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Spicilège

Le numérique a-t-il enflammé les violences contre les défenseurs des droits humains ?

Laurence Corroy et Sophie Jehel

Résumés

Un certain nombre de recherches, tout comme des faits d’actualité récents, ont mis la lumière sur les violences qui peuvent se déchaîner sur le web. Cet article propose à partir d’une enquête de terrain auprès de défenseurs des droits humains de comprendre la nature et la portée des attaques numériques qui leur sont adressées. Quelles chaînes de stéréotypes et de discours discriminatoires sont (ré)activés lors de ces cyberharcèlements et cyberhumiliations, reliant notamment antiféminisme, homophobie et antisémitisme ? Comment les porte-paroles de ces associations, exposés médiatiquement, font face aux insultes et tombereaux de haine qu’ils reçoivent ? Quels schèmes explicatifs identifient-ils ? Nous interrogerons enfin les stratégies mises en place par les plateformes numériques, mises en cause au niveau international dans la diffusion des discours de haine, et la faiblesse de leur autorégulation.

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Texte intégral

1La défense des droits humains est facilitée par les technologies numériques. Les travaux sont nombreux pour mettre en évidence les profits que les mobilisations ont pu récolter tant sur le plan national qu’international du fait de l’abaissement des coûts de publication et de diffusion que représentent la banalisation des outils numériques et l’extension des plateformes numériques (Cardon, Granjon 2013, Jouët et al. 2017). Nous souhaitons dans cet article mettre l’accent sur une autre dimension, celle du prix que payent les défenseurs des droits humains sur les espaces numériques et au-delà. Les mobilisations #Metoo, #balancetonporc, l’affaire de la ligue du LOL ont certes permis de comprendre à quel point les violences contre les femmes étaient répandues y compris dans les contextes sociaux favorisés. Mais la médiatisation dont bénéficient les défenseurs des droits humains, notamment les associations féministes, leur place symbolique dans l’espace public, en tant qu’émanation de la société civile organisée, auraient pu, semble-t-il, les protéger. Certes, le phénomène des violences contre les défenseurs des droits humains n’est pas nouveau. Pour ne prendre que quelques exemples, nous nous rappelons les attaques et humiliations subies par les premières femmes journalistes à la télévision française, (Coulomb-Gully 2016), les menaces de mort et les injures antisémites contre Simone Weil au moment de la loi sur l’IVG, le dénigrement d’Yvette Roudy lors du dépôt du projet de loi antisexiste en 1983 (Lemaire 2015). Cependant, les luttes contre le sexisme, l’homophobie, le racisme et l’antisémitisme ont depuis gagné en visibilité et en légitimité, la loi interdisant de façon plus stricte les propos discriminatoires. Nous aurions donc pu nous attendre à ce que les défenseurs de ces causes, dans les pays européens et en France en particulier, soient respectés. L’intensité des attaques que subissent les porte-paroles de ces mouvements nous semble d’une gravité particulière. Elle nous conduit à interroger la face sombre d’internet, le rôle politique des plateformes numériques et des GAFAM en particulier et la résilience de nos sociétés face à ces risques de déstabilisation qui font ressurgir des discours de haine pluricentenaires.

  • 1 Merci aux Chiennes de Garde, Stop Homophobie, LGBT, la Licra, Osons le féminisme qui nous ont accor (...)

2Nos sociétés sont devenues trop imprégnées par les technologies numériques pour pouvoir isoler ce qui relève de l’influence des technologies et plus encore des stratégies des plateformes numériques et de leur économie de l’attention. La montée des discours populistes, voire extrêmes, et les appels à la haine contre des catégories de la population prennent aussi des formes institutionnelles. Mais la responsabilité des plateformes numériques est importante. Nous sommes allées à la rencontre de responsables d’associations qui défendent les droits humains1. A partir de leur témoignage, nous avons pris conscience des difficultés qu’ils rencontrent dans la promotion de ces droits sur internet. Nous souhaitons dans cet article analyser la nature des discours de haine présents sur internet à partir des attaques qu’ils y subissent tels qu’ils les évoquent et les mettre en regard des stratégies des plateformes numériques mobilisées jusqu’à présent.

Violences physiques et prises à partie numériques

  • 2 Terence Katchadourian, secrétaire général et porte-parole de l’association Stop Homophobie a été in (...)

3La sécurité des biens comme des personnes est un sujet qui préoccupe tous les représentants des associations luttant pour les droits humains que nous avons rencontrés. Ces derniers dénoncent des violences de plusieurs natures. Les prises à partie dans la rue lorsqu’ils sont reconnus se révèlent particulièrement inquiétantes, dans un contexte d’augmentation significative des agressions des personnes homosexuelles, victimes de guet-apens ces dernières années, rouées de coups voire assassinées2. Leurs locaux, qui au départ avaient pignon sur rue, après avoir été vandalisés à plusieurs reprises, sont choisis pour leur discrétion et la difficulté d’y accéder. Ces dégradations ont contraint certaines associations à déménager pour s’installer en étage, avec des digicodes et des sas d’entrée qui permettent de vérifier l’identité des visiteurs. Pour autant, la violence ne s’arrête pas au bas des immeubles. La violence symbolique alimentée par Internet a été citée au cours de tous les entretiens menés. Les réseaux numériques servent de déversoir à une haine manifestement désinhibée (Ikiz 2018). Il s’agit tout à la fois de cyberharcèlement et de cyberhumiliation.

4Qu’entendre par cette distinction ? Catherine Blaya, en reprenant la définition de Smith (2008), estime que le cyberharcèlement est « un acte agressif, intentionnel, perpétré par un individu ou un groupe d’individus au moyen de formes de communication électroniques, de façon répétée à l’encontre d’une victime qui ne peut se défendre facilement seule » (Blaya 2018). Sur le site officiel du service public français, le harcèlement est caractérisé par la fréquence et la teneur des propos échangés3. Le harcèlement en ligne a les mêmes caractéristiques, en prenant comme champ d’action Internet. Les commentaires mais aussi les vidéos et les montages d’images postés concourent à la violence par leur fond menaçant, obscène ou insultant. Qu’il soit question de « raid numérique » ou de « harcèlement de meute », la loi sanctionne le cyberharcèlement, comme forme de harcèlement moral ou sexiste. Il impose à une victime des propos tenus par plusieurs personnes qui agissent sur ordre d’une d’entre elles ou de manière concertée dans un espace-temps circonscrit voire simultané, ou qui agissent successivement en sachant pertinemment qu’il y a effet de répétition pour le destinataire.

5La cyberhumiliation est une forme plus spécifique de cyberharcèlement qui s’en prend plus profondément à l’ethos de la victime en cherchant à l’avilir. Julie Alec Dilmaç la définit comme « l’attaque virtuelle par l’image et de l’image d’une personne sur Internet. Elle a pour but de remettre en question la réputation de sa victime, la plongeant dans un mal-être profond » (2017). Le but est de brouiller la frontière de l’intime et de l’obscène, en recourant à des photomontages pornographiques, en créant de faux profils et en faisant tenir à la place de la victime des propos choquants, voire qui tombent sous le coup de la Loi. L’objectif est de discréditer la personne visée en utilisant le registre de l’indécence pour qu’elle soit atteinte dans ce qu’elle a de plus personnel, sa sexualité.

  • 4 L’été 2018, la porte-parole a été prise à partie dans la rue : « J’ai eu très peur cet été. Alain S (...)

6À chaque passage à la télévision de Raphaëlle Remi-Leleu, porte-parole d’Osons le féminisme, celle-ci reçoit pendant plusieurs jours des centaines de messages, qu’il s’agisse d’insultes ou de montages pornographiques et pédopornographiques, bloqués par Twitter sur son fil, ainsi qu’en messages privés sur son compte Facebook : « Des internautes font des captures d’écran de mon visage quand je passe à la télévision, à chaque fois les moins flatteuses possibles, et ils mettent des sexes devant mon visage.4 » Les messages pédopornographiques sont signalés à Pharos. Le combat féministe est considéré par les internautes haineux au prisme d’une déficience sexuelle. Attaquées comme des viragos, le registre des insultes subodore qu’elles s’en prennent aux hommes parce que leur vie sexuelle est estimée insatisfaisante : « On est mal baisées, on n’aime pas les hommes. Or c’est justement parce qu’on pense que les hommes ne sont pas naturellement des agresseurs qu’on dénonce les comportements d’agresseurs » poursuit-elle.

7Si les appels au meurtre sont fréquents à l’encontre des homosexuels – « une balle pour chaque pédale », « mort aux pédés »écrivent certains internautes sur Twitter ou sur Facebook sur les comptes de SOS homophobie –, les appels au viol sont très fréquents contre les féministes. Lors de l’affaire des « médecins pigeons », une fresque pornographique représentait le viol collectif de Marisol Touraine dans une salle de garde du CHU de Clermont. Suite aux critiques d’Osons le féminisme, les numéros de téléphone de deux porte-paroles avaient été trouvés et diffusés sur des forums qui incitaient les internautes à les harceler et les menacer de viol, appel qui avait été effectivement suivi.

8Si l’association LGBT Paris Ile de France communique peu sur les attaques numériques dont elle fait l’objet, elle en reçoit elle aussi énormément, qui appellent tout autant au meurtre qu’au viol, les lesbiennes étant haïes en raison de leur orientation sexuelle et des combats féministes qu’elles portent ou relaient. Les appels au viol sont autant d’appels à la haine des femmes par le saccage le plus intime de leur nature sexuée. Se joue une histoire séculaire d’appropriation du ventre des femmes : « Plus le stigmate est collectif, évident, légitime, donc historique, moins le crime de viol qui concerne la victime de ce stigmate est perçu comme transgressif » (Véronique Nahoum-Grappe 2019). De nature profondément sexiste, l’appel au viol renvoie à la valence différentielle des sexes (Françoise Héritier, 1996), invariant d’une hiérarchie structurelle où les pénétrés valent moins que les pénétrants, privilégiant « une sexualité de pénétration » qui « définit le cercle des “pénétrés” – femmes, homosexuels passifs – comme des inférieurs, d’emblée dévalorisés, “baisés” » (Véronique Nahoum-Grappe 2019).

9La fréquence et l’intensité des messages haineux sur Internet à l’égard des défenseurs des droits humains posent question. L’anonymat apparaît comme une des clés d’explication mais ce n’est pas la seule. La distance induite par le numérique permet aussi de minimiser pour l’agresseur l’effet que produit sur le destinataire les messages qu’il reçoit (Blaya 2018). Tel David Doucet, rédacteur en chef aux Inrockuptibles, qui justifiait a posteriori ses actions au sein de la ligue du LOL, qui s’exerçaient à l’encontre de youtubeuses et de jeunes journalistes en les harcelant par des raids de cyberhumiliation, parce qu’il n’avait pas mesuré « l’ampleur et les traumas subis » En l’espèce, David Doucet et ses acolytes étaient de jeunes journalistes issus de milieux favorisés et bien insérés socialement. « La perspective qui conçoit les formes persistantes de violences comme marginales et comme relevant davantage de la déviance dans des sociétés apaisées n’est pas tenable. Non seulement les violences sont toujours présentes, mais surtout elles ne sont pas nécessairement le fait de personnes déviantes ou marginalisées. Une telle problématisation conduit, qui plus est, à invisibiliser les violences commises par les hommes les plus dominants et les mieux insérés socialement » (Pauline Delage, Marylène Lieber, Natacha Cherchuti-Osorovitz 2019). Si le numérique ne crée par le sexisme, l’homophobie ou le racisme, il en facilite l’expression (Kunert 2017).

10L’idéologie utopique qui a porté la naissance et le développement de la Toile en est une autre, posant toute tentative de régulation comme une restriction insupportable des libertés individuelles (Ricaud 141-144). Sandra Lucbert en souligne une troisième, relevant de notre fonctionnement psychique : « En fait de grande horizontalité, on expérimente un régime pulsionnel commun que Lacan appellerait la jouissance, un affect irrésistible par l’effraction d’intensité qu’il procure, mais s’apparentant à une quasi-douleur et nécessitant un perpétuel recommencement sans apaisement possible. La jouissance est une répétition sans prise de consistance. Etre traversé pousse à vouloir l’être encore, et c’est bien de cela qu’il s’agit sur les réseaux : une tenue vibrante de l’audace énonciative, de la radicalité des positionnements et stratagèmes visant à l’emporter en vitesse, en violence d’impact, et finalement en nombre de validations mesurables en temps réel » (Lucbert 2019). Un fantasme de toute puissance, sans contrôle ni régulation permet ainsi d’« oublier » tous les usages de la politesse, des règles de la conversation et de la bienséance, levant les barrières du refoulement des pulsions agressives en menaçant le processus de civilisation (Elias & Dunning, 1986 : 58-59).

Ré/activation de chaines de stéréotypes

11La violence des discours haineux reprend des stéréotypes discriminatoires qui se conjuguent entre eux par dyades ou triades. Selon le porte-parole de Stop homophobie, dans le corpus très volumineux des insultes reçues, parfois à connotation religieuse, « il n’y pas d’homosexuel noir ou arabe, ou alors c’est le diable qui l’a possédé », en revanche les homophobes se montrent volontiers antisémites dans leurs invectives : « “A mort les pédés et les juifs !” ou “Mort les pédés, les juifs” » sont extrêmement fréquents. Les femmes ne sont pas épargnées, car, si elles sont lesbiennes, « elles ne sont pas avec de vrais hommes » et si elles sont féministes, elles sont honnies pour désirer bouleverser les lois « naturelles » qui régissent les rapports entre les sexes.

12Antisémitisme, antiféminisme, homophobie se nouent en ce qu’ils partagent une « inquiétante étrangeté ». Ces chaînes de stéréotypes discriminatoires ne sont pas novatrices en elles-mêmes. Le lien entre judéité et homosexualité est déjà souligné par les historiens dix-neuviémistes et le triptyque homosexualité – judéité – féminisme identifié par les porte-paroles que nous avons rencontrés est lui-même déjà apparent au début du XXe siècle. Comment expliquer la puissance et la pérennité de ce type de discours ? Un premier élément à prendre en considération est le lien fort qu’entretient le stéréotype avec une idéologie. Comme le rappelle Dominique Wolton : « La force et la prégnance du stéréotype, mais aussi des représentations et des idéologies, ne sont donc pas fonction de la rareté, ou de l’abondance d’informations, de l’ancienneté ou de la modernité, du caractère traditionnel ou novateur du débat, mais du besoin que nous avons de donner un sens idéologique à la réalité » (Wolton 12-13). Le juif homosexuel est accusé d’être pédophile, repère Camille Lhopitault, à la Licra, qui y voit une réactivation d’une rhétorique très ancienne en Europe sur les juifs mangeurs d’enfants. Depuis la seconde moitié du XIXe siècle, l’antisémitisme français décrit le juif comme un être perverti aux mœurs décadentes (Chetcuci-Osorovitz et Teicher 2017).

13Les attaques numériques identifiées par LGBT, Stop Homophobie, la Licra et Osons le féminisme ont de nombreux points communs. Pour autant, les arguments et justifications des invectives numériques nous paraissent relever de discours d’ordre, de nature différente, susceptibles d’être combinés et intersectionnels, mais pas toujours.

L’ordre « naturel » des sexes

14Il s’agit d’un ordre de genre, qui tend à vouloir affirmer que l’asymétrie des pouvoirs traditionnels entre hommes et femmes est « naturelle ». Pour le justifier, la hiérarchie des rôles et des fonctions systématiquement en défaveur du féminin se fonde sur la différenciation des sexes (François Héritier 1996). En essentialisant une distinction des sexes et de leurs aptitudes « naturelles », justifiant ainsi la domination de l’un sur l’autre, les discours masculinistes cherchent à empêcher de questionner les « évidences » soi-disant naturelles de la distinction entre les sexes.

15Le postulat machiste et misogyne des masculinistes a tout intérêt idéologiquement à réfuter toute remise en cause de l’essentialisation du féminin et du masculin : « Le plus grand danger pour les masculinistes est la relativisation de la différence entre les sexes puisque c’est cette bicatégorisation qui leur permet de justifier l’oppression des sexes » affirme ainsi Tanguy Grannis (2019). Le féminisme est donc accusé de vouloir renverser la société dont l’un des socles est précisément la bipartition entre le masculin et le féminin (Chetcuti-Osorovitz et Teicher 2017). De fait, et cela peut sembler contre-intuitif, les messages les plus agressifs (notamment par des menaces de viol) à l’encontre des féministes lorsqu’elles s’expriment dans les médias concernent des sujets qui questionnent les différences culturelles et éducatives qui distinguent le féminin du masculin : « Hormis sur la prostitution et la pornographie qui ont des corps institués très organisés contre nous, sur toute la masse antiféministe, c’est lorsqu’on parle de l’école ou des jouets, d’écriture inclusive, qu’on a des regains de violence absolument délirants. C’est très impressionnant à voir. Je vais me faire plus insulter et harceler après un passage sur Miss France qu’après un témoignage sur le féminicide. Il y a un report de la violence » note Raphaëlle Rémi-Leleu.

16Si le sujet paraît au premier abord anodin, les porte-paroles de cette association font particulièrement attention à ce que ce soit des représentantes aguerries qui s’expriment : « Quand on a une nouvelle porte-parole, on ne l’envoie pas faire des interventions médiatiques sur des sujets trop “simples”. C’est arrivé une fois ou deux. Une porte-parole était intervenue sur une campagne qui avait plu aux parents, et elle a été atrocement insultée sur les réseaux sociaux. » Qu’il s’agisse du rose pour les filles et du bleu pour les garçons, des concours de Miss ou de la taille des poches de jeans, les questions les plus bénignes, parce qu’elles mettent en cause la différenciation des sexes dans leur banalité et leur quotidienneté, seraient celles qui déchaînent le plus de haine. Comment expliquer une telle attitude ? Pour la porte-parole de l’association, il est beaucoup plus aisé de se déchainer via les réseaux sociaux sur des sujets anodins qui touchent au genre que sur le viol qui pourrait assimiler l’auteur à une personne déviante : « On observe une corrélation étrange : plus le sujet paraît anodin, plus les réactions sont violentes. C’est compliqué de traiter de pute une militante qui parle de viol et de féminicide. Ils n’ont pas envie d’être assimilés à des violeurs. Par contre, si elle parle de la poche des tailles de jean, certaines personnes y vont à fond. » Se déchaîner sur les féministes contre les concours de beauté paraît donc moins gênant pour la représentation de soi, puisqu’il s’agit de « méchanceté en actes » (Jost 2018) sur des sujets peu importants, facilitée par le numérique.

Un ordre « moral »

  • 5 Térence Katchadourian, Stop homophobie.

17L’antiféminisme, l’homophobie et l’antisémitisme exprimés sur les réseaux prennent pour terreau et justification un ordre moral étayé par des références religieuses. Flora Bolter, coprésidente de LGBT, considère qu’il y a une pollinisation du discours extrémiste qui rejette celui qui n’est pas à la place qu’on lui assigne : « Ultra catholiques, ultra musulmans, se réunissent sur l’idée d’exclure un groupe. » Dans cette optique, les insultes et prises à partie contre les homosexuels se font au nom de Dieu, qui ne saurait tolérer des amours qui ne soient pas hétéronormées : « Les catholiques d’extrême droite et certains musulmans sont très virulents, sur Twitter, à proportion égale. Ce sont de très jeunes musulmans, âgés de 13, 14 ans qui nous insultent. Ils invoquent le peuple de Lot, Sodome et Gomorrhe, sans savoir la plupart du temps qu’ils se réfèrent originellement à la Bible et non au Coran. Les chrétiens utilisent Sodome et Gomorrhe, mais pas Lot. Nous avons dû apprendre le Lévitique, le contexte d’écriture de l’ancien Testament. On rappelle aux chrétiens que l’ancien Testament ne s’applique plus pour eux, sinon ils devraient être lapidés pour manger des fruits de mer…5»

18Davantage que le PACS, le Mariage pour tous a été le déclencheur d’un déferlement de haine (Cervulle et Pailler 2014). Les slogans antisémites, homophobes et antiféministes repérés lors de la manifestation du 5 octobre 2014 (Vincent Duclert 2019) ont été déclinés et abondamment adressés aux associations rencontrées. Le Pacs représentait un aménagement de la loi, qui ne concernait pas seulement les personnes homosexuelles. Dans le projet de loi permettant aux couples homosexuels de se marier, il s’agissait désormais de mettre sur un pied d’égalité tous les couples, qu’ils soient hétérosexuels ou non. Sortir d’une logique d’invisibilité, acquérir les mêmes droits semble dès lors nettement moins supportable, analyse Flora Bolter : « Pour certaines personnes, c’est le signe du déclin de la société, de la décadence, sur un terreau religieux. Exclusion, violence, rejet, insultes apparaissent. Depuis 2013, une parole homophobe apparaît parce que la bête est blessée, liée à une représentation de sa propre valeur. Si homosexuels et hétérosexuels se valent, leur propre valeur diminue. »

Un ordre politique

19Marie-Noelle Bas, engagée dans Les chiennes de garde, estime que le féminisme est insupportable pour une certaine frange de la population car il est « révolutionnaire ». Les Chiennes de garde sont accusées de comploter à la destruction de la société en remettant en question « une société qui a été faite par les hommes pour les hommes. » Le combat politique des tenants d’une identité nationale dont le héraut est blanc et hétérosexuel (Chetcuti-Osorovitz et Teicher 2017) vilipende le juif parce qu’il est soupçonné d’être un déraciné sans terre, perverti dans sa sexualité, tout comme les féministes et les homosexuels. Ce trait n’est pas nouveau. Dès les années 1930, les attaques politiques contre Léon Blum l’assimilent à une femme, traité par la presse de « fifille », « mamzelle » et « grande coquette » (Horvilleur 2019). D’une manière plus générale, à la même période, « les antisémites, assimilant homosexualité et féminité, voulaient démontrer que les Juifs, dévirilisés, ne correspondaient pas au modèle de l’homme français ; de ce fait, ils étaient inaptes à tout destin national, et contribuaient à la ruine du pays » (Guedj 2007).

20Ces trois catégories honnies – féministes, juifs, homosexuels – et reliées entre elles dans les attaques malveillantes que subissent les porte-paroles médiatiques des associations rencontrées ont pour point commun d’interroger les normes et les catégories sociétales traditionnelles. La politique internationale et notamment le conflit israélo-palestinien, tout comme la politique intérieure et les controverses autour des migrants et de la figure de l’étranger alimentées par l’extrême droite viennent nourrir un ordre politique qui réactive une chaîne de stéréotypes discriminatoires par des catégories d’acteurs aux intérêts divergents, voire contradictoires.

21Une vision complotiste mondiale se développe volontiers. Des discours dénonçant les « lobbys juifs » dans les médias, à Hollywood et les cercles du pouvoir, franc-maçonniques, homosexuels et pédophiles émaillent les commentaires laissés sur les réseaux sociaux. Pour Flora Bolter, il s’agit de discours recyclés de « discours américains conservateurs, idéologiques se prétendant scientifiques, métabolisés par la fachosphère française, s’inspirant de Mark Regnerus ».

  • 6 Nous tenons ici à utiliser un pluriel pour rappeler la diversité des expressions racistes et de leu (...)

22Tout ce qui est cosmopolite est considéré, dans ces discours racistes, comme décadent. La Licra identifie l’expression de racismes d’exclusion6 qui prennent appui sur un sexisme de « pureté de la race ». Les femmes en particulier sont présentées comme des traîtresses à leur communauté si elles se marient en dehors de leurs origines ethniques. Ces expressions racistes et communautaristes peuvent émerger sans distinction dans toutes les communautés présentes en France, qui peuvent se sentir par ailleurs stigmatisées, dont un pourcentage, difficile à estimer, considère toute forme de mixité comme condamnable (Delanoë, Moro 2016 ; Memmi 2004 ; Khellil 2005) : « dans toutes les communautés se déploient des discours sexistes qui interdisent le mariage ou la mise en couple avec un homme qui ne serait pas de la même origine, culturelle et ethnique. Les femmes sont accusées sinon de détruire leur race », souligne la porte-parole de la Licra.

Le double discours des plateformes numériques et la faiblesse des moyens de leur régulation

23La régulation est attendue et demandée par nombre d’acteurs. Les pouvoirs publics français et européens s’y sont engagés, les Gafam réitèrent chaque année leurs promesses de mieux faire.

L’implication des plateformes numériques dans la diffusion des discours de haine est observée à l’échelle internationale

  • 7 Entendue comme discours ou acte haineux envers les personnes des personnes LGBT.

24Les failles de l’autorégulation des plateformes dont pâtissent les leaders des associations de défense des droits humains font l’objet d’un large consensus nourri par plusieurs rapports publics nationaux et internationaux. À titre d’exemple, l’Unesco s’inquiète de l’impact du harcèlement sur l’accroissement de la fracture numérique de genre, marquée par la baisse du pourcentage des filles investies dans des études et des carrières liées aux technologies numériques (West 2019). Amnesty international (2018) a dénoncé la faiblesse de la régulation effectuée par Twitter en s’appuyant sur plusieurs enquêtes qui décrivent la plateforme comme « toxique » et source de censure de la parole des femmes. Par ailleurs, deux enquêtes récentes montrent l’accroissement de l’antisémitisme en Europe et le rôle d’internet (FRA 2019) : 80 % des personnes juives considèrent que l’antisémitisme et le racisme augmentent dans leur pays.44 % des jeunes de 16-34 ans ont déclaré avoir été victimes de propos ou de gestes antisémites. La diffusion de l’antisémitisme sur internet et sur les médias sociaux constitue leur première inquiétude. Dans son rapport annuel pour 2018, SOS Homophobie s’alarme d’une augmentation des signalements pour homophobie7 (+ 66 %), Facebook et Twitter focalisaient 46 % des plaintes liées à internet.

La mise en avant de l’autorégulation des plateformes sous l’œil de la commission européenne

  • 8 La loi du 3 aout 2018 a créé une nouvelle infraction l’« outrage sexiste » renforçant la répression (...)
  • 9 Décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil 28 novembre 2008, sur la lutte contre certaines formes et ma (...)
  • 10 Voir le communiqué de presse « Lutte contre les discours de haine illégaux en ligne – le code de co (...)

25L’Union européenne préconise l’autorégulation des plateformes numériques depuis 2006 et l’a réitéré dans la directive sur les services médias audiovisuels en 2010 puis en 2018. Les plateformes bénéficient d’un régime de responsabilité limitée : elles doivent supprimer les contenus illégaux lorsqu’ils leur sont signalés. Ceux-ci étaient définis comme des contenus attentatoires gravement à la dignité humaine et longtemps limités aux contenus pédopornographiques, avant d’intégrer l’ensemble des contenus haineux. La publication de ces contenus est contraire au droit français8, mais en l’absence de consensus européen, voire avec les juridictions nord-américaines, obtenir leur retrait a souvent été difficile voire impossible. Depuis 2016, la Commission européenne a publié avec l’aide d’ONG quatre rapports sur la prise en compte de ses recommandations en matière de contenu haineux, sur la base d’un code de conduite élaboré avec Facebook, Microsoft, YouTube et Twitter, et d’une décision-cadre prise en 20089. En 2019, lors de son quatrième rapport, elle s’est félicitée de ce que le taux de suppression des messages signalés soit passé de 28 % en 2016, à 72 % en 2018, ce qui prouverait le bien-fondé de l’autorégulation comme méthode de gouvernance10.

  • 11 Avec la plateforme de signalement Pharos, rattachée à la police judiciaire. En 2018 La Licra a soum (...)

26La LICRA, seule association associée au monitoring de la commission européenne des plateformes pour la France11, souligne la limite de ce dispositif de contrôle. Il repose sur les signalements réalisés par des associations qui y collaborent officiellement : or les plateformes suppriment d’autant plus les contenus signalés qu’elles repèrent l’origine des signalements comme émanant d’elles. Il leur est donc difficile d’évaluer réellement l’efficacité des procédures de signalement réalisées par les particuliers.

27Les grandes plateformes (Twitter, YouTube, Facebook notamment) mettent également en avant des actions volontaires. Pour répondre aux critiques, elles modifient leurs « politiques » de contenu, textes dans lesquels elles déclarent interdire la publication de discours haineux. Elles financent des programmes d’observation des discours de haine et de diffusion de « contre-discours », options encouragées par la Commission. Les GAFAM (sauf Amazon) soutiennent ainsi l’ISD (Institut pour le Dialogue Stratégique)12 qui finance des chercheurs, des programmes d’éducation, des actions de sensibilisation. Dans ce cadre, Facebook a lancé le think tank l’OCCI (Online Civil Courage Initiative) qui publie des rapports sur la diffusion des thèses d’extrême droite, misogynes, racistes, antisémites en Europe. Le groupe soutient aussi financièrement les actions d’associations de lutte pour les droits humains, comme la LICRA. Cette subvention pourrait limiter leur indépendance, mais vient pallier la faiblesse des subventions publiques nationales dans ce secteur13.

Les discours de haine font partie de leur modèle économique

28Sur les plateformes numériques les cadres de la régulation peinent à jouer leur partition. Plusieurs caractéristiques du fonctionnement des réseaux sociaux ont en effet tendance à renforcer la présence des discours discriminatoires. La première est l’absence de modération a priori des contenus, ce qui constitue une forte économie par rapport à un média classique. Le nombre de personnes engagées directement ou non par les grandes plateformes pour une modération a posteriori reste très faible (Roberts 2014). Elle est souvent réalisée dans des pays où le coût du travail est bas et la compréhension des enjeux discriminatoires affaiblie par la différence de contexte culturel, ce qui pour le contrôle du racisme ou de l’antisémitisme est particulièrement problématique comme le soulignait la LICRA. Les associations (Amnesty International et SOS Homophobie dans les rapports mentionnés, la LICRA dans notre entretien) mettent en cause l’absence de transparence des plateformes sur le fonctionnement de leur modération, le nombre de plaintes reçues, les réponses qui y ont été apportées.

  • 14 Selon les termes de sa déclaration devant le Sénat américain le 25 juin 2019 https://www.commerce.s (...)
  • 15 Ce que met en exergue le titre de l’étude de l’Unesco, déjà citée, « I’d Blush if I Could », « je r (...)

29Le fonctionnement des plateformes accentue la visibilité des messages stéréotypés, surtout s’ils sont « choquants » et capables de susciter de l’indignation ou de l’amusement. Les informations fallacieuses circulent six fois plus rapidement sur Twitter que les informations vérifiées (Vosoughi et al. 2018), du fait de leurs caractéristiques émotionnelles. Or ces informations « fausses » relèvent pour une part des discours complotistes, qui font partie des « armes » des mouvements extrémistes, comportant une dimension xénophobe, misogyne et antisémite (Baldauf et al.). D’après Tristan Harris, ex ingénieur chez Google, « Une étude a montré que chaque terme d’outrage moral ajouté à un tweet augmentait le taux de retweets de 17 %. Autrement dit, la polarisation de nos sociétés fait partie du business model14. » Des observations identiques ont été faites pour YouTube, qui tire 70 % de son trafic des recommandations que son algorithme propose aux internautes. Celles-ci les poussent vers des vidéos de plus en plus trash, choquantes, conspirationnistes (Bergen 2019). Les algorithmes ont par ailleurs tendance à renforcer les biais discriminatoires, parce que les croisements statistiques figent les identités et que les algorithmes machine learning redoublent les discriminations présentes dans les données recueillies (Bertail et al. 2019, Cardon 2015). L’étude de l’Unesco (2018) montre que le fonctionnement des assistants vocaux (Siri, Cortana, Alexia) a eu lui-même tendance à renforcer et banaliser les stéréotypes et les insultes sexistes15.

Vers des mesures législatives plus fermes mais insuffisantes

  • 16 Un CSA qui serait mieux armé pour agir sur les plateformes numériques et fusionnerait avec la Hadop (...)

30Les pouvoirs publics envisagent des actions plus fermes. Des lois sanctionnant le non-retrait des propos haineux qui leur sont signalés sont déjà adoptées (en Australie, en Allemagne) ou en cours de discussion (en Grande-Bretagne et en France). L’introduction de la nouvelle directive sur les services médias audiovisuels à travers la future loi sur l’audiovisuel devrait donner davantage de compétences au CSA16 sur les plateformes numériques pour lutter contre les contenus haineux. Facebook s’est engagé auprès du secrétaire d’Etat au numérique en juin 2019 à donner les adresses IP des comptes qui seraient réclamés par la justice pour diffusion de propos haineux.

  • 17 Proposition de loi visant à lutter contre la haine sur Internet, n° 1785, 20 mars 2019.
  • 18 La mention en a été introduite par le Sénat et maintenue par la commission des lois de l’Assemblée (...)
  • 19 La Licra a publié un communiqué le 10 juillet 2019 se démarquant de cette position, soutenant au co (...)

31Mais les associations sont partagées. Elles redoutent un coup d’épée dans l’eau quand l’interdiction d’un contenu haineux consiste en fait à interdire l’accès aux pages répréhensibles sur les serveurs français, les laissant accessibles depuis les autres serveurs. Les désaccords se sont manifestés dès les premiers débats sur le projet de loi Laetitia Avia17 qui demande le retrait sous 24 heures des contenus haineux. La Licra souhaitait que la loi vise également les contenus négationnistes18, alors que la Commission nationale des droits de l’homme contestait les modalités retenues par la loi et regrettait, comme la Quadrature du net, la privatisation de la censure, les faibles moyens de l’éducation au numérique, les faibles obligations faites aux plateformes en la matière, et les risques que cette loi fait courir au final à la liberté d’expression19.

32Les moyens des associations dépendent de plus des compétences qu’elles réussissent à rassembler. Aujourd’hui elles se disent particulièrement démunies par rapport aux plateformes comme Snapchat ou WhatsApp qui fonctionnent comme des messageries privées ou des groupes fermés difficiles à infiltrer. Or, Facebook, pour répondre aux attaques dont il fait l’objet en matière de protection des données personnelles, envisage de limiter les publications ouvertes pour concentrer ses activités sur ses messageries privées qu’il souhaite rendre compatibles.

Conclusion

33En dépit de principes juridiques explicitement favorables aux droits des femmes et à la défense des minorités, la mise en œuvre des sanctions contre les propos sexistes, homophobes, racistes et antisémites diffusés sur le web demeure un champ de bataille. Une sanction particulière pour les attaques visant les responsables des associations de défense des droits humains devrait-elle être envisagée ?

34La violence et les prises à partie des représentants des associations luttant pour les droits humains s’avèrent en effet d’une intensité inquiétante. Force est de reconnaître qu’internet, par la possibilité d’anonymat qu’il offre aux internautes et les politiques laxistes des plateformes, facilite l’expression et la circulation de discours haineux. Ces derniers sont particulièrement virulents lorsque des porte-parole sont invités sur des plateaux de télévision, qui demeure le média le plus regardé et écouté. Penser la diversité, s’affranchir des règles hétéronormées, questionner les inégalités de genre, rejeter les ordres « naturels » parait transgressif pour certains internautes, voire inacceptable. Ils le perçoivent comme une remise en question de leur ethos. Peu soucieux de tomber sous le coup de la loi, pour des raisons plurielles et parfois contradictoires, ils n’hésitent pas à se déchaîner par écran interposé, du moins est-ce le sentiment partagé par les représentants des associations interrogés.

35En dépit du mentorat mis en place de façon informelle entre nouveaux porte-paroles et ceux qui ont acquis de l’expérience afin de les aider à faire face au cyberharcèlement, les prises à partie numériques, qui souvent s’apparentent à des cyberhumiliations, les affectent toutes et tous. Les messages haineux, qui incitent les internautes à s’en prendre physiquement à eux sont traumatisants. Comme le précise la représentante d’Osez le féminisme, des cauchemars liés aux appels aux viols qu’elle subit viennent troubler régulièrement son sommeil. Pendant ce temps, les dirigeants des plateformes ont mis en place des dispositifs qui sont encore loin d’être suffisants.

  • 20 Le sommet du 15 mai 2019 a réuni, à l’initiative d’Emmanuel Macron, une vingtaine de chefs d’Etat e (...)

36L’ensemble des personnes avec lesquelles nous nous sommes entretenues sont persuadées de la nécessité de leur action militante, ce qui ne les met pas à l’abri de la peur et du dégoût face à la multiplicité des invectives et des insultes qui leur sont adressées. Si les pouvoirs publics ont depuis quelques mois lancé des appels à davantage de régulation20, les comportements des internautes, tout comme les politiques de plateformes mériteraient d’être davantage questionnés.

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Bibliographie

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Notes

1 Merci aux Chiennes de Garde, Stop Homophobie, LGBT, la Licra, Osons le féminisme qui nous ont accordé chacune plus de deux heures d’entretien.

2 Terence Katchadourian, secrétaire général et porte-parole de l’association Stop Homophobie a été insulté et roué de coups le 30 avril 2019 par un voisin suite à la diffusion d’Envoyé spécial, émission dans laquelle il témoignait au sujet des agressions homophobes. Dans ce reportage, Lyès Alouane, délégué pour l’ile de France, était quant à lui frappé devant les caméras de France 2, à Gennevilliers.

3 www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F32239

4 L’été 2018, la porte-parole a été prise à partie dans la rue : « J’ai eu très peur cet été. Alain Soral et ses réseaux m’ont citée nommément, mis ma photo, et j’ai été interpellée deux fois dans la rue la même semaine, dont une fois juste à côté de chez moi. »

5 Térence Katchadourian, Stop homophobie.

6 Nous tenons ici à utiliser un pluriel pour rappeler la diversité des expressions racistes et de leurs cibles.

7 Entendue comme discours ou acte haineux envers les personnes des personnes LGBT.

8 La loi du 3 aout 2018 a créé une nouvelle infraction l’« outrage sexiste » renforçant la répression des violences verbales ou comportementales à caractère sexuel.

9 Décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil 28 novembre 2008, sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal.

10 Voir le communiqué de presse « Lutte contre les discours de haine illégaux en ligne – le code de conduite de l'UE permet de réagir rapidement », Bruxelles, le 4 février 2019.

11 Avec la plateforme de signalement Pharos, rattachée à la police judiciaire. En 2018 La Licra a soumis 111 cas aux plateformes dans le cadre de ce monitoring et Pharos qui reçoit pourtant 3500 signalements par semaine, seulement 31.

12 https://www.isdglobal.org/programmes/.

13 Les actions liées au numérique sont financées grâce à des appels à projet de la commission européenne.

14 Selon les termes de sa déclaration devant le Sénat américain le 25 juin 2019 https://www.commerce.senate.gov/public/index.cfm/2019/6/optimizing-for-engagement-understanding-the-use-of-persuasive-technology-on-internet-platforms.

15 Ce que met en exergue le titre de l’étude de l’Unesco, déjà citée, « I’d Blush if I Could », « je rougirais, si je pouvais », première réponse proposée aux questions insultantes posées à Siri, l’assistante vocale d’Apple par les utilisateurs.

16 Un CSA qui serait mieux armé pour agir sur les plateformes numériques et fusionnerait avec la Hadopi, sous le nom d’Arcom (interview de Franck Riester, par Caroline Sallé et Enguérand Renault, Le Figaro, 24 septembre 2019).

17 Proposition de loi visant à lutter contre la haine sur Internet, n° 1785, 20 mars 2019.

18 La mention en a été introduite par le Sénat et maintenue par la commission des lois de l’Assemblée nationale le 15 janvier 2020.

19 La Licra a publié un communiqué le 10 juillet 2019 se démarquant de cette position, soutenant au contraire la loi, https://www.Licra.org/la-haine-en-ligne-nest-pas-affaire-de-liberte-dexpression. Fin janvier 2020, la loi est encore en discussion à l’assemblée nationale.

20 Le sommet du 15 mai 2019 a réuni, à l’initiative d’Emmanuel Macron, une vingtaine de chefs d’Etat et de dirigeants du numérique, afin d’améliorer la rapidité de retrait a posteriori des messages et contenus haineux. Facebook s’est engagé à sanctionner les internautes qui relaient des contenus explicitement violents.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Laurence Corroy et Sophie Jehel, « Le numérique a-t-il enflammé les violences contre les défenseurs des droits humains ? »Revue française des sciences de l’information et de la communication [En ligne], 18 | 2019, mis en ligne le 01 décembre 2019, consulté le 17 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rfsic/8401 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/rfsic.8401

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Auteurs

Laurence Corroy

Laurence Corroy est maître de conférences habilitée à diriger des recherches à la Sorbonne Nouvelle, directrice de l’axe « Education, socialisation, âge de la vie » du laboratoire CERLIS. Elle est membre du Conseil scientifique de l’Education nationale (CSEN). Ses derniers ouvrages : Laurence Corroy, Education et médias, la créativité à l’ère du numérique, Londres, Iste ed. 2016. Laurence Corroy, Émilie Roche & Emmanuelle Savignac (dir.), Éducation aux médias et pratiques pédagogiques innovantes, enjeux interculturels, Paris, Publibook universités, 2017, 220 p. Avec Philippe Ricaud, Utopies et médias de masse, Londres, Iste ed., 2019. Courriel : laurence.labardens-corroy(at)sorbonne-nouvelle.fr

Articles du même auteur

Sophie Jehel

Sophie Jehel est maîtresse de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université Paris 8, chercheure au CEMTI, chercheure associée au CARISM. Ses derniers ouvrages : Codirection avec Angélique Gozlan, Les adolescents face aux images trash sur internet, Paris, In Press, 2019. Codirection avec Laurence Corroy, Stéréotypes, discriminations et éducation aux médias, Paris, L’Harmattan, 2016. Codirection avec Alexandra Saemmer, Education critique aux médias et à l’information en contexte numérique, Lyon, Les Presses de l’ENSSIB, à paraître 2020. Courriel : sophie.jehel(at)univ-paris8.fr.

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