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Dossier - Cultures olympiques. Appropriations, pratiques, représentations
Cultures nationales de l’olympisme

Le Kremlin et l’olympisme. Divergences et convergences entre visions et pratiques de l’internationalisme

The Kremlin and Olympism. Divergences and convergences between visions and practices of internationalism
Sylvain Dufraisse

Résumés

Comment les dirigeants soviétiques, dont les prédécesseurs bolchéviques étaient en tout point opposés à l’olympisme et à ses idéaux, se sont-ils retrouvés au cours des années 1980 à se concevoir comme les premiers défenseurs de l’idéal olympique ? Pour résoudre cette énigme, l’article revient sur les relations entre les dirigeants russes puis soviétiques et le mouvement olympique depuis l’entrée des sportifs russes dans les compétitions olympiques. Ce faisant, il dégage des phases de divergences et de convergences entre ces deux mondes. Il montre que le poids géopolitique acquis après la Seconde Guerre mondiale et le prestige apporté par les résultats obtenus par les politiques de performance soviétiques permettent aux représentants soviétiques d’intégrer les instances olympiques, puis d’y peser. Les dirigeants originaires d’URSS, avec leurs alliés des démocraties populaires, s’accoutument ainsi à l’olympisme et cherchent à l’encoder différemment. Ils tentent d’en orienter les modes de fonctionnement pour rendre le CIO plus « démocratique » et plus ouvert.

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Texte intégral

  • 1 Marie Chamard, « La représentation des pays organisateurs dans les cérémonies d’ouverture des Jeux (...)

1Le 19 juillet 1980, Leonid Ilič Brejnev, secrétaire général du Comité central du Parti communiste de l’Union soviétique et président du Présidium du Soviet suprême de l’URSS, s’avance à la tribune du stade Lužniki et ouvre les Jeux de Moscou. La cérémonie met en scène la vision de l’olympisme « à la soviétique », tel qu’il peut se concevoir au début des années 1980. Les organisateurs de la cérémonie reprennent le récit de l’institution olympique et mettent en scène le lien fantasmé entre les concours panhelléniques et les Jeux modernes. De jeunes Soviétiques en tenue grecque, certains postés de manière hiératique sur des chars, simulent une procession antique. Ils pénètrent dans le stade et portent les anneaux olympiques. Outre les rituels habituels – le défilé et le serment des athlètes, l’allumage de la vasque –, les tableaux qui suivent s’inspirent de l’idéal olympique : à l’amitié entre les peuples succède « plus vite, plus haut, plus fort ». La dernière séquence de la cérémonie s’intitule même « Ô sport, tu es la paix », inspiré par l’Ode au sport écrite par Pierre de Coubertin en 1912. Les Soviétiques ont fait leur l’olympisme, son récit et ses mots1.

  • 2 Stephan Wassong, Karl Lennartz, « Olympisme », dans Michaël Attali, Jean Saint-Martin (dir.), Dicti (...)

2Cette mise en scène apparaît surprenante si l’on compare la distance entre les positions publiques des organisateurs des Jeux olympiques de Moscou et celles des dirigeants bolchéviques des années 1920. La création d’une Internationale rouge du sport en 1921 avait justement eu pour but de proposer un autre modèle d’organisation internationale du sport qui s’opposerait à une codification « bourgeoise » de cette pratique. Les dirigeants de l’URSS se sont ainsi approprié le concept d’olympisme, entendu comme l’ensemble des principes et des activités relatives aux Jeux olympiques, des statuts réglementant l’organisation et le déroulement de ces Jeux, autrefois considérés comme la défense d’un idéal universaliste, aristocratique et élitiste et qui promeuvent désormais l’entente interculturelle et la défense de la paix2.

  • 3 Jean-Michel Faure, Charles Suaud, La Raison des sports, Paris, Raisons d’agir, 2015, p. 343.
  • 4 André Gounot, Die rote Sportinternationale, 1921-1937, Munster, Lit Verlag, 2002 ; Mihajl Prozumens (...)
  • 5 En cela, il est possible de s’inspirer des relations que la Russie, puis l’Union soviétique, a noué (...)
  • 6 Gosudarstvennyj arhiv Rossijskoj Federacii (désormais GARF), Archives nationales de la Fédération d (...)
  • 7 Centralen Dâržaven Archiv, Archives centrales d’État, Sofia, f. 597.
  • 8 Bundesarchiv, Archives fédérales, Berlin, DY 12.
  • 9 Centre d’études olympiques, Lausanne.

3Cet article s’intéresse à la manière dont les dirigeants soviétiques, politiques et sportifs, ont cherché à infléchir la notion d’olympisme, comme concept et comme mouvement, et ses principes de fonctionnement, alors que la place de ce dernier a crû en importance dans l’espace international des sports. Plus largement, par le prisme du rapport des Soviétiques à l’olympisme, il vise à contribuer à la réflexion sur l’entrée dans la convergence des systèmes et dans la fabrique mondiale de l’universalisme sportif. Les Soviétiques, par le biais de leurs représentants dans les instances internationales, deviennent les protagonistes d’une lutte de marquage symbolique et cherchent à infléchir le cours des discussions sur l’ordre mondial du sport3. Cette contribution, à visée de synthèse4, adopte une perspective chronologique et distingue plusieurs phases dans les relations entre les dirigeants de la Russie soviétique, puis de l’URSS, et l’olympisme5. Elle s’appuie sur un ensemble de sources qui croisent les fonds soviétiques du Comité de culture physique (administration du sport soviétique) et du département de propagande et d’agitation du PCUS conservés dans les archives russes6, les rapports et les comptes rendus des organisations des dirigeants des organisations sportives des pays socialistes consultés à Sofia7 et à Berlin8, et ceux des commissions exécutives et des sessions du CIO9. Elle mobilise ponctuellement la presse et les publications soviétiques, consultées à la bibliothèque de l’Université russe de sport (GCOLIFK) à Moscou, à la bibliothèque Lénine de Moscou et au Centre d’études olympiques.

4Alors que les pionniers russes de l’éducation physique avaient été partie prenante de la construction des instances internationales du sport, leurs successeurs bolchéviques optèrent pour une construction parallèle et opposée, l’Internationale rouge du sport. Ce faisant, ils copiaient le modèle des Jeux olympiques en l’adaptant à la marge. L’après-guerre et les années 1950 sont marqués par un rapprochement qui conduit les dirigeants soviétiques à s’approprier les codes du mouvement olympique, tout en défendant des réformes pour un olympisme plus universel. Enfin, on reviendra sur la manière dont le projet d’organisation des Jeux olympiques à Moscou pousse les Soviétiques à tempérer leurs critiques et à se présenter comme les garants d’un olympisme originel, travaillé alors par la commercialisation rampante du sport international.

« Écartez-vous, Olympiens, face au sport ouvrier10 »

  • 10 « A nu, postoronisʹ, olimpijcy, Kogda idet, Rabočij sport ! » : extrait de l’hymne de la Spartakiad (...)
  • 11 Jean-François Fayet, « Le CICR et la Russie… », art. cité.
  • 12 « De l’implantation de l’Olympisme en Russie, Lithuanie, Lettonie et Estonie », Revue olympique, 19 (...)
  • 13 Aleksandr Sunik, Očerki otečestvennoj istoriografij istorii fizičeskoj kul’tury i sporta [Essais su (...)
  • 14 « Chronique du mois », Revue olympique, décembre 1910, p. 188.
  • 15 D. D. Parcevskaâ, E. F. Dolgopolova., « Predstaviteli rossijskoj Imperii v meždunarodnom olimpijsko (...)
  • 16 Patrick Clastres, « Inventer une élite : Pierre de Coubertin et la “chevalerie sportive” » », Revue (...)
  • 17 Victor Peppard, James Riordan, Playing politics: soviet sport diplomacy to 1992, Greenwich-Londres, (...)

5L’Empire russe n’a pas été tenu à l’écart de la renaissance des Jeux olympiques et de l’émergence d’un milieu d’élite cosmopolite passionné par les activités physiques modernes. Les Russes sont des protagonistes de la promotion de l’universalisme sportif, comme ils ont pu l’être dans d’autres milieux internationalistes, comme celui du droit international humanitaire11. Ainsi, lorsque Pierre de Coubertin soutient la création des Jeux olympiques en 1894 lors du congrès de la Sorbonne, sont présents Aleksej Dmitrievič Butovskij, lieutenant général de l’armée impériale russe, expert de la question de la préparation physique, et Aleksej Lebedev, de la société de gymnastique de Saint-Pétersbourg12. Butovskij a été formé à l’école des cadets, puis à l’école d’artillerie Konstantinovskij. Grâce à sa maîtrise de l’anglais, du français et de l’allemand, c’est un des courtiers des méthodes de préparation physique dans l’empire tsariste. Il parcourt l’Angleterre, la France, la Suède dans les années 1880-1890 pour étudier les exercices et les techniques de formation en éducation physique13. C’est d’ailleurs en 1892, lors d’un de ses séjours d’étude en France pour analyser la préparation militaire dans l’Hexagone, en particulier des escrimeurs, qu’il rencontre Coubertin. S’il quitte le Comité international olympique en 1900, ses successeurs ont des profils similaires : ce sont des pionniers du sport et de l’activité physique, habitués, par leurs statuts ou leurs professions, aux contacts internationaux. Butovskij est ainsi remplacé par le prince Serge Beliosselskij-Beliozerskij, un des fondateurs du club Sport de Saint-Pétersbourg, président de la ligue de football de hockey sur glace et de football de Saint-Pétersbourg, jusqu’en 1908, puis par Georges de Ribeaupierre, moniteur de gymnastique dans l’armée et pionnier de l’haltérophilie, de la boxe et de la lutte dans la société athlétique de Saint-Pétersbourg, jusqu’en 1913. Simon Troubetzkoj succède à ce dernier pour deux ans avant de recommander le diplomate, alors premier secrétaire de la Légation de Russie à Sofia, le comte Léon Ouroussoff, pour prendre sa place en 191014. Georges Duperron, premier secrétaire du Comité olympique russe, premier président de l’union de football russe et représentant de la Russie à la FIFA de 1912 à 1917, prend la suite de Ribeaupierre jusqu’en 191515. Les représentants russes font bel et bien partie de cette première « chevalerie sportive16 », tout en n’y jouant que des rôles secondaires et en s’y ancrant peu. Sans que l’existence d’un Comité national olympique russe ne soit officialisée, trois représentants russes, deux cavaliers et un tireur concourent à Paris en 1900 et cinq participent aux épreuves à Londres17. C’est en 1912, après la fondation d’un Comité national olympique russe en 1911, qu’une délégation plus étoffée de 154 sportifs traverse la mer Baltique et prend part aux épreuves à Stockholm.

6La révolution de février 1917 ne constitue pas une rupture immédiate. Dans une lettre datée du 15 avril 1917, Léon Ouroussoff félicite le baron de Coubertin pour son renouvellement décennal à la tête du CIO et nie l’intensité des effets des événements politiques :

  • 18 Archives du Comité international olympique (ACIO), Lausanne, CIO MBR-OUROU-CORR, lettre du 15 avril (...)

Notre révolution n’a été qu’une formidable évolution indispensable pour la cause de la guerre et salutaire pour le grand avenir de la Russie. Ce n’est pas à croire mais la vie normale a repris absolument son cours. La bourse commence à fonctionner dans une semaine. À vrai dire, il y avait un seul jour dangereux, le 27 février 1917. Trois jours après, on tirait encore dans les rues et ensuite c’était fini. C’est presque un miracle – tant il simple et beau [sic]18 .

  • 19 N. M. Bogolûbova, Û. V. Nikolaeva, « Krasnyj sportivnyj internacional i zaroždenie sovetskoj sporti (...)
  • 20 Fabrice Auger, « Le Comité international olympique face aux rivalités franco-allemandes, 1918-1928  (...)
  • 21 Fabrice Auger, Une histoire politique du mouvement olympique : l’exemple de l’entre-deux-guerres, t (...)
  • 22 ACIO, Procès-verbal de la 22e session du CIO, Rome, 1963, p. 27.
  • 23 Pierre de Coubertin, « Mémoires olympiques », Revue olympique, 128, 1978, p. 369.
  • 24 ACIO, Procès-verbal de la 22e session du CIO, Rome, 1963, p. 27.

7Quelques mois plus tard, Léon Ouroussoff émigre à Paris, tout en conservant sa position de membre du CIO. Les liens avec la Russie désormais soviétique s’émoussent ; les divisions politiques s’imposent dans ce monde censé valoriser l’universel du sport. Initialement, Ouroussoff ne contribue pas à rapprocher les membres du CIO de la Russie bolchévique, car le cas russe pose plusieurs problèmes19. D’une part, il met en avant les limites de la politique d’élargissement dans laquelle s’était engagé le CIO depuis la fin de la Première Guerre mondiale20. D’autre part, il contraint les dirigeants olympiques à se positionner quant à la question des représentations nationales divisées, non plus au sein d’une même entité politique comme cela avait été le cas pour la Bohême ou la Finlande en 1912, mais entre les représentants nationaux en exil et ceux restés dans le pays. Dès 1922, Ouroussoff, le mandataire russe, évoque à la session de Paris l’intégration des associations russes mais aussi soviétiques21. En 1923, à Rome, il propose d’inviter aux Jeux de 1924 une équipe de champions arméniens émigrés et deux équipes issues de Russie, « en dehors et au-dessus de toute pensée politique22 »  : l’une soviétique et une autre réunissant les sportifs émigrés russes, ce qui ne peut être admis pour des raisons réglementaires23. Plusieurs autres membres estiment que l’absence de reconnaissance diplomatique de ce pays ne permet pas d’envisager une participation des ressortissants soviétiques. Mais dans le même temps, les Russes émigrés ne peuvent prétendre à concourir étant donné qu’ils ne sont pas issus d’un État autonome24. L’ambiguïté constitutive des instances internationales par rapport aux nations et aux États est ici manifeste.

  • 25 Fabrice Auger, Une histoire politique…, op. cit., p. 166.
  • 26 ACIO, Procès-verbal de la commission exécutive, procès-verbal de la session de la commission exécut (...)
  • 27 Fabrice Auger, Une histoire politique…, op. cit., p. 165-171 ; Barbara Keys, Globalizing Sport: Nat (...)
  • 28 Karen Bretin-Maffiuletti, Benoît Caritey, « Modèle et contre-modèles olympiques dans l’entre-deux-g (...)
  • 29 ACIO, Lettre de Baillet-Latour à Berdez, 17 janvier 1934. Cité dans Fabrice Auger, Une histoire pol (...)

8Pierre de Coubertin essaie de convaincre le gouvernement français d’inviter une délégation soviétique aux Jeux de Paris en 1924. Les autorités françaises s’y opposent fermement au nom du respect des décisions de la Société des Nations25. À Lausanne, en juillet 1929, c’est le brigadier général britannique Réginald John Kentish qui propose dans un premier temps l’invitation de la « Russie », avant de la retirer26. Le comte belge Henri de Baillet-Latour, désormais président du CIO, est fondamentalement hostile au communisme et fermement opposé à l’idée qu’un représentant de l’URSS en soit membre27. Les dirigeants du CIO considèrent les représentants socialistes et communistes, qui défendent la révolution sociale, comme des menaces28. À la tête du CIO de 1925 à 1942, Henri de Baillet-Latour insiste en 1934 : « J’y [le rapprochement avec l’URSS] suis totalement opposé, je ne voulais à aucun prix faciliter la corruption de la jeunesse du monde entier en les mettant en contact avec ces Rouges, qui en profiteraient pour faire une propagande effrénée29. »

  • 30 André Gounot, Les Mouvements sportifs ouvriers en Europe (1893-1939), Strasbourg, Presses universit (...)
  • 31 Karen Bretin-Maffiuletti, Benoît Caritey, « Modèle et contre-modèles… », art. cité.

9Cette hostilité s’explique en partie par la création de l’Internationale rouge du sport (IRS) par les dirigeants bolchéviques en 1921, mouvement ouvertement communiste. Il s’agit pour les Soviétiques de fédérer le mouvement sportif ouvrier par-delà les frontières. Les associations sportives ouvrières, nées à la fin du XIXe siècle, se sont d’abord organisées à l’échelle nationale avant de former une Internationale éphémère, l’Association socialiste internationale d’éducation physique, dans l’orbite de l’Internationale socialiste, à Gand en 191230. Son bureau cesse ses activités en 1914. Au lendemain de la Première Guerre mondiale, deux Internationales parallèles et concurrentes renaissent et reproduisent les divisions entre socialistes et communistes31. L’Internationale rouge du sport est créée à Moscou à l’occasion des congrès de l’Internationale communiste, de l’Internationale communiste de la Jeunesse et de l’Internationale syndicale rouge en juillet 1921, de manière assez improvisée. Nikolaj Podvojskij en est à l’initiative. Il est appuyé par des représentants de huit pays : la Russie, l’Allemagne, la France, l’Italie, la Hongrie, la Tchécoslovaquie, la Suède et les Pays-Bas. L’établissement de cette Internationale des sportifs répond à plusieurs buts politiques : attirer les jeunes ouvriers en investissant ce nouveau champ d’intervention ; favoriser la coopération ; former et sélectionner de nouveaux militants ; constituer une instance de propagande et proposer une organisation internationale fondée sur d’autres visions du sport. La Sportintern envisage l’organisation de ses propres jeux internationaux dès janvier 1925 en réplique à la première olympiade ouvrière portée par l’Internationale sportive réformiste. Elle s’insère dans le projet du Conseil suprême de Culture physique de se lancer dans la préparation d’une « Spartakiade de toutes les Républiques ». L’IRS y invite des représentants des mouvements ouvriers étrangers.

  • 32 André Gounot, Les Mouvements sportifs…, op. cit., p. 17-42.
  • 33 André Gounot, « Les Spartakiades internationales, manifestations sportives et politiques du communi (...)

10Les Jeux olympiques sont évidemment une source d’inspiration. Outre la référence au spartakisme, le nom de cette manifestation s’inspire de l’Antiquité mythifiée, comme son homologue « bourgeoise ». Les organisateurs font allusion à Spartacus, le gladiateur d’origine thrace qui a mené le soulèvement des esclaves. La Spartakiade s’organise autour des mêmes cérémonies et des manifestations sportives que les Jeux olympiques, démontrant la force de ce modèle. Elle s’ouvre par une cérémonie et un grand défilé qui regroupe les sections selon leurs origines nationales. Les compétiteurs – et les 70 compétitrices – s’affrontent dans différentes épreuves (athlétisme, gymnastique, natation et plongeon, aviron, cyclisme, haltérophilie, boxe, lutte, escrime, tir, voile, tennis, water-polo, volley-ball, handball, basket-ball, football et motocyclisme32), largement médiatisées. Les sportifs et les sportives représentent leurs fédérations nationales ou des républiques soviétiques. Enfin, cette compétition débute alors que les Jeux olympiques d’Amsterdam se terminent, le dimanche 12 août 1928. Cette initiative ne perdure pas. La Spartakiade mondiale initialement prévue en 1933, décalée en 1934, est finalement annulée. Une partie des sections sportives communistes, parmi les plus importantes, sont réprimées ou sombrent dans l’illégalité en Allemagne ou en Autriche. L’IRS est désormais nettement affaiblie et ses orientations ne coïncident plus totalement avec celle du Comité de culture physique et de sport d’Union soviétique qui se tourne progressivement vers la performance33.

  • 34 Sylvain Dufraisse, Les Héros du sport…, op. cit., p. 59-60 ; Fabrice Auger, Une histoire politique(...)
  • 35 Barbara Keys, Globalizing Sport…, op. cit.

11Les rapprochements – limités – avec le monde du sport prennent à partir de 1934 une autre forme et s’éloignent du projet olympique : contacts entre équipes de club dans le cadre de rapprochements diplomatiques, échanges avec les dirigeants des fédérations internationales, accueil à Moscou de sportifs professionnels exclus des instances pour amateurs comme Jules Ladoumègue ou le patineur norvégien Michael Staksrud, accueil d’entraîneurs étrangers34. Les liens avec le monde olympique sont encore inexistants. Ces essais ne connaissent pas de généralisation en raison des bouleversements internes à l’administration du sport soviétique : une grande partie des dirigeants sont victimes des purges. Dans les années 1920 et 1930, les Soviétiques se construisent ainsi contre les principes défendus par le CIO, tout en adoptant certains de ses usages, la quête du record et de la victoire, et l’organisation de compétitions multisports sur des bases nationales35.

Construire l’universalisme sportif : les voies d’une convergence

  • 36 GARF, f. r7576, inv. 32, d 99, l. 208.
  • 37 GARF, f. r7576, inv. 32, d. 99, l. 97-98.
  • 38 Jenifer Parks, Red Sport, Red Tape…, op. cit., p. 7.
  • 39 Ibid., p8.
  • 40 Ibid., p. 11-12.

12Dès 1944, les dirigeants du Comité de culture physique de l’URSS soutiennent un rapprochement avec le monde du sport à de multiples reprises et en soulignent l’usage possible : séduire les opinions publiques occidentales et être une vitrine du prestige de la patrie des Soviets36. Le 5 janvier 1945, le président du Comité de culture physique, Vasilij Snegov, s’adresse au Conseil des commissaires du peuple, Kliment Voroshilov, pour lui signaler l’absolue nécessité d’intégrer les fédérations internationales et le CIO. Le Comité central du Parti communiste d’Union soviétique (bolchévique) autorise l’intégration à la Fédération sportive internationale d’haltérophilie le 13 octobre 1946, de football le 4 novembre 1946, de basket, de lutte, de patinage, d’athlétisme et de natation le 9 janvier 1947, à celle d’échecs le 19 mars 1947, enfin le 26 décembre 1947 à celles de boxe, de gymnastique, de volley-ball et de ski37. L’entrée au CIO est plus longue et nécessite de convaincre les plus hauts décisionnaires soviétiques. Nikolaj Romanov, président du Comité de culture physique à partir de 1945, s’appuie sur les convergences entre les idéaux pacifiques que l’olympisme est censé défendre et la doctrine que Andreï Jdanov énonce le 22 septembre 1947 à Szklarska Poręba, d’une URSS avant-garde du camp progressiste qui aspire à la paix. Lorsqu’il s’adresse à Jdanov pour le convaincre de prendre part aux Jeux de 1948, Romanov s’appuie ainsi sur le symbole de paix que les Jeux olympiques représentent38. Staline, échaudé par les piètres performances des lutteurs au championnat d’Europe de 1946, refuse : « Si vous n’êtes pas prêts, il n’y a pas besoin de participer39. » Entre 1948 et 1951, Nikolaj Romanov est écarté de la présidence du comité au profit d’Arkadij Apollonov qui ne défend guère le rapprochement avec le CIO. Le 14 décembre 1950, le Comité de culture physique formule cependant une demande au Comité central pour créer un Comité olympique soviétique (COS) ; la réponse reste sans suite. Romanov, de nouveau au premier plan, la réitère le 18 avril 1951 et bénéficie du soutien du Département international du Comité central. Cette intégration ne doit pas seulement permettre aux champions soviétiques de briller, mais aussi aux représentants de l’URSS de soutenir la démocratisation des instances internationales et la lutte pour la paix dans le monde40.

  • 41 Archives du CIO (ACIO), Lausanne, Procès-verbal de la 46e session, Vienne, 7 mai 1951.
  • 42 Ibid.

13À Vienne, le lundi 7 mai 1951, le président du CIO, Sigfrid Edström, soumet la candidature du Comité olympique d’URSS, reçue le 23 avril, à la discussion des membres de la session du CIO. « Ce comité s’est engagé par écrit auprès du CIO à se conformer strictement à nos règles », assène-t-il à l’assemblée41. Si quelques membres sont enthousiastes et soutiennent la demande soviétique, plusieurs autres font preuve de réticences et mettent en évidence la faiblesse des contacts avec les interlocuteurs et le faible niveau de connaissance qu’ils ont sur le mouvement sportif en URSS. François Piétri, membre français du CIO, remarque « que la reconnaissance de la Russie [sic] se fait dans des conditions peu usuelles et assez précipitées, mais que la conception pacificatrice et mondiale du CIO nous fait un devoir d’accueillir une masse imposante de millions de sportifs. Après de longues années d’absence, la Russie déclare vouloir faire partie du grand mouvement olympique42 ». L’issue du vote est positive : 31 voix se prononcent en faveur de la reconnaissance, 3 s’abstiennent. S’ensuit le vote pour l’admission comme membre de Konstantin Andrianov. Les Soviétiques prennent ainsi pied dans l’instance olympique où, pendant vingt ans, ils montrent à la fois leur adhésion aux principes universalistes portés par le mouvement olympique et défendent une vision plus internationale et démocratique de l’olympisme.

  • 43 RGASPI, f. 17, o. 132, d. 571, p. 5.

14Le COS est invité à participer aux Jeux olympiques d’hiver à Oslo en 1952. Des hockeyeurs, des patineurs et des skieurs et leurs entraîneurs ont même pétitionné pour y prendre part. Nikolaj Romanov y répond par la négative : « La direction du comité estime que, pour participer aux compétitions internationales, il faut être sûr de la victoire43. » Quelques mois plus tard, la délégation soviétique est autorisée à concourir à Helsinki. Le pacifisme promu par le mouvement olympique rencontre alors la lutte pour la paix que portent les Soviétiques sur un plan international. À l’ouverture des Jeux d’Helsinki, les journalistes de la Komsomol’skaâ Pravda, le journal de l’organisation de jeunesse communiste, mettent en avant les velléités américaines :

  • 44 « XV olimpiskije igry », Komsomolskaâ Pravda, 16 juillet 1952.

Dans les années d’après-guerre, quand les impérialistes américains ont commencé à prêcher ouvertement des idées délirantes de domination mondiale, leurs protégés ont tenté de s’emparer des affaires olympiques et de mener au sein du CIO la politique de diktat déjà habituelle pour les Yankees dans les pays « marshallisés ». […] Alors que le début des Jeux se rapproche, un mouvement se développe pour que les Jeux olympiques soient placés sous le signe de la lutte pour la paix44.

  • 45 Ibid.

15Le même article évoque le Congrès des partisans de la paix des pays du Nord qui s’est déroulé à Stockholm en décembre 1951 – un message a été adressé aux sportifs et aux amateurs de sports – et recense les sportifs occidentaux en faveur de la paix. Le coureur de demi-fond Patrick El Mabrouk est cité : « Les Jeux olympiques doivent se dérouler sous le signe de la lutte pour la paix. Il est indispensable que les Jeux olympiques se déroulent sous le signe de la paix, sans laquelle le développement du sport n’est pas possible45. »

  • 46 Robert Frank, « Images et imaginaire dans les relations internationales depuis 1938 », Cahiers de l (...)
  • 47 Los Angeles Time, 25 juillet 1952, p. C2.
  • 48 Roman Krakovsky, « Une représentation de la guerre froide : le camp de la paix et le camp de la gue (...)

16Les sportifs et les sportives d’URSS et des démocraties populaires deviennent dès lors les incarnations souriantes des régimes socialistes et montrent, par leurs actes, sur le terrain et en dehors, combien, eux, représentent le camp de la paix. Les embrassades, comme celle entre Petr Deninsenko et le pasteur Bob Richards, ainsi que les témoignages d’amitié entre les athlètes des deux blocs, et leurs réfractions médiatiques, constituent d’évidents marqueurs d’une « politique extérieure de l’image46 » : les équipes de 4x100 m d’URSS et des États-Unis font un tour de stade commun ; les rameurs du huit soviétique en aviron, arrivés en deuxième position lors de la finale, invitent leurs homologues américains à Otaniemi, le village olympique rassemblant les délégations des démocraties populaires et d’URSS pour partager un dîner. Selon le Los Angeles Times, qui en rapporte les principaux moments, le capitaine de l’équipe soviétique Vladimir Kuchmenko s’est levé pour un discours, conclu par toast : « Nous sommes heureux de l’amitié que nous avons nouée sur l’eau. Nous voulons que les sportifs de Russie et les sportifs d’Amérique concourent dans un esprit d’amitié47. » Pour les dirigeants soviétiques, les athlètes permettent de porter les idéaux que les intellectuels proclament lors des Congrès mondiaux pour la paix vers un autre public48.

  • 49 Archives centrales d’État de Bulgarie, CDA, f. 597, o. 1, d. 99, p. 3.
  • 50 Ibid., p. 4.
  • 51 Ibid.

17Au sein du CIO, après 1956, les deux membres soviétiques, Konstantin Andrianov et Nikolaj Romanov, une fois qu’ils sont plus établis et qu’ils peuvent compter sur le soutien de leurs alliés des autres démocraties populaires, défendent des évolutions. Ces positions sont préparées dans les espaces de discussions entre représentants des pays socialistes. Selon eux, le CIO doit devenir plus représentatif, plus démocratique et il faut faire évoluer la « politique réactionnaire » que mènent les dirigeants du CIO49. Les Soviétiques critiquent particulièrement une des spécificités de celui-ci, à savoir son fonctionnement aristocratique fondé sur la cooptation de membres choisis et, par conséquent, sur les inégalités entre représentations nationales. S’inspirant des organisations des Nations unies, les représentants soviétiques souhaitent que les sessions du CIO rassemblent un représentant de chaque comité olympique national et que tous puissent disposer de voix décisionnaires. Ce point est abordé par exemple lors de la réunion des dirigeants des organisations sportives des pays socialistes à Berlin-Est en septembre 1958 : le CIO, au fonctionnement trop aristocratique, ne laisse pas assez de place aux fédérations et aux comités nationaux dans les décisions qu’il prend et va ainsi contre les intérêts socialistes. Outre la reconnaissance des comités nationaux des pays socialistes et celle d’une équipe autonome pour la RDA, les pays socialistes se font les chantres de la lutte contre la discrimination raciale dans le monde du sport et de l’ouverture d’un plus grand nombre d’épreuves aux femmes. Ils mettent aussi en avant les ambiguïtés du CIO qui, tout en cherchant à créer un monde plus pacifique, « décourage en fait les athlètes de s’exprimer en faveur de la paix en déclarant que ces discours sont politiques » dans la charte olympique50. Le rapport de la réunion des dirigeants des organisations sportives socialistes conclut : « L’objectif principal des organisations sportives des pays socialistes, c’est la lutte pour la transformation du mouvement olympique en un mouvement sportif international démocratique51. »

  • 52 Jenifer Parks, Red Sport, Red Tape…, op. cit., p. 49.

18Dès 1958, les représentants des pays socialistes conviennent d’un projet de réforme du CIO. C’est Konstantin Andrianov qui, en avril 1959, défend auprès du président du CIO Avery Brundage un « multilatéralisme sportif ». Il soutient les positions définies en amont : d’une part, un élargissement de la composition du comité, permettant une représentation de chaque comité national olympique et de chaque fédération, d’autre part, une clarification du fonctionnement des instances avec une assemblée générale, réunie tous les quatre ans, et un comité exécutif. Brundage ne déborde pas d’enthousiasme : « L’adoption de la proposition soviétique détruirait les principaux fondements du mouvement olympique » et nuirait à l’indépendance et à l’impartialité du CIO52. Le projet de résolution d’Andrianov est mis à l’ordre du jour de la réunion entre les fédérations internationales et les comités nationaux prévue à Athènes en 1960 et à la session du CIO en juin 1961. Lors du vote final, la proposition soviétique est finalement rejetée par 35 voix contre 7. Les fédérations internationales n’ont pas soutenu la campagne de « démocratisation » soviétique et les représentants du CIO ont craint de donner trop de pouvoir aux représentants socialistes et à leurs homologues africains et asiatiques, tous défendant une même vision anti-impérialiste. Après cet échec, les représentants soviétiques adoptent une stratégie moins frontale d’aide en faveur du développement du sport de performance qui vise les pays issus de la décolonisation. Lors de la session du CIO de 1962 à Moscou, la stratégie se révèle gagnante : Andrianov intègre le comité́ exécutif. Parallèlement, de nouveaux comités olympiques d’Asie, d’Afrique et des Antilles sont acceptés. Si le projet de multilatéralisme sportif n’a pas abouti, les représentants socialistes ont permis une plus juste représentation de tous les continents et un olympisme plus universel – de fait, le CIO n’avait pas les moyens de s’opposer au nouveau rapport de force international.

  • 53 ACIO, Lausanne, Commission d’Aide internationale olympique, Athènes, 26 juin 1961. Voir Pascal Char (...)

19Suivant cette logique d’aide au développement et d’accès de tous les États au sport de performance, les membres soviétiques du CIO proposent également la création d’un fonds de soutien aux pays nouvellement indépendants, garanti et piloté par le CIO. Le projet des comités nationaux des pays socialistes converge avec celui du Français Jean de Beaumont et aboutit à la création du Comité d’aide internationale olympique (CAIO) en 1962, doté par des comités nationaux53. Le CAIO doit fournir des techniciens et envoyer des documents pour soutenir la préparation de la performance. C’est néanmoins un échec : les fonds sont limités et le président du CIO dévitalise rapidement ce comité. Lors de l’Assemblée générale des comités nationaux olympiques en 1968, les représentants des pays socialistes relancent l’idée d’aides au développement sportif des pays émergents, fondé sur une partie de la vente des droits télévisés. Cela aboutit en 1972 à la création du Comité de solidarité olympique qui subventionne des cours, l’aide à la construction d’équipements, des missions d’experts et finance des bourses.

20Outre la mesure par les performances de leur avance voire de leur supériorité, l’entrée des Soviétiques dans le mouvement olympique a également servi une autre forme de rayonnement : elle a en effet permis de mettre en évidence l’attachement à la paix, en se liant à une manifestation internationale et à une instance qui en a fait un de ses fondements et un de ses principes. La position des représentants soviétiques à l’égard de l’olympisme n’en est pas moins critique. Selon eux, le mouvement olympique reste un club mû par les intérêts impérialistes, de forme aristocratique, qu’il convient donc de démocratiser.

  • 54 N. G. Tomilina (dir.), Pât’ kolec pod kremlevskimi zvezdami, dokumental’naâ hronika Olimpiady-80 (...)

21Les revendications de démocratisation de l’organisation refont surface en 1970 après l’échec de la première candidature de Moscou pour l’organisation des Jeux olympiques. Dans la presse soviétique, le coupable est tout trouvé : le CIO y est qualifié d’organisation non démocratique et de surgeon de la bourgeoisie, et le Comité national olympique soviétique doit poursuivre son combat pour démocratiser l’instance, encore aux mains de grands bourgeois et d’aristocrates54. Ce point de vue n’est toutefois pas partagé par tous en Union soviétique.

L’Union soviétique, premier défenseur de l’olympisme

  • 55 Ibid., p. 9-10.

22Dès 1956, les dirigeants du sport soviétique avaient songé à accueillir les Jeux olympiques à Moscou. Trente fonctionnaires étaient allés à Melbourne analyser les modalités d’organisation et avaient conclu, à leur retour, que la capitale soviétique n’était pas encore en mesure d’organiser une telle manifestation. Les dirigeants du Comité de culture physique et de sport relancent l’idée à la fin des années 1960 et la candidature est officialisée en septembre 196955. L’URSS accueille désormais avec régularité des championnats du monde et des congrès, et ses infrastructures sont prêtes pour rassembler les meilleurs sportifs mondiaux. Montréal est finalement choisie : la candidature moscovite a pâti du manque d’infrastructures touristiques, des difficultés de circulation liées aux visas et de la situation en matière de droits de l’homme.

  • 56 RGANI, f. 4, o. 20, d. 699, l. 193. Cité dans N. G. Tomilina (dir.), Pât’ kolec…, op. cit., p. 20.
  • 57 Mikhail Prozumenŝikov, Bol’ŝoj sporti bol’ŝaâ politika [Le grand sport et la grande politique], (...)

23Cet échec pousse de fait certains dirigeants soviétiques à modérer leurs critiques à l’égard du mouvement olympique et à adopter une stratégie différente à son égard. Boris Ponomarev, directeur du département international du Comité central du PCUS, note que les articles de presse qui s’en prennent au CIO nuisent à l’image de l’URSS : « Il serait plus correct de se concentrer non pas sur la critique de la composition du CIO, mais sur l’aspect politique de telle ou telle décision, en opposant certains de ses membres, connus pour leur hostilité à l’URSS, à d’autres qui abordent objectivement les questions du mouvement olympique56. » Le comité de Culture physique et de sport dépose, dès 1971, une nouvelle candidature et modifie son approche. Les dirigeants soviétiques rassurent les fédérations internationales en octroyant des visas pour des compétitions internationales à des Sud-Coréens et des Taïwanais, jusque-là interdits d’entrée en URSS : les Taïwanais, après de subtiles justifications rhétoriques des appareils du Comité central du Parti communiste d’Union soviétique, sont ainsi autorisés à prendre part au championnat du monde de biathlon en 1974 ; les Coréens du Sud participent pour leur part en 1975 à des compétitions mondiales de lutte et d’athlétisme et au championnat du monde de volley-ball en 197857. Les représentants soviétiques donnent des gages de probité olympique, en faisant la preuve de leur respect des usages du sport international et apparaissant ainsi comme les premiers défenseurs de l’olympisme et de ses valeurs.

  • 58 Sébastien Fleuriel, Le Sport de haut niveau en France, sociologie d’une catégorie de pensée, Greno (...)
  • 59 Cité dans Patrick Clastres, « Inventer une élite… », art. cité.
  • 60 « Sergej Pavlov: vek atomnyj, vek sportivnyj », Fizkul’tura i sport, 1, 1975, p. 1.
  • 61 Moskva ždet olimpiady, Moscou, Izdatel'tsvo Russkij Âzyk, 1979, p. 10.

24Tout au long des années 1970, les médias soviétiques mettent en avant combien le projet coubertinien de « pyramide sportive » prend forme en Union soviétique – Pierre de Coubertin soutenait l’idée que l’élite sportive était le produit d’une pratique de masse à la base et qu’elle convainquait en retour la masse de pratiquer58 : « Pour que cent se livrent à la culture physique, il faut que cinquante fassent du sport ; pour que cinquante fassent du sport, il faut que vingt se spécialisent ; pour que vingt se spécialisent, il faut que cinq soient capables de prouesses étonnantes59. » Ce que mettent en scène des films documentaires comme Dvoe na l’du de I Grigor’ev (1974) ou Sport strany sovetov de A. Rybakova (1979), ou bien la presse sportive soviétique – Fizkul’tura i sport en particulier –, c’est ce qu’explique le président du Comité de culture physique et de sport Sergej Pavlov en janvier 1975 : « Les victoires internationales de notre sport sont fondées sur le développement du mouvement de culture physique60. » Les publications destinées à un public étranger, comme la revue en langue française du CNO soviétique Panorama olympique, ou les ouvrages vantant les Jeux olympiques entendent montrer la réalisation du projet coubertinien en terre soviétique, autour du thème classique d’un espace de défense de la paix et de l’entente cordiale entre les peuples. La maison d’édition spécialisée dans les manuels de langue Russkij Âzyk sort ainsi un livre de lecture avec des commentaires en anglais tiré à 10 000 exemplaires Moskva ždet olimpiady [Moscou attend les Jeux] qui évoque ces deux aspects. Compilant témoignages de sportifs, photographies de Moscou, l’ouvrage met en scène l’attachement soviétique à l’olympisme. Il s’ouvre par une citation de Leonid Brejnev : « L’URSS soutient et continuera de soutenir le mouvement olympique contemporain. Aujourd’hui, les Soviétiques préparent activement les olympiades de Moscou de 1980 et font tout pour que cela soit une réussite, qu’elle donne une nouvelle impulsion aux idées nobles d’amitié et de paix61. » L’ouvrage évoque à de nombreuses reprises l’idée qu’une masse produit des champions en mettant en avant la trajectoire d’actuels champions soviétiques, à l’exemple du gymnaste Nikolaj Andrianov. Des citations de dirigeants internationaux comme Benito Casteron, le président du CNO espagnol, ou Robert Busnel, le président de la Fédération française de basket-ball, attestent le rôle moral du sport soviétique et son adéquation aux valeurs de l’olympisme.

25Dans les arènes internationales, les représentants soviétiques donnent des gages de confiance à leurs interlocuteurs. Le discours du représentant du comité d’organisation des Jeux de 1980 au congrès international de la presse sportive réuni à Mexico du 13 au 18 avril 1976 en est un excellent exemple. Outre la qualité future des infrastructures et la garantie de la liberté de la presse, les intervenants glosent sur la vision soviétique de l’olympisme qui se rapprocherait de la vision pacifiste de Pierre de Coubertin, dans un contexte de détente qu’il ne faut pas négliger :

  • 62 RGANI, f 5, o. 69, d. 423, l. 35-43. Cité dans N. G Tomilina, (dir.), Pât’ kolec…, op. cit., p. 45 (...)

Les « guerres chaudes » ont été suivies par des années de « guerre froide » qui ont porté également de nombreux coups à l’olympisme moderne. Le mouvement olympique a été en mesure de défendre ses positions. Il a, en outre, apporté une contribution inestimable à la lutte pour la paix mondiale, il a été un des canaux du rapprochement entre les nations et au renforcement et au développement de l’esprit de coopération mutuellement bénéfique62.

26Ce type d’opérations de communication et l’assouplissement des règles de délivrance des visas d’entrée sur le territoire soviétique ont fini par fonctionner : le 23 octobre 1974, Moscou est enfin désignée pour organiser le rendez-vous des meilleurs sportifs et sportives du monde en 1980.

  • 63 Sylvain Dufraisse, Une histoire sportive…, op. cit., p. 254-255.
  • 64 RGANI, f. 5, o. 24, d. 1740, l. 106-106 oб.
  • 65 ACIO, Session du CIO, Lake Placid, 10 au 13 février 1980, p. 16.
  • 66 ACIO, Session de la Commission exécutive de Lake Placid, 8 février 1980, p. 57.
  • 67 ACIO, Rapport du Congrès de Baden-Baden, 1981, p. 39.

27L’annonce du boycottage états-unien, le 20 janvier 1980, ne fait finalement que renforcer la position des autorités soviétiques qui se présentent comme les défenseurs d’un olympisme pur. Lorsque Jimmy Carter annonce sa décision, il rompt avec la tradition américaine d’autonomie entre le monde du sport et le pouvoir politique63 : de fait, Carter et son entourage n’ont cessé de multiplier les ingérences et les pressions sur les organisations sportives. Les cercles dirigeants soviétiques s’en font l’écho et dénoncent un détournement de l’idéal olympique et l’utilisation du sport comme moyen de pression politique64. Certains membres du CIO adhèrent à cette position : lors de la 82e session du CIO, le prince belge Alexandre de Mérode constate que « le sport a été choisi pour essayer de résoudre une situation internationale et ceci est intolérable65 ». Dans la lettre qu’il adresse au président du CIO, Lord Killanin, Leonid Brejnev se fait le porte-parole des idéaux « nobles et humanitaires » de l’olympisme, soutenus par des « millions de gens sur terre, indépendamment de leur appartenance nationale et sociale, de leurs conceptions politiques et de leur religion ». L’invitation aux Jeux de Moscou met également en avant combien ceux-ci « sont appelés à contribuer de façon importante au soutien et à la propagation des nobles idéaux olympiques, à l’amélioration du climat de la coopération, de l’amitié et de la paix qui de nos jours sont tellement indispensables66 ». Malgré l’absence d’un grand nombre de délégations, la période du 19 juillet au 3 août 1980 fut un moment de mise en scène de l’adhésion soviétique aux principes coubertiniens, que le boycottage et les charges contre l’Union soviétique confortaient. Un an plus tard à Baden-Baden, le vice-président soviétique du CIO, Vitaly Smirnov, se pose en défenseur des principes olympiques qui doivent contribuer « au renforcement de la paix et de la bonne volonté sur notre planète. […] Il est impossible de mettre sur pied et de préparer des Jeux olympiques dignes de ce nom dans une atmosphère s’opposant aux idéaux de l’Olympisme, idéaux d’amitié et de compréhension mutuelle67 ».

  • 68 Alain Guiraudo, « Le Congrès olympique de Baden-Baden. Les athlètes prennent la parole », Le Monde, (...)

28Ce rôle, les Soviétiques et une partie de leurs alliés le tiennent au cours des années 1980. Les représentants de l’URSS s’opposent à trois dérives qui affectent, selon eux, les valeurs de l’olympisme : l’usage politique des compétitions olympiques, la commercialisation et la libéralisation des règles de l’amateurisme. L’équipe dirigeante du CIO lance en effet une série de réformes qui impose la professionnalisation, puis la commercialisation du spectacle olympique. À la suite du Congrès de Baden-Baden en 1981, le CIO laisse les fédérations décider des règles d’éligibilité au tournoi olympique, ce qui ouvre la porte des compétitions aux sportifs professionnels. Vitaly Smirnov dénonce de manière virulente l’entrée du professionnalisme aux Jeux, tout comme le hockeyeur Vladislav Tretiak : « Nous sommes tous contre le professionnalisme et [pour] le maintien des règles interdisant aux professionnels de participer aux Jeux68. » Les règles d’amateurisme ayant cours jusque-là favorisaient évidemment les Soviétiques dans certains sports – les meilleurs hockeyeurs ou basketteurs jouant par exemple dans des ligues professionnelles en Amérique du Nord.

  • 69 Jérôme Gygax, Olympisme et guerre froide culturelle. Le prix de la victoire américaine, Paris, L’ (...)
  • 70 Jacques Amalric, « Le boycottage des Jeux olympiques par l’URSS », Le Monde, 10 mai 1984, p. 1.
  • 71 ACIO, Réunion de la Commission exécutive du CIO avec les comités nationaux olympiques, 9 novembre 1 (...)

29L’organisation des Jeux olympiques à Los Angeles donne l’occasion de dénoncer les responsables sportifs américains comme des fossoyeurs de l’idéal de Coubertin. De manière tout à fait paradoxale si l’on a en tête le fonctionnement du système soviétique, les dirigeants sportifs d’URSS dénoncent l’ingérence du gouvernement des États-Unis et surtout la « prise de contrôle des Jeux par des firmes monopolistiques69 ». Le 8 mai 1984, c’est en invoquant le « grossier mépris des idéaux et des traditions du mouvement olympique70 » que le Comité olympique soviétique annonce qu’il boycottera les Jeux de Los Angeles. À l’issue de ces derniers, Marat Gramov, représentant le COS, considère qu’ils ont été perturbés par trois choses : une propagande chauviniste, la commercialisation et les violations de la Charte olympique, qu’il aurait fallu respecter strictement71. La même année, le journaliste soviétique Valeri Steinbach résume ainsi l’apport de l’URSS au mouvement olympique :

  • 72 Valeri Steinbach, 638 champions olympiques, Moscou, éditions Radouga, 1984, p. 18.

On ne peut guère sous-estimer la contribution de l’Union soviétique au mouvement olympique. Il s’agit aussi bien de la diffusion permanente des idées olympiques que de la lutte en vue de démocratiser le mouvement olympique et les Jeux, de l’aide désintéressée aux Jeunes États et à tous ceux qui en ont besoin, de la participation active à toutes les Olympiades à partir de 1952, sans oublier, bien sûr les records établis par les athlètes soviétiques ni les médailles remportées dans une franche rivalité72.

  • 73 « Politiques et commerciaux », Le Monde, 15 septembre 1988, p. 13.
  • 74 Sylvain Dufraisse, Une histoire sportive…, op. cit., p. 306-311.
  • 75 ACIO, Comité national olympique-URSS, 1985-1988, Dossier 1987, Coupure de presse, juin 1987, Dossi (...)

30Les Soviétiques continuent de s’opposer à l’admission des professionnels, en particulier en tennis, aux Jeux olympiques de Séoul73. Le président de la Fédération internationale de tennis, Philippe Chatrier, se rend même à Moscou en 1986 pour faire plier le représentant soviétique qui s’oppose désormais à la vision de l’olympisme portée par l’ancien ambassadeur d’Espagne en URSS, devenu président du Comité international olympique, Juan Antonio Samaranch. Mais le nouveau contexte politique de la perestroïka en Union soviétique, l’arrivée de nouveaux acteurs, en particulier les sponsors et les cabinets de consultants, et la transformation des modes d’administration et de financement du monde du sport affaiblissent le poids des représentants soviétiques et en font des acteurs moins écoutés. L’olympisme a trouvé d’autres défenseurs et d’autres valeurs, plus lucratives. L’évocation publique des dysfonctionnements du mouvement sportif soviétique (dopage, entraînement intensif, manipulations sur l’âge des athlètes) dans la presse de la Glasnost ternit l’image de l’URSS et rend caduc son rôle de premier héraut de l’olympisme74. En 1987, le rédacteur en chef de L’Équipe conclut laconiquement : « Les rivalités de personnes, les échecs, les tares du régime soviétique sont étales crûment sur la place publique75. »

Conclusion

  • 76 Jean-Michel Faure, Charles Suaud, La Raison des sports. Sociologie d’une pratique singulière et uni (...)
  • 77 Ibid., p. 337.

31Pierre de Coubertin a donné de la légitimité aux Jeux olympiques et à l’instance chargée de les organiser, le CIO, en s’appuyant sur une idéologie à visée universaliste, l’olympisme, et la chargeant de valeurs. Lorsqu’ils arrivent au pouvoir, les bolchéviques disposent d’un projet internationaliste, très éloigné du précédent et en tout lieu opposé à la « chevalerie des sportsmen » et au pacifisme « bourgeois » qu’il promeut. Alors que leurs prédécesseurs russes ont pris part au mouvement olympique naissant, ils font le choix d’organiser le mouvement sportif ouvrier communiste dans une Internationale parallèle. Cet article a souhaité étudier le processus de convergence entre Est et Ouest sous l’angle sportif et résoudre l’énigme suivante : comment les dirigeants soviétiques se sont-ils retrouvés au cours des années 1980 à se concevoir comme les premiers défenseurs de l’idéal de Coubertin ? Le poids pris dans les relations internationales par l’Union soviétique dans la deuxième moitié du XXe siècle a imposé sa présence dans des instances affaiblies par leurs compromissions avec les régimes défaits au moment de la Seconde Guerre mondiale. Les représentants soviétiques, associés à leurs homologues des démocraties populaires, par le poids croissant qu’ils représentaient mais surtout grâce à leur prestige sportif, aux résultats incroyables de leurs sportifs et de leurs entraîneurs, ont pesé sur les décisions du Comité international olympique, sans s’imposer toutefois. Ils ont modifié l’esprit de l’olympisme et se sont appuyés sur des points de convergence entre les deux visions internationalistes : l’idéal d’un sport au service de l’éducation et le sport au service de la paix et de l’entente internationale. Au cours des années 1980, ils ont enfin continué de défendre, contre une partie des dirigeants du CIO, l’idéal olympique qui pour eux prenait la forme de l’amateurisme et l’opposition à la commercialisation du spectacle sportif. L’analyse de la relation entre l’Union soviétique et les instances olympiques met alors bien en évidence ce que Jean-Michel Faure et Charles Suaud qualifient de « concurrence pour le captage de l’universel sportif » : dans le monde du sport, des « instances de pouvoir cherchent à imposer, les unes contre les autres, parfois en collaboration les unes avec les autres, leurs conceptions et leurs modes de gestion des pratiques sportives76 », suscitant des convergences dont chacun tire profit. Elle montre également le processus de « construction circulaire de l’universalisme sportif77 ». Le Comité international olympique et l’olympisme ont bénéficié de l’intérêt soviétique : l’intégration des représentants soviétiques et leur investissement dans l’institution ont permis de renforcer sa légitimité, de susciter les débats sur son fonctionnement et sur sa politique, enfin de renforcer le caractère consensuel, voire plus universel, de l’idéologie olympique, en la diffusant vers d’autres publics.

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Notes

1 Marie Chamard, « La représentation des pays organisateurs dans les cérémonies d’ouverture des Jeux olympiques d’été (1960-2012) », mémoire de master en histoire, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2016, p. 92-93.

2 Stephan Wassong, Karl Lennartz, « Olympisme », dans Michaël Attali, Jean Saint-Martin (dir.), Dictionnaire culturel du sport, Paris, Armand Colin, 2010, p. 513- 515 ; Patrick Clastres, « Olympisme et guerre froide. Du paradigme réaliste au paradigme culturel », Guerres mondiales et conflits contemporains, 277-1, 2020, p. 7-25.

3 Jean-Michel Faure, Charles Suaud, La Raison des sports, Paris, Raisons d’agir, 2015, p. 343.

4 André Gounot, Die rote Sportinternationale, 1921-1937, Munster, Lit Verlag, 2002 ; Mihajl Prozumenŝikov, Bol’ŝoj sport i bol’ŝaâ politika [Le grand sport et la grande politique], Moscou, Rosspen, 2004 ; N. G Tomilina (dir.), Pât’ kolec pod kremlevskimi zvezdami, dokumental’naâ hronika Olimpiady-80 v Moskva [Cinq années sous les étoiles du Kremlin : chronique documentaire des olympiades de 1980 à Moscou], Moscou, MFD, 2011 ; N. G. Tomilina (dir.), Belye igry pod grifom « sekretno », sovetskij soûz i zimnie olimpiady, 1956-1988 [Des jeux blancs sous la griffe du secret : l’Union soviétique et les olympiades d’hiver], Moscou, MFD, 2013 ; Jenifer Parks, Red Sport, Red Tape: The Olympic Games, the Soviet Sports Bureaucracy, and the Cold War, Lanham, Lexington Books, 2017 ; Sylvain Dufraisse, Les Héros du sport. Une histoire des champions soviétiques, Ceyzérieu, Champ Vallon, 2019 ; Igor’ Orlov, Aleksej Popov, Olimpijskij Perepoloh: zabytaâ sovetskaâ modernizaciâ [Le tumulte olympique, la modernisation soviétique oubliée], Moscou, HSE, 2020 ; Sylvain Dufraisse, Une histoire sportive de la guerre froide, Paris, Nouveau Monde éditions, 2023.

5 En cela, il est possible de s’inspirer des relations que la Russie, puis l’Union soviétique, a nouées avec une autre organisation internationale privée, le Comité international de la Croix-Rouge. Voir Jean-François Fayet, « Le CICR et la Russie : un peu plus que de l’humanitaire », Connexe. Les Espaces Postcommunistes En question(s), 1, 2019, p. 55-74.

6 Gosudarstvennyj arhiv Rossijskoj Federacii (désormais GARF), Archives nationales de la Fédération de Russie, Moscou, f. 7576 ; Rossijskij gosudarstvennyj arhiv social’no-politictcheskoj istorii (désormais RGASPI), Archives nationales russes d’histoire politique et sociale, Moscou, f. 17 ; Rossijskij gosudarstvennyj arhiv novejshej istorii (désormais RGANI), Archives nationales russes d’histoire contemporaine, Moscou, f. 5.

7 Centralen Dâržaven Archiv, Archives centrales d’État, Sofia, f. 597.

8 Bundesarchiv, Archives fédérales, Berlin, DY 12.

9 Centre d’études olympiques, Lausanne.

10 « A nu, postoronisʹ, olimpijcy, Kogda idet, Rabočij sport ! » : extrait de l’hymne de la Spartakiade de 1928 dont les paroles ont été écrites par N. Aseev.

11 Jean-François Fayet, « Le CICR et la Russie… », art. cité.

12 « De l’implantation de l’Olympisme en Russie, Lithuanie, Lettonie et Estonie », Revue olympique, 1974, p. 558-560.

13 Aleksandr Sunik, Očerki otečestvennoj istoriografij istorii fizičeskoj kul’tury i sporta [Essais sur notre historiographie de l’histoire de la culture physique et du sport], Moscou, Izdatel’stvo Sovetskij Sport, 2010, p. 56-58 ; Aleksandr Sunik, « Aleksej Dmitrievič Butovskij. Fizična aktivnist’ », Zdorov’. I Sport, 3-13, 2013, p. 10-39.

14 « Chronique du mois », Revue olympique, décembre 1910, p. 188.

15 D. D. Parcevskaâ, E. F. Dolgopolova., « Predstaviteli rossijskoj Imperii v meždunarodnom olimpijskom dviženii », Olimpijskij bûlleten', 18, 2017, p. 207-210.

16 Patrick Clastres, « Inventer une élite : Pierre de Coubertin et la “chevalerie sportive” » », Revue française d’histoire des idées politiques, 22, 2005, p. 51-71.

17 Victor Peppard, James Riordan, Playing politics: soviet sport diplomacy to 1992, Greenwich-Londres, Jai press, 1993, p. 24-25.

18 Archives du Comité international olympique (ACIO), Lausanne, CIO MBR-OUROU-CORR, lettre du 15 avril 1917 de Léon Ouroussoff à Pierre de Coubertin.

19 N. M. Bogolûbova, Û. V. Nikolaeva, « Krasnyj sportivnyj internacional i zaroždenie sovetskoj sportivnoj diplomatij », Vestnik Sankt-Peterburgskogo universiteta, 6-2, 2012, p. 107-114.

20 Fabrice Auger, « Le Comité international olympique face aux rivalités franco-allemandes, 1918-1928 », Relations internationales, 4, 2002, p. 427-446.

21 Fabrice Auger, Une histoire politique du mouvement olympique : l’exemple de l’entre-deux-guerres, thèse d’histoire contemporaine, Université Paris Ouest Nanterre La Défense, 1998, p. 165.

22 ACIO, Procès-verbal de la 22e session du CIO, Rome, 1963, p. 27.

23 Pierre de Coubertin, « Mémoires olympiques », Revue olympique, 128, 1978, p. 369.

24 ACIO, Procès-verbal de la 22e session du CIO, Rome, 1963, p. 27.

25 Fabrice Auger, Une histoire politique…, op. cit., p. 166.

26 ACIO, Procès-verbal de la commission exécutive, procès-verbal de la session de la commission exécutive, Vittel, juillet 1929.

27 Fabrice Auger, Une histoire politique…, op. cit., p. 165-171 ; Barbara Keys, Globalizing Sport: National Rivalry and International Community in the 1930s, Cambridge, Harvard University Press, 2006, p. 62.

28 Karen Bretin-Maffiuletti, Benoît Caritey, « Modèle et contre-modèles olympiques dans l’entre-deux-guerres », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, 158, 2023, p. 21-33.

29 ACIO, Lettre de Baillet-Latour à Berdez, 17 janvier 1934. Cité dans Fabrice Auger, Une histoire politique…, op. cit., p. 169.

30 André Gounot, Les Mouvements sportifs ouvriers en Europe (1893-1939), Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 2016, p. 17-42.

31 Karen Bretin-Maffiuletti, Benoît Caritey, « Modèle et contre-modèles… », art. cité.

32 André Gounot, Les Mouvements sportifs…, op. cit., p. 17-42.

33 André Gounot, « Les Spartakiades internationales, manifestations sportives et politiques du communisme », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, 88, 2002, p. 59-75.

34 Sylvain Dufraisse, Les Héros du sport…, op. cit., p. 59-60 ; Fabrice Auger, Une histoire politique…, op. cit., p. 172.

35 Barbara Keys, Globalizing Sport…, op. cit.

36 GARF, f. r7576, inv. 32, d 99, l. 208.

37 GARF, f. r7576, inv. 32, d. 99, l. 97-98.

38 Jenifer Parks, Red Sport, Red Tape…, op. cit., p. 7.

39 Ibid., p8.

40 Ibid., p. 11-12.

41 Archives du CIO (ACIO), Lausanne, Procès-verbal de la 46e session, Vienne, 7 mai 1951.

42 Ibid.

43 RGASPI, f. 17, o. 132, d. 571, p. 5.

44 « XV olimpiskije igry », Komsomolskaâ Pravda, 16 juillet 1952.

45 Ibid.

46 Robert Frank, « Images et imaginaire dans les relations internationales depuis 1938 », Cahiers de l’IHTP, 28, 1994, p. 8-9.

47 Los Angeles Time, 25 juillet 1952, p. C2.

48 Roman Krakovsky, « Une représentation de la guerre froide : le camp de la paix et le camp de la guerre en Tchécoslovaquie (1948-1960) », Relations internationales, 129-1, 2007, p. 21-35.

49 Archives centrales d’État de Bulgarie, CDA, f. 597, o. 1, d. 99, p. 3.

50 Ibid., p. 4.

51 Ibid.

52 Jenifer Parks, Red Sport, Red Tape…, op. cit., p. 49.

53 ACIO, Lausanne, Commission d’Aide internationale olympique, Athènes, 26 juin 1961. Voir Pascal Charitas, « La naissance d’une solidarité. Les conditions d’émergence de l’aide au développement sportif olympique (la commission d’aide internationale olympique, 1952-1964) », Staps, 80-2, 2008, p. 23-32.

54 N. G. Tomilina (dir.), Pât’ kolec pod kremlevskimi zvezdami, dokumental’naâ hronika Olimpiady-80 v Moskva [Cinq anneaux sous les étoiles du Kremlin, chronique documentaire des Olympiades de 1980], Moscou, MFD, 2011, p. 19.

55 Ibid., p. 9-10.

56 RGANI, f. 4, o. 20, d. 699, l. 193. Cité dans N. G. Tomilina (dir.), Pât’ kolec…, op. cit., p. 20.

57 Mikhail Prozumenŝikov, Bol’ŝoj sporti bol’ŝaâ politika [Le grand sport et la grande politique], Moscou, Rosspen, 2004, p. 125-127.

58 Sébastien Fleuriel, Le Sport de haut niveau en France, sociologie d’une catégorie de pensée, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 2004, p. 37.

59 Cité dans Patrick Clastres, « Inventer une élite… », art. cité.

60 « Sergej Pavlov: vek atomnyj, vek sportivnyj », Fizkul’tura i sport, 1, 1975, p. 1.

61 Moskva ždet olimpiady, Moscou, Izdatel'tsvo Russkij Âzyk, 1979, p. 10.

62 RGANI, f 5, o. 69, d. 423, l. 35-43. Cité dans N. G Tomilina, (dir.), Pât’ kolec…, op. cit., p. 453.

63 Sylvain Dufraisse, Une histoire sportive…, op. cit., p. 254-255.

64 RGANI, f. 5, o. 24, d. 1740, l. 106-106 oб.

65 ACIO, Session du CIO, Lake Placid, 10 au 13 février 1980, p. 16.

66 ACIO, Session de la Commission exécutive de Lake Placid, 8 février 1980, p. 57.

67 ACIO, Rapport du Congrès de Baden-Baden, 1981, p. 39.

68 Alain Guiraudo, « Le Congrès olympique de Baden-Baden. Les athlètes prennent la parole », Le Monde, 30 septembre 1981, p. 12.

69 Jérôme Gygax, Olympisme et guerre froide culturelle. Le prix de la victoire américaine, Paris, L’Harmattan, 2012, p. 384.

70 Jacques Amalric, « Le boycottage des Jeux olympiques par l’URSS », Le Monde, 10 mai 1984, p. 1.

71 ACIO, Réunion de la Commission exécutive du CIO avec les comités nationaux olympiques, 9 novembre 1984, p. 5.

72 Valeri Steinbach, 638 champions olympiques, Moscou, éditions Radouga, 1984, p. 18.

73 « Politiques et commerciaux », Le Monde, 15 septembre 1988, p. 13.

74 Sylvain Dufraisse, Une histoire sportive…, op. cit., p. 306-311.

75 ACIO, Comité national olympique-URSS, 1985-1988, Dossier 1987, Coupure de presse, juin 1987, Dossier de L’Équipe, « L’URSS : la grande révolution ».

76 Jean-Michel Faure, Charles Suaud, La Raison des sports. Sociologie d’une pratique singulière et universelle, Paris, Raisons d’agir, 2015, p. 342-342.

77 Ibid., p. 337.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Sylvain Dufraisse, « Le Kremlin et l’olympisme. Divergences et convergences entre visions et pratiques de l’internationalisme »Revue d’histoire culturelle [En ligne], 8 | 2024, mis en ligne le 30 mai 2024, consulté le 01 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rhc/10863 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/11ycx

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Auteur

Sylvain Dufraisse

Agrégé d’histoire et docteur en histoire contemporaine, Sylvain Dufraisse est actuellement maître de conférences à Nantes Université. Il a travaillé dans le cadre de son doctorat sur l’histoire de l’élite sportive soviétique des années 1930 aux années 1980. Il est l’auteur de Les Héros du sport. Une histoire des champions soviétiques (années 1930-années 1980), chez Champvallon en 2019 et d’Une Histoire sportive de la guerre froide en 2023, chez Nouveau Monde éditions. Sylvain.Dufraisse@univ-nantes.fr

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