1La vaccination contre la grippe est une préoccupation sanitaire mondiale. Avec l’éclosion de nouveaux types de virus, comme le coronavirus (Covid-19), le débat pour ou contre la vaccination semble de plus en plus pertinent et actuel. Au-delà des risques pandémiques qui affectent la santé des populations fragiles, mais aussi le développement social et l’économique au niveau plantaire, la vaccination reste avant tout un enjeu local qui nécessite des actions régulières et soutenues pour combattre l’éclosion saisonnière de la grippe. Cette question est encore plus pertinente lorsqu’il s’agit de prévenir la santé des populations fragilisées par un problème de santé et hospitalisées en établissement médicale comme les hôpitaux de la ville.
2Si la prévention de la grippe en milieu hospitalier a été surtout traitée sous un angle médical (Talbot et al., 2010), peu d’études s’intéressent à l’apport de la communication en tant que discours et action stratégique qui permettraient d’augmenter le taux de vaccination du personnel hospitalier afin de diminuer les risques d’éclosion du virus et de contamination des patients. Comment la communication contribue-t-elle à l’augmentation du taux de vaccination contre la grippe au sein de l’hôpital ? Quelles stratégies auprès de quels publics cibles permettraient-elles de bâtir des messages et des outils adaptés compte tenu de la complexité culturelle et organisationnelle qui entourent la vaccination en générale ?
3Le but de cet article est de fournir les réponses à ces questionnements à travers une étude-pilote dans un hôpital situé au cœur de la capitale fédérale canadienne. Notre objectif principal est d’implémenter une approche participative dans le développement d’une stratégie de communication sur la vaccination contre la grippe auprès des infirmières et des infirmiers considérés ici comme des publics cibles à cause de leur positionnement central et stratégique. Cette étude fait partie d’un projet plus général qui cherche à optimiser la prévention de la grippe saisonnière de tous les autres membres du personnel de ce même établissement de santé.
4Dans cet article, nous allons commencer par décrire le contexte sociosanitaire dans lequel se déroule cette expérience pilote afin de définir la portée de notre approche communicationnelle dans le cadre d’une recherche-action. Ensuite, nous allons présenter la méthodologie et les techniques qualitatives adoptées et nous allons discuter les résultats des groupes de discussion conduits avec le personnel infirmier. Finalement, nous allons nous concentrer sur les implications de cette recherche pour une meilleure compréhension de la communication participative comme une approche permettant d’entamer un dialogue transformationnel avec le personnel de l’hôpital sur la vaccination contre la grippe. Nous discutons ainsi l’effet de la Covid-19 sur les opinons et les prédispositions des infirmières/ers.
- 1 La valeur négative est liée ici au nombre d’employés et des médecins qui y travaillent.
5Différentes recherches montrent que la vaccination contre la grippe chez les personnes qui travaillent dans le milieu hospitalier reste un enjeu important tant au niveau des disparités dans les taux d’immunisation qu’au sujet de l’augmentation du nombre des personnes protégées contre la grippe dans les institutions de santé. Cet enjeu est encore plus important dans la mesure où une augmentation de la mortalité due aux complications respiratoires causées par l’influenza est observée dans plusieurs régions du monde (Luliano et al., 2018 ; CDC 2017). Le taux de vaccination dans les hôpitaux au niveau mondial varie de moins 5 % à plus de 90 %1 dépendamment d’une série de variables, comme les contraintes institutionnelles (par exemple, dans certains hôpitaux aux États-Unis la vaccination est obligatoire), l’accessibilité et la disponibilité de comptoirs de vaccination dans les organisations ainsi que l’éclosion hors-saison d’influenza (par exemple la « grippe aviaire », cf. Toa et al., 2016). Au Canada, le taux global de vaccination contre la grippe chez le personnel de santé se situe entre 60 % et 70 %, mais ces pourcentages varient en fonction des régions et des types d’hôpitaux (Health Canada, 2014). Dans la province du Québec, le taux de vaccination reste en-dessous de 50 % (Dubé et al., 2014) tandis qu’en Colombie-Britannique, il y a une augmentation considérable et constante du taux d’immunisation qui se situe autour de 40 % en 2011-12 et de 74 % en 2012-2013 lorsque la vaccination contre la grippe est devenue obligatoire pour pouvoir travailler dans le domaine de la santé (Ksienski, 2014).
6La nécessité d’une intervention communicationnelle permettant d’augmenter le taux de vaccination représente ainsi un défi d’importance première pour les institutions de santé. Au-delà des disparités statistiques, la vaccination du personnel de santé contre la grippe est une mesure stratégique permettant de réduire de façon modérée la mortalité des patients qui sont en contact avec eux le personnel hospitalier, bien que l’immunisation contre l’influenza du personnel aurait un effet relativement bas pour la réduction des hospitalisations causées par la grippe (Ahmed et al., 2014). Une barrière socioculturelle devant l’augmentation du taux d’immunisation est le climat d’opinion publique à travers lequel les différentes parties prenantes contestent et mettent en doute l’efficacité, voire la sécurité des vaccins en général (Moxon & Siegrist, 2011). Il s’agit d’un manque de confiance important (confidence gap décrit par Larson et al., 2011) envers la vaccination comme moyen de prévention des maladies infectieuses. Un exemple éloquent, qui illustre justement ce phénomène, est la résistance des citoyens à la vaccination contre la grippe AH1N1 (ladite « grippe porcine »). En France, seulement 8 % de la population s’est fait vacciner contre ce virus (Reuters, 2010). Au Canada, le taux de vaccination contre le H1N1 a été calculé à 41 % (excluant la population des territoires du nord du pays), tandis que trois quarts des personnes qui ont décidé de ne pas s’immuniser ont déclaré qu’elles croyaient que la vaccination n’était pas nécessaire (Gilmour & Hofmann, 2010).
7Des mythes, des préjugés et des désinformations véhiculés par les réseaux sociaux ont également contribué à une croissance relative à l’hésitation à se faire vacciner (« vaccine hesitancy », cf.WHO, 2019) : un phénomène qui concerne aussi d’autres maladies contagieuses. À titre d’exemple, l’Organisation mondiale de la santé a constaté une augmentation de 30 % des cas de rougeole à l’échelle mondiale, un phénomène lié directement aux doutes de l’efficacité et au rejet de la vaccination (WHO, 2019). Même si les groupes « antivaxx » — activistes qui font la promotion active de la non-vaccination — représentent une minorité au niveau mondial, une proportion croissante de la population les suit et exprime des doutes sur l’efficacité et la sécurité des vaccins (Dubé et al., 2013). Des voix qui étaient considérées comme marginales avant l’explosion de la communication sur le web et les réseaux sociaux exercent maintenant une influence croissante dans le façonnement des perceptions sur l’efficacité et la sécurité des vaccins. Ces activistes gagnent de la popularité et de la légitimité grâce à la dissémination de rumeurs, de théories du complot et de témoignages des « victimes » de la vaccination sur les plateformes numériques (Perera, Timms & Heimans, 2019).
- 2 Données fournies par l’administration de l’hôpital.
8Dans l’hôpital canadien dans lequel nous avons mené notre expérience pilote, le taux global de vaccination contre la grippe reste relativement bas (actuellement à 46 % contre 45,40 % en 2017-2018 après 10 semaines de campagne2). Nous avons constaté une légère augmentation, particulièrement chez les cadres — actuellement à 77 % contre 71.4 % en 2017-2018 après 10 semaines de campagne — et les employés, excepté les médecins (actuellement à 43 % contre 36,5 % en 2017-2018 après 10 semaines de campagne). Dans certains sous-groupes, comme ceux du personnel d’entretien ou des bénévoles, une diminution du taux de vaccination est en revanche observée (de 58 % à 55 % pour la même période). Chez le personnel infirmier, qui est au cœur de notre étude pilote, le taux est encore plus faible : 42 % pour les années 2018-2019. Au niveau stratégique, la direction de l’hôpital considère ces taux relativement bas en les comparant aux autres hôpitaux situés à Ottawa. Même s’il n’y a pas d’objectif officiel en matière de pourcentage établi dans le cadre des campagnes de vaccination, dans cet hôpital le taux optimal est fixé par la direction à 70 %. Une approche communicationnelle est alors privilégiée pour contribuer à améliorer le taux de vaccination et prévenir les risques d’éclosion de la grippe auprès du personnel et des patients.
9Les études de la communication au sein des organisations ont été largement appliquées au domaine de la santé (De Souza, 2009 ; Iedema et al., 2003). La communication contribue de façon directe ou indirecte à l’augmentation du taux de vaccination au sein de l’hôpital grâce aux approches multisectorielles, y compris des campagnes d’information soutenues, qui aboutissent à un changement durable dans les attitudes et les comportements du personnel hospitalier envers la vaccination contre la grippe (Toa et al., 2016). Nous abordons ici la communication organisationnelle comme un dialogue permettant de construire avec le personnel hospitalier une stratégie ciblée afin d’augmenter le taux de vaccination contre la grippe saisonnière. Le dialogue est abordé ici comme un processus sociotechnique qui engage les individus dans les interactions et les amène à agir sur autrui et non pas simplement à échanger des informations et des messages (Ivanov, 2016). Cette manière d’aborder la communication se place au-delà de la distinction classique dans le domaine de la santé entre les paradigmes fonctionnaliste et pragmatique. Elle reconnaît l’origine stratégique des objectifs communicationnels qui reposent sur des attentes claires envers la communication en termes d’augmentation de taux de vaccination au sein de l’hôpital, mais s’intéresse également aux conditions de réception et aux prédispositions culturelles et professionnelles du personnel infirmier lors de l’étape de conception de stratégies communicationnelles dans le cadre de notre recherche-action. Nous nous plaçons donc dans un paradigme d’action dialogique (Freire, 1970/2000) et privilégions la force constitutive de la communication dans une perspective horizontale et participative permettant d’améliorer la qualité de vie des individus en interaction dans un milieu professionnel (dans notre cas, le personnel infirmier de l’hôpital).
10La communication joue ainsi un double rôle. En partant des visées stratégiques préalables, elle contribue à agir sur la confiance entre le public et l’institution hospitalière afin de surmonter la brèche perceptuelle sur les bénéfices de l’immunisation contre l’influenza (Goldenberg, 2018 ; Nahon-Serfaty, 2013). Elle favorise aussi une approche d’auto-efficacité, c’est-à-dire des comportements et des actions individuelles qui peuvent réduire les risques de contamination (Witte et al., 1996), afin de montrer comment les décisions personnelles et collectives contribuent à protéger les patients et les membres des familles du personnel de santé. La communication se situe ainsi au cœur de notre approche participative (Figueroa et al., 2002) à travers la conception et l’implémentation d’une stratégie organisationnelle qui pourrait contribuer à la sensibilisation du personnel sur les bénéfices du vaccin contre la grippe saisonnière. Dans ce sens, la communication facilite la recherche collaborative (Small, 1995 ; Small & Uttal, 2005) dans laquelle les chercheurs font équipe avec des partenaires clés comme des experts en communication (le service des communications de l’hôpital), des professionnels de la santé (infirmières, médecins, équipe soignante, etc.) et la direction de l’hôpital pour élaborer et valider des stratégies qui seront mises en place. Des séances de mobilisation des partenaires ont contribué aux échanges et aux partages d’expériences et d’expertises entre les membres de l’équipe, permettant ainsi un transfert de connaissances interdisciplinaires notamment dans la conception de stratégies de communication en santé plus efficaces.
11Dans cette étude pilote, nous avons, tout d’abord, souhaité comprendre les opinions et les prédispositions du personnel infirmier sur la vaccination contre la grippe. Les infirmières/ers sont considéré(e)s ici comme un public cible prioritaire et transversal à cause de leur positionnement hospitalier central et leurs contacts fréquents et réguliers avec tous les autres membres du personnel. Cette expérience pilote vise ensuite à entamer un dialogue avec les cadres de l’hôpital afin de les impliquer effectivement dans la formulation d’une stratégie de communication centrée sur l’importance de l’immunisation contre l’influenza grâce à une démarche participative. Dans les phases à venir (prévues en automne 2020), nous intégrerons les résultats exploratoires de ce projet dans la conception et l’implémentation d’une campagne effective de communication sur la vaccination contre la grippe qui ciblera tous les autres publics internes de l’hôpital.
12La méthode adoptée est celle de la recherche-action, qui est ici une approche qualitative dans laquelle l’accent est mis sur le « faire » afin de transformer les pratiques des acteurs (Dolbec & Prud’homme, 2009). Elle part d’un processus itératif dialogique qui articule l’action individuelle et collective afin de déboucher sur une transformation organisationnelle et sociale qui vise l’amélioration du bien-être de la communauté étudiée (Figueroa et al., 2002 ; Nahon-Serfaty & Eid, 2018). Cette recherche-action s’est déroulée en deux temps. Tout d’abord, nous avons réalisé un diagnostic de la situation basé sur l’organisation de groupes de discussions avec le personnel infirmier. Ensuite, nous avons proposé des principes stratégiques de communication et nous les avons discutés, validés ou infirmés dans un atelier distinct avec les infirmières/ers gestionnaires de l’hôpital.
13Pour la première phase de l’étude, nous avons constitué deux groupes de discussion (durée d’une heure pour chaque groupe). D’abord, il s’agissait d’un groupe mixte d’infirmières/ers qui étaient aussi des gestionnaires cliniques des unités de soins et une infirmière-éducatrice. Ce groupe réunissait des personnes (n = 5) qui 1) se sont fait vacciner l’année précédente contre la grippe (n = 3) et 2) qui n’ont pas reçu le vaccin (n = 2). Le premier groupe a été constitué de quatre infirmières et un infirmier qui travaillent dans différents services de l’hôpital. Ensuite, un autre groupe mixte du personnel infirmier non-cadres des différents services de l’hôpital (n = 8) composé par 1) celles et ceux qui se sont fait vacciner l’an dernier contre la grippe (n = 7) et 2) celles et ceux qui n’ont pas reçu le vaccin (n = 1). Le deuxième groupe a été constitué de sept infirmières et un infirmier. Concernant les années d’expérience professionnelle des participants, nous avons observé une certaine diversité dans les deux groupes : des personnes ayant entre 26 et 38 ans d’ancienneté, et d’autres, plus jeunes et en début de carrière, avec une expérience de travail de 5 à 3 ans dans le milieu hospitalier. Les années d’expérience reflètent aussi l’âge des participants qui est une variable que nous n’avons pas définie comme critère de sélection des participants, mais qui est associée aux années passées dans l’institution da santé. Finalement, il est important de noter un élément sociodémographique additionnel. Dans la composition des groupes, il y a une certaine diversité dans l’origine socioculturelle des participants qui correspond aux caractéristiques d’un pays comme le Canada.
14Par ailleurs, il est important de souligner la difficulté de recruter des infirmières/ers qui ont décidé de ne pas recevoir le vaccin. À cette étape de la recherche, il nous est impossible d’expliquer avec certitude les raisons de cette difficulté, même si nous pensons que parmi ces raisons sont la crainte de répercussions négatives sur la carrière professionnelle ou, encore, les réticences du personnel de parler ouvertement sur ce sujet dans un milieu hospitalier qui est censé protéger la santé des patients. Bien que ce fait constitue une des limites de notre méthodologie, nous avons pu constituer des groupes de discussion permettant d’atteindre une saturation empirique. Dans le premier groupe (personnel infirmier gestionnaire et formateur), deux personnes ont affirmé ne pas avoir reçu le vaccin contre la grippe dans la campagne de l’année précédente. Dans le deuxième groupe (personnel infirmier de différents services), une personne n’a pas reçu le vaccin contre la grippe.
15Nous avons fait une actualisation en mai 2020 de nos questionnements et méthodes de collecte de données dans le contexte de la pandémie de la Covid-19 afin de comprendre l’impact du coronavirus sur les opinions des personnes qui ont participé dans nos groupes de discussion en octobre 2019. Nous avons envoyé par courriel un court questionnaire à ces mêmes 12 personnes (nous n’avons pas pu contacter une des infirmières qui a participé aux groupes de discussions initiales). Nous avons reçu sept réponses aux deux questions : 1) « Quelle influence a eu la pandémie de Covid-19 sur votre perception sur les vaccins en général ? Pourquoi ? » ; 2) « La pandémie de Covid-19 a-t-elle changé votre opinion sur la vaccination contre l’influenza ? Expliquez votre réponse ». Les résultats de ce volet de l’étude seront présentés dans ce texte après les analyses des groupes de discussions.
16Les résultats des groupes de discussion, dans un premier niveau analytique, servent de base pour constituer des catégories dans une grille thématique qui sont : 1) les prédispositions personnelles sur les vaccins en général ; 2) les connaissances et les avis individuels sur le vaccin contre la grippe ; 3) les raisons évoquées pour se faire vacciner — ou non — contre la grippe ; 4) les recommandations pour prévenir la grippe ; 5) le rôle des suppléments nutritionnels dans la prévention de la grippe ; 6) les recommandations sur “quoi faire” ou “ne pas faire” lors d’une campagne de communication sur la vaccination ; 7) les messages de référence à communiquer sur la vaccination contre la grippe. Un deuxième niveau de l’analyse est celui des aspects sémantiques des discours produits par les participants. Cette perspective sémantique est associée à certaines formules langagières des participants qui portent une signification particulière dans le cadre de la discussion. Notre attention s’est concentrée sur certains mots et expressions qui ont porté une forte charge significative que nous analysons dans cet article.
17Les deux groupes de discussion ont exprimé des opinions et des perceptions plus ou moins homogènes, ce qui suggère que les responsabilités hiérarchiques ou de gestion des participants n’ont pas une influence majeure dans le façonnement de points de vue sur la vaccination contre la grippe. Les participants dans les deux groupes ont affirmé également, de façon plus ou moins consensuelle, que les vaccins aident à prévenir les maladies. Cependant, les propos davantage positifs à l’égard de la vaccination étaient fréquemment suivis par « oui, mais… », qui nuançaient constamment les réponses des infirmières/ers. Par exemple, certains participants, qui ont reçu le vaccin, ont affirmé que les vaccins ont des effets secondaires parfois graves ou que des personnes ont été malades après avoir préalablement reçu un vaccin. Une infirmière a expliqué que « le vaccin est considéré comme une contrainte » imposée par l’hôpital, car s’il y a une éclosion de grippe, le personnel qui n’a pas eu le vaccin doit rester à la maison et ne reçoit pas de rémunération pour les jours non travaillés. Une autre infirmière, qui n’a jamais pris dans sa vie le vaccin contre la grippe, a dit qu’en Afrique, son pays d’origine, les gens perçoivent des vaccins expérimentaux et « ils sont traités comme des cobayes ». Elle a donc expliqué sa réticence par rapport à la prise du vaccin avec des arguments d’ordre socioculturel, tout en affirmant qu’elle n’a jamais pris le vaccin et, à sa connaissance, n’a jamais été malade de la grippe.
18Les participants ont aussi fait des références aux rumeurs « véhiculées par les réseaux sociaux » comme un facteur qui a une influence directe et indirecte sur la méfiance sur la vaccination entre certaines personnes. Les réseaux sociaux ont été régulièrement cités en tant que sources d’information et de documentation au sujet du vaccin, de ses bienfaits ou de ses effets secondaires et indésirables. D’après les propos des participants dans les groupes de discussion, la désinformation dans les réseaux sociaux aurait une certaine synergie avec les points de vue fragmentaires, voire contradictoires de certains médecins qui, comme le personnel infirmier l’a affirmé, ne croient pas à l’efficacité du vaccin contre la grippe. La désinformation sur les réseaux sociaux fait partie d’un système de croyances et des rumeurs qui s’alimente via plusieurs sources d’information et commentaires non vérifiés et d’expériences personnelles vécues.
19Dans le groupe des infirmières/ers-gestionnaires, les participants ont affirmé que certaines personnes attrapent la grippe, ou peuvent même être affectées par des maladies graves, après avoir reçu le vaccin contre la grippe. Cela amène les infirmières/ers à devenir sceptiques quant à l’efficacité du vaccin en demandant s’il est vraiment nécessaire de se faire vacciner et si le vaccin est réellement bénéfique pour la santé. Dans la même veine, une infirmière a souligné : « À chaque fois que je me fais vacciner contre la grippe, je suis malade. J’ai été obligée de me procurer un certificat médical pour justifier pourquoi je ne prends pas le vaccin contre la grippe ». Ce scepticisme est renforcé par des idées reçues de la part des médecins de l’hôpital avec lesquels les infirmières/ers travaillent quotidiennement. Des infirmières gestionnaires ont expliqué qu’elles ont entendu des avis médicaux contradictoires provenant des médecins généralistes et même des spécialistes, ce qui contribue à alimenter la méfiance envers le vaccin. C’est pourquoi « il faut éviter de créer la confusion dans nos recommandations sur comment prévenir la grippe », a déclaré une des participantes.
20Dans le groupe du personnel infirmier travaillant au sein des différents services, certains participants ont ouvertement exprimé leur scepticisme sur la vaccination contre la grippe, en reproduisant des informations lues ou retrouvées sur les réseaux sociaux : « On entend souvent que le vaccin ne répond pas à la souche virale en circulation » ; « Il y a beaucoup plus de rumeurs concernant les risques liés au vaccin antigrippal (autisme, Guillain-Barré, etc.) » ; « Nos collègues refusent de se faire vacciner parce qu’ils ont été malades suite au vaccin antigrippal ». Certains participants ont affirmé que leurs collègues prennent le vaccin, parce qu’ils ont été obligés par l’administration de l’hôpital. Ils ont précisé que si jamais il y a une éclosion, le personnel infirmier non vacciné ne peut pas se présenter à son poste de travail jusqu’à la fin de l’éclosion alors que les journées d’absence ne sont pas payées.
21Dans les deux groupes de discussion, il est clairement apparu qu’il faut renforcer les mesures de précaution et d’hygiène lors de la saison de la grippe, y compris le lavage des mains fréquent et l’évitement des lieux publics pour contrer l’éclosion de la maladie. Les participants ont aussi insisté sur l’importance de recevoir la bonne information sur l’impératif de ne pas visiter l’hôpital s’ils sont malades de la grippe pour ne pas contaminer les patients et les travailleurs de santé. D’autres participants ont insisté sur la bonne gestion du stress, mais aussi sur bien manger, faire de l’exercice physique régulier et même sur la luminothérapie comme des moyens de prévention de la grippe. Ces arguments ont été émis tant par ceux qui ont reçu que par ceux qui n’ont pas reçu le vaccin.
22Les différentes discussions ont aussi abordé la question des produits dits « suppléments naturels ». Les participants des deux groupes ont mentionné que certains suppléments, comme la vitamine C et les antioxydants (comme le zinc et l’échinacée), permettent de « booster le système immunitaire ». Pour ceux qui n’ont pas reçu le vaccin, les suppléments et l’hygiène sont suffisants pour prévenir la grippe, ce qui explique aussi pourquoi ils n’ont pas souhaité recevoir le vaccin. Pour ceux qui ont reçu le vaccin, les suppléments permettent d’augmenter l’efficacité du vaccin, mais aussi de réduire les effets secondaires ou non désirés.
23Un certain nombre de propositions sur les bienfaits du vaccin et en lien avec la communication a été émis. Le groupe de gestionnaires a proposé d’améliorer le partage d’un plus grand nombre d’informations sur la grippe avant la saison grippale ; d’organiser un forum en interne afin que les gens puissent s’en informer et poser des questions ; de communiquer des données statistiques faisant apparaître l’impact positif du vaccin antigrippal au Canada. Selon certains participants, ces améliorations permettraient aux membres du personnel de prendre des décisions éclairées sur la base d’évidences scientifiques qui sont jugées plus impartiales et convaincantes. D’autres ont suggéré de populariser le changement des attitudes, à titre de bonne conduite à suivre, des personnes influentes ou connues dans la société qui ont été initialement réticentes face au vaccin et qui, par la suite, ont changé d’avis. Les participants pensent que ces célébrités pourraient clairement expliquer les raisons qui sous-tendent leur changement de comportement par rapport au vaccin. Finalement, une personne a avancé l’idée d’offrir une compensation en argent au personnel qui souhaite se faire vacciner contre la grippe comme moyen de motivation. Bien que les autres membres des groupes de discussion n’aient pas partagé cet avis, ils étaient d’accord qu’offrir une récompense, autre que monétaire, serait une bonne idée pour convaincre une personne à se faire vacciner.
24Les deux groupes du personnel infirmier (les gestionnaires et celles/ceux des services) ont aussi mis l’accent sur la prévention, la sensibilisation, l’éducation et l’accès à l’information concernant les vaccins et les risques en milieu hospitalier associés à la grippe, mais ont aussi suggéré de renforcer l’accessibilité du personnel au vaccin, c’est-à-dire de le rendre davantage accessible et disponible à l’intérieur de l’hôpital et à proximité des services et des départements. Les participants ont souligné que lors des dernières campagnes de vaccination, les stations (comptoirs) mobiles dans les couloirs de l’hôpital n’étaient ni visibles ni accessibles pour tous. Une des pistes d’amélioration proposées était d’autoriser le personnel infirmier à administrer lui-même le vaccin aux autres membres du corps médical.
- 3 La direction de l’hôpital avait mis en place un système de compétition interne entre les services q (...)
25Plusieurs discussions ont été menées sur le thème « choses à ne pas faire » lors d’une campagne interne de communication sur la vaccination. Les deux groupes ont été d’accord sur le fait qu’« il ne faut pas contraindre le personnel à recevoir le vaccin » et ceci sous aucune forme administrative ou financière (mise à pied temporaire, rétention de salaire, etc.). Selon les participants dans les deux groupes, les employés se sentent forcés à prendre le vaccin contre la grippe, ce qui renforce, peu ou prou, leur résistance. « Il faudrait plutôt informer, inciter, accompagner au lieu de contraindre le personnel à se faire vacciner », a souligné une des participantes. Dans le groupe du personnel infirmier des services, certaines personnes ont rejeté l’idée de compétition entre départements3 afin de savoir quelle unité affiche les taux d’immunisation les plus élevés. Cette stratégie aurait un effet d’intimidation et de contrainte, ce qui ne permet en aucun cas d’augmenter le nombre des personnes vaccinées.
26Les messages de communication proposés par les deux groupes devraient être centrés et porter sur la communauté et non pas sur les individus. Il s’agirait, par exemple, d’implémenter « une approche communautaire » en mettant l’accent sur l’immunité de groupe que pourrait procurer le vaccin au personnel et qui protègera les personnes malades, y compris les plus vulnérables. Si l’expérience avec le vaccin diffère d’une personne à l’autre, les prédispositions du personnel soignant portant sur la famille et les proches sont communes. Les messages qui prônent la protection des patients et de la communauté seront mieux acceptés par le personnel. Certains participants ont ajouté que le vaccin contre la grippe protège aussi « votre famille et votre entourage », ce qui illustre l’idée qu’il serait nécessaire de proposer des messages à formulation plus personnelle et attractive.
27Plusieurs participants ont souligné l’importance d’élaborer et de fournir des messages plus transparents (« On peut attraper la grippe même si l’on a reçu le vaccin, cependant le vaccin nous protègera contre les complications »). Autrement dit, il ne faut pas cacher au public des informations jugées négatives qui portent sur les effets secondaires et indésirables du vaccin ainsi que sur son inefficacité préventive probable. Cacher les risques possibles et les effets secondaires du vaccin contre la grippe n’est pas une pratique communicationnelle appropriée, selon les participants.
28Dans l’optique de l’analyse sémantique, nous avons identifié certaines expressions et mots-clés qui ont une charge émotionnelle et cognitive importante. Le vécu personnel des gens, qui ont décidé de ne pas prendre le vaccin contre la grippe à partir d’« une mauvaise expérience », est jugé comme très marquant. Plusieurs perceptions sur l’efficacité et la sécurité du vaccin, même chez des personnes qui se sont fait vacciner, sont plutôt liées aux « croyances », accompagnées par des doutes et du scepticisme par rapport à aux informations diffusées par l’organisation. L’« empathie » est une autre catégorie analytique qui révèle le besoin de reconnaître les différences culturelles à l’égard de la vaccination et de mettre l’accent sur la protection de la communauté, de la famille et des patients. Les attentes concernant « plus de transparence » se manifestent dans la recommandation de ne pas cacher des informations, soient-elles négatives ou positives, surtout sur l’efficacité réelle du vaccin contre la grippe. Toute idée de « compétition » entre services est associée avec de l’« intimidation » ou la « contrainte » de se faire vacciner en milieu professionnel. L’« accessibilité » du vaccin paraît associée à l’idée de « compensation » comme moyen de motiver les gens. Une infirmière gestionnaire, qui n’a pas reçu le vaccin, a introduit dans la discussion le mot d’« hypocrisie » qu’elle a défini de la façon suivante : « dire aux autres de faire ce que je ne fais pas ».
29Nous nous sommes alors demandés comment l’arrivée de la Covid-19 a impacté ces différentes opinions. L’analyse des réponses du questionnaire envoyé pendant la pandémie tenait compte de deux catégories : 1) le point de vue de la personne face à la vaccination en générale et face au vaccin contre la grippe (pour ou contre, avec certaines nuances) ; 2) les marqueurs d’énonciation dans les réponses (position du locuteur à l’égard de son énoncé dans une logique pragmatique du discours). D’une façon générale, les réponses montraient l’existence d’un consensus sur l’importance de la vaccination ainsi que la réaffirmation de cette conviction dans le contexte de la pandémie causée par la Covid-19. Une seule personne (R7) a exprimé un point de vue un différent : « J’ai toujours été pro vaccination sauf pour antigrippale (sic) ». Le consensus est aussi perceptible dans ce qui concerne la vaccination contre la grippe. Tout le monde déclare que le vaccin anti-influenza est important alors que le R7 se dit prêt à revoir son opinion sur l’immunisation contre la grippe : « Un peu plus croyant au vaccin antigrippal (sic)… puisque semble être la solution pour la cessation de la Covid (sic) ».
30Les marqueurs d’énonciation dans les réponses nous révèlent la position des locuteurs à l’égard de leurs énoncés (le degré ou la force de sa conviction et donc de l’action implicite dans le discours). Nous avons observé des marqueurs forts : « je me fais vacciner » (R1) ; « je suis en accord », « mes convictions » (R3) ; « je crois », « obligatoire » (R4) ; « je suis plus d’accord de prendre le vaccin contre la grippe » « je serai la première en linge pour recevoir mon injection », « ma famille est passée au travers de beaucoup de stress et souffrance » (R6). Nous avons observé aussi des marqueurs faibles : « ça (sic) confirme que pour éviter des pandémies comme celle-ci (sic), les vaccins sont importants », (R2) « je trouve cela très important », « je trouve encore qu’il est important de se faire vacciner contre la grippe, surtout si on est dans la population à risque » (R5) ; « j’ai toujours été pro vaccination sauf pour antigrippal (sic) » (R7). R6 a répondu à la deuxième question (point de vue sur le vaccin contre la grippe) en livrant un récit très personnel avec une forte charge émotionnelle. La personne relate son vécu et celui de sa famille. Elle a contracté la Covid-19 et a perdu son beau-père à cause de la maladie. Ses convictions sur la vaccination en général et sur le besoin de se faire vacciner contre la grippe sont à présent encore plus solides à cause de la pandémie Covid-19 et la perte personnelle.
31L’objectif de cet article était d’explorer les perceptions et les opinions des infirmières/ers au sein d’un hôpital situé à Ottawa sur la vaccination antigrippale à travers une approche participative afin d’implémenter une stratégie de communication permettant d’augmenter le taux de vaccination. Nous avons constaté deux pôles d’opinions majeurs, plus au moins représentés et perceptibles, qui affectent les efforts de l’administration de l’hôpital d’augmenter le taux de vaccination contre la grippe auprès du personnel infirmier (qui reste autour de 42 % depuis quelques années). Le premier est représentatif des personnes qui reçoivent le vaccin, mais qui expriment des doutes sur l’efficacité de l’immunisation (les sceptiques du « oui », qui répondent toujours « oui, mais… »). L’autre pôle est caractéristique des personnes qui décident de ne pas recevoir le vaccin et qui, sans être des militants « antivaxx », seraient prêtes à reconsidérer leur avis (les sceptiques du « non »). Il y a aussi deux pôles minoritaires qui caractérisent les personnes hautement convaincues : 1) celles qui sont « pour » la vaccination et qui n’expriment pas de doutes sur le fait de le recevoir pour prévenir l’éclosion de la grippe, et 2) celles qui sont « contre » la vaccination pour des raisons culturelles (affichées aussi comme des principes de vie) ou personnelles (expériences antérieures vécues négativement).
32Compte tenu de ces résultats, le défi d’une stratégie de communication qui est le nôtre serait de cibler et agir sur les pôles majeurs qui se neutralisent (les sceptiques du « oui » et du « non ») vers une acceptation plus éclairée de la vaccination contre la grippe comme un moyen d’optimiser sa prévention au sein de l’hôpital. Or, les résultats des groupes de discussion révèlent des barrières communicationnelles et discursives à surmonter afin d’atteindre cet objectif. La première barrière est celle de la fragmentation des informations qui circulent sur les réseaux sociaux sur la vaccination et qui alimentent le scepticisme des deux pôles opposés. La fragmentation (Nahon-Serfaty, 2012) est caractérisée par la diffusion de points de vue contradictoires sur un sujet (par exemple, la santé publique ou le changement climatique) dans une logique de concurrence discursive entre acteurs, qui se présentent comme porte-paroles légitimes d’une cause (les pro-vaccins contre les anti-vaccins). L’autre barrière identifiée dans notre analyse est la tension entre un discours de gestion, rationaliste, basé sur l’évidence et les données — qui répond à une logique administrative et qui a pour but principal d’augmenter le taux de vaccination contre la grippe chez le personnel de l’hôpital — et un discours existentiel et plus pragmatique, axé sur le vécu, sur l’expérience, l’empathie et le bien-être de la famille et la communauté, qui exprime une sensibilité aux différences culturelles (Nahon-Serfaty, 2015). Dans tous les cas, le discours de gestion est souvent associé, pour le personnel infirmier, à la contrainte, à l’injonction et, même, à la rationalité de concurrence entre les différents services du même hôpital.
33Les résultats révèlent aussi une perception d’opacité dans la diffusion des informations sur l’efficacité du vaccin antigrippal. Ceci explique pourquoi le personnel infirmier souhaite plus de transparence non pas dans le sens passif du terme (dévoiler de l’information lorsque l’institution est pressée de le faire par les employés, les médias ou les syndicats), mais bien une transparence proactive (proactive disclosure, cf. Oliver, 2004) qui est destinée à expliquer en amont et au plus juste les avantages et les limites de la vaccination contre la grippe. Élaborer et véhiculer des messages centrés sur les effets secondaires et les risques possibles du vaccin est une des pistes à suivre lors de la prochaine campagne de communication.
34Nous avons présenté les résultats des groupes de discussion au comité mixte chargé de la campagne de vaccination contre la grippe à l’hôpital, qui inclut l’équipe de communication. Dans cette séance, nous avons observé comment les gestionnaires remettaient en question certains présupposés stratégiques qui avaient guidé jusqu’à présent la stratégie de communication avec le personnel infirmier. Le comité, par exemple, a décidé d’abandonner le dispositif de compétition entre les services pour la campagne 2019-2020. Ils ont pris note du manque de transparence mis en évidence par certains membres du personnel infirmier ainsi que des différentes sensibilités culturelles identifiées par les groupes de discussion.
35En ce qui concerne les messages à communiquer, le comité a noté l’importance de focaliser les messages sur la communauté, les patients et la famille des membres du personnel au lieu de cibler seulement les individus au travail (comme les responsables de la gestion du risque). Il a aussi validé le principe de centrer les messages sur la famille et les porches afin d’augmenter leur portée performative. Nous avons constaté que le comité a adopté une approche plus flexible sur la stratégie de communication qui se reproche de la notion de « strategizing » qui est plus horizontale et ouverte et qui permet l’émergence d’une « direction organisationnelle » (organizational direction, cf. Ate et Thomas, 2016).
36L’hôpital, en tant que système ouvert et « institution totale » dans le sens de Goffman (1961 : 1), est sous l’influence des processus sociaux et communicationnels qui marquent l’actualité médicale et économique. En tant que « fenêtre sur la localité » (Fortin & Knotova, 2013 : 13) à partir de laquelle il est possible d’observer des phénomènes sociaux dans un contexte organisationnel, l’hôpital est un milieu qui révèle la manière dont les opinions et les prédispositions s’articulent à partir de l’information et la désinformation qui circulent sur les réseaux sociaux, l’expérience familiale, les relations avec les patients et les politiques publiques qui émergent sous le discours gestionnaires sanitaires. C’est dans cette complexité des facteurs et de dynamiques que nous continuons à aborder l’optimisation de la prévention de la grippe dans le milieu hospitalier. Dans un monde sans barrières à la transmission de virus et de maladies infectieuses, bâtir des stratégies de communication en prenant en compte cette complexité pourrait contribuer à inciter d’autres types de publics à changer de comportement et à se faire vacciner contre la grippe pour prévenir les conséquences négatives sur la santé des populations fragiles ou hospitalisées.
37Suite à nos questionnements qui découlaient de la Covid-19, nous pouvons affirmer que la pandémie actuelle a renforcé les convictions des personnes pro vaccination contre la grippe qui étaient déjà convaincues de l’importance de l’immunisation anti-influenza. Mais il y des nuances dans les réponses dont il faut tenir compte : trois répondants ont exprimé leurs points de vue avec moins de force dans l’énonciation, ce qui implique moins de conviction dans la volonté d’agir. Parmi ces personnes, une a exprimé des doutes sur le vaccin contre la grippe bien qu’elle serait prête à revoir son avis à la lumière de l’évolution de la pandémie. D’un point de vue pratique, ces réponses indiquent l’importance de communiquer avec une force énonciative à partir de l’expérience personnelle (surtout dans le contexte de la Covid-19). La charge émotionnelle de R6 représente un témoignage important dans la conceptualisation de la stratégie de communication dans les prochaines campagnes de vaccination contre la grippe. Nul doute que la Covid-19 aura une grande influence sur la communication pour promouvoir la vaccination contre l’influenza.