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Épistémologie en débats

Cultural Studies et histoire culturelle, vues d’ailleurs

Les rédacteurs de la rubrique

Texte intégral

1Les Cultural Studies, originaires d’Angleterre, lancées par les parutions successives de The Uses of Literacy de Richard Hoggart (1957) et des Popular Arts de Stuart Hall (1964), sont souvent identifiées comme un courant transdisciplinaire, porteur de dimensions critiques et politiques. La compréhension sensible, à tout le moins anthropologique, de l’objet d’étude, l’analyse de la capacité de résistance des classes dominées, le constat d’une réappropriation sociale des objets culturels constituent les marqueurs des écrits fondateurs des travaux du Center for Contemporary Cultural Studies de Birmingham.

2Depuis cette première génération, les Cultural Studies ont essaimé dans l’ensemble du monde. Par un double mouvement d’exportation et de relocalisation, les études culturelles se sont implantées aux États-Unis, en Amérique du Sud, en Inde et en Afrique. La multiplication des dénominations, en Hispanic, Afro-american, ou encore African Studies, est emblématique de cette segmentation des Cultural Studies. Les problématiques, déjà anciennes, de minorités, d’identités ethniques, de pratiques culturelles sont reprises à nouveaux frais, alors même que l’uniformisation ou l’omnivorisme culturel sont censés avoir gagné nos quotidiens. Corrélativement, les Cultural Studies connaissent une évolution épistémologique singulière : l’interrogation empirique et marxiste s’est déplacée des classes aux genres et aux catégories identitaires, avec une dimension ethnographique plus marquée, tout en conservant l’analyse des filtres sociaux de réception.

3L’extension des Cultural Studies vers de nouveaux territoires, au sens propre comme figuré, a permis un renouvellement des approches. Cependant, s’agissant de l’espace français, l’institutionnalisation de ces approches est restée faible. Si les rapports de domination culturelle ont été repris par certains sociologues, tels Jean-Claude Passeron ou Claude Grignon, les historiens français ont, eux, suivi une voie plus spécifique, autour de l’histoire culturelle, et en mobilisant d’autres héritages. Les différences entre les deux approches sont connues et documentées : aux Cultural Studies, le présentisme revendiqué, l’empathie pour l’objet étudié, à l’histoire culturelle, une distance historique et critique et une dialectique entre le fait et sa représentation. Malgré ces différences épistémologiques, des liens sont susceptibles d’être mis en évidence : un même intérêt pour le trivial, le commun, le quotidien, mais aussi pour les représentations d’un groupe social, voire d’une société.

4Plutôt que de revenir sur les généalogies et les héritages, favorisant une lecture opposant les approches culturelles, le dossier présenté ici revient sur la circulation des Cultural Studies comme modèle théorique dans un paradigme mondialisé. Partant du constat de leur fragmentation, visible par la multiplication des dénominations en -studies, les Cultural Studies se définissent toujours par l’étude d’une forme de matérialisme culturel, autorisant une analyse des catégories populaires. Témoin, spectateur et acteur de ces évolutions, Erik Neveu revient dans un entretien sur un demi-siècle de Cultural Studies. Des premières lectures à l’importation de la grille de lecture en France, des synthèses sur le courant à un point de vue plus détaché, il replace cette « anti-discipline » dans les contextes successifs, du désert britannique au paradigme mondialisé. C’est un prétexte pour mieux revenir sur les liens avec l’histoire culturelle, et enfin, une façon de se prononcer sur le devenir d’une socio-histoire de la culture, à la croisée des deux approches. C’est ce même dialogue entre Cultural Studies et histoire culturelle que Claire Demoulin se propose d’étudier, en établissant une zone de partage, à savoir les Postcolonial Studies. Soulignant le rôle joué par les frontières disciplinaires, elle montre que des notions circulent entre les approches, avec une complémentarité de fait. Dans le cas étudié, l’ « hybridité culturelle » sert ainsi de passerelle, au service d’une histoire des migrations culturelles.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Les rédacteurs de la rubrique, « Cultural Studies et histoire culturelle, vues d’ailleurs »Revue d’histoire culturelle [En ligne], 7 | 2023, mis en ligne le 15 décembre 2023, consulté le 17 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rhc/7441 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/rhc.7441

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