rôle social de la femme.

2Or, afin d’appréhender la question de la fonction formative chez ces auteures, il semble nécessaire de nous interroger avant tout sur la notion de « roman de formation au féminin » et sur la possibilité d’analyser ce corpus avec les mêmes instruments que ceux de la critique des styles et des thèmes du « roman de formation au masculin ». Nous commencerons par une argumentation préliminaire d’un point de vue historique et comparatif, en nous plongeant dans le réseau culturel européen de la seconde moitié du XVIIIe siècle, contexte dans lequel le genre « roman de formation » a trouvé son point culminant, ou du moins, son moment le plus « classique ».

  • 2 Voir F. Moretti, « Stile SRL. Riflessioni su settemila titoli », dans Id., A una certa distanza. Le (...)
  • 3 Nous renvoyons à des écrits majeurs qui, à partir de Hegel, ont abordé la relation entre la formati (...)

3Comme l’a constaté Franco Moretti dans l’une de ses études quantitatives sur le roman de la première modernité, dans la période qui va de la veille de la Révolution française à la Restauration, le roman au féminin a connu un très grand essor2. Les graphiques tracés par Moretti montrent justement qu’à partir des années quatre-vingt-dix du XVIIIe siècle le nombre de romans publiés dont le titre est composé uniquement de prénoms féminins dépasse largement ceux dont le héros est un homme. Ces données sont d’autant plus surprenantes si l’on considère qu’à la même époque, notamment dans les contextes germanophones, va se développer un modèle littéraire à succès qui trouve son pivot diégétique moins dans le récit de l’existence des femmes que dans celui de l’histoire d’une personne qui est presque toujours « un héros ». Nous faisons évidemment référence au Bildungsroman, un genre romanesque tout à fait masculin, qui, dans la tradition historiographique à venir, allait s’imposer comme la référence paradigmatique. D’ailleurs, rappelons que d’après de nombreux penseurs tels que Wilhelm Dilthey, Hegel, Lukács, ou encore Bakhtine, le Bildungsroman allemand avait su traduire sur le plan littéraire beaucoup de grands thèmes du siècle des Lumières, à savoir le problème de la liberté de l’individu et de sa singularité, ou bien encore la place que chacun est appelé à occuper au sein de la société3.

4Lorsque l’on tente d’appliquer ce schéma à la plupart des romans français de la seconde moitié du siècle ayant pour objet la vie d’une femme, on se rend vite compte que ce modèle de formation ne lui correspond pas du tout, étant donné que le héros du roman de formation classique parvient à affirmer sa vocation mondaine, politique et artistique, précisément parce qu’il s’agit d’un homme. Autrement dit, tout ce qu’il fait, tout ce qu’il pense est rendu possible par son statut social, bien différent de celui des femmes. Ces aspects genrés se reflètent également dans la codification des stylèmes littéraires du Tournant des Lumières. Si le jeune homme a la possibilité de se former, de se perfectionner en voyageant dans un espace ouvert et mobile où les occasions d’apprentissage sont presque inépuisables (le cadre gnoséologique est évidemment celui du Grand Tour), la marge de manœuvre des héroïnes romanesques reste en revanche fort limitée. Et même si certains récits permettent aux femmes de franchir les murs de l’alcôve domestique, ils ne le font que pour les placer dans un contexte narratif bien loin du voyage de formation, un contexte qui est uniquement celui de la transgression sociale impliquant le plus souvent l’adultère. Tout processus d’apprentissage est alors interdit aux jeunes filles, impuissantes, reléguées à l’espace clos de la chambre, à la passivité sociale : la seule formation sociale accordée est une évolution absolument privée, nullement extraordinaire, qui ne s’accomplit que dans le mariage et dans la maternité, ou, le cas échéant, dans la mort et la folie. Dès que la dimension odéporique du récit fait défaut, la formation romanesque classique tombe également. En somme, il est clair que, lorsque l’on observe la vie des femmes dans la plupart des romans des Lumières, il n’est pas possible de parler de « formation » dans le sens linéaire de Bildung qui nous a été transmis par la tradition littéraire.

  • 4 Voir à ce propos le chapitre « Les influences étrangères » dans H. Coulet, Le Roman jusqu’à la Révo (...)

5Dès lors, il faut chercher ailleurs les racines de la tradition romanesque de la vie des femmes, moins dans le succès du roman de formation allemand que dans la réception en France du roman sentimental anglais. D’ailleurs, l’influence de celui-ci sur la littérature française dans la seconde moitié du XVIIIe siècle a été indéniable. Du célèbre Éloge de Richardson (1766) de Diderot au compte rendu du roman de Frances Burney Cecilia rédigé par Laclos dans le Mercure de France (1784), de nombreux écrits de l’époque témoignent de la centralité du genre anglais pour le renouvellement du roman au tournant du siècle en France, tant sur le plan stylistique que sur celui de ses enjeux moraux4.

  • 5 Sur le rapport entre le style « sérieux » chez Auerbach et la littérature française, voir A. Zagamé (...)
  • 6 Sur la spécificité masculine du genre sentimental, voir le chapitre « Three sentimental writers » d (...)
  • 7 Voir G. Mazzacurati, Il fantasma di Yorick. Laurence Sterne e il romanzo sentimentale, Napoli, Ligu (...)

6En se penchant pour la première fois sur des sujets tout à fait ordinaires dans un style qu’Auerbach juge « sérieux »5, cette rénovation ne se fonde pas seulement sur l’adoption de nouveaux outils rhétoriques, mais aussi sur une redéfinition globale du rôle de la littérature. Et s’il est bien connu que le roman sentimental n’est pas spécifiquement féminin6, ce n’est pas un hasard si la réflexion liée aux vertus morales menée dans ces écrits passe volontiers par la description des bouleversements psychologiques de jeunes femmes. Partagées entre le respect d’une norme sociale qui leur a été imposée et le désir de se rebeller contre elle, les personnages féminins de ces romans entreprennent un voyage intérieur circulaire, un voyage qui, le plus souvent, se termine soit par une prise de conscience qui les ramène, repenties, au point de départ de leur tourment, soit par la mort, la folie ou le couvent. Le rôle du personnage féminin n’est pas transformé. Ainsi, le raffinement de la sensibilité qui a lieu grâce à l’exhibition des sentiments face aux contraintes de la fidélité conjugale permet aux filles larmoyantes de purger leur âme afin de revenir à la conscience du rôle qui leur convient le mieux dans le monde. D’un point de vue théorico-littéraire, comme l’a remarqué Giancarlo Mazzacurati, faute de toute dimension historique, on ne peut donc pas parler d’une formation en termes de changement ontologique comme c’était le cas du roman de formation allemand, mais plutôt d’une formation comme réintégration sociale des jeunes femmes par leur conformité à un code de conduite préétabli7. C’est la raison pour laquelle l’enseignement moral de ces romans porte justement sur une réflexion qui récompense la vertu et punit le vice.

  • 8 Tel est le cas, par exemple, de La Nouvelle Héloïse et de Paul et Virginie.
  • 9 Sur le rapport entre littérature et projets pédagogiques dans la seconde moitié du XVIIIe siècle en (...)
  • 10 Sur ce point, voir F. Bessire et M. Reid (dir.), Madame de Genlis. Littérature et éducation, Mont-S (...)

7Il est intéressant de constater qu’en France, beaucoup plus qu’en Angleterre, ces intrigues sentimentales se terminent plus fréquemment par la mort des personnages féminins8. Il y a, d’une part, sur un plan stylistique, une tendance à susciter l’empathie du lecteur par des stratégies narratives ; mais sur un plan plus anthropologique, on peut y voir le signe de l’impossibilité des femmes à concilier la liberté individuelle avec une pleine adhésion à la norme sociale. C’est justement dans cette perspective que Rousseau jouera un rôle déterminant dans l’évolution du genre en France. Dans la Nouvelle Héloïse de 1761 le concept de sensibilité est problématisé et poussé à l’extrême dans le cadre d’une critique des mœurs du temps symbolisée par la mort de Julie à la fin du roman. La tension entre la passion des amants Julie et Saint-Preux et les impératifs sociaux, la possibilité de l’établissement d’une société fondée sur l’éthique de la liberté individuelle, le bonheur aussi bien que la religion et l’athéisme, sont autant de thèmes que Rousseau tente d’insérer dans un projet général d’« éducation négative »9 visant à rétablir la primauté des « passions douces » à l’intérieur des rapports entre les êtres. La rhétorique sentimentale préconisée par Rousseau dans son roman par lettres aussi bien que dans le traité pédagogique de l’Émile se fait ainsi porteuse de valeurs morales qui annoncent une nouvelle considération du rôle du sentiment amoureux dans la vie en société et qui étayent un imaginaire féminin bien différent par rapport à la tradition précédente10.

  • 11 Au sujet de la « querelle des femmes » au siècle des Lumières, voir E. Viennot (dir.), Revisiter la (...)

8C’est vers la fin du siècle que ces fêlures commencent à être visibles, surtout dans le contexte français. À partir des années 1780 et 1790, des textes apparaissent qui, écrits pour la plupart précisément par des femmes, contestent et minent de plus en plus le modèle du sentimentalisme classique et de sa composante morale. Dans ces nouveaux romans, c’est l’incapacité des filles à parvenir à une formation sociale qui devient l’occasion de se former autrement, d’une manière plus subtile et complexe qu’auparavant. Par le biais des outils diégétiques du roman sentimental classique lui-même – la forme épistolaire, le style plaintif et décousu, l’intrigue du triangle amoureux – ces récits commencent à éroder le genre de l’intérieur, en engendrant une réflexion métanarrative sur le rôle de la femme dans la société. Il s’agit d’un véritable processus de déconstruction qui puise ses arguments dans les nombreux débats qui bouleversaient la société française depuis les Lumières tardives. C’est notamment la querelle des femmes de la dernière décennie du siècle qui a tracé de nouvelles voies pour la réévaluation de la position civique des femmes11. Dans le sillage de femmes de lettres comme Louise d’Épinay, Marie-Anne Robert, Leprince de Beaumont, des questions telles que la valeur de la vertu féminine, l’éducation des femmes et leur accès au monde des Lettres deviennent les points de discussion majeurs autour desquels s’articulent les tentatives de réévaluer l’image de la femme qui marquent les décennies suivantes.

9S’il est certain que ces romans s’insèrent dans la large tradition sentimentale, il apparaît donc qu’il est possible d’émettre l’hypothèse d’une spécificité française, de Rousseau à la querelle des femmes, qui se charge d’illustrer de façon inédite la possibilité de nouvelles revendications identitaires par les voix féminines des auteures et des personnages mêmes. Dans les romans d’Adélaïde de Souza et de Félicité de Genlis, et encore plus chez Claire de Duras, la réflexion sur la formation des femmes sort ainsi de l’économie de l’adaptation sociale pour se pencher au contraire sur la quête d’une autonomie intellectuelle face aux perturbations historiques. De même, chez ces auteures la correspondance entre le sujet raconté et l’idéologie sous-jacente s’estompe, de sorte que la fonction socio-formative du sentiment qui avait caractérisé les romans des Lumières est désormais ambiguë. La méfiance à l’égard du sentimentalisme devient de plus en plus marquée et l’évolution-formation individuelle se teint d’une nuance bien différente. En effet, ces romans ne racontent plus les vicissitudes que la femme doit affronter pour s’intégrer dans une société hiérarchisée, mais ils signalent les efforts qu’elle déploie pour affirmer son individualité dans une dimension publique inédite. Le malheur devient ainsi une occasion de remettre en question d’anciennes valeurs.

10Publié à Londres pendant l’exil de l’auteure, et admiré par ses contemporains dès sa parution en 1794, Adèle de Sénange est le premier roman d’Adélaïde de Souza. L’intrigue du roman, fort autobiographique, suit la plus classique des situations sentimentales. C’est l’histoire d’une jeune fille qui, ainsi que son auteure, a passé sa jeunesse au couvent et qui en sort suite à un mariage avec un homme beaucoup plus âgé qu’elle. Comme on peut s’y attendre, la femme tombe amoureuse d’un jeune Lord très proche de son vieux mari, ce qui engendre une longue série de péripéties et de malentendus. Après la mort du vieil homme, Adèle peut enfin épouser le jeune Lord, non sans s’être heurtée aux volontés de sa mère qui voulait la marier avec un autre homme. Aux yeux des contemporains de Souza, l’intrigue avait bien évidemment tous les caractères de la sensibilité amoureuse à la mode : le roman finit sur Adèle ayant trouvé le bonheur dans son amour pour Lord Sydenham. Néanmoins, plusieurs repères textuels révèlent une certaine prise de distance de l’auteure par rapport à la tradition sentimentale d’influence anglaise qui semble gouverner le récit.

11Tout d’abord, il faut considérer que, dans ce roman épistolaire, seul le jeune Lord tient la plume. Ce faisant, Souza fait coïncider l’expression des sentiments des personnages avec un point de vue univoque et masculin qui souligne la nature essentiellement égoïste et possessive de toute sorte de passion amoureuse. La lettre qui clôt le roman est très significative. En effet, contrairement aux quarante-neuf très longues lettres qui la précèdent, la dernière missive censée célébrer le mariage du couple est étrangement laconique, dans un style froid, rendu par la parataxe, des phrases courtes, des oppositions frappantes.

  • 12 A. Filleul de Souza, Adèle de Sénange, ou Lettres de Lord Sydenham, Hambourg, Hoffmann, 1796, t. II (...)

                                                LETTRE L
                                                                                      Paris, ce I février.
Je viens de l’autel. Adèle est à moi ; je lui appartiens. Elle a donné sa fortune à son jeune frère. Madame de Joyeuse est contente, chérit sa fille ; elle m’aimera. M. de Mortagne est oublié de tous. Jouissez du bonheur de votre ami.12

12Le fait qu’Adèle ne soit que l’objet de l’amour-propre du Lord, comme semble le suggérer l’auteure, est réitéré à plusieurs reprises tout au long du récit. Par exemple, au moment où le Lord décide d’abandonner sa passion pour la jeune fille, il est hanté par la vision insupportable de celle-ci mariée à un autre homme.

  • 13 Ibid., p. 168-169.

Je n’avais pas fait deux lieues que l’envie de savoir ce que deviendrait Adèle me tourmenta. D’ailleurs, je voulais bien l’abandonner, mais certes je ne consentais pas à la céder à Monsieur de Mortagne, et j’étais déterminé à lui arracher la vie plutôt que de la lui voir épouser. Dans cette agitation je revins ici.13

13La sentimentalité larmoyante dont fait preuve le Lord est alors régulièrement sapée par des passages semblables, nous montrant la volonté de l’auteure d’accentuer la passivité psychologique des femmes face aux contraintes du contrat de mariage. Tiraillée entre l’amour familial et l’amour pour ses maris, la voix d’Adèle s’éteint progressivement, laissant au lecteur un sentiment d’incertitude finale sur les prétendus buts moraux du récit.

  • 14 Voir M.-F. Silver, « Adèle de Sénange (1794) et sa réception », dans Lumen, 11, 1995, p. 119-126.
  • 15 Voir A. Filleul de Souza, op. cit., t. II, p. 181-208.

14Par ailleurs, si l’on lit l’appendice du roman, on y trouve, sous la forme d’un conte de fée, un reproche très nuancé aux femmes qui misent tout sur l’amour pour un homme. Au début de la narration, une amie de Lord Sydenham se moque de celui-ci en lui racontant un conte qui, comme nous en informe l’auteure dans une note, sera placé à la fin du texte. Comme on l’a remarqué14, le choix de situer ce conte au bout du roman correspondrait à la volonté de Madame de Souza d’établir une confrontation entre une lecture uniquement sentimentale d’Adèle et une lecture qui en revanche puisse entraîner une critique de la valorisation romantique de l’amour conjugal par une transposition satirique du récit. En effet, l’expression du sentiment amoureux qui impressionna tant les contemporains de Madame de Souza est tournée en dérision par celle-ci justement au moyen de la fable d’Aglaé, une jeune fille qui apprend à se dépouiller de tout désir de plaire aux hommes en faveur d’une existence indépendante vouée à l’étude15. De tels repères paratextuels rendent encore plus évident le fait que l’ensemble romanesque d’Adèle de Sénange, au lieu d’être lu comme une simple intrigue à la mode, devrait être interprété plutôt comme une subtile parodie de l’éthique traditionnelle du mariage. L’amour qu’Adèle voue à Lord Sydenham, loin de la conduire au bonheur, pourrait au contraire la détruire. C’est un leitmotiv, qui, repris au fil des années dans nombre de romans au féminin, va de pair avec un sombre sentiment de l’histoire qui était en train de s’imposer dans les esprits de la première génération romantique.

  • 16 Voir, à ce sujet, S. Lorusso (dir.), Violence des sentiments et violence de l’histoire. Le roman fr (...)
  • 17 A. Filleul de Souza, op. cit., t. I, p. XXI-XXII.

15De fait, le renversement négatif des liens moraux et sentimentaux qui a lieu dans ces romans serait révélateur d’un fort sentiment d’inquiétude face aux bouleversements de la période, de sorte que l’intériorité perturbée de ces héroïnes romanesques, leur incapacité à parler et à agir activement, trahirait une véritable angoisse historique ; le refuge dans un passé tout sentimental ou dans l’alcôve domestique qui s’ensuit ne laisse place à aucune possibilité de maturation positive pour la grande majorité de ces tristes personnages16. Or, afin de mieux saisir ces points de réflexion, il faut attirer l’attention davantage sur les aspects métanarratifs de ces romans, à savoir sur la fonction en quelque sorte cathartique dont fait preuve l’engagement littéraire de leurs auteures. D’ailleurs, bien avant les écrits de Madame de Staël sur la littérature, c’est Madame de Souza elle-même qui revendique la valeur de ce genre d’écriture intime pour le développement intérieur du lecteur comme de l’écrivain face aux crises de l’histoire. Dans l’« Avant-Propos » d’Adèle de Sénange, elle arrive à déclarer que « cet essai a été commencé dans un temps qui semblait imposer à une femme, à une mère, le besoin de s’éloigner de tout ce qui était réel, de ne guère réfléchir, et même d’écarter la prévoyance : et il a été achevé dans les intervalles d’un dépérissement lent et douloureux »17. L’écriture littéraire devient ainsi une véritable quête allégorique d’une identité perdue, une opération visant à refouler toute instance sociale et historique contraignante. Bien que de manière différente, les intentions qui sous-tendent les courts romans La Femme Auteur par Félicité de Genlis et Ourika par Claire de Duras visent justement à restaurer l’autorité de la réflexion des femmes sur leur fonction civique et sur les préjugés sociaux qui pèsent sur elles.

  • 18 Madame de Genlis, La Femme auteur [1802], éd. M. Reid, Paris, Gallimard, 2007, p. 28.

16La Femme auteur de Madame de Genlis de 1802 questionne le statut des femmes de lettres au Tournant des Lumières, en représentant sous une forme romanesque les débats sur la possibilité pour le genre féminin de s’émanciper des jougs familiaux par le biais de l’activité littéraire. Dans le cadre d’une intrigue sentimentale classique, Genlis met en scène le choc entre le désir du personnage principal, Natalie, de mener une carrière littéraire, et la vision patriarcale des devoirs de la femme incarnée par Dorothée, raisonnable et travailleuse, aînée de Natalie, et Germeuil, l’amant de celle-ci. Là aussi, l’utilisation du bagage de la rhétorique sentimentale du XVIIIe siècle permet au narrateur de dévoiler à la fois les conflits des personnages principaux et de signaler la tyrannie de l’opinion publique sur la conduite des femmes, sans cesse observée, commentée, admirée ou blâmée. Ainsi, les succès littéraires remportés par Natalie deviennent l’occasion de dévoiler les opinions de la société française de l’époque de Napoléon sur les femmes de lettres. D’une part, sa sœur Dorothée la met en garde car, d’après elle, « la gloire pour nous [les femmes], c’est le bonheur ; les épouses et les mères heureuses, voilà les véritables héroïnes »18 ; d’autre part, Germeuil couvre son amante de honte, allant même, vers la fin du récit, jusqu’à la renier :

  • 19 Ibid., p. 77-78.

Natalie attendait Germeuil avec la plus vive impatience ; elle pensait que la gloire qu’elle venait d’acquérir augmenterait son amour ; elle se trompait. […] Elle devint pour lui une autre femme, et elle y perdit. Ce n’était plus pour Germeuil cette Natalie à la fois ingénue et piquante, dont les saillies l’amusaient, et dont il aimait tant le naturel et la gaieté. […] Il lui supposait un orgueil qu’elle n’eut jamais.19

  • 20 Ibid., p. 78.

« Tout le monde à présent vous connaît comme moi ! N’est-ce pas une sorte d’infidélité dont votre amant aurait le droit de se plaindre ? Quoi ! Ces sentiments si tendres, si délicats, dont l’expression faisait mon bonheur dans vos lettres, je les retrouve dans vos ouvrages ! Ces phrases touchantes, inspirées par l’amour, m’appartenaient ; vous me les reprenez pour les publier et pour en faire des fictions !... ».20

  • 21 Voir M. Reid, « Présentation », dans Madame de Genlis, op. cit., p. 7-13.

17De même que dans le cas d’Adélaïde de Souza, Martine Reid a signalé à juste titre la nature fortement autobiographique de la Femme auteur21 : souvent critiquée pour ses publications, Genlis partage avec son double romanesque une même vision de la littérature. Dans une société, celle du Premier Empire, où toute prise de parole qui ne soit pas d’ordre moral ou religieux est interdite aux femmes, c’est la littérature même qui devient alors le moyen de ses propres revendications :

  • 22 Madame de Genlis, op. cit., p. 66-67.

Natalie se remit à écrire et à composer avec plus de plaisir que jamais. […] Il est beaucoup plus doux, pour le cœur et pour l’esprit, de faire un roman, que d’écrire sa propre histoire. […] En composant un roman, on peut, sans avoir le vain projet de faire son portrait, se peindre vaguement de mille manières, et s’embellir sans tromper le lecteur, auquel on n’a promis qu’une fable. Il est plus doux encore de peindre les objets qu’on aime, dans ce temps heureux de la vie où l’on voit tout ce qui intéresse avec l’illusion de la confiance aveugle et de la sensibilité ! […] On aime encore à retracer les fictions qui ont séduit, on n’imagine pas les créer, on croit les reproduire.22

  • 23 Nous faisons référence à l’expression de l’« école du désenchantement » inventée par Paul Bénichou. (...)

18Des passages narratifs tels que ceux-ci dévoilent une véritable théorie de l’écriture romanesque au féminin, que Madame de Staël venait de traiter dans son De la littérature de 1800, et que Félicité de Genlis même, plus tard, allait avancer dans son De l’influence des femmes sur la littérature française de 1811. Hors des conventions sociales du mariage, l’écriture devient ainsi le seul moyen octroyé aux femmes pour s’imposer dans la sphère publique. En plaçant des femmes malheureuses et méprisées au centre du récit, ces écrivaines font face à une condition précaire répandue et se soucient en même temps de se revêtir d’une nouvelle identité intellectuelle qui puisse surmonter l’ancienne figure galante de la femme de lettres salonnière des Lumières. Désormais, le déploiement de la sentimentalité des personnages féminins n’est plus le reflet d’une crise des valeurs à guérir au moyen du récit moral, mais devient au contraire le signe d’un questionnement plus profond sur le sentiment de désenchantement qui a affecté toute une époque23.

19Dans son roman le plus célèbre, Ourika, de 1824, Claire de Duras transpose, par la technique stylistique de l’étrangisation, ses douloureuses expériences de vie dans l’histoire d’une jeune fille sénégalaise rejetée par la société française à cause de son origine et de sa couleur de peau. Bien qu’élevée avec amour par sa famille adoptive, Ourika se rend vite compte de son statut de marginale et de son destin tragique. La narration à la première personne permet à Duras de sonder de l’intérieur la douleur de la jeune protagoniste, faisant partager au lecteur les effets sur l’âme humaine des préjugés de la société bien-pensante de la Restauration. Conformément au schéma diégétique circulaire du récit sentimental classique, la dramatique prise de conscience existentielle d’Ourika se déroule également à travers des étapes bien définies jusqu’à la mort. Après une jeunesse heureuse chez la noble Madame de B., l’agnition tragique d’Ourika se produit lorsqu’elle surprend une conversation entre sa bienfaitrice et la Marquise de …, qui s’exprime ainsi : « La philosophie nous place au-dessus des maux de la fortune, mais elle ne peut rien contre les maux qui viennent d’avoir brisé l’ordre de la nature. Ourika n’a pas rempli sa destinée : elle s’est placée dans la société sans sa permission ; la société se vengera ». Ce à quoi réplique Ourika :

  • 24 Madame de Duras, Ourika, dans Ead., Ourika. Édouard. Olivier ou le Secret, éd. M.-B. Diethelm, Pari (...)

Il me serait impossible de vous peindre l’effet que produisit en moi ce peu de paroles ; l’éclair n’est pas plus prompt : je vis tout ; je me vis négresse, dépendante, méprisée, sans fortune, sans appui, sans un être de mon espèce à qui unir mon sort, jusqu’ici un jouet, un amusement pour ma bienfaitrice, bientôt rejetée d’un monde où je n’étais pas faite pour être admise. […] à présent, mes yeux étaient ouverts, et le malheur avait déjà fait entrer la défiance dans mon âme.24

20Désormais étrangère à tout, Ourika ne peut se consoler de rien ; même les acquis de la Révolution française concernant l’émancipation des Noirs ne peuvent guérir son âme brisée. L’échec des rêves révolutionnaires et les massacres de Saint-Domingue plongent Ourika dans un nouvel état de dissociation psychique. Au fil de la narration, Duras nous confronte progressivement à l’aveu lucide d’une désillusion supérieure, une prise de conscience désespérée rarement vue dans la littérature antérieure. Après une ennième déception, cette fois en amour, Ourika décide finalement de se retirer dans un couvent, remettant ses peines à l’amour de Dieu. Elle meurt peu après, sous les soins du médecin chargé de rapporter son histoire à la postérité :

  • 25 Ibid., p. 95.

Dieu, en me jetant sur cette terre étrangère, voulut peut-être me prédestiner à lui ; il m’arracha à la barbarie, à l’ignorance ; par un miracle de sa bonté, il me déroba aux vices de l’esclavage, et me fit connaître sa loi : cette loi me montre tous mes devoirs ; elle m’enseigne ma route : je la suivrai, ô mon Dieu ! je ne me servirai plus de vos bienfaits pour vous offenser, je ne vous accuserai plus de mes fautes.25

21Dans la « Préface » à l’édition Folio du roman, Marc Fumaroli présente l’œuvre de Claire de Duras avec des arguments qui nous seront utiles pour tenter de tirer des conclusions. Après nous avoir présenté la vie tourbillonnante de l’auteure, le critique affirme :

  • 26 M. Fumaroli, « Préface », dans Madame de Duras, op. cit., p. 28-29.

Chacun des romans de Mme de Duras est une variation sur « le mur de cristal » infranchissable qui interdit au désir de connaître le bonheur dont il a rêvé et qui condamne à une mélancolie mortelle de coupable innocent. […] La romancière s’identifie à « l’étrangère » incurable qu’est sa petite héroïne, et sa lucidité indirecte n’épargne pas la « restauration » intacte de ces mœurs aristocratiques sous Louis XVIII. […] Les romans de la grande dame de la Restauration s’emploient, de l’intérieur, à décrire le « vague des passions » qui fêle de l’intérieur l’édifice de l’Ancien Régime « restauré ».26

  • 27 F.-R. de Chateaubriand, « Préface d’Atala et de René [Paris, 1805] », dans Id., Atala. René, Milan, (...)

22Ourika semble ainsi élucider parfaitement les thèmes et les styles d’une nouvelle façon de concevoir la littérature qui, comme on l’a vu, commençait déjà à se manifester à la fin du XVIIIe siècle. La violence des sentiments et des désirs décrite dans les scènes de ces romans au féminin devient alors le paradigme de ces « passions étouffées qui fermentent toutes ensembles »27 que Duras avait su apercevoir dans la littérature de sa génération, notamment dans l’œuvre de Chateaubriand.

  • 28 E. Auerbach, Mimésis, la représentation de la réalité dans la littérature occidentale [Bern, 1946], (...)
  • 29 Id., « A propos de l’imitation sérieuse du quotidien » [Istanbul, 1937], dans Po&sie, 129, 2009, p. (...)
  • 30 M. Fumaroli, op. cit., p. 30.

23Fortement autobiographiques, mais suffisamment détachés pour permettre un examen critique du sujet, ces romans racontent avant tout la quête d’identité d’une génération qui ne peut plus compter sur les élans prométhéens du modèle de formation avancé par la tradition allemande du Bildungsroman, ni encore moins sur le fond moral rassurant du sentimentalisme anglais. D’ailleurs, même si, comme on l’a vu, la réflexion sur le roman sentimental anglais a fortement caractérisé le débat littéraire dans la France des Lumières, l’irruption sans précédent de l’élément socio-historique dans la narration romanesque de ces vies déchirées a marqué un tournant décisif par rapport à la tradition esthétique antérieure. En effet, si, comme Auerbach l’a démontré dans Mimesis, « le style sentimental ne convient pas à l’expression véritable de la réalité », dans la mesure où il implique « un ton et un niveau stylistique [...] défavorables à l’élargissement du cadre social et [qui empêchent] d’y inclure des problèmes politiques et sociaux d’ordre général »28, pour cette nouvelle génération, « la perception de l’historicité […] est la condition sine qua non pour la représentation sérieuse du quotidien »29. Dès lors, la déformation des héroïnes de ces ouvrages offre une double lecture critique de ces textes. D’un côté, c’est, pour reprendre les mots de Fumaroli, l’expression de ce « désir de bonheur sauvage, insatiable et illimité qui porte en lui-même le principe d’une désillusion mélancolique »30. De l’autre, elle souligne la fonction thérapeutique, voire cathartique, qu’assume la littérature moderne dans sa tentative de déchiffrer le monde postrévolutionnaire. Le roman féminin du Tournant des Lumières contribue ainsi au passage d’une littérature à forte impulsion formative-morale à une littérature, pourrait-on dire, identitaire et « sérieuse ». Par le contraste entre les consciences et les valeurs de la société, ces romans reflètent le malaise de l’individu face à une réalité historique qui échappe désormais à tout principe de rationalisation.

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Notes

1 Pour un aperçu récent sur ce sujet, voir M. Reid (dir.), Femmes et littérature. Une histoire culturelle, Paris, Gallimard, 2020.

2 Voir F. Moretti, « Stile SRL. Riflessioni su settemila titoli », dans Id., A una certa distanza. Leggere i testi letterari nel nuovo millennio, Roma, Carocci, 2020, p. 147, fig. 23.

3 Nous renvoyons à des écrits majeurs qui, à partir de Hegel, ont abordé la relation entre la formation de l’individu et l’écriture littéraire à la fin du XVIIIe siècle. Voir J. K. S. Morgenstern, Über das Wesen des Bildungsromans, Dorpat, Raupat, 1820 ; W. Dilthey, Das Erlebnis und die Dichtung. Lessing, Goethe, Novalis, Hölderlin : vier Aufsätze, Leipzig, Teubner, 1906 ; M. Bakhtine, « Le roman d’apprentissage dans l’histoire du réalisme [Moscou, 1979] », dans Id., Esthétique de la création verbale, Paris, Gallimard, « Bibliothèque des idées », 1984, p. 211-261 ; G. Lukács, La théorie du roman [Berlin, 1920], Paris, Gallimard, « Tel », 1989. Pour un aperçu de l’histoire du roman de formation en France et en Europe au XVIIIe siècle, voir F. Bancaud-Maënen, Le roman de formation au XVIIIe siècle en Europe, Paris, A. Colin, 2005, et A. Beretta Anguissola (dir.), Il romanzo francese di formazione, Roma-Bari, Laterza, « Istituzioni di letteratura francese », 2009.

4 Voir à ce propos le chapitre « Les influences étrangères » dans H. Coulet, Le Roman jusqu’à la Révolution [1967], Paris, A. Colin, 2014, p. 503-506, et M. Delon, « Le roman du XVIIIe siècle », dans J.-C. Darmon et M. Delon (dir.), Histoire de la France littéraire, t. II, Classicisme. XVIIe-XVIIIe siècle, Paris, Presses Universitaires de France, « Quadrige », 2006, p. 682-700.

5 Sur le rapport entre le style « sérieux » chez Auerbach et la littérature française, voir A. Zagamé, « Sur l’imitation sérieuse du quotidien (Auerbach). Le roman français du XVIIIe siècle », dans Poétique, 2, 2015, p. 213-236.

6 Sur la spécificité masculine du genre sentimental, voir le chapitre « Three sentimental writers » dans D. J. Denby, Sentimental narrative and the social order in France, 1760-1820, Cambridge, Cambridge University Press, 1994, p. 8-70.

7 Voir G. Mazzacurati, Il fantasma di Yorick. Laurence Sterne e il romanzo sentimentale, Napoli, Liguori, 2006.

8 Tel est le cas, par exemple, de La Nouvelle Héloïse et de Paul et Virginie.

9 Sur le rapport entre littérature et projets pédagogiques dans la seconde moitié du XVIIIe siècle en France, et sur l’influence de Rousseau sur ceux-ci, voir C. Martin, « Éducations négatives ». Fictions d’expérimentation pédagogique au XVIIIe siècle, Paris, Classiques Garnier, « L’Europe des Lumières », 2010.

10 Sur ce point, voir F. Bessire et M. Reid (dir.), Madame de Genlis. Littérature et éducation, Mont-Saint-Aignan, Publications des universités de Rouen et du Havre, 2008, et B. Louichon, Romancières sentimentales (1789-1825), Saint-Denis, Presses Universitaires de Vincennes, 2009.

11 Au sujet de la « querelle des femmes » au siècle des Lumières, voir E. Viennot (dir.), Revisiter la « Querelle des femmes ». Discours sur l’égalité-inégalité des sexes, de 1750 aux lendemains de la Révolution, Saint-Étienne, Publications de l’Université de Saint-Étienne, 2012, et K. Gladu, H. Krief et M.A. Bernier (dir.), La Vertu féminine, de la cour de Sceaux à la guillotine, Paris, Classiques Garnier, « Masculin/féminin dans l’Europe moderne », 2022.

12 A. Filleul de Souza, Adèle de Sénange, ou Lettres de Lord Sydenham, Hambourg, Hoffmann, 1796, t. II, lettre L, p. 180. Il est à noter que cette lettre finale, tout comme la lettre XLIX, a été ajoutée dans la deuxième édition du roman parue à Hambourg en 1796, alors que la première édition du roman publiée à Londres en 1794 s’achevait sur la lettre XLVIII. Dans les éditions suivantes (Alexis Eymery de 1821, Garnier Frères de 1865), le roman est enrichi d'une lettre supplémentaire, de sorte qu'il s’achève sur la lettre LI.

13 Ibid., p. 168-169.

14 Voir M.-F. Silver, « Adèle de Sénange (1794) et sa réception », dans Lumen, 11, 1995, p. 119-126.

15 Voir A. Filleul de Souza, op. cit., t. II, p. 181-208.

16 Voir, à ce sujet, S. Lorusso (dir.), Violence des sentiments et violence de l’histoire. Le roman français à l’orée du XIXe siècle, Pisa, ETS, 2019. Il faut signaler également l’étude de référence de M. Cohen, The Sentimental Education of the Novel, Princeton New Jersey, Princeton University Press, 1999, qui a eu le mérite de redésigner le champ littéraire de l’époque en conférant au genre sentimental au féminin une place prépondérante dans les débats culturels du Tournant des Lumières.

17 A. Filleul de Souza, op. cit., t. I, p. XXI-XXII.

18 Madame de Genlis, La Femme auteur [1802], éd. M. Reid, Paris, Gallimard, 2007, p. 28.

19 Ibid., p. 77-78.

20 Ibid., p. 78.

21 Voir M. Reid, « Présentation », dans Madame de Genlis, op. cit., p. 7-13.

22 Madame de Genlis, op. cit., p. 66-67.

23 Nous faisons référence à l’expression de l’« école du désenchantement » inventée par Paul Bénichou. Voir P. Bénichou, L’école du désenchantement. Sainte-Beuve, Nodier, Musset, Nerval, Gautier [1992], dans Id., Romantisme français, Paris, Gallimard, 2008, t. II, p. 1475-2017.

24 Madame de Duras, Ourika, dans Ead., Ourika. Édouard. Olivier ou le Secret, éd. M.-B. Diethelm, Paris, Gallimard, 2007, p. 61-62.

25 Ibid., p. 95.

26 M. Fumaroli, « Préface », dans Madame de Duras, op. cit., p. 28-29.

27 F.-R. de Chateaubriand, « Préface d’Atala et de René [Paris, 1805] », dans Id., Atala. René, Milan, Vedova di A. F. Stella, 1843, p. 16.

28 E. Auerbach, Mimésis, la représentation de la réalité dans la littérature occidentale [Bern, 1946], Paris, Gallimard, « Bibliothèque des idées », 1968, p. 436.

29 Id., « A propos de l’imitation sérieuse du quotidien » [Istanbul, 1937], dans Po&sie, 129, 2009, p. 185.

30 M. Fumaroli, op. cit., p. 30.

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Pour citer cet article

Référence électronique

David Matteini, « Du roman sentimental au « roman identitaire » au féminin. Réflexions sur la redéfinition d’un genre au Tournant des Lumières »Revue italienne d’études françaises [En ligne], 13 | 2023, mis en ligne le 15 novembre 2023, consulté le 11 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rief/10478 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/rief.10478

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